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Collection: GA328 OEUVRES COMPLETES DE RUDOLF STEINER – CONFÉRENCES SUR LA VIE SOCIALE ET LA TRIARTICULATION DE L'ORGANISME SOCIAL - La question sociale
Troisième conférence,
Zurich, 10 février 1919
Exaltation d'esprit et conception réaliste de la vie dans le penser et le vouloir sociaux.
DRITTER VORTRAG,
Zürich, 10. Februar 1919
Schwarmgeisterei und reale Lebensauffassung im sozialen Denken und Wollen.

 

 

Les références Rudolf Steiner Oeuvres complètes GA328 047-072 (1977) 10/02/1919

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Original

Traduit de l'allemand par Geneviève Bideau Editeur: Revue TRIADES

Au cours des conférences de la semaine précédente, j'ai déjà attiré l'attention sur le fait que la situation sociale rencontre, en ce qui concerne son évolution, des obstacles et connaît des difficultés dus à ce qu'une entente entre les différentes classes de l'humanité d'aujourd'hui appartient encore à un avenir relativement éloigné. La classe dirigeante de la société, qui a connu son essor dans les derniers siècles, les dernières décennies jusqu'à l'époque présente, a certaines habitudes de pensée, certaines impulsions intérieures à partir desquelles elle ressent, pense et veut. Et on aimerait dire : il y a un abîme entre ces habitudes de pensée et ce qui, de la manière dont je l'ai caractérisé la semaine dernière, s'est développé sous la forme toute spécifique présente dans les habitudes de pensée du prolétariat moderne au sein duquel se trouve pourtant à proprement parler l'origine de ce que l'on appelle aujourd'hui la question sociale.


Il apparaît à celui qui s'efforce de pénétrer dans la vie réelle, dans les forces qui sont en jeu dans les rapports sociaux des êtres humains entre eux, beaucoup plus important d'observer ces impulsions pour ainsi dire sous-jacentes à la conscience des hommes, en dessous de ce sur quoi portent les discussions conscientes, que ce qui se manifeste précisément dans cette conscience elle-même. Dans les cercles de la bourgeoisie qui réfléchissent sur ces choses, on peut entendre à ce sujet toutes sortes de points de vue. On peut aussi apprendre les façons de voir des personnalités actives dans le prolétariat ou des dirigeants de ce prolétariat ; ce sera en observant moins ces conceptions que ce qui se trouve pour ainsi dire à l'arrière-plan que l'on pourra se forger une vision de la vie qui soit réelle et se former un jugement au sujet de la réalité sociale du présent. Et il y a là en fait beaucoup plus de psychologie sociale, de connaissance de l'âme dans sa dimension sociale qu'on ne le croit des deux côtés.

Celui qui — je puis bien le dire de moi-même, puisque je tente ici d'exposer ces choses — s'est efforcé comme moi de se familiariser avec tous les milieux, aussi bien avec les habitudes de pensée des cercles dirigeants de la bourgeoisie, d'un côté, qu'avec les impulsions vivant dans les âmes du prolétariat en quête d'ascension sociale, sait combien entre eux le fossé est profond et l'entente difficile ; et cette non-compréhension est tout simplement un fait de l'histoire universelle, est elle-même un fait social du présent. En effet, nous voyons maintenant de nouveau les événements de Paris et de Berne '. Lorsqu'on a pour ces choses une oreille attentive, on va dire : on parle dans les deux endroits une langue tout à fait différente. On y parle une langue si différente qu'on pourrait tout d'abord désespérer que ce qui est dit dans l'un des deux puisse être aussi ressenti le moins du monde dans l'autre, et réciproquement. C'est pourquoi il est également si difficile de nos jours, aussi bien dans les cercles bourgeois que dans les cercles du prolétariat, de considérer les choses qui importent parce qu'elles sont en fait dans la question sociale les forces véritablement motrices. Car dans ce qui se passe historiquement tout n'est pas d'importance égale, mais parmi les événements historiques il y en a qui sont des signes clairs de ce qui constitue en fait les forces agissantes, les forces véritablement agissantes. D'autres phénomènes qu'un observateur super- ficiel tiendrait peut-être pour tout aussi importants n'entrent absolument pas en ligne de compte pour ce qui est la véritable réalité.


A celui qui a été en mesure de suivre objectivement le processus de formation du mouvement prolétarien au cours des deniers siècles s'imposera, parmi bien d'autres de ces faits significatifs, le fait suivant le prolétariat moderne, qui a reçu ce qui constitue ses impulsions sous une forme que l'on aimerait appeler scientifique, a su exprimer à partir de ses conceptions que ce qui l'a placé dans la situation actuelle doit nécessairement s'effacer, que l'organisation sociale et économique instaurée par les anciennes classes sociales doit peu à peu disparaître et que quelque chose d'autre doit prendre sa place.

 

 

Il y a là un fait qui a trouvé bien des railleurs. Nous ne nous rangerons cependant pas parmi eux, mais il faut souligner ce que cette affaire a de grave au regard de l'histoire. Lorsqu'on s'est précisément expliqué avec des représentants lucides de la conception prolétarienne moderne de la vie — on l'a peut-être fait plus particulièrement dans les premières années où on a rencontré ce mouvement que plus tard où on en avait davantage pris son parti, où néanmoins on soulevait à peu près cette question : quelle forme de société, de la vie humaine en commun et de l'agir humain, quelle forme de l'organisme social considère-t-on en fait dans cette conception de la vie comme ce qui doit venir, comme ce qui doit être instauré ? — on recevait alors toujours cette réponse, tout à fait conséquente par rapport à cette conception de la vie : pour l'instant, nous n'en sommes pas encore là. Pour nous, il s'agit avant tout de faire disparaître l'organisation sociale actuelle, de l'amener à aller d'elle-même à l'absurde. On verra ensuite ce qui la remplacera. — Il s'agissait toujours pour ces gens de défendre le point de vue que le prolétariat moderne devait s'emparer des positions-clés du pouvoir. Quand il y sera parvenu, après avoir vaincu la classe qui l'a précédé, il trouvera, quand il aura le pouvoir en mains, ce à quoi il n'a pour l'instant pas besoin de réfléchir.

 

 


La réponse avait valeur de programme. Mais ce n'est pas réellement pensé de façon adéquate. C'est un slogan de propagande, mais ce n'est pas pensé en rapport avec la réalité. Est au contraire en rapport avec la réalité pour celui qui a le sens des forces d'évolution de l'histoire cette question : mais alors, que signifie donc au juste dans l'évolution de l'humanité jusqu'à l'époque présente cette vision prolétarienne moderne du monde ? — Et alors, comme les conceptions entrent elles-mêmes, ainsi que je l'ai déjà mentionné, beaucoup moins en ligne de compte, on est sans cesse détourné de ce que les gens disent et amené à considérer ce qu'ils ressentent, ce qu'ils éprouvent au sujet de leur propre vie, ce qu'ils pensent à propos des autres classes de la société humaine. Bref, on est détourné de la question du prolétariat et amené à étudier le statut de vie du prolétariat lui- même. Ce n'est pas la vie qui, pour ainsi dire, s'exprime elle-même, mais il en sort la forme d'existence particulière d'une classe d'êtres humains qui, par la façon dont elle existe, dit de quoi il s'agit. Et la réponse que donne donc la réalité, que donne le prolétariat réellement vivant tel qu'il est aujourd'hui, cette réponse, on pourrait la formuler ainsi. On pourrait dire : ce prolétariat moderne, avec ses possibilités et ses conditions de vie, avec la façon dont il est inséré dans l'organisation moderne de la société et dont il se ressent lui-même en elle, ce prolétariat moderne se ressent, s'éprouve comme la critique de cette organisation économique moderne issue de la technique et du capitalisme.


Il est à mon avis extrêmement intéressant que l'on ait, si l'on a le sens de ce qu'est une conception adéquate à la réalité, pour ainsi dire dans le prolétariat lui-même la réponse, dans ce qui est là et non dans une théorie, non dans une explication théorique quelconque, mais dans le prolétariat lui-même. Il est une critique. Que ce prolétariat soit devenu tel, cela forme pour ainsi dire la critique de l'organisation économique moderne qui s'est constituée en dehors de ce prolétariat et le prenant à sa solde.

 

C'est parce qu'il en est ainsi qu'a particulièrement réussi à s'introduire dans l'âme de ce prolétariat moderne une doctrine en soi abstraite, marchant pour ainsi dire avec des échasses scientifiques, mais une doctrine qui est justement tout imprégnée de l'impulsion qui est présente dans le prolétariat moderne — c'est sa véritable impulsion de vie : la doctrine du marxisme, la doctrine de Karl Marx. C'est un exemple unique dans l'histoire spirituelle de l'humanité qu'une classe d'êtres humains encore neuve, une classe d'êtres humains à l'intellectualité encore neuve, pas encore décadente, avec un cœur aussi plein, une âme aussi ouverte, ait adopté une théorie scientifique, ainsi que le prolétariat moderne l'a fait pour la doctrine marxiste.

 

 

Il faut sous ce rapport avoir étudié les choses sur le vif. Il faut avoir vu comment même les connaissances les plus difficiles, considérées comme difficiles par les autres classes ont trouvé l'accès de cette âme prolétarienne au ressentir doué d'une force élémentaire, comment le prolétariat est tombé, par millions, sous l'emprise d'une doctrine qui semblait théorique. Mais qu'est-ce qui vit dans cette doctrine théorique ? Il est de nouveau singulier que ne vit pas en elle ce que l'on appelle communément un idéal social. Ce qui vit en elle ne contient pas la moindre formulation de la forme que doit prendre un Etat futur ou une structure sociale future, non, ce qui vit en elle est pour l'essentiel une critique de l'organisation moderne de la société et de l'économie bourgeoises ; dans cet ouvrage marxiste, il y a pour ainsi dire cet instinct : si je dirige l'attention du prolétariat sur ce qui est la critique de l'organisation de l'économie capitaliste moderne fondée sur la technique, je le renvoie à ses propres forces de vie, je l'amène à sa propre réalité. En un certain sens, l'image-reflet de la vie prolétarienne concrète s'exprime précisément dans la doctrine marxiste. Et ceux qui croient que la doctrine marxiste n'est plus actuelle pour le prolétariat ne comprennent pas d'une part que des formulations extérieures, certaines conceptions et certaines pensées peuvent être depuis longtemps dépassées, mais que l'élan spécifique, l'impulsion spécifique qui y vit subsiste et que d'autre part c'est peut-être justement dans les conceptions opposées auxquelles on est parvenu à partir du marxisme, dans toutes sortes de tentatives révisionnistes que vivent à un stade ultérieur d'évolution des impulsions qui ont pénétré par le marxisme dans l'âme du prolétariat moderne.

 

 

Je voulais seulement caractériser par là un fait social du temps présent qui me semble plus important que les discussions simplistes auxquelles on se livre fréquemment, car ce fait renvoie pour ainsi dire à la psychologie sociale. Et même s'il ne donne pas directement de réponse — nous verrons encore au cours de ces conférences quelle réponse il faut donner —, il renvoie aux questions qui se posent actuellement à partir de points de vue qui sont probablement les seuls à entrer en ligne de compte pour la vie réelle du présent. Et quel sentiment éprouve-t-on lorsqu'on se place sans préventions et sans préjugés en face de ce fait ? On éprouve ce sentiment : la vie moderne est, très généralement, caractérisée par un trait particulier. Cette vie moderne — comme je l'ai déjà fréquemment souligné dans les conférences que j'ai faites ici à Zurich — a acquis des habitudes, des formes de pensée qui s'avèrent extraordinairement fécondes pour une orientation bien particulière de la science de la nature. Ce penser moderne a ensuite voulu également tenter de comprendre et de réformer en les comprenant, de comprendre en les réformant, la vie sociale moderne, les phénomènes et les impulsions de la vie sociale. Mais lorsqu'on observe ces tentatives, on a à chaque fois ce sentiment : les hommes du temps présent qui sont précisément pris dans les formes et les habitudes de pensée du temps présent n'ont pas les concepts qui puissent réellement appréhender les phénomènes compliqués de la vie sociale. D'une certaine façon, les concepts ont les mailles trop fines. Ils ne peuvent pas prendre en eux — comprendre — les phénomènes complexes de la vie sociale elle-même. Ils restent abstraits, ils ne sont faits que de contours, mais ne pénètrent pas dans la vie réelle elle- même qui se déroule dans le corps social. On aimerait dire ceci : cette humanité moderne se caractérise par un penser à mailles trop fines. Et ce penser à mailles fines, ce penser dont les mailles lâchent de tous côtés lorsqu'on veut plonger dans la vie réelle, ce penser, il est aussi passé dans la quête du prolétariat moderne. Et c'est ainsi que ce penser est suffisant pour la critique, mais n'est pas suffisant pour faire naître à partir de l'expérience de l'âme humaine de véritables impulsions qui pourraient constituer des forces orientant, menant vers l'avenir. Partout où il aspire à de telles impulsions, ce penser lâche.

On a caractérisé par là une réalité qui va très profond dans toute la vie du temps présent. Celui qui est capable de comprendre avec tout le sérieux requis ce qui est nécessaire à cette vie du temps présent doit y porter son attention à partir du point de vue évoqué ici, justement maintenant en cet instant historique où on a réellement bien peu de temps pour des discussions purement théoriques parce que les faits sont pressants et brûlants. C'est précisément maintenant, en cet instant, que l'on voit les hommes placés devant ces faits pressants et brûlants et faisant partout preuve de ce penser qui ne peut pas pénétrer dans la réalité. Les hommes sont souvent pétris de bonne volonté, mais non pas d'un penser à la mesure des faits. A celui qui est capable de saisir la gravité de la situation du temps se montre, précisément en cet instant historique, le surgissement — il se montre fréquemment masqué sous toutes sortes d'autres formes, sans que l'être humain en ait la moindre conscience — de ce penchant des hommes qui devient particulièrement néfaste à une conduite de vie véritablement sérieuse lorsque se posent des question brûlantes et pressantes : le surgissement d'une certaine forme d'exaltation d'esprit, comme j'aimerais la qualifier. Cette exaltation d'esprit, qui se montre sous les masques les plus divers dans les domaines les plus divers, c'est elle qui nous rend si difficile de trouver le chemin d'un agir objectif dans l'époque présente. Et cette exaltation d'esprit, elle est le résultat de l'évolution historique que j'ai indiquée dans les conférences de la semaine dernière et qui a commencé à peu près au tournant des )(ive, xve, xvIe siècles.

 

 

En quoi consiste l'essentiel de cette exaltation d'esprit ? L'essentiel est précisément qu'en raison d'une certaine conception de vie irréelle, en raison d'une conception de vie qui est dépourvue de ce que j'ai nommé la semaine dernière la force d'impulsion de l'expérience intérieure, une vie intérieure de l'âme, de la pensée, une vie recherchant la connaissance de manière scientifique cherche pour ainsi dire une île ou constamment tout un archipel d'îles et ne veut pas jeter de pont vers la vie quotidienne. Nous voyons actuellement beaucoup d'hommes trouver pour ainsi dire que c'est une marque de distinction intérieure — si je peux me permettre l'expression — de réfléchir d'une certaine façon abstraite, peut-être même pédante, sur toutes sortes de problèmes éthico-religieux en se perdant dans les nuages. Nous voyons les hommes réfléchir à la façon dont l'être humain peut acquérir des vertus, dont il doit adopter à l'égard de son prochain une conduite pleine d'amour, dont il peut recevoir la grâce. On développe des concepts de rédemption, de grâce etc., que certains représentants de ces conceptions de vie veulent garder le plus possible dans des hauteurs de l'âme et de l'esprit. Mais en même temps nous constatons aussi l'incapacité de jeter le pont véritable depuis ce que les gens nomment bon et plein d'amour et bienveillant et juste et moral jusqu'à ce qui nous entoure dans la réalité extérieure quotidienne sous la forme du capital, de la rétribution du travail, de la consommation, de la production en rapport avec la circulation des marchandises, sous la forme du crédit, de la banque et de la bourse. Nous voyons deux courants universels ne jamais se rencontrer dans les habitudes de pensée des êtres humains : un courant universel qui veut demeurer pour ainsi dire à une hauteur spirituelle divine, qui ne veut pas jeter de pont entre ce qui est commandement religieux et ce qui est un usage habituel dans le commerce. Mais la vie est une. La vie ne peut être florissante que si les forces qui l'impulsent descendent des hauteurs de la vie éthique et religieuse jusque dans la vie la plus quotidienne, la plus profane, dans cette vie qui, précisément, paraît moins distinguée. Car si nous négligeons de jeter ce pont, si nous tombons, en ce qui concerne la vie religieuse et morale, dans une pure exaltation d'esprit éloignée de la réalité vraie et quotidienne, alors cette réalité vraie et quotidienne se venge. Alors l'être humain aspire, par une certaine impulsion religieuse, à toutes sortes d'idéaux, à toutes sortes de choses qu'il nomme « bonnes », mais l'être humain est confronté, sans pouvoir et dénué de sentiment, aux instincts qui, en tant que besoins communs et quotidiens, sont face aux satisfactions qui doivent provenir de l'économie. Il ne sait pas jeter de pont entre le concept de la grâce divine et ce qui se passe dans la vie quotidienne. Alors cette vie quotidienne se venge. Alors cette vie quotidienne prend une forme qui ne veut rien avoir à faire avec ces impulsions éthiques que l'on veut garder dans des hauteurs distinguées de l'âme et de l'esprit. Mais cette vengeance prend alors la forme suivante : comme la vie éthique et religieuse se tient à l'écart de la vie pratique concrète quotidienne, elle devient en fait, sans qu'on le remarque, parce que la chose apparaît dans la vie sous un masque, un mensonge existentiel en l'être humain.

 

Nous voyons comment se comportent en bien des circonstances les êtres humains qui, à partir — comme ils le croient — d'une certaine distinction éthique et religieuse, témoignent, en ce qui concerne une forme correcte de vie en société avec leurs contemporains, de la meilleure volonté du monde de ne faire à leur prochain que le plus grand bien possible, mais qui négligent entièrement de le faire en réalité, parce qu'ils ne cherchent pas à avoir une vie de sentiment sociale et qui soit en plein dans les habitudes pratiques de la vie.

Et ainsi, en cet instant historique — si je puis encore une fois employer cette expression — où les questions sociales nous pressent de façon aussi visible, aussi sensible, nous constatons que surgissent de tous côtés les esprits exaltés qui se prennent souvent pour de très grands praticiens de la vie qui vous disent : il est nécessaire que les êtres humains reviennent du matérialisme, de la vie matérielle extérieure qui nous a poussés dans la catastrophe et dans le malheur à une certaine forme de spiritualité, à une conception spirituelle de la vie — et on ne se lasse pas de citer ou de mentionner les personnalités qui dans le passé — en règle générale il faut que ce soit dans le passé, on rend moins justice au présent — se sont prononcées en faveur d'une certaine façon de vivre idéale, d'une certaine spiritualité. Bien plus, on fait l'expérience que, lorsque quelqu'un tente de faire allusion à ce qui est aujourd'hui aussi nécessaire pour la vie pratique que le pain quotidien, on lui fait remarquer qu'il importe en tout premier lieu de ramener les hommes à l'esprit. Il y a dans cette exhortation une énorme part de ce qui a précisément conduit les humains à la catastrophe actuelle, il y a là-dedans l'exaltation d'esprit qui se présente aujourd'hui sous les masques les plus divers et qui agit dans les faits. Certes, c'est d'un côté de l'exaltation d'esprit lorsque quelqu'un, sans connaître les conditions extérieures pratiques de la vie, pose des idéaux sociaux quelconques que l'on appelle des utopies où il montre, dans un système soigneusement mis au point et schématisé, comment les êtres humains devraient vivre pour être heureux ou contents ou dans tout autre état. Au fond, même quand de telles utopies sont pleines d'intelligence, ce n'est pas l'intelligence qui importe, ce n'est pas non plus la bonne volonté qui importe ; ce qui importe, c'est leur rapport avec la pratique de la vie. Il n'importe pas aujourd'hui d'inciter les êtres humains à retourner à l'esprit, mais il importe qu'il y ait de l'esprit dans la façon dont on pense de nos jours au sujet de l'organisme social. Ce qui importe, c'est la manière, c'est le « comment » du penser. On peut bien, à mon sens, ne pas parler du tout d'esprit, pourvu qu'il y ait de l'esprit dans la façon dont on parle de la pratique de la vie. On rendra alors à l'époque présente un service beaucoup plus grand que si par exaltation d'esprit on incite toutes les trois phrases les êtres humains à revenir à l'esprit, car ceux auxquels on parle ainsi ne peuvent habituellement rien se représenter sous ce terme d'esprit, précisément parce que ceux qui parlent ainsi ne se représentent non plus rien de bien précis sous ce terme. Mais les utopies elles-mêmes qui sont présentées — et aujourd'hui encore elles ne sont même pas en si petit nombre que cela —, les idéaux sociaux finement pensés, ne sont pas même le pire, car en règle générale on ne fait pas grand cas de ces choses. On s'aperçoit rapidement que ces choses ne sont pas pratiques, qu'elles ne sont pas pensées à partir des véritables conditions de la vie. Dans la réalité actuelle de la vie, il y a bien pire : ce sont les formes masquées d'exaltation d'esprit, qui proviennent d'une prétendue pratique de la vie, mais qui ne comportent en réalité pas cette pratique de la vie, qui vivent en fait dans des abstractions sans consistance. Ces esprits exaltés, nous les avons vus — il faut toujours dans ce genre de choses dire carrément ce que l'on a sur le cœur — n'avoir que trop d'importance dans les événements de l'époque présente. Et ils sont difficiles à déceler. Ils sont difficiles à déceler parce que l'on n'a précisément pas aiguisé son regard dans ces domaines.

 

 

Lorsqu'aujourd'hui, à propos d'un être humain qui a précisément de la façon la plus essentielle cette particularité d'être un esprit exalté — il n'est du reste pas question de rien dire contre bien d'autres qualités de ces esprits exaltés, ce sont peut-être par ailleurs de braves gens, il se peut qu'ils remplissent leurs obligations dans leur domaine, qu'ils soient même des personnes remarquables —, mais, lorsqu'à propos de bien des personnalités on souligne que ce sont des esprits exaltés, les gens sont de nos jours très étonnés, parce qu'ils ont à ce sujet, croient-ils, des jugements qui leur semblent évidents, alors qu'en réalité ces jugements évidents ne sont rien d'autre qu'une épouvantable superstition. J'ai, par exemple, au cours des dernières années, étudié beaucoup de ces « praticiens de la vie » — je le dis maintenant entre guillemets — sous l'aspect de l'exaltation d'esprit. Sous ce rapport, l'humanité, si elle veut parvenir jusqu'à une connaissance véritable, devra faire l'expérience de plus d'un paradoxe intérieur. On sera par exemple étonné que je présente Ludendorff2 comme un esprit au plus haut point exalté. Le jugement de ses partisans et de ses adversaires va dans une tout autre direction. Le trait le plus essentiel de sa personnalité est qu'à l'exception du domaine où il avait, de par sa formation, de grandes capacités, la stratégie, c'était, dans tout autre domaine du penser, un esprit au plus haut point abstrait, un homme totalement étranger à la vie, qui se faisait sur les choses des idées exaltées qui n'avaient rien à faire avec la réalité et qui a causé d'indicibles désastres par le fait qu'il a voulu faire passer dans la réalité ses idées d'esprit exalté. Et l'on pourrait de même présenter comme les représentants typiques de l'exaltation d'esprit bien des personnalités qui causent des désastres infinis parce qu'on les tient pour des gens qui ont de l'esprit pratique dans la vie.


Dans les années quatre-vingt-dix du dix-neuvième siècle, cette exaltation d'esprit apparut sous la forme d'une véritable épidémie venue d'Amérique qui submergea l'Europe, prenant la forme de ce que l'on appela alors « Société pour la culture éthique ». On tenta de propager comme culture éthique quelque chose qui était étranger à la vie, qui était censé n'émaner que de cette façon abstraite et distinguée de ressentir certaines impulsions éthiques. Et lorsque quelqu'un montra, comme je dus le faire alors, qu'avec de telles choses on vit précisément dans l'exaltation, qu'avec de telles choses on enferme, on limite justement le penser humain, si bien qu'il ne peut plus plonger dans la véritable réalité, alors on était ou bien pas compris, ou bien mal compris ou l'objet de sarcasmes.

Il faut justement qu'à cette exaltation d'esprit s'oppose le penser conforme à la réalité qui découle, à mon avis, de la conception du monde défendue ici depuis bien des années et qui est véritablement une science de l'esprit. Quel est l'essentiel de cette conception du monde qui est une science de l'esprit ? L'essentiel est qu'elle ne parle pas, à partir de la vision de la réalité extérieure des sens, de l'esprit comme d'une simple image-reflet, mais qu'elle parle de l'esprit à partir d'une véritable expérience suprasensible d'un monde qui est tout aussi réel que le monde que l'on voit de ses yeux, que l'on entend de ses oreilles et que l'on touche de ses mains. Ce que l'on dit dans le détail au sujet de ce monde spirituel réel importe peu ; ce qui importe bien plus, c'est qu'à travers tout ce que l'on reçoit comme connaissance par cette connaissance spirituelle du monde, on acquière une disposition intérieure de l'âme, un état intérieur de la vie par lequel l'être humain sache qu'il vit en tant qu'être psycho-spirituel dans un monde spirituel réel. Peu importe ce que l'on dit de ce monde spirituel ; ce qui importe, c'est la façon dont on sent que l'on vit à l'intérieur de ce monde spirituel. Il peut paraître beau de croire à telle ou telle réalité spirituelle. Mais cela peut tout aussi bien conduire à l'exaltation d'esprit qu'à une volonté bonne d'une certaine façon. Ce qui importe, c'est de ressentir ceci : tandis que l'on pense, tandis que l'on éprouve des sentiments, l'esprit à la vie agissante est présent dans les éclairs de pensées qui sillonnent votre âme propre, dans les sentiments qui traversent votre âme propre.


Cet esprit est présent en nous dans son agir vivant. Il est là, de la même façon que les choses sont au-dehors dans l'espace et que les processus sont au-dehors dans le temps. Et lorsque ce n'est pas la pensée, mais la vie qui vous amène à cette attitude à l'égard de la connaissance de l'esprit, alors jaillit de cette connaissance de l'esprit une impulsion intérieure qui vous incite à éprouver l'esprit dans sa réalité et à le réaliser de tout autre façon que ce n'est possible par ce qui n'est qu'un simple reflet d'idées, de concepts qui traitent de quelque chose de spirituel. Il est très différent de dire : je pense au sujet de l'esprit, je crois à l'esprit —, ou de dire : l'esprit pense en moi, l'esprit éprouve en moi. — Le concept habituel de foi perd même au fond son sens face à cette expérience intérieure. Il faut que cette expérience de l'esprit insuffle une certaine force psycho-spirituelle dans l'évolution de l'humanité. Et cette force psycho-spirituelle qui doit être insufflée dans l'évolution de l'humanité a une importance sociale plus grande qu'on ne peut le penser, car c'est le remède à l'idéologie paralysante que j'ai caractérisée ici la semaine dernière (4), à cet oppressant héritage que le prolétariat a reçu de la bourgeoisie.

 

 

Voilà ce qui vit en vérité sous la forme première et vraie de la question sociale lorsqu'on sait pénétrer jusque dans les profondeurs de cette question : l'évolution de la vie moderne de l'esprit a subi peu à peu au tournant des temps modernes ou depuis ce tournant des temps modernes au mye siècle un tel obscurcissement, un tel affaiblissement, une telle paralysie progressive que les êtres humains ne savaient plus qu'en eux l'esprit vit en tant que réalité vivante; non, ils croyaient qu'en eux ne vivent que des idées, des reflets d'une réalité quelconque. Dans la vision du monde et de la vie du prolétariat moderne, cela a conduit à ce que ce prolétariat dise : dans le domaine spirituel il n'y a que de l'idéologie. La réalité n'est que dans le processus économique, dans la lutte des classes ; c'est là que se joue la réalité. — Mais une sorte de vapeur — pour ainsi dire — s'en élève d'une certaine façon dans les âmes des hommes ; cela se manifeste sous la forme d'images qui agissent dans la science, dans la morale, dans la religion, dans l'art. Cela constitue la superstructure de l'infra- structure, qui est la seule réalité véritable. Et même si l'on ne peut pas faire autrement en sociologie que de reconnaître que l'idéologie qui vit dans cette superstructure a en retour une action réelle sur la vie économique, cela reste quand même de l'idéologie. Il n'y a pas de remède pour sortir de cette idéologie si l'on ne veut pas recourir à la véritable expérience de l'esprit telle que la science de l'esprit veut l'introduire dans l'humanité moderne. On ne pourra guérir des dom- mages causés par l'idéologie qu'en se plongeant dans l'esprit véritable et ses manifestations, en se plongeant dans la réalité qu'est le monde suprasensible. Ce qui a eu l'effet que pour le prolétariat moderne toute vie spirituelle dans laquelle la civilisation fait entrer l'être humain semble être une pure idéologie, cela laisse l'âme insatisfaite et vide, parce que l'idéologie n'est pas quelque chose qui puisse remplir l'âme d'un certain élan, d'une certaine force dynamique, d'une certaine conscience — ce qu'elle est en fait en un sens supérieur. C'est de ce vide de l'âme qu'est née la tonalité désespérante de la vision du monde prolétarienne qui constitue une partie, un membre de la véritable question sociale. Et tant qu'on ne verra pas qu'il faut guérir la tendance de l'être humain à voir en la vie de l'esprit une idéologie, on ne pourra pas apporter à l'âme du prolétaire moderne d'impulsions positives, l'âme du prolétaire moderne en restera à une simple critique de l'organisation économique et de la vision du monde technico- capitaliste qui s'est progressivement imposée.

 


Mais on n'y parviendra pas si l'on n'a pas la volonté d'entrer dans une conception de la vie véritablement pratique, une conception de la vie qui ne consiste pas en théories, même pas en simples théories religieuses, mais qui veut vivre, qui veut créer réellement de la vie, qui veut elle-même faire naître des impulsions de vie. Bien des choses sont pour cela nécessaires, devant lesquelles l'homme d'aujourd'hui recule d'effroi parce qu'il s'agit de quelque chose de tout à fait radical. Mais ce dont il s'agit là est bien moins radical que ce dont les hommes feront l'expérience et qui surgira de la vie qui se déchaînera dans les instincts propres aux temps modernes, si les hommes aiment trop leur confort pour se tourner vers ce qui est nécessaire.

Ce que je viens de développer ici d'un certain point de vue se rapporte à l'un des membres de l'organisme social qui doit naître des conditions de vie de l'humanité moderne, l'un des trois membres tels que j'en ai donné ici une esquisse mercredi dernier 4. J'ai exposé alors qu'en un certain sens le malheur de l'humanité moderne, même si on ne le décèle pas — or on ne le décèle pas —, consiste en ce que l'on a fait et que l'on veut continuer à faire de ce qui doit avoir trois membres, et dont les trois membres doivent agir de façon vivante les uns sur les autres dans une certaine autonomie, un organisme dont les forces agissent de façon confuse et chaotique.

 


Je fais remarquer pour ainsi dire encore une fois entre parenthèses et seulement pour ne pas être mal compris qu'il ne s'agit véritablement pas pour moi de défendre un quelconque renversement violent de la situation qui devrait se produire du jour au lendemain. Ce que j'indique doit être une ligne directrice, un certain courant d'après lequel doit s'orienter chacune des questions particulières qui peuvent se poser à l'être humain dans l'Etat, dans la vie de l'esprit, dans la vie économique. Il n'est nullement besoin de croire aussitôt, comme bien des gens auxquels j'ai exposé tout cela, que l'on doit dès demain matin transformer ce que l'on appelle l'Etat en autre chose. Il suffit d'avoir la volonté de réaliser le « changez votre esprit ! » chrétien en ce qui concerne tout cela, c'est-à-dire, lorsqu'on doit intervenir, d'orienter, dans une certaine direction, sous le rapport de la forme à leur donner, les détails, les mesures particulières que l'on a à prendre.


Et ainsi j'ai exposé que ce que l'on veut aujourd'hui agglutiner en un Etat unitaire, de la même façon que si l'on voulait agglutiner ensemble les diverses parties de l'organisme humain — on en ferait alors un homunculus — si bien que ses trois systèmes seraient centralisés dans la confusion, que ce que l'on veut aujourd'hui centraliser ainsi, dont on veut faire l'ensemble de l'activité de l'Etat tout entier doit se dissocier de façon vivante en trois membres si l'on veut que se développe un organisme social sain. Il faut que se développe en tant que membre autonome de cet organisme social tout ce qui est culture de l'esprit, que se développe en tant qu'organisme autonome tout ce que l'on appelle aujourd'hui la vie politique au sens strict, qui ne doit pas être liée à la vie de l'esprit par la centralisation, mais par une interaction vivante, et il faut que se développe en tant que troisième membre autonome l'organisme économique. L'organisme spirituel, l'organisme étatique, l'organisme économique, c'est ce dont on peut dire dans les dix à vingt prochaines années, c'est à cette dissociation qu'aspirent les forces d'évolution des hommes. Et celui qui s'oppose à cette évolution s'oppose à ce qui constitue les possibilités de vie de l'humanité moderne.


J'ai traité le premier point du point de vue que j'ai exposé aujourd'hui, tout d'abord : la vie de ce que l'on nomme culture de l'esprit, comprenant tout ce que l'on peut nommer instruction et éducation, vie religieuse, comprenant tout ce qui est vie artistique, littéraire, mais comprenant aussi tout ce qui concerne le droit privé et pénal. Je vais caractériser ces choses de plus près encore. Tout ce qui est inclus dans cette vie de la culture spirituelle doit reposer sur un fondement commun, mais autonome par rapport aux fondements du reste de l'organisme social. Cela doit reposer sur soi-même, cela doit reposer sur un fondement tel que l'on puisse dire : dans ce membre de l'organisme social, l'élément vivant doit être le libre déploiement des dons du corps et de l'esprit agissant à partir du centre de l'être humain. Dans ce domaine, tout doit reposer sur l'individualité. Car ce qui pénètre dans ce domaine doit provenir du centre de l'individualité humaine, et les dons du corps et de l'esprit de l'homme doivent avoir la possibilité de se développer librement, mais doivent en même temps être empêchés d'intervenir aucunement d'une façon nuisible ou gênante ou injustifiée dans le reste de la vie culturelle.

 



On pourrait dans ce domaine mentionner toutes sortes de cas. Je voudrais citer un exemple grotesque. Je vous prie d'excuser l'aspect légèrement grotesque de cet exemple, mais peut-être exprimera-t-il précisément ce que je veux dire dans ce domaine. Supposons qu'un jeune étudiant, donc un être qui est placé dans l'évolution spirituelle dans la position de celui qui est en train de devenir un homme, doive faire sa thèse de doctorat. Il reçoit de la personne qui a qualité pour cela le conseil de traiter un sujet quelconque qui n'a pas ou qui n'a que peu été traité — imaginons par exemple qu'il doive étudier les jurons chez un auteur de l'Antiquité romaine. Ce genre de choses existe, comme ceux qui connaissent la question le savent sûrement. Donc, ce jeune homme travaille pendant toute une année sur les jurons chez un auteur quelconque de l'Antiquité. On dit de nos jours : c'est important du point de vue scientifique. — Oui, du point de vue des représentations que l'on se fait dans certains domaines, cela est certes important du point de vue scientifique ; mais un autre élément entre en ligne de compte. C'est qu'une telle affaire est insérée dans tout l'organisme social. Il faut détourner son regard du fait qu'il peut être très intéressant d'écrire au sujet des jurons chez un auteur de l'Antiquité. Je connais une thèse où le jeune homme s'est donné le plus grand mal et qui traitait des parenthèses chez un auteur de l'Antiquité grecque. Je ne dirai rien contre les arguments qui peuvent être présentés à ce propos du point de vue purement scientifique. Il ne s'agit pas ici de venir avec ses gros sabots. Mais par rapport à l'insertion dans l'organisme social, la situation est la suivante : il faut peut-être à ce jeune homme un an de travail assidu pendant lequel il doit manger, il doit boire, il doit s'habiller. Il a besoin pour cela de certains revenus, d'un certain capital. Qu'est-ce que cela signifie : il consomme un certain capital ? Dans la vie réelle, cela ne signifie rien d'autre que ceci beaucoup, beaucoup d'êtres humains doivent travailler pour lui.

 

Ce qu'il mange, ce qu'il boit, les vêtements qu'il porte, tout cela met à son service toute une armée d'êtres humains pendant cette année-là. Il prend à son service une petite armée d'êtres humains pour boire, manger et se vêtir. Et c'est cela qui entre en ligne de compte du point de vue de l'effet social de la chose. On est aujourd'hui fréquemment d'avis que l'on peut tout simplement placer les choses dans le monde sans connaissance du monde social, parce qu'on est d'une certaine manière porté à servir des intérêts purement scientifiques. Or notre vie dans l'époque présente exige que chaque branche soit appréhendée par la compréhension sociale, par le sentiment social dans son rapport, dans la relation vivante à toutes les autres branches de la vie.

Je vous ai déjà priés tout à l'heure de m'excuser d'avoir cité un exemple grotesque, on pourrait en citer de moins grotesques, mais j'ai cité cet exemple pour vous montrer combien il est nécessaire de développer le sentiment social que la vie spirituelle, toute l'activité de la vie spirituelle doit être insérée dans l'organisme social de telle façon qu'elle soit justifiée par les intérêts généraux de l'humanité. Il faut demander à l'intérêt général de l'humanité s'il accorde au repérage des jurons chez un quelconque auteur de l'Antiquité romaine une valeur assez grande pour qu'on doive engager pour ce travail pendant toute une année une petite armée de travailleurs. On pourrait naturellement étudier ce problème sous bien d'autres aspects beaucoup moins grotesques. On constaterait alors que ce que comprend la vie de l'esprit, dont fait partie par exemple aussi l'invention d'idées techniques, agit précisément de façon vivante sur l'autre organisme, sur l'Etat, lorsque les choses ont dans la vie une relative autonomie. En revanche, la centralisation a pour effet que tout va au chaos.

 

Il faut que la vie de l'esprit jouisse d'une relative autonomie, que non seulement elle repose sur la liberté intérieure de l'être humain, mais cette vie de l'esprit doit avoir dans l'organisme social une place telle qu'elle soit placée dans le champ d'une concurrence totalement libre, qu'elle ne soit fondée sur aucun monopole d'Etat, que l'importance que la vie de l'esprit acquiert auprès des êtres humains — l'importance qu'elle a pour l'individu, c'est une autre affaire, ici nous parlons de la forme à donner à l'organisme social — puisse uniquement se manifester dans une concurrence totalement libre, dans une ouverture pleinement libre aux besoins de l'ensemble. Quelqu'un peut bien écrire pendant ses loisirs autant de poèmes qu'il veut, il peut bien trouver autant d'amis qu'il veut pour ces poèmes — seule est justifiée dans la vie de l'esprit l'expérience que les autres hommes veulent partager avec l'être individuel. Or cela ne sera posé sur un fondement sain que lorsqu'on aura ôté son caractère de monopole à toute la vie de l'esprit, à toute la vie de l'école et de l'université, à toute la vie de l'éducation et à toute la vie de l'art et qu'on leur aura donné l'autonomie — comme je l'ai déjà dit, pas du jour au lendemain. Donner l'autonomie à l'être humain, voilà la direction. Ainsi est jeté un pont vers autre chose. J'ai déjà tenté, au début des années quatre-vingt-dix, de montrer dans ma Philosophie de la liberté qui vient, peut-être juste au bon moment, d'être rééditée, de montrer que l'expérience véritable de la liberté en l'homme ne peut jamais reposer sur autre chose que sur la vie véritable de l'esprit agissant en l'âme de l'être humain. J'ai appelé cela à l'époque l'activité de l'intuition dans l'âme humaine, l'activité de la véritable réalité spirituelle. Il faut que cette réalité spirituelle véritable naisse en l'âme humaine dans la lumière de la liberté et de la libre concurrence, alors elle s'insère de façon juste dans l'organisme social. Mais alors elle ne doit pas, et cela est important, être placée sous la tutelle de quelqu'autre membre que ce soit de l'organisme social, alors il faut qu'elle puisse se manifester dans une totale liberté, sous la seule incitation des besoins de l'ensemble.

 

 

Je sais — et je réfuterai cela aussi dans les prochaines conférences — que bien des gens croient : oh alors, quand l'école sera libre, nous ne serons plus entourés que d'analphabètes. — Je montrerai que ce n'est pas le cas. Ce qui m'importe aujourd'hui tout d'abord, c'est de montrer, à partir de la nature interne de la chose, la nécessité de la libre vie de l'esprit dans l'organisme social. Il y a des Etats où, comme presque partout aujourd'hui, la science est un monopole, où l'activité de la science elle aussi est monopolisée par l'Etat et où on trouve cette loi : la science et son enseignement sont libres. — Mais ceci ne reste que formule vide de sens et ne peut que le rester si la vie spirituelle n'est pas autonome. Non seulement parce que cette vie de l'esprit dépend, en ce qui concerne les personnalités qui y sont actives, en ce qui concerne ce qui peut ou ne peut pas être dit publiquement, d'un autre membre de l'organisme social, puisque cet autre membre est chargé de l'organisation des écoles, des universités, pour ne citer que cela ; non seulement, comme je viens de le dire, l'activité extérieure, la nomination des enseignants, la délimitation de ce que l'on peut ou ne peut pas dire en sont déterminés, mais même le contenu interne de la vie de l'esprit en est lui aussi déterminé. Toute notre vie scientifique porte un caractère de vie politique depuis qu'à notre époque la sphère de la vie politique s'est étendue à la vie de l'esprit. Mais la vie de l'esprit ne peut pas être l'affaire d'un autre membre quelconque de l'organisme social ; elle ne peut recevoir le caractère qui lui est conforme que si elle se développe à partir de l'individualité humaine libre.

 

A cette vie de l'esprit s'oppose la vie économique pure et simple, comme dans l'organisme humain naturel le système de la tête s'oppose au système de la digestion. Cette vie économique a ses lois propres. C'est précisément la science prolétarienne qui a fait ressortir le caractère de la vie économique moderne d'une façon conforme à ce que l'on éprouve, à la vie, et pas seulement de manière théorique comme la science universitaire, si bien que l'on voit d'après cette science prolétarienne quel est très généralement le rapport de la vie économique à l'être humain.

Or il faut là sans se lasser attirer l'attention tout particulièrement sur un point. J'ai déjà attiré l'attention sur ce point dans ces conférences. Ce qui frappe particulièrement aujourd'hui dans cette vie économique, ou plutôt dans l'étude que fait de cette vie économique la science prolétarienne, c'est que, sous ce rapport également, le prolétariat a reçu l'héritage des autres classes. A mesure que la technique moderne, que le capitalisme moderne se développaient, le regard de l'être humain — pour les raisons déjà mentionnées ici la semaine dernière — a été attiré, presque hypnotisé, par cette vie économique présentée comme seule véritable réalité dans l'organisme social. Quand on parle d'évolution humaine, on croit qu'il faut attirer l'attention sur cette seule vie économique. Que cette vie économique ait été, comme nous l'avons vu, particulièrement concernée et active, que par cette vie économique une impulsion particulièrement agissante dans le prolétariat moderne se soit trouvé placée dans la claire lumière du soleil du sentiment d'être un homme, du sentiment de la dignité de l'homme, c'est cela qu'il faut considérer à propos de cette vie économique. Si Karl Marx a pu enflammer tant de millions de prolétaires, c'est parce que les gens croyaient qu'il était le premier à montrer en termes clairs ce qu'il y a d'indigne d'un être humain dans toute la situation du prolétaire moderne ; que lui, Karl Marx, était le premier à montrer que pour le prolétaire sa force de travail est une marchandise, comme d'autres marchandises circulent sur le marché des marchandises et sont soumises à la loi de l'offre et de la demande.

 

Karl Marx a attiré l'attention sur les fondements de la réalité sociale d'une façon qui est erronée en bien des points. Mais qu'il ait attiré l'attention sur ce point absolument central de la question sociale est tout particulièrement porté à son crédit par le sentiment de l'âme prolétarienne. Ici encore, l'élément de la psychologie sociale a une importance plus conforme à la réalité que les théories, les réflexions et les discussions qui viennent se greffer sur bien des points de la vie économique et, en général, de la vie sociale. Mais il en découle cette question existentielle : comment surmonter ce que l'on éprouve comme indigne de l'être humain, à savoir que la force de travail est une marchandise et qu'elle est traitée comme une marchandise ? — C'est ainsi que Marx fut en effet le premier à s'exprimer. Je le répète, il y a là bien des erreurs, mais ce n'est pas là ce qui importe, car lorsqu'un fait erroné a une telle puissance d'action dans l'âme de millions d'êtres humains, c'est tout simplement un fait social. C'est ainsi que s'exprima Karl Marx et c'est ainsi que les prolétaires modernes le comprirent. Cette façon de comprendre, même si elle s'est transformée en bien des points, a encore aujourd'hui des répercussions, exerce précisément aujourd'hui une action tout particulièrement vivante sur les sentiments. Il disait par exemple : au sein du monde de l'organisme économique, des marchandises sont apportées sur le marché et vendues. Il y a des possesseurs de marchandises, des propriétaires de marchandises, il y a des acheteurs de marchandises. Les marchandises circulent entre eux. Le prolétaire moderne ne possède rien en dehors de sa propre force de travail. Pour toute marchandise, des frais de production sont nécessaires. La production de telle ou telle marchandise, jusqu'au point où elle peut être consommée, coûte tant. Le prolétaire moderne n'a que sa force corporelle, il n'a que sa force de travail. Pour produire sa force de travail est nécessaire tout ce qu'il doit acquérir en fait de nourriture, de vêtements etc. La force de travail utilisée est sans cesse renouvelée par ce qu'il doit acquérir en fait de nourriture, de vêtements etc. Ce sont les frais de production de sa force de travail. — Or, disait Karl Marx, et tout au fond de lui-même, c'est ce que pense aussi le prolétaire moderne : si on ne l'y contraint pas, sans contrainte, l'employeur ne lui donnera pas plus de ce que l'on appelle le salaire du travail que ne requièrent les frais de production de sa force de travail. Mais même si, par exemple, le travail de cinq heures suffisait à subvenir à tous les frais de production, le chef d'entreprise ne s'en déclare pas satisfait. Il exige un temps de travail plus long. Le travailleur travaille alors pour rien, car il ne reçoit que le montant correspondant à la production de sa marchandise, la « force de travail ». Le travail fourni en sus est la plus-value. C'est l'offrande qu'il apporte sur l'autel — si on a le droit d'appeler cela l'autel — du capitalisme, qui s'amasse sous forme de capital, mais qui est issue de sa force de travail et qui en est issue par le fait qu'il ne reçoit que les frais de production, parce qu'il est contraint d'offrir sur le marché du travail, d'offrir aux conditions de l'économie la seule chose qu'il ait : sa marchandise la « force de travail ».

Vous pouvez faire appel à la plus grande perspicacité humaine, aux connaissances les plus profondes en matière d'économie politique afin de discuter sur la façon dont il faut s'y prendre pour que le travailleur n'ait plus besoin de porter au marché comme une marchandise sa force de travail et qu'il puisse abolir ce dernier reste de l'esclavage, et, même si vous pouviez réfléchir avec la plus grande perspicacité et les connaissances les plus profondes en matière d'économie politique, vous n'aboutiriez à aucun résultat. Vous ne pouvez aboutir à aucun résultat, car cette question est précisément le type de question qui ne peut pas faire l'objet d'une discussion, à laquelle on ne peut pas répondre de façon théorique, mais à laquelle seule la vie elle-même peut répondre : on ne peut y répondre qu'en créant quelque chose qui agisse dans la vie de façon telle que la force de travail soit dépouillée de son caractère de marchandise.


Si je puis me servir d'une comparaison, j'aimerais évoquer ici ce petit homme que, dans le Faust de Goethe, Wagner produit dans sa cornue : Homunculus. Il est composé des ingrédients de la nature qu'un être humain peut réunir par sa pensée ; mais il ne devient pas un homme, il devient seulement un petit homme, un homunculus. Vous pouvez de la même manière faire un agrégat d'ingrédients provenant de votre intelligence ou fabriqués par l'économie politique — et vous n'aurez qu'un homunculus social ! De même qu'il faut créer les conditions d'existence d'un être humain vivant, de même il faut créer les conditions pour qu'un organisme social vivant agisse de façon telle que dans la vie et non par des théories, des arguments, soient constamment dissociés ce qui doit se manifester dans la simple circulation des marchandises et ce qui est la force humaine de travail et qui ne doit pas se manifester dans la simple circulation des marchandises.


Vous n'y parviendrez pas d'autre façon qu'en faisant l'effort de comprendre que l'organisme social vivant doit contenir, à côté du membre spirituel, le membre du droit et de l'Etat, le membre politico- étatique au sens strict, et, de façon relativement autonome à côté, l'organisme économique, qui doit vivre d'après ses propres lois. L'estomac peut tout aussi peu respirer ou produire des battements de cœur que l'organisme économique peut de par ses propres forces être à l'origine de droits. Et il ne sera jamais à l'origine de droits lorsqu'il n'agit qu'à partir de son propre fondement réel. Ce fondement réel ne poussera l'organisme social à la consommation qu'au moyen de la production, du commerce.


Mais de la même façon que se trouve face à cette circulation des marchandises cette nature elle-même, ce fondement naturel de toute production et de toute consommation et de toutes les activités humaines, etc., de l'artisanat et de l'activité économique en général, de même s'y oppose d'un autre côté et ne doit pas être déterminé par l'organisation économique, mais doit déterminer cette économie, ce qui vit dans l'Etat politique, l'Etat du droit. Celui-ci doit avoir face à l'organisme économique la même autonomie que le système cœur-poumons face au système de la tête, au système neurosensoriel dont il est relativement indépendant. C'est précisément parce que ces systèmes agissent de manière autonome les uns sur les autres qu'ils se placent dans la vie dans un rapport juste. C'est seulement parce que le poumon et le coeur sont dans la vie organique séparés de la vie de l'estomac qu'ils agissent les uns sur les autres de façon juste, alors qu'ils sont relativement autonomes. C'est seulement grâce à l'existence dans l'organisme social vivant d'un membre indépendant qui, au lieu de faire une marchandise de la force de travail à partir de mobiles économiques quelconques, fait en sorte, à partir de la vie vivante, de donner au travail dans la structure sociale une place telle qu'il soit enchâssé dans cette structure sociale en tant que droit, c'est seulement grâce à cela que vous pourrez obtenir d'un autre côté que la vie économique soit déterminée par la vie du droit, la vie politique de l'Etat au sens strict, de même que la vie économique est déterminée par le fondement de la nature 4. L'organisme social ne sera véritablement sain que lorsque ces trois membres se côtoieront dans une autonomie relative, lorsqu'on aura un membre spirituel autonome, un membre du système de la vie propre de l'Etat, du droit, autonome et un membre de l'économique autonome et que ces membres agiront l'un à côté de l'autre dans une autonomie relative, lorsque chacun de ces membres aura son organe de repré- sentation, son organe d'administration issus de ses propres fondements, disons, son Parlement, sa Diète, son ministère et que les divers membres négocieront les uns avec les autres avec les mêmes pouvoirs souverains que des Etats différents et seulement par des délégués. Alors se développeront dans ce champ de la vie économique les fondements d'intérêts qui peuvent seuls fournir les impulsions déterminantes pour cette vie économique. Et alors pourra être posée par la vie elle-même, par ce qui se passe dans l'autre membre de l'organisme social, dans l'organisme du droit cette question : lorsqu'à partir des impulsions de cet organisme du droit on limite la force humaine de travail qui n'a plus désormais le caractère d'une marchandise, mais qui a le caractère d'un droit — lorsque l'incidence de cette force de travail sur une branche particulière de l'économie est telle que cette branche de l'économie n'est pas rentable, alors on devra considérer la non-rentabilité de cette branche de l'économie au même titre que lorsqu'elle n'est pas rentable en raison du coût trop élevé d'une matière première. Ce qui signifie : la force humaine de travail deviendra par rapport à la vie économique un élément souverain et non un sujet opprimé, un esclave. Et on n'obtiendra pas ce résultat en promulguant certaines lois, mais en créant dans la vie véritablement vivante un organisme qui, par la seule raison qu'il faut que d'autres impulsions humaines soient présentes dans ce corps séparé, enlèvera constamment d'époque en époque son caractère de marchandise au travail, car il faut lui enlever ce caractère de marchandise, sinon il sera sans cesse aspiré, parce que l'organisme économique a toujours la tendance d'aspirer la force de travail et d'en faire une marchandise. Il faut que l'organisme étatique soit sans cesse vigilant pour reprendre à la force de travail le caractère de marchandise qu'il a revêtu.


Partout la vie vous montre que l'amalgame — si je puis employer l'expression — des trois domaines de la vie sociale est néfaste. Il suffit pour le voir d'étudier la catastrophe sociale et humaine en général à laquelle on a assisté ces quatre dernières années et demie. Il suffit de l'étudier dans les événements réels. C'est l'objet d'une belle étude que d'étudier, dans la région qui s'est maintenant pour ainsi dire désagrégée en atomes, en Autriche : comment la structure interne a-t-elle cherché au juste à se maintenir, comment a-t-elle cherché à se maintenir depuis plus d'un demi-siècle ? On avait ce qui s'appelait un Conseil d'Empire. Dans ce Conseil d'Empire, le peuple était représenté, mais seulement certaines couches de la population. Cette représentation se décomposait — non pas ces derniers temps, mais au moment où les événements se sont déjà préparés, dans la deuxième moitié du xixe siècle — en quatre curies : la curie des grands propriétaires terriens, celle des assemblées régionales, celle des villes et des marchés et des centres industriels, celle des chambres de commerce ; donc celle des assemblées régionales, celle des villes, celle des grands propriétaires terriens, celle des chambres de commerce. Vous le voyez, il n'y avait au fond que des impulsions économiques dans cette représentation. Et cette représentation était donc la représentation au niveau de l'Etat. Cette représentation édictait des lois. Cela provenait seulement du fait que l'on était incapable, sous l'influence de l'évolution moderne, ainsi que je l'ai indiqué au début de ma réflexion d'aujourd'hui, de donner à la vie économique son organisation propre, parce que le penser avait des mailles trop courtes, trop fines, et était enserré dans des limites, parce que l'on ne savait pas plonger vraiment dans la vie. On prit pour cadre de la vie économique l'Etat tel qu'il s'était développé et on brassa à tort et à travers la vie économique et la vie politique. Et tant qu'on ne saisira pas qu'un nombre considérable des causes qui ont conduit à notre temps présent catastrophique est dû à ce brassage désordonné, on ne découvrira pas les véritables remèdes. Je n'ai pu aujourd'hui que donner de nouveau certaines indications. Je me permettrai de développer la suite après-demain. J'aimerais faire encore la remarque suivante : même en ce qui concerne la politique à l'échelle mondiale, vous pourriez trouver ce que j'ai dit confirmé, pourvu que vous vouliez aller jusqu'aux arrière-plans de la vie. Lorsqu'on étudie la genèse de cette terrible guerre, qui n'est pas une guerre au sens habituel du terme, mais une grande catastrophe pour l'humanité, où se trouvent brassés toutes sortes d'ingrédients et qui n'en est pas arrivée à sa fin, mais qui est entrée dans une crise, quand on étudie la genèse de cette catastrophe, on trouvera par exemple qu'un aspect essentiel est donné dans le point de départ, dans toute la préparation de la guerre : c'est que la vie économique moderne s'est formée d'une manière particulière et que, par le fait que l'on n'a pas su l'isoler de l'ensemble de l'organisme social en un organisme conforme à sa nature, un organisme social réellement viable, ou en un organisme s'étendant au monde entier, cette vie économique s'est liée à la vie juridique proprement dite qui aurait dû rester relativement autonome. Et ainsi certains facteurs, certains éléments économiques se sont servis, pendant les dernières décennies, de forces de l'Etat, certaines forces économiques ont travaillé les unes contre les autres d'une façon très disharmonieuse. Si on les avait obligées à ne se développer que sur la base de leur vie économique et sur la base de leurs accords réciproques, elles n'auraient jamais pu conduire à cette catastrophe. Elles ont conduit à cette catastrophe en tant que forces économiques pures, parce que ces forces économiques ont pu, par l'intermédiaire d'un corps politique à la structure erronée, se servir des forces politiques de l'Etat qui ont envoyé pour elles leurs armées en campagne.

 

Il faut seulement considérer ce fait de façon adéquate et non de façon théorique. C'est ce que font aujourd'hui certes bien des gens. Mais il faut savoir le placer dans la lumière juste qui le fait apparaître comme le véritable symptôme de la vie présente par rapport à l'impulsion véritable — pressante et brûlante — de la question sociale qui traverse toute l'époque moderne. On sort alors de l'exaltation d'esprit, des simples exhortations, et on entre dans ce qui est réel, dans ce qui rend possible que les trois membres de l'organisme social agissent les uns sur les autres dans la vie. Ce que ne peut réaliser aucune discussion, aucun jugement d'économie politique — que la vie économique et la vie politique vivent côte à côte —, cela résoudra le problème de la force de travail et pourra durablement et d'une façon juste supprimer l'un des points névralgiques qui blessent le plus profondément le sentiment du prolétariat moderne.


Je poursuivrai en ces lieux après-demain ces considérations, j'entrerai dans les détails et bien des points qui ont dû rester encore aujourd'hui en suspens pourront alors s'éclairer comme il convient. Je peux peut-être encore mentionner une seule chose. C'est un fait, et cela le restera encore longtemps, que les gens, voulant rester dans le confort des habitudes de pensée du temps présent, trouvent trop radical, peut-être trop universitaire ou autrement ce qui n'est en vérité pas un idéalisme abstrait, ce qui est en vérité pratique de la vie. Bien des gens diront : bon, voilà un de ces chercheurs en science de l'esprit qui prétend dire son mot dans une question éminemment pratique, dans une question qui a son importance à l'échelle de l'histoire universelle : la question sociale. — J'aimerais utiliser ici pour terminer une comparaison, non pas pour évoquer un argument particulier en ma faveur ou en faveur des représentants de l'orientation de recherche que je veux défendre ici, mais par rapport aux gens qui trouvent que ce genre de choses est éloigné de la pratique et condamné à l'échec, parce qu'ils ne sont pas en mesure de prendre un point de vue plus élevé pour apprécier ces perspectives, donc pour ces gens et pas pour moi. J'aimerais évoquer ce gamin de famille pauvre, Stephenson, qui était à l'époque condamné à travailler sur une machine à vapeur de Newcomen et qui devait alternativement ouvrir et fermer les robinets par lesquels on introduisait d'un côté la vapeur, de l'autre l'eau de condensation. Et voici que le petit garçon remarqua qu'en haut le balancier s'élevait et s'abaissait et il lui vint cette idée : Et si, avec ma ficelle, j'attachais chacun des robinets au balancier ? En remontant, celui-ci tirerait une fois l'un des robinets et pousserait l'autre, et en descendant il pousserait l'un et tirerait l'autre la fois suivante. Le balancier ferait le travail à ma place et je pourrais me contenter de regarder, se dit le jeune garçon. Et il mit la chose réellement en œuvre. Or il aurait bien pu, dès ce moment-là, se produire ce qui a lieu bien des fois lorsque quelque chose de nouveau doit voir le jour, est dit ou exprimé : qu'une personne pétrie d'intelligence aurait dit Petit sot, occupe-toi de ce qu'on t'a dit de faire ! Qu'est-ce que c'est que ces ficelles que tu as attachées au balancier ? Enlève-moi ça bien vite ou je te donne une ràclée ! — Eh bien ! Ce n'est pas ce qui s'est passé, mais une des inventions les plus importantes des temps modernes, le fonctionnement automatique de la machine à vapeur, est née de cette expérience acquise par le jeune garçon. La science de l'esprit ne prétend pas faire plus que d'avoir développé un regard juste pour ce qui conduit à un fonctionnement autonome de l'organisme social, à l'action vivante des trois membres de l'organisme les uns dans les autres, les uns sur les autres, — à une activité autonome du membre spirituel, du membre politique et juridique, du membre économique. Mais tout dépend maintenant de savoir si les gens pétris d'intelligence diront à cette science de l'esprit : Petit sot, fais ce qui t'es demandé ! — ou s'ils entreront dans cette façon de voir. C'est ce que l'on doit souvent se dire, lorsqu'on est en plein dans ces choses, en toute modestie et sans prétentions. Puisse la foi en les esprits exaltés, qui se prennent pour des esprits pratiques, faire bientôt place à cette connaissance que les véritables praticiens de la vie sont ces idéalistes décriés, qui sont cependant capables d'entrer réellement dans la vie réelle, que ce sont eux qui doivent découvrir les véritables conditions d'évolution de l'humanité ; c'est seulement par la connaissance et la réalisation effective des véritables conditions d'évolution et des véritables forces d'évolution de l'humanité moderne que l'on pourra trouver la voie conduisant à la solution de la question sociale — nous en parlerons la prochaine fois — qui, quoi qu'on puisse en penser, est possible dans la vie réelle. Ce qui est juste ne se trouvera pas par la voie de la prétention dont font preuve ces hommes qui passent encore souvent pour des esprits pratiques, mais les idéalistes décriés qui pourront toutefois entrer réellement dans la réalité de la vie, devront s'avérer être les véritables praticiens de la vie.

 

NOTES DE LA REDACTION

1) Après l'armistice du 11 novembre 1918, on ne parvint pas à une véritable conférence sur la paix entre les puissances du Centre et de l'Ouest. Au contraire, la « Conférence de Paris sur la paix » qui s'ouvrit à Versailles le 18 juin 1919 ne fut qu'une réunion de plénipotentiaires délégués par les 27 Etats de l'Entente, dans le but de s'entendre sur les conditions à poser aux puissances du Centre. A Berne eut lieu du 3 au 10 février 1919 le Congres international des socialistes.
2) Ludendorff (1865-1937) fut le principal collaborateur de Hindenburg à la tête des armées allemandes ; partisan de la guerre à outrance et pour cette raison limogé en octobre 1918, il s'engagea politiquement à droite après la défaite et participa au putsch manqué de Hitler à Munich (1923). Elu député au Reichstag l'année suivante, il fut battu par Hindenburg aux élections présidentielles de 1925.
3) La Gesellschaft für ethische Kultur (Société pour la culture éthique) fut fondée à Berlin en 1892, à l'imitation d'un modèle américain, sur l'initiative de deux publicistes, Wilhelm Foerster et Georg von Gizycki. Elle se proposait de promouvoir une morale fondée sur l'universalité de la nature humaine. Rudolf Steiner, qui travaillait alors à La Philosophie de la liberté, rédigea plusieurs articles pour attirer l'attention sur le caractère foncièrement anti- individualiste de ce mouvement aux dehors « humanistes ». Les démarches personnelles qu'il tenta dans ce sens restèrent vaines. Il Mettra plus tard en pleine lumière la dimension spirituelle de cet événement symptomatique (voir son Autobiographie, chapitre XVII). 0) Voir la conférence du 5.2.1919 traduite dans Triades, 36 année N° 1. * Conférence faite à Zurich le 10 février 1919. In : Die soziale Frage, Rudolf Steiner Verlag, Dornach 1977 (GA 328), pp. 47-74.

In den Vorträgen der vorigen Woche habe ich bereits darauf aufmerksam gemacht, daß die gegenwärtige soziale Lage mit Bezug auf ihre Entwickelung besonders dadurch Hemmnisse erfährt, Schwierigkeiten er­lebt, daß eine Verständigung der verschiedenen Klassen der gegenwärtigen Menschheit in einer verhältnismäßig weiten Ferne liegt. Die füh­rende Bevölkerungsklasse, wie sie sich heraufentwickelt hat in den letz­ten Jahrhunderten, Jahrzehnten bis zur Gegenwart, sie hat gewisse Denkgewohnheiten, gewisse innere Impulse, aus denen heraus sie emp­findet, denkt und will. Und man möchte sagen: Ein Abgrund ist zwischen diesen Denkgewohnheiten und zwischen dem, was in der Art, wie ich es die vorige Woche charakterisierte, sich entwickelt hat als die ganz spezifische Eigenart in den Denkgewohnheiten des modernen Proleta­riats, in dem doch eigentlich der Ursprung dessen liegt, was man heute die soziale Frage nennt.

Wer sich bemüht, in das wirkliche Leben einzudringen, in die Kräfte, die spielen im gesellschaftlichen Zusammenhange der Menschen, für den erscheint es viel wichtiger, diese, man möchte sagen, unter dem Bewußtsein der Menschen, unter dem, worüber sie bewußt diskutieren, liegenden Impulse zu beobachten als das, was eben im Bewußtsein selbst auftritt. Man kann innerhalb der über diese Dinge denkenden Kreise des Bürgertums heute mancherlei Ansichten hören. Man kann auch verneh­men die Anschauungen der Persönlichkeiten des Proletariats oder Füh­rer dieses Proletariats ; man wird nicht so viel für eine reale Lebensan­schauung und für die Bildung eines Urteiles mit Bezug auf die soziale Tatsache der Gegenwart gewinnen aus der Beobachtung dieser An­schauung, als gewissermaßen aus dem, was hinter diesen Anschauungen liegt. Und da liegt viel mehr soziale Psychologie, soziale Seelenlehre, als man auf beiden Seiten eigentlich denkt.

Wer — ich darf das von mir wohl sagen, der ich versuche, diese Dinge hier darzustellen —, wer sich bemüht hat, nach allen Seiten hin einzudrin­gen sowohl in die Denkgewohnheiten der bürgerlich leitenden Kreise auf der einen Seite wie in die Seelenimpulse des aufstrebenden Proleta­riats, der weiß, wie groß die Kluft ist zwischen beiden und wie schwierig das Verständnis ist ; und dieses Nichtverstehen ist einmal eine welthisto­rische, ist selber eine soziale Tatsache der Gegenwart. Wir sehen ja jetzt wiederum Paris - - Bern. Wenn man einen Sinn hat für das Hören solcher Dinge, dann wird man sagen : An beiden Orten wird eine ganz verschie­dene Sprache gesprochen. An beiden Orten wird eine so verschiedene Sprache gesprochen, daß man zunächst daran verzweifeln könnte, daß das, was an dem einen Ort gesprochen wird, an dem anderen auch nur im entferntesten empfunden wird, und umgekehrt. Deshalb ist es auch so schwierig, in der Gegenwart den Blick hinzulenken sowohl in bürger­lichen Kreisen als auch in Kreisen des Proletariats auf diejenigen Dinge, auf die es eigentlich als hauptsächlich treibende Kräfte in der sozialen Frage ankommt. Denn in dem, was geschichtlich vorgeht, ist ja nicht alles gleich wichtig, sondern unter den geschichtlichen Ereignissen sind solche, welche in signifikanter Weise das andeuten, was eigentlich die wirksamen, die wahrhaft wirksamen Kräfte sind. Andere Erscheinun­gen, die der oberflächliche Beobachter vielleicht für ebenso wichtig hält, kommen für die wahre Wirklichkeit gar nicht in Betracht.

Wer die proletarische Bewegung, wie sie sich herausgebildet hat in den letzten Jahrzehnten, sachgemäß zu verfolgen in der Lage war, dem wird sich als eine solche signifikante Tatsache wohl unter vielem anderen die aufdrängen, daß das moderne Proletariat, das ja wirklich in einer, man möchte sagen, wissenschaftlichen Form das in sich aufgenommen hat, was seine Impulse sind, daß dieses moderne Proletariat aus seinen Anschauungen heraus zu sagen verstand, wie die Dinge, die es in die gegenwärtige Lage hineingebracht haben, ihre Auflösung finden müssen, wie das, was als eine Wirtschafts- und Gesellschaftsordnung die alten Bevölkerungsklassen heraufgebracht haben, nach und nach verschwinden und wie etwas anderes an dessen Stelle treten müsse.

Es liegt da eine Tatsache vor, für die sich manche Spötter gefunden haben. Allein unter die Spötter soll hier nicht gegangen werden, sondern es soll auf das historisch Ernste dieser Angelegenheit hingewiesen werden. Wenn man gerade mit einsichtigen Vertretern der modernen proletarischen Lebensauffassung sich auseinandergesetzt hat — vielleicht hat man es besonders in den ersten Jahren, in denen man bekanntgewor­den ist mit dieser Bewegung, mehr getan als später, wo man sich in diese Dinge schon mehr hineingefunden, wo man sich mit ihnen mehr abge­funden hatte, wo man doch wohl die Frage aufwarf: Welche Gestaltung der Gesellschaft, des menschlichen Zusammenlebens und menschlichen Wirkens, welche Gestaltung des sozialen Organismus betrachtet man innerhalb dieser Lebensauffassung eigentlich als das, was da kommen soll, als das, was herbeigeführt werden soll? — man bekam immer die aus dieser Lebensauffassung heraus ganz sachgemäße Antwort: Das interes­siert uns weiter jetzt noch nicht. Für uns handelt es sich vor allen Dingen darum, die gegenwärtige Gesellschaftsordnung zu ihrer Auflösung zu bringen, sie dahin zu bringen, daß sie sich selber ad absurdum führt. Was dann an die Stelle tritt, das wird sich schon ergeben. — Immer handelte es sich den Leuten darum, die Ansicht zu vertreten, das moderne Proleta­riat müsse in die Macht- und Herrschaftsstellungen einrücken. Gelingt ihm das nach der Überwindung der vor ihm her marschierenden Klasse, so wird es dann, wenn es die Macht in den Händen hat, das finden, woran es vorläufig nicht zu denken braucht.

Das war programmatisch. Das ist aber nicht im eigentlichen Sinne sachgemäß gedacht. Es ist auch agitatorisch, allein es ist nicht wirklich­keitsgemäß gedacht. Wirklichkeitsgemäß ist aber für den, der einen Sinn hat für die Entwickelungskräfte der Geschichte, die Frage : Ja, was be­deutet denn eigentlich dann diese moderne proletarische Weltanschau­ung innerhalb der Entwickelung der Menschheit in die Gegenwart her­ein überhaupt ? — Und da wird man immer wieder und wiederum abge­lenkt, weil, wie gesagt, die Anschauungen selbst weniger in Betracht kommen, abgelenkt von dem, was die Leute sagen zu dem, wie sie füh­len, wie sie über ihr eigenes Leben empfinden, wie sie denken über die anderen Klassen der menschlichen Gesellschaft. Kurz, man wird abge­lenkt von der proletarischen Frage auf den Lebensstatus des Proletariats selbst. Es tritt einem gewissermaßen aus dem Leben entgegen nicht Rede, nicht Aussage, sondern das bestimmt geartete Dasein einer Menschenklasse, die durch die Art, wie sie da ist, sagt, um was es sich han­delt. Und die Antwort, die nun die Realität gibt, die das wirkliche leben­dige Proletariat, wie es heute ist, selbst gibt, diese Antwort, sie könnte etwa so formuliert werden. Es könnte gesagt werden: Dieses moderne Proletariat mit seinen Lebensmöglichkeiten und Lebensbedingungen, mit der Art und Weise, wie es drinnensteht in der modernen Gesell­schaftsordnung und sich selber in ihr fühlt, dieses moderne Proletariat fühlt sich, erlebt sich als die Kritik dieser modernen, aus Technik und Kapitalismus hervorgegangenen Wirtschaftsordnung.

Das ist, wie ich meine, außerordentlich interessant, daß man, wenn man Sinn für wirklichkeitsgemäße Anschauung hat, gewissermaßen in dem Proletariat selber die Antwort hat in dem, was da ist, nicht in einer Theorie, nicht in irgendwelcher theoretischen Auseinandersetzung, sondern in dem Proletariat selber. Eine Kritik ist es. Daß dieses moderne Proletariat so geworden ist, das liefert gewissermaßen die Kritik dessen, was sich außerhalb dieses Proletariats und dieses Proletariat für sich in Lohn nehmend als moderne Wirtschaftsordnung herausgebildet hat.

Weil dies so ist, hat insbesondere eingeschlagen in die Seele dieses modernen Proletariats eine an sich abstrakte, man möchte sagen auf wis­senschaftlichen Stelzen gehende Lehre, aber eine Lehre, die durchdrun­gen ist gerade von dem Impuls, der, wie ich es eben charakterisiert habe, als der eigentliche Lebensimpuls im modernen Proletariat selber vor­handen ist : die Lehre des Marxismus, die Lehre des Karl Marx. Es ist ein einzigartiges Beispiel in der Geistesgeschichte der Menschheit, daß eine unverbrauchte Menschenklasse, eine Menschenklasse mit noch nicht de­kadenter, mit unverbrauchter Intellektualität, mit so vollem Herzen, mit so offener Seele und so, wie wenn die darin wirksamen Kräfte die eige­nen Lebenskräfte wären, eine wissenschaftliche Theorie aufgenommen hat, wie das von seiten des modernen Proletariats mit der marxistischen Lehre geschehen ist.

In dieser Beziehung muß man die Dinge am Leben studiert haben. Man muß gesehen haben, wie selbst Schwierigstes, von den anderen Klassen als schwierig Angesehenes sich hineingefunden hat in die ele­mentar fühlende und empfindende Proletarierseele, wie das moderne Proletariat in Millionen und Millionen ergriffen worden ist von einer scheinbar theoretischen Lehre. Aber was lebt in dieser theoretischen Lehre? Das ist wiederum das Eigentümliche, daß in ihr auch nicht das lebt, was man im gewöhnlichen Sinne ein soziales Ideal nennt. Was in ihr lebt, hat nicht irgendeine Formulierung, wie ein Zukunftsstaat oder eine zukünftige soziale Struktur aussehen soll, sondern in ihr lebt im wesent­lichen eine Kritik der modernen bürgerlichen Gesellschafts- und Wirt­schaftsordnung, und es liegt gewissermaßen der Instinkt in diesem mar­xistischen Werke, der Instinkt : Weise ich das Proletariat hin auf das, was Kritik der modernen technischen kapitalistischen Wirtschaftsordnung ist, dann weise ich es auf seine eigenen Lebenskräfte hin, dann führe ich es zu seiner eigenen Wirklichkeit. Es ist schon in einem gewissen Sinne das Spiegelbild ausgedrückt des unmittelbaren proletarischen Lebens gerade in der marxistischen Lehre. Und diejenigen, welche glauben, daß die marxistische Lehre für das Proletariat abgetan ist, die begreifen auf der einen Seite nicht, daß äußere Formulierungen, bestimmte Anschau­ungen und Gedanken längst überwunden sein können, daß aber geblie­ben ist der spezifische Elan, der spezifische Impuls, der in einer solchen Sache lebt, und daß auf der anderen Seite gerade vielleicht in den entge­gengesetzten Anschauungen, zu denen man gekommen ist aus dem Marxismus heraus, daß in allerlei revisionistischen Versuchen nur wie­derum eine Fortentwickelung dessen lebt, was als Impulse in die Seele des modernen Proletariats durch den Marxismus hineingezogen ist.

Das ist nur, um zu charakterisieren eine soziale Tatsache der Gegenwart, die mir wichtiger scheint als elementare Diskussionen, die gepflogen werden, denn sie weist gewissermaßen in die soziale Psychologie hinein. Und wenn sie auch nicht direkt eine Antwort gibt — wir werden im Laufe der Vorträge noch sehen, was als Antwort zu geben ist —, so weist sie auf die vorhandenen Fragen von Gesichtspunkten aus hin, die für das reale Leben der Gegenwart wohl wahrscheinlich als erste in Be­tracht kommen. Und welche Empfindung bekommt man, wenn man sich dieser Tatsache unbefangen, vorurteilslos gegenüberstellt? Da be­kommt man die Empfindung einer gewissen Eigentümlichkeit des modernen Lebens überhaupt. Dieses moderne Leben — wie ich ja oftmals in meinen Vorträgen, die ich hier in Zürich gehalten habe, betonte — hat Denkgewohnheiten, hat Denkformen herausgebildet, die sich für eine gewisse Richtung der Naturwissenschaft außerordentlich fruchtbar er­weisen. Es hat dann dieses moderne Denken auch eindringen wollen in das Begreifen und begreifende Reformieren, reformierende Begreifen des sozialen Lebens selbst, der sozialen Erscheinungen und Impulse des Lebens. Aber bei diesem Eindringen hat man überall das Gefühl: Die Menschen der Gegenwart, die gerade rein in den Denkformen und Denkgewohnheiten der Gegenwart drinnenstehen, haben nicht Be­griffe, welche in Wirklichkeit die komplizierten Erscheinungen des sozialen Lebens erfassen können. Gewissermaßen sind die Begriffe zu engmaschig. Sie können nicht in sich fassen die komplizierten Erschei­nungen des sozialen Lebens selbst. Sie bleiben abstrakt, sie bleiben kon­turenhaft, aber sie dringen nicht ein in das wirkliche Leben selbst, das sich im sozialen Körper abspielt. Man möchte sagen : Ein kurzmaschiges Denken zeichnet diese moderne Menschheit aus. Und dieses kurzma­schige Denken, dieses Denken, das überall abreißt, wenn man ins wirk­liche Leben untertauchen will, dieses Denken, das ist auch übergegan­gen in das Bestreben des modernen Proletariats. Und so kommt es, daß dieses Denken hinreicht zur Kritik, nicht aber hinreicht dazu, wirkliche Impulse herauszugestalten aus dem menschlichen Seelenerleben, die dastehen könnten wie Richtungskräfte, die in die Zukunft hineinführen. Überall reißt das Denken ab, wenn es nach solchen Impulsen hinstreben will.

Und damit bezeichnet man etwas, was tief einschneidend ist in das ganze Leben der Gegenwart. Wer mit vollem Ernst imstande ist, das aufzufassen, was diesem Leben der Gegenwart not tut, der muß gerade von dem Gesichtspunkte aus seinen Blick darauf richten, der hier be­rührt wird, gerade jetzt in diesem weltgeschichtlichen Augenblicke, wo wahrhaftig für Diskussionen, die bloß theoretisch verlaufen, wenig Zeit ist, weil die Tatsachen drängend und brennend sind. Gerade jetzt in die­sem Augenblicke sieht man, wie die Menschen vor diese drängenden und brennenden Tatsachen gestellt sind, und wie sie überall eben diese Erscheinung des Denkens zeigen, das in die Wirklichkeit nicht eindrin­gen kann. Von gutem Willen sind die Menschen vielfach durchdrungen, von einem den Tatsachen gewachsenen Denken aber nicht. Es zeigt sich gerade in diesem weltgeschichtlichen Augenblicke für den, der eben imErnst in die Zeitlage einzudringen vermag, das Heraufkommen — oft­mals zeigt es sich maskiert in allerlei anderen Formen, ganz unbewußt dem Menschen— desjenigen Hanges der Menschen, der für die wirkliche ernste Lebensführung, wenn brennende und drängende Fragen vorhan­den sind, ganz besonders verhängnisvoll wird: das Heraufkommen einer gewissen Schwarmgeisterei, wie ich es nennen möchte. Diese Schwarmgeisterei, die sich in den verschiedensten Masken auf den ver­schiedensten Gebieten zeigt, die ist es, was uns so schwer in ein sachgemäßes Wirken in der Gegenwart hineinkommen läßt. Und diese Schwarmgeisterei, sie hat sich ergeben aus der Entwickelung, die ich als die historische angedeutet habe in den Vorträgen der vorigen Woche, und die etwa begonnen hat um die Zeitenwende des 14., 15., 16. Jahr­hunderts.

Worinnen liegt das Wesentliche dieser Schwarmgeisterei ? Das Wesentliche liegt eben gerade darinnen, daß durch eine gewisse unwirk­liche Lebensauffassung, durch eine Lebensauffassung, welche das ver­missen läßt, was ich in der vorigen Woche die Stoßkraft des inneren Er­lebens genannt habe, daß durch eine gewisse Lebensauffassung ein see­lisches, ein denkerisches, ein wissenschaftlich Erkenntnis suchendes in­neres Leben gewissermaßen eine Insel oder fortwährend eine Fülle von Inseln sucht, und nicht die Brücke bauen will zu demjenigen, was das Leben in der Alltäglichkeit ist. Wir finden, wie zahlreiche Menschen der Gegenwart es gewissermaßen — wenn ich den Ausdruck gebrauchen darf — innerlich vornehm finden, in einer gewissen, sei es auch schulmä­ßigen Abstraktheit nachzudenken über allerlei ethisch-religiöse Pro­bleme in Wolkenkuckucksheimhöhen. Wir sehen, wie die Menschen nachdenken über die Art und Weise, wie sich der Mensch Tugenden an­eignen könne, wie er in Liebe zu seinen Mitmenschen sich verhalten soll, wie er begnadet werden kann. Wir sehen Begriffe von Erlösung, Gnade und so weiter sich entwickeln, die gewisse Träger von Lebensanschau­ungen möglichst nur in geistig-seelischen Höhen halten wollen. Wir sehen aber zugleich das Unvermögen, die echte Brücke zu schlagen von demjenigen, was die Leute gut und liebevoll und wohlwollend und rechtlich und sittlich nennen, zu dem, was in der äußeren Wirklichkeit, im Alltag uns umgibt als Kapital, als Arbeitsentlöhnung, als Konsum, als Produktion in bezug auf die Warenzirkulation, als Kreditwesen, als Bank- und Börsenwesen. Wir sehen, wie zwei Weltenströmungen nebeneinandergestellt werden auch in den Denkgewohnheiten der Men­schen: die eine Weltenströmung, die sich gewissermaßen in göttlich-geistiger Höhe halten will, die keine Brücke bauen will zwischen dem, was ein religiöses Gebot ist, und was eine Usance des gewöhnlichen Handels ist. Das Leben aber ist ein einheitliches. Das Leben kann nur gedeihen, wenn die es treibenden Kräfte von allem ethisch-religiösen Leben herunterwirken in das alleralltäglichste, profanste Leben, in das­jenige Leben, das eben weniger vornehm erscheint. Denn vernachlässi­gen wir es, diese Brücke zu schlagen, verfallen wir in bezug auf religiö­ses, sittliches Leben in bloße Schwarmgeisterei, die fernsteht der alltäg­lichen wahren Wirklichkeit, dann rächt sich diese alltäglich wahre Wirk­lichkeit. Dann strebt der Mensch aus einem gewissen religiösen Impuls alles möglich Ideale an, alles mögliche, was er «gut» nennt, aber den In­stinkten, die als gewöhnliche alltägliche Lebensbedürfnisse gegenüber­stehen den Befriedigungen, die aus der Volkswirtschaft heraus kommen müssen, diesen Instinkten steht der Mensch ohne Empfindung machtlos gegenüber. Er weiß keine Brücke zu bauen von dem Begriff der gött­lichen Gnade zu dem, was im alltäglichen Leben vor sich geht. Dann rächt sich dieses alltägliche Leben. Dann nimmt dieses alltägliche Leben eine Gestalt an, die nichts zu tun haben will mit dem, was als ethische Impulse in vornehmeren, seelisch-geistigen Höhen gehalten werden will. Dann aber wird die Rache eine solche, daß das ethisch-religiöse Leben, weil es sich fernhält von der alltäglichen, von der unmittelbaren Lebenspraxis, daß dieses ethisch-religiöse Leben, ohne daß man es merkt, weil die Sache maskiert auftritt im Leben, eigentlich zu einer in­nerlichen Lebenslüge des Menschen wird.

Wie sehen wir heute die Menschen vielfach herumgehen, die aus ge­wisser ethisch-religiöser Vornehmheit heraus — wie sie meinen — den besten Willen zeigen mit Bezug auf ein richtiges Zusammenleben mit ihren Mitmenschen, die den besten Willen zeigen, ihren Mitmenschen nur das Allerallergütigste zu tun, die aber alles versäumen, dies wirklich zu tun, weil sie sich kein soziales, in den praktischen Lebensgewohnheiten drin­nenstehendes Gefühlsleben aneignen.


Und so erleben wir es — wenn ich den Ausdruck noch einmal gebrauchen darf— in diesem welthistorischen Augenblick, wo die sozialen Fra­gen so sichtbarlich, so fühlbar drängen, daß von allen Seiten die Schwarmgeister, die manchmal sich für sehr starke Lebenspraktiker hal­ten, kommen und sagen: Wir haben nötig, daß die Menschen wiederum zurückkehren aus dem Materialismus, aus dem äußerlich materiellen Leben, das uns in die Katastrophe und in das Unglück hineingetrieben hat, zu einer gewissen Geistigkeit, zu einer geistigen Auffassung des Lebens. — Und man wird nicht müde, zu zitieren oder anzuführen die Persönlichkeiten, die in der Vergangenheit — Vergangenheit muß es in der Regel sein, dem Gegenwärtigen wird man weniger gerecht — sich für eine gewisse ideale Weise, für eine gewisse Geistigkeit ausgesprochen haben. Ja, man kann es erleben, daß, wenn jemand versucht, gerade auf das hinzuweisen, was heute für das praktische Leben so notwendig ist wie das tägliche Brot, daß er darauf aufmerksam gemacht wird, daß es ja in erster Linie darauf ankomme, die Menschen wiederum zum Geiste zu bringen. In dieser Mahnung steckt ungeheuer viel von dem, was gerade die Menschen in die heutige Katastrophe hineingeführt hat, steckt Schwarmgeisterei, die in den mannigfaltigsten Masken heute auftritt und in den Tatsachen wirkt. Gewiß, es ist auf der einen Seite Schwarm­geisterei, wenn jemand, ohne die äußeren praktischen Lebensbedingun­gen zu kennen, irgendwelche soziale Ideale aufstellt, die man Utopien nennt, in denen er recht fein herausstaffiert und herauskristallisiert das System zeigt, wie die Menschen leben sollten, damit sie glücklich oder zufrieden oder sonst irgendwie seien. Im Grunde genommen, selbst wenn solche Utopien sehr scharfsinnig sind, es kommt nicht auf den Scharfsinn an, es kommt auch nicht auf den guten Willen an, es kommt auf das an, wie sie sich zur Lebenspraxis stellen. Es kommt heute nicht darauf an, daß man die Menschen darauf hinweist, zum Geiste zurückzu­kehren, sondern es kommt darauf an, daß Geist in dem ist, wie man heute über den sozialen Organismus denkt. Auf die Art und Weise, auf das Wie des Denkens kommt es an. Meinetwillen rede man gar nicht vom Geist, aber in der Art und Weise, wie man über die Lebenspraxis redet, sei Geist. Dann wird man der heutigen Zeit viel besser dienen, als wenn man aus Schwarmgeisterei in jedem dritten Satz heute die Menschen darauf hinweist, sie sollen wiederum zum Geiste zurückkehren, denn gewöhnlich können sich diejenigen nichts unter Geist vorstellen, zu denen man so spricht, gerade weil sich auch diejenigen nichts Rechtes vorstellen unter Geist, die so sprechen. Die Utopien selber aber, die auf­gestellt werden — und auch heute sind sie ja nicht einmal so sehr gering an Zahl —, die sozialen Ideale, die fein ausgedacht sind, die sind noch nicht einmal das Schlimmste, denn in der Regel hält man nicht viel von diesen Dingen. Man kommt bald dahinter, daß diese Dinge unpraktisch sind, daß sie nicht aus den wahren Lebensbedingungen heraus gedacht sind. Viel schlimmer sind in der heutigen Lebenswirklichkeit die mas­kierten Schwarmgeistereien, welche aus scheinbarer Lebenspraxis her­ausgehen, aber diese Lebenspraxis nicht in Wirklichkeit in sich haben, sondern die eigentlich leben in wesenlosen Abstraktionen. Diese Schwarmgeister, wir haben sie — man muß in solchen Dingen immer frei von der Leber weg sprechen — in den Ereignissen der Gegenwart nur zu bedeutungsvoll erlebt. Und sie werden schwer erkannt. Sie werden schwer erkannt, weil man gerade auf diesen Gebieten den Blick nicht geschärft hat.

Wenn man heute in bezug auf einen Menschen, der im wesentlichsten gerade die Eigenschaft des Schwarmgeistes an sich hat — es soll im übri­gen gar nichts gegen manche sonstigen Qualitäten solcher Schwarmgei­ster gesagt werden, es können auch gute Leute sein, sie können ihre Pflicht tun auf ihrem Gebiete, können sogar hervorragende Leute sein —, aber wenn man in bezug auf manche Persönlichkeit die Tatsache be­tont, daß er ein Schwarmgeist ist, dann sind die Menschen heute recht erstaunt, weil sie in dieser Beziehung, wie ihnen dünkt, selbstverständ­liche Urteile haben, aber weil in Wirklichkeit diese selbstverständlichen Urteile nichts anderes sind als ein wüster Aberglaube. Ich habe mir zum Beispiel im Verlauf der letzten Jahre auch manche «Lebenspraktiker» — das sage ich jetzt in Gänsefüßchen — angeschaut auf die Schwarmgeiste­rei hin. In dieser Beziehung wird die Menschheit, wenn sie zu wirklicher Erkenntnis vorrücken will, manches innerlich Paradoxe erleben müs­sen. Man wird zum Beispiel erstaunt sein, wenn ich als einen Schwarm­geist im eminentesten Sinne Ludendorff hinstelle. Das Urteil seiner An­hänger und seiner Gegner geht nach ganz anderer Richtung. Das Wesentlichste seiner Persönlichkeit ist, daß er mit Ausnahme desjenigen Gebietes, in dem er schulmäßig groß war, der Strategie, in bezug auf alles übrige Denken im eminentesten Sinne ein Abstraktling war, ein dem Leben völlig fremder Mensch, der sich schwarmgeistige Gedan­ken, die mit der Wirklichkeit nichts zu tun haben, über die Dinge machte, und der dadurch unsägliches Unheil bewirkt hat, daß er seine Schwarmgeistideen in die Wirklichkeit einführen wollte. Und so könnte man gerade manche von den Persönlichkeiten, die heute, weil man sie für Praktiker hält im Leben, unendliches Unheil anrichten, als die typi­schen Repräsentanten der Schwarmgeisterei hinstellen.

In den neunziger Jahren des 19. Jahrhunderts trat diese Schwarmgei­sterei geradezu epidemisch auf, kam von Amerika herüber und überflu­tete Europa in Form der damals sogenannten «Gesellschaft für ethische Kultur». Da versuchte man irgend etwas, was lebensfremd war, was nur aus diesem vornehmen, abstrakten Erfühlen gewisser ethischer Impulse herausströmen sollte, als ethische Kultur auszubreiten. Und wenn jemand, wie ich es damals tun mußte, darauf hinwies, daß man mit sol­chen Dingen eben in Schwarmgeisterei drinnen lebt, daß man mit sol­chen Dingen gerade das menschliche Denken einsperrt, einschränkt, so daß es nicht untertauchen kann in die wahre Wirklichkeit, so wurde man entweder nicht verstanden oder mißverstanden oder verhöhnt.

Dieser Schwarmgeisterei soll sich eben das wirklichkeitsgemäße Den­ken gegenüberstellen, das, wie ich glaube, aus der hier ja auch durch viele Jahre hindurch vertretenen, wirklich geisteswissenschaftlichen Weltauffassung heraus sich ergibt. Was ist das Wesentliche dieser gei­steswissenschaftlichen Weltauffassung? Das Wesentliche ist, daß sie nicht vom Geiste spricht als demjenigen, was sich als ein bloßes Spiegel­bild aus der Anschauung der äußeren sinnlichen Wirklichkeit ergibt, sondern daß sie vom Geiste spricht aus einem wirklichen übersinnlichen Erleben einer Welt, die ebenso real ist, wie die durch Augen gesehene und durch Ohren gehörte und mit Händen getastete. Weniger kommt es darauf an, was man im einzelnen theoretisch über diese geistig wirkliche Welt sagt, sondern viel mehr kommt es darauf an, daß man durch alles das, was einem als Erkenntnis wird aus dieser Geisteserkenntnis der Welt, eine innere Seelenverfassung sich aneignet, einen inneren Lebens‑Status, durch den der Mensch sich lebendig weiß als seelisch-geistiges Wesen in einer wirklichen geistigen Welt. Nicht darauf kommt es an, was man sagt über diese geistige Welt, sondern darauf kommt es an, wie man sich drinnenstehend fühlt in dieser geistigen Welt. Es mag schön sein, zu glauben an das oder jenes Übersinnliche. Das kann aber ebensogut zur Schwarmgeisterei führen, wie zu einem in gewisser Beziehung guten Wollen. Darauf aber kommt es an, daß man fühlt : Indem man denkt, indem man empfindet, ist in den Gedanken, die die eigene Seele durchblitzen, in den Empfindungen, die die eigene Seele durchzucken, der lebendig wirksame Geist.

Dieser lebendig wirksame Geist ist in uns. Er ist da, wie die Dinge draußen im Raume sind und die Vorgänge draußen in der Zeit sind. Und wenn man sich in diese Stellung zum wirklichen geistigen Erkennen nun nicht bloß hineindenkt, sondern hineinlebt, dann sprießt aus diesem geistigen Erkennen ein innerlicher Impuls, der ein Antrieb ist, den Geist in der Welt real zu machen durch sich selber, der ein Antrieb ist, den Geist als Realität zu erleben und zu verwirklichen in einer ganz anderen Weise, als das sein kann durch das, was ein bloßes Spiegelbild ist an Ideen, an Begriffen, die von einem Geistigen handeln. Es ist ein großer Unter­schied, ob man sagt : Ich denke über den Geist, ich glaube an den Geist —, oder ob man sagt : In mir denkt der Geist, in mir empfindet der Geist. Der gewöhnliche Glaubensbegriff verliert eigentlich gegenüber diesem Erleben sogar seinen Sinn. Etwas von seelisch-geistiger Stärke muß in die Menschheitsentwickelung hineinkommen aus diesem geistigen Er­leben heraus. Und dieses Etwas von seelisch-geistiger Stärke, was in die Menschheitsempfindung hineinkommen soll, es ist von größerer sozia­ler Wichtigkeit als man denken kann, denn es ist das, was das Heilmittel ist für die lähmende, in der vorigen Woche hier charakterisierte Ideologie, welche das Proletariat von dem Bürgertum als ein bedrückendes Erbe übernommen hat.

Das ist es, was in der ersten wahren Gestalt der sozialen Frage in Wirklichkeit lebt, wenn man in die Tiefen dieser Frage einzudringen versteht, daß die Entwickelung des modernen Geisteslebens um die Wende der neueren Zeit oder seit dieser Wende der neueren Zeit im 14. Jahrhun­derte allmählich sich so abgestumpft, abgeschwächt, abgelähmt hat, daß die Menschen nicht mehr wußten : in ihnen lebt der Geist als ein realer, lebendiger, sondern daß sie glaubten, nur Ideen, nur Spiegelbilder irgendeiner Wirklichkeit leben in ihnen — was dann in der Welt- und Lebensanschauung des modernen Proletariats dazu geworden ist, daß dieses Proletariat sagt : Es gibt auf geistigem Gebiete nur eine Ideologie. Die Wirklichkeit ist nur in dem ökonomischen, in dem wirtschaftlichen Prozesse, in dem Klassenkampfe; da spielt sich die Realität ab. — Aber daraus dampft in irgendeiner Weise etwas herauf in die Seelen der Men­schen; das kommt in Form von Bildern zur Offenbarung, von Bildern, die sich ausleben in der Wissenschaft, in der Sitte, in der Religion, in der Kunst. Das gibt einen Überbau für den einzig wirklich realen Unterbau. Und wenn man auch nicht umhin kann zuzugeben in der Soziologie, daß das, was in diesem Überbau als eine Ideologie lebt, wiederum real zu­rückwirkt auf das wirtschaftliche Leben, es bleibt doch Ideologie. Es gibt kein Heilmittel aus dieser Ideologie heraus, wenn man nicht zum wirklichen geistigen Erleben, wie es die geistige Wissenschaft in die moderne Menschheit hineinführen will, wenn man nicht zu diesem gei­stigen Erleben greift. Heilung von den Schäden der Ideologie ist nur zu erreichen durch wirkliche Vertiefung in den wahrhaftigen Geist und seine Erscheinungen, durch Vertiefung in die wirkliche übersinnliche Welt. Das, was bewirkt hat, daß innerhalb des modernen Proletariats alles geistige Leben, in das der Mensch durch die Kultur hineingeführt ist, als bloße Ideologie erscheint, das läßt, weil Ideologie nichts ist, was die Seele mit einem gewissen Elan, mit einer gewissen Schwungkraft, mit einem gewissen Bewußtsein, was sie eigentlich ist im höheren Sinne, erfüllen kann, die Seele unbefriedigt und leer. Aus dieser Leerheit der Seele ist die Stimmung, ist die trostlose Stimmung in der proletarischen Weltanschauung, die einen Teil, ein Glied der wirklichen sozialen Frage bildet, erwachsen. Und so lange man nicht einsehen wird, daß die Nei­gung der Menschen zur Ideologie geheilt werden muß, so lange wird man in die moderne proletarische Seele nicht das hineinbringen können, was positive Impulse sind, so lange wird bleiben in der modernen Prole­tarierseele eine bloße Kritik der heraufgekommenen technisch-kapitali­stischen Wirtschaftsordnung und Weltanschauung.

Das aber wird man nicht erreichen, wenn man nicht wird den Willen haben, in eine wirklich praktische Lebensanschauung einzutreten, in eine Lebensanschauung, die nicht aus Theorien, auch nicht bloß religiö­sen Theorien besteht, sondern die leben will, lebenschaffend sein will, die selber Lebensimpulse gebären will. Dazu ist manches notwendig, wovor der heutige Mensch wie vor etwas ganz Radikalem zurück­schreckt. Aber das, was hier gemeint ist, ist viel weniger radikal, als was aus dem Leben, das in den modernen Zeitinstinkten entfesselt wird, an die Menschen herantreten wird, wenn sie zu bequem sind, sich an das Notwendige zu wenden.

 

Was ich hier von einer gewissen Seite her ausgeführt habe, bezieht sich auf das eine Glied des sozialen Organismus, der entstehen muß aus den Lebensbedingungen der modernen Menschheit heraus, auf das eine der drei Glieder, wie ich sie in der vorigen Woche, am Mittwoch, hier skizzenhaft auseinandergesetzt habe. Ich habe damals auseinanderge­setzt, daß in einem gewissen Sinne das Unglück der modernen Mensch­heit, wenn es auch nicht durchschaut wird — es ist so, daß es nicht durch­schaut wird —, darinnen besteht, daß man das, was dreigliedrig sein soll und dessen drei Glieder in einer gewissen Selbständigkeit lebendig ineinanderwirken sollten, zu einem in seinen Kräften chaotisch wirr wirkenden Organismus gemacht hat und noch fernerhin machen will.

Nur um nicht mißverstanden zu werden, bemerke ich gleichsam noch einmal in Parenthese, daß es sich mir wahrhaftig nicht darum handelt, irgendeinen gewaltigen Umschwung zu befürworten, der sich von heute auf morgen vollziehen soll. Was ich angebe, soll eine Richtlinie, eine gewisse Strömung sein, nach der orientiert werden kann jede einzelne Frage, die im Staate, im geistigen Leben, im wirtschaftlichen Leben dem Menschen entgegentreten kann. Man braucht nicht etwa gleich zu glauben, wie manche Leute, denen ich diese Dinge auseinan­dersetzte, man müsse gleich das, was man heute «Staat» nennt, morgen zu etwas anderem machen. Man braucht nur den Willen zu haben in be­zug auf diese Dinge, das christliche «ändert den Sinn» zu verwirk­lichen, das heißt, die Einzelheiten, die Einzelmaßnahmen, vor die man gestellt ist, wenn man bei ihnen eingreifen soll, mit Bezug auf ihre Ge­staltung nach einer gewissen Richtung hin zu orientieren.

Und so habe ich auseinandergesetzt, daß das, was man heute zusam­menmuddeln will in einen einheitlichen Staat, geradeso wie wenn man den menschlichen Organismus — zu einem Homunkulus würde man ihn dann machen — zusammenmuddeln wollte, so daß seine drei Systeme wirr zentralisiert wären, daß das, was man heute so zentralisieren will, zum gesamten Staatsbetriebe machen will, lebendig in drei Glieder aus­einanderfallen muß, wenn sich ein gesunder sozialer Organismus ent­wickeln soll. Es muß als selbständiges Glied dieses sozialen Organismus alles dasjenige sich entwickeln, was geistige Kultur ist, als selbständiger Organismus sich entwickeln alles das, was man heute im engeren Sinne das politische Staatsleben nennt, das nicht durch Zentralisation, sondern nur durch eine lebendige Wechselwirkung mit dem geistigen Leben zu­sammenhängen soll, und es muß sich als drittes selbständiges Glied ent­wickeln der Wirtschaftsorganismus. Geistiger Organismus, Staatsorga­nismus, wirtschaftlicher Organismus, das ist es, wovon man sagen muß : in den nächsten zehn bis zwanzig Jahren streben die Entwickelungs­kräfte der Menschen dahin. Und wer sich dieser Entwickelung wider­setzt, widersetzt sich dem, was die Lebensmöglichkeiten der modernen Menschheit sind.

Den ersten Punkt berührte ich von dem Gesichtspunkte aus, den ich heute auseinandergesetzt habe, zunächst : Das Leben der sogenannten geistigen Kultur, alles umfassend, was man Schul- und Erziehungswe­sen, was man religiöses Leben nennen kann, alles das umfassend, was künstlerisches, literarisches Leben ist, aber auch alles das umfassend, was sich auf das Privat- und das Strafrecht bezieht. Diese Dinge werde ich noch genauer charakterisieren. Alles das, was innerhalb dieses Lebens der geistigen Kultur beschlossen ist, das muß auf eine gemein­schaftliche, aber selbständige Grundlage gegenüber den Grundlagen des übrigen sozialen Organismus gestellt werden. Das muß ganz auf sich gestellt werden, das muß auf eine solche Grundlage gestellt werden, daß man sagen kann : das Lebenselement innerhalb dieses Gliedes des sozia­len Organismus muß die aus dem Zentrum des Menschen heraus wir­kende freie Entfaltung seiner körperlichen und geistigen Anlagen sein. Alles muß auf diesem Gebiete auf Individualität gestellt werden. Denn was in dieses Gebiet einfließt, das muß aus dem Zentrum der menschlichen Individualität heraus kommen, und die körperlichen und geistigen Anlagen des Menschen müssen freie Entwickelungsmöglichkeit haben, müssen aber zu gleicher Zeit davon zurückgehalten werden, daß sie in irgendeiner Weise schädlich oder hemmend oder unberechtigt in das übrige Kulturleben eingreifen können.

Gerade auf diesem Gebiete könnte man mancherlei anführen. Ich möchte ein groteskes Beispiel anführen. Ich bitte zu entschuldigen, daß das Beispiel etwas grotesk sein wird, aber es wird vielleicht zum Aus­druck bringen, was ich gerade mit Bezug auf dieses Gebiet sagen will. Nehmen wir an, irgendein junger Student, also ein Mensch, der als ange­hender Mensch drinnensteht in der geistigen Entwickelung, habe seine Doktorarbeit zu machen. Er bekommt den Rat von der maßgebenden Persönlichkeit, irgendein Thema zu bearbeiten, das noch wenig oder gar nicht bearbeitet ist — nun, sagen wir zum Beispiel, es soll über die Schimpfwörter eines alten römischen Schriftstellers handeln. Solche Dinge gibt es ja, wie diejenigen, die es angeht, ja wohl wissen werden. Nun arbeitet der junge Mann ein ganzes Jahr über die Schimpfwörter irgendeines alten Schriftstellers. Man sagt heute : Das ist wissenschaft­lich wichtig. — Ja, von seiten derjenigen Vorstellungen, die man auf ge­wissen Gebieten hat, ist das ja gewiß wissenschaftlich wichtig; aber es kommt etwas anderes in Betracht. Das ist das Hineingestelltsein einer solchen Sache in den ganzen sozialen Organismus. Ablenken muß man den Blick von dieser Tatsache, daß es ja sehr interessant sein kann, über die Schimpfwörter irgendeines alten Schriftstellers zu schreiben. Ich kenne eine Dissertation, wo sich der junge Mann furchtbar geplagt hat, die handelte über die Parenthesen bei einem alten griechischen Schriftsteller. Ich will gar nichts gegen das, was vom rein wissenschaftlichen Standpunkt über solche Dinge vorgebracht werden kann, sagen. Banau­sische Dinge sollen hier nicht geltend gemacht werden. Aber mit Bezug auf das Hineingestelltsein in den sozialen Organismus liegt doch das Folgende vor: Der junge Mann braucht vielleicht ein Jahr regsten Flei­ßes. Da muß er essen, da muß er trinken, da muß er sich kleiden. Dazu braucht er ein gewisses Einkommen, ein gewisses Kapital. Was heißt das: er verzehrt ein gewisses Kapital? Das heißt ja nichts anderes im wirklichen Leben, als : Viele, viele Menschen müssen für ihn arbeiten.

Das, was er ißt, was er trinkt, das, wovon er sich kleidet, das engagiert ein ganzes Heer von Menschen während dieses Jahres. Ein kleines Heer von Menschen engagiert er für sein Essen, Trinken und Sich-Kleiden, und das kommt in Betracht mit Bezug auf den sozialen Effekt der Sache. Heute ist man vielfach der Ansicht, man könne einfach die Dinge so ohne soziales Verständnis, aus einer gewissen Neigung, rein wissen­schaftlichen Interessen zu dienen, in die Welt hineinstellen. Unser Leben in der Gegenwart fordert aber, daß ein jeglicher Zweig in seinem Ver­hältnis, in seiner lebendigen Beziehung zu allen anderen Lebenszweigen für das soziale Verständnis, für das soziale Gefühl aufgefaßt werde.


Wie gesagt, ich habe Sie um Entschuldigung gebeten, daß ich gerade
ein groteskes Beispiel angeführt habe, es könnten weniger groteske an­geführt werden, aber ich habe dieses Beispiel angeführt, um Ihnen zu zeigen, wie notwendig es ist, ein soziales Gefühl dafür zu entwickeln, wie das geistige Leben, der ganze Betrieb des geistigen Lebens im sozia­len Organismus so drinnenstehen muß, daß er gerechtfertigt ist durch die allgemeinen Interessen der Menschheit. Das Allgemeininteresse der Menschheit muß gefragt werden, ob es auf die Feststellung der Schimpf­wörter irgendeines alten römischen Schriftstellers einen so großen Wert legt, daß ein Jahr lang ein kleines Heer von Arbeitern für diese Arbeit angestellt werden muß. Die Frage könnte man natürlich weniger gro­tesk nach manchen anderen Seiten hin ausarbeiten. Dann würde man darauf kommen, daß das, was die geistige Kultur umfaßt, zu der zum Beispiel auch die Erfindung technischer Ideen gehört, lebendig wirkt gerade in das andere Gebilde, in den Rechtsstaat hinüber, wenn die Dinge mit einer relativen Selbständigkeit im Leben stehen. Dagegen be­wirkt die Zentralisation, daß alles ins Chaos kommt.

Das, was geistiges Leben ist, muß mit einer relativen Selbständigkeit dastehen, muß nicht nur auf die innere Freiheit des Menschen gestellt sein, sondern es muß so innerhalb des sozialen Organismus dieses gei­stige Leben stehen, daß es auch in völlig freie Konkurrenz gestellt ist, daß es auf keinem Staatsmonopol beruht, daß dasjenige, was das geistige Leben als Geltung sich verschafft bei den Menschen — was es für den einzelnen individuellen Menschen für eine Geltung hat, das ist eine an­dere Sache, wir reden von der Gestaltung des sozialen Organismus —, daß das auf völlig freier Konkurrenz, auf völlig freiem Entgegenkom­men den Bedürfnissen der Allgemeinheit einzig und allein sich offenba­ren kann. Mag irgend jemand in seiner Freizeit dichten, so viel er will, mag er auch Freunde finden für diese Dichtung, so viel er will — das, was berechtigt ist im geistigen Leben, ist allein das, was die anderen Menschen miterleben wollen mit der einzelnen menschlichen Individualität. Das aber wird auf eine gesunde Basis nur gestellt, wenn man alles geistige Leben, alles Schul- und Universitätsleben, alles Erziehungsleben und alles Kunstleben des staatlichen Monopolisierungscharakters entkleidet und auf sich selbst stellt -- wie gesagt, nicht von heute auf morgen. Die Richtung ist damit angegeben, wenn man den Menschen auf sich selbst stellt. Damit wird die Brücke geschlagen zu etwas anderem. Ich habe mich bereits im Anfange der neunziger Jahre bemüht, in mei­ner «Philosophie der Freiheit», die jetzt ihre Neuauflage erlebt hat, viel­leicht gerade zur rechten Zeit, zu zeigen, wie das, was das wirkliche Frei­heitserlebnis im Menschen ist, niemals beruhen kann auf etwas anderem als auf dem wirklichen, in die Seele des Menschen hereinspielenden Gei­stesleben. Ich nannte das dazumal das Hereinspielen der Intuition in die Menschenseele, das Hereinspielen des wirklichen Geistigen. Dieses wirkliche Geistige muß in der Menschenseele in dem Lichte der Freiheit und der freien Konkurrenz geboren werden, dann lebt es sich in der richtigen Weise in den sozialen Organismus hinein. Dann darf es aber auch nicht, und das ist wichtig, unter irgendeinem Aufsichtsrecht irgendeines anderen Gliedes des sozialen Organismus stehen, dann muß es in völliger Freiheit, nur herausgefordert durch die allgemeinen Be­dürfnisse, sich offenbaren können.

Ich weiß — und ich werde in den nächsten Vorträgen auch das widerlegen —, daß viele Leute glauben : Nun ja, wenn die Schule frei ist, dann werden wir wiederum von lauter Analphabeten umgeben sein. — Ich werde zeigen, daß das nicht der Fall ist. Worauf es mir zunächst heute ankommt, das ist, aus der inneren Natur der Sache heraus die Notwen­digkeit des freien Geisteslebens im sozialen Organismus zu zeigen. Es gibt Staaten, in denen ja die Wissenschaft, wie heute fast überall, Mono­pol ist, auch ihr Betrieb monopolisiert ist durch den Staat, und in denen sich das Gesetz findet: Die Wissenschaft und ihre Lehre ist frei. — Das bleibt aber eine bloße Phrase und muß eine bloße Phrase bleiben, wenn das geistige Leben nicht auf sich selbst gestellt ist. Nicht nur, daß dieses geistige Leben in bezug auf die Persönlichkeiten, die in ihm wirken, in bezug auf das, was öffentlich gesagt oder nicht gesagt werden darf, ab­hängig wird von einem anderen Gliede des sozialen Organismus, wenn dieses andere Glied Schulen, Universitäten einrichtet, wenn ich nur das erwähne ; nicht nur, wie gesagt, der äußere Betrieb, die Anstellung der Persönlichkeiten, die Begrenzung dessen, was man sagen oder nicht sagen darf, wird dadurch bestimmt, sondern es wird auch der innere In­halt des Geisteslebens selbst bestimmt. Unser gesamtes wissenschaft­liches Leben trägt einen Charakter des politischen Lebens, seitdem sich in der neueren Zeit die Sphäre des politischen Lebens über das geistige Leben ausgedehnt hat. Das geistige Leben kann aber nicht die Angele­genheit irgendeines anderen Gliedes des sozialen Organismus sein; es kann seinen ihm selbst gemäßen Inhalt nur erhalten, wenn es aus der freien menschlichen Individualität heraus sich entwickelt.

Diesem geistigen Leben steht, wie dem Verdauungssystem das Kopf­system im menschlichen natürlichen Organismus, das bloße Wirtschaftsleben gegenüber. Dieses Wirtschaftsleben hat seine eigenen Ge­setze. Herausgearbeitet hat den Charakter des modernen Wirtschafts­lebens gerade die proletarische Wissenschaft in einer empfindungsge­mäßen, in einer lebensgemäßen Weise, nicht wie die Kathederwissen­schaft nur theoretisch, so daß man merkt an dieser proletarischen Wis­senschaft, wie das Wirtschaftsleben zum Menschen im allgemeinen steht.

Nun darf man da besonders auf einen Punkt immer wieder hinweisen. Ich habe auf diesen Punkt in diesen Vorträgen schon hingewiesen. Was an diesem Wirtschaftsleben heute besonders auffällt, beziehungsweise an der proletarischen wissenschaftlichen Betrachtung dieses Wirtschaftslebens, ist, daß auch mit Bezug darauf das Proletariat das Erbe der anderen Klassen übernommen hat. Indem sich die moderne Technik, in­dem sich der moderne Kapitalismus herausgebildet hat, ist — aus den schon in der vorigen Woche hier angeführten Gründen — der mensch­liche Blick wie hypnotisiert auf dieses Wirtschaftsleben als das eigent­liche, im sozialen Organismus allein Wirkliche hingelenkt worden. Man glaubt, wenn man von menschlicher Entwickelung redet, nur auf dieses Wirtschaftsleben hindeuten zu müssen. Daß dieses Wirtschaftsleben, wie wir gesehen haben, ganz besonders engagiert worden ist, daß durch dieses Wirtschaftsleben ein besonders wirksamer Impuls des modernen Proletariats in das helle Licht der Sonne der Menschheitsempfindung, der Menschenwürdeempfindung gerückt worden ist, das muß gerade gegenüber dem Wirtschaftsleben ins Auge gefaßt werden. Dadurch hat ja Karl Marx in Millionen und aber Millionen von Proletariern so zündend gewirkt, daß die Leute glaubten, er habe zuerst mit klaren Worten auf dasjenige hingewiesen, was als ein Menschenunwürdiges lebt für den modernen Proletarier in seiner ganzen Stellung; er, Karl Marx, habe zuerst hingewiesen darauf, daß für den Proletarier seine Arbeitskraft Ware ist, wie andere Waren zirkulieren auf dem Warenmarkt und unter dem Gesetz von Angebot und Nachfrage stehen.

Karl Marx hat in vielfach irrtümlicher Weise auf die zugrunde liegenden Tatsachen hingewiesen. Allein, daß er überhaupt auf diesen inner­sten Nerv der modernen sozialen Frage hingewiesen hat, das wird ihm von dem Gefühle der proletarischen Seele zum besonderen Verdienste angerechnet. Auch hier ist das Sozialpsychologische von einer viel wirklichkeitsgemäßeren Bedeutung als die Theorien, Betrachtungen und Diskussionen, die an manches im wirtschaftlichen und sonstigen sozia­len Leben angeknüpft werden. Aber daraus entsteht die Lebensfrage: Wie kann dieses als menschenunwürdig Empfundene überwunden werden: Arbeitskraft des Menschen ist Ware und wird als Ware behandelt? — So sagte ja zunächst Marx. Wie gesagt, die Sache ist in vieler Beziehung irrig, aber darauf kommt es jetzt nicht an, denn wenn eine irrige Tatsa­che so gewaltige Stoßkraft in den Seelen von Millionen von Menschen hat, so ist sie eben eine soziale Tatsache. So sagte Karl Marx und so ver­standen ihn die modernen Proletarier. Dieses Verständnis, wenn es sich auch in mancher Beziehung geändert hat, wirkt heute noch nach, wirkt gerade heute ganz besonders lebendig in den Gefühlen. So sagte er : In­nerhalb des Wirtschaftsorganismus werden Waren auf den Markt ge­bracht und verkauft. Es gibt Besitzer von Waren, Eigentümer von Waren, es gibt Käufer von Waren. Zwischen denen zirkulieren die Waren. Der moderne Proletarier besitzt nichts außer seiner eigenen Arbeitskraft. Für jede Ware sind gewisse Herstellungskosten notwen­dig. Die Herstellung dieser oder jener Ware, bis sie konsumfähig ist, ist so und so hoch. Der moderne Proletarier hat nur seine Körperkraft, er hat nur seine Arbeitskraft. Zur Herstellung dieser Arbeitskraft ist alles das notwendig, was er erwerben muß an Nahrungsmitteln, an Kleidern und so weiter. Durch das, was er an Nahrungsmitteln, an Kleidern sich erwerben muß, wird immerzu die verbrauchte Arbeitskraft wiederum ersetzt. Das sind die Herstellungskosten für seine Arbeitskraft. — Nun sagte Karl Marx, und in seinem innersten Wesen meint dies auch der moderne Proletarier: Ungezwungen, ohne Zwang gibt ihm der Arbeit­geber nicht mehr als sogenannten Lohn für die Arbeit, als diese Herstel­lungskosten für seine Arbeitskraft. Aber wenn zum Beispiel durch eine Arbeit, die fünf Stunden dauert, abgearbeitet wäre alles das, was die Herstellungskosten sind, so gibt sich der moderne Unternehmer damit nicht zufrieden. Er fordert längere Arbeitszeit. Da arbeitet dann der Arbeiter umsonst, denn er bekommt nur so viel, wie die Herstellungs­kosten seiner Ware «Arbeitskraft» betragen. Was er darüber hinaus arbeitet, ist der Mehrwert. Das ist das, was er darbringt auf dem Altar — wenn man das Altar nennen darf — des Kapitalismus, was sich als Kapital ansammelt, was aber entstammt seiner Arbeitskraft, und deshalb dem entstammt, weil er nur die Herstellungskosten bekommt, weil er ge­zwungen ist dazu, auf dem Arbeitsmarkt das feilzubieten, feilzubieten unter den wirtschaftlichen Verhältnissen, was er allein hat : seine Ware «Arbeitskraft».

Sie können den größten menschlichen Scharfsinn, Sie können die tief­sten nationalökonomischen Erkenntnisse aufwenden, um darüber zu diskutieren, wie man das nun machen soll, daß im sozialen Organismus der Arbeiter nicht mehr seine Arbeitskraft als Ware zum Markte tragen soll, daß er diese letzte Konsequenz der Sklaverei aus der Welt schaffen könnte, und Sie werden, auch wenn Sie mit dem größten Scharfsinn, mit den tiefsten nationalökonomischen Erkenntnissen mehrere Menschen­leben nachdenken könnten, Sie werden zu keinem Resultate kommen. Sie können zu keinem Resultate kommen, denn dies ist gerade im emi­nentesten Sinne eine Frage, welche nicht diskutiert werden kann, welche nicht theoretisch beantwortet werden kann, sondern welche nur vom Leben selbst beantwortet werden kann, nur dadurch beantwortet wer­den kann, daß man etwas schafft, was im Leben so wirkt, daß die Arbeitskraft des Warencharakters entkleidet wird.

Wenn ich mich eines Vergleiches bedienen darf, möchte ich hinweisen auf jenes Männlein, das im Goetheschen «Faust» der Wagner in der Retorte erzeugt: den Homunkulus. Der ist aus dem zusammengesetzt, was ein Mensch zusammendenken kann an Ingredienzien aus der Natur heraus ; aber er wird kein Mensch, er wird bloß ein Menschlein, ein Homunkulus. Sie mögen so aus Verständnisingredienzien oder aus nationalökonomisch erzeugten Ingredienzien etwas zusammensetzen — Sie werden nur einen sozialen Homunkulus bekommen! So wie man die Bedingungen schaffen muß, daß ein lebendiger Mensch da ist, so muß man die Bedingungen schaffen, daß ein lebendiger sozialer Organismus so wirkt, daß fortwährend im Leben, nicht durch Theorien, durch Argumente, abgetrennt werden muß das, was in der bloßen Warenzir­kulation sich ausleben soll, und das, was menschliche Arbeitskraft ist und sich nicht in der bloßen Warenzirkulation ausleben darf.

Dies erreichen Sie auf keine andere Weise, als wenn Sie darauf einge­hen, daß der lebendige soziale Organismus als selbständige Glieder ent­halten muß neben dem geistigen Glied das rechtlich-staatliche, das im engeren Sinne politisch-staatliche, und relativ selbständig daneben den Wirtschaftsorganismus, der nach seinen eigenen Gesetzen zu leben hat. So wenig als der Magen atmen oder Herzschläge vollführen kann, so wenig kann der wirtschaftliche Organismus aus seinen eigenen Kräften heraus Rechte entwickeln. Und er wird nie Rechte entwickeln, wenn er nur aus seiner eigenen realen Grundlage heraus wirkt. Aus dieser realen Grundlage heraus wird der soziale Organismus nur durch Produktion, durch Handel, zur Konsumtion treiben.

Geradeso aber wie gegenübersteht dieser Warenzirkulation diese Natur selbst, diese Naturgrundlage aller Produktion und aller Konsum­tion und aller menschlichen Geschehnisse und so weiter des Handwer­kes und Gewerbes, so muß auf der anderen Seite gegenüberstehen und nicht bestimmt werden durch die Wirtschaftsorganisation, sondern diese Wirtschaft bestimmend das, was im politischen, im Rechtsstaate lebt. Das muß so selbständig sein dem Wirtschaftsorganismus gegenüber, wie das Lungen-Herzsystem relativ selbständig ist dem Kopfsy­stem, dem Nerven-Sinnessystem gegenüber. Gerade dadurch, daß diese Dinge selbständig wirken, zusammenwirken, gerade dadurch stellen sie sich im Leben in das rechte Verhältnis. Nur dadurch, daß die Lunge und das Herz im organischen Leben abgesondert sind von dem Magenleben, wirken sie, die relativ selbständig sind, in der rechten Weise zusammen. Nur dadurch, daß im lebendigen sozialen Organismus ein selbständiges Glied da ist, welches nun nicht bestimmt aus irgendwelchen wirtschaft­lichen Untergründen heraus die Arbeitskraft zur Ware, sondern welches bewirkt, daß aus dem lebendigen Leben heraus die Arbeit nur in solcher Weise in der sozialen Struktur drinnensteht, daß sie als Recht in diese soziale Struktur eingefaßt ist, nur dadurch können Sie nach der anderen Seite hin bestimmt sein lassen das Wirtschaftsleben durch das, was das Rechtsleben, das politische Leben des Staates im engeren Sinne ist, wie bestimmt ist durch die Naturgrundlage das Wirtschaftsleben. Erst dann, wenn man diese drei Glieder relativ selbständig nebeneinander hat, wenn man ein selbständiges geistiges Glied, ein selbständiges Rechtssy­stemglied, eigentliches Staatsleben, und ein selbständiges Wirtschaftsle­ben hat und diese Glieder mit relativer Selbständigkeit nebeneinander wirken, wenn jedes dieser Glieder aus seinen eigenen Grundlagen her­aus seinen Vertretungskörper, seinen Verwaltungskörper hat, sagen wir, seinen Reichstag, seinen Bundestag, sein Ministerium hat und die einzelnen Glieder fast so souverän zueinander stehen wie Einzelstaaten, nur durch Delegierte zueinander verhandeln, erst dann wird der soziale Organismus wirklich gesund. Dann entwickeln sich auf dem Gebiete des Wirtschaftslebens die Interessengrundlagen, die allein in diesem Wirtschaftsleben als Impulse ausschlaggebend sein können. Und dann wird die Frage aufgeworfen werden können vom Leben durch das, was im anderen Gliede des sozialen Organismus, im Rechtsorganismus ge­schieht : Wenn aus den Impulsen dieses Rechtsorganismus heraus die Begrenzung der menschlichen Arbeitskraft, die fortan nicht den Cha­rakter der Ware hat, sondern den Charakter eines Rechts hat, wenn diese Arbeitskraft so in einen bestimmten Wirtschaftszweig hineinfließt, daß sich dieser Wirtschaftszweig nicht rentiert, dann wird dieser Wirt­schaftszweig ebenso in bezug auf dieses Nichtrentieren angesehen werden müssen, wie wenn er sich durch das zu Teure eines Rohstoffes nicht rentiert. Das heißt : Die menschliche Arbeitskraft wird ein Beherrschen­des werden mit Bezug auf das Wirtschaftsleben, nicht ein Unterdrück­tes, nicht ein Versklavtes. Aber das wird nicht dadurch erreicht, daß man gewisse Gesetze gibt, sondern daß man im lebendigen Leben einen Körper schafft, der einfach dadurch, daß etwas anderes an menschlichen Impulsen in diesem abgetrennten Körper da sein muß, fortdauernd von Epoche zu Epoche die Arbeit dem Warencharakter entreißt, denn sie muß dem Warencharakter entrissen werden, sonst wird sie immer wie­derum aufgesogen werden, weil der Wirtschaftskörper immer die Ten­denz hat, die Arbeitskraft aufzusaugen und sie zur Ware zu machen. Immer muß der Staatskörper wachen, um wiederum die Arbeitskraft des Warencharakters zu entkleiden.

Überall zeigt einem das Leben, daß die Durcheinandermuddelung — wenn ich mich des trivialen Ausdrucks bedienen darf — der drei sozialen Lebensgebiete von Unheil ist. Man studiere nur einmal das, was sich als diese soziale und sonstige Menschheitskatastrophe in den letzten vier­einhalb Jahren herausgebildet hat. Man studiere es an den wirklichen Ereignissen. Es ist ein schönes Studium, zum Beispiel in dem Gebiet, das jetzt wie in Atome zerfallen ist, in Österreich zu studieren: Wie hat eigentlich das innere Gefüge sich, halten wollen, sich halten wollen seit mehr als einem halben Jahrhundert ? Da hatte man einen sogenannten Reichsrat. In diesem Reichsrat war eine gewisse Vertretung des Volkes, nur gewisser Schichten. Diese Vertretung zerfiel — nicht in der letzten Zeit, sondern da, wo sich die Ereignisse aber schon vorbereitet haben, in der zweiten Hälfte des 19. Jahrhunderts — in vier Kurien, in die Kurie der Großgrundbesitzer, der Landgemeinden, der Städte und Märkte und der Industrieorte, der Handelskammern; also der Landgemeinden, der Städte, der Großgrundbesitzer, der Handelskammern. Sie sehen, lauter im Grunde wirtschaftliche Impulse steckten in dieser Vertretung. Und diese Vertretung war nun die Staatsvertretung. Diese Vertretung gab Gesetze. Das kam nur davon her, weil man unter dem Einflusse der modernen Entwickelung, wie ich im Anfange meiner heutigen Betrachtungen andeutete, ohnmächtig war, das wirtschaftliche Leben selbst mit seiner eigenen Organisation zu durchdringen, weil das Denken zu kurzmaschig wurde, zu engmaschig und begrenzt wurde, weil man gar nicht untertauchen konnte. Man nahm als Rahmen für das Wirtschaftsleben den heraufgekommenen Staat und pfuschte Wirtschafts- und Staatsleben durcheinander. Und ehe man nicht einsehen wird, daß durch dieses Ineinanderpfuschen Unzähliges von den Ursachen gelegt worden ist, was zu unserer katastrophalen Gegenwart geführt hat, eher wird man nicht auf die wahren Heilmittel verfallen.
Ich konnte heute nur wiederum manche Andeutungen geben. Die weiteren Ausführungen werde ich mir erlauben, übermorgen zu bringen. Nur das möchte ich noch bemerken : Selbst mit Bezug auf die große Weltpolitik könnten Sie erhärtet finden, was ich gesagt habe, wenn Sie nur auf die Untergründe des Lebens gehen wollen. Wer die Genesis dieses furchtbaren Krieges studiert, der kein Krieg im alten Sinne ist, sondern eine aus mancherlei Ingredienzien zusammengebraute große Menschheitskatastrophe, die jetzt nicht in ihr Ende, sondern in ihre Kri­sis eingetreten ist, wer die Genesis dieser Katastrophe studiert, der wird zum Beispiel finden, daß eine wesentliche Gestalt in dem Ausgangs­punkte, in der ganzen Vorbereitung dadurch gegeben worden ist, daß sich das moderne Wirtschaftsleben herausgebildet hat in einer bestimm­ten Weise, und daß dieses moderne Wirtschaftsleben dadurch, daß man es nicht in der rechten Weise abzutrennen verstand in einen naturgemä­ßen, in einen wirklich lebensfähigen sozialen Organismus oder in einen Organismus über die Welt hin, daß sich dieses Wirtschaftsleben verbun­den hat mit dem bloßen Rechtsstaatsleben, das in relativer Selbständig­keit hätte bleiben sollen. Und so waren im wesentlichen Wirtschaftsfak­toren, Wirtschaftselemente da, welche sich bedient haben der staatlichen Machtkräfte durch die letzten Jahrzehnte, Wirtschaftskräfte, die in dis­harmonischer Weise gegeneinander gewirkt haben. Wären sie darauf an­gehalten gewesen, bloß auf Grundlage ihres wirtschaftlichen Lebens und auf Grundlage ihrer gegenseitigen Zusammenklänge sich zu entfal­ten, niemals hätten sie zu dieser Katastrophe führen können. Zu dieser Katastrophe haben sie geführt als bloße Wirtschaftskräfte, weil diese Wirtschaftskräfte sich bedienen durften durch eine falsche politische Körperschaft der politischen Staatskräfte, die für sie ihre Heere ins Feld schickten.

Diese Sache muß man nur in der entsprechenden Weise, nicht nur theoretisch, sich vor Augen führen. Das tun ja gewiß heute manche Leute. Aber man muß sie in bezug auf das, was als der eigentliche Impuls der sozialen Frage durch die moderne Gegenwart drängend und bren­nend geht, in das rechte Licht als das wahre Symptom des gegenwärti­gen Lebens zu heben wissen. Dann kommt man aus der Schwarmgeiste­rei heraus, aus der bloßen Ermahnung, und kommt hinein in das, was wirklich ist, was möglich macht, daß die drei Glieder des sozialen Orga­nismus zusammenwirken im Leben. Was keine Diskussion, kein natio­nalökonomisches Urteil bewirken kann, das Nebeneinanderleben des Wirtschaftslebens und des politischen Lebens, wird die Arbeitskraft­frage lösen und wird einen der wesentlichsten, schwierigsten Punkte in der Empfindung des modernen Proletariats in der rechten Weise fort­dauernd aus der Welt schaffen können.

Nun, ich werde übermorgen diese Betrachtungen hier fortsetzen, in Einzelheiten eingehen und manches von dem, was heute noch fraglich bleiben mußte, wird sich ja dann in sachgemäßer Weise aufklären kön­nen. Nur auf das eine darf ich wohl noch hinweisen. So ist es schon und so wird es noch lange sein, daß die Leute aus den bequemen Denkge­wohnheiten der Gegenwart heraus das zu radikal, vielleicht auch zu aka­demisch oder sonst irgendwie finden, was in Wahrheit nicht ein abstrak­ter Idealismus, was in Wahrheit Lebenspraxis ist. Da werden manche sagen : Nun, da kommt so ein Geisteswissenschafter und will in der emi­nent praktischen Frage, in der welthistorisch wichtigen Frage, in der sozialen Frage mitreden. — Gerade nicht um irgend etwas Besonderes für mich oder für die Vertreter jener Richtung, die ich hier geltend mache, zu sprechen, sondern mit Bezug auf solche Leute, die derlei Dinge für unpraktisch, für aussichtslos finden, weil sie die Aussichten nicht über­blicken, die Perspektiven nicht ins Auge fassen können, für diese Leute, nicht für mich, möchte ich einen Vergleich hier zum Schlusse heute gebrauchen. Ich möchte hinweisen auf jenen armen Knaben, Stephenson, der dazumal verurteilt war, an einer Newcomenschen Dampfmaschine zu sitzen und der die Hahnen abwechselnd zu öffnen und zu schließen hatte, durch die auf der einen Seite der Dampf, auf der anderen Seite das Kondensationswasser eingelassen wird. Da bemerkte der kleine Knabe, daß da oben ja der Balancier auf- und niederschwinge, und da fiel er auf den Gedanken : Wie wäre es denn, wenn ich nun den einen Hahnen und den anderen Hahnen mit einer Schnur an den Balancier anbinden würde? Der würde das eine Mal beim Hinaufgehen den einen Hahnen herausziehen und den anderen hineinstecken, das andere Mal den einen Hahnen hineinstecken und den anderen herausziehen. Der Balancier würde meine Arbeit ersetzen, ich kann zuschauen, dachte sich der kleine Knabe. Und er führte das wirklich aus. Nun hätte damals schon etwas geschehen können, was sich in solchen Dingen vielfach ergibt, wenn irgend etwas Neues ins Leben hineinkommen soll, ausgesprochen oder ausgesagt wird, daß von einem ganz Gescheiten gesagt worden wäre : Du dummer Junge, du hast das zu tun, was dir obliegt! Was hast du für Schnüre an den Balancier angebunden? Mach das rasch weg, sonst hau ich dich durch ! — Nun, es ist nicht so geschehen, sondern es ist eine der wichtigsten Erfindungen der neueren Zeit, die Selbststeuerung der Dampfmaschine, aus dieser Erfahrung des kleinen Knaben erwachsen. Auf mehr als den richtigen Blick dafür entwickelt zu haben, was zur Selbststeuerung des sozialen Organismus, zu dem lebendigen Ineinan­der- und Zusammenwirken der drei Glieder führt — zu einer Selbstbetä­tigung des geistigen Gliedes, des rechtlich-politischen Gliedes, des wirt­schaftlichen Gliedes —, auf mehr erhebt Geisteswissenschaft nicht An­spruch. Aber nun hängt es davon ab, ob die ganz gescheiten Leute sagen zu dieser Geisteswissenschaft : Du dummer Junge, tu deine Aufgabe —, oder ob sie darauf eingehen werden. Das muß man sich oftmals, wenn man in diesen Dingen drinnensteht, in aller Bescheidenheit und ohne Anmaßung sagen. Der Glaube an die Schwarmgeister, die sich für Prak­tiker halten, möge bald der Erkenntnis weichen, daß die wahren Lebens­praktiker die verschrienen Idealisten sind, die aber auf die Lebenswirk­lichkeit eingehen können, daß sie es sind, die die wahren Entwicke­lungsbedingungen der Menschheit erforschen müssen, und daß nur durch die Erkenntnis und Auswirkung der wahren Entwickelungsbe­dingungen und Entwickelungskräfte der modernen Menschheit der Weg gefunden werden kann, der zu jener Lösung der sozialen Frage führen kann — das nächste Mal wollen wir davon sprechen —, die eben überhaupt im wirklichen Leben möglich ist. Nicht auf dem Wege der Anmaßung der heute noch vielfach als Praktiker geltenden Menschen wird das Rechte liegen, sondern wahrscheinlich werden sich als die wah­ren Lebenspraktiker die verschrienen Idealisten, die aber auf die Lebens­wirklichkeit wirklich eingehen können, erweisen müssen.