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Du mécanisme de marché à la configuration sociale
Udo Hermannstorfer

(récapitulation de C. Strawe)

L’économie semble aujourd’hui tout dominer. Les points de vue économiques — mot-clef « réfugiés économiques » — supplantent même assez souvent les aspects humanitaires et juridiques dans la question des réfugiés. Récemment le lobby des employeurs a stoppé un manuel de cours d'économique proposé par la centrale fédérale pour la formation politique ( 1 ) contredisant leur vision entrepreneuriale. Mais le thème « économie » est beaucoup trop complexe pour qu'on puisse le mettre suffisamment en ordre par une logique conduite du point de vue d’intérêts unilatéraux. Cela s'effectue d’une manière catastrophique ainsi que, la moindre compréhension fondamentale du rôle de l’économie n'est le plus souvent pas disponible dans la vie de la société. Pourtant les évolutions économiques ont les effets les plus larges sur toutes nos vies. Que la question après une configuration économique et sociale conforme à l’époque nous occupe ici une fois encore, cela tient bien entendu aux conditions sociales qui pressent à découvrir de nouvelles réponses. Puisque qu’en gros, les théories économiques sont encore vraiment figées, il y a donc de nombreux petits mouvements et initiatives qui cherchent de nouvelles voies à la force du poignet.
Pour une compréhension plus profonde de la position de l’économie dans la structure sociale, nous devons nous remettre sous les yeux le fait que la reconnaissance de l’individualité, qui se trouve au point de départ de la configuration sociale moderne de l’organisme social, est « polarisante » : à savoir qu’individualité et société se font désormais face. Les droits à la liberté autorisent à l’individualité d’emprunter sa propre voie. Mais qui se soucie pour la communauté restée en arrière ? Le lien entre individualité et communauté semble donc rompu. Mais en même temps, elles se voient aussi renvoyées l’une à l’autre. L’individualité a besoin de la communauté dans laquelle elle vit ; la communauté doit apprendre à estimer l’individualité comme une source, sans les prestations de laquelle elle devrait elle-même se dessécher. Cette déchirure, qui passe par la socialité, renferme en même temps la tâche de la surmonter d’une nouvelle façon constructive. Nous devons apprendre que l’autre est aussi mon frère, même s’il n’appartient pas à ma propre communauté d’origine. La fraternité n’est pas liée à l’origine, mais elle élargit le concept de communauté à l’humanité (globalisation). Mais l’ancienne compréhension d’une communauté délimitée continue d’agir, ses formes se révèlent opiniâtres. Ainsi l’élément nouveau ne prend pas naissance par la mise à disposition de « verts pâturages », mais il doit au contraire, pas à pas, se rattachant à l’ancien, se développer en le métamorphosant. Pour cela il faut des structures et processus permettant la participation des êtres humains. Sous le terme « associations » nous comprenons, non pas un « modèle » à transposer, mais bien plus le processus de la création de telles formes de la vie économiques au moyen desquelles de plus en plus de bon sens (NDT : Vernünftikeit > raison synthétique à caractère d'intériorité) peut être apporté dans l’ensemble et répondu activement aux questions, qui seront soulevées par la polarisation caractérisée de l’organisme social.
Le même esprit d’émancipation, qui agissait en dissolvant les relations sociales, fut aussi cependant l’esprit inventeur de notre civilisation technique. Au déploiement duquel se mit en place le processus de division/partage du travail poussant à la globalisation. Mais les parties sont seulement utilisables si elles coopèrent au tout. Partage du travail et collaboration forment une unité. La question économique centrale en résulte : de quelle manière et dans quel rapport seront partagés les fruits du travail commun ? Autrefois ces rapports de partage étaient largement garantis par la vie communautaire traditionnelle de chacun des groupes sociaux. Mais pourquoi donc partager avec des êtres humains, qui n’appartiennent pas à mon groupe et dont je ne partage pas les valeurs ? Là où les anciennes forces de cohésion tombent, la question du partager correct devient problème.

Tôt déjà la conception a surgit qu’une organisation consciente de l’économie n’était plus du tout possible dans ces circonstances puisqu’on ne pouvait plus en suivre la totalité devenant de plus en plus complexe avec le penser représentatif. À cette place intervint la pensée du marché du libéralisme. Étant donné qu’on ne pouvait plus ordonner ou selon le cas, organiser les choses d’une manière ou d’une autre, on dut les laisser suivre leur cours. Tout un chacun apporte ses produits sur le marché et se cherche les acheteurs pour cela et inversement. Et le rapport de partage social se forme en tant que prix entre l’offre et la demande. Pour toutes les conséquences supplémentaires qui en résultent, l’économie n’est plus responsable.
Ce laisser-faire [en français dans le texte, parce que nous avons en Allemagne la réputation d’en être de bons spécialistes, ndtDK] du libéralisme suscite aussi des peurs. L’absence des forces de mise en ordre sociale semble déboucher dans un chaos social qui expose l’être humain isolé aux aspirations des autres à se procurer un avantage a son coût par utilisation de sa méconnaissance ou son inattention. D’une répartition correcte, ne peut alors plus être parlé.

Concurrence en tant que panacée
Pour garantir la protection durable contre le fait de se procurer un avantage au coût de l'autre par l'utilisation de sa méconnaissance ou de son inattention , le libéralisme économique développa alors un second postulat riche de conséquences, dont l’effet contrarie le danger de destruction de la société par l’égoïsme des individus : il doit sans cesse être assuré que la concurrence règne entre les acteurs économiques. Au moyen de la concurrence, l’égoïsme est, en quelque sorte, « domestiqué » ; des déséquilibres naissants retrouveraient l’équilibre dans le dos des acteurs, le mécanisme de concurrence veille finalement sans cesse « comme une main invisible » en faveur d’une répartition supportable socialement. Quand bien même surgissent des dommages collatéraux, ceux-ci sont toujours moindres que les dommages qui se produiraient s’il survenait une perturbation du mécanisme de concurrence. En définitive, on n’avait plus qu’à attendre, patiemment et ensuite la misère disparaîtrait déjà d'elle-même. Les revenus plus bas actuels dans les pays pauvres seraient certes non sociaux, mais ils constitueraient en même temps un avantage concurrentiel sur le marché mondial en tant que condition préalable vers une prospérité future.
De nombreux êtres humains ressentent pourtant aujourd’hui la position fondamentaliste du marché comme cynique et inconciliable avec les droits de l’homme. Ils ne veulent plus continuer d’être dans le rôle de ceux qui regardent, comme au spectacle, comment agissent les forces du marché, mais ils ont aussi un sain scepticisme vis-à-vis des solutions étatiques. Ils se sentent co-responsables. Ils remarquent que « l’économie » n’est pas un objet extérieur, mais un processus dans lequel nous sommes impliqués comme agissants, tout de suite aussi dans notre rôle de consommateurs.

En considération de la réalité du capitalisme de Manchester, se développa très tôt déjà un contre-mouvement à l’encontre du libéralisme économique d’Adam Smith. Le pendule repartit dans l’autre sens, du libéral au communautaire. De l’individu isolé, on ne pouvait selon sa teneur attendre d’engagement social, celui-ci devait donc se lier à la puissance de l’État, au cas extrême comme économie de planification d’un « État de la dictature du prolétariat ». L’expérience en fin de compte avec l'échecv de l'économie de planification a conduit de nouveau, après l’effondrement du socialisme d’état, tout d’abord à la conjoncture du néolibéralisme. Aussi différents que soient aussi ces deux modèles économiques, la défiance dans les forces de responsabilité sociale de l’individu en tant que vertu fondatrice de communauté, leur est nonobstant commune. Se placer sur le comportement intelligent des individus, leur apparaît, à tous deux, insensé : davantage de raison viendrait dans la vie économique seulement si l’on rend le déraisonnable plus cher et le raisonnable bon marché. L’avantage du prix remplace la conscience. De cette manière, on reste prisonnier dans la posture qui est la cause originelle des circonstances actuelles et devrait donc être tout de suite surmontée actuellement.


Position de l’économie dans la totalité sociale
De nombreuses difficultés sociales sont redevables à la conjoncture que la signification des processus économiques pour la vie sociale est trop peu consciente. Toute la vie ne consiste pas en économie. Certes la création de valeur économique porte aussi la vie culturelle et étatique ; mais en même temps elle repose aussi sur les règles d’une société et est protégée par celle-ci. Par dessus le marché, l’économie vit aussi de l’ensemble du potentiel des faculté et du savoir qui a été accumulé dans le passé culturel. Mais des événements économiques, politiques-juridiques et culturels ont des qualités toutes différentes. Leur amalgame est largement répandu. La tendance existe, par exemple, aujourd’hui d’aligner de plus en plus fortement la formation sur les points de vue économiques (plans scolaires, réforme de Bologne), et de la traiter en tant que facteur de production économique dans la compétition globale. Mais des éléments de droit sont énormément et fortement tissés dans la vie économique, sont en cela dépouillées de leurs qualités juridiques et utilisées dans la formation de pouvoir économique. Le droit de propriété se trouve ici au premier rang, avec lequel il s’agit véritablement d’un pur droit d’usage qui est cependant traité aujourd’hui comme une marchandise économique commercialement négociable. De telles amalgames alourdissent une façon de voir conforme à la chose de l’économie .
La deuxième question en direction d’une économie saine est celle d’un milieu possible entre libéralisme et collectivisme, ce en quoi milieu n’est fixé ni statiquement et statistiquement, mais doit être saisit dynamiquement en renouvellement actif constant. Cela signifie au fond « associativement ». On entend parfois que le mot « associatif » serait encombrant et prêtant à des malentendus. On peut discuter là-dessus. Il ne s’agit pas non plus, au sens primaire, « d’association » en tant que forme achevée, mais plutôt de l’ « associer », de se lier mutuellement dans un processus qui doit parcourir les différentes marches/étapes. La volonté est décisive d’entrer dans un espace dans lequel on commence à percevoir, délibérer et façonner les choses d’une manière déterminée. Il s'agit d'une formation dynamique de centre.
Assurément, la conscience individuelle ne suffit pas encore pour garantir la paix dans le monde. Mais l’argumentation ne peut pas en résulter que seule la société aurait à déterminer sur le quoi, le contenu du développement, et l’individu pourrait seulement être compétent sur le comment, la transposition opératoire, comme cela sera propagé dans le nouveau management public. Une telle autonomie partielle aboutit à ce que les acteurs véritables dans les institutions sont seulement autorisés à transposer ce que d’autres ont pensé, de sorte qu’ils sont eux-même exclus de la responsabilité d’orientation de ces institutions. La voie n’est pas celle de la mise hors circuit de la conscience individuelle, mais au contraire de sa mise en réseau. R. Steiner parlait d’une « circulation des raisons synthétiques » , de « jugement social » et de «sens commun objectif » pouvant préparer le terrain aux organes associatifs.

Au sujet de l’économie associative
1. Surmontement des simulacres de marché
Trois éléments doivent être disponible, pour qu’une activité économique puisse avoir lieu : sol, travail et capital ( 2 ) . Ils constituent la condition préalable pour la production, la circulation et la consommation de biens et prestations — ce qui ne signifie de loin pas qu’ils avaient la permission de prendre part à la concurrence économique comme ils le font aujourd’hui. Économiquement, on devrait plutôt les considérer comme des simulacres de marchés, parce qu’il s’agit avec cela de rapports de droit. La vénalité des facteurs de la production est finalement inconciliable avec l'exercice du droit de propriété dans le cadre des lois et de l'intérêt général et la dignité du travail. ( 3 ) Que ces facteurs soient manipulés/traité comme des marchandises et sont aussi devenu partie de l’économie, cela conduit à ce que finalement le pouvoir économique détermine le droit et la culture. Parce que ces rapports semblent légitimés par le droit, ils ne sont même pas remarqués la plus part du temps. Le développement d’une économie associative dépendra largement de savoir si l’on arrivera à détacher complètement ces facteurs de non-droit de l’économie.

Des questions comme l’équité devront aussi être traitées comme des questions de droit. L’équilibre social nécessaire à cela doit être amené consciemment. La manière dont cela se produit doit être prédisposée dans l’économie. Un exemple : l’inégalité commence déjà dans la dotation différente des régions de cette Terre en ressources et fécondité du sol. Comme moyen classique à l’encontre de cela valent les droits de douane. Parce que l’état A dispose d’une fertilité réduite du sol, qu’il compense économiquement en élevant des droits de douane sur l’exportation d’un état B pouvant les offrir à meilleur marché car plus favorisé en fertilité du sol. Mais par cela l’état A cumule deux avantages : la protection de son agriculture d’une concurrence à meilleur marché et les revenus des douanes. Ce processus serait ensuite pensé à sa fin si les revenus des douanes retournaient à l’état B pour pouvoir y être utilisés comme capital de développement.

On n'a pas la permission de tout mettre dans le même sac en économie, mais plutôt prendre en compte sa différenciabilité. Des paysans qui doivent lutter pour quelques centimes sur le prix du lait, se trouvent dans un autre monde de vie économique que des gestionnaires de la banque allemande, qui peuvent inscrire plus de 6,5 milliards d’Euros de perte à l’année. Comment sommes-nous censés estimer correctement des prix aujourd’hui, si la complication de l’économie par des positions de pouvoir et de droit tordent la formation du jugement de manière permanente ? Compenser ces distorsions de conditions serait une tâche importante lors de l’évolution d'une économie associative. Il existe déjà de nombreuses initiatives qui s’engagent pour une autre manière de s’y prendre avec le foncier, l’argent et le travail. Quand bien même elles sont encore trop faibles ces temps-ci, elles jouent un rôle important.

2. Accord associatif, économie contractuelle
L’économie se déroule entre production et consommation, nous pouvons dire aussi : entre pôle de facultés et pôle de besoins. D’un côté, c’est un courant d’impulsions formateur d’offre, de l’autre, un courant de succion formateur de demande, qui se rencontrent l’un l’autre au milieu en formant une sorte de tourbillon de rencontre. Que règne une liberté de production et de consommation, les deux pôles ne peuvent se rencontrer qu’au moyen d’un libre rapport de contrat. Des êtres humains libres ne peuvent pas se contraindre mutuellement, mais seulement s'entendre. L'essence de contrat crée un espace libre de façonnement pour les parties prenantes, dans les contrats se restreignent les engagements de soi respectifs des partenaires de contrat. C’est seulement là où l'engagement de soi ne fonctionne pas ou bien où le contrat est rompu que l’état de droit intervient.

Cette qualité du système de contrat sera souvent sous-estimée. Cette sous-estimation a ses causes dans des phénomènes de décadence du système de contrat lui-même qui ne proviennent pas seulement simplement de la masse des « stipulations rédigées en petits caractères », mais aussi du fait que beaucoup de contrats, pour les raisons nommées, ne sont pas conclus à la même hauteur des yeux, mais au contraire à partir de positions différenciées de pouvoir. Ceci sert alors, entre autres,comme prétexte, pour sortir le plus possible du chemin des engagements personnels, et les remplacer ou restreindre au moyen de réglementations législatives normatives. La peur du lien est aussi un reproche fréquent contre l’économie associative. Ainsi lors de la formation d’une alliance d’entreprises un grossiste en sort à la dernière minute avec l’argument : « Je préfère rester mon propre maître ». Quelque chose de tel est l’expression d’un concept de liberté bancal, dans lequel on ne voit pas que l’obligation personnelle contractuelle est un fruit de la liberté et ne signifie pas la restriction de celle-ci.

Aussi sur ce qu’est un contrat associatif, il y a maintes représentations bancales. Il ne peut pas fixer ce qui est ouvert d'après la chose, par exemple la question de savoir combien de clients viendront. On peut l’estimer d’avance, mais on ne peut pas exactement le savoir. Ce qui est décisif, c’est que la figure de droit du contrat, au milieu d’un monde de réglementations déterminées de manière étrangère ouvre des portes pour des configurations sociales par des êtres humains libres autodéterminés. Aux droits de l’homme appartient la liberté d'association, ce qui veut dire, que des êtres humains peuvent librement se réunir. La faculté de contracter est par conséquent le droit social le plus élevé. Une économie associative est un réseau de contrats à fin d’une collaboration. Dans une telle économie de contrats, la responsabilité sociale peut se vivre activement jusqu’au bout en tant que condition préalable à l’autogestion économique.

Une telle économie se base sur des rencontres réelles des êtres humains participants. Une rencontre de ce genre n’a lieu aujourd’hui encore ponctuellement qu’au « point de vente ».[« point of sale », en anglais dans le texte, ndtDK] Une entente continue de partenaires économiques échoue par contre à cause de la suspicion qu’elle peut seulement mener au cartel et donc, à la charge d'un tiers. Car la rencontre créerait la possibilité, si les corrects se rencontrent, de manipuler le prix en leur faveur. Cela peut réussir horizontalement — par exemple par arrangement entre entrepreneurs d’une même branche — ou verticalement — entre arrangement des échelons dans la création de valeur. Étant donné que le prix renferme toujours un rapport entre deux situations de vie — combien je reçois et combien l’autre reçoit ? — cela semble une question d’équité sociale que ce qui doit valoir c’est la parole : « Bas les pattes, touchez pas au prix ! » De fait on doit empêcher d’en arriver à un sur avantage par manipulation du prix. Pourtant cela ne veut-il pas dire, tout de suite qu’un besoin d’entente existe là-dessus, si le prix est «correct» ? C'est tout de suite cela pourtant qui est exclu par l’interdiction des ententes de l’économie de marché, parce que l’économie de marché ne tient pas pour possible cet équilibre des intérêts, en tant que forme volontaire d’une entente consciente entre les participants — production, commerce, consommateur —.

Étant donné que les prix déterminent la situation de vie et décident dans quelle mesure une économie porte tous les êtres humains, cette entente sur les rapports de prix est tout de suite d’une signification centrale. Des prix durablement bas peuvent être certes amicaux pour les clients, mais sont-ils corrects aussi pour les détaillants ? Le prix du lait est-il tel que le fermier peut produire un lait qui peut aussi rester abordable. Il s’agit toujours de questions de relations. Travailler de manière associative signifie créer des organes dans lesquels cette qualité relationnelle sera mûe et que des motifs d’agir correspondants naissent pour son amélioration : équilibre des intérêts au lieu de renforcement des intérêts. Les prix ne montrent alors plus seulement les résultats de la situation actuelle des rapports de pouvoir, mais deviennent les objectifs d’un agir responsable.

Puisque les prix sont l'expression de la réalité économique et ne représentent pas eux-mêmes celle-ci, l’influence du prix devra être mise en marche par une convention d’intervention dans la réalité — on tient donc ici aussi, pour reprendre aussi un argument de R. Steiner — pas une allumette au thermomètre, mais qu'on chauffe la pièce pour obtenir la chaleur et avec cela modifier l’état du thermomètre. Aujourd’hui une telle configuration du marché, à partir des raisons désignées, n’est pas souhaitée et il n’y a pour autant dire aucun organe pour cela, les acteurs n’ont pas confiance dans la vertu de configuration qui serait requise pour sa formation. Des fermiers exigent à bon droit un prix loyal du lait. Mais la cause de la chute du prix, c’est pourtant manifestement aussi la surabondance de l’offre en lait. La réduction de la quantité produite par le moyen d’entente parmi les participants ne sera le plus souvent même pas envisagée. Car la tentative d’un accord sur les quantités conduirait aussi à des conflits avec la législation sur les cartels. Le stigmate de soupçon de cartel est un obstacle puissant à une économie de l’entente.
« De l’auto jusqu’à la saucisse — nous sommes tous les idiots » tel était récemment le titre de manchette d’un journal. De fait la réalité ressemble à autre chose que la théorie de l’économie de marché le prévoit. Par derrière, sera plus cartellisé qu’il n’est ébruité. Manifestement, il y a dans la vie économique un besoin profond d’arrangements, parce que la concurrence y est vécue comme menaçant l’existence même. Au moyen d'accords de cartel, on tente d’agir à l’encontre de cette menace et cela d’autant plus que la concurrence est plus forte. Ainsi, d’une manière paradoxale, la législation sur les cartels, censée protéger le consommateur, mène tout de suite, derrière la façade du marché, au renforcement des efforts pour assurer son propre avantage, ou pour agrandir. L’entente des partenaires économiques sur des questions d’un développement économiquement sain, que les circonstances appellent de leurs vœux en hurlant carrément, se voit ainsi placée sous le soupçon général de criminalité sociale. L’équité sociale ne pourra être pratiquée aujourd’hui seulement là où des communautés closes abolissent l’activité du marché, comme dans les CSA [consumer Supported Agriculture – Agriculture soutenue par les consommateurs], des systèmes de partage et autres.
Pendant que nous voulons introduire souvent encore l’associer dans les structures existantes, les EDV [ndtDK : Elektronische Daten Verarbeitung, élaboration électroniques de données] et Internet ont poussés à une évolution qui portera avec soi de nombreux changements en rapport avec la production, la commercialisation et la consommation. Particulièrement touché en est le commerce qui traverse et relie toutes les parties de la vie de l'économie les unes aux autres. Après des débuts sceptiques tous les participants du marché, qu’ils soient producteurs ou consommateurs, ont bondi entre temps dans le sillage du commerce sur Internet. Des processus virtuels remplacent de réels. La vue d’ensemble totale du marché , le surfing en direction de la plus grande moindre chèreté (NDT : le français courant ne distingue justement pas dans l'expression « meilleur marché »), l’accessibilité aux marchés pour tous et ainsi de suite, renforcent le penser de marché d’une manière insoupçonnée. Les processus électroniques remplacent l’être humain social faisant l'économie par des algorithmes, qui appréhendent, reproduisent et réglementent les processus sociaux. Ici se venge la négligence de n’avoir pas formé à temps des structures associatives.

Avec l’évolution des économies associatives, nous courons le danger de reprendre les modèles du penser de l’économie existante et d’agir seulement en chamarrant de manière associative, donc au fond, d'agir largement conventionnel au marché. Mais autre danger est aussi représenté par le fait d’élever des amorces de pratique isolées au rang de modèles de base de la « vraie » économie associative, ce qui ne peut engendrer que des luttes idéologiques infécondes. Savoir si le fermier, par la vente à la ferme, doit reprendre la fonction commerciale de détaillant ou pas, n’est pas une question de principe à laquelle on peut donner une réponse en tous lieux et pour tous les temps. L’agriculture soutenue par les consommateurs — cela peut marcher dans maintes régions, mais pas dans d’autres parce qu’une ferme n’a pas l’entourage requis. On ne doit pas se laisser séduire et généraliser la manière spécifique dans laquelle on transpose soi-même l’impulsion d’association, que l’on tient pour la seule et unique possible. Sinon, on tombe dans une façon de conduire excluant de manière durable, dans une pire du genre, comme d’autres le font sous d’autres conditions. On doit développer ici une certaine largesse d'esprit.
En fait partie aussi l’ouverture à refléter autant les expériences propres que de laisser valoir celles des autres. Le terme « associer », se relier, exprime d’une jolie manière qu’il s’agit d’un processus d’entente. Des processus doivent se créer des organes pour pouvoir devenir agissants. À savoir que l'association sert l’activité d’associer. Des organes servent toujours des processus de vie. Nous devons donc apprendre à fréquenter les formes mouvantes du vivant, pas simplement avec des représentations mortes. L’associatif n’est pas un système clos, mais au contraire une tentative de fréquenter la réalité avec responsabilité.

Législation sur les cartels en tant que problème de seuil
Nous avons parlé, au début de cet article, d’une déchirure entre individualité et communauté. En même temps une déchirure se fait entre le Cosmos et la Terre, on se tourne vers la Terre, le matérialisme deviendra — sous une forme ouverte ou cachée — la conception déterminante du monde. La spiritualité du Cosmos « se volatilise », ce qui reste c’est un bon sens et une raison synthétique orientées sur le terrestre. En rapport au faire l’économie, cette déchirure s’extériorise par le sortir l'un de l'autre de la sphère de production d’avec celle de la consommation. Ce qui sera produit, s’en va dans le monde, le bien de consommation arrive de n’importe où du monde. Offre et demande ne se rencontrent plus l'un l'autre comme sur l’ancienne place du marché dans un vrai espace de rencontre et de négociation, mais son étrangères l'une à l'autre et entrent seulement chaque fois en contact pour un bref instant au « point de vente ». On ne se connaît plus réellement, on devient aveugle pour la situation de vie de l'autre.
Cela commence à se modifier lentement. Nous nous réjouissons d’un prix peu onéreux, mais beaucoup de gens s’éveillent en même temps — aussi grâce aux médias digitaux — aux conditions de production et de livraison catastrophiques, dont ils sont coupables. Cela commence à gagner sur la sphère de responsabilité personnelle. Là où il n’y avait qu’attouchement ponctuel, commence à se façonner un espace de rencontre commun — associatif. En lui un réel intérêt du partenaire économique peut naître réciproquement. On ne s’intéresserait alors plus seulement pour l'amour de son avantage personnel pour la position où se trouve l'autre ; la consultation clients serait un dialogue réel et le consommateur pourrait devenir co-façonneur responsable de l’économie. Il s’agit sans cesse de rencontre et de discussion au même hauteur d'yeux, de geste contractuel excluant tout empiétement dans la sphère d’autrui. Par de tels empiétement l’idée associative serait détériorée. Dans les coopératives producteurs-consommateurs par exemple, ce n’était jamais bon quand les consommateurs ne prenaient aucune véritable responsabilité entrepreneuriale, mais en même temps, voulaient donner des instructions à ceux qui étaient en charge en tant que porteurs réels de responsabilité.
Nous avons vu comment aux temps modernes, matérialisme et égoïsme sont montés. Ce fut nécessairement contraignant. Car ils sont une expression de la situation de l’être scindé de la totalité qui, dans un certain sens, était nécessaire pour l’amour de l’autonomisation de l’être humain individuel. Sans le matérialisme et l’intervention de l’égoïsme dans le monde pour l’amour de l’avantage personnel, nous n’aurions jamais reçu les conquêtes de la civilisation technique du présent. Le « temps de la séparation » avait son sens. Mais nous voyons aujourd’hui que l’accentuation de l’individu a aussi des conséquences qui doivent être corrigées. Nous sentons bien que l’entrepreneuriat doit aussi être co-responsabilisé au sujet des répercussions de l’action entrepreneuriale. Nous devons sortir de cette situation de séparation et en venir à établir des liens avec le monde et nos semblables. Ainsi les temps changent. L’exigence d’un nouveau genre d’économie n’est pas intemporelle et pour cette raison une extériorisation d’opinion arbitraire, elle provient par contre de la volonté éveillée d’intervenir dans le monde en étant conscients et responsables.
Le modèle de l’économie du marché se tient en tant qu’épreuve au seuil de l'époque de séparation se déroulant/s'achevant, dans laquelle égoïsme et matérialisme ont agi avec une grande puissance et agissent encore. L’économie de marché lutte avec la question de savoir comment l’humanité peut se protéger des répercussions de l’égoïsme, sans affaiblir pour autant celui-ci dans sa force motrice de l’économie. Sa réponse c’est la lutte contre les égoïsmes. En ayant instauré l’égalité des armes pour tous au moyen de la libre concurrence, l’égoïsme de l’individu est censé ^tre socialisé et réfréné. Pourtant à la longue cela ne suffira pas pour résoudre nos problèmes toujours plus entortillés. Nous avons besoin d’un nouveau pas qui permette que l’évolution économique puisse se découpler plus longtemps encore de l’évolution humaine sociale. Car c’est de développement de manières de penser, de sentir et d’agir socialement qu'il sagit finalement. Mais pour celui qui n’accorde généralement pas sa confiance à un tel développement, il est vrai, sur la base de l’image de l’être humain qu’il se fait, qu'il en résulte pour lui, avec une logique d’airain, que l’idée de concurrence et avec cela du darwinisme social en sont la conséquence. L’associer est la voie pour franchir le seuil de la co-responsabilité sociale pour les rapports sociaux.
L’économie associative n’est pas une solution universelle, mais un chemin que l’on peut emprunter ensemble pour pouvoir avancer chacun à son pas. Chaque pas en appellera d’autres derrière lui.
Sozialimpulse 4/2015.
(Traduction Daniel Kmiecik, revue F.G.)

Crainte de conjuration et fidélité de foi

« Pour le philosophe de la morale écossais Adam Smith, le cas était clair, des gens d’affaires d’une même activité industrielle en arrivent rarement ensemble eux-mêmes aux renforcements et aux dispersions, sans que le dialogue s’achève dans une conjuration contre la collectivité ou bien finisse dans l’élucubration d’un plan quelconque sur la manière dont on peut rehausser les prix. »
En Allemagne toutefois il ne rencontra aucune ouïe avec ce genre d’attitude à la fin du 19ème siècle : à cette époque-là, l’économie de ce pays-ci était marquée des cartels. Et les industriels n’y voyaient aucun problème.
Au contraire. Ils s’abonnaient à la revue « Kartel-Rundschau [Revue des cartels] »fondée par l’avocat Siegfried Tschierschky éditée de 1904 à 1936, dans la première édition de laquelle on pouvait lire que « les cartels seraient, pour quelques politiciens comme des groupes sociaux, un objet déclenchant le plus violent combat, mais pour l’industrie et le commerce (cependant) un moyen de s’organiser auquel on ne pouvait pas renoncer ».
Autour de 1900, il y avait en Allemagne environ 300 cartels, en 1929, ils étaient 2100. Avant tout dans les secteurs de production des matières premières, des concurrents s’alliaient souvent : charbon, acier, ciment. »
(Ingo Malcher : Les conspirateurs, Brand eins, édition 10/2014. Voir aussi : http:/www.Brandeins.de/archiv/2014/vertrauen/wirtschaftsgeschichte-kartelle-in-deutschland-rheinisch-westphaelisches-kohlen-syndicat-die-verschwoerer/)
Nous intervenons si le marché se dérobe ou menace de se dérober. Nous cherchons après des cartels, contrôlons les fusions et vérifions que quelques entreprises dominantes sur les marchés ne mésusent pas de leur pouvoir de pousser des concurrents hors du marché. »
Au début, notre travail n’avait pas été compris de tous, précisément du côté des entrepreneurs. Les cartels avaient en Allemagne une certaine tradition qui remonte à l’empire. Dans les années 20, il y en avait encore quelques milliers. Des négociations de prix et de secteurs parmi les entrepreneurs passèrent pour légitimes jusqu’à la fin de la seconde Guerre mondiale et elles ont même été encouragées pendant un temps par l’État, car ils semblaient empêcher des prix ruineux, assurer les emplois et garantir une direction effective par l’État en cas de guerre. L’administration fédérale des cartel fut fondée en 1958. »
« Nous croyons fermement que le marché libre fonctionne […] Ici travaillent de nombreux acteurs de conviction […] »

(Ce qui pousse les êtres humains : chose de foi. Interview avec le président de l’administration de l'administration des cartels, Bernhard Heitzer. Brand eins. Edition 4/2008. Voir aussi http:/www.Brandeins.de/archiv/2008/wirtschaft-und-wahrheit/glaubenssache/


( 1 ) Voir http://www.spiegel.de/schulspiegel/lobby-und-schule-arbeit-geberverband-stoppt-wirtschaftsbuch-a-1059654.html
( 2 ) Nous laissons ici ouverte la question de savoir si au delà des facteurs de production, il y en ait d’autres à devoir être cités comme le savoir et l’énergie.
( 3 ) Voir Udo Hermannstorfer : Simulacre d’économie de marché. Travail, sol, capital et la globalisation de l’économie, Stuttgart, 3 1997.