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Jean-Marc Decressonnière - L ' «approche anthroposophique»
Utopie sociale ou technologie sociale?
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3 Le contexte sociétal de l'action

 

Selon la compréhension qu'il a de lui-même, l'approche NPI est un pionnier du renouveau social. 104 Compte tenu des exigences de réforme de grande envergure, ce chapitre commencera par examiner cette approche au niveau du contexte d'action. Il s'agit ici d'évaluer de manière critique les objectifs normatifs de l'approche NPI, qui visent le changement social. Les éléments de contenu de l'approche NPI seront ensuite abordés dans le prochain chapitre.

 

Comme nous l'avons souligné dans le chapitre précédent, il appartient à la science de proposer des orientations d'action bien fondées pour la pratique. 105 Pour la théorie de gestion des entreprises, il en résulte la nécessité d'inclure le contexte de l'ordre social dans son domaine, puisque ce contexte, en tant que contexte d'action, détermine de manière décisive les objectifs de l'action économique. 106 À l'heure actuelle, les conditions structurelles dans lesquelles les entreprises agissent (ou sont amenées à agir) sont façonnées par l'économie de marché capitaliste. 107 Selon la position méthodologique de l'école d'Erlangen, ce système économique dominant nécésite une justification. La première étape de la procédure de justification consiste à établir une compréhension fondée de la situation au moyen d'une genèse factuelle. 108 Dans la section 3.1, une telle explication génétique de l'ordre économique valable et de son principe d'ordre aura lieu.109 Sur cette base, la justification de l'ordre économique factuel peut alors être remise en question dans une genèse critique-normative, en utilisant le principe de la transsubjectivité comme norme d'évaluation.110 Cette deuxième étape de la procédure de justification fera l'objet de la section 3.2. Dans le contexte d'une telle évaluation critique de l'économie de marché capitaliste, les implications de la réforme de l'approche NPI seront présentées et discutées (section 3.3). Ici aussi, la ligne directrice méthodologique sera le principe de la transsubjectivité, qui appelle à modifier les rapports de force injustifiables de manière à créer les conditions d'une délibération rationnelle 111 .

 

104 Cf. Lievegoed 1974, p. 186 s.

105 Cf. Steinmann/Gerum 1978, p. 3.

106 Cf. Steinmann/Gerum 1978, p. 5.

107 Cf. Steinmann/Gerum 1978, p. 1.

108 Cf. Steinmann/Gerum 1978, p. 34.

109 Cf. Steinmann/Gerum 1978, p. 39.

110 Cf. Steinmann/Gerum 1978, p. 35.

111 Cf. Steinmann/Gerum 1978, p. 44 s.

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3.1 Interprétation de l'ordre économique en vigueur


Comme toute activité humaine, l'activité économique peut être comprise comme une action délibérée. Contrairement à d'autres actions, elle se caractérise par le fait qu'elle vise à se procurer des biens pour satisfaire les besoins humains ou à les produire par le travail.112 Comme les ressources disponibles pour produire ces biens sont rares, elles doivent être "gérées", c'est-à-dire utilisées selon le principe de l'efficacité économique.113 L'essence de l'action économique est donc de réduire autant que possible la tension entre des besoins qui tendent à être illimités et des ressources rares.114

 

Le cas le plus simple d'activité économique est l'autosuffisance. Ici, producteur et consommateur sont une seule et même personne (ou groupe de personnes), c'est-à-dire que la production est effectuée uniquement pour la satisfaction de ses propres besoins.115 Avec le passage à la division sociétale du travail, qui conduit à une augmentation de la puissance productive et assure ainsi une amélioration de la satisfaction des besoins, le lien d'action uniforme entre production et consommation tombe et les intérêts des producteurs et des consommateurs indépendants se constituent 116. Les consommateurs, quant à eux, sont intéressés par une offre optimale de biens pour satisfaire leurs besoins 117. Il existe une relation élémentaire entre ces deux intérêts opposés. Ils sont liés les uns aux autres de telle manière que le travail des producteurs est la condition préalable à la consommation, et la consommation est la condition préalable à la nécessité et en même temps à la possibilité de travailler 118 .

Des précautions institutionnelles sont nécessaires pour établir le lien nécessaire entre les actions de tous les individus, qui sont répartis selon la division du travail, et pour assurer que les intérêts des producteurs et des consommateurs qui dépendent les uns des autres soient mutuellement conciliés 119 .Avec cela, la question de l'organisation de l'économie est soulevée.120

112 Cf. Steinmann/Gerum 1978, p. 54.

113 Le principe économique est basé sur le principe général de la rationnalité de finalité, qui soit exige le plus grand succès possible avec des moyens donnés (principe du maximum), soit exige qu'un but donné soit atteint avec le moins d'effort possible (principe du minimum) (cf. Bartling/Luzius 1992, p. 5).

114 Cf. Bartling/Lucius 1992, p. 4.

115 Cf. Steinmann/Gerum 1978, p. 55.

116 Cf. Steinmann/Gerum 1978, p. 55.

117 Cf. Gérum 1992, p. 284.

118 Cf. Gérum 1992, p. 284.

119 Cf. Gérum 1992, p. 285.

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Traditionnellement, on distingue deux formes idéales-typiques d'ordre économique, l'économie de marché et l'économie administrée centralement (voir fig. 5). Étant donné que ce chapitre porte sur l'évaluation du contexte d'action actuel, la suite de l'examen sera limitée au type idéal d'économie de marché.


Principales caractéristiques Économie de marché Économie d'administration centrale
Base idéologique Libéralisme Socialisme
Planification décentralisée centralisée
Coordination marchés interdépendants (ex post) Rapports (ex ante)
Information prix libre Rapports
Incitation différenciation spontanée des revenus Distribution des revenus
Principe de l'ordre de la propriété Propriété privée ("capitalisme") Propriété de l'État ("socialisme")
subordination du gouvernement Interdictions

(indiquer

Cadre réglementaire)

Offres (spécifications cibles prévues)

 

Figure 5 : Formes organisationnelles de l'économie 121

 

 

3.1.1 Le système d'économie de marché

L'ordre économique de marché est basé sur le courant politique du libéralisme 122 , qui a pour objectif de "garantir à un nombre croissant de personnes le plus grand degré possible de liberté individuelle et de possibilités individuelles de réalisation de soi tout en minimisant la domination (...)".123 Selon ce modèle

Comme les intérêts des producteurs et des consommateurs résultent uniquement de la structure de la division du travail de l'économie, on peut les décrire comme des intérêts de l'activité économique qui sont différenciés selon le système économique et donc originaires (cf. Gerum 1992, p. 285). L'intérêt (public) pour des institutions de coordination du processus économique basées sur la division du travail, qui est supérieur à ces intérêts spécifiques, est également différent et originaire du point de vue du système, puisqu'il n'est pas lié à un ordre économique spécifique (voir Gerum 1992, p. 286 s.).

 

120 Les termes "ordre économique" et "système économique" sont utilisés comme synonymes dans ce qui suit. La différenciation conceptuelle courante dans les sciences économiques est ici supprimée. En règle générale, on entend par ordre économique l'ensemble des normes et des institutions qui régissent la structure organisationnelle de l'économie, les relations entre les sujets économiques et le déroulement des événements économiques. La partie légalement réglementée de l'ordre économique est connue sous le nom de constitution économique, et le mot système économique désigne l'économie comme un sous-système de la société (cf. Gruber/Kleber 1994, p. 31).

 

121 Représentation basée sur Molitor 1992, p. 14 et Bartling/Luzius 1992, p. 35.

122 Cf. Bea 1992, p. 203.

123 Cf. Boelcke 1988, p. 33.

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la société est considérée comme une association de citoyens égaux et libres qui représentent de manière autonome leurs intérêts économiques et les équilibrent entre eux sur le marché. 124 Les prix sont formés par le jeu de l'offre et de la demande, qui se rencontrent sur le marché. Ceux-ci sont le point de référence des producteurs et des consommateurs pour l'orientation de leurs dispositions. Ainsi, la libre formation des prix peut coordonner les plans économiques individuels décentralisés des acteurs du marché de telle sorte que l'offre et la demande soient équilibrées en termes macroéconomiques. 125 Contrairement à une économie centralisée, les activités économiques dans une économie de marché ne sont donc pas dirigées par une autorité centrale de l'État, mais par le mécanisme indépendant de régulation des prix du marché. 126

Comme les prix reflètent la rareté relative des biens, le mécanisme de marché des prix libres assure une allocation optimale des ressources d'un point de vue macroéconomique, c'est-à-dire qu'il garantit que les ressources disponibles sont dirigées vers l'endroit où elles peuvent être utilisées le plus efficacement pour satisfaire les besoins. 128 Par conséquent, le modèle de marché libéral équilibre les intérêts individuels dans la liberté et pour le bien-être de tous. 129

 

Pour que ces effets systémiques du marché se produisent, il est nécessaire qu'il y ait une concurrence entre les fournisseurs, ce qui les fait rivaliser pour la faveur des consommateurs et les encourage à améliorer continuellement leurs performances. 131 En outre, le mécanisme de coordination du marché autonome présuppose que les sujets économiques agissent "rationnellement", c'est-à-dire qu'ils s'efforcent de maximiser leur bénéfice : Les demandeurs (consommateurs) tentent d'y parvenir en essayant d'acquérir les biens souhaités au meilleur prix possible, et les fournisseurs en essayant de réaliser le plus grand profit possible. 132 Sous la condition d'une concurrence parfaite, le mécanisme des prix du marché a pour effet que ces intérêts personnels individuels qui guident l'action servent l'intérêt collectif global d'un


124 Cf. Gérum 1992, p. 299.

125 Cf. Gruber/Kleber 1994, p. 41.

126 Cf. Molitor, p. 15.

127 Cf. Steinmann/Gerum 1978, p. 64.

128 Cf. Gruber/Kleber 1994, p. 42.

129 Cf. Steinmann/Gerum 1978, p. 6.

130 La pleine concurrence est la condition nécessaire pour que le prix du marché soit égal aux coûts marginaux de production (ainsi qu'à l'utilité marginale des consommateurs). L'alignement sur les coûts marginaux conduit à l'équilibre économique et à la satisfaction optimale des besoins (cf. Schachtschabel 1967, p. 67 s.).

131 Cf. Molitor, p. 19.

132 Cf. Rich 1990, p. 183.

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approvisionnement optimal de la société. 133 La force d'une "main invisible" 134 régnant dans le mécanisme de marché  permet aux entités/sujets économiques de promouvoir objectivement la prospérité de tous, contrairement à leurs intentions subjectives. A cet égard, l'homo oeconomicus de l'économie de marché s'avère être un "altruiste contre coeur" dans son comportement égoïste de base.135

En raison de la coordination automatique du processus économique par l'instance du marché, l'État n'a qu'une signification péri-phérique dans le modèle social du libéralisme économique ("État gardien de nuit").136 Contrairement à ce principe de "laissez-faire" fondamentaliste du marché 137 , cependant, dans l'économie de marché réelle existante de caractère ordo-libéral, le contrôle du marché est complété par des éléments de politique économique.138 Selon la conception ordo-libérale, la réalisation d'une augmentation maximale des performances et d'un contrôle optimal des processus économiques par le marché exige un ordre concurrentiel correspondant, que l'État doit faire respecter et protéger contre les concentrations monopolistiques de pouvoir. L'État a également pour tâche de corriger la répartition des revenus sur le marché à l'aide de la politique financière et fiscale. Enfin, l'État peut restreindre la liberté économique qui incombe à sa protection si la protection du travail humain ou des intérêts macroéconomiques l'exigent 139 .

 

En Allemagne, le concept économique ordo-libéral a pris une orientation spécifique sous la forme de l'"économie sociale de marché".140 Dans ce modèle "rhénan", le "principe de liberté sur le marché doit être lié à celui de la péréquation sociale" (Müller-Armack)141 . En conséquence, l'État a la tâche, d'une part, de fournir un cadre réglementaire qui permet le libre développement de l'activité entrepreneuriale 142 , ainsi que de prendre des précautions politiques pour assurer une concurrence efficace en matière de prestation (composante de l'économie de marché).143 D'autre part, en corrigeant les résultats du marché, il doit veiller à ce que la prospérité économique soit aussi élevée que possible au

 

133 Cf. Rich 1990, p. 185.

134 Smith 1974, p. 371.

135 Cf. Rich 1990, p. 187.

136 Cf. Bea 1992, p. 204

137 Cf. Ulrich 1997, p. 342.

138 Cf. sur ce point et les suivants Schachtschabel 1967, p. 65 et suiv.

139 L'exigence de correction de la main invisible par "la main visible de l'État" (Staehle 1992, p. 36) se fonde sur la défaillance du marché, comme les effets externes (Staehle 1992, p. 35 et suivantes).

140 Cf. Schachtschabel 1967, p. 75.

141 Cité d'après Bea 1992, p. 207.

142 Cf. Bea 1992, p. 207.

143 Cf. Schachtschabel 1967, p. 75.

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bénéficie à tous, et que les personnes en situation de changement et d'urgence soient soutenues par la communauté de solidarité sociale (composante sociale). 144

 

L'institution juridique de la propriété privée des moyens de production est inséparablement liée à l'économie de marché. Le système de propriété capitaliste et ses implications seront examinés plus en détail dans la section suivante.


3.1.2 Le système capitaliste de propriété


Le droit de propriété des moyens de production est une implication du système de marché de coordination des intérêts. En établissant l'unité du risque, du contrôle et du profit, elle assure la nécessaire motivation économique des entrepreneurs. 145 Ceux qui, en tant que producteurs, risquent leurs biens dans le processus économique devraient contrôler toutes les décisions économiques de l'entreprise et en assumer les conséquences sous forme de profits ou de pertes. 146 Avec la propriété illimitée des moyens de production, une participation indépendante au capital est constituée à côté des intérêts originaux des producteurs et des consommateurs. 147 Contrairement aux purs intérêts des producteurs et des consommateurs, qui sont des composantes nécessaires de la relation de base élémentaire de l'action économique et sont donc différents du système, l'intérêt du capital en tant qu'effluant de la forme libérale d'organisation de l'activité économique de nature est historiquement dérivé 148 et donc en principe non indispensable. 149

 

Si le rapport fondamental de l'activité économique était caractérisé par le fait que les producteurs, en tant que porteurs du travail, disposent en même temps des moyens de production 150, ainsi cette unité originelle de travail et de propriété est/sera abolie par le système de propriété capitaliste. 151 Or/désormais, d'un côté, il y a les travailleurs salariés libres qui, faute de moyens de production ou de moyens de subsistance alternatifs, offrent leur force de travail sur le marché du travail, 152 et, de l'autre côté, il y a les entrepreneurs libres, les travailleurs/forces de travail


144 Cf. Schachtschabel 1967, p. 77.

145 Cf. Steinmann/Gerum 1978, p. 64.

146 Cf. Gérum 1992, p. 301.

147 Cf. Steinmann/Gerum 1978, p. 56.

148 Cf. Gérum 1992, p. 285.

149 Cf. Steinmann/Gerum 1978, p. 70.

150 Cf. Steinmann/Gerum 1978, p. 56.

151 Cf. Schweppenhäuser 1970, p. 24 et suivantes.

152 L'achetabilité du travail résultant du système capitaliste de propriété produit un marché du travail. C'est l'institution centrale pour l'allocation du travail sociétal. Par analogie avec le

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ont besoin du travail vivant, pour mettre en mouvement leur capital matériel pour la production de marchandises. 153

Dans les entreprises, qui sont constituées en associations de propriétaires, l'institut juridique du contrat de travail est utilisé pour établir le contexte nécessaire à la production de biens. En tant qu'employeurs/donneurs de travail, les propriétaires de moyens de production concluent des contrats avec des personnes qui offrent leur travail contre rémunération (employés/preneurs de travail). 155 Tandis que les preneurs de travail ont un intérêt à un revenu élevé du travail avec le moins d'effort/fatigue au travail possible, les entrepreneurs (propriétaires de capitaux) sont intéressés par une augmentation du capital investi, c'est-à-dire par un rendement élevé du travail et un faible coût du salaire.156 Ce conflit d'intérêts structurel entre le capital et le travail est une réalité fondamentale de la vie dans les sociétés capitalistes industrielles. 157 Elle est fondée sur la séparation des possesseurs de capital et des travailleurs salariés dépourvus de propriété, structurellement établie par le droit de propriété des moyens de production. 158

Le contrat de travail, dans lequel se reflète la relation juridique entre le salarié et l'entrepreneur capitaliste, suppose des partenaires contractuels autonomes et tout aussi forts, qui représentent leurs intérêts de manière indépendante (idée de l'autonomie privée). 159 Bien qu'elle soit conclue par des personnes formellement libres, les travailleurs salariés se trouvent en fait dans une situation beaucoup moins favorable sur le marché du travail que les entrepreneurs. D'une part, ils offrent leur travail en grand nombre, tandis que les entrepreneurs particuliers apparaissent comme des consommateurs/demandeurs de masse. D'autre part, leur offre de travail est inélastique, puisqu'ils dépendent principalement des revenus salariaux provenant de la vente de leur travail pour subvenir à l'entretien de leur vie. 160

 

mécanisme de prix des marchés de biens de consommation, l'adéquation entre l'offre et la demande sur ce marché de facteurs (dans le modèle idéal-typique) s'effectue par le biais du taux de salaire.

153 Cf. Müller-Jentsch 1997, p. 27 et suivantes.

154 L'accent mis sur les intérêts du capital dans la constitution des sociétés capitalistes découle du modèle de marché libéral. Une allocation optimale des ressources économiques ne peut être réalisée au moyen du système de prix que si la motivation économique est garantie par l'étiquetage des intérêts du capital comme intérêts dominants de l'entreprise (cf. Stein-mann/Gerum 1978, p. 62).

155 Cf. Gérum 1992, p. 297.

156 Cf. Müller-Jentsch 1997, p. 35.

157 Cf. Müller-Jentsch 1997, p. 34 et Oechsler 1999, p. 342.

158 Cf. Müller-Jentsch 1997, p. 26.

Au XIXe siècle, ce contraste était perçu par Marx et ses contemporains comme un antagonisme de classe entre "prolétariat" et "capitalistes". Aujourd'hui, les conflits entre le capital et le travail peuvent être décrits comme des conflits de répartition et de travail plutôt que comme des luttes de classes (cf. Müller-Jentsch 1997, p. 22).

159 Cf. Gérum 1992, p. 305.

160 Cf. Müller-Jentsch 1997, p. 28 et suivantes.

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Outre les conditions de vente sur le marché du travail, les conditions d'utilisation de la main-d'œuvre dans les entreprises sont également conflictuelles. En effet, la main-d'œuvre ne peut pas être facilement comparée à d'autres biens d'échange, car elle n'a "pas d'autre contenant que la chair et le sang humains" (Marx)161. En utilisant la main-d'œuvre sur la base d'un contrat de travail, il reçoit le droit de diriger la main-d'œuvre achetée en échange d'un paiement. Cette disposition éteint complètement la liberté du travailleur de disposer de son travail.162

 

 

1. au niveau international : les conventions 

Règlements

2. au niveau national : la législation sur la santé et la sécurité au travail

3. niveau de la convention collective : convention collective 

(Autonomie tarifaire)

4. au niveau de l'entreprise : co-détermination en matière de gestion et de contrôle 

les organes des sociétés

5. niveau opérationnel : accords d'entreprise 

(Constitution du comité d'entreprise)

6. au niveau du lieu de travail : contrat de travail

Figure 6 : Le système des relations employeur-employé 163

 

Dans le contexte des rapports de force asymétriques sur le marché du travail et des conditions sociales/rapports sociaux dans les entreprises, le législateur a complété le contrat de travail de droit privé réglementé dans le code civil allemand par une multitude de réglementations du droit du travail.164 Le contrat de travail s'inscrit désormais dans un système de relations employeur-employé comportant plusieurs niveaux de réglementation,165 qui place l'économie dans des barrières sociales (voir fig. 6).166


161 Citation de Müller-Jentsch 1997, p. 31.

162 Cf. Müller-Jentsch 1997, p. 31.

163 Illustration basée sur Oechsler 1997, p. 28.

164 Cf. Gérum 1992, p. 305.

165 Cf. Oechsler 1997, p. 24 et suivantes.

166 Cf. Oechsler 1992, p. 273.

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Le droit de direction de l'employeur basé sur un contrat de travail est encadrer par les lois sur la protection des employés, qui fixent des limites maximales pour les charges et des limites minimales pour les mesures de protection.167 Les conditions matérielles de travail continuent d'être influencées au niveau sectoriel par les règlements des conventions collectives. La codétermination des employés dans l'organe de gestion et de contrôle des sociétés (au niveau de l'entreprise) donne aux employés la possibilité d'influencer les décisions de gestion économique de l'entreprise. Enfin, au niveau de l'entreprise, le comité d'entreprise, l'organe représentant les intérêts des travailleurs, dispose d'un certain nombre de droits de codétermination différents en vertu de la constitution de l'entreprise. Ces droits vont des droits d'information en matière économique aux droits de consultation en matière de personnel et aux droits de codécision en matière sociale. La loi sur la constitution des entreprises s'étend également au niveau du lieu de travail, compte tenu des droits individuels de chaque employé. Ces réglementations juridiques ne remettent pas en cause le principe de l'ordre économique capitaliste, la primauté de l'intérêt du capital (droit de direction de l'employeur), mais elles ouvrent le "chas d'aiguille de la rationalité économique "168 afin de donner effet à la rationalité sociale 169.170

Après avoir expliqué génétiquement le système factuel dominant de l'économie de marché capitaliste dans ses caractéristiques de base (interprétation culturelle), nous pouvons passer à la deuxième étape du discours de justification, la critique culturelle.

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