1922 < .......1923....... > 1924
Replacer
dans son contexte
Premier
semestre
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Ce que Rudolf Steiner a offert à l'humanité au
cours de cette vie terrestre n'était pas seulement
un enseignement que l'on peut accepter ou rejeter,
ni seulement une œuvre que l'on peut construire ou
détruire. Les enseignements et les œuvres ont de
tout temps été soumis au destin que leur
réservaient leurs contemporains. Mais Rudolf
Steiner a accompli, par son parcours de vie,
l'acte de recevoir l'être spirituel
"anthroposophie" des mondes spirituels et de
l'incorporer à la sphère terrestre. Un tel être
spirituel, qui habite désormais la sphère
terrestre, ne peut pas être vaincu par les forces
opposées en détruisant l'une ou l'autre de ses
formes d'expression terrestres, il ne perd pas son
existence parce qu'une décennie aveugle ne veut
pas le voir, il ne meurt pas, même si une
génération d'humains terrestres ou des parties de
ceux-ci devaient lui refuser ou détruire son lieu
de travail et de résidence. Car il est d'essence
suprasensible et, en tant que tel, il construit
sans cesse son corps terrestre à nouveau. Une fois
incorporé à la sphère terrestre par l'action d'un
être humain, il s'y réalisera toujours à nouveau
en tant qu'être immortel, éternellement créateur,
guide spirituel, source de force inépuisable, à
travers les têtes, les cœurs et les mains des
humains de bonne volonté dans cette sphère
terrestre.
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C'est pourquoi les forces de l'adversaire,
spirituelles, élémentaires et humaines, ont certes
pu infliger au corps terrestre de cet être des
blessures malsaines et douloureuses, elles ont pu
détruire la "maison du Verbe" extérieurement, dans
le physique, le visible, dans la forme formée par
la matière terrestre, mais elles n'ont pas pu
atteindre l'esprit qui avait parlé là dans le
Verbe dans sa sphère créatrice, elles n'ont pas pu
arrêter le Verbe qui était devenu force terrestre.
Elles essaieront sans doute encore souvent de le
faire, mais devront toujours reconnaître à nouveau
que l'on peut certes détruire les formes
d'expression corporelles d'un être spirituel, mais
que l'on ne peut pas pour autant toucher l'âme et
l'esprit dans leur existence et leur activité.
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C'est pourquoi il s'agissait pour Rudolf
Steiner, en tant que porteur terrestre de cet être
spirituel et guide vers sa demeure suprasensible,
d'aller à la rencontre de la renaissance de sa
forme terrestre par un nouvel acte de création :
par la reconstruction du Goetheanum, la maison du
Verbe, qui reçut une nouvelle forme terrestre, et
par la communion des cœurs humains avec la force
créatrice originelle, la pierre angulaire
spirituelle que cet être spirituel préservait pour
tout l'avenir comme une réalité suprasensible dans
l'existence terrestre. Ce n'était donc pas un
hasard, mais l'expression d'une loi de vie
supérieure, qu'en 1923, la 21e année de vie du
mouvement spirituel qu'il avait inauguré, une
nouvelle enveloppe, une nouvelle maison lui soit
donnée au moment de la naissance-Je , et que dans
les cœurs des humains, qui devaient être les
porteurs
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de cette impulsion spirituelle, fut immergée la
pierre angulaire/de fondation spirituelle qui,
au-delà de toutes les transformations des
enveloppes extérieures, porte en elle la force de
l'essence supra-sensible et donc éternelle de ce
mouvement spirituel.
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Tournons-nous donc vers les actes et les mesures
visibles par lesquels Rudolf Steiner réalisa ces
deux tâches au cours des années à venir. C'était
l'expression d'une tel savoir de
l'indestructibilité et de la force créatrice
continue de ce noyau spirituel que Rudolf Steiner,
comme nous l'avons décrit dans ce qui précède,
quelques heures après que le travail d'une
décennie sur l'œuvre merveilleuse de la
construction ait été détruit en une nuit,
poursuivait immédiatement le lendemain son cycle
de conférences sur le "moment de la naissance de
la science de la nature dans l'histoire du monde
et son développement depuis lors" (GA326) et
incitait le même jour ses élèves à un travail
artistique par la représentation du Jeu de Noël,
le Jeu des Rois. Mais à quelques mètres de ce lieu
de travail provisoire se trouvait dehors l'amas de
ruines fumantes de l'énorme construction, et
lorsque, le soir de ce jour de l'an, les dernières
flammes eurent dévoré les derniers restes de bois,
seules les formes noircies par la fumée de la
terrasse de pierre sur laquelle s'était élevée la
construction se dressaient encore au-dessus du
sommet de la colline. Il s'agissait maintenant,
tandis que le travail spirituel se poursuivait, de
préserver et de garder d'abord ce qui avait été
conservé comme bâtiments, la menuiserie avec la
salle de conférence provisoire, l'atelier où se
trouvait intacte la statue sauvée du feu. Il
s'agissait en même temps de prendre toutes les
mesures pour engager la reconstruction du deuxième
bâtiment du Goetheanum auprès des autorités par
des autorisations, auprès des amis par des actes.
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L'organisation de la protection des bâtiments
encore existants était un impératif de l'heure.
Ces jours-ci, on ne savait pas encore si
l'incendie dévastateur était dû à des causes
techniques, par exemple un court-circuit de la
ligne électrique, ou à un acte sacrilège commis
par des adversaires malveillants. Le fanal de cet
incendie, visible de loin et dont la presse de
toute l'Europe a donné un écho retentissant, a
provoqué de fortes émotions chez les humains : les
voix de la tristesse, de l'amertume, de la
souffrance, de la volonté inébranlable de
construire dans d'innombrables cœurs humains, mais
aussi les voix de la haine, de la volonté
d'anéantissement, de la résistance malveillante.
Tout ce qui se passe d'extraordinaire sous l'effet
d'un puissant mouvement spirituel fait toujours
appel aux deux pôles du monde de l'âme humaine,
l'amour et la haine. Maintenant aussi, l'amour
doit être éveillé pour pouvoir rencontrer la haine
et s'y opposer. - Celui qui éduque à la bonté ne
doit pas la considérer comme un acquis. Oui, les
symptômes de l'époque montraient à quel point les
forces de la haine et le type des "mauvais
compagnons" que Goethe oppose à Faust étaient
encore puissants. Même s'ils menacent et grondent
parfois à distance, ils sont proches sans être
appelés à l'heure décisive. Sur la base des
'avertissements' de
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Rudolf Steiner au cours des années précédentes,
quelques personnes s'étaient déjà réunies pour
surveiller le chantier la nuit. Chaque jour de la
semaine, l'un d'entre nous avait fait le tour du
bâtiment pendant la nuit afin de pouvoir donner
l'alerte en cas de danger. Cela s'était avéré
efficace la nuit de l'incendie, car le foyer
d'incendie avait été immédiatement découvert, les
pompiers alertés et tout ce qui était humainement
possible mis en œuvre. Mais on croyait encore à
l'époque qu'une mauvaise parole ne devenait pas
une mauvaise action, on était parti de l'idée
justifiée qu'il fallait seulement veiller à ce que
les éléments ou les accidents de nature technique
ne causent pas de dommages et qu'ils puissent être
empêchés de le faire en cas d'urgence. Mais
maintenant, il fallait s'opposer non seulement à
la nature et aux éléments, mais aussi à la passion
humaine qui s'était enflammée, et il fallait
assurer la protection de ce qui existait encore,
afin de le sauver jusque dans des temps plus
calmes. C'est pourquoi j'ai proposé ces jours-là à
Rudolf Steiner la création d'une "garde" qui,
après avoir obtenu son accord, fut immédiatement
organisée et se composa d'abord d'une trentaine de
jeunes gens qui surveillaient jour et nuit les
bâtiments et les valeurs encore existants.
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L'esprit de communauté sociale et de camaraderie
qui, dans l'entourage de Rudolf Steiner,
permettait à chacun d'assumer sans plus toute
sorte de service pour la cause commune,
s'exprimait ici à nouveau de manière
symptomatique. Si des étudiants, des scientifiques
et des artistes acceptaient tout naturellement de
monter la garde de jour comme de nuit, par tous
les temps, c'était parce qu'ils étaient conscients
que ce service rendu à l'ensemble était aussi
précieux que toute autre participation à l'œuvre
commune. Au lieu de lire ou d'écrire des livres,
d'apprendre ou de créer, on se mettait en veille
pour un certain temps. Cette époque de la
fondation et de la mise en œuvre de l'organisation
de la garde au Goetheanum me laisse encore
aujourd'hui des impressions très fortes. Souvent,
Rudolf Steiner réunissait les gardiens autour de
lui pour une brève allocution, les remerciait pour
leur service et leur serrait la main, puis il
prononçait quelques mots sur les phénomènes de
l'époque et les exigences qu'elle pose. Dans son
livre de souvenirs "Heiliges Vermächtnis
(testament saint)", Fred Poeppig, qui faisait
également partie de ce cercle de gardiens, a
relaté ces réunions de manière belle et claire,
comme lorsque Rudolf Steiner dit aux
gardiens/veilleurs :
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« Vous
ne devriez pas seulement monter la garde
extérieure de nos bâtiments ici, vous
devriez vous sentir responsables en tant
que gardiens de la culture...".
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Il
planta alors dans notre âme deux mots
qu'il répéta souvent : ‘Veiller - et
avoir une attitude/mentalité de fer’
! »
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C'est à la vigilance, à l'intérieur comme à
l'extérieur, que conduisait toute son œuvre. C'est
pourquoi nous savions que nous n'étions pas
seulement des gardiens ou des pompiers, mais que
nous étions au service de cette œuvre. Ce sera
toujours un signe de la santé intérieure d'un
mouvement spirituel que de savoir si, à l'avenir
aussi, chacun
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sera prêt à assumer volontiers toute tâche de ce
genre, même si elle n'est pas prévue dans son
autre mode de vie.
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Il fut aussi très instructif de voir, à travers
un autre exemple, comment Rudolf Steiner se
positionnait par rapport à ce qui est au service
de la collectivité et à ce qui ne peut être fait
que par l'initiative et la responsabilité de
l'individu. Cette "garde" lui avait été proposée
et il l'avait approuvée parce qu'elle servait
l'intérêt général. Or, à cette époque, quelqu'un
qui ne le connaissait manifestement pas depuis
assez longtemps lui demanda s'il pouvait le
surveiller personnellement dans sa maison. Il a
refusé sèchement cela. L'auteur de la question
n'avait pas pensé qu'un tel service personnel ne
pouvait être rendu que sous sa propre
responsabilité et qu'il ne fallait pas, par une
question préalable, faire porter la responsabilité
à celui à qui le service était destiné. Certains
d'entre nous savaient que Rudolf Steiner
refuserait catégoriquement toute question de ce
genre, et comme nous savions en même temps qu'il
était alors menacé personnellement, nous sommes
tout simplement allés surveiller sa maison sans
poser de questions. Nous faisions cela deux par
deux chaque nuit, et c'est ainsi qu'il devait
inévitablement nous rencontrer un soir en rentrant
à la maison. Les premières fois, il n'a pas du
tout fait attention à nous, il est passé à côté de
nous comme si nous n'étions pas là. Ce n'est qu'au
bout de plusieurs semaines, lorsqu'il nous a de
nouveau croisés dans une pièce à une heure
tardive, qu'il nous a salués chaleureusement,
comme si notre présence allait de soi. Plus tard,
j'ai appris de lui que cela lui convenait, mais
uniquement parce que nous l'avions fait de notre
propre chef et que nous l'avions appliqué de
manière conséquente.
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Au bout d'un certain temps, lorsque les vagues
de l'agitation extérieure se sont apaisées dans le
monde, ce service a bien sûr été immédiatement cessé.
Car lorsque les relations avec l'environnement
devinrent si cordiales que de larges cercles de la
population s'engagèrent d'eux-mêmes comme forces
de protection et d'aide pour l'œuvre sur la
colline, en raison du destin commun et du grand
respect sans cesse croissant pour l'œuvre
inébranlable de Rudolf Steiner - il faut ici
remercier tout particulièrement la commune de
Dornach et son généreux et serviable maire, le Dr.
Bernhard Krauß -, cette garde du bâtiment avait
aussi achevé sa tâche et ceux qui y avaient
travaillé pouvaient à présent se consacrer
entièrement à leurs autres domaines d'activité.
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Comme nous l'avons déjà mentionné plus haut, le
bâtiment de la menuiserie avec sa salle provisoire
et l'atelier de Rudolf Steiner, où se trouvait la
statue qui n'était pas encore achevée à l'époque,
ainsi que son local de travail avaient
heureusement été épargnés par l'incendie, de sorte
que l'on put continuer à y travailler
immédiatement.
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Les lieux de travail de l'administration du
Goetheanum étaient alors installés dans plusieurs
maisons entourant le bâtiment, de sorte que leur
activité ne devait pas non plus être interrompue.
Le secrétariat, qui devait s'occuper de
l'organisation de l'entreprise et de la
correspondance, se trouvait encore à l'époque dans
la
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Maison Friedwart", où j'ai pu effectuer ce
travail pendant de nombreuses années avec Madame
M. Metzener, jusqu'à ce que nous déménagions dans
le nouveau bâtiment du Goetheanum, où Rudolf
Steiner avait prévu des locaux spéciaux pour cela.
Le bureau de construction se trouvait à nouveau
dans un autre bâtiment, la "maison des
vitraux(Glahaus)" déjà mentionnée, où E.
Aisenpreis, E. Binder, S. Ruschmann et d'autres
collaborateurs s'occupaient de l'administration
technique de la construction. Le "bureau des
congrès", créé plus tard notamment pour
l'organisation des congrès, a ensuite été repris
par le Dr. O. Fränkl. Le "service d'ordre"
restant, encadré par W. Moldenhauer et quelques
amis, a contribué pendant toutes les décennies à
maintenir vivante la bonne tradition de l'époque
de la fondation de la Bauwache (garde de
l'édifice) et a pu se consacrer à nouveau à la
belle tâche d'aider le flux de visiteurs lors des
congrès qui avaient à nouveau lieu et de
contribuer à l'harmonie extérieure et à la bonne
réussite des congrès.
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Au cours de ces premières semaines de l'année
1923, il fallut tout d'abord clarifier les causes
de l'incendie au cours de nombreuses négociations
avec les autorités compétentes, prendre les
décisions concernant l'assurance et entamer les
premières démarches pour rendre certaine la
reconstruction. Grâce à des enquêtes approfondies,
les autorités ont constaté que l'incendie n'était
dû ni à une faute personnelle, ni à des défauts
techniques (court-circuit de la ligne électrique,
etc.) et ont accordé la totalité de la somme
assurée. Celle-ci ne couvrait cependant qu'une
infime partie des énormes dégâts occasionnés, car
la construction de l'édifice s'était élevée à plus
de sept millions de francs, qui, comme nous
l'avons déjà expliqué, avaient été exclusivement
apportés par les dons des membres. Ce n'est donc
pas seulement toute une décennie de travail
bénévole et une valeur artistique inestimable qui
ont été détruites, mais aussi un très grand
dommage matériel. Le fait que Rudolf Steiner se
soit tourné directement vers la reconstruction
sans se laisser abattre par ces graves dommages,
et ce à une époque où les conditions extérieures,
tant spirituelles que matérielles, ne cessaient de
s'aggraver dans l'environnement, montre la
certitude intérieure qu'une telle œuvre née de
l'Esprit possède, même dans les temps les plus
difficiles, la force portante de se renouveler de
manière éternellement vivante et de réaliser
malgré tout son propre chemin de destin, même en
présence des plus grands obstacles extérieurs.
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C'était un symbole de son immense force de
concentration et de sa capacité unique à élever
l'action spirituelle au-dessus des vagues du
destin extérieur que, pendant ces semaines qui
étaient remplies pendant la journée par de
nombreuses démarches administratives et
organisationnelles difficiles et éprouvantes et
qui mobilisaient ses forces très fortement
sollicitées par les événements, il ait pu se
rendre quand même les soirs dans la salle de
conférence de la menuiserie, devant les membres
et, avec le même calme serein qui avait
caractérisé son action pendant toutes ces
décennies, il leur parlait dans un flux
ininterrompu de dons spirituels des résultats de
la recherche en science
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de l'esprit. C'est ainsi que nous l'avons vu,
ébranlé par la force des coups du sort et souvent
accablé par l'ampleur des problèmes et des tâches
qu'ils soulevaient, monter soir après soir au
pupitre de Dornach et parler, indépendamment des
turbulences de la situation extérieure, dans une
sérénité énergisante, de science de la nature,
d'histoire de l'esprit, de philosophie et de
christologie, de formation spirituelle et de
tâches temporelles à accomplir.
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Ces conférences de Dornach, tenues dans les
premières semaines de janvier après l'incendie,
ont donné une image de l'évolution de la vie
spirituelle et religieuse depuis le 4e siècle
après Jésus-Christ, de la détresse psychique qui a
rempli l'humanité depuis le 4e siècle, jusqu'à sa
rédemption par l'expérience du Christ, que le 20e
siècle doit nous apporter. Il a parlé des combats
spirituels de Giordano Bruno, de Jakob Böhme et de
Baco de Verulam, et de la résolution des énigmes
de la vie apparues depuis le Moyen-Âge par une
compréhension des pendants entre l'être prénatal,
l'être terrestre et l'être post-mortem des
humains. Il a illustré les voies par lesquelles le
vrai, le beau et le bon peuvent être redécouverts
dans la nature et dans l'humain par une
exploration de la structure de force suprasensible
de l'humain, qui le met en harmonie créative avec
les règnes élémentaires et les entités du cosmos
par le biais de son être physique, éthérique,
astral et Je. Il a éclairé les chemins d'évolution
de l'humain à travers la chute et l'élévation du
péché, à travers un réveil du sommeil des sens des
siècles passés vers l'éveil lumineux de la
conscience de l'esprit que notre époque exige
inexorablement. Avec une parole des jeux de Noël
"Stichl, lève-toi !", il a appelé les humains à
contribuer à ce que le sommeil spirituel confus et
onirique de l'humanité soit dissipé et à ce que
les temps difficiles soient maîtrisés. Il
s'agissait désormais plus que jamais de regarder
en face le démoniaque dans la pensée et l'action
de l'environnement et de contrer le déferlement du
mal à partir de la force de rayonnement d'un
centre de force construit dans l'exercice
spirituel.
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Après avoir ainsi assuré la continuité
spirituelle et pratique de l'activité à Dornach,
Rudolf Steiner partit en voyage à la fin du mois
de janvier afin de résoudre en tous lieux les
problèmes posés par la nouvelle situation du
destin et d'établir clairement le nouveau point de
départ sur lequel il faudrait désormais
construire. Comme pour l'humain individuel, de
tels événements du destin sont aussi pour un
mouvement spirituel l'occasion d'une rétrospective
et d'une prévision. C'est pourquoi Rudolf Steiner
a fait des conférences et des discours qu'il a
tenus fin janvier à Dornach et à Stuttgart une
rétrospective décisive et clarifiante. Car s'il
invitait les humains qui voulaient aider à
regarder en face les forces adverses dans le monde
et à s'y opposer, il faisait précéder chaque fois
de manière conséquente l'appel encore plus intense
à ce que chacun et la communauté s'examinent
d'abord eux-mêmes pour voir où pourraient s'être
introduites par effraction les forces d'entrave ou
les actions déviantes dans leurs propres
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rangs et entraveraient le développement. C'est
pourquoi Rudolf Steiner a prononcé à cette époque
les paroles les plus sérieuses, les plus dures et
les plus inconditionnelles de l'"examen de
conscience" à l'intention des membres et les a
invités avec amour, mais aussi avec une implacable
cohérence, à une rétrospective sans illusions. On
ne peut pas vraiment comprendre beaucoup de choses
dans l'évolution du mouvement avant et après
l'année 1923 si l'on n'accorde pas à cette
rétrospective, à laquelle Rudolf Steiner lui-même
invitait et contribuait alors avec tant
d'insistance, l'attention qui lui revient. Les
conférences et les discours qu'il donna le 26
janvier à Stuttgart sous le titre "Paroles de
douleur, de recherche de conscience, paroles pour
la prise de conscience de la responsabilité", le
30 janvier sur "La formation du jugement sur la
base des faits", les 6 et 13 février sur "Les
trois phases du travail anthroposophique" et les
27 et 28 février à l'occasion de l'assemblée des
délégués à Stuttgart, servirent avant tout à cela.
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Dans cette rétrospective, Rudolf Steiner, en
décrivant en détail les événements des dernières
années, est parti du fait que le rythme de
l'évolution de ce mouvement spirituel avait été, à
maints égards, tout à fait différent depuis son
début en 1902 jusqu'à 1919 environ, et qu'au cours
des années 1919 à 1922, toute une série d'éléments
nouveaux avaient influencé ce développement, ce
qui avait entraîné un changement considérable de
la situation interne et externe du mouvement,
apportant aussi bien des enrichissements positifs
que de graves dangers, des difficultés et des
dérives diverses.
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Alors que Rudolf Steiner, dans sa propre
activité, était toujours parti du noyau central de
la recherche spirituelle-scientifique,
l'anthroposophie, et que c'est à partir de là
qu'il avait transformé et fécondé les différents
domaines de travail, et que ce type d'activité
avait entièrement déterminé la ligne de conduite
intérieure et extérieure du Mouvement, de
nombreuses nouvelles forces étaient devenues
actives dans le Mouvement - en particulier depuis
1919 - qui, certes de bonne volonté, ont apporté
dans le Mouvement, pour ainsi dire de la
périphérie, leurs méthodes de pensée
scientifiques, leurs intérêts de vie pratiques et
leurs domaines de travail acquis dans le monde
extérieur, sans avoir d'abord suffisamment
transformé et réincarné leurs contenus à partir du
noyau essentiel de l'anthroposophie. C'est ainsi
que de nombreux corps étrangers spirituels sont
entrés dans l'organisme du mouvement et que
beaucoup de choses qui voulaient s'activer dans
cet organisme n'ont pas pu renaître de l'essence
de l'anthroposophie par catharsis et
transformation. Rudolf Steiner avait déjà rappelé
l'année précédente, lors de la rétrospective après
le Congrès de Vienne, "que le mouvement
anthroposophique a agi dès le début à partir de
l'ésotérisme". En raison de la forte croissance du
mouvement et de l'afflux de nombreux humains ayant
des intérêts particuliers pour certaines
disciplines scientifiques ou sociales ou pour
certaines professions de la vie, beaucoup de
choses étaient venues de l'extérieur, ce qui,
selon la façon dont cela se rattachait avec le
courant central
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de l'anthroposophie ou non, pouvait apporter un
enrichissement ou, au contraire, une distraction
et une fragmentation. C'est pourquoi Rudolf
Steiner a dit dans cette conférence à Stuttgart du
25 janvier 1923 :
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"Depuis
1919, dans le sillage du mouvement
anthroposophique, il s'est produit bien
des choses d'une autre manière que si
l'anthroposophie avait progressé dans la
même sorte de mouvement, dans la même
essence de mouvement qu'elle a observée
jusqu'en 1918. Il ne fait aucun doute
que l'anthroposophie est appelée à agir
dans les domaines les plus divers de la
vie, y compris bien sûr dans tous ceux
qui, en lien avec elle, ont été cultivés
de manière fructueuse depuis 1919 par
différents amis de l'anthroposophie.
Mais les événements extérieurs ont
conduit d'une certaine manière à ce que
les choses ne soient pas directement
extraites de l'anthroposophie, mais
qu'elles soient en quelque sorte fondées
et cultivées à côté de l'anthroposophie
- bien que pas du tout dans le sens
anthroposophique. Et c'est ainsi que
nous avons vu, depuis 1919, diverses
choses qui ont été cultivées - non pas
anthroposophiquement, mais à côté de
l'anthroposophie - dans un autre type de
mouvement que celui qui avait suivi de
manière élémentaire la poursuite du
mouvement anthroposophique jusqu'en
1918".
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Il utilisa ici la belle comparaison de la mère
et de ses filles et souligna le danger que les
filles oublient leur mère dans la poursuite de
leurs propres objectifs. Tous ces mouvements de
filles, le travail scientifique spécialisé, la
pédagogie, le mouvement de la triarticulation, le
mouvement pour le renouveau religieux, le
mouvement de la jeunesse, etc. étaient nés de la
mère "anthroposophie", mais dans le zèle de la
réalisation de leurs propres intérêts, ils
couraient parfois le risque d'oublier ou de
négliger leur origine, la source de vie d'où ils
provenaient et recevaient la vie. En s'isolant de
cette source de vie, ils ont emprunté des voies
qui les ont menés à s'isoler de l'ensemble du
courant spirituel et à perdre ainsi leur véritable
nature et leur mission :
|
"Car
nous ne devons pas devenir un cercle de
pédagogues, un cercle de rénovateurs
religieux, un cercle de scientifiques,
un cercle de jeunes, de vieux et de
moyens, nous devons être une communauté
anthroposophique consciente de ce dont
elle s'inspire et dont elle alimente au
fond ses mouvements-filles. Nous devons
en être fortement conscients !...
|
Puissiez-vous
entendre avec le sérieux qui convient ce
que j'ai dû vous dire aujourd'hui avec
un cœur profondément meurtri.
Puisse-t-il s'agir en vous d'une force
de travail, d'une volonté de travailler,
d'une volonté de s'unir précisément dans
le domaine du mouvement
anthroposophique. Il ne faut offenser
personne en lui disant qu'il est un
excellent membre du travail du Jour à
venir, de l'école Waldorf, ou qu'il
travaille de manière remarquable dans le
domaine du renouveau religieux ou dans
un autre domaine. Mais tous ceux-là - en
plus de ceux qui ne sont pas entrés dans
un domaine particulier - et aussi ceux
qui sont vieux et jeunes et au milieu,
tous, tous devraient prendre conscience
de la mère : la Société anthroposophique
elle-même, d'où tout cela doit jaillir
et dans laquelle tous les spécialistes
individuels doivent collaborer. Trop de
spécialistes, sans que cela ait été
remarqué de la bonne manière, sont
devenus grands parmi nous ; certains
sont si grands qu'ils sont déjà petits à
nouveau, parce qu'ils ont trop oublié la
Mère".
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Ces
paroles étaient des vérités fondamentales
et des avertissements que Rudolf Steiner a
donnés au mouvement qu'il a inauguré pour
tout l'avenir, car il y aura toujours le
danger que se forme, à partir
d'arrangements extérieurs, de concessions,
de compromis et d'intérêts particuliers,
un cercle de pédagogues, de rénovateurs
religieux, de scientifiques,
d'agriculteurs, de médecins, de personnes
voulant être actives socialement, de
jeunes et de vieux, etc. qui oublie la
mère, qui oublie la source commune, le
mouvement anthroposophique, qui le néglige
ou même le renie par commodité ou par
intérêt personnel. Ces "paroles de douleur
et d'examen de conscience", ces "paroles
pour la prise de conscience de la
responsabilité", Rudolf Steiner a demandé
de les inscrire profondément dans son cœur
pour toujours. Il soulignait :
|
"L'ensemble
de ce qui est aujourd'hui lié à
l'anthroposophie ne peut exister sans la
Société anthroposophique, il a besoin de
la Société anthroposophique comme
réceptacle. On peut être un excellent
professeur d'école Waldorf, un excellent
pédagogue, on peut aussi être un
excellent propagateur de
l'anthroposophie par la parole et par
l'écrit, mais on peut soustraire son
activité à l'entretien et au soin de la
Société anthroposophique, ou plus
généralement à l'action de
l'anthroposophie d'humain à humain...
Nous avons eu des gens énergiques et
enthousiastes dans le domaine du
mouvement de la triarticulation : en
travaillant dans le domaine du mouvement
de tri articulation, ils ont de plus en
plus retiré leur activité de la Société
anthroposophique proprement dite. Et
maintenant, nous sommes menacés par le
fait que dans le domaine du renouveau
religieux, des personnalités éminentes
agissent d'une manière peut-être tout à
fait brillante, et il pourrait se
produire à nouveau, et maintenant dans
un domaine particulièrement important,
qu'à la Société anthroposophique, les
forces soient à nouveau retirées ...
|
On
peut à son tour être un excellent
scientifique au sein de la Société
anthroposophique et ne pas tenir compte
de ses conditions de base en tant que
telles. En tant que scientifique, on
peut parfaitement transposer les
enseignements anthroposophiques à la
chimie, à la physique, etc. et on peut
être un aussi mauvais anthroposophe que
possible ... De sorte que ces
scientifiques parlent encore avec cette
approche, avec ce sous-entendu qu'ils
apportent de la chimie, de la physique,
etc., où il y a certes encore quelque
chose de l'humain en général, qui est
chimique, physique, biologique ou
juridique, mais qui est quand même très
éloigné de l'humain en général. - Mais
ce dont nous avons besoin, c'est que la
mère ne soit pas oubliée. Car si la
Société anthroposophique n'avait pas
cultivé l'anthroposophie pendant une
décennie et demie à partir du centre,
l'anthroposophie en tant que telle - les
scientifiques n'auraient pas pu
s'installer sur son sol.
L'anthroposophie leur a donné ce dont
ils avaient besoin. Ils devraient se
souvenir qu'ils doivent à leur tour
rendre, par leur collaboration à la
Société anthroposophique, ce qu'ils ont
trouvé pour la science à partir de
l'anthroposophie".
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Depuis
quelque temps, il avait souvent constaté
que des conférences scientifiques étaient
tenues par certains participants, alors
qu'elles auraient pu être présentées avec
succès dans n'importe quelle autre
université ou haute école, dont
|
513
|
les contenus ne sont pas nés de l'anthroposophie
à neuf à partir du fond, qui ne mènent pas de
l'anthroposophie à la science, mais ajoutent aux
connaissances scientifiques extérieures un
appendice plus ou moins anthroposophique ; qui
évitaient craintivement de placer les
connaissances et la terminologie de la science de
l'esprit au point de départ de leurs
considérations, mais qui croyaient devoir parler à
partir du langage courant des amphithéâtres et du
vocabulaire du monde extérieur, afin de satisfaire
les deux parties, mais qui, en fin de compte,
laissaient ainsi les deux parties insatisfaites et
ne les encourageaient pas. A cet égard, Rudolf
Steiner a dit :
|
"on
entend souvent des scientifiques de la
Société anthroposophique dire : nous
effrayons les non-anthroposophes lorsque
nous leur parlons sans plus du corps
éthérique ou astral. - Mais nous restons
stériles si nous critiquons les
non-anthroposophes sur leur terrain en
ne nous servant que des jugements qui
peuvent aussi se développer sur ce
terrain. On peut parler de corps
éthérique et de corps astral si on dit
pourquoi on fait ceci". …
|
"Une
autre chose qui nous pose de grandes
difficultés, c'est que l'impulsivité du
mouvement anthroposophique n'est pas
évaluée partout de manière correcte. On
peut tout simplement entendre ici ou là
des jugements qui renient totalement le
mouvement anthroposophique en le mettant
en parallèle avec ce qui doit être
remplacé par lui pour l'évolution de
l'humanité. Il m'est encore arrivé ces
derniers jours que quelqu'un m'a dit :
si l'on présente à telle ou telle
personne ce que donne l'anthroposophie,
même les praticiens les plus forts
l'acceptent, il suffit de ne pas leur
parler d'anthroposophie ou de
triarticulation, il faut les renier.
Vous voyez, c'est quelque chose qui a
été pratiqué par certains depuis de
nombreuses années. C'est la chose la
plus fausse que nous puissions faire.
Nous devons nous présenter partout dans
le monde sous le signe de la pleine
vérité, quel que soit le domaine, en
tant que représentants de l'essence
anthroposophique, et nous devons être
conscients que, dans la mesure où nous
ne pouvons pas le faire, nous ne pouvons
pas promouvoir le mouvement
anthroposophique. Toute prise de
position déguisée en faveur du mouvement
anthroposophique ne conduit finalement à
aucun salut".
|
De tels opportunismes et de telles erreurs
apparaîtront bien toujours ici et là chez certains
humains et seront défendus par eux, mais tôt ou
tard, ils conduiront toujours à la stérilité et à
la dérive. C'est contre cela que Rudolf Steiner
voulait mettre en garde et préserver une fois pour
toutes le mouvement spirituel et ceux qui s'en
sentent responsables.
|
Par une telle tendance à s'adapter aux
phénomènes du temps ou par les aspirations
personnelles de quelques collaborateurs, beaucoup
de choses trop actives, trop actives, beaucoup
d'"aménagements précipités", comme il les
appelait, avaient été introduites dans le
Mouvement depuis l'année 1919. On avait commencé
des choses que l'on n'a pas menées à terme, que
l'on n'a pas poursuivies, mais que l'on a
soudainement abandonnées pour longtemps ou pour
des années, pour les reprendre plus tard avec la
même précipitation. Il y a des humains qui
n'arrivent jamais à trouver le bon équilibre entre
l'inaction et la précipitation
|
514
|
Mais succombaient plutôt à l'un ou l'autre
extrême. Il manquait à certains collaborateurs la
démarche constante et continue de la progression,
qui seule peut correspondre au noyau ésotérique
d'un mouvement spirituel. Rudolf Steiner a tiré la
conclusion suivante pour de tels efforts :
|
C'est
ainsi que les difficultés se sont
multipliées à cause de ce que
j'appellerais les aménagements
extraordinairement précipités qui ont
été pris depuis l'année 1919, notamment
- il faut toujours le souligner - à
cause du fait que des personnalités ont
fondé toutes sortes de choses et n'ont
plus collaboré ensuite à ce qu'elles
avaient elles-mêmes fondé".
|
Dans
sa rétrospective et ses perspectives,
Rudolf Steiner opposait à ces dérives
inconséquentes d'efforts souvent motivés
par la bonne volonté mais par un excès de
force débridé, le noyau du mouvement à
partir duquel, même en ces temps
mouvementés, le courant ésotérique
"purement anthroposophique" avait été
cultivé et réalisé de manière conséquente,
en progressant continuellement et
tranquillement.
|
Dans ce contexte, il a décrit comment le
bâtiment du Goetheanum s'était révélé pour lui un
instrument fin qui indiquait infailliblement si ce
qu'un orateur apportait de l'extérieur s'accordait
avec les formes artistiques et organiques de cet
environnement ou si, inorganique et étranger, il
ne parvenait pas à s'intégrer à cette harmonie
(cf. p. 410). Dans sa rétrospective, il dit par
exemple de ce premier cours universitaire de
l'année 1920 :
|
"La
première série de conférences dans son
ensemble se révèle comme quelque chose
qui n'était pas tout à fait
organiquement issu de la même idée que
la construction elle-même. C'était comme
quelque chose d'introduit dans l'édifice
purement anthroposophique ... Les
personnalités scientifiquement formées
sont devenues des membres de la société.
La science a été leur chemin de vie et
leur éducation. L'anthroposophie est
devenue leur affaire de cœur. Ils s'en
sont inspirés pour leur science. C'est
ainsi que nous avons reçu des
explications scientifiques de
personnalités à la pensée
anthroposophique, avant que les
différents domaines de la connaissance
ne soient nés de l'anthroposophie" ...-.
|
Et
encore : "J'ai décrit dans
l'hebdomadaire "Das Goetheanum" comment,
par exemple pour l'art eurythmique, les
lignes du Goetheanum se sont prolongées
dans le mouvement de l'humain. Mais cela
devait être le cas pour tout au
Goetheanum selon les intentions
initiales ; - je laissai donc mon regard
spirituel errer sur la manière dont
cette architecture intérieure, cette
sculpture et cette peinture
correspondaient à ce que les orateurs
disaient du haut de l'estrade. Et là,
j'ai trouvé que tout ce qui était, dans
le meilleur sens du terme, un tableau
anthroposophique, où l'on parlait de
l'anthroposophie au sens le plus étroit,
s'accordait merveilleusement bien avec
le style architectural. Mais pour toute
une série de conférences, on avait le
sentiment que celles-ci ne pourraient
être tenues que lorsque le Goetheanum
serait parvenu à ériger toute une série
de bâtiments annexes, dont le style
architectural serait à son tour adapté à
ces études et considérations spéciales.
Le Goetheanum, au cours de ses presque
dix ans de destin, a vraiment vécu le
destin de la Société anthroposophique ;
et il a été facile de remarquer, en
ressentant l'harmonie ou la disharmonie
du style de construction avec ce qui a
été fait à l'intérieur, comment quelque
chose d'inorganique est en fait entré
dans le courant même du mouvement
spirituel anthroposophique".
|
515
|
Il a ensuite évoqué l'activité de Mme Marie
Steiner et d'Albert Steffens, qui ont donné à ces
manifestations ce qui est issu de ce noyau
essentiel et en lien organique avec lui, comme un
exemple de la manière dont on agit au meilleur
sens du terme à partir de l'essence et de la
source de l'anthroposophie :
|
"Les
manifestations de ce type comprenaient
toujours des représentations
d'eurythmie. On se rendait compte à
cette occasion que l'édifice exigeait
que les connaissances qui y étaient
présentées soient transformées en un
tout par l'art. L'intérieur du
Goetheanum ne semblait pas tolérer un
cycle de conférences qui ne serait pas
complété par des éléments artistiques.
Je crois que l'on ressentait comme une
nécessité le fait que Madame Marie
Steiner, du haut de l'orgue, insère son
art de la récitation et de la
déclamation dans les conférences.
|
Personnellement,
j'ai toujours eu le plus grand plaisir à
entendre Albert Steffen du haut de la
tribune du Goetheanum. Ce qu'il dit veut
toujours être ressenti sous des formes
plastiques. Il est comme un sculpteur de
la langue, un sculpteur qui taille le
bois. Je percevais une harmonie entre
les formes de construction et ses
sculptures linguistiques, qu'il plaçait
dans la construction de manière à la
fois réfléchie et sûre."
|
Il y avait déjà là le noyau et le germe à partir
desquels, à la fin de cette année riche en
décisions, la nouvelle constitution saine et
organique de ce mouvement spirituel et de la
Société anthroposophique universelle pouvait
naître.
|
Dans une vue d'ensemble de tous les phénomènes
positifs et négatifs, rectilignes et aberrants,
tels que le cours du destin de tout mouvement
spirituel en expansion doit nécessairement les
apporter, Rudolf Steiner décrivit encore une fois
en images vivantes, dans une conférence du 6
février 1923, "les trois phases du travail
anthroposophique", telles qu'elles s'étaient
développées jusqu'alors. Les événements décrits
jusqu'ici depuis 1902 permettront de comprendre
facilement ce qui est à nouveau évoqué dans ce
contexte. Dans cette conférence, il a caractérisé
comme première phase l'époque de 1902-1909, où, à
côté du développement et de l'élaboration de
l'anthroposophie, de la propre recherche
spirituelle-scientifique, la tâche a aussi été
accomplie "d'abord d'opposer à ce qui existait
dans la Société théosophique - et c'était la
réception traditionnelle de sagesses orientales
très anciennes - la spiritualité de la
civilisation occidentale centrée sur le Mystère du
Golgotha". Nous avons décrit cette phase en détail
dans ce qui précède. Rudolf Steiner a dit de la
deuxième époque, qui pouvait alors s'appuyer sur
la substance fondamentale de la précédente, sur
les connaissances du monde spirituel, du destin et
de la réincarnation, sur les vérités et les
intuitions religieuses, sur les premières
impulsions artistiques et sociales :
|
"Cette
deuxième phase du mouvement
anthroposophique avait donc comme
prémisses les enseignements les plus
importants sur le destin et les vies
terrestres répétées, elle avait le
mystère du Golgotha sous un éclairage
spirituel qui était en accord avec la
civilisation du présent. Il avait en
outre une interprétation des évangiles
qui permettait à la tradition
d'apparaître à nouveau en accord avec ce
que l'on peut encore saisir aujourd'hui
par le
|
516
|
Christ
vivant, présent et agissant. Dans la
deuxième phase, qui a duré jusqu'en 1916
ou 1917, on devait d'abord, je dirais,
observer tout ce qui est la civilisation
scientifique et pratique extérieure du
présent. Il fallait montrer comment
l'anthroposophie pouvait être harmonisée
avec ce qui est aujourd'hui
scientifique, ce qui est aujourd'hui
artistique, bien sûr dans un sens plus
profond, et ce qui est aujourd'hui la
vie pratique...
|
Un
autre aspect de cette phase a été le
développement de l'artistique. C'est à
peu près au milieu de cette phase qu'est
apparue l'intention de mettre en scène
le Goetheanum, le bâtiment de Dornach.
Ce qui a été donné artistiquement dans
les Mystères s'est étendu à
l'architecture, à la sculpture et à la
peinture. S'y est ajouté l'eurythmique,
dont j'ai souvent pu caractériser
l'essence. Et tout cela a jailli en
quelque sorte de la source qui venait
d'être ouverte par les chemins que j'ai
esquissés dans le livre "Comment
acquérir des connaissances des mondes
supérieurs", mais suffisamment pour que
quiconque le veuille puisse se faire une
idée de la manière dont on doit suivre
de tels chemins".
|
Lorsque, au cours de la troisième phase, de 1916
à 1922, ces connaissances tirées de la "pure
anthroposophie", de la recherche
spirituelle-scientifique, furent diffusées par lui
dans l'environnement et transposées dans la
pratique de la vie, alors, à côté des nombreuses
personnes qui, à partir du noyau central,
développaient organiquement cette action dans
l'environnement, apparurent dans les dernières
années de cette époque quelques autres éléments
dans le mouvement qui n'avaient pas encore trouvé
ce lien organique avec le tout et le juste
équilibre entre compréhension et action. Rudolf
Steiner disait à ce propos :
|
"Il
était maintenant arrivé qu'un certain
nombre de personnalités voulaient faire
ceci ou cela, voulaient le faire
d'elles-mêmes et le faisaient... de
sorte qu'au sein du mouvement
anthroposophique, toutes sortes de
communautés autres que celle qui est
anthroposophique à l'origine se sont
créées".
|
Reconnaître ces éléments inorganiques et les
éviter à l'avenir n'est possible, selon lui,
|
"si
ceux qui y travaillent, par exemple
comme scientifiques, se souviennent
qu'ils ne doivent pas oublier
l'anthroposophie au-dessus de la
science, mais qu'ils doivent justement
couronner la phase la plus récente de la
science par l'anthroposophie... Ceux qui
travaillent comme enseignants ont une
tâche similaire. Et en particulier, ceux
qui sont actifs en tant que praticiens
auraient une tâche similaire... Combien
d'oppositions, par exemple, le
mouvement de la triarticulation a
apporté au mouvement anthroposophique
parce que le mouvement de
triarticulation n'a pas su se placer
sur le terrain anthroposophique... Il
en va de même dans d'autres domaines. Ce
dont nous devons tenir compte, c'est que
l'anthroposophie est la mère de ce
mouvement... Il ne peut y avoir
séparément un mouvement d'école Waldorf,
un mouvement pour la vie spirituelle
libre, un mouvement pour le renouveau
religieux... mais tout cela ne peut
s'épanouir que si cela se sent à
l'intérieur du mouvement mère, le
mouvement anthroposophique. Je sais
qu'en fin de compte, c'est quand même ce
qui est dit dans tous les cœurs pour
tous ceux qui veulent sincèrement le
mouvement anthroposophique" !
|
517
|
Si, dans cette phase, certains cercles avaient
"oublié l'anthroposophie dans un certain sens par
rapport à toutes sortes de mouvements
individuels", comme il l'a dit, il était
maintenant nécessaire de le reconnaître, de
l'éviter à l'avenir et de retrouver de tous côtés
la totalité de l'organisme global de ce mouvement
spirituel. La plupart des membres et des
collaborateurs avaient parfaitement reconnu et
respecté cette tâche d'action organique et
constante à partir des lois spirituelles de la
totalité. Mais il se trouve aussi de temps en
temps dans chaque mouvement des individus qui,
soit par des forces de volonté indomptées, soit
par une dose d'ambition encore apportée avec, soit
par une disposition au compromis, soit par un
manque de compréhension du sens et de la
signification de l'ensemble et de l'unité d'un tel
mouvement spirituel, soit par une disposition et
un penchant sentimental unilatéral, ne peuvent pas
encore trouver le juste équilibre et la
collaboration des forces et des tâches et peuvent
ainsi provoquer toutes sortes de perturbations et
de partialités dans le cours du destin de
l'ensemble.
|
Rudolf Steiner avait observé ces développements
pendant un certain temps et les avait laissés se
développer librement, afin que ceux qui y
aspiraient apprennent eux-mêmes, en tant
qu'humains libres, ce qui en résulterait. Mais le
temps était venu de réveiller au maximum les
forces de la conscience et de se concentrer à
nouveau entièrement sur le noyau essentiel de ce
mouvement spirituel. Dans ce contexte, il parla de
la nécessité de se consacrer désormais entièrement
à ce qui est central dans l'anthroposophie, car ce
sont précisément ces contenus de l'anthroposophie
qui "se présentent comme un besoin de l'âme d'un
nombre toujours croissant d'humains" :
|
"Cela
exige que je réponde aux exigences
accrues de l'entretien du besoin
anthroposophique plus que cela n'a pu
être le cas depuis que des institutions
pratiques de diverses sortes se sont
formées par les objectifs des amis de
notre cause ... Pour un délai
relativement court, j'ai dû répondre aux
souhaits des amis. Mais de même, je dois
maintenant me placer du point de vue que
je n'ai la permission d'agir qu'à
l'intérieur de ce centre de la vie
anthroposophique avec ses effets
artistiques et pédagogiques".
|
Rudolf Steiner a pu rappeler ici que, même dans
les époques les plus tumultueuses de ces années,
il avait continuellement poursuivi "la
représentation directe du monde spirituel". Et
comme nous le savons par les événements et les
étapes de développement des années passées, c'est
justement dans ces temps les plus difficiles des
années de guerre et d'après-guerre qu'il avait
poussé au plus haut point l'exploration et la
représentation des faits spirituels et les avait
transmis à l'environnement par la parole et par
l'action. Cette substance et cette force
spirituelles étaient là, et si le mouvement
lui-même s'y consacrait de manière concentrée et
sans se disperser, il était à la longue à la
hauteur de toute opposition.
|
Rudolf Steiner avait déjà réfléchi à l'attitude
à adopter face à l'adversité l'année précédente,
lorsque les conditions des années 1919-22 avaient
entraîné une augmentation constante des attaques
et que toujours de nouveau, en partie aussi
|
518
|
de ses propres rangs, a été contraint de
s'opposer à ces attaques perpétuelles par une
telle défense justement, a déclaré que ce serait
la plus grande erreur s'il s'y laissait prendre.
Car c'est précisément la tendance cachée, mais
consciente, des forces maléfiques à l'œuvre
derrière cette opposition, de vouloir entraîner le
chercheur de l'esprit dans des affrontements
négatifs permanents, des défenses et des défenses,
afin de l'empêcher de faire de la recherche
spirituelle, du travail positif et fructueux.
Lui-même ne tomberait pas dans ces pièges, mais
poursuivrait imperturbablement son propre chemin.
Bien sûr, il y a des moments décisifs où il s'agit
d'ôter de toutes ses forces le masque de cette
opposition et de rendre visible ce qui se cache
derrière. Il faut alors le faire avec clarté et
cohérence, mais au niveau spirituel. Mais il ne
s'est jamais laissé contraindre à l'entraîner
continuellement dans cette sphère de défense et
d'attaque.
|
En effet, face à un certain type d'adversaires
de bas niveau, Rudolf Steiner a utilisé une fois,
alors qu'il devait être poussé à une confrontation
procédurale avec de telles personnes, une
comparaison drastique mais pertinente : un humain
qui, lors d'une promenade, entre par mégarde en
contact avec un objet naturellement sale, par
exemple un cochon, ne va pas pour autant
poursuivre le cochon, car il ne peut pas être
autrement que sale par nature. Il faut l'accepter
comme un fait et éviter tout contact ultérieur
dans la mesure du possible.
|
Et en ce qui concerne le reste de l'opposition,
il dit encore une fois dans sa conférence de
février 1923 :
|
"Une
grande partie des opposants est en fait
constituée de telle sorte qu'elle vit
dans des contextes de vie très précis.
Elle a par exemple étudié ici ou là
telle ou telle chose ; il est d'usage de
penser de telle ou telle manière sur
telle ou telle chose ; du fait qu'elle
doit penser de telle ou telle manière,
elle doit devenir un adversaire de
l'anthroposophie. Elle ne sait pas du
tout pourquoi elle doit le devenir, mais
elle doit le devenir parce qu'elle est
inconsciemment attachée à ce qui l'a
élevé, à ce qu'elle a vécu ; c'est ainsi
qu'il en est intérieurement. -
Extérieurement, il est évident que pour
la prospérité ou la ruine de ce qui a
été fondé avec la société
anthroposophique, de tels adversaires
doivent être écartés du champ de la
manière correspondante.
|
Mais
les personnalités dirigeantes de
l'opposition savent très bien ce
qu'elles veulent. Car parmi eux se
trouvent ceux qui connaissent bien les
lois de la recherche spirituelle - même
si c'est d'un autre point de vue que
celui de l'anthroposophie - et qui
savent que le meilleur moyen est de
bombarder continuellement celui qui a
besoin de calme pour faire des
recherches spirituelles d'écrits et
d'objections adverses, afin qu'il soit
détourné de sa recherche spirituelle.
Car ils savent très bien que la
réfutation permanente des adversaires ne
peut pas s'accorder avec la recherche
spirituelle. Ils veulent vous jeter des
bâtons dans les roues en vous opposant
ces choses. Ces gens, qui savent en fait
ce qui est important, ne se soucient pas
tant de ce qui est écrit dans les livres
de leurs adversaires, mais que ces
livres soient jetés à la tête du
chercheur de l'esprit. Et ils tiennent
particulièrement à ce que, par le biais
de
|
519
|
ruses et de moyens similaires,
ils le contraignent à se défendre
lui-même. Ces choses doivent tout de
même être considérées en toute
objectivité".
|
A cet égard aussi, Rudolf Steiner invitait donc
à reconnaître et à éviter le manque de
discernement et donc les réactions erronées qui
s'étaient produites en maints endroits au cours
des années précédentes.
|
Lorsque, lors d'un débat sur cette question,
quelqu'un fit remarquer le danger de destruction
du mouvement par l'opposition, il répondit :
|
"On
a dit que le mouvement anthroposophique
pouvait être détruit par les opposants.
Il ne peut pas l'être. Les adversaires
peuvent constituer le plus grand danger
pour la société anthroposophique, pour
moi-même personnellement, etc. etc. Mais
le mouvement anthroposophique, il ne
pourra lui être fait aucun mal, il
pourra tout au plus être arrêté par les
adversaires".
|
Il savait que l'essence "anthroposophie" était
suffisamment liée aux forces de la sphère
terrestre pour que les adversaires puissent certes
l'entraver et la combattre, mais jamais l'empêcher
de progresser vers l'avenir.
|
Après avoir effectué, lors de ces conférences de
fin janvier à février 1923, avec amour et sérieux,
sans compromis et de manière conséquente, une
sorte de nettoyage général de la sphère des forces
au sein du mouvement et vis-à-vis de l'opposition,
il pouvait maintenant se consacrer entièrement aux
grands actes qui ouvraient une nouvelle ère de
l'évolution et qui étaient prédestinés à l'année
1923. Avant les impulsions annonçant les futures
tâches ésotériques du mouvement qu'il donna à
Dornach à Pâques et à Noël 1923, il introduisit
ces nouvelles étapes de développement dans les
conférences du soir de Dornach de février et mars
1923, dans lesquelles il parla d'abord des
transformations historiques de l'activité
spirituelle des anciens lieux de mystères aux
centres de travail spirituels actuels ; sur les
impulsions morales qui, en tant qu'actes d'entités
spirituelles, se répercutent dans cette évolution
et jusque dans l'organisation psycho-corporelle de
l'être humain ; sur le renversement de la
situation spirituelle de l'être humain vis-à-vis
de l'univers depuis le tournant du siècle et sur
la création d'un nouveau monde au XXe siècle, la
création d'une nouvelle unité entre la science,
l'art et la religion. Il est caractéristique qu'à
cette époque, consacrée à la création d'une
nouvelle harmonie de la vie communautaire, Rudolf
Steiner se soit particulièrement tourné, dans la
thématique de ses conférences, vers les lois
spirituelles de la musicalité. Ainsi, dans les
conférences des 7 et 8 mars à Stuttgart, il donna
deux conférences fondamentales pour l'essence et
l'exercice de la musicalité sur "L'expérience
sonore de l'humain" et mena ensuite ces réflexions
jusqu'aux sources ésotériques de l'harmonie et de
la musicalité dans l'organisme global de l'univers
dans la conférence de Dornach du 16 mars sur "Le
monde des hiérarchies et le monde des sons".
|
Même pour celui qui a pu observer l'inépuisable
diversité du savoir et du savoir-faire de Rudolf
Steiner dans tant de domaines, c'est à nouveau une
expérience d'émerveillement que de voir comment,
dans ces conférences, il dominait de la base
l'essence, l'histoire,
|
520
|
la thématique et la technique de la création
musicale et maintenant aussi pour la musique,
donnait le matériel de connaissance pour les
récepteurs et les interprètes dans ce domaine. Il
a tout d'abord donné un aperçu des étapes
concrètes de l'évolution de l'expérience sonore
humaine au cours de l'histoire*, par exemple des
transformations structurelles de l'humanité par le
passage de l'expérience de la quinte à celle de la
tierce, à la sensation de l'octave. Il a ensuite
expliqué comment, au cours de l'évolution, de
telles métamorphoses de l'expérience musicale
étaient liées à la formation de l'organisation
spirituelle et de la conscience-Je de l'humanité
et a aussi caractérisé les influences sur l'humain
nerveux, l'humain rythmique et l'humain des
membres. Il expliqua leur importance dans la
pédagogie pour les différentes classes d'âge, les
bienfaits des ambiances majeures et mineures pour
les forces de l'âme de l'humain en devenir, et
montra aussi aux musiciens créatifs la voie à
suivre pour trouver à notre époque, grâce à la
formation des forces de l'imagination, de
l'inspiration et de l'intuition, l'accès aux
sphères spirituellement productives du musical, à
la source originelle de la composition.
|
Dans sa conférence de Dornach du 16 mars, il a
aussi rappelé comment, aux premiers stades de
l'évolution de l'humanité, "l'expérience musicale
coïncidait avec une expérience directement
religieuse", qu'à l'époque, il y avait encore une
conscience de la manière dont l'action de la
divinité, des hiérarchies , s'exprimait dans
l'expérience de la septième, de la quinte, de la
tierce, etc. comment les humains vivaient alors
encore les "acclamations cosmiques des dieux" et
les "lamentations cosmiques des dieux", comment
cette activité hiérarchique dans les sphères
cosmiques s'est imprimée dans l'organisation
humaine au cours des âges. Et comment l'humain,
qui a de plus en plus perdu cette expérience au
cours du siècle dernier et qui risque donc de
devenir improductif dans le domaine musical, peut
à nouveau se relier consciemment à ces sphères par
la connaissance et la formation spirituelles. Ici
aussi, nous ne pouvons que renvoyer le lecteur à
l'étude personnelle de toutes les idées créatives
contenues dans ces conférences et dans celles
consacrées au même thème (voir aussi p. 83, 264,
267). De telles suggestions de Rudolf Steiner sont
aujourd'hui déjà à l'origine d'un grand nombre
d'élèves musiciens qui ont offert à notre époque
une multitude de compositions de grande valeur.
|
En plus de ces conférences menant à la sphère
lumineuse du musical, il a aussi parlé à Dornach,
ces dernières semaines, du pôle opposé de telle
|
* Rudolf Steiner : "Das Ton-Erlebnis
des Menschen" (L'expérience sonore de l'homme),
"Das moralische Erleben der Farben- und Tonwelt"
(L'expérience morale du monde des couleurs et des
sons), "Die Welt der Hierarchien und die Welt der
Töne" (Le monde des hiérarchies et le monde des
sons) ; voir aussi : Dr G. Wachsmuth : "Die
ätherische Welt in Wissenschaft, Kunst und
Religion" (Le monde éthérique dans la science,
l'art et la religion) chap. X, "Mysterien- und
Geistesgeschichte" (Histoire des mystères et de
l'esprit) chap. IX ; Walter Blume : "Musikalische
Betrachtungen im geisteswissenschaftlichen Sinne
(Considérations musicales dans le sens
spirituel-scientifique)" ; Prof. Hermann Beckh :
"Das geistige Wesen der Tonarten (L'être spirituel
des sortes de son )" ; Dr. H. E. Lauer : "Die
Entwicklung der Musik im Wandel der Tonsysteme
(L'évolution de la musique dans la transformation
des systèmes de son)" ; H. Ziemann :
"Polaritäten-Metamorphose in der Tonskalen-Bildung
(Métamorphoses de polarité dans la formation
d'échelles de sons)", Gäa-Sophia, vol. II ; Erich
Schwebsch : "Anton Bruckner. Ein Beitrag zur
Erkenntnis von Entwicklungen in dcr Musik (Une
contribution à la connaissance de l'évolution de
la musique)" ; A. G. Huber : "Auf den Geisteswege
von (Sur le chemin spirituel de) Joh. Seb. Bach et
L. van Beethoven" ; entre autres.
|
521
|
harmonie dans le cosmos, sur les phénomènes de
décadence et de destruction dans l'organisme de
l'humain et dans les règnes de la nature. Il
illustra comment, par la matérialisation du
langage, l'humain s'isole de plus en plus des
puissances spirituelles qui étaient et sont
toujours actives dans le langage. Il a aussi
décrit la nature de la dysharmonie dans les règnes
inférieurs de la nature, a parlé par exemple des
effets des plantes toxiques, de leur influence sur
l'organisation humaine et dans l'art de la
guérison, et a ensuite mené cette vue d'ensemble
jusqu'à la compréhension du danger qui menace
l'ensemble de l'organisme de la Terre dans son
évolution future par l'intellectualisme étranger à
l'esprit de l'homme terrestre actuel. L'aperçu de
l'imbrication intime de tous ces phénomènes, des
actes des dieux et des humains, a donné à celui
qui a écouté ces conférences et les a assimilées
une conscience de responsabilité qui s'est
orientée avec la même intensité vers l'intérieur
et l'extérieur.
|
Fin mars, Rudolf Steiner se rendit une nouvelle
fois de Dornach à Stuttgart pour participer, du 25
au 29 mars, à un "congrès artistique et
pédagogique" de l'école Waldorf libre, auquel il
contribua lui-même par deux conférences du soir
sur "Pédagogie et Art" et "Pédagogie et Morale",
et par des mots d'introduction à une soirée de
récitation de Mme Marie Steiner, ainsi qu'à une
représentation d'eurythmie pour adultes et à une
représentation d'eurythmie pour enfants.
|
Comme symptôme caractéristique pour rappeler les
conditions extérieures de l'époque, il convient de
mentionner qu'à cette époque, le glissement de
l'environnement dans le chaos économique était
déjà si avancé qu'un billet d'entrée pour de
telles manifestations devait être estimé à 5000
marks, un billet d'entrée pour une représentation
artistique à 300-1000 marks. Peu de temps après,
en juin 1923, un cours d'eurythmie coûtait déjà 60
000 marks, et ainsi de suite, et la chute dans
l'abîme était évidente. L'humanité se trouvait
alors à un stade où la dysharmonie, le chaos et
l'incapacité à maîtriser la vie devenaient les
dominantes de l'époque.
|
C'est pourquoi il était tout à fait judicieux et
opportun que Rudolf Steiner, à Pâques 1923 à
Dornach, ramène la conscience des humains qui
voulaient entendre à ce noyau ésotérique et la
concentre là où elle pouvait se renforcer et se
consolider à la source originelle, et qu'au lieu
de se perdre dans le chaos d'un environnement
fragmenté, ils pouvaient recevoir cette "communion
spirituelle" avec les puissances créatrices qui
avaient construit et guidé avec sagesse le monde
cosmique et terrestre, jusqu'à ce que l'humain
s'isole d'elles dans son aveuglement. Il avait
parlé de cette communion spirituelle comme d'un
acte ésotérique de l'humain se formant lui-même et
se reconnectant avec le monde spirituel par ses
propres forces lors de sa dernière conférence dans
le premier bâtiment du Goetheanum à Noël dernier
(voir page 502). Or, à Pâques, l'idée de la
résurrection devait être vécue, non seulement par
tradition, comme consolation de la foi, ou par
habitude de fêtes annuelles qui laissaient intacte
la vie du reste de l'année, mais comme
|
522
|
une pensée de la résurrection qui s'enracine
dans la connaissance de la sagesse du divin et de
son œuvre vivante, la nature et l'humo, et qui
peut donner l'impulsion à une action conforme à
l'esprit. Les conférences de Pâques de Dornach de
l'année 1923 étaient consacrées au thème : "Le
cycle annuel et les quatre grandes périodes de
fête de l'année".
|
Ces conférences, qui ont fait passer
l'inauguration du culte spirituel des saisons de
fête au Goetheanum à un nouveau stade de
développement, partaient de la considération du
cours de l'année comme un puissant "processus de
respiration de la terre", spirituel et
organiquement vivant, et ont conduit, à partir de
cette compréhension, à un culte des fêtes
annuelles qui donnera la force intérieure et la
direction spirituelle à la structure sociale
fondée sur l'esprit du cours de la vie future,
afin d'introduire peu à peu, dans la dysharmonie
de l'environnement, l'harmonie et l'objectif de la
direction spirituelle du monde. Nous ne pouvons
ici qu'évoquer en quelques points la substance de
la connaissance et l'action ésotérique de ces
conférences de Pâques de Dornach, mais elles sont
aussi devenues accessibles à l'étude depuis lors.
Rudolf Steiner partait à nouveau de processus
naturels observables pour ensuite dévoiler le
spirituel qui se manifeste en eux. Goethe avait
déjà parlé de manière allusive d'une "respiration
de la terre" et Rudolf Steiner s'est penché
concrètement sur les rythmes et les forces qui se
manifestent dans cet énorme processus de
respiration. Nous avons déjà mentionné les
premiers pas de connaissance sur ce chemin dans ce
qui précède (voir page 348) et c'est pourquoi nous
abordons ici directement les processus dans le
monde élémentaire et cosmique-spirituel que les
humains, dans la sagesse originelle des époques
passées, associaient aux saisons de consécration
et de fête au cours de l'année. Les solstices
d'été et d'hiver n'étaient pas seulement pour eux
un problème astronomique extérieur, mais ils
connaissaient les subtiles transformations
matérielles, psychiques et spirituelles qui
s'opèrent dans la nature et dans l'humain à ces
moments de l'année. La recherche spirituelle
d'aujourd'hui peut à nouveau accéder à ces subtils
changements dans la structure de l'âme. Alors
qu'en été, la terre a rayonné ses forces dans
l'environnement, les a expirées, et a ainsi
provoqué la plénitude des phénomènes végétatifs,
en hiver, elle les retire à nouveau dans la terre
protectrice, les concentre à l'intérieur et
retient son souffle au plus profond de l'hiver,
avant de recommencer au printemps le processus
d'expiration, le rayonnement*. Rudolf Steiner
décrivit alors l'intuition pleine de sagesse qui,
en ces temps plus clairvoyants, avait conduit à
placer la fête de la Nativité précisément à la
saison où la terre retient pour ainsi dire son
souffle, où elle est concentrée dans son être
propre :
|
C'est
le moment où l'on place à juste titre la
naissance de Jésus, parce que la Terre
est alors en quelque sorte en possession
intérieure de toute la force de son âme.
Et en naissant à ce moment-là, Jésus est
né d'une force terrestre qui a fait
naître tout le psychisme/ce qui est
d'âme de la Terre
|
* Rudolf Steiner : "Le cycle annuel
et les quatre grandes périodes de fête de l'année"
; voir aussi à ce sujet : G. Wachsmuth : "Les
forces éthériques de l'image dans le cosmos, la
terre et l'homme".
|
523
|
porte
en elle. Et c'est un sens profond
qu'ont, à l'époque du mystère du
Golgotha, les initiés qui étaient encore
dignes de l'ancienne initiation, un sens
profond que ces initiés ont lié à la
vision qui fait tomber la naissance de
Jésus dans ce moment d'inspiration
terrestre, de retenue du souffle
terrestre".
|
A l'époque de l'apparition du Christ, "une
grande métamorphose spirituelle et d'âme traversa
tout l'univers des mystères" et transforma les
anciens cultes, célébrations et actes de
consécration. Alors qu'à l'époque précédente, le
moment propice pour la liaison cultuelle avec les
puissances essentielles du monde se lisait dans
les constellations du soleil, de la lune et des
étoiles, à l'horloge universelle, on savait
désormais que ces puissances et forces créatrices
étaient également liées à la Terre elle-même, et
les périodes de fête du cœur de l'hiver et du
printemps devinrent, à partir de la vision de
processus spirituels réels, la célébration
annuelle de la naissance du Christ à Noël et de la
résurrection à Pâques. On reconnaissait "la
signification cosmique de la naissance de Jésus",
on savait que "si Jésus naît, il naît à une époque
où la terre ne parle en quelque sorte pas avec les
cieux, où la terre est entièrement repliée sur
elle-même avec son essence". Mais lorsque, à
l'époque de l'équinoxe de printemps, avec
l'ascension de l'orbite solaire, "les forces de
l'âme de la terre se déversent dans le cosmos",
lorsqu'elles se préparent "à recevoir ce qui est
solaire", c'est le temps de la résurrection, de la
fête de Pâques. Lorsqu'en juin, au solstice d'été,
les forces terrestres sont entièrement expirées
dans l'immensité, lorsque "l'âme de la terre est
imprégnée de la force du soleil, de la force des
étoiles", c'est le temps de la consécration de la
fête de la Saint-Jean. Et l'inspiration, la
concentration des forces terrestres en automne
conduit à nouveau à ce moment du cycle annuel où
la conscience de l'humain s'associe chaque année à
l'événement de la naissance de l'enfant Jésus sur
terre.
|
En raison des changements qui se sont produits
dans le domaine des mystères et de la connaissance
de l'esprit au cours du dernier tiers du siècle
dernier et que nous avons présentés dans ce qui
précède à l'aide des conférences de Rudolf Steiner
(cf. pages 335, 385/86), la tâche de reconnaître
et de réaliser l'aspect contemporain de
l'introduction d'une nouvelle fête annuelle,
l'inauguration de la fête de Saint-Michel à
l'automne, cette fête qui inscrit et consacre
chaque année la défaite du dragon par l'archange
Michel dans les grands rythmes du cours de l'année
comme un événement touchant le cosmos, la Terre et
l'humain. - Rudolf Steiner a ensuite décrit en
détail comment, dans la polarité de l'été et de
l'hiver, l'union avec la force du Christ à Noël
s'oppose à la menace de domination des puissances
ahrimaniennes hostiles au Christ qui, en été,
c'est-à-dire dans ces périodes du cycle annuel où
la terre s'abandonne entièrement au naturel et au
végétal, déploient aussi pour l'humain leur
surpuissance menaçante. Lorsque cette sagesse
originelle parlait du combat de Michel contre le
dragon, elle faisait allusion à la victoire que
cette entité de Michel avait remportée autrefois
sur
|
524
|
les hordes ahrimaniennes. Dans des conférences
antérieures, Rudolf Steiner avait présenté cet
événement dans les mondes spirituels, qui s'était
déroulé avant le tournant du siècle, et il
montrait maintenant comment, dans le grand rythme
du cours de l'année, dans le processus de
respiration de la Terre, l'heure d'automne est
l'heure juste pour diriger la conscience dans une
consécration festive sur cet acte de Michaël. Car
c'est cette puissance mondiale qui vainc les
puissances ahrimaniennes surpuissantes pendant
l'été et qui est en même temps appelée à préparer
la liaison avec la force du Christ que l'humain
fait ensuite resplendir en lui au temps de Noël et
de Pâques. C'est donc surtout à l'automne que la
force du Christ vient au secours de l'humain, que
la Terre doit être purifiée des forces contraires
et que l'espoir de vivre le Christ doit s'affermir
en l'humain. C'est pourquoi le fait que la période
autour du 29 septembre, à l'équinoxe d'automne,
soit depuis toujours consacrée au nom de Michel,
est à nouveau un signe de la teneur spirituelle de
l'ancienne sagesse. Rudolf Steiner a résumé ce
rythme sacré du cours de l'année, qu'il a expliqué
en détail jusque dans tous ses événements naturels
et spirituels, par les mots suivants :
|
"Jusqu'à
présent, la Saint-Michel/le jour de
Michel est une fête paysanne - vous
savez quel sens j'y attache - une fête
d'humains simples. Elle est appelée à
devenir de plus en plus la fête
complémentaire de la fête de Pâques, à
partir de la reconnaissance de tout le
sens de la respiration annuelle
terrestre et cosmique. Car c'est ainsi
que l'humanité, qui comprendra à son
tour la vie terrestre dans le sens
spirituel, devra un jour penser.
|
Pendant
l'expiration de l'été, la terre est
ahrimanisée. Malheur si la naissance de
Jésus tombait dans cette terre
ahrimanisée ! Avant que le cycle ne soit
à nouveau achevé et que le mois de
décembre ne s'approche, ce qui permettra
à l'impulsion du Christ de naître dans
la terre pénétrée, la terre doit être
purifiée du dragon, des forces
ahrimaniennes, par des forces
spirituelles. Et la force de Michael
doit s'unir à ce qui afflue en tant que
respiration terrestre depuis la période
de septembre jusqu'à la période de
décembre, la force de Michael
purificatrice, celle qui vainc le
mauvais ahrimanien, doit s'unir à elle,
afin que la fête de Noël puisse
s'approcher de la bonne manière, et que
la naissance de l'impulsion du Christ
puisse s'accomplir de la bonne manière,
laquelle continuera ensuite à mûrir
jusqu'à la période de Pâques".
|
Ainsi, la force de Michael est au service de la
force du Christ. Et l'humain d'aujourd'hui peut,
par le service de consécration humaine dans le
culte des fêtes annuelles, se mettre consciemment,
chacun par ses propres moyens, au service des
puissances spirituelles dirigeantes qui façonnent
le destin terrestre et le destin humain.
|
Après ces exposés sur Pâques, Rudolf Steiner a
abordé l'histoire des cultes qui étaient liés aux
fêtes annuelles dans les époques précédentes. Il a
dévoilé le sens qui, dans les temps les plus
reculés, sous-tendait ces coutumes populaires
tirées des secrets de la nature, comme le lancer
de runes, les devinettes, la fonte de plomb, etc.
à l'époque de l'automne et de l'hiver, des
coutumes qui provenaient naturellement d'un tout
autre niveau de conscience que celui
d'aujourd'hui. Il a ensuite parlé de la sagesse
transmise lors de l'initiation aux mystères
chthoniens de l'Antiquité, qui était encore au
courant des secrets de l'hiver, qui savait encore
comment, en cette période hivernale
|
525
|
le monde végétal s'enrichit de forces curatives,
et qui a développé une science de la guérison à
partir de là. Il décrivit les enseignements et les
actes des initiés de l'époque, car la polarité des
secrets souterrains et aériens était révélée dans
la nature lors de ces fêtes annuelles de l'hiver
et de l'été. Cette connaissance des mystères s'est
transformée de fond en comble lorsque, avec
l'apparition du Christ, ces initiés ont pris
conscience que "le Christ s'est uni à l'humanité
après la résurrection, qu'il ne vit plus seulement
dans les hauteurs extraterrestres, mais qu'il vit
au sein de l'existence terrestre, qu'il vit dans
l'évolution, dans le courant d'évolution de
l'humanité". Avec cela, tout le rapport de
l'humain avec le monde spirituel, avec la nature,
avec le sens des fêtes annuelles devait s'élever
conformément au sens à un nouveau niveau. Et c'est
un pas de plus vers les mystères de l'ordre
spirituel qui nous entoure et qui nous habite que
la fête de Michel vient compléter le rythme sacré
des fêtes annuelles. Elle ouvre la voie à une
nouvelle expérience des mystères de la naissance,
de l'ensevelissement/mise au tombeau et de la
résurrection. De même que l'humain, à la suite des
disciples du Christ, apprend à contempler la
résurrection, il doit intégrer dans sa volonté la
force michaélique qui vainc le dragon :
|
"Dans
la pensée festive du solstice d'automne,
l'âme doit sentir sa force, en ce sens
qu'il n'est pas fait appel à sa vue,
mais à sa volonté : Accepte la pensée de
Michael qui vainc les forces
ahrimaniennes, cette pensée qui te rend
fort pour acquérir la connaissance
spirituelle ici sur terre, afin que tu
puisses vaincre les forces de mort. - De
même que la pensée pascale s'adresse à
la contemplation, cette pensée s'adresse
aux forces de la volonté : accueillir la
force de Michael, c'est-à-dire
accueillir la force de la connaissance
spirituelle dans les forces de la
volonté…
|
Les
êtres humains doivent à leur tour
apprendre à penser le spirituel avec le
cours de la nature. Aujourd'hui, il
n'est pas seulement permis à l'humain de
faire des réflexions ésotériques, il est
nécessaire pour l'humain de pouvoir
faire à nouveau de l'ésotérisme...
|
Lorsque
l'on comprendra penser avec le cours de
l'année, alors se mêleront aux pensées
les forces qui permettront à l'humain
d'entrer en dialogue avec les forces
spirituelles divines qui se révèlent à
partir des étoiles. C'est dans les
étoiles que les humains ont cherché la
force de fonder des fêtes qui ont une
validité humaine intérieure. Les humains
doivent fonder les fêtes à partir de
leur force ésotérique intérieure."
|
Nous voyons comment Rudolf Steiner, après
l'époque du plus grand rayonnement dans l'étendue
de l'environnement, dans tous les domaines de la
vie et du travail de l'époque, tel que le destin
de ce mouvement spirituel l'avait apporté ces
dernières années, a maintenant concentré la
conscience des humains qui travaillent avec lui
sur le pôle intérieur de l'évolution humaine, sur
le service de consécration de l'humain que chacun
peut accomplir en lui-même, sur la formation de la
capacité de l'humain à "pouvoir à son tour faire
de l'ésotérisme". Car cette source de force
intérieure devait être rassemblée et enrichie,
afin que les humains, ainsi armés, puissent
affronter les lourdes tâches et les détresses des
temps à venir, invincibles au service de la force
michaélique.
|
526
|
Après que cet acte ésotérique de préparation fut
accompli à Dornach, Rudolf Steiner reprit ses
multiples activités de conférences et de voyages
qui, en cette année, devaient être consacrées à la
préparation d'une nouvelle impulsion aussi à
nouveau à l'environnement dans les pays et les
domaines d'activité d'Europe. Il tint tout d'abord
des conférences dans une série de villes suisses,
qui servirent à orienter un cercle plus large sur
les objectifs de la reconstruction du Goetheanum,
et visita ensuite au cours de cette année six pays
d'Europe pour y répandre les nouvelles impulsions,
une activité qu'il poursuivit de la manière la
plus intensive l'année suivante. Du 5 au 12 avril
1923, il s'exprima à Berne, Bâle, Zurich,
Winterthur et Saint-Gall sur le thème "Que voulait
le Goetheanum et que doit être l'anthroposophie ?
Il s'agissait en effet tout d'abord de fournir des
explications sur les voies et les objectifs visés
par la construction du nouveau bâtiment du
Goetheanum et de son école supérieure/université.
Il s'agissait de transmettre les directives à la
volonté d'aide enthousiaste de larges cercles,
mais aussi de pousser les opposants, également
actifs, "sur les deux bords du chemin" et de les
convaincre de l'inutilité de leur action
éternellement inhibitrice. - Il est peut-être
possible de mentionner à nouveau une expérience
personnelle de cette tournée de conférences, car
elle peut illustrer l'ambiance et la situation.
Comme il était encore possible, ces derniers mois,
que la dernière flambée des esprits de certaines
personnes, excitées par la violence des événements
de la Saint-Sylvestre, puisse devenir un danger
personnel pour Rudolf Steiner, je décidai de
l'accompagner dans ce voyage afin d'aider
éventuellement à écarter un tel danger, mais je le
fis en me basant sur l'expérience décrite
précédemment, et de nouveau sans lui faire porter
la responsabilité par des questions préalables. Et
une fois de plus, j'ai pu constater que c'était la
bonne voie, car lorsque je suis monté dans le même
coupé de chemin de fer au moment du départ, il l'a
accepté cordialement comme une évidence, sans
demander aucunement les raisons de ce voyage, et
c'est ainsi que ce qui n'était qu'un essai est
devenu une coutume qu'il a respectée de manière
conséquente, même dans les années à venir. En
effet, lorsque, quelque temps plus tard, après que
les vagues d'excitation se furent apaisées et que
le voyage put à nouveau être considéré comme
totalement sans danger, je pris la décision
intérieure de cesser de voyager, il vint, sans que
j'aie dit un mot de cette décision, m'aborda dans
la menuiserie, me dit qu'il voyageait à telle et
telle heure, me donna le lieu de départ et la
destination, et lorsque j'objectai timidement que
j'avais en fait l'intention de rester là cette
fois-ci, il se contenta de dire "Non, non, vous
voyagez avec moi". Et c'est ainsi que j'ai pu
continuer à l'accompagner dans ses voyages jusqu'à
la fin de sa vie, un des plus beaux cadeaux qui
m'a donné si souvent l'occasion de recevoir des
informations essentielles par des questions et des
réponses, dans le train, le bateau, à l'hôtel,
lors de promenades, et de vivre la grande
personnalité de Rudolf Steiner au quotidien dans
sa bonté humaine et sa pratique exemplaire de la
vie. Lors de ce voyage en avril 1923, il m'a
|
527
|
rendu attentif, pendant le trajet ou, ce qu'il
faisait volontiers, après la conférence, en
discutant autour d'une tasse de café, à certaines
particularités de ce qui était présenté, comme par
exemple le fait que, bien que le thème de la
conférence soit le même dans toutes les villes, il
pouvait le compléter par différentes nuances à
Berne, Zurich ou Saint-Gall.
|
Ainsi, les conférences à Saint-Gall étaient
toujours imprégnées d'un élément spirituel
particulier, qui résultait de l'atmosphère
historique qui s'y trouvait encore du temps du
christianisme européen primitif *. Comme nous
l'avons déjà mentionné, une telle orientation de
ses conférences en rapport avec la structure
spirituelle et historique particulière de
certaines régions du monde avait aussi été
observée lors de ses conférences dans différents
pays. Nous l'illustrerons encore par la suite à
l'aide de divers exemples. On a pu voir à chaque
fois comment il a fait appel aux forces
spirituelles latentes en tous lieux, afin de les
amener à la tâche commune de notre époque. C'est
ainsi que les nombreuses et lointaines conférences
de Rudolf Steiner au cours de ces années sont
devenues pour moi, de ce point de vue aussi, une
source d'inspiration précieuse pour l'histoire de
la pensée. A l'occasion de la conférence à
Saint-Gall, nous avons visité pendant la journée
la bibliothèque du monastère et ses trésors
uniques, et Rudolf Steiner nous a fait de nombreux
cadeaux en nous faisant profiter de ses
connaissances historiques inépuisables.
|
Ce voyage-conférence d'avril 1923 contribua
aussi largement à clarifier et à écarter certains
arguments des opposants qui, par malentendu,
s'étaient encore opposés à la reconstruction de
Dornach. Lors des négociations avec les autorités
et les associations au cours des mois suivants,
qui ont permis d'éliminer complètement les
derniers obstacles à la reconstruction, cette
prise de conscience a été d'une grande valeur.
Lorsque, par exemple, quelques mois plus tard, je
dus mener moi-même une négociation à ce sujet avec
un représentant de la partie adverse à Bâle, parce
que Rudolf Steiner venait de s'absenter, il me
donna comme directive de négocier : "nous pouvons
négocier la hauteur du bâtiment (il s'agissait de
savoir si le nouveau bâtiment devait être aussi
haut ou plus haut que le premier), mais nous ne
négocions pas les formes artistiques, nous restons
fermes sur ce point". Et il en fut ainsi. Le
nouveau bâtiment fut construit dans les cinq
années qui suivirent exactement selon le modèle
que Rudolf Steiner avait modelé de sa propre main
de son vivant. Nous y reviendrons plus tard.
|
Une fois ces étapes franchies pour le
développement futur de l'ensemble du travail,
Rudolf Steiner, à l'initiative d'un groupe
d'enseignants suisses, donna à Pâques, du 15 au 22
avril, une conférence sur le thème de l'éducation,
avant de poursuivre ses voyages maintenant vers
l'est,
|
* voir aussi à ce sujet :
Friedrich Häusler : "Die Geburt der
Eidgenossenschaft aus der geistigen Urschweiz (La
naissance de la Confédération de la Suisse
originelle spirituelle)" ; C. Englert-Faye : "Du
mythe à l'idée de la Suisse" ; Maria Schindler :
"Columba" ; Fiona Macleod : "Jonas", entre autres.
|
528
|
un cours pédagogique de huit conférences à
Dornach, publié depuis sous le titre "Die
pädagogische Praxis vom Gesichtspunkte
geisteswissenschaftlicher Menschenerkenntnis" (La
pratique pédagogique du point de vue de la
connaissance de l'humain dans la science de
l'esprit), dans lequel il présentait à un cercle
plus large d'intéressés la pédagogie qu'il avait
fondée et qui avait déjà fait ses preuves dans la
pratique. Ce qu'un enseignant encore éloigné de
l'anthroposophie a écrit dans le "Berner
Schulblatt (Feuille bernoise des écoles)" à propos
de son expérience lors de ce cours pédagogique au
Goetheanum est aussi caractéristique :
|
"Chaque
matin, lorsque nous écoutions à nouveau
le Dr Steiner lui-même, nous nous
sentions un peu plus proches de lui,
nous comprenions toujours mieux ce qu'il
avait à dire, comment il devait le dire.
Et puis nous, les nouveaux, nous nous
retrouvions ensemble, et chaque jour
nous devions demander avec plus
d'insistance : pourquoi n'y a-t-il pas
beaucoup plus de collègues ici ? Il
n'est pas vrai que l'anthroposophie
enferme, qu'elle cultive l'étroitesse
d'esprit, qu'elle passe à côté de la vie
; il n'est pas vrai qu'elle flotte dans
l'air avec sa doctrine du suprasensible
; car pas à pas, le Dr Steiner montrait
l'application à la vie, qui éclairait
comme un projecteur dans les détails et
révélait leur lien avec des questions
profondes de la vie et de l'être…
|
Je
suis venu ici pour chercher une
stimulation et un profit pour mon
travail scolaire, c'est ce que j'ai
trouvé en grande partie ; à ce profit
s'ajoute de façon inespérée une richesse
encore plus grande pour le cœur et
l'âme, et de là doit émaner à nouveau
une richesse pour ma classe, pour mes
compagnons de route...
|
Ces
dernières semaines, depuis que nous
avons repris notre travail scolaire,
bien des choses se sont déjà éclaircies,
et la conviction que le Dr. Steiner a
beaucoup à nous offrir, à nous
enseignants actuels, est devenue plus
grande et plus pure. Je m'étonne qu'on
n'ait pas encore demandé au Dr Steiner
de donner un cours à Berne, comme
Scharrelmann et comme Kühnel maintenant.
Nous irons volontiers et accepterons
avec reconnaissance ce que Kühnel nous
offrira ; mais nous qui connaissons
maintenant le Dr Steiner, nous aimerions
qu'il soit lui aussi appelé à donner un
cours à Berne. Nous ne voulons pas être
unilatéraux, mais accepter partout avec
reconnaissance ce qui est bon, quel que
soit le nom de la source, si seulement
elle est une source pure. Avoir vécu
cela en soi comme une conviction, c'est
peut-être encore le plus grand".
|
Quiconque a abordé l'œuvre de Rudolf Steiner
sans préjugés a pu acquérir cette conviction d'un
profond enrichissement dans le domaine des tâches
humaines, matérielles et professionnelles.
|
Fin avril 1923, il se mit en route pour des
voyages qui le menèrent d'abord en Allemagne, en
Autriche et en Norvège. A Stuttgart, les 24 et 25
avril, il introduisit deux représentations
d'eurythmie, et le 2 mai, il s'adressa aux membres
sur le thème "Le logos individualisé et l'art
d'extraire l'esprit de la parole". C'est justement
à cette époque qu'il a fait prendre conscience à
plusieurs reprises des forces spirituelles
intérieures de la parole, de la langue, comme lors
des conférences de Dornach des 6 et 13 avril sur
"La spiritualité de la langue et la voix de la
conscience" et "La récupération de la source
vivante de la parole par l'impulsion du Christ".
C'est aussi à ce thème que furent consacrées les
conférences du 25 au 30 avril en Autriche, où il
parla à Prague des forces suprasensibles de
l'humain qui se développent dans le processus de
la marche, de la parole et de la pensée. Les
conférences publiques
|
529
|
à Prague portèrent pour thème : "L'éternité de
l'âme à la lumière de l'anthroposophie" et
"Développement humain et éducation humaine".
|
Après être revenu brièvement d'Autriche à
Dornach pendant les jours de Pentecôte et nous
avoir offert une conférence sur "La révélation de
l'Ascension et le mystère de la Pentecôte", il
partit à la mi-mai pour la Norvège afin de
représenter la nouvelle impulsion qui devait
désormais émaner du Goetheanum et fonder le
travail des amis locaux sur cette nouvelle base,
conformément à cet objectif. Une série de
conférences publiques à Christiania développa la
connaissance spirituelle-scientifique de "l'être
humain, le destin de l'humain et l'évolution du
monde". Dans le cercle de ses collaborateurs, il a
parlé de la "Pentecôte mondiale, le message de
l'anthroposophie" et a participé le 17 mai à la
fondation de la société anthroposophique en
Norvège. Dans de nombreux pays, il a reconstitué
cette année les groupes nationaux en préparation
de la refondation de la Société anthroposophique
universelle lors du congrès de Noël 1923 à
Dornach, leur montrant ainsi la voie pour être
prêts à l'action décisive de la prochaine période
de Noël.
|
Sur le chemin du retour de Norvège, il donna une
conférence à Berlin sur "Les énigmes de l'humain
intérieur". De retour à Dornach, il reprit les
thèmes de conférences commencés au printemps, qui
se tournaient surtout vers la mission spirituelle
des forces créatrices données à l'humain dans le
langage. Du 27 mai au 9 juin, il donna cette
importante série de conférences sur "L'artistique
dans sa mission mondiale", avec le sous-titre "Le
génie du langage et le monde de l'apparence
rayonnante se révélant dans la couleur". Dans ces
conférences, il est parti des débuts historiques
de l'art à l'aube de l'humanité et a décrit les
premières sources d'inspiration de l'art de la
construction, dans lequel s'exprimait encore à
l'époque la conscience de la vie après la mort,
par exemple dans l'art des tombeaux, tandis que la
connaissance de la vie prénatale de l'humain se
révélait jusque dans la conception des enveloppes
extérieures, par exemple dans l'art du vêtement.
Il représentait l'expérience des forces plastiques
de l'image dans la tête de l'humain antérieur,
telle qu'elle se manifestait dans l'art de la
sculpture. Dans ces considérations, il a parcouru
l'histoire des arts depuis le langage en tant
qu'"art originel", en passant par la révélation de
l'esprit et du non-esprit dans la peinture, la
sculpture et l'architecture, jusqu'à la tâche de
notre époque qui consiste à agir, par la
récupération consciente des forces spirituelles,
pour que l'art puisse s'intégrer de manière
créative à l'unité à créer entre science, art et
religion. Ainsi, à la spiritualisation de
l'expérience de la nature suggérée dans les
conférences de Pâques, qui peut conduire jusqu'au
culte des fêtes annuelles, il ajoute maintenant la
compréhension de la "mission universelle des
arts", qui sont appelés à coopérer à cette œuvre
comme les meilleurs auxiliaires.
|
Il plaça ces objectifs de connaissance de
l'esprit, de création artistique et de
reconstruction sociale dans le cercle de tâches du
mouvement spirituel-scientifique
|
530
|
qui leur avait préparé le chemin depuis le
tournant du siècle,en ce qu'il donna dans les
conférences de Dornach du 10 au 17 juin, un aperçu
complet de "l'histoire et des conditions du
mouvement anthroposophique par rapport à la
Société anthroposophique". Comme nous ne pouvons
pas présenter ici à nouveau en détail ces
considérations très détaillées sur l'histoire du
mouvement, nous devons renvoyer à l'étude de ces
textes. Ici, la formation du corps communautaire
et de la conscience-Je de cet organisme social a
été présentée une fois de plus dans ses phases de
développement et ses étapes, avec toutes les
maladies infantiles, les processus de maturation,
les phénomènes concomitants qui favorisent et
entravent toute croissance vivante, en observant
sérieusement, en avertissant avec amour, en
éveillant la connaissance de soi, en montrant sans
illusion ce qui est erroné, en stimulant ce qui
est bon et fort et en le préparant à de nouvelles
actions. C'était justement le moment de la
rétrospective et de l'anticipation de cette année,
où tout ce qui s'était avéré être lié au passé et
inorganique a été rejeté, et tout ce qui s'était
avéré être sain, créatif et organiquement lié au
centre de l'anthroposophie a été amené à un nouvel
ordre et à un enrichissement de la responsabilité
à partir de l'ésotérisme de ce mouvement
spirituel.
|
Les négociations administratives concernant
l'incendie, l'assurance et la reconstruction ayant
maintenant été menées à bien à la mi-juin,
l'assemblée des membres du 10 juin et l'assemblée
générale de l'Association du Goetheanum du 17 juin
clarifièrent, par une rétrospective et une
prévision, les bases de la reconstruction du
bâtiment du Goetheanum et décidèrent à l'unanimité
de sa reconstruction. A cette occasion, Rudolf
Steiner parla encore une fois avec force de ce
qui, dans tous les coups du sort présents et
futurs, doit toujours vivre dans la conscience
d'un tel mouvement, fort intérieurement, luttant
contre des forces contraires, mais sûr de l'aide
spirituelle lorsqu'il est bien disposé :
|
"Ce
qui s'est exprimé d'une manière évidente
pour nous lorsque nous étions sous
l'impression immédiate de l'incendie du
Goetheanum, à savoir que nous ne
voulions absolument pas abandonner la
continuité du travail de notre vie de
l'esprit, doit toujours nous animer. Et
il est particulièrement important que
nous sachions effectivement nous
comporter dans le sens de ce que j'ai
dit hier : travailler à partir du centre
du spirituel, et ne pas se laisser
troubler dans ce travail et cet état
d'esprit proprement intérieurs, issus du
centre, même par les impressions les
plus douloureuses, mais aussi par les
impressions exaltantes du monde
extérieur. C'est de cela que dépend la
perspective réelle du mouvement
anthroposophique. Elle ne dépend pas du
nombre et de la nature des coups du sort
qui viennent de l'extérieur. Ceux-ci
doivent être acceptés avec l'état
d'esprit qui découle naturellement de la
vision anthroposophique de la vie. Mais
que, malgré tous les coups du sort, même
les plus favorables, l'énergie
intérieure ne faiblisse pas dans
l'élaboration du centre de la vie
spirituelle, c'est de cela que dépend ce
qui doit et peut être atteint par le
mouvement anthroposophique... Je
voudrais seulement faire remarquer que
dans
|
531
|
un
mouvement spirituel tel que
l'anthroposophie, doit vraiment devenir
sérieux s'il veut trouver la bonne voie,
que le succès et l'échec ne signifient
en fait rien, que seul ce qui provient
de la force intérieure et des impulsions
intérieures de la chose elle-même a une
signification...
|
J'aurais
pu imaginer qu'à l'époque où ce terrible
malheur nous a frappés, il y aurait eu
des âmes, même parmi les anthroposophes,
qui auraient dit : Oui, pourquoi les
bonnes puissances spirituelles ne nous
ont-elles pas protégés dans ce cas ? Une
telle pensée se rattache justement à
l'extérieur, elle ne se rattache pas à
ce qui vient imperturbablement de
l'extérieur, simplement du centre
intérieur de la chose. Si l'on veut
prendre au sérieux le fait que les
sentiments, les pensées, notamment les
impulsions de la conscience, sont des
réalités, alors il faut croire en
elles-mêmes, en ces impulsions de la
conscience, en ces pensées, en ces
sensations, non pas aux aides qu'elles
peuvent avoir de l'extérieur, mais à
leur propre force. Il faut alors être
sûr que ce que l'on puise dans de telles
impulsions, malgré tout échec extérieur
apparent, atteindra son but juste, le
but qui lui a été prescrit dans le monde
spirituel...
|
Le
succès est assuré pour ce qui est voulu
de l'intérieur, mais on ne peut alors
parler de succès que dans le sens où
l'on entend ce qui est dans le sens des
impulsions intérieures, des pensées, des
intentions de la conscience elle-même.
Les choses qui s'accomplissent dans le
monde extérieur s'accomplissent en
général d'une manière qui ne devient
souvent explicable qu'après des
décennies, peut-être même après un temps
encore plus long".
|
Rudolf Steiner lui-même a donné l'exemple de la
force intérieure et du comportement juste dans les
moments d'épreuves extérieures tragiques. Sa vie
fut en effet, pour tous ceux qui purent la
contempler dans la plénitude de son destin et sa
cohérence intérieure, un signe que les puissances
spirituelles éprouvent le plus durement celui qui
est fort et que chaque épreuve de droiture donne
lieu à l'accroissement de nouvelles forces et
capacités. La question pusillanime de certains
humains, qu'il laisse entendre dans les mots
ci-dessus, à savoir pourquoi les puissances
spirituelles permettent de tels coups du sort, ne
pouvait donc naître que de la non-reconnaissance
de la conduite spirituelle du destin. C'est
pourquoi il convient de mentionner ici une réponse
que Rudolf Steiner a donnée un jour lors d'un
entretien personnel, lorsque je lui ai raconté que
quelques contemporains incompréhensifs de son
entourage lui avaient demandé pourquoi, malgré son
don de clairvoyance, il n'avait pas lui-même
empêché un tel coup du sort. Il m'a répondu que
les personnes qui argumentaient ainsi n'avaient
manifestement pas saisi l'essence de la guidance
spirituelle, ni celle de la clairvoyance.
Premièrement, celui qui travaille dans le sens des
bonnes forces spirituelles n'est jamais autorisé à
détourner un coup du sort de lui-même, même s'il
le prévoit. Mais même dans cette hypothèse, l'idée
que ces personnes se font de l'essence de la
clairvoyance est totalement erronée. Ces personnes
auraient l'idée, étrangère à la réalité, que le
clairvoyant doit toujours voir simultanément
devant lui tous les événements présents et futurs
du destin et qu'il peut les arranger à son gré de
manière favorable pour lui. Mais, outre
l'inexactitude morale d'une telle pensée, ils ne
tiennent pas compte du fait que le clairvoyant
doit lui aussi diriger volontairement son regard
sur un événement présent ou futur pour le voir. Ce
ne serait pas quelque peu
|
532
|
tous les événements suprasensibles se présentant
constamment d'eux-mêmes devant l'œil de l'esprit,
celui-ci doit être dirigé vers eux, comme l'œil
physique doit être dirigé vers le visible
sensoriel pour le percevoir. Il utilisait la
comparaison suivante : si vous allez par exemple
le soir dans votre chambre et que vous ne regardez
pas sous votre lit et que vous ne percevez pas, du
fait de cette absence de regard, qu'un cambrioleur
se trouve sous votre lit, cela ne prouve pas que
vous n'avez pas de bons yeux - vous pouvez même
avoir les meilleurs et les plus aiguisés - mais
vous n'avez justement pas regardé là, mais
ailleurs, et vous ne l'avez donc pas perçu. Mais
il en va naturellement de même pour la perception
extrasensorielle, le regard doit être
volontairement dirigé vers l'objet pour le voir.
Mais le clairvoyant qui suit les lois spirituelles
ne dirigera pas son regard sur ce qui le concerne
lui-même ou pourrait être dirigé contre lui, mais
il concentrera toute sa force et sa vision sur ce
qui concerne la généralité et cherchera et
regardera avant tout ce qui est nécessaire à la
poursuite de la recherche spirituelle. Pour toutes
ces raisons, il doit laisser les coups du destin
l'atteindre et, sans se laisser décourager,
diriger sa force de vision vers ce qui serait
l'affaire et la tâche de la collectivité.
|
Celui qui avance de manière conséquente sur ce
chemin se tient au-dessus des vagues du destin
personnel et est ainsi inséré dans le courant
spirituel qui ne peut être entravé par le succès
ou l'échec local et temporel. C'est aussi ce que
Rudolf Steiner a illustré en paroles et en actes :
celui qui travaille à partir du noyau central d'un
tel mouvement spirituel est invincible dans sa
force de rayonnement et sa continuité, malgré le
ressac, les marées hautes et basses, le flux et le
reflux et la confusion de l'environnement
périphérique.
|
En même temps que les conférences sur
"L'artistique dans sa mission mondiale" en juin
1923, qui servaient à la prise de conscience de la
situation historique mondiale actuelle et de la
nouvelle sphère d'activité des arts qui en
résulte, la formation pratique des artistes fut
intensivement encouragée, afin de pouvoir réaliser
au Goetheanum nouvellement construit la formation
artistique qui, sous la direction de Rudolf
Steiner et de Madame Marie Steiner, menait
constamment à de nouvelles étapes de
développement. En référence à ce qui a été dit
précédemment sur l'essence des fêtes annuelles, la
représentation d'eurythmie de la Saint-Jean 1923,
par exemple, a déjà été plongée dans l'élément
spirituel de "l'ambiance de la Saint-Jean". Le
travail de peinture et de sculpture fut aussi
poursuivi de manière continue, dans la mesure où
cela était possible dans les locaux provisoires.
Les peintres ont cependant subi une lourde perte
ces jours-ci avec le décès de Hermann Linde, qui
faisait partie du cercle des artistes qui avaient
peint la grande coupole du premier bâtiment du
Goetheanum avec des motifs de l'histoire de
l'évolution de la Terre. Lors de l'incinération de
Hermann Linde, le 29 juillet, Rudolf Steiner a
prononcé les paroles de commémoration de l'action,
impérissable dans l'esprit, de ce collaborateur
éminent et compréhensif.
|
533
|
Mais les motifs et les esquisses des peintures
conçues par Rudolf Steiner et exécutées par les
collaborateurs avec la plus grande sensibilité à
l'égard du nouvel art pictural étaient encore
conservés et les collaborateurs recevaient
toujours de nouvelles impulsions grâce à la visite
de Rudolf Steiner dans les ateliers ou grâce à
l'action exemplaire de Rudolf Steiner lorsqu'il
prenait lui-même les pinceaux et les couleurs et
qu'il leur montrait par des exemples l'essence de
la peinture à partir de l'élément de la couleur.
|
La formation artistique des peintres a ensuite
été poursuivie systématiquement par ses élèves,
par le biais de cours et d'expositions lors des
congrès, à l'initiative de Mieta Pyle-Waller,
Marie Stralcosch-Giesler, Hilde Boos-Hamburger,
Louise van Blommestein, W. Nedella et Carl
Bessenich. Mais nous ne pouvons malheureusement
pas citer ici tous ces précieux auxiliaires. - Les
nouvelles directives dans le domaine de la
sculpture et de la taille ont également été
développées dans l'"école de sculpture" du
Goetheanum sous la direction d'Oswald Dubach et de
F. Kemper et transmises par l'enseignement à
d'autres artistes venus plus tard. - C'est ainsi
que, dans toutes les sphères de la création
artistique que Rudolf Steiner a ouvertes ces
années-là, sont nées les impulsions pour
transmettre aux générations futures d'artistes,
par un enseignement approfondi, ce qu'ils avaient
reçu.
|
Au printemps 1923, la fidèle troupe des ouvriers
du bâtiment et des artisans reçut à nouveau ses
conférences régulières et ses heures de discussion
sous la direction de Rudolf Steiner. Ils
s'occupèrent alors de démolir la terrasse en béton
de l'ancien bâtiment, trop petite pour le nouveau
bâtiment plus grand, et de procéder au nivellement
et aux travaux préparatoires pour le nouveau
bâtiment. Le premier bâtiment avait un volume de
66 000 mètres cubes, le nouveau devait avoir un
volume d'environ 106 000 mètres cubes. Rudolf
Steiner souligna lui-même que le nouveau bâtiment,
d'un genre si différent, devait être construit
dans l'élément dur du béton armé et qu'il devait
désormais s'intégrer encore plus fortement, par
son monde de formes, aux rythmes et aux lignes
caractéristiques du paysage environnant, grâce à
l'expérience de nombreuses années. Dans ce cercle
de personnes reliées entre elles de manière encore
plus solide et enthousiaste par les graves
événements de la Saint-Sylvestre, par les dons
spirituels de Rudolf Steiner au printemps et par
l'objectif clair pour l'avenir, les fondations
extérieures et intérieures de la deuxième
construction du Goetheanum sur la colline de
Dornach se développèrent.
|
|
2ème semestre
|
Du 20 au 23 juillet eut lieu l'importante
assemblée qui prit les décisions définitives
concernant la réalisation de la reconstruction et
ses fondements pratiques. Ce congrès des membres
de tous les pays fut ouvert par Albert Steffen
avec des mots qui représentaient, dans une vue
d'ensemble artistique, les courants d'esprit de
l'Est, du Centre et de l'Ouest, du Nord et du Sud,
dans leurs relations avec l'œuvre à réaliser ici.
Le Dr Wachsmuth a présenté un rapport sur les
mesures prises jusqu'à présent et celles à venir.
|
534
|
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Le deuxième bâtiment du Goetheanum vu de
l'ouest
|
|
Cage d'escalier sud du deuxième bâtiment du
Goetheanum
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|
Le deuxième bâtiment du Goetheanum vu du
sud-ouest
|
|
|
Le deuxième bâtiment du Goetheanum dans le
paysage jurassien
|
pour la réalisation pratique et les dons
généreux déjà versés ou souscrits par les
différents pays pour cette œuvre. Et après que les
décisions prises les 10 et 17 juin aient été
confirmées à l'unanimité, à savoir d'assurer et de
réaliser la reconstruction en commun et de toutes
nos forces, et de demander à Rudolf Steiner
d'assumer à nouveau la conception et la direction
du nouveau bâtiment entièrement selon ses propres
projets et directives, il a lui-même conclu
l'assemblée par les mots :
|
Ce
sera sans aucun doute une réunion
mémorable si la construction d'un
nouveau Goetheanum peut en résulter. Et
ce serait beau si ce nouveau Goetheanum
pouvait devenir tel qu'il puisse à
nouveau rayonner vers nous dans ses
formes ce qui doit être dit à l'humanité
par la parole sur le terrain de
l'anthroposophie. Vous aurez ainsi fait
beaucoup pour l'anthroposophie.
|
Je
peux parler impersonnellement de toutes
ces choses en ce moment, cela ne dépend
vraiment pas de moi, je ne veux pas non
plus parler de la décision qui a été
prise de me laisser prendre les
dispositions internes concernant la
construction, car si j'ai demandé, si je
dois réaliser la construction, de
pouvoir la réaliser dans ces conditions,
c'est parce que je ne peux assumer la
responsabilité de la construction que
dans cette condition. Et tout cela reste
dans le cadre de l'objectif.
|
Il
faut reconnaître que l'on a accédé à
cette demande avec compréhension. Ce qui
en résultera profitera déjà au mouvement
anthroposophique en tant que tel. Et
c'est ainsi qu'à la fin de ce congrès,
en saluant chaleureusement les amis
venus ici, je ne veux être que
l'interprète de la compréhension
anthroposophique, et la répercussion de
cette compréhension anthroposophique ne
manquera pas de se faire sentir pour
ceux qui ont cette compréhension. En
vérité, on voit bien, du point de vue de
l'esprit, le lourd sacrifice que font
nos amis pour la reconstruction du
Goetheanum. Mais le sentiment s'est
justement répandu dans nos rangs que le
vouloir de ce qui se tient comme idéal
devant l'œil de l'âme ne peut pas être
réalisé sans de tels grands sacrifices.
|
Le
Goetheanum ne sera vraiment béni que si
ceux qui font les sacrifices le veulent
vraiment et si ces sacrifices
proviennent d'un vouloir sacré. Mais la
beauté, le beau sérieux de ce vouloir
peut déjà être exprimé par l'interprète
de l'anthroposophie comme un cordial
salut d'adieu. Et je peux vous en
assurer : On reconstruira le Goetheanum
de son mieux, maintenant que les
sacrifices ont été faits".
|
C'est ainsi qu'est née de cette réunion
mémorable la grande œuvre de la deuxième
construction du Goetheanum, décision et acte
responsable de tous les membres de ce mouvement
spirituel.
|
Durant ces mois, Rudolf Steiner reprit ses
activités de voyage en Europe. A la mi-juillet, il
se rendit à Stuttgart pour y poursuivre le travail
scientifique-spirituel par des conférences aux
membres, cette fois-ci par des réflexions sur les
"axiomes" des quatre niveaux d'existence des
mondes physique, éthérique, astral et je, auxquels
l'humain est relié par ses quatre membres
essentiels et auxquels il doit se réveille à la
conscience de son propre être-là.
|
535
|
Du 11 au 14 juillet, il a donné quatre
conférences aux théologiens de la communauté des
chrétiens afin de les former pour la suite de leur
travail. Là aussi, l'unité entre la connaissance,
l'art et la religion a été établie par des
représentations d'eurythmie.
|
Après avoir préparé et expliqué au printemps
dans plusieurs pays d'Europe centrale et du Nord
la nouvelle impulsion qui devait être donnée cette
année au travail spirituel dans le monde entier,
il se rendit début août en Angleterre pour
consolider et compléter ce qui avait été mis en
place au cours des dernières décennies et le
préparer au nouveau cycle de tâches . Il s'est
tout d'abord rendu à Ilkley pour poursuivre le
travail pédagogique des années précédentes, où
s'est tenu du 4 au 17 août un congrès de
l'"Educational Union for the Realization of
spiritual Values in Education" sous la direction
de la célèbre pédagogue Mme Margaret McMillan.
Quatre conférences de Rudolf Steiner sur "La vie
spirituelle contemporaine et l'éducation" étaient
au centre de ce congrès. Depuis, cet important
cours de pédagogie a aussi été rendu accessible
aux étudiants sous forme de livre. De nombreuses
personnalités de la pratique éducative européenne,
et plus particulièrement anglaise, ont participé à
ce cours et, entre les conférences, des
discussions animées ont donné une image des fortes
impulsions que la pédagogie a reçues du patrimoine
spirituel de l'anthroposophie. En complément de ce
congrès pédagogique à Ilkley, Rudolf Steiner a
aussi parlé de sa méthodologie d'éducation devant
un public nombreux lors d'un séminaire
d'enseignants (Training College). Il faut
d'ailleurs mentionner que cette réunion était
présidée par un haut dignitaire ecclésiastique de
la High Church anglaise, l'archidiacre de Halifax,
qui a ainsi fait preuve de plus d'objectivité et
d'intérêt pour de nouvelles impulsions
spirituelles que certains représentants
subalternes du clergé européen. C'est là que
l'ouverture et la disposition objective à la
compréhension, y compris de la part de l'Eglise,
ont été mises en avant de manière belle et digne.
Nous rappelons les symptômes similaires que nous
avons pu constater lors de la conférence de
l'année dernière à l'Université d'Oxford et les
phénomènes de bonne volonté qui se sont manifestés
ici et là dans le cercle des théologiens de
certains autres pays au cours des dernières
années. La haute valeur éthique inhérente à la
pédagogie de Rudolf Steiner pouvait être perçue et
approuvée par tous ceux qui avaient l'esprit
ouvert.
|
D'Ilkley, le voyage s'est poursuivi jusqu'à
Penmaenmawr, un endroit magnifiquement situé sur
la côte du Pays de Galles, où un grand nombre de
visiteurs venus de nombreux pays se sont réunis
pour un "cours d'été". Ce cours d'été avait été
organisé notamment à l'initiative de D.N. Dunlop,
décédé depuis lors. Ici, à Penmaenmawr, nous avons
vécu deux semaines de travail intensif et d'études
intéressantes de la nature et de l'histoire dans
ce paysage consacré par d'anciens sites
druidiques. De tels "cours d'été" avaient leur
propre
|
536
|
atmosphère de travail spirituel et de vie
communautaire. Les participants étaient unis non
seulement pendant les conférences, mais aussi
pendant la journée, lors des repas pris en commun
dans les hôtels de la petite localité, lors des
excursions dans le paysage dominé par une
austérité et une beauté étranges, avec ses
falaises abruptes, la mer déchaînée, les hauteurs
isolées avec leurs anciens lieux de culte et les
symboles étranges d'une haute culture spirituelle
remontant aux débuts de l'histoire de l'humanité.
Ainsi, on était constamment ensemble pendant la
journée et on se retrouvait aussi humainement dans
une expérience commune. Ce petit lieu situé sur la
rude côte ne disposait que d'une petite salle
construite en planches peu étanches, et les
participants n'oublieront sans doute jamais
comment, pendant une conférence ou une
représentation d'eurythmie, les tempêtes venues de
la mer s'infiltraient souvent par les joints,
froissaient les rideaux d'eurythmie, et comment
certaines personnes assises dans la salle étaient
trempées par la pluie à travers le toit non
étanche. Mais ce lien assez élémentaire avec la
nature s'accordait bien avec l'essence de ce
paysage, dans l'atmosphère duquel, comme le disait
Rudolf Steiner, les événements de l'histoire et
les combats spirituels du passé étaient encore
écrits de manière dense dans l'éther. Ainsi,
durant ces semaines à Penmaenmawr, beaucoup de
choses sérieuses, belles et joyeuses se sont
entremêlées. On a vécu, dans les conférences et
dans certaines conversations au quartier ou au
bord de la mer, l'assimilation commune de la
substance spirituelle importante que Rudolf
Steiner a transmise dans son cycle de conférences,
la beauté de l'eurythmie qui, dans ses
représentations, a dû parfois accepter
l'intervention des éléments, à tel point que, lors
d'un poème traitant de la tempête et des vagues,
la nature elle-même a soudain participé, a éteint
les lumières dans la salle et a soufflé sur la
scène une tempête et une pluie réelles pour les
eurythmistes. C'était une étrange imbrication de
l'humain et de la nature dans ce "cours d'été" qui
nous a tous réjouit et suscite un vécu intensif.
|
Comme nous l'avons déjà mentionné, les
conférences et les paroles de Rudolf Steiner
étaient toujours orientées vers la situation
concrète, l'essence des humains présents, le
caractère du pays, du peuple, la nature
spirituelle de l'environnement. Dans un pays, il
parlait plus de l'aspect philosophique, dans un
autre pays, il partait généralement plus de
l'histoire et du mythe, etc. Ici, en Angleterre,
il aimait aborder directement le monde des faits,
l'aspect factuel des phénomènes occultes,
suprasensibles. Nous étions tous étonnés de voir à
quel point, dans ces conférences auxquelles
assistaient, outre les membres, de nombreux
participants non encore familiarisés avec
l'anthroposophie, il abordait les phénomènes
concrets de l'expérience suprasensible, mais aussi
les erreurs et les dérives de certaines
aspirations occultes. Ce cycle de 14 conférences,
qui s'est déroulé du 18 au 31 août, était intitulé
: "Connaissance initiatique" et sous-titré :
"L'évolution spirituelle et physique du monde et
de l'humanité dans le passé, le présent et
l'avenir à la lumière de l'anthroposophie". Il a
conduit de manière très concentrée et en même
temps d'une immédiateté dépourvue
|
537
|
d'embellissement dans les domaines de la
recherche spirituelle, à ses résultats, aux
dangers et aux surmontements, aux erreurs
menaçantes et évitables, aux contestations et aux
victoires, au champ de bataille des débats
spirituels actuels.
|
Après ces conférences matinales, les
participants ont visité en petits et grands
groupes, ou individuellement, les dolmens des
anciens sites druidiques perchés sur les falaises,
dont l'évolution historique, le sens et l'action
nous ont été présentés lors des conférences. L'une
de ces expériences inoubliables reste le jour où
Rudolf Steiner m'a demandé de monter seul avec lui
sur le haut plateau rocheux au-dessus de
Penmaenmawr pour visiter les cercles druidiques.
Malgré ses 62 ans, il gravit la montagne
rapidement et avec vigueur. Conformément à
l'atmosphère spirituelle du lieu, la conversation
s'est concentrée sur les mystères des druides et
leur pôle opposé en Europe, le service de Mithra,
que le Sud opposait aux mystères du Nord. Au cours
de cette promenade, j'ai pu lui raconter une
expérience que j'avais vécue quelques années
auparavant lors de la découverte d'un ancien site
mithraïque au bord du Danube. En montant sans
cesse et sans relâche, Rudolf Steiner m'expliqua
la grande antithèse du culte des druides et de
Mithra, des mystères nordiques et méridionaux de
l'Europe, les effets des courants spirituels
d'Irlande et du nord de l'Europe, du nord au sud,
et d'Italie et du Danube, du sud au nord, qui
trouvèrent tous deux leur destin dans le
christianisme naissant. Lorsque nous sommes
arrivés sur les falaises surplombant Penmaenmawr,
le cercle solitaire du plateau entouré de pics
rocheux s'étendait devant nous, au milieu duquel
se trouvaient les immenses signes de pierre du
cercle druidique. Ce fut un moment de la vie dont
le souvenir reste toujours vivant, une image
singulièrement étrange, lorsque Rudolf Steiner
s'avança dans la solitude de ce plateau au milieu
du cercle des druides. Il m'invita à viser les
sommets des montagnes entourant le plateau
par-dessus les pierres saillantes du cercle et
décrivit alors avec une intensité de
rétrospective, comme si cela se produisait dans
l'instant, comment les prêtres druides vivaient
autrefois le cosmos spirituel, les entités qui y
agissent et leur mission envers les humains en
visant les constellations qui défilent à l'horizon
au cours de l'année ; comment ils organisaient les
fêtes de consécration et les cultes de l'année en
fonction de ces rythmes cosmiques et donnaient
leurs instructions sacerdotales aux membres de
leur communauté ; comment le déroulement des
saisons devait se refléter spirituellement dans le
culte et physiquement jusque dans le maniement du
travail agricole. Il a parlé de l'expérience du
soleil et de l'ombre dans la chambre de pierre
intérieure de l'ancien sanctuaire et de la
propagation des visions et des impulsions qui y
sont reçues dans l'immensité du cercle terrestre.
Les mots et les images prononcés ici dans la
solitude ont été repris plus tard par Rudolf
Steiner dans de nombreuses conférences
|
538
|
et complétées par d'autres résultats de
recherche *. Lorsque nous quittâmes le cercle
druidique et le plateau silencieux pour retourner
à Penmaenmawr, au pied des montagnes, j'eus la
certitude intérieure qu'il s'était passé quelque
chose de réel, d'extraordinaire, dans la sphère de
ce lieu, du fait qu'une personnalité voyante,
comme Rudolf Steiner, avait un jour séjourné ici,
qu'elle avait pu lire les événements spirituels du
passé en un tel lieu et qu'elle pouvait maintenant
communiquer ce qu'elle avait vu aux humains qui, à
notre époque, veulent emprunter le chemin de
formation spirituelle pour l'avenir.
|
En redescendant vers le bord de mer, nous
rencontrâmes à nouveau les amis qui furent étonnés
de ne pas voir Rudolf Steiner fatigué après les
montées et descentes abruptes qu'il raconta de
manière vivante. En effet, durant ces journées
remplies de conférences, de présentations
artistiques, de discussions et d'excursions, il
était d'une fraîcheur que peu de jeunes pouvaient
lui égaler. Une autre petite expérience
caractéristique de ces journées est rapportée ici,
qui montre comment il savait systématiquement
s'approprier les langues étrangères. Dans l'hôtel
de cette petite ville côtière du Pays de Galles,
il existait une étrange coutume qui consistait à
éteindre complètement la lumière la nuit, à partir
de 12 h environ, pendant quelques heures. Rudolf
Steiner, qui manifestement restait debout, lisait
et travaillait la nuit pendant de nombreuses
heures, m'a donc demandé le lendemain d'aller
acheter des bougies. Il m'accompagna dans le petit
magasin et écouta attentivement lorsque je fis
l'achat de bougies en anglais. Quelques jours plus
tard, il m'a dit le matin que je devais à nouveau
aller acheter des bougies avec lui, mais que cette
fois-ci, il le ferait lui-même en anglais. Et
c'est ce qui s'est passé, avec une syntaxe et une
prononciation parfaites. Quelques jours plus tard,
il m'a croisé dans la rue et m'a dit, rayonnant,
qu'il avait désormais acheté les bougies tout
seul. Certains amis parlant d'autres langues ont
souvent été étonnés de la rapidité avec laquelle
il se vivait dans une langue étrangère.
|
L'expérience suivante a aussi donné un aperçu
important de la nature et de la méthodologie de sa
vision spirituelle. Depuis des années, il était
devenu fréquent que des parents de la Société,
auxquels un garçon ou une fille venait de naître,
demandent à Rudolf Steiner d'indiquer le nom juste
pour l'enfant. Comme cette attribution de nom
devait se faire très rapidement entre la naissance
et l'enregistrement officiel du nom et le baptême,
ces demandes arrivaient le plus souvent par
télégramme. Mais lorsque Rudolf Steiner était en
voyage, ces télégrammes devaient d'abord être
transmis de Dornach au lieu de séjour respectif,
ce qui rendait le temps très court. Pendant notre
séjour à Penmaenmawr, quelques télégrammes de ce
genre sont arrivés avec des demandes de noms et
comme l'un d'eux est arrivé le samedi à midi, la
réponse n'aurait peut-être pas pu être donnée le
dimanche,
|
* Rudolf Steiner : "Initiations-Erkenntnis
(Connaissance d'initiation)" ; voir aussi à ce
sujet : Dr.G.Wachsmuth : "Mysterien-und
Geistesgeschichte (Mystères et histoire de
l'esprit)" chap. VII, avec des illustrations des
cercles druidiques de Penmaenmawr.
|
539
|
j'ai demandé à
Rudolf Steiner s'il pouvait me donner le nom à
transmettre aux parents par télégramme dans le
courant de l'après-midi. Mais il me répondit :
"Vous savez bien qu'il faut toujours attendre une
nuit avant que je puisse donner le nom de
l'enfant. Car je dois d'abord entrer en contact
avec son être spirituel". Eh bien, je ne le savais
pas, mais c'était pour moi une leçon importante
et, à partir de ce moment-là, je ne demandais
jamais la réponse avant le lendemain, même si les
parents attendaient désespérément. Une scène
joyeuse se déroula un jour dans cet hôtel anglais
un peu rigidement correct, lorsqu'un midi Rudolf
Steiner passa devant ma table dans la salle à
manger et me cria : "Pensez Dr. Wachsmuth, en une
semaine trois garçons". Bien entendu, aucun des
auditeurs assis autour de la table ne put trouver
une quelconque signification à ces mots et les
hypothèses les plus étranges se développèrent. Ces
attributions de noms ont aussi apporté des
informations intéressantes. Ainsi, au cours de
nombreuses attributions de noms, il a choisi deux
fois le nom de Gotthard pour des garçons, par
exemple Gotthard Johannes et Gotthart Michael. La
deuxième fois que j'ai écrit ce nom sur un bout de
papier devant lui, il s'est penché, l'a lu et a
dit : "Non, ce garçon doit avoir un t dur :
Gotthart". - Un intermède plus joyeux se produisit
une fois, lorsqu'il donna à une jeune fille, parmi
deux noms, celui de "Lichthild". J'ai
immédiatement télégraphié ce nom aux parents, mais
l'employé de la poste, qui ne pouvait sans doute
pas s'en faire une idée, l'avait transformé en
"Lichtbild" et les parents horrifiés ont hésité
plusieurs jours sur ce qu'ils devaient faire de ce
nom, jusqu'à ce que ma lettre confirmant le
télégramme arrive et clarifie l'erreur. - Lorsque
les enfants grandissaient, on pouvait souvent
constater assez rapidement, d'après le tempérament
et la nature de l'enfant, à quel point le nom qui
lui avait été donné correspondait à sa nature
profonde.
|
Au cours de ces journées délicieuses au Pays de
Galles, nous avons aussi fait des excursions
intéressantes vers les autres anciens sites
druidiques de la région, notamment sur l'île
d'Anglesey, qui ouvre la vue sur l'Irlande, à
Carnarvon, vers les anciens châteaux, sites
funéraires et lieux de culte des temps anciens. Et
là aussi, nous avons fait l'expérience singulière
de la façon dont Rudolf Steiner, à partir de sa
vision clairvoyante des événements réels qui se
sont déroulés sur ces sites à une époque
lointaine, nous a parlé de manière si concrète et
si claire que les humains de cette époque, leurs
pensées, leurs coutumes et leurs actes sont
apparus devant nous comme s'ils étaient présents.
|
Après ces semaines riches en événements au Pays
de Galles, nous nous sommes rendus ensemble à
Londres où Rudolf Steiner a participé à la
reconstitution du groupe national anglais, comme
il l'avait déjà fait dans d'autres pays. Sur son
conseil, c'est l'ami de longue date Harry Collison
qui fut nommé à la tête de ce groupe national, lui
qui, comme nous l'avons déjà décrit, avait si
généreusement étendu le travail anthroposophique
aussi bien là-bas que sur de nombreux autres
continents. Au cours de son voyage de retour,
Rudolf Steiner a encore exprimé à plusieurs
reprises sa grande satisfaction
|
540
|
sur cette élection/ce choix. Les 2 et 3
septembre, deux conférences particulières ont
encore eu lieu à Londres dans la maison du Dr et
de Mme Larkins, Harleystreet, devant un cercle de
médecins invités, sur le thème "Comment fonder le
rationnel dans la thérapie ?". Ces impulsions
médicales ont ensuite donné lieu à une activité
médicale fructueuse en Angleterre, entre autres à
la fondation de l'excellent foyer pour enfants
malades et nécessitant des soins de l'âme, sous la
direction de Miss Sergeant à Larkfield Hall. Le 2
septembre, Rudolf Steiner a donné une conférence
pour les membres sur le thème : "L'humain en tant
qu'image d'êtres spirituels et d'activités
spirituelles sur terre". L'art a couronné ce
congrès à Londres par une représentation
d'eurythmie à la "Royal Academy of Dramatic Art".
|
Début septembre, nous sommes retournés à
Dornach, où Rudolf Steiner avait déjà donné le 9
septembre un rapport sur les recherches
spirituelles encouragées lors du voyage sur la
"culture druidique et la culture wotanique". Après
quelques jours favorisant le travail de
reconstruction de l'édifice, il se rendit aux
congrès de Stuttgart et de Vienne qui se
déroulèrent dans la deuxième moitié de septembre.
A Stuttgart, il a donné trois conférences sur le
thème "L'humain dans le passé, le présent et
l'avenir". Il s'est aussi adressé aux membres sur
les principes applicables à la nouvelle
constitution à venir. Ici aussi, à Stuttgart,
certaines constitutions extérieures qui étaient
passées au premier plan dans les années 1919 à
1922 ont de nouveau été mises en retrait,
conformément à l'évolution qui avait eu lieu
depuis lors, et le travail anthroposophique
central a de nouveau pris davantage la voix
directrice dans le chœur des participants. Le
travail artistique, pédagogique et scientifique
étroitement lié à cette substance centrale reçut
ici aussi de nouvelles forces d'orientation pour
le chemin à parcourir. L'art de l'eurythmie a
contribué à construire les ponts vers ce domaine
de forces qui libère les humains des attaches de
l'intellectuel ; dans la pédagogie, dans les
laboratoires scientifiques et dans tous les autres
domaines de travail, les forces saines ont été
libérées de certaines enveloppes extérieures
pesantes et guidées vers la réorganisation
imminente. Dans les laboratoires de recherche
scientifique de Stuttgart, ce qui portait encore
trop le sceau de la périphérie, de la polémique
stérile ou des anciens courants de pensée fut
éliminé, et ce qui était précieux, comme par
exemple les expériences scientifiques de Mme L.
Kolisko sur "l'efficacité des plus petites
entités", publiées en août, fut par la suite
attribué à la sphère de travail de l'Institut de
biologie du Goetheanum. Une telle clarification a
été initiée dans tous les domaines de travail. Le
puissant processus de transformation de l'année
1923 plaça chaque individu devant la décision de
savoir dans quelle mesure sa méthode de travail
voulait et pouvait s'intégrer dans l'organisme
global du mouvement à réorganiser. Ce que Rudolf
Steiner exigeait particulièrement à cette époque,
c'était d'éveiller la "capacité de distinction".
Comme il l'a exprimé à plusieurs reprises avec
humour, le "maître libre de la capacité de
discernement" devait être congédié, et tout un
|
541
|
chacun devait se demander, en toute conscience,
dans quelle mesure la pensée et l'action pouvaient
s'unir à la substance centrale du mouvement, qui
atteignait maintenant un nouveau stade de
développement.
|
Le 21 septembre, date anniversaire de la pose de
la première pierre du Goetheanum, Rudolf Steiner
retourna encore une fois à Dornach avant son
voyage à Vienne pour prononcer un discours lors de
la célébration de la pose de la première pierre du
bâtiment, qui avait eu lieu il y a une dizaine
d'années. Fin septembre, il se rendit en Autriche
pour participer au congrès qui se déroula du 26
septembre au 1er octobre, auquel il contribua par
un cycle de conférences sur "L'anthroposophie et
l'âme tranquille humaine". Dans l'atmosphère de
Vienne, l'élément du "plein d'âme tranquile" était
endémique, mais Rudolf Steiner orienta à nouveau
les forces du cœur et les forces de connaissance
des humains vers leur patrie cosmique, il parla de
"l'extension de l'horizon de vie dans l'univers",
grâce à laquelle "l'ermitage-monde des humains de
notre temps" peut être surmonté et la liaison avec
l'élément d'action des forces de Michaël conquise.
- Ici, en Autriche, dans le domaine des impulsions
historiques qui avaient rayonné dans la sphère
européenne depuis la région du Danube, il parla
aussi en détail de la polarité des mystères
druidiques et mithriaques, déjà évoquée plus haut,
et communiqua dans ces importantes conférences
viennoises quelques-uns des résultats de recherche
spirituelle qui avaient été obtenus et confirmés
lors de la visite précédente à Penmaenmawr.
|
C'est une grande fresque de l'histoire
européenne des mystères qui a été réalisée ici. La
différenciation des mystères européens entre le
Nord et le Sud, qui s'est ensuite unifiée à un
niveau supérieur, était un phénomène clairement
visible de la direction spirituelle dans le
développement de la culture européenne du passé.
C'est pourquoi Rudolf Steiner a décrit en détail
la différence entre les lieux de mystères le long
du Danube et les mystères druidiques du Nord. Les
premiers conduisaient davantage à une
compréhension de l'essence du macrocosme par une
connaissance de soi de l'être humain intérieur ;
les autres conduisaient davantage à une
compréhension de l'intra-humain, du microcosme,
par une vision spirituelle des processus
macrocosmiques du monde. Ainsi, la sagesse des
mystères, qui était autrefois enseignée dans les
régions du Nord et du Sud, se complétait pour
former une structure mondiale harmonieuse. En se
référant aux conférences de Dornach sur les fêtes
annuelles, il montra ensuite comment le bon
développement des forces émotionnelles et
mentales, lorsqu'elles sont purifiées et
consolidées par la connaissance éveillée, apporte
dans l'observation du cours de l'année un nouveau
niveau de conscience de la nature et de conscience
de soi, à partir duquel l'humain acquiert une vue
sur les domaines d'où lui viennent les forces
d'aide des puissances spirituelles. Il peut alors
confirmer leur présence dans la consécration des
fêtes annuelles, en particulier dans l'institution
d'une fête d'automne, la fête de Saint-Michel. -
Outre ce cycle de conférences sur la nature et les
forces de l'âme tranquille humaine, il donna à
Vienne, les 26 et 29 septembre, encore
|
542
|
deux conférences publiques sur "La connaissance
suprasensible comme défi contemporain" et
"L'anthroposophie et l'attitude éthique et
religieuse de l'humain".
|
Il était extrêmement intéressant d'observer à
quel point la substance et la forme de ces
conférences viennoises de 1923 étaient différentes
de celles des conférences du Congrès Ouest-Est de
l'année précédente. Alors que les conférences de
l'année précédente s'adressaient à des milliers de
personnes excitées par la situation actuelle et
cherchant de l'aide pour maîtriser les défis de
l'environnement et, comme nous l'avons décrit sur
la base des faits, englobaient probablement le
plus grand domaine de rayonnement dans la sphère
de l'action européenne, ces conférences viennoises
de l'année 1923 s'adressaient à nouveau au germe
le plus intime qui peut se deployer à partir des
forces d'âme tranquille humaines dans
l'entrainement spirituel, et le conduisaient à la
vision de la guidance pleine de sagesse qui peut
devenir pour l'humain dans le déroulement
historique à partir de la substance ésotérique de
l'être-mystère en transformation. Ce grand
processus de respiration de l'organisation
spirituelle humaine qui, après le rayonnement dans
l'immensité, provoque à nouveau consciemment la
concentration des forces à l'intérieur dans un
rythme sain, est aussi clairement lisible dans
l'organisation de telles réunions des
collaborateurs de ce mouvement spirituel. - Comme
dans les autres pays, ici aussi en Autriche, la
refondation du groupe national en vue des
objectifs de l'organisme global du mouvement a eu
lieu le 1er octobre 1923.
|
Pendant ce séjour viennois, Rudolf Steiner m'a
demandé un matin de l'accompagner lors d'une
visite privée qu'il rendait à la poétesse
viennoise Rosa Mayreder, dont il s'était intéressé
aux travaux d'écriture et d'art pendant sa période
viennoise des années 1888/89, et dont il parle
dans son autobiographie "Mein Lebensgang (le cours
de ma vie)", chap. IX, comment il avait eu avec
elle, en dépit des différences de parcours
intellectuels, tant de discussions significatives
lors de l'élaboration de sa "Philosophie de la
liberté", et dans le cercle mondain duquel il
avait rencontré Marie Lang, Hugo Wolf et d'autres
personnalités importantes. - Environ 35 ans
s'étaient écoulés depuis cette époque et Rudolf
Steiner avait apparemment décidé soudainement de
lui rendre à nouveau visite à l'occasion de ce
séjour à Vienne. Nous avons rencontré l'écrivaine
dans son appartement et, au cours de la
conversation que Rudolf Steiner a eue avec elle,
de nombreux souvenirs de cette époque viennoise
révolue ont refait surface et le chemin du destin
vers la sphère de travail spirituel-scientifique à
l'époque actuelle a aussi été évoqué.
|
Le voyage de retour en commun de Vienne à
Dornach, le 4 octobre, est encore très présent
dans mon esprit. Pendant le long voyage dans le
coupé-lit de l'Arlberg-Express, Rudolf Steiner
avait organisé une petite fête pour mon trentième
anniversaire, qui tombait tout de suite ce jour-là
et lors de telles occasions, l'inépuisable
|
543
|
bonté et cordialité humaine de son être venait
ainsi bien au vécu. Ce jour-là, dans l'étroit
coupé, nous restâmes assis pendant des heures
autour d'une petite table et, dans un échange
vivant, il évoqua bientôt des souvenirs joyeux de
sa propre vie, puis répondit à nouveau à des
questions profondes de la vie ésotérique, telles
qu'elles se posent aujourd'hui à l'individu et à
la communauté, et les interpréta à partir de
grands contextes. - Ce petit groupe étrange de
personnes si différentes dans ce train express de
l'Arlberg a dû occuper d'une manière ou d'une
autre les autres voyageurs, la silhouette
marquante de Rudolf Steiner, vêtu d'une redingote
noire, et nous autres, avec notre habitus souvent
très gai et mondain, qui alternait entre la gaieté
et de longues conversations sérieuses. C'est ainsi
que le matin, avant l'arrivée du train en gare de
Bâle, l'un de nos amis entendit un voyageur
demander au contrôleur des wagons-lits quel genre
de gens c'était. Le contrôleur réfléchit un
instant et répondit à l'étranger : "C'est une
famille religieuse". - Ces longs voyages en train
avec Rudolf Steiner ont toujours été pour nous les
plus beaux moments de contact personnel et humain
avec l'entité de cette grande personnalité, qui
pouvait s'adresser à chacun de manière si
compréhensive, si chaleureuse et si humainement
ouverte.
|
J'aimerais profiter de cette occasion pour vous
en donner un autre exemple. Comme je l'ai déjà
mentionné, Rudolf Steiner s'était à l'époque
occupé avec beaucoup de gentillesse,
d'encouragement et de conseils de mon livre sur
"Les forces éthériques formatrices", qui était
alors en cours d'élaboration, et m'avait même
promis un dessin de sa propre main pour la page de
titre. En raison de mes nombreux autres travaux,
cela avait pris un peu de retard et je n'osais pas
le demander à nouveau. C'est alors qu'un soir,
lors d'un tel voyage en train, on frappa soudain à
la porte de mon coupé-lit - en raison du peu de
temps disponible, ces voyages se faisaient souvent
de nuit -, j'étais sur le point de m'endormir,
lorsque Rudolf Steiner regarda par la porte et me
remit une feuille avec le dessin à la main en
couleur pour ma page de titre*, parfaitement
exécuté. Malgré tous ses efforts, il avait donc
encore trouvé le temps de l'exécuter pendant le
voyage de nuit. Ce souvenir artistique a
accompagné le livre sur les forces formatrices
tout au long de son destin, et il a même eu la
gentillesse, dans les mois qui ont suivi, d'en
lire le contenu, d'en discuter en détail avec moi,
de le corriger et de le compléter. Avec de telles
instructions et une telle aide spirituelle,
c'était un plaisir d'écrire un livre.
|
Immédiatement après son retour sur son lieu de
travail à Dornach, Rudolf Steiner tint le 5
octobre 1923 la grandiose "Conférence sur
Michael", dans laquelle il illustra la
signification cosmique et géologique de ce
matériau à partir duquel l'épée de Michael peut en
quelque sorte être forgée
|
* D'autres dessins de ce
genre sont représentés artistiquement dans la
publication : "Rudolf Steiner als illustrierender
Künstler (comme artiste illustratif)", avec une
préface de Marie Steiner et une introduction
d'Emil Schweigler.
|
544
|
si l'humain ne considère pas les substances
terrestres uniquement sous l'angle de leur
signification technique extérieure, mais les
examine à la lumière de la tâche qui leur est
assignée dans l'évolution de l'organisme global de
l'existence de la nature et de l'humain. Il a
parlé de la mission cosmique du fer. Il partit à
nouveau de la transformation des forces naturelles
au cours de l'année et donna une image de la
métamorphose de l'efficacité des grandes et des
plus petites entités de ces substances terrestres,
aussi bien dans la nature extérieure que dans
l'organisme de l'humain lui-même. Au cours de
l'année, les mondes élémentaires et l'humain
subissent des influences qui, dans la conscience
de penseurs médiévaux tels que Jakob Böhme et
Paracelse, étaient encore reconnues comme des
processus sulfuriques, mercuriels et salins.
Lorsque, par exemple, au cœur de l'été, le fer
cosmique s'écrase sur la Terre dans les nombreux
essaims de météores, cela ne signifie pas
seulement un événement matériel, mais aussi un
événement spirituel dans l'univers. Et chaque
événement cosmique a à son tour sa contrepartie à
l'intérieur de l'humain, dans le sang duquel
circulent aussi les forces et les substances du
fer. Nous ne pouvons ici qu'évoquer la manière
dont Rudolf Steiner, dans ces conférences de
Dornach d'octobre 1923, a déduit des destinées des
substances dans la nature et dans l'être humain la
vision de "ce qui se déroule derrière le voile
sensible en termes d'événements mondiaux
suprasensibles qui déterminent et orientent". Dans
cette conférence, il expliqua aussi comment celui
qui regarde dans ce monde suprasensible trouve,
dans une sorte de lumière spirituelle, les "tables
d'orientation inscrites avec une écriture
spirituelle" qui lui révèlent la finalité de ces
processus cosmiques en devenir. C'est à partir de
cette connaissance qu'il a résumé la tâche
assignée à la force et à la substance du fer dans
le devenir terrestre par la maxime :
|
L'épée
de Michel.
|
Ô
humain !
|
Tu
le façonnes pour ton service, tu le
révèles selon sa substance dans nombre
de tes œuvres.
|
Mais
tu ne seras sauvé que lorsque se
manifestera à toi
|
La
puissance de son esprit".
|
Lorsque
la période du plein été, au cours de
laquelle s'accomplit symboliquement la
chute du fer cosmique, passe à la
période de l'automne, et que dans la
nature les germes et les pousses cèdent
la place aux forces du flétrissement et
de la mort, c'est le bon moment pour
l'humain de s'affermir face à la nature
mourante dans la force de la conscience
de soi qui s'arrache à la nature et la
maîtrise. L'image de Michel terrassant
le dragon est alors la véritable
expression de l'exigence faite à
l'humain de s'opposer de manière
victorieuse aux puissances ahrimaniennes
qui régnaient au cœur de l'été et aux
forces qui maintenant dans la nature
|
35
|
amènent
le processus de mort. C'est pourquoi la
fête de la Saint-Michel doit devenir "la
fête du vouloir fort".
|
C'est pourquoi Rudolf Steiner a lancé cette
année encore une revendication importante pour les
temps à venir : L'inauguration d'une "Fête de
Michael" qui, en cette période automnale, présente
à la conscience, par une fête de concentration et
de consécration maximales, les résultats de la
recherche scientifique, des aspirations
artistiques et du vouloir social issus de l'esprit
de Michael. A l'avenir, l'humain devra vivre avec
son âme et son esprit le grand "processus de
respiration de la terre", l'expansion et
l'expiration des forces terrestres dans
l'environnement cosmique au printemps, et la
concentration, l'inspiration de ces forces dans le
terrestre à l'automne, et en saisir la
signification dans l'organisme monde. Cette
globalité des événements naturels et spirituels
dans le cosmos doit être au centre d'une telle
célébration annuelle :
|
"Au printemps, l'âme humaine s'efforce de
suivre l'âme terrestre expirée qui cherche le
cosmos, - mais elle n'y parvient pas. Sous
l'influence du sentiment de liberté, de la
conscience-je, l'âme humaine est devenue
impuissante face aux hauteurs du ciel.
|
Mais lorsque l'automne approche, l'âme
humaine peut sentir, si elle le sent bien,
comment Michel descend et devient le
collaborateur de l'humain en remplacement du
Christ à l'automne.
|
Lorsque les feuilles se fanent, deviennent
brunes, lorsqu'elles tombent des arbres, lorsque
la nature meurt, alors on peut sentir, dans
cette nature automnale, si l'on sait ressentir
correctement, comment Michael descend des
hauteurs que l'on ne peut plus atteindre avec
l'âme humaine, pour devenir, par procuration du
Christ qu'il nous apportera à Noël, l'assistant
de l'humain à travers les difficultés de
l'automne. On sent alors la possibilité
d'introduire dans le cours de l'année une fête
qui unit les humains par leur volonté et que les
humains fondent à leur tour par leur conscience
spirituelle. C'est écrit dans le calendrier,
mais comme une prophétie, comme une indication :
fin septembre
|
la fête de Michael ...
|
Si les humains prenaient une telle décision
spirituelle de fixer quelque chose qui serait
introduit dans la vie sociale à partir des
mondes spirituels, cela signifierait quelque
chose d'énorme pour cette vie sociale. Je sais
que la conscience matérielle considérera cela
comme quelque chose de fantastique si des
humains quelconques aspirent à une fête de
l'automne, à une fête de la Saint-Michel. Mais
celui qui regarde vraiment les faits du monde
sait que l'effet sur l'équilibre social, l'effet
sur le progrès social sera plus fort que toute
l'agitation sociale qui parcourt le monde
aujourd'hui, c'est le fait, cette décision de
volonté : que les humains organisent une fête
d'automne comme une affaire purement spirituelle
pour montrer qu'ils veulent aspirer, entre la
naissance et la mort, à un éveil de l'âme, à une
résurrection de l'âme, qui peut ensuite être
suivie d'une mort physique de la bonne manière.
Vouloir à son tour le spirituel dans le monde
physique, c'est de cela qu'il s'agira".
|
Dans les quatre conférences qui suivirent
immédiatement, du 6 au 12 octobre 1923, Rudolf
Steiner donna une autre préparation pour les
cycles de conférences importants par lesquels il
conduisit ensuite, de la mi-octobre à décembre
1923, au congrès décisif de Noël de cette année.
Alors que la première
|
546
|
de ces quatre conférences était consacrée à
l'essence de la fête de Michel, les trois
conférences suivantes donnaient une image du cours
de l'année à travers "l'imagination de Noël",
"l'imagination de Pâques" et "l'imagination de la
Saint-Jean". Si Rudolf Steiner avait souvent
souligné dans les années précédentes que la
science de l'esprit ne rejetait pas la matière,
mais qu'elle la présentait dans ses origines et
ses relations spirituelles, il en a aussi donné la
preuve et l'exemple dans ces conférences. Car
c'est précisément la représentation des rythmes et
des processus de transformation de la sphère
terrestre au cours de l'année qui a donné la
possibilité de montrer concrètement l'intégration
des substances terrestres dans les grandes
métamorphoses de l'organisme de la Terre et du
monde, et de montrer comment, dans ces processus
cosmiques, l'action d'entités spirituelles
créatrices se traduit en actes jusque dans les
sphères des forces et des substances. Dans les
grands tableaux qu'il donna ici des actes des
entités spirituelles au cours de l'année, l'image
de l'archange Gabriel en tant que figure
spirituelle active apparut au temps de l'hiver,
celle de Raphaël au temps de Pâques, celle d'Uriel
au temps de l'été, celle de Michael au temps de
l'automne. - Et c'est à partir d'œuvres d'art
telles que la Madone Sixtine de Raphaël qu'il a
illustré comment les grands artistes des époques
précédentes avaient encore conservé de cette
sublime association entre l'entité spirituelle,
les éléments naturels et l'humanité un savoir
inspiré que la capacité d'imagination,
d'inspiration et d'intuition, qu'il s'agit
d'acquérir à nouveau, peut nous transmettre à
nouveau aujourd'hui. Ces quatre images des
archanges guidant les saisons pourront guider les
générations futures dans la consécration des fêtes
annuelles et leur permettre de s'unir aux
puissances spirituelles dans la connaissance et la
volonté de donner un sens à la terre.
|
Lors d'une courte visite qui le conduisit à
Stuttgart les 15 et 16 octobre, il donna aux
enseignants Waldorf trois autres conférences sur
la pédagogie et transmit le 15 octobre avec le
thème "L'imagination de Michael. Indicateur
kilométrique dans le cours de l'année", la
conférence de Dornach du 5 octobre, dans laquelle
il avait parlé de la signification cosmique du fer
et de l'épée de Michael.
|
De retour à Dornach, il a offert ici le deuxième
des trois cycles de conférences préparatoires à la
session de Noël de cette période automnale. Le
premier, du 5 au 12 octobre, avait illustré, comme
nous l'avons décrit plus haut, l'action des quatre
archanges au cours de l'année. Le deuxième, du 19
octobre au 11 novembre, était consacré au thème :
"L'humain en tant qu'harmonie de la parole
universelle créatrice, formatrice et
organisatrice", le troisième, du 23 novembre au 23
décembre, était intitulé : "Formations des
mystères". Ces trois cycles conduisirent donc
systématiquement la connaissance de la science de
l'esprit de la compréhension de l'action des
puissances spirituelles dirigeantes, des êtres
hiérarchiques, à l'humain en tant qu'être
terrestre appelé à recevoir l'acte créateur du
Verbe universel et à le réaliser dans le monde des
œuvres de la terre, et donnèrent finalement comme
fondement de la nouvelle impulsion à inaugurer
cette année une représentation de l'être des
mystères dans
|
547
|
l'histoire de l'humanité, dont l'œuvre
précédente devait être prise en compte et
poursuivie de manière moderne lors de la nouvelle
étape d'évolution.
|
Le deuxième de ces trois cycles, dans lequel
"L'humain en tant que résonance du Verbe du monde
créateur, formateur et organisateur" a été
présenté à la conscience des auditeurs, partait de
la structure spirituelle, psychique et corporelle
de l'humain en tant que microcosme dans lequel se
reflètent les images originelles et les tendances
des forces formatrice de l'organisme du monde.
Dans ce contexte, Rudolf Steiner a
particulièrement insisté sur le fait que
l'artistique devait être pris en compte dans cette
méthode de connaissance afin de comprendre la
concordance entre la structure humaine et le
cosmos. Car les puissances créatrices ne sont pas
seulement actives dans la formation de la matière,
la mathématisation et la dynamisation, mais aussi
dans la création artistique. Il a montré quel
contenu de vérité, à la fois artistique et
représentant le monde organique dans ses
archétypes, était transmis par la sagesse inspirée
des temps passés, lorsqu'elle parlait par exemple
des quatre archétypes de l'aigle, du lion, du
taureau et de l'humain. Il a décrit la dette
karmique de la race humaine, qui s'est détachée de
la direction spirituelle des puissances
suprasensibles, et l'équilibre qui a toujours été
rétabli par les entités cosmiques afin d'empêcher
une évolution unilatérale de l'existence terrestre
dans le seul domaine matériel. Dans des
présentations très détaillées, que nous ne pouvons
bien sûr pas reproduire ici, il décrivit la
formation des règnes de la nature à partir des
forces du zodiaque et de la dynamique cosmique et
montra, à l'aide d'exemples concrets tirés de la
succession des étapes du règne animal, comment on
peut lire dans la nature non seulement une
incarnation du spirituel, mais aussi une
spiritualisation de la matière comme tendance
d'évolution. Ce que Rudolf Steiner a illustré, par
exemple, à l'aide des métamorphoses des plantes,
des papillons et du monde des oiseaux, peut
constituer la base d'une toute nouvelle
considération de la phylogénie et a déjà incité
plus d'un naturaliste à emprunter de nouvelles
voies dans l'étude et la représentation de la
morphologie. Il en résulte aussi un nouveau champ
de vision pour les différences existant depuis le
début de l'évolution dans la formation cosmique de
l'humain et des animaux supérieurs, une vision de
la nature dans laquelle il est d'emblée absurde de
déduire la forme spirituelle de l'humain de la
série animale, une vision du monde dans laquelle
les phénomènes eux-mêmes conduisent à la
reconnaissance que l'harmonie de l'évolution
humaine avec les forces créatrices du Verbe
universel est depuis le début la tâche et le but.
|
De telles réflexions de Rudolf Steiner ne
s'arrêtent cependant jamais à l'être spirituel de
l'humain, mais conduisent profondément dans la
vision concrète de la nature corporelle de
l'humain, jusqu'à la sagesse des processus de
métabolisme, la dynamique de la circulation
vivante des substances et des forces formatrices
dans l'humain. Et ce n'est que lorsque la nature
du corps a pu être pleinement comprise à partir
d'une telle vision du monde qu'il a conduit la
conscience
|
548
|
vers la tâche future de redécouvrir, par une
formation exacte de la perception suprasensible,
le lien avec le monde élémentaire et le monde
hiérarchique des êtres spirituels. C'est ici que
s'ouvre aussi le chemin de retour vers une liaison
reconnaissante avec la source originelle des
impulsions morales dans l'humanité, qui ne restent
plus seulement le contenu de la foi ou de la
philosophie abstraite, comme au siècle dernier,
mais qui sont à nouveau lues dans les actes et les
objectifs des puissances de la Création, de la
Parole universelle. Participer à la transformation
de la forme spirituelle de l'humain vers des
niveaux de conscience toujours plus élevés dans ce
travail des hiérarchies, telle est la mission d'un
centre de mystères contemporain qui s'adresse de
manière planifiée aux forces de conscience de
notre temps. C'est à partir d'une telle vision du
monde, de sa phylogénie et de sa signification
dans l'histoire de l'humanité qu'il faut
reconnaître le but qui est aujourd'hui assigné au
mouvement spirituel qui a trouvé au Goetheanum son
centre de recherche et de travail. Dans ces cycles
de conférences de l'automne 1923, Rudolf Steiner
donna aux humains, dans une vision globale, la
possibilité de se décider, par la connaissance et
la libre décision, pour le franchissement du
seuil, pour le nouveau domaine d'activité de
l'époque qui commence avec la période de Noël,
pour la participation au lieu de mystère
contemporain de l'avenir.
|
Avant de franchir cette étape, il entreprit
encore le dernier voyage à l'étranger de cette
année riche en événements et participa, du 13 au
18 novembre, au congrès du mouvement
anthroposophique en Hollande, en lien avec la
nouvelle continuation du travail dans les
différents groupes nationaux. Le cycle de cinq
conférences qu'il a donné dans le cadre de ce
congrès à La Haye avait pour thème "L'humain
suprasensible saisi par l'anthroposophie". Il
n'est pas possible, dans ce cadre, d'entrer dans
les détails de ces conférences, au cours
desquelles il a encore une fois transmis aux amis
réunis en Hollande, dans une vue d'ensemble, bien
des aspects et des impulsions nouvelles présentées
dans les conférences de Dornach. Après avoir
parcouru l'histoire de la nature et de l'humanité,
ces exposés ont conduit à une référence aux forces
de la flamme du sacrifice qui, à des époques
antérieures, établissait sur les autels des
mystères du passé la liaison cultuelle de l'humain
avec les forces ascendantes et descendantes du
monde et qui, à notre époque, en tant que flamme
spirituelle du sacrifice, annonce à l'intérieur de
l'humain l'essence suprasensible de la nature et
de l'humain. Tandis que l'impulsion ésotérique de
telles aspirations s'allumait à nouveau partout
dans les cercles des élèves et des collaborateurs,
Rudolf Steiner donnait là aussi de nouvelles
impulsions aux personnes actives dans l'éducation
et l'art de guérir par des conférences spéciales
pour les pédagogues et les médecins. Les 15 et 16
novembre, il donna deux conférences publiques à La
Haye sur "L'anthroposophie comme défi
contemporain" et "L'anthroposophie comme chemin de
vie humain et personnel". Le 18 novembre, la
nouvelle constitution du groupe national
hollandais a eu lieu ici aussi.
|
549
|
Le sacrifice que Rudolf Steiner a lui-même
consenti en réalisant cette vaste reconstitution
prend tout son sens lorsqu'on se remémore le
fardeau qu'il a assumé au cours des années
suivantes, jusqu'à la maladie physique, pour aider
les humains à assumer jusqu'au bout leurs
responsabilités spirituelles et terrestres. En
1923, lors de ses nombreux voyages dans l'espace
européen, il disposait encore de toutes les forces
nécessaires pour faire face à toutes les mesures
extérieures, voyages, exposés, conférences,
réunions, etc. Mais l'année suivante, la force qui
devait être prélevée dans le réservoir de forces
physiques pour toutes ces activités a dû être
arrachée à la maladie physique, avec l'énergie
sans précédent qui était propre à cet humain de 63
ans. Et pourtant, il a poursuivi ces longs voyages
de conférences sans faiblir, voire en les
intensifiant. Qui, dans son entourage, aurait pu
se douter à l'époque du lourd sacrifice que lui
réservait le destin pour supporter des charges
aussi lourdes dans les dernières années de sa vie
? C'est précisément au cours de ces voyages de
1923 qu'il nous a donné à tous, par son
infatigable enthousiasme, sa chaleureuse ouverture
d'esprit et son travail incessant jour et nuit,
l'exemple d'un humain qui porte lui-même les plus
lourdes charges et soulage les autres des leurs.
Ce serait une image tout à fait inexacte si l'on
pensait que Rudolf Steiner, précisément à cette
époque où il inaugurait spirituellement toutes ces
nouvelles créations issues du noyau ésotérique du
mouvement, aurait toléré dans son entourage
l'ambiance d'une quelconque légèreté et solennité
du train-train extérieur qui se manifeste
facilement en de tels moments chez des humains
plus petits. Comme il était joyeux, ouvert et
serein lors de ces inoubliables voyages en train,
lors des repas et des conversations du soir dans
les hôtels des grandes villes d'Europe. En ce mois
de novembre 1923, par exemple, lorsque nous étions
assis ensemble le soir dans le vénérable hôtel
"Oude Doelen" à La Haye, il nous racontait les
plus beaux et les plus joyeux épisodes de sa vie
bien remplie, et comme il pouvait rire de bon cœur
lorsque nous lui racontions sans fard les combats
insensés que nous avions menés entre nous la nuit
précédente avec les bouches d'incendie de l'hôtel
dans nos chambres. Je me souviens encore d'un
monsieur qui, lors d'une promenade à cette époque,
le suivait sans cesse avec l'amertume cadavérique
du vert profond, et comment il se retourna soudain
et demanda à l'intéressé en souriant amicalement :
"Pourquoi faites-vous toujours cette tête ! Il
voulait s'entourer de personnes joyeuses, ouvertes
et joyeuses, sérieuses au bon moment, mais aussi
joyeuses et proches de la vie, et il a souvent
cité avec humour les propos d'un membre italien,
la Principessa d'Antuni, qui, dans sa manière
originale de s'exprimer, parlait avec horreur des
personnes qui font toujours "la tête jusqu'au
ventre". Tout cela ne serait que
|
550
|
pour montrer, même par de petits exemples, quel
équilibre de sérieux et de sérénité était toujours
présent dans l'atmosphère de ce grand humain.
|
La période de fin novembre à Noël fut consacrée
à Dornach à la préparation des événements décisifs
à venir. Rudolf Steiner le fit à travers le
troisième des cycles de conférences mentionnés
plus haut, qui introduisit la nature des
"configurations de mystères" dans l'histoire. En
guise d'introduction, il a décrit les chemins que
l'humain doit parcourir dans sa vie psychique pour
parvenir à percevoir les fondements spirituels du
monde. De ce point de vue, il a présenté comment
le spirituel a agi au cours de l'évolution en
modelant l'âme de l'humain et jusque dans la
physiologie, jusque dans les métamorphoses de
l'activité de pensée, des forces de mémoire, des
impulsions héréditaires ; mais aussi de
l'empreinte individuelle dans les gestes, la
physionomie et la structure corporelle. Il a aussi
donné une description détaillée des relations de
cette évolution de l'humain avec les êtres, les
substances et les forces de la planète Terre. Et
maintenant, dans les conférences du 2 au 23
décembre, il a développé une image grandiose de
l'histoire des mystères de la préhistoire, à
partir de laquelle nous pouvons à nouveau lire
aujourd'hui comment, à des époques antérieures, ce
savoir a été acquis, gardé, cultivé par les lieux
de mystères de la Terre et développé de degré en
degré dans les mystères du Nord et du Sud comme le
bien le plus sacré de l'humanité.
|
Cette présentation d'un chapitre presque
totalement inconnu de l'histoire des Mystères et
de l'esprit est si vaste et si importante dans ses
détails, elle révèle une telle richesse de
connaissances sur les méthodes et les étapes de la
conduite spirituelle de l'humain et de l'humanité
à travers les siècles, que nous ne pouvons
mentionner ici que les étapes les plus importantes
de cette nouvelle historiographie : "Les mystères
éphésiens d'Artémis. Les sites mythiques
d'Hybernie. La nature des mystères hyberniens. Les
grands mystères d'Hybernia. Les mystères
chthoniens et les mystères éleusiniens. Le passage
de Platon à Aristote. Le mystère des êtres
végétaux, des métaux et des humains. Les mystères
des cabires samothraces. Le passage de l'esprit
des anciens mystères aux mystères du Moyen Âge.
Les aspirations de l'âme humaine au cours du
Moyen-Âge. Les mystères rosicruciens".
|
La tâche de l'institution moderne des mystères,
du mouvement spirituel scientifique et de son
école supérieure, le Goetheanum à Dornach, est
maintenant d'élever à nouveau dans la conscience
de l'humain d'aujourd'hui le savoir perdu de la
direction spirituelle de l'humain et de
l'humanité, issu de l'histoire spirituelle du
passé, et d'introduire dans le devenir de
l'humanité de l'avenir la nouvelle impulsion qui
est adaptée, prédestinée et atteignable au niveau
d'évolution actuel. La révélation de l'histoire
des mystères donnée au cours de ces semaines a
donc été le fondement adéquat pour les décisions
qui devaient maintenant être prises à Noël 1923.
|
551
|
Ceux qui ont assisté aux conférences de novembre
à décembre 1923 se souviendront encore du fait
qu'ici, sur le lieu de travail de Dornach,
l'expérience directe a montré qu'en ce moment
décisif, l'histoire future de l'humanité
s'écrivait concrètement dans la sphère de
conscience et de force de la Terre et des humains
prêts à l'accueillir. Grâce à une direction
spirituelle planifiée, grâce au destin de ce
mouvement qui atteignait maintenant sa 21e année
d'activité terrestre, grâce à la formation et à la
préparation particulières des humains, la
structure et l'enveloppe terrestres dans
lesquelles la nouvelle impulsion pouvait
s'incarner étaient en quelque sorte créées.
|
Au cours de ces semaines, les importantes
discussions préliminaires eurent lieu dans
l'appartement de Rudolf Steiner, au cours
desquelles il exposa le plan et l'organisation de
la nouvelle fondation du mouvement, de la société,
de l'université, de ses tâches ésotériques, des
sections à constituer pour la direction du travail
de l'université, de la structure, du sens et du
but de l'organisme spirituel à créer lors du
prochain congrès de Noël. Durant ces semaines,
Rudolf Steiner mena à bien ces discussions
préliminaires et prit des décisions en
collaboration avec Madame Marie Steiner, Albert
Steffen, le Dr I. Wegmann et le Dr G. Wachsmuth.
Plus tard, au cours de ces discussions, le Dr E.
Vreede fut alors encore inclu. Au cours de son
exposé sur la structure de base à créer, Rudolf
Steiner donna aussi la répartition et les tâches
des sections de l'Ecole Supérieure à constituer :
la création d'une section anthroposophique
générale, d'une section des arts oratoires et
artistiques, d'une section des belles sciences,
d'une section médicale, d'une section de sciences
de la nature, d'une section mathématiques et
astronomiques et d'une section des beaux-arts. Il
n'est pas possible dans ce cadre d'exposer en
détail toutes les connaissances fondamentales, les
lois spirituelles et les directives que Rudolf
Steiner a révélées dans ces pré-propositions. Car
il s'agissait d'une harmonie de toutes les
impulsions et de tous les objectifs mûris en
lui-même à partir de la compréhension de
l'évolution spirituelle du passé, du présent et de
l'avenir, qu'il a transmis au germe de cet
organisme spirituel qui allait maintenant prendre
vie, dans la plus grande concentration.
|
Après que les conditions préalables et les
directives pour les décisions à prendre lors du
congrès de Noël dans la sphère de l'organisme
global du Mouvement aient été clarifiées,
l'invitation à tous les groupes nationaux et aux
membres, signée au nom de la Société
anthroposophique en Suisse par Albert Steffen et
le Dr G. Wachsmuth, a été envoyée à la mi-décembre
au Goetheanum, à l'initiative de Rudolf Steiner,
pour les inviter à participer à l'assemblée
constitutive de la Société anthroposophique
universelle lors du congrès de Noël 1923.
|
Un flot d'amis plus important que prévu se
retrouva le 24 décembre 1923 au lieu d'activité
central du mouvement à Dornach. Comme
|
552
|
le nouveau bâtiment du Goetheanum n'en était
qu'à ses tout premiers balbutiements sur la
colline et que les manifestations devaient donc
encore se dérouler dans les locaux provisoires de
la menuiserie, consacrés par l'histoire de la
création et des souffrances du Mouvement, il a été
nécessaire d'agrandir les locaux trop étroits en
abattant des murs et en construisant des
extensions afin de pouvoir accueillir tous les
participants.
|
Avant d'aborder plus en détail l'acte de
consécration de l'acte fondateur, il convient de
donner un bref aperçu de la forme générale de
cette réunion de Noël. La session était structurée
de telle sorte que l'assemblée constitutive et la
pose de la première pierre se sont déroulées les
24 et 25 décembre. Le congrès dans son ensemble a
été porté par le cycle de conférences de Rudolf
Steiner : "L'histoire universelle sous l'éclairage
anthroposophique et comme base de la connaissance
de l'esprit humain". La consécration par l'art a
été apportée par les représentations festives des
jeux de Noël et de l'eurythmie, sous la direction
de Madame Marie Steiner. Albert Steffen
introduisit le congrès de Noël le 24 décembre avec
la conférence "Aus der Schick-salsgeschichte des
Goetheanum (De l'histoire de destin du
Goethéanum)". L'unité de la science, de l'art et
de la religion, qui est la mission du Mouvement et
de l'Ecole de Science de l'esprit, a été évoquée
dans trois conférences sur "l'anthroposophie et la
connaissance de la nature", "l'anthroposophie et
l'art" et "l'anthroposophie et la religion". Le
premier thème a été abordé par le Dr Guenther
Wachsmuth sur "L'antériorité terrestre et le
destin de l'humanité", le deuxième par Jan Stuten
sur "La musique et le monde spirituel" et le
troisième par le Dr K. Schubert :
"L'anthroposophie, un guide vers le Christ". Dans
la deuxième moitié du congrès, les participants se
sont réunis à dix heures du matin pour discuter du
travail futur et prendre des décisions. Le 1er
janvier au soir, Rudolf Steiner prononça les
paroles de clôture et de balisage pour l'avenir
lors de la neuvième conférence de son cycle
historique.
|
Pour comprendre la signification de ce qui s'est
passé durant les jours de Noël de l'année 1923, il
est nécessaire de se remémorer brièvement
l'histoire précédente. Nous avions décrit la
grande solitude dans laquelle Rudolf Steiner avait
reçu, au tournant du siècle, les connaissances
décisives sur l'être spirituel de l'humain et sur
l'événement macrocosmique de l'acte du Christ, et
avait cherché les moyens de transmettre ces
connaissances aux humains. Comment, à partir de
cette solitude du chercheur spirituel, il offrit
d'abord à ceux qui étaient ouverts à une telle
connaissance la possibilité d'accueillir les
nouveaux résultats spirituels à partir de leurs
communautés empruntées à la tradition ou à
d'autres courants spirituels et de les assimiler
de telle manière que finalement, dans les années
1909-1912, la décision de se débarrasser des
anciennes enveloppes et de donner un nouveau cadre
terrestre au nouveau contenu dut mûrir
d'elle-même. Au cours de la première septaine ,
tant que d'autres contextes traditionnels
existaient, il avait adapté son activité à leur
organisation extérieure,
|
553
|
il avait été le secrétaire général de la section
allemande de la Société théosophique, à la demande
de cette dernière, et avait aussi rempli
correctement les fonctions extérieures qui
découlaient d'une telle tradition. Lorsque, au
cours des deux septaines suivants, une nouvelle
enveloppe s'est formée pour l'être vivant en
développement de ce mouvement spirituel, il lui a
donné la possibilité d'un développement
entièrement libre de son être propre, en ce sens
que, depuis 1912, il n'exerçait plus de fonctions
extérieures pour cette organisation, mais était
l'enseignant et le conseiller qui lui donnait son
contenu spirituel, tout en étant, comme il l'a
souligné expressément à plusieurs reprises, une
"personne privée" vis-à-vis de son développement
extérieur, dont les conseils pouvaient être
acceptés ou refusés, exécutés ou non, en toute
liberté. Certains auront peut-être été surpris que
nous ne soyons pas entrés plus en détail, dans ce
qui précède, dans les détails organisationnels
extérieurs de cette époque en ce qui concerne les
différentes transformations structurelles de ses
comités, fonctionnaires, etc. Mais justement, à
cette époque de 1912-1923, Rudolf Steiner
n'appartenait pas lui-même à ces institutions, il
était leur conseiller quand on le lui demandait,
mais pas leur fonctionnaire, comme il le
soulignait lui-même. C'est pourquoi ces événements
n'entrent pas dans le cadre de cette biographie
qui, durant cette période, ne doit s'intéresser
qu'à l'activité de Rudolf Steiner en tant
qu'enseignant et conseiller. Au cours de ces deux
septaines, cet organisme a pu, pour ainsi dire, de
son propre destin et de sa propre volonté,
traverser toutes les maladies infantiles et les
stades de développement changeants propres à de
tels êtres vivants. Rudolf Steiner, en l'encadrant
avec amour, montrait le chemin, mais laissait aux
autres la liberté de suivre ce chemin, droit ou
non droit, rapide ou lent, en se précipitant vers
l'avant ou en le freinant, avec discernement ou
seulement après avoir été instruit par des coups
du sort, toujours par leurs propres moyens. C'est
ainsi que cet être vivant du mouvement spirituel a
pu se déployer en toute liberté et s'examiner
lui-même pour savoir si et comment il avait
atteint, pas à pas, le stade de développement de
la vie où, après trois septaines, la pleine
réalisation de sa propre maturité, la naissance
je, pouvait s'accomplir organiquement. A ce stade
de développement, il n'était plus possible de se
contenter de renouer avec les acquis
traditionnels, et aussi le rapport de l'enseignant
avec la communauté des élèves devait elle aussi
être réorganisée. Il ne pouvait plus être, comme
au début, un administrateur transformant les
acquis, ni, comme plus tard, uniquement un
enseignant et un soignant à distance de
l'éducation libre. L'engagement du principe
spirituel créateur au sein de l'organisme mûr de
la communauté devait conduire, conformément à ces
grandes lois éternelles de la vie, à une nouvelle
forme de vie et de communauté. Or, ce fut l'une
des métamorphoses décisives que Rudolf Steiner
accomplit à Noël 1923 dans son rapport avec cet
organisme spirituel qui avait alors mûri pendant
21 années de sa vie, qu'il s'unit à lui avec tout
son être, son existence et son action, de sorte
que son devenir devint son devenir, son destin son
destin,
|
554
|
qu'il ne devint plus seulement un administrateur
et un conseiller, mais le noyau essentiel de cet
organisme agissant sur Terre et dans les mondes
spirituels, une unité inséparable à travers tous
les coups du sort extérieurs, qui suivra ensemble
tous les chemins futurs du destin dans la joie et
la souffrance, le combat et la victoire, l'épreuve
et la résurrection. C'est la création de la forme
de vie sociale d'un mouvement spirituel à partir
des lois des mondes spirituels que Rudolf Steiner
a accomplie par cet acte à Noël 1923. Et celui qui
ne reconnaît pas que cette œuvre est égale et
inséparable de ses autres œuvres, de ses livres et
de ses écrits, de ses actes dans la connaissance,
l'art et la vie religieuse, de ses dons et de ses
sacrifices pour toujours, celui-là n'a pas compris
la totalité, l'unité, la réalisation conséquente
de l'image originelle de sa création. - On ne peut
pas, dans la sphère des événements terrestres,
affirmer un être et nier son incarnation, on ne
peut pas vouloir être pris dans le courant du
destin d'une entité spirituelle et pourtant se
maintenir en dehors de la forme de vie sociale
dans laquelle elle s'incarne sur terre. Car une
communauté fondée sur l'esprit s'élève plus haut
et s'enracine plus profondément que toute autre
communauté sur Terre. C'est pourquoi les créations
spirituelles de Rudolf Steiner et ce qu'il a créé
à Noël 1923 forment un tout indissociable pour
celui qui comprend l'esprit de la totalité.
|
Rudolf Steiner a accompli cet engagement de tout
son être, cette création d'une nouvelle forme de
communauté et de vie sociale, cette construction
suprasensible indestructible sur Terre, érigée sur
le fondement durable des forces du cœur humain,
non pas comme une disposition changeante dans
l'organisation ou sous la forme d'un conseil, qui
ne faisait appel qu'aux forces de la tête ou de la
volonté, à l'intellect, au tempérament ou à
l'échéance temporelle des êtres humains à un
moment donné, mais comme un acte de consécration,
une pose de la première pierre dans les forces
immortelles et éternellement ressuscitées de
l'être humain. Dans la Création de 1923, il donna
à cette forme de vie sociale, fondée dans le
suprasensible et réalisée sur Terre, à la fois
l'essence, la substance, la direction et le but.
Comme tout ce qui agit sur terre, elle peut passer
par bien des transformations, des épreuves, des
combats contre les forces adverses et des
résurrections, mais elle est, de par sa nature et
son essence, une réalité spirituelle durable, donc
indestructible dans son noyau essentiel et appelée
à des degrés d'évolution et des actes toujours
nouveaux. Ce qui s'est passé le jour de Noël 1923,
qui a été vécu par les personnes présentes et qui
a ensuite accueilli dans sa sphère d'existence et
d'action les cœurs de tous les êtres humains qui
se sont librement associés à ce qui s'est passé et
à ce qui est en devenir, ne peut donc pas non plus
être décrit par écrit. Il faut toujours le
chercher à nouveau dans sa patrie suprasensible et
maintenir soi-même en éveil le lien, lorsque
quelque part la turbulence des événements
extérieurs ou les forces des puissances adverses
rendent invisible la flamme qui brille sans cesse
à l'intérieur
|
555
|
ou cherchent à étouffer son éclat. C'est
pourquoi nous ne pouvons ici qu'évoquer le cours
extérieur des événements, laissant à chacun le
soin d'aller chercher en lui-même le noyau de
l'événement et de le déployer.
|
C'est dans ce contexte que Rudolf Steiner se
présenta le 24 décembre 1923 devant les membres
réunis à Dornach et commença par reprendre les
paroles qu'Albert Steffen venait de prononcer dans
sa conférence d'ouverture sur "L'histoire du
destin du Goetheanum". Nous voulons ici laisser
parler un rapport que Rudolf Steiner a écrit
lui-même immédiatement après. Il rappela l'appel
qui avait été lancé à tous les groupes nationaux
et amis de par le monde pour qu'ils envoient leurs
représentants à Dornach pour la réalisation de
cette refondation ou qu'ils y participent
eux-mêmes, et il dit en guise d'introduction :
|
"L'appel a été entendu d'une manière inattendue.
Sept à huit cents personnes se sont présentées à
la "pose de la première pierre" de la "Société
anthroposophique universelle". Ce qu'ils ont fait
doit être décrit au fur et à mesure.
|
L'ouverture et la direction des assemblées
m'incombaient. - Et elle fut facile pour mon cœur
- cette ouverture. Le poète suisse Albert Steffen
était assis à côté de moi. Les anthroposophes
réunis le regardaient avec une âme pleine de
reconnaissance. C'est sur le sol suisse qu'ils
s'étaient réunis pour former la Société
anthroposophique universelle. Depuis longtemps,
ils doivent à la Suisse un membre dirigeant en la
personne d'Albert Steffen, vers lequel ils se
tournent avec un véritable enthousiasme. En lui,
j'avais devant moi la Suisse dans l'un de ses plus
nobles fils ; mon premier mot a été de lui
adresser, ainsi qu'à nos amis, le salut le plus
cordial - et le second de l'inviter à donner le
coup d'envoi de l'assemblée.
|
Ce fut un début profondément émouvant. Albert
Steffen, le merveilleux peintre en mots, le
créateur d'images poétiques, prit la parole. On
l'entendait et on voyait devant soi, comme des
visions, des images puissantes pour l'âme.
|
La pose de la première pierre du Goetheanum en
1913 était là, devant l'œil de l'âme. Je ne trouve
pas les mots pour dire ce que j'ai ressenti dans
mon âme lorsque j'ai revu, dans le tableau de
Steffen, ce processus auquel j'avais pu participer
il y a dix ans.
|
Le travail au Goetheanum, dans lequel
s'activaient des centaines de mains dévouées et où
battaient des centaines de cœurs enthousiastes,
faisait apparaître à l'esprit des mots
artistiquement parfaits.
|
Et - l'incendie du Goetheanum : toute la
tragédie, la douleur de milliers de personnes,
elles ont tremblé lorsqu'Albert Steffen nous a
parlé.
|
Et puis - au premier plan d'un tableau
supplémentaire : l'essence même de
l'anthroposophie transfigurée par l'âme de poète
d'Albert Steffen - à l'arrière-plan, ses ennemis,
non pas blâmés, mais simplement posés là avec une
force créatrice.
|
"Dix ans de Goetheanum" ; les paroles d'Albert
Steffen à ce sujet ont profondément - on l'a senti
- pénétré dans le cœur des personnes réunies.
|
Après ce prélude si digne, il me revint de
parler de la forme que devra désormais prendre la
Société anthroposophique universelle.
|
Il fallait dire ce qu'il fallait mettre à la
place d'un statut ordinaire. Une description de ce
que les humains veulent accomplir dans un contexte
de vie purement humain - en tant que société
anthroposophique - doit remplacer un tel statut.
|
556
|
Au Goetheanum, qui ne dispose que de locaux
sommairement aménagés en bois depuis l'incendie,
on cultive l'anthroposophie. Il convient de dire
ce que les directeurs du Goetheanum entendent par
ces soins et quels effets ils en attendent pour la
civilisation humaine. Ensuite, comment ils
conçoivent ces soins dans une université libre de
sciences de l'esprit. Il ne s'agit pas d'énoncer
des principes auxquels on devrait adhérer, mais de
décrire une réalité dans sa spécificité. Ensuite,
il faut dire : Celui qui veut apporter sa
contribution à ce qui se passe au Goetheanum peut
devenir membre. Comme "statut", qui ne doit
cependant pas être une "statue", mais la
représentation de ce qui peut résulter d'un tel
rapport de sociéte purement humain et vivant, est
maintenant proposé ceci".
|
Vient ensuite la lecture des principes et des
statuts, dont nous devons laisser l'étude au
lecteur lui-même. Ils sont les plus libres qui
puissent être donnés à une communauté spirituelle,
car ils consistent justement à présenter ce que
fera une association d'humains "qui veulent
soigner la vie de l'âme dans l'humain individuel
et dans la société humaine sur la base d'une vraie
connaissance du monde spirituel". Rudolf Steiner
décrit ensuite dans son rapport :
|
"En
relation étroite avec l'assemblée
d'ouverture du matin du 24 décembre se
tenait la festivite du matin du 25, qui
portait le nom de : 'Pose de la pierre
de fondation de la Société
anthroposophique universelle'.
|
Il
ne pouvait s'agir que d'une pose de
pierre de fondation idéelle et
spirituelle. Le sol dans lequel la
"pierre de fondation" a été posée ne
pouvait être que les cœurs et les âmes
des personnalités réunies dans la
Société ; et la pierre de fondation
elle-même doit être l'esprit qui jaillit
de la conception anthroposophique de la
vie. Cette disposition, telle qu'elle
est exigée par les signes de l'époque
actuelle, est la volonté de trouver, par
l'approfondissement humain de l'âme, le
chemin vers la contemplation de l'esprit
et la vie à partir de l'esprit. Je
voudrais tout d'abord placer ici ce avec
quoi j'ai essayé de former la "pierre
angulaire" sous forme de sentences".
|
Le 25 décembre suivit donc l'acte de
consécration par les paroles de la "pose de la
pierre de fondation" que Rudolf Steiner accomplit
dans le cœur des humains. Il faut toujours
reprendre les mots de cette "pose de la pierre de
fondation" dans la concentration et la méditation,
afin de maintenir constamment présent à la
conscience le lien avec la source vivante de cet
acte. Lorsque Rudolf Steiner appelle ici les âmes
humaines et les mondes spirituels à coopérer et à
prendre soin de ce qui se passe et de cette
communauté, cela correspond à la réalité de ce
qu'il a réalisé depuis le début du siècle.
Construite sur les bases solides de la
connaissance, de l'exploration scientifique des
domaines sensoriels et suprasensibles, de l'art et
de la prestation sociale, et donc érigée à partir
des meilleurs éléments constitutifs du monde du
travail humain, une pyramide de l'activité
terrestre avait pour ainsi dire vu le jour, qui,
dans son élévation la plus élevée, touchait à la
pyramide du monde créateur hiérarchique et
spirituel, dont la pointe était en quelque sorte
orientée vers le bas et qui s'élargissait vers le
haut, et à partir de laquelle s'élevait la
direction des événements spirituels et terrestres
de la Terre. Parce qu'il a été a la rencontre de
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ce contact, il était sur les marches solides
sculptées par les meilleures forces scientifiques,
artistiques et religieuses de notre époque, ce
contact ne pouvait plus, comme au siècle
précédent, naître de la foi et du mythe, mais de
la connaissance et de l'action. C'est pourquoi,
lors de l'assemblée constitutive de la veille, il
avait pu énoncer le fait suivant lors de la
description historique du développement de ce
mouvement spirituel :
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"L'impulsion
pour le mouvement anthroposophique est
née non pas d'un arbitraire terrestre,
mais de l'obéissance à l'appel qui a
retenti depuis le monde spirituel, non
pas d'un arbitraire terrestre, mais de
la vue des images grandioses qui, depuis
le monde spirituel, se sont présentées
comme les révélations modernes pour la
vie spirituelle de l'humanité ... Nous
voulons inscrire dans notre âme comme
principe suprême pour le mouvement
anthroposophique, qui doit avoir son
enveloppe dans la Société
anthroposophique, que tout en lui est
voulu par l'esprit, qu'il veut être un
accomplissement de ce que les signes des
temps disent en lettres lumineuses au
cœur des humains".
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Et c'est pourquoi il pouvait maintenant laisser
les paroles de cet acte de consécration s'achever
par une prière adressée aux puissances auxiliaires
du monde spirituel, "afin
que devienne bon ce que nous
fondons par le cœur, ce que
nous voulons conduire avec
détermination par la tête".
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Comme nous l'avons dit, de tels événements ne
sont pas soumis à notre interprétation, mais ne
sont accessibles qu'à notre vécu, et c'est
pourquoi le lien avec l'événement de la session de
Noël 1923 doit naître dans l'âme de chacun de ceux
qui se savent liés à lui. En décrivant le
déroulement des événements, nous ne pouvons que
mentionner ici les différentes étapes ultérieures
qui consistèrent à présenter et à décider les
principes reconnus par Rudolf Steiner comme les
conditions préalables d'une activité saine et
conforme à l'esprit, la direction de la Société,
la fondation de l'Ecole supérieure et de ses
sections, ainsi que la structure et le mode de
fonctionnement de l'organisme de cette Communauté,
tels qu'ils sont définis dans les statuts. Au
cours de la deuxième moitié de la réunion, des
débats animés, des rapports et des suggestions
issus du travail de tous les pays ont permis de
dresser un tableau vivant de ce qui a déjà été
fait et de ce qu'il faut maintenant entreprendre
et accomplir comme travail de construction sur la
nouvelle base. Au cours de ces débats communs,
Rudolf Steiner donna encore plusieurs fois des
explications sur le sens et le but de la
consécration donnée lors de la pose de la pierre
de fondation, explications qui conduisirent au
cœur de la communauté de destin qui commençait.
Pour le travail ésotérique de l'École Supérieure,
il a ensuite donné d'autres directives lors du
début des travaux en janvier/février de l'année
prochaine, nous y reviendrons. Ce que les
participants ont reçu de ces événements de la
réunion de Noël, c'est l'expérience de nouvelles
possibilités illimitées d'action planifiée à
partir d'une loi spirituelle, une impulsion qui
s'est poursuivie par la suite à travers toutes les
transformations et les obstacles à surmonter
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s'est avéré une force invincible qui,
aujourd'hui encore et pour l'avenir, guide et
porte la marche du destin de ce mouvement.
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Rudolf Steiner a donné la classification
historique mondiale et la vision de la nécessité
qui peut être déduite du cours de l'histoire
jusqu'à présent dans le cycle de neuf conférences
sur "L'histoire mondiale dans l'éclairage
anthroposophique et comme base de la connaissance
de l'esprit humain", dont il a parlé les soirs du
24 décembre 1923 au 1er janvier 1924. Comme nous
l'avons souligné au début de cette biographie,
Rudolf Steiner a toujours maintenu de manière
organique un lien vivant entre la nouveauté et le
courant spirituel éprouvé du passé et c'est
pourquoi, depuis le tournant du siècle, il a
toujours rappelé dans ses conférences les grandes
lignes de développement et les actes spirituels du
passé. Il est maintenant très instructif
d'observer les différents points de vue à partir
desquels il a éclairé, hier et aujourd'hui, la
réalité du passé déjà acquis par l'humanité. Dans
son ouvrage "Les énigmes de la philosophie", qu'il
a écrit au tournant du siècle, il a d'abord, comme
nous l'avons montré à la page 1, retracé
l'histoire de la pensée humaine au cours des
siècles passés. Ce qu'il donnait maintenant, au
seuil de l'entrée de ce mouvement spirituel dans
une nouvelle phase de développement, n'était plus
seulement axé sur le développement historique de
la pensée humaine, mais sur la conduite
spirituelle planifiée de l'humanité dans le passé
jusqu'à l'époque actuelle. Il s'agissait d'une
histoire des mystères et de l'esprit qui, à partir
des faits de l'évolution à étudier de manière
sensorielle et suprasensible, mettait en lumière
les événements et les phénomènes qui apportaient
la preuve d'une telle conduite de l'humain à
partir des mondes spirituels.
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C'est pourquoi ce cycle de conférences est allé
encore plus loin que l'ouvrage du tournant du
siècle dans la préhistoire, expliquant tout
d'abord la naissance et le développement, dans les
plus anciens lieux de mystères, de la "mémoire
localisée", de la "mémoire rythmée" et de la
"mémoire temporelle" de l'humain primitif, pour
passer ensuite à la formation aux mystères, dans
la préhistoire atlantique/atlantéenne, asiatique
ancienne et européenne. Il a ensuite présenté les
développements du courant des mystères du sud,
tels qu'ils sont apparus dans la période
culturelle de l'Égypte ancienne et de la Grèce,
que l'on peut lire par exemple dans les symptômes
de l'épopée de Gilgamesh, du service d'Artémis à
Éphèse, des mystères chthoniens, éphésiens et
samothraces, jusqu'à la nouvelle situation de
l'esprit qui a été inaugurée à l'époque
d'Aristote. Il décrivit l'impulsion puissante qui
jaillit des mystères d'Hybernie et de l'Europe du
Nord pour donner naissance à cet événement
spirituel, et comment s'effectuèrent ensuite la
synthèse et la renaissance de ces courants de
développement issus de l'esprit et de la force de
l'événement du Christ, ses irradiations dans les
premiers siècles post-chrétiens, au Moyen Âge,
dans les symptômes du développement religieux
extérieur et des mystères et actes plus cachés
d'un véritable rosicrucianisme.
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De cette vaste vue d'ensemble du sens et du plan
de l'histoire de l'esprit, que nous ne pouvons ici
qu'esquisser en quelques traits, il a ensuite
conduit les auditeurs, dans le dernier exposé, à
l'événement décisif du XXe siècle, à savoir la
disparition de la direction spirituelle. Le fait
que l'humanité, après avoir perdu la connaissance
de la guidance spirituelle au cours des derniers
siècles, se trouve aujourd'hui, par nécessité
évolutive, à nouveau placée au seuil du monde
spirituel et qu'elle doit désormais entrer dans
cette sphère de manière consciente et volontaire,
afin de conduire les siècles à venir du chaos à
l'ordre, de la pensée sensorielle déviante à
l'harmonie avec le plan universel reconnaissable
dans le suprasensible. - Les mots avec lesquels
Rudolf Steiner a conclu ce cycle de conférences
étaient, après une référence aux événements de la
réunion de Noël, un appel au courage et à la
vigilance. Il a exprimé ce que lui-même, le
Goetheanum, la Société, allaient maintenant
commencer et réaliser de toutes leurs forces et a
appelé les amis à collaborer en tout lieu :
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"Nous
avons posé la pierre de fondation ici.
C'est sur cette pierre que doit être
érigé l'édifice dont les pierres
individuelles seront les travaux que les
individus de tous nos groupes
accomplissent maintenant dans le vaste
monde. C'est sur ces travaux que nous
voulons maintenant jeter un regard en
esprit et prendre conscience de la
responsabilité dont il a été question
aujourd'hui".
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Il a rappelé la responsabilité qui découle du
fait que l'humanité se trouve aujourd'hui devant
le gardien du seuil et, pour conclure, il a donné
une nouvelle fois la consécration de la "pose de
la pierre de fondation" à tous ceux qui voulaient
maintenant se mettre au travail, comme une clé
pour entrer dans cette nouvelle sphère d'activité.
C'est ainsi qu'a été franchie l'étape décisive,
ésotériquement fondée, riche de destin et porteuse
d'avenir du Congrès de Noël 1923.
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Replacer
dans son contexte
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