Schmidt-Brabant - Une banque au sens spirituel

Institut pour une triarticulation sociale
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Trad. BP v.01 au 05/07/2020
(avec quelques retouches de FG)

Conférences de science de l'esprit

Manfred Schmidt-Brabant

La banque au sens spirituel

L’argent – au service de l’homme


Editions du Goetheanum

TIRAGE SPECIAL POUR LES DIX ANS D'EXISTENCE DE LA BANQUE COMMUNAUTAIRE LIBRE, DECEMBRE 1994

Transcription légèrement rédigée d’une conférence donnée lors de l’assemblée générale de la Freie Gemeinschaftsbank BCL le 16 avril 1999 à Dornach

(les dates ci-dessus laissent planer la suspicion d'une erreur)





C’est à Bochum qu’ont été faites les premières tentatives pour concevoir un nouveau système bancaire.(1) De quelle idée originale était partie la banque communautaire à Bochum ? Créer des institutions semblables à des banques – je reviendrai plus tard sur cette expression. Ces institutions semblables à des banques n’étaient pas nées de théories comme on en avait l’habitude jusqu’alors, de théories monétaires, de théories sociales ; c’était en fait une impulsion morale. Il faut plutôt les voir comme une méthode permettant d’expérimenter une nouvelle humanité dans la gestion de l’argent. C’était le fondement. Cette impulsion était née de l’expérience du temps, de l’expérience de l’histoire de la banque, que nous examinerons dans un instant. Elle remonte à la suggestion que Rudolf Steiner avait faite, peu après la Première Guerre mondiale, de rechercher une nouvelle moralité, on pourrait même dire une nouvelle façon d’être chrétien, afin de ramener dans les transactions monétaires, les prêts, etc., le caractère humain qui avait été perdu au cours de l’histoire moderne.
Dans cet exposé, je voudrais faire la lumière sur ce que j’ai sommairement décrit comme une « méthode permettant d’expérimenter une nouvelle humanité dans la gestion de l’argent ». Ce faisant, je ne m’engagerai toutefois pas dans les diverses théories de l’argent qui existent également dans le champ de travail anthroposophique, mais je décrirai les principes fondamentaux qui se trouvent derrière les différents points de vue sur la manière de gérer l’argent.
Je voudrais commencer par un commentaire. Parler de la réalité des transactions monétaires touche profondément les sentiments, voire les émotions, des gens. Par conséquent, je vais m’efforcer de piloter le mieux possible mes considérations entre les écueils émotionnels que l’on pourrait nommer Charybde et Scylla. Je vais essayer de montrer de manière plus imagée ce que les personnes impliquées dans la Freie Gemeinschaftsbank, en tant que fondateurs ou de collaborateurs, ont porté, bougé, impulsé, et ce que d’autres institutions similaires impulsent.
On situera toujours une telle réflexion dans le contexte très spécifique de notre époque : il y a les besoins de notre temps, nous les connaissons tous ; ils nous interpellent chaque jour par l’intermédiaire des médias. Mais à ces besoins de notre temps est liée une question sérieuse. On voit la somme infinie d’intelligence que l’humanité est capable de rassembler. Quelle intelligence ne met-on pas dans le domaine de la technologie ! Des projets comme les vols lunaires ou les sondes spatiales ne sont que des symboles de la capacité, dans le domaine technique, de faire tout ce que l’on veut. Et il ne s’agit pas seulement de l’intelligence technique. Considérons aussi le monde si diversifié de l’idéalisme : que ne tentent pas de faire des milliers et des millions de personnes – pour le salut de la Terre, pour le salut des peuples défavorisés ! Que ne voyons-nous pas non plus comme force et comme courage de faire des sacrifices lorsqu’il s’agit de répondre à des besoins humains ! Tout est là, tout peut remplir d’admiration, et en même temps on est sans cesse confronté, autour de soi, à de nouvelles ruptures sociales.
Ces ruptures sociales se manifestent encore et encore dans trois grands domaines. Il y a d’abord ce qu’on appelle le problème mondial du chômage, expression qui est loin de recouvrir la réalité. Il y a déjà le fait que les gens ne gagnent rien et sont obligés de recevoir, comme une aumône, des allocations de chômage. Mais le problème est beaucoup plus vaste. Des millions et des millions de personnes sont rendues étrangères à leur mission de vie. Quelqu’un qui, conformément à sa volonté, à son talent, voulait vraiment être musicien ne trouve pas de travail, et le voici pompiste ! Dans un sens plus élevé, il est au chômage – par rapport à ce qu’il voulait faire et aurait peut-être dû faire. Il a un travail, il gagne de l’argent et, probablement, le pompiste est-il encore mieux payé que le violoniste de l’orchestre. Le chômage est un problème de notre présent social bien plus profond qu’on ne le pense.

Deuxièmement, il en va de même pour la criminalité. Il ne faut pas seulement considérer les 900 milliards de dollars de chiffre d’affaires annuel du seul commerce de la drogue ; celui-ci se répand, en crimes économiques anonymes de toutes sortes ; il s’introduit dans de nombreux domaines et provoque, comme le chômage, les chocs internes de la vie sociale.
Troisièmement, nous voyons les terribles événements de Bosnie. Mais pourquoi sont-ils si terribles ? Comment un peuple si misérable en soi en vient-il à transformer des milliards en poudre, au sens propre du terme ? Ce n’est pas une accusation ; je pense ici à l’énorme industrie d’armement qui s’est développée sur la Terre.
Derrière ces trois phénomènes, exemplaires et significatifs, il y a certaines conceptions de l’argent et donc aussi du rôle que les banques doivent jouer ; ce sont des idées fausses. Si je peux me le permettre dans un tel discours, je résumerais ainsi : une grande partie des maux de notre temps provient d’une fausse compréhension de ce qu’est réellement l’argent.
Le chômage n’est que l’expression de l’opinion selon laquelle on peut payer le travail de quelqu’un, que le travail est une marchandise à acheter et qu’une personne doit veiller à vendre sa marchandise – le mieux possible, le plus cher possible, avec l’aide des syndicats, mais justement : elle doit la mettre sur le marché, cette marchandise ! – Nous y reviendrons.
La deuxième idée, qui était déjà répandue dans la Rome antique, est que l’argent en soi est neutre. À Rome, on disait « l’argent n’a pas d’odeur » (pecunia non olet), même si, comme à l’époque, on le gagnait en louant des latrines. L’opinion selon laquelle un billet de 100 francs est un billet de 100 francs, qu’il provienne d’un trafic de drogue ou d’un travail honnête, est la deuxième grande idée fausse sur l’argent. La première : l’argent peut acheter du travail ; la deuxième : l’argent est neutre, quelle que soit son origine.


Troisièmement, l’industrie de la défense n’est qu’un exemple frappant de l’idée selon laquelle le profit justifie le produit. La rentabilité d’une production, quelle qu’elle soit, justifie le produit.
Or, la situation dans laquelle nous nous trouvons actuellement n’est apparue que progressivement au cours de l’histoire. Une observation historique plus approfondie permet de dégager trois grandes étapes. On voit alors que l’ensemble du monde antique, c’est-à-dire ce qu’on appelle les cultures des Mystères – Babylone, Égypte, jusqu’aux débuts de la Grèce – étaient complètement dominées par la vie de l’esprit, alors totalement théocratique, par une culture sacerdotale qui englobait tout. Toute la vie était déterminée depuis les temples. Cette domination disparut ensuite progressivement en Grèce, et plus encore à Rome ; là, l’État commença à dominer, l’État et la vie juridique, les lois furent désormais le facteur déterminant de l’espace social, et le sacerdoce, les temples, reculèrent jusqu’au troisième grand changement, à partir du 16e, 17e siècle : l’État recula à son tour et l’économie mondiale prit de l’importance, devint prédominante. Aujourd’hui, nous vivons déjà à une époque où tout ce qui est lié aux domaines de la vie au sein du social est teinté, déterminé et dominé par l’économie.



Ces trois grandes étapes ont toutefois entraîné d’énormes changements dans la gestion de l’argent. Dans les anciennes cultures des Mystères, celui-ci constituait d’une manière ou d’une autre le trésor du temple. La richesse du pays appartenait en fait aux dieux. Si, pour une raison ou une autre, il devait y avoir quelque chose comme un emprunt d’argent, c’était un processus sacré et religieux. Ce n’est qu’en Grèce qu’apparut une autre façon de se comporter par rapport à l’argent : celui-ci devint une richesse personnelle. Ce phénomène se manifesta particulièrement à Rome, où apparut l’homme riche : Jules César, Crassus, légendaire riche politicien romain, jusqu’à Jacob Fugger (1459-1525) à Augsbourg qui, grâce à sa richesse, prêta de l’argent au roi. L’argent devint un bien personnel, et les opérations de prêt qui commencèrent alors devinrent des opérations de prêt personnel. Le roi dut frapper à la porte du riche marchand pour lui emprunter de l’argent.
Et c’est seulement avec la montée en puissance de l’économie que commence le processus qui a eu un effet aussi désastreux au cours du XXe siècle : la dépersonnalisation de l’argent. On assiste à la création du capital anonyme, de la société anonyme. Les gens passent à l’arrière-plan, ils deviennent interchangeables à volonté, par exemple en tant que présidents de sociétés. Le capital en tant que tel commence à régner.
Ce n’est qu’à cette époque que le système bancaire réel se forme. Dans ses observations sur l’histoire de la banque, Rudolf Steiner s’intéresse à des personnages tels que les Rothschild (2). Le caractère personnel y est encore présent, l’élément venu de l’Antiquité y est toujours présent, mais en même temps, c’est là qu’apparaît le système bancaire moderne – avec les Rothschild et les banques qu’ils ont créées à Paris, à Londres, etc.
Aujourd’hui, ce système bancaire moderne est associé à de nombreux problèmes qui caractérisent la situation monétaire, car la plupart des banques qui se développent actuellement cultivent et promeuvent le faux concept d’argent que nous avons décrit au début.
Afin de mettre un terme à cette situation, de se placer d’emblée dans une position complètement différente, il est nécessaire de bien analyser quelque chose que l’on connaît, mais que l’on néglige toujours. Je tiens à le souligner à ce stade : les considérations sur l’argent sont des considérations sur les composantes de toute biographie. Si l’on ne s’occupe pas seulement des sciences sociales, mais aussi du travail social et d’autres domaines similaires, on connaît les effets profondément offensants et blessants que peut avoir une mauvaise perception de l’argent pour la biographie d’une personne. Et c’est pourquoi de telles considérations sont en même temps des actes de connaissance de soi, de la nature humaine. Posons la question cruciale : que pensez-vous de l’argent ? Savez-vous, par exemple, que l’argent est en fait totalement illusoire ? – Je ne parle pas du billet de banque. Ce n’est qu’une apparence ; c’est une réservation.

L’une des grandes avancées faites par Rudolf Steiner dans le « Cours d’économie » a été son insistance sur l’idée qu’à l’origine, l’argent n’est rien d’autre qu’une comptabilité volante (3). J’aurais aussi pu tout aussi bien noter quelque part les chiffres : ce à quoi j’ai droit, ce que je dois aux autres. L’argent s’est développé parce que cette forme de comptabilité est gérable ; mais en tant que telle, elle est totalement sans valeur. Mettons que j’aie une valise avec 100 millions de francs suisses : je ne peux pas la manger, je ne peux pas m’en vêtir. Ce n’est qu’une valeur, une valeur numérique qui s’exprime là. Ce phénomène devient évident dans le système moderne des chèques et des cartes de crédit, où l’on ne manipule plus réellement d’argent, mais où la carte de crédit ne sert qu’à équilibrer des valeurs.
Cet état de fait a conduit Rudolf Steiner à formuler une exigence très forte : renoncer à tout impôt sur le revenu, mais instaurer plutôt un impôt sur les dépenses (4). Car le revenu lui-même, le fait d’avoir de l’argent, n’est pas du tout un fardeau pour l’organisation sociale. Repensez à la valise que vous avez chez vous, avec un million de francs suisses en billets : ce pourrait être de vieux journaux, ça ne veut rien dire. Ce n’est qu’au moment où, avec cet argent, vous bougez quelque chose dans l’organisme social, où vous achetez des marchandises à quelqu’un, c’est à ce moment-là que l’État doit dire : maintenant que l’argent est activé, je prélève mon obole. Steiner donne une description de l’impôt sur les dépenses si cohérente qu’il juge qu’un tel impôt doit également être dû quand on dépose son argent dans une banque. Car dès que vous déposez le million sur votre compte, la banque commence à travailler avec lui et quelque chose bouge dans l’organisme social, alors que le million à la maison est totalement inintéressant socialement (sauf si vous vous pavanez devant vos voisins avec une valise ouverte...). Du point de vue des sciences sociales, l’argent ne redevient réalité que lorsqu’il est dépensé.



Cela signifie que je suis disposé à ressentir ce que Rudolf Steiner, à l’occasion, formule de cette manière : l’argent est la chose la plus spirituelle qui existe dans l’économie (5) On ne peut le comprendre que spirituellement. C’est un processus qui vise à ce que d’autres personnes ayant la même compréhension spirituelle vivent dans une reconnaissance mutuelle de ce qui, extérieurement, en tant qu’argent, indique des valeurs de compensation entre les hommes.
Aujourd’hui, les excès de la dépersonnalisation de l’argent rendent une telle vision nécessaire. Ce qui nous amène au point le plus fondamental. C’est le processus : l’argent crée l’argent. Ce n’est pas le travail qui crée l’argent, c’est l’argent qui crée l’argent. Nous revenons ainsi au début de l’histoire de l’humanité. Car la plus ancienne façon de créer de l’argent à partir de l’argent est de faire payer des intérêts sur une somme empruntée. Quand je dis « le début de l’histoire humaine », je veux dire, bien sûr, le livre de Moïse : « Tu ne prêteras point ton argent à intérêt » (6). Cette phrase a façonné trois mille ans d’histoire. Et ce n’était pas seulement la vision biblique, celle de l’Ancien Testament ; la plupart des philosophes grecs, surtout Platon et Aristote, condamnaient violemment l’intérêt, comme l’ont fait de nombreux écrivains grecs et, plus tard, chrétiens, jusqu’au Moyen Âge, voire jusqu’aux temps modernes ! Si vous ouvrez une grande encyclopédie, telle que l’Encyclopédie théologique de l’Église catholique, vous la trouverez en toutes lettres – elle est toujours valable. Mais comme maintenant l’Église catholique gère des banques, fait des transactions monétaires, comme nous l’avons constaté à maintes reprises, elle a trouvé une formule qui n’est pas du tout inintéressante : on est autorisé à facturer des intérêts dans la mesure où l’on a eu des dépenses pour gérer et prêter l’argent. Mais c’est précisément ce commandement de Moïse qui a conduit à un phénomène tout à fait remarquable.
Car dans le même livre de Moïse, il est dit (aux juifs, il faut le rappeler) : « Tu pourras tirer un intérêt de l’étranger »(7) – donc des autres personnes. Et cela a conduit au phénomène universellement connu qui a déterminé tout le Moyen-Âge : il était interdit aux chrétiens, qui s’en tenaient à la première phrase, de demander des intérêts ; mais les juifs qui vivaient dans les villes médiévales étaient autorisés à prêter de l’argent avec des intérêts. Une histoire très particulière ! Les chrétiens s’en sont tenus à la première phrase, l’État aussi ; il y avait des interdictions très strictes par rapport aux intérêts. En même temps, l’État a déclaré : mais les juifs ont le droit, et c’est pourquoi nous autorisons à emprunter de l’argent aux juifs avec des intérêts.



Nous comprenons maintenant pourquoi, après la fin du Moyen-Âge, la famille Rothschild, le père et les fils, est soudainement apparue dans la création de la banque moderne. Un événement historique mondial !
Mais le problème de l’intérêt n’est pas le plus grave ; ce qui est beaucoup plus grave à l’époque moderne, c’est le fait que l’argent lui-même est devenu une marchandise. On dit qu’à chaque seconde, 300 milliards de dollars sont déplacés d’un bout à l’autre de la Terre à l’aide des moyens modernes de transmission de données ; en quelque sorte, cela signifie qu’un manteau est posé autour de la Terre, un manteau tissé par un mouvement continu et gigantesque d’argent, dans lequel, la plupart du temps, on échange celui-ci comme une marchandise : on achète des dollars, on vend des dollars, on les échange contre d’autres devises, etc.
Cette situation a été aggravée par le fait que, dès l’époque des Grecs anciens, les banques étaient des banques de dépôt, où les gens pouvaient garder leur argent. À partir du XVIe siècle, ce phénomène prit une telle ampleur que ces institutions de type bancaire ou pré-bancaire, telles qu’elles se développèrent en Italie, par exemple, accumulèrent d’énormes quantités de capitaux qui étaient déposés chez elles. Et c’est ainsi qu’a débuté, grâce à l’accumulation du capital, le processus qui s’est ensuite intensifié à la fin du siècle dernier, voire au cours de ce siècle : l’émergence du capital d’emprunt.

Tout cela s’est mis en place d’une certaine manière, de sorte que, surtout grâce au commerce avec l’argent, il est apparu une chose qu’il faut caractériser en termes très sérieux. Dans la vision anthroposophique, la force opposée au divin, qui imprègne avant tout le monde de la matière, est appelée Ahriman ; on peut la comparer au Méchant que la Bible appelle Satan. Il faut dire que cette force ahrimanienne est le pouvoir légitime sur toutes les choses matérielles, sur la Terre. Lorsque l’argent ne crée que de l’argent et que l’argent lui-même est échangé comme une marchandise, lorsqu’il n’y a plus du tout de travail humain, la relation purement matérielle prévaut, le spirituel du matériel prévaut. Et c’est dans cette domination de l’argent que vit maintenant, avant toute chose, la puissance ahrimanienne.
Rudolf Steiner nous guide dans ses réflexions sur ces processus monétaires pour nous faire comprendre que, tant que l’argent lui-même reste un instrument économique, que le capital est pour ainsi dire un instrument économique permettant de créer de l’argent nouveau, alors, en raison de la participation exclusive d’un élément antichrétien, anti-divin, tout ce qui est socialement infecté par lui doit conduire à l’effondrement.
Des analyses très précises ont déjà amené Paul Kennedy à dire qu’un redressement ne serait possible que si on réfléchissait à une nouvelle éducation, à une rééducation de l’espèce humaine (8) – que l’on ne doit pas imaginer grossière et superficielle. Mais il faut imaginer que certaines choses que l’on a pensées de façon erronée au cours des siècles, en particulier au cours des derniers siècles de matérialisme, doivent être vues clairement, nouvellement conçues, nouvellement pensées, nouvellement fondées.


« On apprivoisera l’argent grâce à des banques à but non lucratif comme objet vagabond de commerce et de spéculation » (9) (l’argent comme marchandise). Oui, il est extrêmement important de considérer qu’il s’agit d’apprivoiser ces processus d’argent sauvages. On ne peut pas fuir Ahriman. Le diable règne dans ce monde, les gens l’ont toujours su, dès le Moyen-Âge. Mais on peut se comporter dans ce monde de manière à repousser le diable dans son rôle. Il y a des images médiévales où le diable tient le missel pour un saint. Il doit le servir ; il est là comme une sorte de pupitre portant le missel – une imagination imagée du Moyen Âge ! Mais on peut reprendre cette image. Avec une pensée nouvelle, moderne, plus conceptuelle : Ahriman est à juste titre dans ce monde. Ahriman contrôle à juste titre le système monétaire mais, avec ce système monétaire, il doit et devrait servir les objectifs spirituels de l’homme.
C’est pourquoi on a toujours su – et c’était déjà perceptible chez les écrivains chrétiens des premiers siècles – que seul l’argent qui est obtenu par le travail est sain, est chrétien. Seul l’argent que j’ai en tant qu’homme – forces spirituelles, forces artistiques, travail des muscles et de la main-d’œuvre, peu importe – seul cet argent est sain dans ma biographie ; ce que j’ai acquis par mes compétences et mes efforts de toute sorte, par des performances professionnelles que je peux compenser par les performances d’une autre personne. L’argent n’est alors que l’expression : je l’ai gagné par mon travail ! C’est ce que tu as gagné ! Et l’argent nous donne une mesure de la façon dont nous pouvons échanger et équilibrer les résultats de notre travail.


Si l’on regarde les nombreuses biographies qui se brisent pour une raison ou une autre, qui ont besoin d’une certaine forme d’assistance – jeunes qui deviennent des criminels, adultes qui déraillent – on trouve toujours le rêve de l’« argent rapide » comme moteur prédominant ; l’envie, par exemple, de gagner un million à la loterie. Si l’on ne peut pas avoir le sentiment que gagner un million à la loterie est en fait un coup du destin et qu’il faut une force infinie pour faire face à ce coup, alors on n’en est pas encore au point qui permet de comprendre comment l’argent reflète dans le physique ce que l’homme accomplit spirituellement. Je veille à ne pas m’arrêter aux émotions ; donc rien contre les billets de loterie remplis innocemment. Il s’agit d’autre chose, c’est une question de ressenti. Toute personne ayant rempli un tel billet de loterie peut, à un moment ou à un autre, avoir réfléchi sur elle-même et s’être posé des questions : qu’est-ce que je ferais si je gagnais un million ou plus ? Des idées absurdes surgissent. Et quand la personne se réveille, qu’elle est éveillée intérieurement et qu’elle se dit : écoute ! Tu es une personne tout à fait raisonnable, tu fais ton travail, tu as une certaine rémunération que la société te donne en retour ; que tu sois indépendant ou salarié, regarde comment les rêves de gros sous libèrent en toi une personne complètement différente, qui n’est pas toi-même, qui est en fait ta plus mauvaise partie, une sorte de Méphisto. Goethe, d’ailleurs, en savait beaucoup sur les secrets de l’argent, comme on peut le voir non seulement là où il décrit la production de billets dans son Faust (10), mais dans tout le Faust. Le Faust fait partie de la lecture obligatoire pour toute personne qui veut approfondir l’essence de l’argent.




Mais il me reste encore quelque chose à ajouter ici avant de chercher comment un nouveau système bancaire, une nouvelle façon de traiter l’argent, peut naître de ces fondamentaux. Revenons à ce que j’ai dit au début. Le travail humain n’est pas une marchandise. On ne peut pas acheter la force de travail d’une personne ; on peut prétendre la payer, mais alors surviennent les ruptures et les controverses au sein de la vie sociale. Car c’est dans la puissance de travail de l’homme que réside toute sa mission biographique. En anthroposophie, nous parlons avec une certaine évidence du fait que l’homme passe par des vies terrestres répétées. Il a déjà vécu sur terre, non pas un nombre infini de fois, mais à plusieurs reprises, et de ces vies terrestres passées – dans l’Antiquité ou en Asie, au Moyen-Âge ou ailleurs – il rapporte une somme d’expériences. Après chaque vie sur terre, il a mûri, il est devenu plus individuel. Chaque vie sur terre est telle que l’homme veut y réaliser un peu plus son individualité ; et cela se produit par le travail.



C’est une gigantesque illusion de penser que l’on peut être un être humain sans travailler. Il y a ces gens qui ont hérité de grandes fortunes et qui se contentent de faire des allers-retours entre Saint-Moritz et Acapulco et ainsi de suite : pauvres créatures, vraiment pitoyables, pauvres créatures ! Car on n’est humain que si l’on travaille sur la Terre ou dans le domaine social ou spirituel. Alors seulement on est vraiment là. Sinon, on ne vit que comme un être qui rêve – comme un animal qui rêve, une vache dans le pâturage. On n’est humain que par le travail. Et on ne peut pas acheter cette humanité ! Il y a un très bon exemple de cela, il faut juste bien le comprendre. Une grande force spirituelle de l’homme est l’amour, l’amour pour une autre personne. On ne peut pas non plus acheter l’amour ! On ne peut pas payer pour que quelqu’un aime. Ce n’est pas possible. On ne peut donc pas payer pour le travail que quelqu’un fait. On fait juste semblant. Et ce faisant, on cause des dommages à l’organisme social.

Ce sont des pensées sérieuses, oui ! Mais il faut faire bouger ces pensées sérieuses en soi ; elles sont étroitement liées au nerf de notre époque. Ainsi, la vision qu’a Rudolf Steiner des situations humaines dans la vie sociale, en particulier l’argent, a donné l’impulsion à la triarticulation de l’organisme social : tout d’abord, créer un organisme social dans lequel les processus de guérison puissent à nouveau avoir lieu. Pour cet organisme social, il pense à certaines institutions. Après la Première Guerre mondiale, il se créa une sorte d’union de différentes entreprises, appelée Der Kommende Tag : des usines, des écoles, des institutions économiques et des institutions spirituelles en un seul groupe. Ce groupe devait aussi comporter une banque, pour laquelle Rudolf Steiner avait préparé des « Principes directeurs pour une entreprise à créer », un document de travail, dirait-on aujourd’hui (11). La première phrase commence par une expression maintenant très répandue : « il est nécessaire de créer un institut semblable à une banque ». Aujourd’hui, nous utilisons davantage l’expression « institution semblable à une banque ». Il ne s’agit pas d’une banque ordinaire, mais d’une institution qui ressemble à une banque, avec des impulsions différentes, avec des aspects différents – une institution poursuivant des objectifs autres que ceux des banques existantes.
Les principes directeurs de Rudolf Steiner ont donné naissance aux impulsions qui ont conduit à une première réalisation à Bochum, puis plus tard ici à Dornach et dans d’autres pays.(12) Toutes ces banques sont portées par une impulsion de fond, qui est : mettre fin à la dépersonnalisation de l’argent et ainsi relier à nouveau l’esprit humain et la spiritualité humaine aux processus monétaires eux-mêmes ; développer l’activité bancaire de telle sorte que l’on puisse dire : les gens aident les gens, les individus qui travaillent dans une institution semblable à une banque aident d’autres individus à faire exactement ce dont nous venons de parler : à réaliser leur biographie, quelle que soit la forme de leur travail.

Cela conduit alors le banquier à s’intéresser de manière totalement différente aux initiatives, à la créativité, à l’esprit d’entreprise d’individus ou de groupes entiers. Partout dans le monde, le banquier, avant d’accorder un prêt, demande : quelles sont les garanties dont vous disposez ? Immobilier, valeurs ? Mais le banquier qui assume une fonction bancaire au sens spirituel s’enquiert de l’initiative, de la volonté. Il pose également des questions sur l’entourage : y a-t-il des gens qui veulent aussi faire ce que voulez faire ? Y a-t-il des personnes qui veulent vous soutenir ? Y a-t-il des gens prêts à offrir une certaine garantie ? Un banquier anthroposophe participe au processus d’une manière qui n’est pas habituelle. Comme l’écrit Rudolf Steiner dans ses Principes directeurs, il devient lui-même entrepreneur : « Le banquier doit donc avoir moins le caractère d’un prêteur et plus celui d’un homme d’affaires qui a une bonne compréhension de l’ampleur d’une opération à financer et qui, avec le sens des réalités, peut prendre les dispositions nécessaires à son exécution. » (13) Il est, pour ainsi dire, celui qui, du côté de l’argent, participe à l’entreprise. Il accompagne et promeut tout ce que veut faire l’individu, dans tous les domaines, du jardin d’enfants à l’université, de la culture des plantes médicinales aux usines.
Pour cela, il a besoin de comprendre la société. Mais on n’a une compréhension sociale que lorsqu’on a une compréhension spirituelle et intellectuelle de l’être humain, de l’humanité, de la situation. Ainsi – et c’est probablement assez courant – dans les banques à orientation anthroposophique, les membres du personnel travaillent ensemble sur des questions spirituelles, et de telle manière qu’ils ne le font pas comme un loisir, mais qu’ils savent exactement ce qui se passe : quel que soit le sujet sur lequel nous travaillons, qu’il s’agisse d’une étude de la nature humaine ou des processus historiques, cela développe en nous la capacité d’accompagner les initiatives avec une compréhension sociale, de les promouvoir de la bonne manière, de façon à pouvoir accorder des prêts dans la bonne mesure. C’est tout à fait unique. Le banquier anthroposophe qui travaille sur la nature humaine et sur les questions sociales sait immédiatement que cet approfondissement spirituel accroît sa compréhension sociale ; et il a besoin de la compréhension sociale s’il veut vraiment aider les autres.
Ainsi, le banquier anthroposophe fait face à son client, l’emprunteur, tout comme il fait face au déposant. Parce qu’il y a un grand secret à l’arrière-plan – et c’est encore une partie très difficile. Quand on a investi son argent dans une banque, celle-ci travaille avec lui. Elle finance et crée n’importe quelles entreprises. Mais on est lié par le destin aux crédits qui sont octroyés avec cet argent. Il s’agit d’un processus mystérieux. Il ne peut pas m’être indifférent que l’argent que j’ai en banque soit utilisé pour financer, peut-être, la production de bombes au napalm. À l’époque, Rudolf Steiner avait choisi un autre exemple, il avait dit : « Votre argent permettra peut-être de monter une fabrique de spiritueux ! Oui, mais alors vous serez impliqué karmiquement, par le destin, dans la propagation de l’alcoolisme ! » (14)

Ce phénomène met en lumière un domaine qu’on approfondit et éclaire dans le travail de la banque anthroposophique, ce qui a conduit le banquier anthroposophe à vouloir entrer en conversation avec le déposant. Il lui dit : « Vous voulez investir 100 000, 200 00 francs chez nous. Que voulez-vous que nous soutenions avec cette somme ? Plutôt quelque chose dans la santé ou quelque chose dans l’éducation ? » – Soudain, des processus intérieurs s’enclenchent, car le positif a aussi un effet karmique. La personne commence à réfléchir et dit : « Oui, je voudrais promouvoir l’agriculture biodynamique ». Il y a quelque chose comme un désir ardent de destin, d’être impliqué dans de nouvelles formes d’agriculture, de pédagogie Waldorf ou dans l’une ou l’autre production au sein de l’économie.
Un système bancaire au sens spirituel devient une prestation de services entre les biographies des gens. L’argent perd son rôle dominant. Il perd son enveloppe de pouvoir, la vision de l’être humain commence à jouer un rôle déterminant. La banque, c’est tout le tissu et le réseau entre les employés, entre ceux qui déposent de l’argent et ceux qui empruntent de l’argent et tous ceux qui sont encore impliqués dans d’autres transactions bancaires. La banque est toujours un « extrait » d’une certaine situation de l’humanité, à savoir la situation de l’humanité dans laquelle il faut libérer ce qui est créateur. Comme je l’ai dit au début, les gens ont tellement d’intelligence ! Pourquoi ne parviennent-ils pas à appliquer leur idéalisme et leur intelligence dans des domaines où ils ont jusqu’ici erré à l’aveuglette ? L’humanité a besoin d’une nouvelle éducation ; en fait, les adultes devraient aller dans une école spéciale. Mais même dans les écoles ordinaires, les élèves peuvent commencer à apprendre ce qu’est l’argent et comment gérer la propriété, les droits, la liberté et les capacités.
Nous arrivons pour finir à une conclusion très sérieuse. Le véritable atout d’une communauté – communauté humaine ou communauté nationale, Communauté européenne ou communauté régionale – est le pouvoir créateur des initiatives des gens. Ce ne sont pas les ressources minérales, ni le pétrole, etc., des ressources qui finiront par s’épuiser, mais la créativité, la production créative : c’est la vraie richesse d’une communauté. Et cette richesse nécessite l’ensemble de l’organisme social. La triarticulation sociale signifie que la vie de l’esprit a besoin d’une forme autonome, tout comme l’État et la vie juridique, tout comme la vie économique. Ce n’est que si l’homme peut se tenir en totalité dans cet organisme social que ses capacités créatrices sont libérées. C’est pourquoi il est si désastreux que, comme ces derniers temps, les États se mettent à réduire les dépenses destinées à la vie de l’esprit : les théâtres ferment, etc. C’est un malentendu ! Les gens pensent qu’il faut concentrer tous les efforts sur l’économie afin de préserver la richesse. Non ! La richesse d’un pays vient de la volonté et de la capacité de travailler de sa population, et l’ensemble de l’organisme social en a besoin ; il a aussi besoin de musées, de théâtres, d’universités, d’arts et de vie religieuse, d’un État de droit équilibré et de vie économique.
Ceci nous amène à un dernier aspect de ce tour d’horizon à travers les sciences sociales anthroposophiques.
En fait, l’argent veut se comporter différemment dans chaque cas. Il a trois grandes qualités. Il peut s’agir d’argent d’achat, comme celui que nous utilisons tous, d’argent échangé contre des marchandises. C’est le monde réel de l’économie, parce que le monde de l’économie commence là où les marchandises sortent de l’usine, par le biais des échanges et du commerce, et vont jusqu’au consommateur. L’usine elle-même relève de la vie de l’esprit. On a l’habitude de penser : les machines, c’est l’économie ; le bureau, c’est la vie de l’esprit. Mais la machine a la même signification pour une personne que le bureau pour le savant : un instrument lui permettant d’activer ses capacités. Tout exercice des capacités est vie de l’esprit ! Par conséquent, l’argent d’achat – l’argent avec lequel on peut acheter quelque chose – n’est vraiment justifié que lorsqu’il équivaut à des marchandises. La vie de l’esprit, en revanche, a besoin de l’argent de don, de l’argent qui provient des excédents de l’économie et qui est libéré pour la vie de l’esprit.







Dans le Cours d’économie, Rudolf Steiner a dit très fermement : le travail libre de l’esprit diminue lorsqu’il y a trop peu de dons. Il s’agit d’un processus interne, non pas que le musée ferme parce qu’il ne reçoit plus de subventions, mais : si l’argent de don ne circule pas dans un organisme social – car les processus d’argent sont des processus similaires aux processus de la circulation sanguine – alors la vie de l’esprit libre et créatrice décline. C’est pourquoi toutes les banques anthroposophiques se sont toujours senties obligées d’investir des fonds dans la vie de l’esprit. Il faut promouvoir celle-ci en mettant librement quelque chose à disposition. Entre l’argent d’achat et l’argent de don, il y a l’argent de prêt qui est donné pour lancer des initiatives puis qui revient.

C’est aussi la tâche d’une banque au sens spirituel, car nous n’en sommes qu’au début. Il faudra encore plusieurs centaines d’années avant qu’aboutisse la rééducation des êtres humains, qui a déjà commencé. C’est donc toujours une tâche de la banque de faire en sorte que l’élément primordial de l’argent – en tant qu’argent d’achat, de prêt ou de don – se développe de plus en plus, de sorte que, ponctuellement, depuis un seul endroit ou plusieurs, les forces de guérison puissent circuler dans l’ensemble de l’organisme social.
Un système bancaire au sens spirituel a un objectif principal majeur auquel toutes les méthodes et procédures sont subordonnées : servir l’homme dans son incarnation, et non pas servir l’argent, le capital. Ce sera le grand schibboleth, la question déterminante des prochaines décennies : voulez-vous être un voleur de capital, d’argent, travailler à l’augmentation de l’argent et du capital, ou voulez-vous être un serviteur de l’humanité sur son chemin biographique, sur son chemin d’incarnation ?

Il en ressort ce que l’on peut appeler une gestion de l’argent adaptée à l’être humain. Premièrement, l’argent permet de donner aux gens la liberté de réaliser le travail créateur qu’ils ont entrepris, de leur donner la liberté de prendre des initiatives. Deuxièmement, travailler avec l’argent de telle sorte que les initiatives des nombreuses individualités apparaissent comme ayant des droits égaux. Une banque évitera de promouvoir les projets favoris d’un client, mais demandera toujours : ce projet est-il né de sa vie ? Si c’est le cas, nous pourrons réellement le promouvoir. Il peut s’agir des initiatives les plus diverses : une banque reconnaîtra et promouvra l’égalité de cette volonté d’agir. Troisièmement, elle pourra apporter un équilibre fraternel entre les différentes situations en termes de richesse. Il y a des gens qui ont gagné de l’argent – par héritage, par leur propre travail – et qui se demandent maintenant : comment le donner à d’autres qui sont dans une situation plus malheureuse, soit personnellement soit par rapport à leur institution ?

Une banque au sens spirituel essaiera donc de rendre possibles la liberté, l’égalité et la fraternité entre les êtres humains grâce à l’argent. De ces activités – qui ne sont que de petits îlots de lumière dans une mer de travail – menées par les personnes œuvrant dans les différentes institutions bancaires peut alors émerger ce que nous appellerons le véritable secret de l’argent. Et c’est ainsi que nous pouvons faire des expériences avec l’argent et par l’argent sur terre, que seuls nous, les êtres humains sur terre, pouvons faire et que nous pourrons ensuite, après la mort, apporter aux dieux dans le monde spirituel.
A plusieurs reprises, Rudolf Steiner a relié ces observations aux trois tentations du Christ, à cette troisième, grande tentation : « Ordonne à cette pierre qu’elle devienne du pain ! ».(15) Alors que le Christ a pu, comme une évidence, rejeter les deux premières tentations, une sorte de question est apparue ici. « L’homme ne vit pas que de pain ». Mais le Christ ne savait pas encore à quelles difficultés l’homme est confronté sur terre parce qu’il a besoin d’argent pour acheter du pain. Par le baptême dans le Jourdain, il venait d’entrer dans les enveloppes de la Terre en tant qu’être divin. Rudolf Steiner le prend comme une image : les dieux veulent aussi savoir ce que vit l’homme sur terre dans le royaume d’Ahriman et comment l’homme sur terre a commencé à s’arracher au pouvoir d’Ahriman et à l’argent, non seulement pour rejeter Ahriman mais aussi pour le purifier. Il existe un beau poème du siècle dernier qui dit :
« Même Ahriman, le sombre, mourra pour finir dans la lumière. » (16)



Notre attitude envers l’argent est le début de ce qui peut venir des gens pour ramener cet esprit qui se présente maintenant comme un esprit opposé aux dieux. Car les adversaires ont pris leur rôle en main pour donner à l’homme la force de former la résistance ; pour que l’homme puisse développer la force. Et dans la mesure où nous redonnons à l’argent le vrai caractère qu’il devrait avoir en le retirant aux forces sataniques, nous portons aux dieux quelque chose qu’ils ne connaissent pas – dans le monde spirituel, il n’y a pas d’argent ! Ils doivent entendre les hommes dire comment vaincre les démons qui sont liés à l’argent et comment faire de l’argent – et ainsi d’Ahriman – un serviteur de la volonté de s’incarner et de travailler qu’ont les hommes, chaque individu comme, en tant que tout, la communauté de ceux qui coopèrent.



Remarques
( 1 ) Les premières tentatives réussies pour travailler sur les questions d'argent dans le domaine anthroposophique ont eu lieu en 1961 avec la fondation de la Gemeinnützige Treuhandstelle à Bochum. Celle-ci a été suivie, toujours à Bochum, par la Gemeinnützige Kredit-Garantie-Genossenschaft GKG en 1967 puis, en 1974, par la Gemeinschaftsbank GLS.
Entretemps, une cinquantaine d'institutions financières ont été créées dans divers pays, qui diffèrent grandement les uns des autres. Certaines ont le statut de banque officielle, d'autres sont plutôt des communautés financières, des coopératives de garantie, des fondations et autres institutions de type bancaire. Outre les établissements bancaires de Bochum, on peut citer la Triodos Bank N. V., Zeist, Pays-Bas (fondée en 1980) et la Freie Gemeinschaftsbank BCL, Dornach, Suisse (fondée en 1984).
( 2 ) Cf. Rudolf Steiner, Cours d’économie, Quatorze conférences, Dornach, 24 juillet au 6 août 1922, GA  340, conférence du 24 juillet 1922.
( 3 ) Cf. Rudolf Steiner, Séminaire d’économie, Dornach, 31 juillet au 5 août 1922, GA 341, séminaire du 5 août 1922

( 4 ) Voir par exemple : Rudolf Steiner, La question sociale en tant que question de conscience, Huit conférences, Dornach, 15 février au 10 mars 1919, GA 189, conférence du 2 mars 1919.
( 5 ) Voir par exemple note 2, conférence du 27 juillet 1922.
( 6 ) 3e livre de Moïse (Lévitique), 25, 37.
( 7 ) 5e livre de Moïse (Deutéronome), 23, 20 [référence inexacte dans l’original].
( 8 ) Paul Kennedy, Préparer le XXIe siècle, Odile Jacob, 1999.
( 9 ) Rapport annuel 1993, 10 Jahre Freie Gemeinschaftsbank, Dornach 1994, p. 11.
( 10 ) J. W. von Goethe, Faust, seconde partie, premier acte, Salle du trône dans le palais impérial.
( 11 ) Novembre 1920, in : Rudolf Steiner, Aufsätze über die Dreigliederung des sozialen Organismus und zur Zeitlage 1915-1921 (Articles sur la tri-articulation de l'organisme social et sur la situation du temps 1918-1921), GA 24, p. 450 ss.
( 12 ) Cf. note 1.
( 13 ) « Principes directeurs pour une entreprise à créer », cf. note 11,p. 451.
( 14 ) « Principes directeurs...», cf. note. 11, p. 451.
( 15 ) Nouveau Testament, Évangile de Luc, 4, 3.
( 16 ) August von Platen, poèmes, « Lumière », Leipzig o.J.

4e de couverture :
Dans les "institutions semblables à des banques" issues du mouvement anthroposophique depuis le début des années 60 - d'abord en Allemagne, puis de plus en plus loin - une "méthode expérimentale d'une nouvelle humanité dans le traitement de l'argent" est testée.
Comment se fait-il que les processus monétaires soient de plus en plus "dépersonnalisés", voire déshumanisés, et servent de plus en plus les objectifs les plus matérialistes ? L'habitude habituelle de traiter avec l'argent, résultant de conceptions fausses sur ce qu'est réellement l'argent, a provoqué les catastrophes de notre époque (par exemple le chômage, la criminalité, l'industrie de la guerre). Mais que sont les conceptions "correctes" ? Les principes directeurs de Rudolf Steiner, totalement inhabituels, sont pris au sérieux dans les banques anthroposophiques - par les collaborateurs et les clients !  La manière dont est procédé avec l'argent est aussi très importante pour la biographie de chaque humain individuel. L'homme sert-il l'argent, ou l'argent sert-il l'homme ? Le secret de l'argent est l'un des secrets les plus profonds.
Manfred Schmidt-Brabant est le président de la Société anthroposophique universelle et directeur de la Section pour la science sociale au Goetheanum de Dornach.
Conférences de science de l'esprit n° 39

 

Geisteswissenschaftliche Vortäge

Manfred Schmidt-Brabant

Spirituell verstandenes Bankwesen

Geld — im Dienste des Menschen

Verlag am Goetheanum


SONDERDRUCK ZUM ZEHNJÄHRIGEN BESTEHEN DER FREIEN GEMEINSCHAFTSBANK BCL, DORNACH, DEZEMBER 1994

Leicht redigierte Nachschrift eines Vortrages im Rahmen der
Generalversammlung der Freien Gemeinschaftsbank BCL
am 16. April 1999 in Dornach.

© Copyright 1995 by Philosophisch-Anthroposophischer Verlag am Goetheanum
Alle Rechte vorbehalten
Gesamtherstellung: Freiburger Graphische Betriebe
ISBN 3-7235-0771-9
Die ersten Versuche, ein neues Bankwesen auszugestalten, erfolgten in Bochum.' Was war es, was als Uridee für die Gemeinschaftsbank in
Bochum Gestalt angenommen hatte? Bankähnliche Einrichtungen — ich werde auf den Ausdruck noch zurückkommen — waren da entstanden. Es waren nicht Theorien, wie man es bisher gewohnt war, monetäre Theorien, soziale Theorien, aus denen diese hervorgingen, sondern es war eigentlich ein moralischer Impuls. Diese bankähnlichen Einrichtung sind eher zu verstehen als eine Versuchsmethode einer neuen Menschlichkeit im Umgang mit dem Geld. Das war das tragende Fundament. Aus dem Erleben der Zeit heraus, aus dem Erleben auch der Geschichte des Bankwesens, die wir noch kurz betrachten werden, war dieser Impuls geboren. Er geht zurück auf die Anregung, die Rudolf Steiner kurz nach dem Ersten Weltkrieg gegeben hatte, eine neue Moralität, man darf vielleicht sogar sagen, eine neue Christlichkeit zu suchen, um in Geldverkehr, Kreditvergabe und so weiter wieder das Menschliche hineinzubringen, das im Laufe gerade der neueren Geschichte verlorengegangen war.
Ich möchte in dieser Betrachtung das beleuchten, was ich summarisch als «Versuchsmethode für eine neue Menschlichkeit im Umgang mit dem Geldwesen» bezeichnet habe. — Dabei werde ich mich aber nicht auf die auch im anthroposophischen Arbeitsfeld vorhandenen unterschiedlichen Geldtheorien einlassen, sondern Grundsätzliches schildern, was als Gemeinsames hinter den verschiedenen Auffassungen, wie das Geld handzuhaben sei, steht.
Zudem möchte ich eine Bemerkung voranstellen. Immer, wenn man über die Wirklichkeit von Geldvorgängen spricht, werden zutiefst die Gefühle, ja auch die Emotionen der Menschen bewegt. Deshalb werde ich versuchen, meine Betrachtung, so gut ich kann, zwischen Skylla und Charybdis solcher Emotionen hindurchzusteuern. Ich will versuchen, in mehr bildhafter Weise zu zeigen, was die an der Freien Gemeinschaftsbank als Begründer und Mitarbeiter Beteiligten getragen, bewegt, impulsiert hat und was andere, ähnliche Einrichtungen in gleicher Weise im-pulsiert.
Man wird eine solche Betrachtung immer anstellen wollen vor einem ganz bestimmten Hintergrund unserer Gegenwart: Da sind die Nöte unserer Zeit, wir kennen sie alle; sie schreien uns jeden Tag geradezu an aus den Medien. Mit diesen Nöten der Zeit ist zugleich eine ernste Frage verbunden. Da blickt man hin auf die unendliche Summe von Intelligenz, die die Menschheit aufzubringen fähig ist. Was wird nicht alles an Intelligenz aufgebracht im Bereich der Technik! Solche Unternehmungen wie die Mondflüge oder die Raumsonden sind ja nur Symbole für die Fähigkeit im Technischen, im Grunde genommen alles zu können, was man will. Und es ist nicht nur die technische Intelligenz. Wir schauen doch auch hinein in eine Welt des vielfältigen Idealismus! Was wird da nicht von Tausenden und Millionen Menschen angestrebt — zum Heil der Erde, zum Heil benachteiligter Völker! Was sehen  wir nicht auch an Opferkraft und Opfermut bei den Menschen, wenn es darum geht, menschliche Not zu lindern! Das alles ist da, das alles kann einen mit Bewunderung erfüllen, und gleichzeitig sieht man um sich herum ununterbrochen die sozialen Zusammenbrüche.
Und man sieht sie auf drei großen Feldern sich immer wieder erneuern. Da ist erstens alles das, was man ja nur sehr unzulänglich das Weltproblem der Arbeitslosigkeit nennt. Es ist ja nicht nur dieses, daß die Menschen keinen Verdienst haben, Arbeitslosengeld empfangen müssen wie ein Almosen, sondern es ist viel weiter verbreitet. Da sehen wir Millionen und Abermillionen Menschen, die ihrem eigenen Lebensauftrag entfremdet sind. Jemand, der eigentlich seinem Willen, seiner Begabung entsprechend ein Musiker sein wollte, findet keine Anstellung, und nun arbeitet er als Tankwart! Im höheren Sinne ist er arbeitslos — in bezug auf das, was er eigentlich wollte und vielleicht auch sollte. Er hat zwar einen Job, er verdient Geld, wahrscheinlich ist der Tankwart sogar besser besoldet als der Geiger im Orchester. — Arbeitslosigkeit ist ein viel, viel tieferes Problem unserer sozialen Gegenwart, als man meint.
So ist es zweitens auch mit der Kriminalität. — Da muß man ja nicht nur hinschauen auf die neunhundert Milliarden Dollars Umsatz pro Jahr allein im Drogengeschäft; es breitet sich aus als anonyme Wirtschaftskriminalität aller Art, dringt in viele Bereiche ein und verursacht, wie die Arbeitslosigkeit auch, die inneren Erschütterungen des sozialen Lebens.
Drittens: Wir sehen die furchtbaren Ereignisse in Bosnien. Aber warum sind sie so furchtbar? Wie kommt ein an sich bettelarmes Volk dazu, Milliarden im wahrsten Sinne des Wortes zu «verpulvern»? Es ist keine Anklage; alles, was da über die Erde hin sich entwickelt hat als gigantische Rüstungsindustrie, ist gemeint.
Hinter diesen drei beispielhaft, signifikant zu nennenden Erscheinungen stehen bestimmte Auffassungen über das Geld und damit auch Auffassungen über die Rolle, die Banken zu spielen haben; es sind falsche Auffassungen. Man kann, wenn es erlaubt ist in einer solchen Ansprache, abgekürzt sagen: Ein Großteil der Übel unserer Zeit rührt her von einer falschen Auffassung dessen, was das Geld eigentlich ist.

Die Arbeitslosigkeit ist ja nur Ausdruck für die Meinung, daß man die Arbeit eines Menschen bezahlen kann, daß Arbeitskraft eine käufliche Ware ist und daß der Mensch sehen muß, daß er diese seine Ware verkauft — so gut wie möglich, so teuer wie möglich, wobei dann die Gewerkschaften behilflich sein sollen, aber eben: er muß sie auf den Markt bringen, diese Ware! — Wir kommen darauf zurück.
Die zweite Auffassung ist die — und sie herrschte schon im alten Rom —, daß Geld an sich neutral ist. In Rom sagte man «Geld stinkt nicht!» («non olet!»), auch wenn man es, wie damals, mit der Vermietung von Latrinen verdiente. Die Meinung, daß ein Hundertfrankenschein ein Hundertfrankenschein ist, gleichgültig, ob er aus einem Drogendeal hervorgegangen ist oder aus ehrlicher Arbeit: das ist der zweite große Grundirrtum in bezug auf das Geld. Der erste: daß man mit Geld Arbeitskraft kaufen kann; der zweite, daß Geld neutral ist, unabhängig von seinem Ursprung.
Als Drittes sei die Rüstungsindustrie nur als ein markantes Beispiel für die Auffassung genannt, daß der Gewinn das Produkt rechtfertigt. Wenn eine wie auch immer geartete Produktion sich gewinnbringend darstellt, ist das eine Rechtfertigung für das Produkt.
Nun ist diese Situation, in der wir heute stehen, nach und nach erst im Laufe der Geschichte entstanden. Es ist notwendig, auf drei große Schritte aufmerksam zu werden, die zu einer etwas tiefer gehenden Geschichtsbetrachtung gehören. Dann sieht man, wie das ganze Altertum, die sogenannten alten Mysterienkulturen von Babylonien, Ägypten bis hinein in die Anfänge Griechenlands, vollkommen dominiert waren von dem damals ganz und gar theokratischen Geistesleben, von einer alles umfassenden Priesterkultur. Von den Tempeln aus wurde das ganze Leben bestimmt. Das hörte dann allmählich auf in Griechenland, noch mehr dann in Rom; nun begann der Staat zu dominieren, das Staats- und Rechtsleben, die Gesetze wurden jetzt das Bestimmende für den sozialen Raum, und das Priesterliche, Tempelmäßige trat nunmehr zurück, bis der dritte große Umschwung kam, beginnend mit dem 16., 17. Jahrhundert: Das Staatswesen trat jetzt seinerseits zurück, und die Weltwirtschaft stieg auf zu immer stärkerer Herrschaft und Dominanz. Heute leben wir bereits in einem Zeitalter, in dem alles, was sich an Lebensbereichen innerhalb des Sozialen zeigt, gefärbt wird, bestimmt wird, dominiert wird durch das Wirtschaftsleben.
Mit diesen drei großen Schritten sind aber enorme Umbrüche vor sich gegangen in bezug auf die Handhabung des Geldes. In den alten Mysterienkulturen war Geld immer in irgendeiner Weise der Tempelschatz. Die Reichtümer des Landes gehörten eigentlich den Göttern. Wenn es damals schon so etwas gab wie ein Ausleihen von Mitteln für irgendeinen Zweck, so war das ein ganz sakraler, religiöser Vorgang. Erst in Griechenland beginnt eine andere Art, sich zum Geld zu verhalten. Das Geld wird jetzt persönlicher Reichtum. Dies wurde ganz deutlich in Rom: Es tritt auf der reiche Mensch — Julius Caesar, der sagenhaft reiche römische Politiker Crassus, bis hin zum Fugger Jakob II. (1459-1525) in Augsburg, der eben dem König als reicher Mann Geld leihen konnte. Geld wird persönliches Eigentum, und die Leihvorgänge, die jetzt beginnen, werden persönliche Leihvorgänge. Der König muß anklopfen beim reichen Handelsherrn, um Geld zu borgen.
Und erst mit dem Aufsteigen der Wirtschaftsmacht beginnt nun jener Prozeß, der sich vor allem dann im Laufe des 20. Jahrhunderts so verhängnisvoll ausgewirkt hat: die Entpersönlichung des Geldes. Es entsteht das anonyme Kapital, die Société Anonyme, die Aktiengesellschaft. Die Menschen treten zurück, sie werden beliebig auswechselbar, zum Beispiel als Präsidenten eines Konzerns. Das Kapital als solches beginnt zu herrschen.
Erst jetzt bildet sich das eigentliche Bankwesen. Rudolf Steiner schaut in seinen Betrachtungen über die Geschichte des Bankwesens hin auf solche Gestalten wie die Rothschilds.2 Da ist noch der persönliche Charakter da, da reicht noch das Element, das vom Altertum gekommen war, herüber, aber gleichzeitig beginnt — mit den Rothschilds und ihren Banken, die sie in Paris und London und so weiter errichten — das moderne Bankwesen.
Mit diesem modernen Bankwesen sind nun viele jener Probleme verbunden, die die heutige monetäre Situation charakterisieren, weil eben die meisten der nun sich entwickelnden Banken jenen falschen Geldbegriff pflegen und fördern, den wir eingangs beschrieben haben.
Um das aufzubrechen, um zunächst einmal in eine ganz andere Position sich hineinzubegeben, ist es notwendig, etwas ganz scharf ins Auge zu fassen, was man zwar weiß, was man aber eigentlich auch wieder übersieht. Ich will an dieser Stelle schon darauf hinweisen: Betrachtungen über das Geld sind Betrachtungen über Bauelemente einer jeden Biographie. — Wenn man nicht nur mit Sozialwissenschaft, sondern auch mit Sozialarbeit und ähnlichen Feldern zu tun hat, dann weiß man, wie die falschen Geldauffassungen tief kränkend und verletzend in die Biographie eines Menschen hineinwirken können. Und deshalb sind solche Betrachtungen zugleich auch Akte einer menschenkundlichen Selbsterkenntnis. Wir können da die Gretchenfrage stellen: Wie hältst du's mit dem Geld? Bist du dir zum Beispiel im klaren darüber, daß Geld eigentlich zunächst einen absoluten Scheincharakter hat — ich meine nicht den Geldschein. Es ist bloßer Schein; es ist ein Buchungsvorgang.

Einer der großen Schritte Rudolf Steiners im «Nationalökonomischen Kurs» war, mit aller Kraft deutlich zu machen: Zunächst ist Geld nichts weiter als eine fliegende Buchhaltung.' Ich könnte auch irgendwo die Zahlen aufgeschrieben haben: was mir zusteht oder was ich anderen schulde. Das Geld entwickelte sich, weil diese Form der Buchhaltung handhabbar ist; aber als solches ist es völlig wertlos. Ich kann einen Koffer mit hundert Millionen Schweizer Franken haben — ich kann sie nicht essen, ich kann mich damit nicht kleiden. Es ist nur ein Wert, ein Zahlenwert, der sich da ausdrückt. Das wird ganz deutlich im modernen Scheck- und Kreditkartenwesen, wo gar nicht mehr Geld wirklich gehandhabt wird, sondern wo mit der Kreditkarte nur Werte ausgeglichen werden.
Dieser Tatbestand hat Rudolf Steiner zu einer sehr scharfen Forderung geführt: auf jegliche Einkommenssteuer zu verzichten, dafür aber Ausgabensteuern einzurichten.4 Denn das Einkommen selber, das Haben von Geld, ist ja überhaupt keine Belastung des sozialen Organismus. Denken Sie noch einmal an den Koffer, den Sie da zu Hause haben, mit einer Million Schweizer Franken in Noten: Es könnten auch alte Zeitungen sein, es besagt noch gar nichts. Erst in dem Augenblick, da Sie mit diesem Geld etwas bewegen im sozialen Organismus, wenn Sie Waren kaufen von jemandem, in dem Augenblick muß der Staat sagen: Jetzt aktiviert sich das Geld, jetzt erhebe ich meinen Obolus. So konsequent ist Rudolf Steiner in der Schilderung der Ausgabensteuer, daß er für sinnvoll hält, daß auch dann eine solche Ausgabensteuer fällig wird, wenn Sie Ihr Geld in einer Bank deponieren. Denn in dem Augenblick, wo Sie nun die Million einzahlen auf Ihr Konto, beginnt die Bank damit zu arbeiten, wird im sozialen Organismus etwas bewegt. Aber die Million zu Hause ist im Sozialen völlig uninteressant (außer wenn Sie vor Ihren Nachbarn renommieren mit dem offenen Koffer ...); sozialwissenschaftlich wird Geld erst wieder zu einer Realität, wenn es ausgegeben wird.
Das bedeutet, daß ich veranlagt werde, eine Empfindung dafür zu bekommen, was Rudolf Steiner gelegentlich so formuliert: Das Geld ist das Geistigste, was es gibt in der Wirtschaft.' Es ist eigentlich nur geistig zu verstehen. Es ist ein Vorgang, der darauf abhebt, daß andere Menschen mit dem gleichen geistigen Verständnis in einer wechselseitigen Anerkennung dessen leben, was äußerlich als Geld Ausgleichswerte unter den Menschen anzeigt.
Eine solche Anschauung aber ist nun notwendig, wenn man auf die Auswüchse der Entpersönlichung des Geldes schaut. Da kommen wir auf das Allergrundlegendste. Es ist der Vorgang: Geld schafft Geld. Nicht Arbeit schafft Geld, sondern Geld schafft Geld. Wir kehren damit an den Anfang der menschlichen Geschichte zurück. Denn die allerälteste Form, wie Geld Geld schafft, ist, daß man auf eine ausgeliehene Summe Zinsen erhebt. Wenn ich sage «der Anfang der menschlichen Geschichte», dann meine ich natürlich das Buch Mosis: «Du sollst dem anderen Menschen dein Geld nicht auf Zins leihen.»6 - Dreitausend Jahre Geschichte wurden geprägt durch diesen Ausspruch. Und es war nicht nur die biblische, alttestamentarische Auffassung, auch die meisten griechischen Philosophen, allen voran Plato und Aristoteles, haben das Zinsennehmen auf das allerschärfste verdammt — wie dann auch viele griechische und später die christlichen Schriftsteller bis in das Mittelalter hinein, sogar bis in die Neuzeit! Wenn Sie ein großes Lexikon, etwa das Theologische Lexikon der katholischen Kirche, aufschlagen, dann steht da unumwunden: Eigentlich ist dieser Satz immer noch gültig. Aber da nun die katholische Kirche ja auch Banken betreibt, Geldgeschäfte macht, wie man ja immer wieder erfahren hat, hat sie dann eine Formel gefunden, die gar nicht so uninteressant ist: Man darf insoweit Zinsen erheben, als man Unkosten gehabt hat durch das Verwalten und Ausleihen der Gelder. Aber es hat doch eben dieses Gebot des Moses zu einer ganz merkwürdigen Erscheinung geführt.
Denn in den gleichen Büchern Mosis (7), da wird nun gesagt — man muß bedenken, daß dies zu den Juden gesagt wird: «Von Fremden aber darfst du Zinsen nehmen» — also von anderen Leuten. Und das führte zu der allbekannten Erscheinung, die das ganze Mittelalter bestimmt hat: Es war dem Christen, der sich an den ersten Ausspruch hielt, verboten, Zinsen zu nehmen; aber den Juden, die da lebten in den mittelalterlichen Städten, war es erlaubt, Geld auf Zinsen auszuleihen. Eine ganz eigentümliche Geschichte! Der Christ hielt sich an das erste Wort, der Staat auch; es gab ganz strenge Verbote in bezug auf das Zinsennehmen. Der Staat hielt sich daran: Du sollst dein Geld nicht auf Zins leihen. Gleichzeitig sagte der Staat: Aber den Juden ist es erlaubt, und deshalb wollen wir das gelten lassen, daß man beim Juden sich Geld leihen kann auf Zins.
Nun verstehen wir, warum dann auf einmal, nach dem Ende des Mittelalters, bei der Begründung für das moderne Bankwesen die Familie Rothschild auftauchte, der Vater und die Söhne. Ein weltgeschichtlicher Vorgang!
Nun ist aber das Problem der Zinsen gar nicht das gravierendste, sondern viel gravierender wurde in der neueren Zeit, daß das Geld selber zur Ware wurde. In jeder Sekunde, heißt es, werden mit Hilfe der modernen Daten-übertragungsmittel dreihundert Milliarden Dollars über die Erde hin und her verschoben, womit sozusagen ein Mantel um die Erde herumgelegt wird, der gewoben ist aus einer ununterbrochenen, riesigen Geldbewegung, in der Geld zum größten Teil als Ware gehandelt wird: Dollars werden gekauft, Dollars werden verkauft, umgewechselt in andere Währungen und so weiter.
Das alles wurde noch verstärkt dadurch, daß die Banken schon seit der Zeit der alten Griechen zunächst einmal Depositenbanken waren, wo man sein Geld aufbewahren konnte. Das nahm dann vom 16. Jahrhundert an so stark zu, daß diese bankähnlichen oder vorbankähnlichen Einrichtungen, wie sie zum Beispiel in Italien entstanden, riesige Kapitalien gehortet hatten, die bei ihnen deponiert waren. Und so begann, durch das angehäufte Kapital, jener Prozeß, der dann am Ende des vorigen Jahrhunderts, ja bis in dieses Jahrhundert hinein eskalierte: die Entstehung des Leihkapitals.

Das alles schob sich in einer gewissen Weise so zusammen, daß nun vor allen Dingen durch das Handeln mit Geld etwas auftauchte, was man schon mit sehr ernsten Worten charakterisieren muß. — In der anthroposophischen Auffassung bezeichnet man ja die Gegenkraft des Göttlichen, die vor allen Dingen die ganze Welt der Materie durchdringt, als Ahriman; sie läßt sich vergleichen mit dem Bösen, das in der Bibel Satan genannt wird. Man muß sagen: Diese ahrimanische Kraft ist die rechtmäßige Macht über alles Materielle, über die Erde. Immer dann, wenn Geld nur Geld schafft und Geld selbst als Ware gehandelt wird, wenn überhaupt kein menschlicher Arbeitsanteil mehr dabei ist, herrscht das rein materielle Verhältnis, herrscht das Geistige der Materie. Und in dieser Geldherrschaft lebt nun vor allen Dingen diese ahrimanische Macht.
Rudolf Steiner führt uns in seinen Betrachtungen über diese Geldvorgänge zur Einsicht: Solange es dabei bleibt, daß das Geld selber wirtschaftet, daß das Kapital sozusagen ein Wirtschaftsinstrument ist, um neues Geld zu schaffen, muß wegen der ausschließlichen Beteiligung eines antichristlichen, eines antigöttlichen Elementes alles Soziale, was davon infiziert wird, zum Untergang führen.
Es ist schon aus sehr genauen Analysen hervorgegangen, wenn da ein Paul Kennedy meint, es sei wohl ein Umschwung nur noch möglich, wenn man an eine Neuerziehung, an eine Umerziehung des Menschengeschlechtes denke. Man muß sich ja das nicht grob und äußerlich vorstellen. Aber man muß sich doch schon vorstellen, daß gewisse Dinge, die Jahrhunderte hindurch, insbesondere die letzten Jahrhunderte des Materialismus hindurch in das Falsche hinein gedacht wurden, durchschaut, neu gefaßt, neu gedacht, neu begründet werden sollen.
«Das Geld wird mit Hilfe gemeinnütziger Banken als vagabundierendes Handels- und Spekulationsobjekt (Geld als Ware) gezähmt.»9 Ja, es ist außerordentlich wichtig, das zu bedenken, daß es darauf ankommt, diese wilden Geldprozesse zu zähmen. Wir können nicht vor Ahriman fliehen. Der Teufel regiert in dieser Welt, das haben die Menschen schon immer gewußt, schon im Mittelalter. Aber man kann sich in dieser Welt so verhalten, daß der Teufel in seine Rolle zurückgedrängt wird. Es gibt mittelalterliche Bilder, wo der Teufel das Meßbuch hält für einen Heiligen. Er muß ihm dienen; wie eine Art Notenständer steht er da und hält das Meßbuch — eine bildhafte Imagination des Mittelalters! Aber wir dürfen sie aufgreifen. Neu, modern, begrifflicher gedacht: Ahriman ist zu Recht in dieser Welt. Ahriman beherrscht zu Recht das Geldwesen, aber er muß und er soll mit diesem Geldwesen den geistigen Zielen des Menschen dienen.
Man hat deshalb immer schon gewußt — das stand schon hinter den christlichen Schriftstellern der ersten Jahrhunderte — man hat immer gewußt: Nur das Geld ist gesund, ist christlich, das durch Arbeitsleistung errungen wird. Nur das Geld, was ich mit den Kräften, die ich als Mensch habe — geistige Kräfte, künstlerische Kräfte, Muskel- und Arbeitskräfte, wie auch immer —, nur das Geld ist gesund in meiner Biographie; was ich durch meine wie auch immer gearteten Fähigkeiten und Anstrengungen erworben habe, durch Arbeitsleistungen, die ich mit den Leistungen eines anderen Menschen ausgleichen kann. Geld ist dann nur noch der Ausdruck dafür: Das habe ich erarbeitet! Das hast du erarbeitet! Und das Geld gibt uns ein Maß, wie wir die Arbeitsergebnisse austauschen, ausgleichen können.
Wenn man hineinschaut in die vielen Biographien, die zerbrechen aus irgendwelchen Gründen, die also irgendeine Art von Fürsorge brauchen — Jugendliche, die kriminell werden, Erwachsene, die aus den Bahnen geraten —, immer findet man als ein vorherrschendes Moment den Traum vom «schnellen Geld»; die Sehnsucht zum Beispiel, im Lotto eine Million zu gewinnen. Wenn man nicht die Empfindung sich bilden kann, daß eine Million in der Lotterie zu gewinnen, eigentlich ein Schicksalsschlag ist und man unendliche Kräfte braucht, um diesen Schlag zu bewältigen, dann ist man noch nicht an der Stelle, wo man sein muß, um zu verstehen, wie Geld im Physischen widerspiegelt, was der Mensch geistig leistet. — Ich will vorsichtig versuchen, an allen Emotionen vorbeizukommen; also nichts gegen die unschuldig ausgefüllten Lottozettel. Es geht um etwas anderes, es geht um die Empfindung. Jeder mag sich schon einmal geprüft haben, der so einen Lottoschein ausgefüllt hat, sich gefragt haben: Was mache ich, wenn ich eine Million oder mehr gewinne? Ganz absurde Ideen tauchen auf. Und wenn jetzt der Mensch wach ist, innerlich wach ist und sagt: Nun hör mal! Du bist ein ganz vernünftiger Mensch, du machst deine Arbeit, du hast ein gewisses Entgelt, das dir die Gesellschaft gibt dafür: Ob du nun selbständig bist oder angestellt, merke doch einmal, wie durch die Wunschträume vom großen Geld in dir ein ganz anderer losgelöst wird, der du gar nicht selbst bist, der eigentlich dein schlechteres Teil ist, so eine Art Mephisto. — Goethe, nebenbei bemerkt, hat sehr viel von den Geheimnissen des Geldes gewußt, das erkennt man nicht nur dort, wo er die Herstellung des Papiergeldes im «Faust» darstellt,10 sondern durch den ganzen «Faust» hindurch. Der «Faust» gehört eigentlich zur Pflichtlektüre eines jeden Menschen, der sich in das Wesen des Geldes vertiefen will.
Nun ist hier aber noch etwas einzuschieben, bevor wir dann dazu übergehen zu suchen, wie aus all diesen Grundlagen sich ein neues Bankwesen erheben kann, ein neuer Umgang mit Geld. Wir müssen noch einmal hinblicken auf das, was ich einleitend sagte. Die Arbeitskraft des Menschen ist nicht Kaufgut. Man kann die Arbeitskraft eines Menschen nicht kaufen; man kann so tun, als ob man sie bezahlt, aber dann entstehen eben die Zusammenbrüche und die Kontroversen innerhalb des sozialen Lebens. Denn in der Arbeitskraft des Menschen liegt sein ganzer biographischer Auftrag. — Wir sprechen in der Anthroposophie mit einer gewissen Selbstverständlichkeit davon, daß der Mensch durch wiederholte Erdenleben geht. Er hat schon auf der Erde gelebt, nicht unendlich viele Male, aber doch immer wieder, und aus diesen vergangenen Erdenleben — in der Antike oder in Asien, im Mittelalter oder wo auch immer — hat er eine Summe von Erfahrungen mitgebracht. Nach jedem Erdenleben ist er gereifter, ist er individueller geworden. Jedes Erdenleben ist so veranlagt, daß der Mensch in ihm seine Individualität ein Stück weiter verwirklichen will; und das geschieht durch die Arbeit.
Es ist eine gigantische Illusion zu meinen, man könne Mensch sein, ohne zu arbeiten. Es gibt zwar solche Leute, die große Vermögen geerbt haben und immer nur hin und her fliegen zwischen St. Moritz und Acapulco und so weiter: arme Geschöpfe, wirklich bedauernswerte, arme Geschöpfe! Denn man ist doch nur Mensch, wenn man an der Erde oder im Sozialen oder im Geistigen irgendetwas arbeitet. Nur dann ist man wirklich da. Sonst lebt man nur als ein träumendes Wesen — wie ein träumendes Tier, eine Kuh auf der Weide. Mensch ist man nur durch die Arbeit. Und dieses Menschsein kann man nicht kaufen! Dafür gibt es ein sehr gutes Beispiel, man muß es nur richtig verstehen. — Eine große seelische Kraft des Menschen ist die Liebe, die Liebe zu einem anderen Menschen. Auch Liebe kann man nicht kaufen! Man kann nicht bezahlen, daß jemand liebt. Es ist nicht möglich. Und so kann man das auch nicht bezahlen, was jemand an Arbeit leistet. Man tut nur so. Und dieses, daß man so tut, das führt zu den Schäden im sozialen Organismus.
Es sind ernste Gedanken, ja! Aber man muß diese ernsten Gedanken in sich bewegen; sie hängen tief mit dem Nerv unseres Zeitalters zusammen. So entstand bei Rudolf Steiner aus diesem Anschauen menschenkundlicher Situationen des sozialen Lebens, insbesondere des Geldes, der Impuls zur Dreigliederung des sozialen Organismus: zunächst einen sozialen Organismus zu schaffen, in dem sich wieder Gesundungsprozesse ereignen können. Im Hinblick auf diesen sozialen Organismus hat er nun auch an bestimmte Einrichtungen gedacht. Es entstand nach dem Ersten Weltkrieg eine Art Zusammenschluß unterschiedlichster Firmen, der «Kommende Tag» genannt: Fabriken, Schulen, wirtschaftliche und geistige Einrichtungen in einem Verbund. Für diesen Verbund sollte eine Bank entstehen. Rudolf Steiner hat für diese Bank «Leitgedanken für eine zu gründende Unternehmung», ein Arbeitspapier, würde man heute sagen, angefertigt.' Es beginnt gleich im ersten Satz mit jenem Wort, das sich sehr verbreitet hat: «Notwendig ist die Gründung eines bankähnlichen Instituts.» Wir gebrauchen heute mehr den Ausdruck «bankähnliche Einrichtung». Er meint damit nicht eine Bank, wie es sie gibt, sondern eben eine bankähnliche Einrichtung mit anderen Impulsen, mit anderen Aspekten — eine Einrichtung, die anderen Zielen folgt, als dies bei den bestehenden Banken der Fall ist.
Es entstanden aus diesen Leitgedanken Rudolf Steiners die Impulse, die zunächst in Bochum zu einer ersten Verwirklichung führten, dann später hier in Dornach und in anderen Ländern.'Z Alle diese Banken werden wie von einem Grundimpuls getragen, nämlich: die Entpersönlichung des Geldes wieder aufzuheben und damit den menschlichen Geist und die menschliche Spiritualität wieder einzubinden in die Geldprozesse selber; das Bankgeschäft also aufzubauen so, daß man sagen kann: Menschen helfen Menschen, individuelle Menschen, die in einer bankähnlichen Einrichtung tätig sind, helfen anderen individuellen Menschen bei genau dem, was wir eben betrachtet haben: daß sie, in welchen Arbeitsformen auch immer, ihre Biographie verwirklichen können.
Das führt dann dazu, daß der Banker ein ganz anderes Interesse nimmt an den Initiativen, an der Kreativität, an dem Unternehmungswillen einzelner oder ganzer Gruppen. Während überall in der Welt vor einer Kreditvergabe gefragt wird: «Was haben Sie an Sicherheiten: Grundstücke, Wertgegenstände?», fragt der Banker, der von einer solchen spirituell verstandenen Bankfunktion ausgeht, nach der Initiative, nach dem Willen. Er fragt auch nach dem Umkreis: Sind Menschen da, die das wollen? Sind andere da, die das stützen wollen? Sind Menschen da, die dafür eine gewisse Bürgschaft übernehmen wollen? In einer Weise, wie das sonst nicht üblich ist, beteiligt sich ein anthroposophischer Banker an dem Vorgang. Er wird, wie Rudolf Steiner in den «Leitgedanken» schreibt, selbst zum Unternehmer: «Der Bankier soll also weniger den Charakter des Leihers als vielmehr den des in der Sache drinnenstehenden Kaufmanns haben, der mit gesundem Sinne die Tragweite einer zu finanzierenden Operation ermessen und mit Wirklichkeitssinn die Einrichtungen zu ihrer Ausführung treffen kann.»" Er ist sozusagen derjenige, der von der Geldseite her den Vorgang unternehmerisch mitmacht. Er begleitet und fördert, was die einzelnen, auf welchem Gebiete auch immer, vom Kindergarten bis zur Hochschule, vom Heilpflanzenanbau bis zu Fabriken unternehmen wollen.
Er braucht dafür soziales Verständnis. Aber soziales Verständnis kommt nur, wenn man spirituelles, geistiges Verständnis hat für den Menschen, für die Menschheit, für die Situation. Und so entsteht — was wohl ganz einmalig ist —, daß in den anthroposophisch orientierten Banken die Mitarbeiter miteinander an geistigen Fragen arbeiten, und zwar so arbeiten, daß sie das nicht als Hobby betreiben, sondern daß sie genau wissen: Was wir immer wieder arbeiten an Menschenkunde, an Verständnis für Geschichtsvorgänge, das bildet in uns die Fähigkeiten aus, daß wir mit sozialem Verständnis Initiativen begleiten können, sie in der rechten Weise fördern können, daß wir im richtigen Maßstabe Kredite vergeben können. Das ist ganz einmalig. Der anthroposophische Banker, der an der Menschenkunde arbeitet, an sozialen Fragen arbeitet, weiß unmittelbar: Durch diese spirituelle Vertiefung steigert sich sein soziales Verständnis; und soziales Verständnis braucht er ja, wenn er dem anderen wirklich helfen soll.

Und so, wie sich der anthroposophische Banker seinem Kunden, dem Kreditnehmer zuwendet, so wendet er sich dem Einleger zu. Denn da ist ein großes Geheimnis im Hintergrund — und dies ist wiederum eine sehr schwierige Stelle. Wenn man sein Geld auf irgendeiner Bank angelegt hat, so arbeitet die Bank damit. Sie finanziert und  kreditiert irgendwelche Unternehmungen. Doch man ist schicksalsmäßig mit dem verbunden, was da mit diesem Geld kreditiert wird. Es ist ein geheimnisvoller Prozeß. — Es kann mir doch nicht gleichgültig sein, wenn mein Geld, das ich auf der Bank habe, benutzt wird, um vielleicht — die Produktion von Napalmbomben zu kreditieren ... Rudolf Steiner wählte damals ein anderes Beispiel, er sagte sinngemäß: «Mit Ihrem Geld wird vielleicht eine Schnapsfabrik betrieben! Ja, dann sind Sie aber karmisch, schicksalsmäßig mitbeteiligt daran, daß sich vielleicht der Alkoholismus ausbreitet!»
Es wirft ein Licht auf einen Bereich, der in der anthroposophische Bankarbeit vertieft und durchleuchtet wird, was dazu geführt hat, daß der anthroposophische Banker mit dem Einleger in ein Gespräch kommen möchte. Da wird dem Einleger gesagt: «Du willst hunderttausend, zweihunderttausend Franken bei uns anlegen. Was willst du, daß wir damit fördern? Eher etwas im Heilwesen oder etwas in die Pädagogik?» — Plötzlich beginnen innere Prozesse; denn das Positive hat ja auch eine karmische Auswirkung. Der Mensch beginnt zu überlegen und sagt: «Ja, ich möchte gerne die biologisch-dynamische Landwirtschaft fördern.» Es taucht etwas auf wie eine Schicksalssehnsucht, an neuen Formen der Landwirtschaft oder der Waldorfpädagogik oder auch an der einen oder anderen Produktion innerhalb der Wirtschaft beteiligt zu sein.
Ein spirituell verstandenes Bankwesen wird zur Dienstleistung zwischen den Biographien von Menschen. Geld tritt in seiner herrschenden Rolle zurück. Es wird der Macht entkleidet, die es hat, es beginnt das Verständnis des Menschen maßgebend zu sein. — Die Bank, das ist das ganze Gewebe und Geflecht zwischen Mitarbeitern, zwischen denen, die Geld einlegen, und denen, die Geld als Kredit nehmen, und allen, die noch an anderen Bankgeschäften beteiligt sind. Die Bank ist immer ein «Ausschnitt» einer bestimmten Menschheitssituation, und zwar gerade jener Menschheitssituation, in der sich das Schöpferische, das Kreative entbinden soll. Ich sagte einleitend: Die Menschen bringen so viel Intelligenz auf — warum schaffen sie es nicht, ihren Idealismus, den sie haben, und ihre Intelligenz anzuwenden auf Gebieten, in denen sie bisher wie blind umhergegangen sind? Eine neue Erziehung braucht die Menschheit; eigentlich müßten die Erwachsenen noch auf eine besondere Schule gehen. Aber man kann auch in der gewöhnlichen Schule schon anfangen, daß die Schüler lernen: Was ist eigentlich Geld, und wie geht man um mit Eigentum, mit Rechten und mit Freiheit und mit Fähigkeiten?
Wir kommen hier zum Schluß auf ein sehr ernst zu nehmendes Gebiet. Das eigentliche Vermögen einer Gemeinschaft — einer Menschen- oder einer Volksgemeinschaft, der europäischen Gemeinschaft oder einer regionalen Gemeinschaft — ist die kreative Initiativkraft der Menschen. Nicht Bodenschätze, nicht Öl und so weiter, Ressourcen, die irgendwann einmal zu Ende sind, sondern die Kreativität, das schöpferische Hervorbringen: das ist der eigentliche Reichtum einer Gemeinschaft. Und dieser Reichtum bedarf des Ganzen des sozialen Organismus. Die Dreigliederung des sozialen Organismus bedeutet, daß das Geistesleben eine eigene, autonome Gestalt braucht so wie das Staats- und Rechtsleben und auch das Wirtschaftsleben. Nur wenn der Mensch im Ganzen dieses sozialen Organismus darinstehen kann, entbinden sich seine schöpferischen Fähigkeiten. Deshalb ist es so verhängnisvoll, wenn, wie in der neueren Zeit, die Staaten anfangen, bei den Ausgaben für das Geistesleben zu sparen. Theater müssen schließen und so weiter. Es ist ein Mißverstehen! Man denkt, man müsse alle Kräfte konzentrieren auf die Wirtschaft, damit der Reichtum erhalten bleibt. Nein! Der Reichtum eines Landes entspringt dem Arbeitswillen und der Arbeitsfähigkeit seiner Bevölkerung, und die braucht das Ganze des sozialen Organismus; die braucht auch die Museen, die braucht die Theater, die braucht die Hochschulen, die braucht die Künste wie auch das religiöse Leben, die braucht auch einen im Gleichgewicht befindlichen Rechtsstaat, und die braucht das Wirtschaftsleben.
Damit gelangen wir zu einem letzten Aspekt dieser Tour d'horizon durch die anthroposophische Sozialkunde.
Das Geld will sich eigentlich jeweils verschieden verhalten. Das Geld hat drei große Qualitäten. Es kann einmal Kaufgeld sein, wie wir es alle benutzen, Geld gegen Ware. Das ist die eigentliche Welt der Wirtschaft, denn die Welt der Wirtschaft beginnt da, wo die Ware das Fabriktor verläßt, durch den Handel bis zum Konsumenten gelangt. Die Fabrik selbst ist Geistesleben. Man ist gewohnt zu denken: die Maschinen, das ist Wirtschaft; der Schreibtisch, das ist Geistesleben. Aber die Maschine bedeutet für den einen Menschen dasselbe, was der Schreibtisch für den Gelehrten bedeutet: ein Instrument, seine Fähigkeiten zu betätigen. Die Betätigung von Fähigkeiten ist immer Geistesleben! Also ist das Kaufgeld — Geld, mit dem man etwas kaufen kann — wirklich nur dort berechtigt, wo es Äquivalent für Ware ist. Das Geistesleben hingegen, das braucht Schenkungsgeld, das braucht Geld, das aus den Überschüssen der Wirtschaft hineinfließt, freigegeben wird für das geistige Leben.
Im «Nationalökonomischen Kurs» sagte Rudolf Steiner sehr dezidiert: Freie Geistesarbeit geht zurück, wenn zu wenig geschenkt wird.14 Damit ist ein innerer Vorgang gemeint, nicht etwa, daß dann das Museum schließt, weil es keine Subventionen mehr erhält, sondern: wenn die Schenkungsgeldprozesse in einem sozialen Organismus nicht fließen — denn die Geldprozesse sind blutkreislaufähnliche Prozesse —, dann geht das freie, kreative Geistesleben zurück. Deshalb haben sich alle anthroposophischen Banken immer wieder verpflichtet gefühlt, Gelder auch in das Geistesleben hineinzugeben. Das Geistesleben ist dadurch zu fördern, daß in freier Weise etwas zur Verfügung gestellt wird. Zwischen Kaufgeld und Schenkungsgeld tritt dann als Drittes das Leihgeld, das gegeben wird, um Initiativen in Gang zu setzten, und das wieder zurückfließt.
Auch das ist Aufgabe einer spirituell verstandenen Bank; denn wir leben erst in den Anfängen. Es wird noch einige hundert Jahre dauern, bis die Umerziehung der Menschen, die ja schon begonnen hat, zum Tragen kommt. So ist es immer auch eine Aufgabe der Bank, hinzuwirken, daß die Urgeste des Geldes — als Kaufgeld, als Leihgeld, als Schenkungsgeld — sich immer mehr ausgestaltet, so daß punktuell, von einer Stelle oder von mehreren Stellen aus, Gesundungskräfte in das Ganze des sozialen Organismus hineinfließen können.
Ein spirituell verstandenes Bankwesen wird ein großes Hauptziel haben, dem alle Methoden und alle Verfahren unterzuordnen sind: Dem Menschen zu dienen auf seinem Inkarnationsgang, nicht dem Geld, dem Kapital zu dienen. Das wird das große Schibboleth, die Entscheidungsfrage der kommenden Jahrzehnte sein: Willst du ein Diener des Kapitals, des Geldes sein, auf Geld- und Kapitalvermehrung hinarbeiten, oder willst du ein Diener sein der Menschen auf ihrem biographischen, auf ihrem Inkarnationsweg?
Daraus geht hervor, was man einen menschengemäßen Umgang mit dem Geld nennen kann. Erstens: Das Geld ermöglicht es, den Menschen so frei zu stellen, daß er den kreativen Arbeitsauftrag, den er sich vorgenommen hat, durchführen kann, dem Menschen die Freiheit zu geben für seine Initiativen. Und zweitens: so zu wirken mit dem Geld, daß die Initiativen der vielen Individualitäten gleichberechtigt erscheinen können. Es wird eine Bank vermeiden, Lieblingsprojekte eines Kunden zu fördern, sondern sie wird immer fragen: Entspringt das seinem Leben? Dann werden wir es wirklich fördern können. Es mögen die unterschiedlichsten Initiativen sein: Eine Bank wird die Gleichheit dieses Tätigkeitswillens anerkennen und fördern. Dann wird sie drittens auch bewirken können, daß zwischen den unterschiedlichen Vermögenslagen ein brüderlicher Ausgleich stattfindet. Es gibt Menschen, die zu Geld gekommen sind — durch Erbschaft, durch ihren eigenen Fleiß —, die sich nun fragen: Wie kann es anderen zukommen, die — persönlich oder im Hinblick auf ihre Einrichtung — in einer unglücklicheren Lage sind?
Eine spirituell verstandene Bank wird also versuchen, durch das Geld Freiheit, Gleichheit und Brüderlichkeit unter den Menschen zu ermöglichen. Dann kann sich aus solchen Tätigkeiten — es sind ja nur kleine Lichtinseln in einem Meer von Arbeit —, die von den in den verschiedenen bankartigen Einrichtungen Tätigen geleistet werden, etwas hervorgehen, was man nennen kann das wahre Geheimnis des Geldes. Und das ist, daß wir mit dem Geld und durch das Geld auf der Erde Erfahrungen machen können, die nur wir Menschen auf der Erde machen können und die wir dann, nach dem Tode, in die geistige Welt zu den Göttern tragen können.
Mehrfach knüpfte Rudolf Steiner solche Betrachtungen an die drei Versuchungen Christi an, an jene dritte, große Versuchung: «Sprich zu dem Stein, daß er Brot werde !»I5 Während Christus die ersten beiden Versuchungen, man könnte sagen, wie selbstverständlich zurückweisen konnte, tauchte hier etwas wie eine Frage auf. — «Der Mensch lebt nicht vom Brot allein.» — Aber der Christus kannte noch nicht, was auf der Erde die Not des Menschen ist, der eben Geld braucht, um Brot zu kaufen. Er war ja gerade erst als göttliche Wesenheit in die irdischen Hüllen eingezogen durch die Jordantaufe. Rudolf Steiner nimmt es als ein Bild: Auch die Götter wollen vernehmen, wie die Erfahrungen sind, die der Mensch auf der Erde in Ahrimans Reich macht und wie der Mensch auf der Erde begonnen hat, sich der Macht Ahrimans und des Geldes zu entwinden, Ahriman nicht nur zurückzuweisen, sondern ihn zu läutern. — Es gibt ein schönes Gedicht aus dem vorigen Jahrhundert, in dem heißt es:
«Ahriman sogar, der dunkle,
Wird zuletzt vergehn im Lichte.» (16)
Unser Umgang mit Geld ist der Anfang dessen, was von Menschen ausgehen kann, um jenen Geist, der jetzt als ein widergöttlicher Geist sich darstellt, zurückzutragen. Denn die Widersacher haben ihre Rolle übernommen, um dem Menschen Kraft zu geben, Widerstand zu bilden; damit der Mensch Kraft entwickeln kann. Und in dem Maße, in dem wir dem Geld wieder den wahren Charakter geben, den es eigentlich haben soll, indem wir es den satanischen Kräften entwinden, in dem Maße tragen wir etwas zu den Göttern, was die Götter nicht kennen — in der geistigen Welt gibt es kein Geld! Sie müssen von Menschen hören, wie man die Dämonen, die mit dem Geld zusammenhängen, überwinden kann und wie man das Geld und damit Ahriman zum Diener macht für den Inkarnations- und Arbeitswillen, den die Menschen haben, jeder einzelne und die Gemeinschaft zusammenarbeitender Menschen als Ganzes.


Anmerkungen
( 1 ) Die ersten erfolgreichen Versuche, an Geldfragen im anthroposophischen Bereich zu arbeiten, wurden 1961 mit der Gründung der Gemeinnützigen Treuhandstelle GTS in Bochum unternommen. 1967 folgte, ebenfalls in Bochum, als erste Bank die Gemeinnützige Kredit-Garantie-Genossenschaft GKG und 1974 als zweite Bank die Gemeinschaftsbank GLS.
In der Zwischenzeit sind in verschiedenen Ländern rund fünfzig Finanzeinrichtungen entstanden, die sich sehr voneinander unterscheiden. Einige haben offiziell den Status einer Bank, andere sind mehr Finanzierungsgemeinschaften, Bürgschaftsgenossenschaften, Stiftungen und sonstige bankähnliche Einrichtungen. Als Beispiele zusätzlich zu den Bochumer Bankeinrichtungen seien noch erwähnt die Triodos Bank N. V., Zeist, Holland (gegründet 1980) und die Freie Gemeinschaftsbank BCL, Dornach, Schweiz (gegründet 1984).
( 2 ) Siehe: Rudolf Steiner, Nationalökonomischer Kurs, Vierzehn Vorträge, Dornach, 24.7. bis 6.8.1922, GA 340, 5. Aufl. Dornach 1979, Vortrag vom 24.7.1922.
( 3 ) Siehe: Rudolf Steiner, Nationalökonomisches Seminar, Dornach, 31. 7. bis 5.8.1922, GA 341, 3. Aufl. Dornach 1986, Seminar vom 5.8.1922.
( 4 ) Siehe zum Beispiel: Rudolf Steiner, Die soziale Frage als Bewußtseinsfrage, Acht Vorträge, Dornach, 15.2. bis 10.3.1919, GA 189, 3. Aufl. Dornach 1980, Vortrag vom 2.3.1919.
( 5 ) Siehe zum Beispiel Anm. 2, Vortrag vom 27.7. 1922.
( 6 ) 3. Mose 25,37.
( 7 ) 5. Mose 20,11.
( 8 ) Paul Kennedy, In Vorbereitung des 21. Jahrhunderts, Frankfurt 1993.
( 9 ) Jahresbericht 1993, 10 Jahre Freie Gemeinschaftsbank, Domach 1994, S. 11.
( 10 ) J. W. von Goethe, Faust, Zweiter Teil, Erster Akt, Kaiserliche Pfalz, Saal des Throns.
( 11 ) November 1920, abgedruckt in: Rudolf Steiner, Aufsätze über die Dreigliederung des sozialen Organismus und zur Zeitlage 1915-1921, GA 24, 2. Aufl. Dornach 1982, S. 450 ff.

( 12 ) Siehe dazu Anm. I.
( 13 ) «Leitgedanken ...», siehe Anm. 11, S. 451.
( 14 ) Siehe Anm. 2, zum Schluß des Vortrages vom 29.7. 1922.
( 15 ) Neues Testament, Lukas-Evangelium, Kap. 4,3.
( 16 ) August von Platen, Gedichte, «Licht», Leipzig o.J.


In den «bankähnlichen Einrichtungen», die seit Anfang der sechziger Jahre - zuerst in Deutschland, dann immer weiter sich ausbreitend - aus der anthroposophischen Bewegung entstanden sind, wird eine «Versuchsmethode einer neuen Menschlichkeit im Umgang mit dem Geld» erprobt.
Wie ist es dazu gekommen, daß die Geldvorgänge immer mehr «entpersönlicht», ja entmenschlicht wurden und immer mehr den materialistischsten Zielen dienten? Der allgemein gewohnte Umgang mit dem Geld, der hervorgeht aus falschen Auffassungen dessen, was das Geld eigentlich ist, verursachte die Katastrophen unserer Zeit (z. B. Arbeitslosigkeit, Kriminalität, Kriegsindustrie). Was sind aber «richtige» Auffassungen? Die ganz und gar ungewohnten Leitgedanken von Rudolf Steiner werden in den anthroposophischen Banken - von Mitarbeitern und Kunden! - ernst genommen. Der Umgang mit Geld hat, von den wenigsten erkannt, auch eine große Bedeutung für die Biographie jedes einzelnen Menschen. Dient der Mensch dem Geld, oder dient das Geld dem Menschen? Das Geheimnis des Geldes ist eines der tiefsten Geheimnisse.
Manfred Schmidt-Brabant ist Erster Vorsitzender der Allgemeinen Anthroposophischen Gesellschaft und Leiter der Sektion für Sozialwissenschaft am Goetheanum in Dornach.
Geisteswissenschaftliche Vorträge Nr. 39