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Institut pour une triarticulation sociale
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Collection: 01-Questions fondamentales



Sujet: Les besoins de la vie juridique tyrannisent la vie spirituelle

 

Les références Rudolf Steiner Oeuvres complètes 023 082-084 (1976) 28/04/1919





Traducteur: Gérard Klockenbring Editeur: EAR

 

 

On parle certes de «Liberté de la science et de l'enseignement». Mais on considère comme allant de soi que l'État politique administre «la liberté de la science et de l'enseignement». On ne développe pas le sentiment qui permettrait de s'apercevoir que l'État, par ce fait, rend la vie spirituelle dépendante de ses besoins politiques. On pense que l'État crée des postes d'enseignement et que ceux qui y sont nommés peuvent y développer une activité spirituelle libre. Lorsqu'on s'habitue à une telle opinion, on ne remarque pas à quel point le contenu de la vie spirituelle est étroitement lié à l'être le plus intime de l'homme dans lequel il s'épanouit; on ne remarque pas que ce développement ne peut être libre que lorsqu'il n'est inséré dans l'organisme social par aucune autre impulsion que celle qui vient de la vie spirituelle elle-même. La fusion avec la vie de l'État, au cours des derniers siècles, a marqué de son empreinte non seulement l'administration de la science et la partie de la vie de l'esprit qui lui est liée, mais le contenu lui-même. Les conceptions mathématiques et physiques ne peuvent certes être influencées directement par l'Etat. Mais que l'on pense à l'histoire et aux autres sciences de civilisation. Ne sont-elles pas devenues un reflet de ce qui a résulté du rapport de leurs représentants avec la vie politique, et des nécessités de cette vie? C'est justement par ce caractère, qui leur a été imprimé, que les représentations ayant actuellement une orientation scientifique, et qui dominent la vie spirituelle, ont agi comme idéologie sur le prolétariat. Le prolétariat a remarqué comment les nécessités de la vie de l'État, dans laquelle il est tenu compte des intérêts de la classe dirigeante, ont imprimé un certain caractère aux pensées de l'homme. Le penseur prolétarien y vit un reflet des intérêts matériels et des conflits d'intérêts. Cela produisit en lui le sentiment que toute vie de l'esprit ne serait qu'idéologie, reflet de l'organisation économique.

[02/37] Une telle conception dessèche la vie spirituelle; cette conception disparaît, quand peut naître le sentiment que dans le domaine spirituel règne une réalité qui va au-delà de la vie matérielle extérieure, et qui porte en elle-même son contenu. Il est impossible qu'un tel sentiment survienne si la vie de l'esprit ne s'épanouit et ne s'administre pas librement, de par ses propres impulsions au sein de l'organisme social. Procurer à cette vie spirituelle le rôle qui lui est dû dans l'organisme social, seuls en ont la force des promoteurs qui se tiennent à l'intérieur d'un tel développement et d'une telle administration. L'art, la science, la conception philosophique du monde, et tout ce qui s'y rapporte, ont besoin d'une telle position d'indépendance, dans la société humaine. Car dans la vie spirituelle tout est lié. La liberté de l'un ne peut se bien porter sans la liberté de l'autre. Bien que les mathématiques et la physique ne puissent être influencées directement dans leur contenu par les nécessités de l'État, leurs applications, l'opinion qu'on se fait de leur valeur, les répercussions que leur pratique peut avoir sur la vie spirituelle, tout cela est déterminé par les nécessités de l'État, quand celui-ci administre des branches de la vie de l'esprit. Qu'un instituteur de l'échelon le plus élémentaire suive les impulsions venant de la vie de l'État ou bien qu'il reçoive ses impulsions d'une vie spirituelle se tenant sur ses propres fondements, c'est tout autre chose. Le socialisme, dans ce domaine aussi, n'a fait que reprendre l'héritage en ce qui concerne les façons de penser et d'agir des cercles dirigeants. Il considère comme son idéal d'inclure la vie de l'esprit dans le corps social, qui est basé sur la vie économique. S'il pouvait atteindre le but qu'il s'est fixé, il ne pourrait ainsi que suivre la voie sur laquelle la vie de l'esprit a perdu sa valeur. En exigeant que la religion soit une affaire privée, il a développé un sentiment juste, d'une façon unilatérale. Dans l'organisme social sain, toute vie de l'esprit, dans le sens esquissé ici, doit être «affaire privée» vis-à-vis de l'État et de l'économie. Mais le socialisme, en transférant la religion au domaine privé, n'a pas l'intention de créer pour un bien spirituel, à l'intérieur de l'organisme social, une position qui lui permettrait d'accéder à un développement plus élevé, plus souhaitable que celui qui est possible sous l'influence de l'État. A son avis, l'organisme social ne doit s'occuper, par ses propres moyens, que de ce qui lui semble vital. Or, placée unilatéralement en dehors de la vie publique, une branche de la vie de l'esprit ne saurait s'épanouir, si le reste du domaine spirituel demeure enchaîné.