J. Mossman - Le virus Corona : avec l'intelligence artificielle contre l'esprit libre

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Corona-virus :
avec l'intelligence artificielle contre l'esprit libre


28.10.2020 - Johannes Mossman
trad. FG v. 01 14/11/2020 - original


L'année 2020 restera dans les livres d'histoire comme une "année d'époque". Dans le monde entier, une majorité de la population a volontairement accepté des restrictions parfois drastiques à ses droits fondamentaux, en partant du principe erroné qu'il s'agissait de réactions temporaires à la "pandémie de Corona". Cela aimerait être vrai pour l'obligation de porter des masques, pour les réglementations en matière de distance et l'interdiction de rassemblement, mais pas pour la transformation structurelle de la société "démocratique libre". Un aspect essentiel de cette restructuration doit ici être examiné de manière critique. Dès 2017, le gouvernement de l'UE, les services secrets et l'industrie numérique ont commencé à manipuler les moteurs de recherche, les réseaux sociaux et les services de messagerie au nom de la "vérité". Sous l'impression de la menace mortelle d'une nouvelle sorte de virus, les manipulations pourraient alors être systématiquement étendues et ancrées légalement. Avec un "Plan d'action pour la démocratie", la Commission européenne veut maintenant dominer la narration de sujets complètement différents "en s'appuyant sur les mesures" pour lutter contre des "désinformations sur Covid-19" - et donne des exemples concrets.



Course à la lune

Le 4 octobre 1957, l'Union soviétique a lancé un satellite en orbite devant les États-Unis, prouvant qu'elle pouvait atteindre le territoire américain avec des missiles intercontinentaux. Les États-Unis ont réagi au "choc Spoutnik" en accordant une subvention sans précédent au développement technologique afin de compenser la présumée avance russe. Le ministère de la Défense a injecté de l'argent dans les start-ups de la Silicon Valley naissante et a établi des partenariats "public-privé" entre l'armée, les services de renseignements et les entreprises technologiques. C'est ainsi qu'a commencé l'histoire des entreprises/groupes numériques [1]. Le développement fulgurant des processeurs informatiques, d'Internet ou de l'IA n'aurait pas été possible sans l'hostilité à l'égard de l'Est en tant que moteur idéologique. L'historienne Margaret O'Mara explique : "L'industrie informatique a été promue parce qu'elle voulait de meilleures armes. La course à l'armement a justifié les énormes dépenses. L'État a été le premier client de cette nouvelle industrie et a fait en sorte que les puces électroniques deviennent moins chères. Ainsi, l’État a créé un nouveau marché sans en avoir l'intention" [2]. Les interdépendances entre l'armée américaine, la CIA et les entreprises numériques se poursuivent encore aujourd'hui [3]. De nombreuses applications de notre vie quotidienne remontent aussi directement aux développements du Pentagone ou des services secrets US, tels que Siri d'Apple, Google-Earth ou l'Internet lui-même [4].


Au tournant du millénaire, la Fédération de Russie a alors subi son "choc Spoutnik". Car la Silicon Valley n'a pas seulement produit les plus grands groupes du monde, ce qui a finalement fait des États-Unis le pays le plus riche du monde. Ce qui est particulier, c'est que ces groupes ne produisent pas de biens ou de services au sens traditionnel du terme, mais servent plutôt d'interfaces pour toute communication et la vente de biens, et ce à l'échelle mondiale. Ils ne se sont pas contentés d'offrir quelque chose sur le marché, mais se sont mis à la place du marché. Ils ne se sont pas contentés de diffuser leurs opinions en public, mais ont été eux-mêmes le nouvel espace public. Les rejetons de la Silicon Valley ont ainsi concentré une toute nouvelle forme de pouvoir entre des mains américaines US.


Les critiques ont fait remarquer à juste titre que l'Europe avait dormi pendant le turbo-impérialisme subventionné par l'État des USA qui s'est emparé du monde au début du millénaire. Néanmoins, les discussions sur une "souveraineté" numérique de l'UE ne vont pas assez loin. L'UE ne peut et ne doit pas copier l'histoire de la Silicon Valley. D'autre part, c'est l'UE elle-même qui utilise à mauvais escient la technologie créée par la Silicon Valley pour concentrer le pouvoir de l'État, comme nous le verrons plus loin. Le gouvernement américain US, en revanche, s’est jusqu'à présent largement retenu, précisément parce qu'il possédait un intérêt dans la croissance des groupes numériques. Bien que la CIA et le Pentagone se soient intéressés aux données, ils n'étaient apparemment pas intéressés au départ par la manipulation directe du nouvel "espace public" apparaissant. Si le gouvernement américain avait influencé les algorithmes de recherche dès les premiers stades de la croissance, Google ne serait jamais devenu le numéro un imbattable. Au contraire, l'entreprise a également obtenu sa position de monopole parce que, jusqu'à il y a quelques années, les utilisateurs pouvaient compter sur sa promesse de neutralité.


La fausse promesse de Google

Les fondateurs de Google, Sergey Brin et Larry Page, ont promis de fournir un outil pour la "mesure objective" de la "représentation humaine subjective de signification" [5]. Le classement ne devrait refléter aucun jugement d’un quelque contenu de vérité des résultats de recherche. Cela plaisait aux surveillants du marché libre. Ils ont insisté pour tenir leur promesse de neutralité, du moins tant qu'ils voyaient Google comme un marché d'échange de biens et de services. Après sept ans d'enquête, la Commission européenne a infligé au groupe une amende de 2,4 milliards d'euros en 2017 [6]. Les Californiens avaient placé des publicités pour leurs propres services à un niveau plus élevé que celui de leurs concurrents, ce que la Commission a considéré comme une violation du droit des ententes en rapport avec la position de monopole du moteur de recherche. Que par contre Google ne se soit pas engagé à la "neutralité", mais une "vérité" et avec cela dû intervenir dans l'algorithme de recherche afin de rendre certains résultats meilleurs et d'autres moins bons ou pas du tout visibles est une exigence relativement récente. Elle est devenue bruyante dans la mesure où l'Internet était perçu non seulement comme un marché numérique, mais avant tout aussi comme une plate-forme pour l'échange d'opinions et de connaissances. Soudain, les gardiens du marché eux-mêmes ont commencé à remettre en question l'idéal de neutralité. Tandis que d'un côté, ils ont exigé l'égalité des chances et la libre concurrence en ce qui concerne les fournisseurs de biens et de services au sens étroit du terme, de l'autre, ils ont forcé les entreprises numériques à manipuler les résultats des recherches en ce qui concerne des contenus rédactionnels, des expressions d'opinion et des discussions - finalement, les décisions de vote en dépendaient.

Liberté pour le marché, contrainte pour l'esprit - la politique numérique de la Commission européenne est basée sur ce paradigme. Il n’est pas clair quand elle a influencé activement les algorithmes de recherche pour la première fois. En tout cas, cela n'a été possible en public que dans le contexte de la discussion sur les "fausses nouvelles", initialement en rapport avec la crise ukrainienne. En 2015, la Commission a créé la "East StratCom Task Force" pour influencer l'opinion publique en Ukraine avec le soutien des services secrets, pour promouvoir les médias pro-occidentaux dans la sphère d'influence de la Russie et pour combattre la "propagande" russe [7]. La même année, une étude conjointe du magazine Slate et de l'Université d'État de l'Arizona a révélé que l'algorithme de recherche de Google favorisait les candidats démocrates américains [8]. "Pour le dire clairement : nous n'insinuons pas que Google est un bras numérique du Parti démocrate. Mais notre analyse montre clairement des préjugés et des différences dans les résultats..." ont remarqué les auteurs. Le public devrait prendre davantage conscience que Google n'est en aucun cas neutre. Lors de la campagne électorale américaine de 2016, Donald Trump a répété l'accusation : que Google manipulait les algorithmes pour le compte d'Hillary Clinton. Clinton a répliqué en accusant la Russie d'avoir poussé Trump au pouvoir en diffusant de "fausses nouvelles" (NDT Les « fake-news ») [9]. Avec le choc entre démocrates et républicains et l'invocation de la prétendue menace russe, la fin de l'idéal de mesurer la pure "représentation humaine subjective de signification" a été scellée. Maintenant, le monde entier demande après la "vérité" des résultats de la recherche ou des classements des hit-parades, surtout la Commission européenne qui, en vue des prochaines élections européennes, craint que la Russie puisse également influencer la formation de l'opinion dans les États membres de l'UE.


La vérité devient une tâche de l'État

En janvier 2017, la Commission européenne a menacé les groupes numériques d'une intervention de l'État au nom de la vérité, pour la première fois en public. "Comme tout le monde, je m'inquiète des fausses nouvelles, surtout après les élections aux États-Unis... Je crois vraiment à l'autorégulation, mais si des clarifications sont nécessaires, nous y sommes préparés", a déclaré Andrus Ansip, commissaire européen chargé du marché unique numérique, aux entreprises/groupes du secteur. À l'automne de la même année, Google a reprogrammé son algorithme de recherche de manière à ce que, indépendamment de la pertinence du résultat de la recherche par rapport à "la représentation humaine subjective de signification", certains contenus puissent être trouvés plus difficilement [11]. Les médias favorables à la Russie, tels que Russia Today et Spoutnik, ainsi que de nombreuses initiatives de gauche ou socialement critiques, dont Wikileaks et Democracy Now, ont été les premiers touchés [12]. À l'approche des élections européennes, elle a accru la pression sur Google, Twitter et Facebook pour qu'ils fassent encore plus dans le domaine de la "vérité" et a déclaré que la bataille numérique de l'opinion était le nouveau domaine de déploiement des opérations militaires [13].

Le ministère fédéral de la Défense justifie comme suit l'extension correspondante des missions de la Bundeswehr : "Dans les scénarios de conflit modernes, les attaquants s'appuient sur une combinaison d'opérations militaires classiques, de pressions économiques, d'attaques informatiques et même de propagande dans les médias et les réseaux sociaux. Cette approche est également connue sous le nom de "tactique hybride" ou "guerre hybride"... Le but des attaquants n'est pas seulement de causer des dommages, mais aussi de déstabiliser les sociétés et d'influencer l'opinion publique. Les sociétés ouvertes, pluralistes et démocratiques offrent de nombreuses possibilités à cet égard et sont donc facilement vulnérables" [14]. Afin de pouvoir prendre des mesures plus ciblées contre les fausses allégations, qu'elle a désormais classées comme faisant partie de la « conduite de guerre » russe, la Commission européenne a mis en commun les ressources de l'OTAN et des services secrets au sein du "Centre contre les menaces hybrides" [15]. La même année, le service des affaires étrangères a élaboré un "plan d'action" contre les fausses informations [16], qui, entre autres, a pour la première fois confié au service de renseignement de l'UE INTCEN, qui n'avait jusqu'alors pratiquement aucune compétence, la coordination des services de renseignement nationaux. En réponse à une question critique de la gauche à ce sujet, le gouvernement fédéral a répondu : "Le gouvernement fédéral prend très au sérieux le potentiel des campagnes de désinformation. Elle estime donc que la demande contenue dans le plan d'action de l'UE contre la désinformation visant à renforcer la coopération des services de renseignement, en particulier avec le "Centre d'analyse des renseignements de l'UE" (EU INTCEN), est judicieuse" [17].

En septembre 2018, Google, Facebook & Co. ont rejoint le plan d'action - en "engagement volontaire". L'accord oblige les géants de la technologie à améliorer "la visibilité et la possibilité de trouver des contenus fiables" [18] et à investir dans des "moyens technologiques" pour "donner la priorité aux informations pertinentes, authentiques et utiles, le cas échéant, dans des canaux de recherche, de diffusion ou autres canaux de distribution automatiquement classés". Ils doivent rendre compte chaque année à la Commission européenne de leurs efforts à cet égard. En outre, les publicités, principale source de revenus pour la plupart des médias en ligne, ne devraient plus être placées sur des pages qui contiennent de "fausses informations". Mais en février 2019, la Commission européenne a continué d'exprimer son mécontentement, menaçant les entreprises numériques de forcer un service encore plus efficace à la "vérité" par la loi [19]. Puis vint Corona.



La grande percée

À partir du printemps 2020, il ne s'agit plus seulement du résultat des élections. Face à la menace mortelle d'une nouvelle sorte de virus, la survie de millions de personnes semblait bien plus dépendre de ce que les entreprises numériques donnent la priorité à certaines opinions définies comme "vraies", tout en traitant les autres comme secondaires, voire en les supprimant. Il était nécessaire de justifier les mesures politiques par une " information correcte ", sans laquelle jusqu'à 570 000 citoyens allemands seraient morts rien qu'en Allemagne [20]. Christian Drosten, conseiller Corona en chef auprès du gouvernement allemand a donc été l'un des premiers à signer une pétition en ligne exigeant un engagement encore plus actif des groupes numériques en faveur de la vérité. « En ce moment, nous ne sommes pas seulement confrontés à la pandémie COVID 19, mais aussi à une "infodémie" mondiale, dans laquelle des vies humaines sont menacées dans le monde entier en raison de la désinformation qui se propage de manière virale dans les médias sociaux... », dit-il. "Toute personne ayant été en contact avec des informations erronées sur la santé sur leurs plateformes" devrait donc être "avertie et informée" et recevoir automatiquement "une correction bien conçue et vérifiée de manière indépendante" afin que les utilisateurs "ne croient pas à des mensonges dangereux" [21].


Drosten enfonçait des portes ouvertes. En mars 2020 déjà, Google, Facebook et Cie avaient devancé la Commission européenne et avaient fondé une "alliance" contre les fausses informations [22]. Des milliers de "fact-checkers", certifiés par l'Institut américain Poynter, ont été chargés de vérifier la véracité des contenus, de les signaler si nécessaire et de faire ainsi une présélection pour les internautes. Cependant, les milliards de nouvelles entrées qui sont distribuées chaque jour via Facebook, WhatsApp et Cie ne peuvent être gérées par les seules forces humaines. "Une quantité énorme de contenu est mise en ligne chaque jour, et il est humainement impossible de rechercher tout ce contenu pour identifier les faux messages et les fausses informations", explique Alexander Wong, chercheur en IA à l'université de Waterloo au Canada [23]. En conséquence, l'intelligence artificielle enlève de plus en plus aux vérificateurs de faits la décision de vérité et de mensonge. En plus des grandes entreprises numériques, de nombreuses start-ups telles que les émetteurs d'informations "Full Fact" ou "Logically", des opérateurs de réseaux et des agences gouvernementales proposent des solutions automatisées et centralisées pour identifier et éliminer les fausses nouvelles supposées. En termes simples, il s'agit d'atomiser les déclarations dans les plus petites unités de sens, de les "enrichir" en prétendues affirmations à l'aide de programmes tels que BERT de Google, puis de les évaluer en fonction de la fréquence à laquelle les mêmes affirmations ont été faites par des organismes "officiels", c'est-à-dire des gouvernements ou des médias établis. Le robot crache alors un pourcentage de probabilité que le texte original soit faux, et recommande des contre-mesures appropriées si nécessaire [24].

Dans le même temps, Google & Co. a reprogrammé les algorithmes de recherche de telle sorte que les présentations des pouvoirs publics soient généralement mieux placées dans les classements des résultats que celles des fournisseurs de médias indépendants [25]. La plateforme vidéo YouTube, qui appartient à l'alphabet mère de Google, affiche également sous toutes les contributions Corona un avis indiquant que l'utilisateur reçoit des "informations scientifiques" du gouvernement, et supprime les messages vidéo classés comme "faux". Pour sa part, l'UE a mis en place un "Observatoire européen des médias numériques (OEDN)", qui doit désormais fonctionner comme un "centre de lutte contre la désinformation en ligne" et "soutenir" les chercheurs de faits. Au lieu d'un rapport annuel, les groupes numériques doivent désormais faire un rapport mensuel sur la façon dont ils privilégient la "vérité" de la Commission européenne et suppriment les "fausses affirmations". Par mesure de précaution, l'UE menace les groupes numériques d'adopter une approche plus stricte si cela ne donne pas encore les résultats escomptés : ces mesures sont "la dernière chance pour chacun de renforcer ses efforts à cet égard" [26].


Le cas de Judy Mikovits

Rien qu'entre avril et juin 2020, Google a supprimé 11,4 millions de vidéos YouTube, soit environ 2,5 millions de plus qu'à la même période l'année dernière. Selon Google, l'augmentation des suppressions est principalement due à de "fausses déclarations" concernant le virus corona [27]. Le cas de Plandemic montre quels critères sont appliqués dans ce contexte : dans la vidéo de 26 minutes intitulée "Plandemic : The Hidden Agenda Behind Covid-19" (l'agenda caché derrière Covid-19), la biologiste moléculaire Judy Mikovits fait des commentaires critiques sur le droit des brevets/patentes, la commercialisation des médicaments et les mesures de lutte contre le coronavirus prises par les gouvernements. Facebook a supprimé la vidéo au motif qu'elle avait affirmé à tort que le port de masques présentait des risques pour la santé [28]. Google s'est joint à l'opération un peu plus tard et a également supprimé la vidéo.

Selon la situation juridique actuelle, les suppressions peuvent être couvertes par le "droit de jouissance légale" des entreprises numériques. À première vue, une telle compréhension de la loi est logique, car naturellement aucun fournisseur de médias ne peut être obligé de laisser les critiques s'exprimer ou de diffuser leurs thèses. Mais les normes juridiques de toute maison d'édition ne peuvent pas être simplement transférées aux sociétés numériques. Google, Facebook et autres ne sont pas des fournisseurs de médias, mais l'infrastructure commune de tous les fournisseurs de médias à l'ère numérique. La Commission européenne en est consciente - après tout, elle a infligé une amende d'un milliard d'euros à Google parce qu'elle a considéré que la préférence de l'entreprise pour l'autopromotion en raison de sa position particulière constituait un abus de son pouvoir de marché. Pourquoi Google devrait-il bénéficier d'un droit de domiciliation sur le contenu éditorial de tiers alors qu'il en est privé pour le placement de sa propre publicité ? En outre, une telle application des "droits de jouissance légale", comme expliquée ci-dessus, est politiquement motivée et est mise en œuvre par les gouvernements. Si, il y a 30 ans, était venu au gouvernement fédéral de manipuler toutes les machines à imprimer de telle sorte que certains fournisseurs de médias publient moins ou pas du tout, tandis que d'autres pourraient produire des tirages plus importants que ce qui est demandé, cela aurait déclenché une tempête d'indignation. Dans le principe, rien d'autre ne s'est passé depuis Corona, si ce n'est qu'à l'ère du numérique, ce ne sont pas les machines à imprimer, mais les moteurs de recherche et les réseaux sociaux qui sont manipulés, avec le même résultat.


La guerre froide avec les claviers
Il est absurde que la pré
sumée lutte contre les théories du complot repose elle-même sur une théorie du complot : la Russie est responsable de tout, de l'élection de Donald Trump à la présidence des États-Unis ainsi que des "faux rapports" sur le coronavirus. La conclusion inverse devrait alors légitimer la manipulation des résultats de recherche par l'État : Si un État étranger exerce une influence, l’État concerné doit bien sûr aussi exercer une influence - au nom de la santé publique. L'UE a donc de plus en plus recours à la rhétorique de guerre : "Dans le monde d'aujourd'hui, marqué par la technologie et la concurrence, les guerriers ont tendance à porter des claviers plutôt que des épées" [29]. Cette lecture a également permis d'impliquer le service de renseignement INTCEN de l'OTAN et de l'UE dans la lutte contre les "fausses affirmations" sur le coronavirus [30], ainsi que d'étendre en conséquence les tâches de la "East StratCom Task Force" déjà mentionnée ici, qui a été fondée à l'origine pour combattre la "propagande russe" dans le conflit ukrainien.

Il est toutefois utile de jeter un coup d'œil aux "preuves" de la prétendue attaque numérique russe. Il est essentiellement fait référence aux publications des médias qui sont considérés comme "favorables au Kremlin". La Commission européenne cite une information de Russia Today, par exemple, selon lequel l'UE n'a pas aidé ses partenaires dans la crise Corona, de sorte que la Russie et la Chine sont intervenues [31]. Cela signifie que le simple fait que Russia Today véhicule une vision des choses différente de celle des médias favorables à l'UE est déjà considéré par la Commission comme une ingérence d'un État étranger. Il ne saurait être question que la Russie oblige les entreprises numériques à modifier leurs algorithmes et à supprimer des contenus, comme le fait l'UE. La "preuve" prouve donc seulement que les médias liés au Kremlin font l'évidence et publient leurs propres opinions, tandis que la Commission européenne, parce qu'elle ne partage pas ce point de vue, manipule l'infrastructure médiatique. Aussi l'étude d'Oxford, qui est souvent citée par la presse et qui prouverait soi-disant une "cyberattaque" de la Russie, ne contient en fait rien de plus que des comptes de publications de médias favorables à la Russie [32]. À titre d'exemple de "la sape de l'UE", il est mentionné qu'un article de Spoutnik a fait craindre qu'une récession économique provoquée par les mesures Corona ne déclenche à nouveau des vagues de protestation en France. Pour prouver que cette considération évidente est une attaque de l'État russe contre l'UE, on prétend que Spoutnik est financé par l'État. Cependant, les auteurs de l'étude ne semblent pas remarquer qu'il en est de même pour l'ARD et la ZDF (NDT Des chaînes d’information allemandes), tout comme le fait que l'UE finance des "médias indépendants" sur le territoire russe [33], qui ne pourraient pas survivre sans l'aide de l'Occident.


Qui définit la vérité ?

Le commissaire européen aux affaires étrangères, Josep Borrell, justifie l'intervention de l'État au nom de la "vérité" de la manière suivante : "L'information est la matière première de la démocratie. Si les gens n'ont pas les bonnes informations, il leur sera difficile de prendre les bonnes décisions" [34] Borrell a certainement raison sur ce point. Cependant, dès que les entreprises numériques cesseront de mesurer "la représentation humaine subjective de signification", comme Google avait autrefois pour objectif de le faire, et qu'elles devront au contraire fournir principalement "l’information correcte", quelqu'un devra définir ce qu'est la "bonne information". C'est maintenant la Commission européenne qui s'en aperçoit. Le 10 septembre 2020, elle a publié une évaluation de sa collaboration avec les entreprises numériques à ce jour. Selon cette évaluation, la "désinformation" a été combattue avec succès dans de nombreux cas. Le problème, cependant, est qu'aucun concept de "désinformation" n'a encore été défini [35]. Apparemment, chacun l'appréhende différemment, c'est pourquoi il faut ensuite travailler à une "compréhension commune" de la désinformation. La Commission européenne estime qu'elle sait déjà ce que sont les "bonnes décisions". La vice-présidente de l'UE, Vera Jourova, explique : "La question de la vaccination semble être le prochain champ de bataille. Une étude a montré, par exemple, que la volonté de se faire vacciner a chuté de 20 points de pourcentage en Allemagne en moins de deux mois" [36]. Les citoyens prennent donc les bonnes décisions lorsqu'ils sont vaccinés contre la rougeole, le corona et d'autres maladies. Les entreprises numériques devraient s'engager dans cette voie. La valeur de vérité de l'information et la définition de la "désinformation" découlent donc de la "bonne décision" anticipée. Une "information correcte" est celle qui conduit les citoyens aux décisions que leurs représentants élus ont prises pour eux.

La Commission européenne considère que les mensonges présumés des médias russes sont dangereux, car ils pourraient inciter les citoyens à prendre des décisions contraires aux leurs. Par exemple, il serait possible pour une majorité démocratique de rejeter les mesures Corona, de refuser les vaccinations, de s'en tenir à la construction de Nordstream 2 ou d'exiger la levée des sanctions contre la Russie. Ainsi, lorsque la Commission européenne met en garde contre le fait de "saper la démocratie", elle pense en réalité à la sape de ses propres politiques par un processus démocratique dont l'issue est imprévisible. La démocratie n'est pas souhaitée, car elle serait ouverte et exigerait que les citoyens puissent juger eux-mêmes des positions russes. Mais cela risquerait de mettre en péril "l'amitié transatlantique". En estimant qu'elle doit protéger ses électeurs contre les "fausses informations" du côté russe, la Commission européenne déclare les citoyens non majeurs et exprime sa méfiance à l'égard de la démocratie en tant que telle. Pour la Commission européenne, il ne s'agit à aucun moment d'engager un processus démocratique de formation de l'opinion, mais seulement de "prendre" les citoyens avec eux dans des décisions supposées/présumées "correctes". Ainsi, au lieu de permettre un discours scientifique sur la nature du virus du corona et des contre-mesures praticables qui soit transparent pour les citoyens, elle inonde le public de mantras dénués de sens, mais psychologiquement efficaces tels que "Ensemble contre le corona" ou "Masques protecteurs", tout en empêchant la communication de nuances différenciées.


Le jour d’après

La pandémie de Corona 2020 a été à la fois un test et une justification pour la création d'un ministère de la vérité bien organisé, qui utilise maintenant des manipulations techniques pour orienter le débat public - au nom de la liberté et contre la Russie. La Commission européenne déclare : "La crise a montré que des médias libres et indépendants sont un service essentiel, qui fournit aux citoyens des informations fiables et factuelles et contribue à sauver des vies. L'UE renforcera son soutien politique et pratique aux médias et aux journalistes indépendants dans l'UE et dans le monde" [37]. Dans cette logique, la présidente de l'UE, Ursula von der Leyen, prévoit maintenant un "plan d'action pour la démocratie" "s'appuyant sur les mesures" contre le coronavirus, qui examinera "tous les moyens utilisés pour influencer notre système démocratique" et permettra une "approche cohérente de la désinformation". Lutz Güllner, du service des affaires étrangères, explique comment la démocratie doit être protégée de manière globale contre l'influence d'opinions "erronées" : "Il ne s'agit pas seulement de désinformation, mais de toutes les formes d'influence. Cela peut être dans le secteur des médias, mais aussi dans le domaine universitaire. Quels types de stratégies sont utilisés, quels types d'acteurs sont présents ? Et, bien sûr, très important : de quels instruments disposons-nous ? Et quels sont les instruments qu'il nous reste à créer pour nous armer contre eux" [39].


La Commission européenne lie explicitement le "Plan d'action pour la démocratie", qui vise à étendre le "Code de conduite contre la désinformation" à la nouvelle législation sur les entreprises numériques, à l'affaire de l'attaque au poison présumée contre l'homme politique russe d'opposition Alexei Nawalny [40]. Cette affaire constitue donc le premier test pour l'application et l'extension du système Corona en dehors de son contexte initial. La "East StratCom Task Force", qui a été mentionnée ici à plusieurs reprises, tient déjà une liste impressionnante de déclarations sur l'affaire, que la Commission européenne veut maintenant combattre avec l'aide des entreprises numériques en tant que "fausses affirmations" et "attaques contre la démocratie" [41]. Par exemple, la déclaration suivante est mentionnée : "Un assassinat ordonné par le Kremlin est le scénario le plus improbable pour ce qui est arrivé à Nawalny". [42] Ou encore celle-ci : "Les réseaux euroatlantiques veulent utiliser le cas de Nawalny pour contrecarrer le Nord Stream 2" [43]. Ces deux déclarations contiennent des considérations tout à fait légitimes au service de la recherche de la vérité, même si le Kremlin devrait en fait être derrière l'attaque. Cependant, sur la base du système de corona décrit ici, ces considérations et d'autres comparables doivent être filtrées par Google & Co. et entraîner des pertes économiques dues au manque de recettes publicitaires. Il en va de même pour les critiques concernant les nouvelles sanctions contre la Russie, que l'UE vient d'imposer comme "punition" pour la prétendue attaque contre Nawalny. Selon ses propres déclarations, la "East StratCom Task Force" tente donc également de supprimer la déclaration suivante : "Heiko Maas parle de l'État de droit. Mais il ne peut être question d'État de droit dans le cas de Nawalny, car les sanctions de l'UE ont été imposées sans procès, sans enquête, même pas dans le cadre d'une conversation avec les autorités. Néanmoins, le coupable a été immédiatement désigné" [44].


La Russie influence-t-elle les élections ?

Il est peu probable que les fournisseurs de médias financés par l'État russe, comme Russia Today ou Spoutnik, adoptent une position qui pourrait nuire à la Russie. Au vu de la menace croissante que représente la politique anti-russe de la Commission européenne et de l'intensification de la rhétorique de guerre des politiciens occidentaux, ils ont un intérêt naturel à ce que davantage de personnes en Europe remettent en question le point de vue du gouvernement. À cet égard, les reportages de fournisseurs de médias tels que Russia Today ou Spoutnik sont naturellement, dans de nombreux cas, guidés par des intérêts et visent en ce sens à "déstabiliser" les systèmes occidentaux. La mesure dans laquelle le gouvernement russe tente également d'utiliser les commentaires et les « likes » achetés pour aider son point de vue à gagner une plus grande présence dans les réseaux sociaux est controversée. L'enquête du service de renseignement fédéral allemand, largement annoncée en 2016, n'a fourni aucune preuve d'une campagne de désinformation ciblée [45]. D'autre part, il existe des rapports de "repentis", selon lesquels une agence de Saint-Pétersbourg paierait des "trolls" pour poster sur Facebook & Co. Cependant, par rapport à la manipulation englobante d'Internet par un "partenariat" entre la Commission européenne et des entreprises numériques, décrite ci-dessus, la petite et moyenne entreprise russe ressemble plus à un coup de pied impuissant d'un désespérément inférieur. Thomas Rid, qui est professeur d'études de sécurité à l'université Johns Hopkins de Washington et qui étudie l'influence russe sur les réseaux sociaux, explique : "Le comportement que nous observons de la part de cette entreprise à Saint-Pétersbourg est très peu professionnel et négligé, tant dans sa dissimulation que dans l'exécution elle-même. Non seulement les médias, mais aussi les experts, les autorités et les hommes politiques ont, à mon avis, exagéré et systématiquement surestimé l'influence de l'Agence de recherche sur Internet - précisément parce que ces opérations étaient si faciles à détecter" [47].


Il ne s'agit en aucun cas de minimiser le problème des « likes » falsifiés et des faux commentaires. Mais une guerre de propagande contre l'ennemi imaginaire à l'Est ne résoudra pas ce problème, d'autant plus qu'il ne s'agit nullement d'un problème "russe". Tout le monde peut aujourd'hui acheter des bots à des prix super-économiques - et ce, en toute légalité. Le magazine Chip recommande dans son conseil pratique : "Lorsque vous achetez des adeptes/followers, vous devriez toujours comparer les prix et choisir un fournisseur réputé et un mode de paiement sécurisé" [48]. L'ensemble des données envoyées à la NDR (North German Broadcasting Corporation) n'a donc probablement révélé que la partie visible de l'iceberg : "Près de 90 000 sites de fans dans les réseaux sociaux ont bénéficié de déclarations "j’aime" payantes... Selon l'analyse, les hommes politiques et les associations de tous les partis politiques ont profité des manipulations : le FDP 17 fois, le SPD 16 fois, la CDU 13 fois, l'AfD 12 fois. Et trois fois chacun pour les Verts et la gauche. Au total, il y a 29 associations locales et de district, cinq associations d'État ainsi que dix membres du parlement d'État et un politicien fédéral". Il est néanmoins évident que les gouvernements et les services secrets occidentaux sont principalement concernés par les trolls russes. La manipulation systématique des algorithmes de recherche et l'incapacité de leurs propres citoyens ne sont cependant pas une réaction appropriée, d'autant plus que la falsification de likes et de commentaires n'est même pas poursuivie dans ce pays, mais fait partie du quotidien de nombreux hommes politiques et d’entreprises occidentaux.


Quo Vadis, la démocratie ?
Je ne suis pas du tout contre les vaccinations généralisées, je ne porte pas de chapeau en aluminium, je ne sympathise pas avec les radicaux de droite et, au passage, je considère également que certaines des affirmations de la censurée Judy Mikovits sont fausses. Néanmoins, je pense que l'idéal initial des fondateurs de Google était juste. Faire une évaluation ou même une sélection selon le critère de la "vérité" ne peut pas être une question de technologie utilisée, mais seulement d'utilisateur de la technologie. Préjuger la formation de l'opinion des citoyens en présélectionnant la "vraie" opinion est en contradiction flagrante avec la démocratie - à plus forte raison lorsqu'une telle action est entreprise par le gouvernement élu lui-même. Cela transforme la démocratie en une farce, ce qui fait que les radicaux de droite, les citoyens du Reich et les théoriciens du complot sont de plus en plus populaires.

Peut-être l'Est n'est-il pas aussi enclin que l'Ouest à l'idéal de la démocratie. Mais l'Occident ne devrait-il pas alors s'efforcer de prouver la viabilité de la démocratie plutôt que de la miner par crainte de l'influence russe ou chinoise ? L'impulsion en faveur de la démocratie n'est pas compatible avec l'attitude "nous contre l’attitude" des chiens de garde autoproclamés de la démocratie. La démocratie n'est jamais terminée, elle est en constante évolution ; mais elle est définitivement terminée dès qu'elle devient l'étiquette de l'arrogance envers des cultures qui ont vraisemblablement ou peut-être prouvé qu'elles avaient d'autres priorités. Les menaces de la Chine et de la Russie pour la démocratie peuvent être réelles à certains égards, tout comme celles des radicaux de droite, des citoyens du Reich ou des théoriciens du complot. Mais cela ne doit pas faire oublier que la menace bien plus grande qui pèse actuellement sur la démocratie vient de l'intérieur - des "démocraties" elles-mêmes.

Ici, seule une petite partie des changements de système que les gouvernements occidentaux et les entreprises numériques ont effectués sous l'impression de la crainte de la Corona pouvait être décrite. Il faudrait en ajouter beaucoup d'autres, par exemple en termes de changements de législation, d'extension des pouvoirs des autorités publiques ou de partenariats "public-privé", afin de rendre visible toute l'étendue de la réorientation antidémocratique des sociétés occidentales. Cependant, une grande partie de ces activités ont déjà commencé il y a plusieurs décennies, comme le montre l'exemple de la manipulation de l'opinion. À cet égard, l'année Corona marque moins un tournant historique que le point bas provisoire d'une évolution descendante. Ce qui semblait être une tendance à la baisse de la démocratie a été consolidé en 2020 et fait partie intégrante des systèmes dits "démocratiques".


Johannes Mosmann, octobre 2020



Remarques :

[1] https://www.faz.net/aktuell/wirtschaft/das-silicon-valley-ist-ein-kind-des-krieges-16286444.html

[2] https://www.wienerzeitung.at/verlagsbeilagen/digitale-republik/2052074-Wie-der-Kalte-Krieg-Silicon-Valley-erschuf.html

[3] https://www.faz.net/aktuell/wirtschaft/wirtschaftspolitik/silicon-valley-tal-der-ahnungslosen-12687192.html

[4] https://www.sueddeutsche.de/digital/us-militaer-darf-google-beim-toeten-helfen-1.3998295-2
https://www.theguardian.com/news/2018/dec/20/googles-earth-how-the-tech-giant-is-helping-the-state-spy-on-us

[5] https://www.internetmythen.de/?mythen=mythos-19-suchmaschinen-liefern-objektive-ergebnisse

[6] https://ec.europa.eu/germany/news/eu-kommission-verhängt-geldbuße-von-242-milliarden-euro-gegen-google_de

[7] https://www.heise.de/tp/features/Krieg-um-die-Ukraine-Kampf-um-die-Koepfe-3582087.html?seite=2
https://www.zdf.de/nachrichten/heute/eu-faktencheck-task-force-in-der-kritik-zdfcheck-100.html

[8] https://slate.com/technology/2015/12/why-google-search-results-favor-democrats.html

[9] https://de.wikipedia.org/wiki/Russische_Einflussnahme_auf_den_Wahlkampf_in_den_Vereinigten_Staaten_2016

[10] https://www.ft.com/content/85683e08-e4a9-11e6-9645-c9357a75844a

[11] https://www.theguardian.com/technology/2017/nov/21/google-de-rank-russia-today-sputnik-combat-misinformation-alphabet-chief-executive-eric-schmidt

[12] https://perspektive-online.net/2017/08/google-zensiert-gezielt/

[13] https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/de/IP_18_4123

[14] https://www.bmvg.de/de/themen/sicherheitspolitik/hybride-bedrohungen/was-sind-hybride-bedrohungen--13692

[15] https://www.bmvg.de/de/themen/sicherheitspolitik/hybride-bedrohungen/was-sind-hybride-bedrohungen--13692

[16] https://ec.europa.eu/transparency/regdoc/rep/10102/2020/EN/SWD-2020-153-F1-EN-MAIN-PART-1.PDF

[17] https://dip21.bundestag.de/dip21/btd/19/078/1907881.pdf

[18] https://www.heise.de/newsticker/meldung/EU-Kommission-Facebook-Co-wollen-staerker-gegen-Desinformation-vorgehen-4175779.html

[19] https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/de/STATEMENT_19_1379

[20] https://www.merkur.de/welt/coronavirus-deutschland-christian-drosten-hendrik-streeck-lockdown-massnahmen-tote-studie-imperial-college-london-zr-13796261.html

[21] https://www.tagesspiegel.de/politik/fake-news-ueber-das-coronavirus-drosten-und-ueber-100-aerzte-warnen-vor-luegen-pandemie/25810040.html
https://secure.avaaz.org/campaign/de/health_disinfo_letter/

[22] https://www.handelsblatt.com/25672130.html

[23] https://thenewstack.io/deep-learning-ai-tool-identifies-fake-news-with-automated-fact-checking/

[24] https://thenewstack.io/deep-learning-ai-tool-identifies-fake-news-with-automated-fact-checking/
Vergleiche auch: https://fullfact.org/about/automated/

[25] https://misinforeview.hks.harvard.edu/article/how-search-engines-disseminate-information-about-covid-19-and-why-they-should-do-better/

[26] https://ec.europa.eu/germany/news/20200610-plattformen-desinformation_de

[27] https://t3n.de/news/youtube-loescht-viele-videos-nie-1316177/

[28] https://www.cbsnews.com/news/plandemic-coronavirus-conspiracy-video-removed-facebook-youtube/

[29] https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/en/SPEECH_20_1036

[30] https://dip21.bundestag.de/dip21/btd/19/209/1920988.pdf

[31] https://www.rnd.de/politik/fake-news-zu-corona-eu-beklagt-falschnachrichten-in-russischen-medien-MIDFSPO2MFHRHEVK3EUGPLLWLM.html

[32] https://comprop.oii.ox.ac.uk/wp-content/uploads/sites/93/2020/06/Covid-19-Misinfo-Targeting-French-German-and-Spanish-Social-Media-Users-Final.pdf

[33] Voir la réponse du gouvernement fédéral à la demande de La gauche (der Linken) : https://dip21.bundestag.de/dip21/btd/18/064/1806486.pdf.
Vergleiche auch: https://www.europarl.europa.eu/doceo/document/P-8-2017-003405-ASW_EN.html

[34] https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/en/SPEECH_20_1036

[35] https://ec.europa.eu/newsroom/dae/document.cfm?doc_id=69212

[36] https://www.tagesschau.de/ausland/eu-soziale-netzwerke-111.html

[37] https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/de/ip_20_1006

[38] https://ec.europa.eu/commission/presscorner/detail/de/ip_20_1352

[39] https://www.deutschlandfunk.de/start-von-eu-sonderausschuss-kampf-gegen-desinformation.2907.de.html?dram:article_id=484563

[40] https://www.euractiv.de/section/eu-innenpolitik/news/eu-probes-russian-disinformation-efforts-on-navalny-and-belarus/

[41] https://euvsdisinfo.eu/disinformation-cases/?disinfo_keywords%5B%5D=77355&date=&per_page=

[42] https://euvsdisinfo.eu/report/there-are-many-scenarios-for-what-happened-to-alexei-navalny-but-an-assassination-attempt-ordered-by-the-kremlin-is-the-most-improbable/

[43] https://euvsdisinfo.eu/report/eruo-atlantic-interests-to-use-navalnys-case/

[44] https://euvsdisinfo.eu/report/eu-imposed-navalny-related-sanctions-on-russia-despite-lack-of-proof/

[45] https://www.heise.de/newsticker/meldung/Bericht-BND-findet-keine-Beweise-fuer-russische-Fake-News-Kampagnen-3618743.html

[46] https://www.handelsblatt.com/politik/international/online-troll-im-dienste-des-kreml-rund-400-mitarbeiter-hat-die-trollfabrik/11602386-2.html?ticket=ST-3360322-cuTjAq6CFi6LgNAdWBnY-ap1

[47] https://www.zeit.de/digital/internet/2020-09/thomas-rid-us-wahl-russland-einfluss-fake-news/komplettansicht

[48] https://praxistipps.chip.de/instagram-follower-kaufen-geht-das_39047