triarticulation

Institut pour une triarticulation sociale
(contenu spécifique au site français)
Conditions d'utilisation.

Accueil

 

Deutsch EnglishDutchSkandinaviskFrançais ItalianoEspañolPortuguês (Brasileiro)Russisch
Recherche
 contact   BLOG  impressum 

Sur Karl Ballmer

Contribution de J. Mosmann le 1er mars 2013
suite au congrès public "Ballmer" organisé à Berlin par Sinneswerk 22-24/02/2013

Traduction F.G. revue par S. Coiplet - accès à l'original


Cher Reto Savoldelli, 

je comprends très bien la lettre reproduite sur votre site. Je peux être d'accord, avant tout avec l'évaluation psychologique de Ballmer. Par contre, pour ce qui est du point crucial, la question de fond réelle sur les nerfs moteurs, vous faites erreur. C'est une expérience très excitante pour moi: je dois donner tout à fait raison à Ballmer, mais je dois aussi donner raison à ses critiques. Ballmer met l'accent sur un point qui de fait a été négligé (au moins de son milieu anthroposophique à l'époque). Mais dans ce but il occulte cet élément dans lequel Witzenmann se sent chez lui. Mais aussitôt qu’on s’adonne à la question de fond, on peut concilier les deux points de vue. La vraie question est en fait: en quel rapport le métabolisme et le processus nerveux se tiennent l’un à l'autre? Cette question de fait n'a absolument pas été discutée lors du congrès. On s'est contenté de philosopher sur les conséquences prétendues de ce fait. Cela a aussi son comique: dans une certaine mesure se disputent métabolisme (Ballmer) et le processus nerveux (Witzenmann) pour leur droit, alors que Steiner a  la corrélation entre les deux à l'œil. Steiner devrait donc pouvoir réconcilier les deux!

       J'ai encore une fois fait le tour des passages de Steiner sur les nerfs moteurs. Et en effet, c'est vraiment le cas: selon Steiner, il n'y a pas de nerf moteur, même pas sous une quelque forme atténuée. Steiner fait lui-même état des preuves qui sont encore aujourd'hui avancées et dit: justement cela prouve que l’ainsi nommé nerf «moteur» est exclusivement un nerf sensitif. Et il poursuit: seulement si cela est compris, pourra être oeuvré pour la tri-articulation sociale. Je vois exactement cela ainsi. Ballmer a compris qu'ici, et c'est aussi le cas de l'auteur de la lettre, on préfère manquer de clarté pour ne pas avoir à admettre la réalité des faits. Par conséquent Ballmer a dû mettre tout le poids sur le métabolisme, et c'est ce qui lui donne l'air d'être si agressif. Le problème est seulement que du coup, il perd de vue la fonction réelle des nerfs,  indépendemment du fait qu'on leur attribue à tort une «motricité». 
       Je trouverais utile de se tourner d'abord vers Steiner indépendemment de Witzmann ou Ballmer. Selon Steiner, le soi-disant nerf "moteur" et le nerf sensible ne diffèrent que légèrement pour ce qui est de leur apparence, cependant pas dans leur fonction. Ce sont tout deux des nerfs sensitifs. Jamais aucune impulsion ne coule du cerveau dans les organes. Le processus nerveux est toujours déconstructeur, sert exclusivement pour la sensation. La différence externe provient de ce que les uns vont aux organes des sens externes, mais les autres dans le tissu musculaire. Les nerfs qui vont dans les structures musculaires perçoivent là le premier résultat de l'activité de la volonté. Ce que fait la volonté tout d’abord et avant tout, est un fin processus métabolique dans le muscle. Du fait que je perçois ce premier moment par le nerf interne, je peux allumer ma conscience dans le processus de la volonté. Sinon, selon Steiner, le corps serait contrôlé comme une machine par le métabolisme, sans conscience. L'humain est par le nerf soi-disant «moteur» donc juste en mesure de suivre avec la conscience ce que fait sa volonté, mais sa volonté n’"oeuvre" pas par le nerf. Le nerf reflète seulement ce qui se passe de toute façon dans l'organisme. C'est si important pour Steiner, parce qu’il n’y a donc pas de point dans l'espace-temps où représentation et réalité se relient. Je dois chercher le lien ailleurs. Il n'y a rien qui passe du nerf au muscle, mais le point de contact est purement spirituel.

       Vu physiquement spatialement l’humain, est ouvert sur trois côtés. L'identité de ces trois systèmes est purement spirituelle. La chose étrange est que Ballmer semble justement avoir perdu de vue cet aspect - Ballmer devient mécaniste d'une autre manière  que la science d'école. Ballmer croit en effet, du moins c'est ce qu'il me semble, qu'il résulte de ce qui précède un problème temporel, que donc la conscience de soi suit l'action. Ce serait naturellement un non-sens. Des affirmations de Steiner suit quelque chose d’entièrement autre, à savoir: Je me meus à travers le processus métabolique. Le processus nerveux perçoit cela. Mais le processus nerveux perçoit également le monde. Et par le fait que je me tourne vers le monde en pensant, je me saisis moi-même dans ce processus de pensée. Cela signifie : que je me saisis moi-même dans le processus nerveux, lorsque j’oriente le regard vers l'extérieur, et ce moi-même, cela meut mes os par le biais du processus métabolique. Abstraitement parlant les deux sont vrais : la volonté suit la représentation ou la représentation suit la volonté. Mais concrètement parlé cela signifie : je me meus moi-même, à savoir en ce que dans ma volonté je m'oriente selon ma représentation. La représentation ne coule pas dans le corps et «fait» le mouvement, mais inversement : je suis identique avec ce qui déplace mes os, et l'oriente en fonction de ma représentation. Mais dans la représentation j'ai en même temps conscience de l'instance qui saisit le métabolisme, à savoir le «je».  Ce problème temporel qui conduit maints ballmériens dans l'Islam est donc complètement inexistant. Ballmer voit donc juste, mais perd par là-même de vue ce qu'un penseur comme Witzenmann doit considérer comme l'essentiel: le fait que le Je se trouve lui-même dans le processus nerveux. On pourrait donc peut être réconcilier Ballmer et Witzenman par la chose elle-même... 
       La lecture de l'oeuvre de Ballmer nouvellement éditée par Peter Wyssling "Sur les nerfs moteurs» est, en dépit de toutes les dissonances, un vrai plaisir, et je ne peux que la recommander d’urgence. Le congrès lui-même, je l'ai vécu comme extrêmement complexe. Je suis particulièrement reconnaissant à Karl Houber de m’avoir révélé Karl Ballmer et avoir ouvert de nouvelles perspectives sur la question sociale, aussi dans les discussions qui ont suivi. Visible a été toutefois, que la plupart des intervenants étaient à la recherche d'un moyen de briser le format "conférence". J’ai trouvé cela passionnant. La négation permanente de ce qui touche à la représentation et l'accentuation de la volonté m'a semblé bien rendre présente la particularité de Ballmer. Mais je me suis tout autant réjouis que Thomas Brunner et Manfred Kannenberg, et eux seuls, aient le courage de s’en prendre à leur vie de représentation, quel que soit le danger. Du fait que l'on admette la limitation de la pensée abstraite ne peut en effet pas découler qu'il faut se débarrasser de cette pensée, mais exactement le contraire: ici on peut en toute conscience de ses limites aller à la recherche d'une forme expressive. Se réclamer de l’ «indicible», c'est par contre succomber complètement à l'abstraction, car celui qui s'en réclame n'en quitte pas pour autant la pensée, il se prend seulement la chance de la façonner de sorte que cet "indicible" puisse justement percer, luir à travers la pensée et que l'auditeur puisse en faire l'expérience. On aurait donc peut-être pu s'approcher encore plus prêt de Ballmer si justement on n’avait pas suivi sa propre attitude. Cela pourrait être un point de vue pour la discussion à suivre, qui est donc maintenant ouverte par le présent congrès! 

Cordialement,
 Johannes Mosmann 
http://www.dreigliederung.de