Une chose au préalable : je viens d'un pays où le
nationalisme, loin d'être mal vu, représente encore
une évidence politique. Ce qui m'a attiré en Allemagne
c'est qu'ici la lutte contre le nationalisme ne me
semble pas perdue d'avance.
J'ai tout d'abord essayé de l'expliquer par le fait
que maints Allemands ont honte de la période du
national-socialisme. Il n’est pas exclu que cela joue
un rôle central. Mais lors de mes recherches sur la
littérature allemande antérieure à cette période, je
suis tombé sur des auteurs qui déjà s'opposaient
strictement à tout nationalisme. Rudolf Steiner
en faisait partie.
Dans l'actuelle discussion il est avant tout débattu
si Steiner était raciste ou non. Le seul aspect
positif de ce débat est la conviction largement
répandue que le racisme doit être surmonté. Par
contre, pour ce qui est de la connaissance des œuvres
de Rudolf Steiner, ses adversaires - et parfois aussi
ses partisans - laissent à désirer sur maintes choses.
Je me suis consciemment décidé à ne pas traiter
directement cette accusation de racisme ou
d'antisémitisme. À mon avis, cette accusation
repose sur une série de malentendus. Et ce que je vais
élaborer en rapport au nationalisme est également
applicable au racisme. Il a été décisif
pour moi que maints auteurs, qui mettent en
garde contre le soi-disant racisme de Steiner,
seraient selon lui clairement à compter au camp
nationaliste. Et cela vaut pas seulement pour ceux qui
croient voir une preuve d'antisémitisme dans sa
critique concernant la fondation d'un État juif.
Steiner s'est souvent exprimé sur le nationalisme
[ 1 ]. Il se devait de le faire,
ne serait-ce qu’afin de ne pas être compté lui-même
parmi les nationalistes. Qui voit une réalité dans les
âmes de peuple peut facilement être mal compris. C’est
pourquoi Steiner insiste toujours de nouveau sur le
fait qu'il ne place aucune âme de peuple par-dessus
d'autres âmes de peuple, et avant tout qu'il
n'identifie pas l'individu avec son âme de peuple. À
cela se rajoute le fait qu’il différencie
strictement entre les concepts de peuple et de
nation.
Maint opposant au nationalisme ne se contentera pas
de cela. Il considérera malgré tout Steiner comme
nationaliste pour la simple raison que celui-ci
tient les âmes de peuple pour une réalité. On peut y
voir une exagération. Mais il y a toutes les raisons
de prendre au sérieux de tels adversaires. J'ai essayé
de le faire en partant tout d’abord de leur définition
du nationalisme. J'ai dans un premier temps renoncé à
la critiquer. J'ai préféré montrer après coup les
dangers d'une telle définition en la mettant à
l'épreuve d'autres définitions.
Je me suis donc imposé de prendre aussi en compte une
définition du nationalisme qui va jusqu'à adjuger
Steiner aux nationalistes. Et peut-être pas seulement
Steiner, mais aussi maints lecteurs. Il n’est pas dans
mon intention d’offenser Steiner ou le lecteur.
Peut-être celui-ci me croira-t-il, si j'avoue que
moi-même devrais, selon cette définition, être compté
parmi les nationalistes. Il ne s’agit pas pour moi
d'admettre une quelconque faute, mais de ne pas
rejeter une définition avant d'avoir vérifié ce
qu'elle nous permet d'apprendre sur le nationalisme.
Cela me semble plus important que de ménager quelqu'un
par principe.
Dans ma recherche d'une définition du nationalisme,
j’en suis finalement venu à distinguer entre trois
définitions possibles du nationalisme (point 2). Il en
résulte l'articulation grossière de ce travail.
Le nationalisme peut consister dans :
1 - la distinction entre les nations
(points 3 et 4)
ou
2 - le mépris d'autres nations
(point 5) ou
3 - l'identification avec une nation
(points 6 et 7)
Ce qui m’a fait donner une telle importance à
la première définition, c’est qu'elle mène à une
question centrale, à savoir : qu'est-ce qu'une
nation ? Ici Rudolf Steiner est bien plus
pointu que des auteurs comme Ernest Renan et
Friedrich Meinecke.
La deuxième définition aboutit sur une autre question
: le nationalisme est-il compatible avec la paix
? La présomption conduit facilement à des
conflits internationaux.
Face à la troisième définition, c’est encore une autre
question qui se pose : le nationalisme
est-il compatible avec la liberté ? C'est ce
dernier aspect qui est décisif pour pouvoir
juger des déclarations partiellement critiques de
Rudolf Steiner sur certains peuples et races. Elles
sont souvent prises personnellement, bien qu'elles ne
s’appliquent pas à l’individu, mais à ce qu'il
pourrait advenir de lui s'il manquait justement
d'individualité, à savoir une caricature.
Ce sont ces trois questions, et non les définitions,
qui sont à l’origine de cette étude sur le
nationalisme.
Ce que d'autres auteurs ont dit au sujet de ces trois
questions est soit précédé des déclarations de Steiner
(points 3 et 6) ou directement confronté (point 5).
Les auteurs les plus caractéristiques sont les plus
anciens. J'ai naturellement pris aussi en compte les
nouveaux chercheurs sur le nationalisme.
Dans l'articulation plus fine en sous rubriques, je me
suis laissé inspirer par une série de conférences de
Steiner sur l'impérialisme. Il distingue là entre un
impérialisme spirituel-culturel, un impérialisme
politique et un impérialisme économique. J'ai tout
simplement transféré cette distinction au
nationalisme. Je ne suis pas sûr que Steiner s’en
serait réjoui. J'aborde les raisons de ce doute à
l'endroit approprié. Cette distinction a cependant
l'avantage de renvoyer au principe central de sa
science sociale.
À partir de 1917, Steiner s'est engagé pour une tri-articulation
sociale. Elle consiste en ce que l'économie,
l'état et la culture prennent eux-mêmes leur vie en
mains et développent leur propre logique. Quelle est
la répercussion d’une telle indépendance des trois
fonctions sociales sur le nationalisme ? Il ne
s'agit en effet pas seulement d’analyser et de
catégoriser le nationalisme, mais aussi de pouvoir
l'éradiquer. Et il apparaîtra que cela n'a jamais été
tenté d’une manière aussi radicale que par l'approche
d'une tri-articulation sociale.
Cette description systématique est suivie d’une brève
biographie de Steiner (point 8). Seul ce qui a à voir
avec la question du nationalisme sera pris en compte.
Cette fois, je n'aborde pas seulement la
tri-articulation sociale, mais aussi l'anthroposophie
de Steiner. C'est le chemin qu'a pris Steiner lui-même
pour en arriver à son jugement sur le nationalisme. Et
c'est l'occasion pour moi d'expliquer pourquoi j'ai
délibérément choisi de me passer dans un premier temps
de toute référence à l'anthroposophie. J'ai tenu à
suivre le seul chemin de la tri-articulation. Mais une
chose se laisse dire préalablement : les chemins
peuvent encore être si différents, ils finissent par
se rejoindre.
Pour finir, une petite remarque sur mon style
d'écriture: j'évite d'employer un style indirect
même quand je rapporte l'opinion d'autres auteurs. .
Je préfère les laisser parler sous la forme de
discours direct et compte sur le lecteur pour ne
pas me confondre avec ces auteurs.
( 1 ) - Une
compilation chronologique d'une partie de ces
déclarations peut être trouvée dans Heyer (1993/2),
pp. 17-146. Malgré sa bonne centaine de pages, cette
compilation est loin d'être exhaustive. Pour les notes
de bas de page, voir l'introduction à la bibliographie
à la page 68 de ce document.
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Eines vorweg: Ich komme aus einem Land, wo der
Nationalismus keineswegs verpönt ist, sondern noch
eine politische Selbstverständlichkeit darstellt.
Deutschland hat mich gerade deswegen angezogen, weil
hier der Kampf gegen den Nationalismus nicht von
vornherein verloren scheint.
Dies habe ich anfangs dadurch versucht zu erklären,
daß manche Deutschen sich über die Zeit des
Nationalsozialismus schämen. Das mag in der Tat eine
zentrale Rolle spielen. Bei meiner Beschäftigung mit
der früheren deutschen Literatur stieß ich aber auf
Autoren, die jeden Nationalismus scharf ablehnten.
Dazu gehörte Rudolf Steiner.
In der heutigen Diskussion wird vor allem gestritten,
ob Steiner Rassist war oder nicht. Das Beste an dieser
Diskussion ist wohl die weitverbreitete Überzeugung,
daß der Rassismus überwunden werden muß. Bei der
Kenntnis des Werkes Rudolf Steiners lassen dagegen
seine Gegner – und gelegentlich auch seine Befürworter
– manches zu wünschen übrig.
Ich habe mich bewußt entschieden, nicht direkt auf
diesen Rassismus- beziehungsweise
Antisemitismusvorwurf einzugehen. Er beruht meiner
Meinung nach auf eine Reihe von Mißverständnissen. Und
was ich bezüglich des Nationalismus ausarbeiten werde,
gilt genauso für den Rassismus. Entscheidend war für
mich, daß manche Autoren, die vor dem vermeintlichen
Rassismus bei Steiner warnen, von ihm klar dem
nationalistischen Lager zugerechnet worden wären. Und
dies gilt nicht nur für Juden, die mit seiner Kritik
an der Gründung eines jüdischen Staates nichts
anfangen können.
Über den Nationalismus hat sich Steiner oft
ausgesprochen [ 1
]. Das mußte er schon allein deswegen, um nicht
selbst zu den Nationalisten gerechnet zu werden. Wer
in den Volksseelen eine Wirklichkeit sieht, kann
leicht mißverstanden werden. Steiner betont daher
immer wieder, daß er keine Volksseele über andere
Volksseelen stellt, und vor allem daß er das
Individuum nicht mit seiner Volksseele identifiziert.
Er unterscheidet noch dazu streng zwischen den
Begriffen Volk und Nation.
Mancher Gegner des Nationalismus wird sich damit nicht
zufrieden geben. Er wird Steiner trotzdem zu den
Nationalisten rechnen, weil dieser einfach Volksseelen
für eine Realität hält. Das mag eine Übertreibung
sein. Es gibt aber allen Grund solche Gegner ernst zu
nehmen. Das habe ich versucht, indem ich ihre
Definition des Nationalismus als erste berücksichtigt
habe. Auf abfällige Kommentare habe ich zunächst
verzichtet. Die Gefahren einer solchen Definition habe
ich lieber im nachhinein anhand weiterer Definitionen
gezeigt.
Ich habe es also in Kauf genommen, auch eine
Definition des Nationalismus zu nehmen, die Steiner
den Nationalisten zuschlägt. Und vielleicht nicht nur
Steiner, sondern auch manchen Leser. Damit will ich
aber weder Steiner noch den Leser beleidigen.
Vielleicht glaubt er es mir, wenn ich gestehe, daß ich
selbst nach dieser Definition auch zu den
Nationalisten gerechnet werden muß. Sich selbst
zerreißen will doch keiner. An dieser Definition läßt
sich aber viel über den Nationalismus lernen. Dies
halte ich für wichtiger als irgend jemanden aus
Prinzip zu schonen.
Auf meiner Suche nach einer Definition des
Nationalismus bin ich letztendlich zu drei
Definitionen des Nationalismus gekommen (Punkt 2).
Daraus ergibt sich die grobe Gliederung dieser Arbeit.
Nationalismus ist demnach die Unterscheidung
zwischen Nationen (Punkt 3 und 4) oder die Verachtung
anderer Nationen (Punkt 5) oder die Identifikation
mit einer Nation (Punkt 6 und 7).
Die erste Definition ist mir deswegen so wichtig
gewesen, weil sie zu einer zentralen Frage führt,
nämlich: Was ist eine Nation? Hier ist
Rudolf Steiner um einiges schärfer als Autoren wie
Ernest Renan und Friedrich Meinecke.
Aus der zweiten Definition ergibt sich eine weitere
Frage: Ist der Nationalismus mit dem Frieden
vereinbar? Überhebung führt nämlich leicht zu
internationalen Konflikten.
Bei der dritten Definition stellt sich zuletzt die
Frage: Ist der Nationalismus mit der Freiheit
vereinbar? Gerade dieser Aspekt ist
entscheidend für eine Beurteilung der zum Teil
kritischen Aussagen Rudolf Steiners zu bestimmten
Völkern und Rassen. Sie werden oft persönlich
genommen, obwohl sie sich gerade nicht auf das
einzelne Individuum beziehen, sondern auf dasjenige,
was aus ihm werden könnte, wenn ihn an Individualität
fehlt, nämlich eine Karikatur.
Diese drei Fragen und nicht die Definitionen standen
für mich am Anfang aller Überlegungen.
Was andere Autoren zu diesen drei Fragen gesagt haben,
wird den Aussagen Steiners entweder vorangestellt
(Punkte 3 und 6) oder direkt gegenübergestellt (Punkt
5). Am Charakteristischsten sind dabei die älteren
Autoren. Die neueren Nationalismus-Forscher habe ich
natürlich auch berücksichtigt.
Bei der feineren Gliederung in Unterpunkten habe ich
mich durch eine Vortragsreihe Steiners über den
Imperialismus inspirieren lassen. Er unterscheidet
dort zwischen einem geistig-kulturellen Imperialismus,
einem politischen Imperialismus und einem
wirtschaftlichen Imperialismus. Diese Unterscheidung
habe ich hier einfach auf den Nationalismus
übertragen. Ob Steiner davon begeistert gewesen wäre,
bin ich nicht sicher. Warum erkläre ich dann an der
entsprechenden Stelle. Diese Unterscheidung hat aber
den Vorteil, auf das zentrale Prinzip seiner
Sozialwissenschaft hinzuweisen.
Ab 1917 hat sich Steiner nämlich für eine soziale
Dreigliederung eingesetzt. Demnach sollen
Wirtschaft, Staat und Kultur ihr Leben selbst in die
Hand nehmen und ihre eigene Logik entwickeln. Meine
Frage ist gewesen, wie die Verselbständigung dieser
drei sozialen Funktionen sich auf den Nationalismus
auswirkt. Es geht eben nicht nur darum, den
Nationalismus einzuordnen sondern auch beseitigen zu
können. Und es wurde niemals so konsequent versucht,
als von dem Ansatz einer sozialen Dreigliederung.
Nach dieser systematischen Darstellung kommt eine
kurze Biographie Steiners (Punkt 8). Es wird nur das
berücksichtigt, was mit dem Thema des Nationalismus zu
tun hat. Diesmal gehe ich nicht nur auf die soziale
Dreigliederung, sondern auch auf die Anthroposophie
Steiners ein. Steiner ist eben über diesen Weg zu
seiner Beurteilung des Nationalismus gekommen. Hier
erkläre ich auch, warum ich diesen zweiten Weg in
dieser Arbeit nicht gegangen bin. Eines läßt sich aber
vorweg sagen: Die Wege mögen noch so unterschiedlich
sein, das Ergebnis bleibt dasselbe.
Zuletzt eine kleine Bemerkung zu meinem Schreibstil,
der bewußt unkorrekt ist. Den Konjunktiv vermeide ich
auch dann, wenn ich die Meinung anderer Autoren
referiere. Ich ziehe es vor, sie in der Form der
direkten Rede selbst sprechen zu lassen. Danke mich
trotzdem nicht mit diesen Autoren zu verwechseln.
( 1 ) - Eine
chronologische Zusammenstellung eines Teils dieser
Aussagen findet sich bei Heyer (1993/2), S.17-146.
Trotz ihrer gut hundert Seiten ist aber diese
Zusammenstellung bei weitem nicht erschöpfend. Zur
Gestaltung der Fußnoten siehe die Einleitung des
Literaturverzeichnisses auf S.68 dieser Arbeit.
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