1920 - L'année de Rudolf Steiner

Institut pour une triarticulation sociale
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1919 < .......1920....... > 1921

Replacer dans son contexte

 L'année 1920 porte sa signature particulière dans la vie et l'œuvre de Rudolf Steiner à travers l'inauguration d'un nouveau système d'enseignement supérieur, l'ouverture de l'« Université libre de Science de l'Esprit » au Goetheanum. Depuis son entrée à l'Université technique de Vienne en 1879, Rudolf Steiner s'était débattu intérieurement avec le problème que la fragmentation de l'ancienne Universitas en domaines spécialisés et largement rendus étrangers les uns aux autres avait conduit à la perte d'une vision du monde globale par les humains. Depuis le tournant du siècle, maintenant depuis deux décennies, il avait concentré son ouvrage, à rendre à nouveau accessible à l'humanité la conscience de la réalité du spirituel dans la nature qui s'était perdue dans la science du siècle dernier. Trois étapes préliminaires en particulier avaient servi ce but : l'humain, en tant que création de l'esprit et de la nature, en tant que formation organique la plus élevée sur terre, dans laquelle les deux mondes se rencontrent en conscience, devait être remis au centre de la contemplation ; le chemin de la connaissance qui conduit le spirituel dans l'être humain vers le spirituel dans l'univers, l'anthroposophie, était maintenant là. La plénitude/globalité ainsi retrouvée, un désir/une nostalgie comblée des Goetheanistes, conduit à nouveau à un synopsis/une vue d’ensemble, à une nouvelle synthèse de toutes les sciences. Cette substance de connaissance n'était pas le résultat de théories et d'hypothèses qui avaient conduit la pensée matérialiste dans une impasse, mais a été acquise à partir d'une phénoménologie concrète de la nature et de l'humain à la fois sensorielle et suprasensible. La reconnaissance par l’examen des deux types de phénomènes et en pratiquant l'expérimentation et la promotion des lois naturelles et spirituelles de l’évolution a été systématiquement réalisée. L'art, au sens d’une « manifestation des lois secrètes de la nature » de Goethe, avait apporté sa contribution créatrice. La nostalgie d'être guidé par le monde des êtres divins-spirituels et des pouvoirs créatifs, exprimée dans la vie religieuse, a été réalisé par une ouverture des portes, par un lien de la conscience de nouveau gagné au monde spirituel. La science, l'art et la religion, séparés pendant de longues époques, allaient de nouveau le même chemin, favorisant conjointement l'évolution spirituelle de l'humain. L’esprit-connaissance comme base des actes » a été donnée aux humains. Les générations actuelles et futures devaient maintenant être formées à suivre cette voie de manière systématique et ciblée. Les cours universitaires des années à venir, les débuts d'une nouvelle Universitas, devaient être les premiers pas de cette éducation de l'humain, qui était disposée pour une large vue. C'est pourquoi l'ouverture des cours de l’université, qui a eu lieu pour la première fois dans la grande salle de la coupole du Goetheanum à la Michaeli1920, était d'une importance qui dépassait ce qui était réalisable dans un premier moment[391] ; la substance et la force pour la reconstruction de l'Universitas avaient été données par un être humain depuis le début du siècle, maintenant beaucoup devaient s’essayer à son extension.

Avant que ce pas supplémentaire vers la Michaeli de l'année soit franchi, certaines étapes préliminaires ont dû être franchies au cours du premier semestre de l'année. Nous avions décrit qu'à la fin de 1919, une série de conférences en sciences de la nature sur la « Théorie de la lumière » pour des éducateurs avait été commencée, ainsi qu'un cours de linguistique. Les deux cours ont été poursuivis au début de 1920 à Stuttgart jusqu'au 3 janvier. Rudolf Steiner est retourné à Dornach le 4 janvier. Trois conférences à Bâle sur « Les voies et objectifs de la science de l'esprit (anthroposophie) » ont orienté le public sur ce que l'on recherchait, et les conférences à Dornach ont poursuivi les réflexions historiques et culturelles entamées les années précédentes jusqu'aux temps modernes. Le 23 janvier, Rudolf Steiner a donné la première d'une série de conférences illustrées de diapositives dans lesquelles il a illustré les intentions artistiques de la construction (ga289), l'application du principe de la métamorphose dans le monde sculptural et pictural des formes des colonnes, architraves, chapiteaux et dômes du Goetheanum avec un matériel pictural instructif. Une conférence du 12 février à Saint-Gall a porté sur « Les forces éducatives dans la communauté du peuple » - et les conférences suivantes à Dornach parmi les collaborateurs déjà plus intensivement formés allèrent sur les dangers auxquels la situation actuelle faisait face en raison de la propagation des tendances des puissances spirituellement hostiles, par exemple le développement historique de l'impérialisme. Sur le fond de l'histoire, il a souligné les trois phases du développement de l'impérialisme au cours des derniers millénaires et a souligné avec beaucoup d'emphase les dangers et les obligations des représentants actuels de ces courants.

Après que la fin de la guerre remonte à plus d'un an et que la possibilité de voyager librement pour tous les pays eut été rétablie, quelques amis anglais étaient également arrivés au tournant de l'année 1919/20 pour assister aux conférences ; formés par les dernières décennies aux nouveaux cours de pensée de Rudolf Steiner, ils considéraient la situation actuelle, comme tous les élèves de Rudolf Steiner, avec une vision plus profonde et des préoccupations plus graves que la plupart de ceux qui vivaient dans le même environnement, reconnaissant que les solutions choisies dans cet environnement ne répondaient en rien aux problèmes actuels et aux tâches sociales et spirituelles du temps. Dans chaque pays du monde vivaient des pionniers de la connaissance spirituelle qui, contrairement à trop de ceux qui se laissaient tromper par les solutions apparentes du moment, affrontaient les événements extérieurs avec le plus grand sérieux et une préoccupation clairement prévoyante, pour qui la question sociale non résolue et le maintien sans esprit de l’ancien brûlait sur l’âme. Ainsi, par exemple, en dehors des mouvements pour la « tri-articulation de l'organisme social » qui avaient vu le jour en Allemagne, en Autriche et en Suisse, au tournant de l'année 1919/20, un mouvement pour l'introduction de ces idées avait également vu le jour en Hollande, et les humains de nombreux pays du monde qui étaient intéressées et voulaient travailler pour un tel assainissement des conditions du temps étaient venus chez Rudolf Steiner à Dornach pour lui demander conseil et aide dans leur dur travail. Il a toujours été convaincu que de telles idées nouvelles, qui englobent l'ensemble de la vie sociale, ne pourraient être effectivement introduites dans la pratique de la coexistence entre les peuples et les nations que si la compréhension de ces idées et leur application devenait mondiale avec le temps, touchant toute la terre. Ainsi, outre les membres d'environ 17 pays qui ont toujours travaillé à Dornach et avec les visiteurs des pays d'Europe centrale, des intéressés néerlandais et anglais étaient également venus s'informer sur les nouvelles pensées. Rudolf Steiner a donc dit à ses amis anglais, qui voulaient s’investir pour une meilleure organisation du temps à venir, au début de ces conférences : « J’aimerai que nos amis anglais, qui retourneront maintenant bientôt dans leur pays, puissent emmener le plus possible d’ici avec eux. Et c'est pourquoi j'organise ces conférences de telle sorte que l'une ou l'autre puisse servir à soutenir l'efficacité qui est nécessaire ». Il leur a maintenant donné une image de l'évolution historique, qui traduisait les tendances plus profondes, les dangers menaçants, les solutions spirituelles, plus saines. Car presque aucun humain, comme lui, n'avait à l'époque l'occasion de parler sur de nouvelles pensées et de nouvelles impulsions de par la terre entière, œuvrant dans le monde entier.

Dans d'autres contextes, lors d'une conférence spéciale le 1er février (ga 196 – 9), Rudolf Steiner, pour clarifier les étapes de l’évolution spirituelle et historique du passé, avait rappelé les sources d'inspiration de quatre grandes personnalités du passé : Shakespeare, Bacon, Jacobus Baldus et Jakob Böhme. Il a dit dans l'introduction :

« On a généralement la représentation qu'une personnalité dans l'histoire, qu'il s'agisse d'une personnalité artistique, d'un homme d'État, d'une personnalité religieuse ou autre, œuvre à travers ce qui se répand sur le chemin des impulsions conscientes, qu'une telle personnalité œuvre seulement sur ce chemin. Et on regarde alors les questions qui y sont liées, de sorte qu'on regarde : qu'est-ce qu'une telle personnalité a fait ? Qu'est-ce qu'elle a exprimée ? Comment ça s'est retrouvé parmi les humains ? Et du genre.

 La chose ne se comporte tout de suite pas aussi simplement dans les cas les plus significatifs du devenir historique, mais ce qui est efficace dans l’évolution de l'humanité dépend des forces spirituelles motrices qui se tiennent derrière le devenir historique, et des personnalités sont, pour ainsi dire, seulement les moyens et les voies par lesquels certaines forces et puissances spirituelles motrices du monde spirituel œuvrent dans notre devenir historique sur terre. [393]

 Cela ne contredit pas le fait qu’aussi beauvoup de l'individualité, de la subjectivité de telles personnalités dirigeantes œuvrait dans des cercles plus larges. C’est donc évident. Mais on reçoit en premier le bon concept de l'histoire quand on est au clair sur ce que lorsqu'un soi-disant grand homme prononce une chose ou une autre ici ou là, les grandes forces spirituelles de l’évolution humaine parlent à travers lui, et il n'est, pour ainsi dire, que le symptôme que certaines forces motrices sont là. Il est la porte par laquelle ces forces parlent dans le devenir historique. »

 De telles influences peuvent avoir des effets très différents en mal ou en bien, retarder ou faire avancer, émousser ou promouvoir la vie de l’esprit de l'humain dans une époque, ou dans l'une ou l'autre personnalité qui la représente. - Il y a maintenant, comme l'a expliqué Rudolf Steiner, des époques de l'histoire où l’évolution fait un bond en avant en même temps. Aux XVe et XVIe siècles, par exemple, l'humanité a reçu une telle impulsion de développement des mondes spirituels, et cette impulsion a également trouvé ses représentants à cette époque. C'est pourquoi la même source d'inspiration se retrouve chez quatre humains qui reçoivent cette impulsion de la même manière, mais qui la forme différemment par les différentes sphères culturelles et géographiques dans lesquelles elles vivent :

"De la même source dont provient l’inspiration de Bacon et Shakespeare, entièrement de la même source provient pour l'Europe centrale, et même des même personnalités-initiées, les courants spirituels de Jakob Böhme et de l'Allemand du Sud Jakob Baldus. Et bien plus qu'on le croit, vit dans la vie de l’esprit centre européenne, ce qui vient/souche de Jakob Böhme – à nouveau une telle personnalité qui a seulement formulé ce qui a vécu et œuvré dans les cercles les plus larges, même si cela ne s'est pas passé avec les paroles/les mots de Jakob Böhme. —

 On doit seulement être clair avec soi-même qu'un bon morceau de la doctrine/l’enseignement de la métamorphose de Goethe provient de Jakob Böhme, qu'un bon morceau de ce qui est dans l'ensemble organique de Goethe est arrivé de Jakob Böhme à Goethe par certains détours, ce qu'on peut facilement prouver. Et même si Jakob Baldus a vécu dans la solitaire Ingoldstadt, c'est justement tout de suite une telle personnalité, qui certes n'a pas œuvré sur beaucoup de contemporains, mais qui a exprimé de façon caractéristique ce qui était pensé et ressenti dans les milieux les plus larges de cette nouvelle ère montante...

Et c'est ainsi que les impulsions qui sont une fois là, œuvrent partout. Les impulsions sont les mêmes, mais elles œuvrent différenciées, spécifiées d’après les différents domaines. »

Il montra maintenant comment ces courants se développent différemment à partir de la même source d'inspiration, comment le baconisme conduit finalement à la science expérimentale matérialiste et à la morale d'utilité, mais la continuation du monde de pensée de Jakob Boehme dans l’organique de Goethe, qui fut pourtant alors oublié par les humains et inondé par le courant de pensée du baconisme. Ainsi, ces courants provenant à l'origine d'une même source trouvent leurs différents lits fluviaux, leur différenciation, leur séparation et leur refonte, favorisant ou inhibant les courants. En conclusion, il a dit : [394]

« Ces questions semblent vivre dans des domaines très, très au-dessus de la vie quotidienne, mais elles ne le sont pas. Les questions que j'ai abordées sont celles qui sous-tendent aujourd'hui les questions les plus importantes qui façonnent le monde, et personne ne pourra répondre à la grande question : à quoi ressemblent l'Est et l'Ouest, l'Europe, l'Asie et l'Amérique ? qui ne veuille pas revenir sur ces choses. Car ce que nous vivons aujourd'hui est finalement la conséquence de ce qui s'est passé dans les âmes humaines au cours des siècles.

 C'est seulement une commodité humaine de pensée de ne pas vouloir revenir jusqu’à ces choses. On peut donc faire l'expérience de ce que j'aimerais appeler ce terrible chagrin d'amour qui se produit lorsqu'on entend aujourd'hui des humains parler sur le grand malheur de l'époque, sur d'autres configurations de la vie politique, économique ou autre, sur les affaires de l'Asie, de l'Europe et de l'Amérique, comme des aveugles de la couleur, car ils ne veulent pas aller dans ce qui est en réalité au fond des grandes questions, qui repose à la base comme ce qui pulse intérieurement. »

 Dans d'autres contextes également, il a fait remarquer, tout comme Goethe, qu'il ne s'encapsule pas, comme d'autres, dans la sphère différenciée de son environnement local, qui lui a d'abord été donnée par le destin, où le danger d'une partialité menace, mais comment Goethe s'ouvre à nouveau au monde entier, à tous les courants de cette ancienne source d'inspiration, au courant d'Europe centrale du monde de la pensée de Jakob Boehme, mais aussi plus intensément, comme il l'a souvent exprimé lui-même avec reconnaissance, au monde spirituel et artistique de Shakespeare ou aux conquêtes scientifiques d'un Linné, etc... Ainsi les grands de la terre sont les représentants des mêmes sources d'inspiration, de leur différenciation et de leur réunification, créateurs d'une nouvelle synthèse de toutes ces forces spirituelles et terrestres.

Après une telle présentation de la situation spirituelle globale, concentrée sur l'essentiel et en même temps mondiale, particulièrement nécessaire en cette période de prolifération d'antagonismes hostiles et permettant une nouvelle synthèse de l'organisme de l'humanité d’ensemble, Rudolf Steiner s'est à nouveau rendu, début mars, de Dornach à Stuttgart afin de promouvoir le progrès des efforts scientifiques, pédagogiques et sociaux des collaborateurs.

 Il a commencé cette activité avec la tenue du deuxième cours de science de la nature du 1er au 14 mars, qui, en complément de l’enseignement traité précédemment sur la lumière, était maintenant consacré à l'« enseignement de la chaleur » (ga 321). L'abondance de nouveaux aspects scientifiques, qui placent l'être-chaleur dans les grands pendants évolutifs du cosmos, qui les ont ensuite suivis dans les phénomènes de la vie, les processus concrets dans le changement des états d'agrégation et dans les formules mathématiques, ne peuvent être reproduits ici. Comme détail caractéristique, soit par ex. mentionné son indication à la nécessité d'explorer tous ces processus, surtout dans leurs métamorphoses dans le rythme du cours de la journée et de l'année, de les sortir du danger de l'abstraction et de la spécialisation et de les comprendre de l'organisme entier de la terre. Ainsi, il a dit par exemple : [395]

« Voyez-vous, c'est le genre de choses pour lesquelles nous aurons à créer nos instituts de recherche. Nous devrons inventer des instruments à nos thermomètres et hygromètres habituels, etc. par lesquels nous pourrons montrer que certains processus qui se déroulent à l'intérieur de la terre, notamment  à l'intérieur du terrestre de forme liquide et gazeuse, ont lieu la nuit différemment du jour. »

Dans les années à venir, ces indications ont ensuite été élaborées expérimentalement dans l'institut de recherche et le laboratoire du Goetheanum à Dornach jusque dans de nombreux phénomènes des rythmes du jour et de l'année, des phénomènes de la vie, jusqu'aux plus fines influences dans les processus de cristallisation, etc. et en particulier les plus précieux services rendus aux travaux agricoles qui ont été inaugurés ultérieurement. Nous y reviendrons.

Lors de la tenue de ce cours sur l'enseignement de la chaleur et des nombreuses conférences avec le corps enseignant de l'école Waldorf, qui grandissait déjà vigoureusement, Rudolf Steiner a également été invité à participer en ces journées aux discussions de certains spécialistes de l’industrie et de l’économie, qui envisageaient appliquer les nouvelles idées sociales également dans une fondation économique, dans laquelle des entreprises industrielles, agricoles et culturelles devaient travailler ensemble. Cette entreprise d’ensemble de ceux, concernés, qui faisaient l’économie reçut le nom de « Le jour qui vient » et entra dans sa phase de fondation le 13 mars 1920. Quelques grandes industries de Stuttgart et quelques biens agricoles environnants ont été regroupés de cette façon. Ce plan de ceux qui, là, faisaient l’économie, a sans doute été établi trop tôt, les conditions nécessaires dans l'environnement n'étaient pas encore suffisamment mûres, car quelque chose comme cela ne pouvait s'affirmer que si cela avait pu être intégré dans une structure similaire de l'environnement. Mais pour cela, dans les cercles de ceux qui faisaient anxieusement et laborieusement l’économie dans le chaos de l'époque, la compréhension et le courage faisaient encore défaut. C’est pourquoi un tel plan ne pouvait donc pas encore se développer organiquement à l'époque, ce sur quoi Rudolf Steiner devait attirer l'attention des économistes concernés après l'expiration de la première période d'essai. Dans les années qui suivirent, lui-même dut concentrer ses énergies en particulier sur les efforts culturels qui grandirent dans une sphère de développement plus libre et qui, comme l'école Waldorf et la fondation parallèle d'écoles, se développèrent avec vigueur et profit sur un terrain spirituel plus sain.

En ce printemps, Rudolf Steiner, à côté des conférences d'enseignants au cours desquelles les expériences éducatives ont été discutées avec lui en questions-réponses et dans lesquelles il a donné de nouvelles directives pour la conception du programme général, les différents domaines d'enseignement, le traitement des enfants difficiles à éduquer, le choix des supports pédagogiques, des livres, des instruments, des activités de loisirs, etc…, a maintenant organisé aussi des « soirées des parents », au cours desquelles, dans le cadre de discussions animées entre lui, les enseignants et les parents, a été visé un travail en commun intensif entre l'école et la maison des parents, une entièreté organique de tous ceux impliqués dans l'éducation.

[396]

L'expansion rapide de l'Association scolaire Waldorf, qui comprenait non seulement les parents des élèves de l’école, mais aussi des amis et des personnes intéressées par la nouvelle pédagogie, a prouvé qu’une grande et active serviabilité était disponible dans de larges cercles. Il s'agissait non seulement de trouver les moyens de poursuivre l'école et les parrainages, etc. pour les enfants non pourvus, mais aussi, à travers toutes ces branches d'activité, d'amener d'autres cercles dans le pays et à l'étranger à une compréhension des valeurs sociales générales de cette pédagogie.

Après ces semaines de travail à Stuttgart, il est retourné à Dornach à la mi-mars pour plusieurs mois. Il a d'abord donné trois conférences à Zurich du 17 au 19 mars sur « Esprit et non-esprit », sur "Les forces spirituelles dans l'art de l'éducation et dans la vie de peuple » et a parlé de la « Tri-articulation et de la situation mondiale présente » lors de la soirée de discussion de la « Société de statistiques et d’économie de peuple du Canton de Zurich » (ga 334).

Une nouvelle phase de développement de grande envergure a commencé à Dornach, où il a inauguré le 21 mars le premier « Cours pour médecins et étudiants en médecine » d'une série de 20 conférences. C'est là qu'il a jeté les bases du mouvement médical, qui s'est construit sur les connaissances de sciences de l’esprit et s'est répandu dans le monde entier dans les années à venir grâce à la formation de médecins, à la création de cliniques et à une pratique médicale plus déployée de nombreux médecins. Depuis lors, ce cours a été publié sous le titre « Geisteswissenschaft und Medizin » (Science de l'esprit et médecine), de sorte que nous n'avons pas besoin d'entrer ici dans le détail du contenu de ces conférences médicales et pouvons nous référer à la littérature correspondante (ga 312)*. - Immédiatement après le tournant du siècle, Rudolf Steiner s'était déjà exprimé pour la première fois sur des questions médicales dans un essai du "Wiener Klinische Rundschau" (année 1901) sur « Goethe et la médecine », comme nous l'avons mentionné à la page 28. Lorsqu’alors , par la connaissance du médecin de Kassel, le Dr Ludwig Nolls, en plus des aspects goetheanistiques qui avaient constitué le point de départ, des problèmes de la pratique médicale vinrent aussi à lui avec des questions du Dr Nolls, la situation concrète de la destinée a été donnée, de traiter maintenant des questions particulières de la médecine à partir de la connaissance spirituelle-scientifique, et Rudolf Steiner l'a fait, comme nous l'avons décrit page 96, pour la première fois avec une conférence du 22 octobre 1906 sur « Questions de nutrition et méthodes thérapeutiques » (ga 096). Depuis ces premières suggestions en 1906, de plus en plus de médecins se sont penchés sur ces idées de base et ont appliqué avec succès les directives de Rudolf Steiner dans la pratique, de sorte que maintenant, exactement deux septaines après cette première impulsion, le premier cours médical pouvait avoir lieu à Dornach en 1920.

* Rudolf Steiner: „Geisteswissenschaft und Medizin"(Science de l’esprit et médecine) ; „Grundlegendes für eine Erweiterung der Heilkunst"(Bases pour un élargissement de l’art de guérir); „Was kann die Heilkunst durch eine geisteswissenschaftliche Betrachtung gewinnen?" (Que peut gagner l’art de guérir par une observation se science de l’esprit ?) entre autres ; là-dessus aussi : Dr. F. Husemann: „Goethe und die Heilkunst" (Goethe et l’art de guérir); „Das Bild des Menschen als Grundlage der Heilkunst"(L’image de l’humain comme base de l’art de guérir).

[397] Là encore, la question concrète des pionniers courageux dans ce domaine avait conduit Rudolf Steiner à répondre à une telle question sous la forme d'un cours complet et donc à l'émergence d'un vaste mouvement, cette fois dans le domaine médical. Il est également remarquable dans ce cas qu'un tel germe ait mûri en seulement deux septaines jusqu'à son premier développement, bien que l'impulsion extérieure ait toujours semblé être une coïncidence ; mais la vie spirituelle a ses propres lois et le biographe peut seulement déterminer les faits factuels comme tels.

Avec ces 20 conférences médicales a été donné un aperçu complètement nouveau de la nature et de l'organisme de l’être humain à guérir, une richesse d'aspects dans les domaines de l'anatomie, de la pathologie et de la thérapie, de la médecine, etc., un vaste matériel de travail pour le diagnostic et la pratique, surtout aussi pour la formation/l’entrainement des connaissances personnelles du médecin lui-même. Rudolf Steiner s'est toujours strictement tenu au fait qu'il ne peut avoir pour tâche de promouvoir la substance et les capacités cognitives du médecin que lorsqu'on lui en fait la demande, mais que la pratique doit seulement être laissée au médecin lui-même. C'est ce qu'il a répété à la fin de ce cours :

« Dans un sens, c'est le  seul chemin où j’aimerais aller pour que la science de l’esprit soit aussi utile à l'art de guérir, car à l'avenir, pour des raisons que vous envisagerez bien, vous trouverez ce que j'ai toujours respecté : j’aimerais savoir convenu ce qui doit exister comme interaction entre la science de l’esprit et le guérir, seulement entre moi et ceux qui guérissent. Évidemment, je n’aimerais jamais intervenir de quelque façon que ce soit dans une guérison pratique comme je ne l'ai jamais fait. C'est aux médecins en exercice de le faire. Mais ce qui devrait venir par la stimulation spirituelle-scientifique doit se produire par l'interaction entre la science de l’esprit et les médecins eux-mêmes ».

 Au nom des nombreux participants, le professeur Dr N. Römer a exprimé la gratitude des médecins à Rudolf Steiner pour les dons reçus dans ce premier cours de médecine selon la science de l’esprit.

Pendant ce cours aux médecins, du 24 mars au 7 avril, a eu lieu simultanément à Dornach une série de conférences publiques sur « Anthroposophie et sciences contemporaines » (ga 073a), au cours de laquelle des conférenciers de disciplines les plus différentes ont pris la parole et où Rudolf Steiner a ensuite donné des points de vue supplémentaires dans la discussion.

Pour la fête de Pâques, les 2 et 3 avril, il a parlé sous le titre « Pâques, fête de mise en garde » (in ga 198) sur l'événement de Damas et de la nouvelle connaissance de l'Esprit, de la transformation du sang et de la renaissance en Christ. Les 4 et 5 avril, il a donné deux autres conférences (in ga 289) avec photographies pour initier les visiteurs à l'univers pictural et sculptural des formes dans le bâtiment du Goetheanum. Par la suite, une série de 16 conférences du 9 avril au 16 mai sur les « Observations cosmologiques »* (ga 201) a de nouveau mis l'accent sur le domaine de recherche des sciences de la nature

* Voir pour cela : "Der Mensch eine Hieroglyphe des Weltenalls", (L'humain - un hiéroglyphe de l'univers), dans "Mathematisch-Astronomische Blätter" (Feuilles mathématiques-astronomiques), numéro 2 et suivants.

[398] et a traité en détail l'essence des dimensions, le rapport de l'humain, de l'animal et de la plante avec les directions spatiales, la réflexion des tendances et des rythmes du mouvement cosmique dans les processus de vie organique, les sphères des forces dans l'espace, la métamorphose des organes internes de l'humain dans les vies terrestres successives, la connexion des forces de la représentation et de la volonté avec le système du chef/de la tête et du métabolique de l'humain, etc. ; il a ainsi donné un aperçu systématique de l'interaction des organismes cosmiques et terrestres.

Tandis que les collaborateurs scientifiques recevaient de cette façon un riche matériel de travail et que les artistes recevaient leurs instructions quotidiennes sur la sculpture et la peinture dans le bâtiment, Rudolf Steiner a également donné un « Cours pédagogique » de 14 conférences pour les enseignants à Bâle et dans les environs, du 20 avril au 11 mai, en soirée à Bâle (ga 301). Nous devons à nouveau renvoyer ceux qui sont intéressés aux textes imprimés, car nous ne pouvons qu'indiquer les étapes rapides de développement avec lesquelles il a maintenant fait avancer ces différents domaines de travail. Parmi la diversité de ses activités durant cette période, il convient de mentionner une conférence de Rudolf Steiner le 18 avril devant les participants des "Staatsbürgerkurs"(Cours  des citoyens de la ville) de Bâle et le 21 mai à Aarau pour le "Verein ehemaliger Kantonsschüler des Kantons Aargau" (Association des anciens écoliers cantonaux du canton Aargau) sur « Education et Communauté sociale ». Le 26 avril, il a également donné une conférence publique à la "Schweizer Mustermesse" (Foire suisse d’échantillons) sur « La crise économique actuelle et la reprise de la vie économique à travers la tri-articulation de l'organisme social » (in ga 334). Le lendemain, une représentation particulière d’eurythmie a été organisée pour les visiteurs de la "Schweizer Mustermesse", qui a également conféré à l'art ses droits dans ce domaine. Une autre représentation d'eurythmie a eu lieu le 29 mai pour l' "Evangelische Lehrerverein von Baselland und Baselstadt" (association  des professeurs évangéliques de Bale ville et Bale campagne). C'est ainsi que chaque domaine de la vie sociale a reçu sa contribution des sources que Rudolf Steiner a rendues accessibles à toutes les parties. Des conférences publiques à Lucerne et à Bâle sur « Les forces spirituelles et morales des peuples contemporains à la lumière de la science de l'esprit » et des sujets connexes ont remis au premier plan la relation avec les grandes questions de l'existence européenne.

Durant le temps de la Pentecôte 1920, Rudolf Steiner consacra une série de conférences sur l'histoire du monde à la « Philosophie de Thomas d'Aquin » (ga 074). La première conférence a décrit la relation entre Thomas et Augustin, la seconde la nature spirituelle du thomisme, et la troisième la signification du thomisme dans le présent. Ces conférences aussi donnent une telle richesse de substance spirituelle-historique et de nouveaux aspects que seulement certains des résultats essentiels de ces considérations peuvent être soulignés ici. C'est aussi nécessaire parce que donc de maints côtés, qui croient aujourd'hui devoir représenter le thomisme de façon exclusive, si peu a été reconnu [399] avec quelle compréhension profonde tout de suite Rudolf Steiner a parlé de cette grande personnalité de l'histoire de l’esprit. Comme je l'ai dit, nous ne pouvons que faire allusion à certains des résultats ici. Après avoir expliqué en détail l'importance historique de la haute scolastique dans le monde, il montrait maintenant comment l’évolution des siècles suivants n'a plus mis au centre la question des énigmes des mondes spirituels, telle qu'elle était encore posée par la scolastique, mais s'est finalement limitée aux énigmes du monde matériel, en sciences de la nature, en philosophie, jusque dans la vision du monde des penseurs comme Hume, Kant, Dubois-Reymond etc. par la thèse des limites insurmontables de la connaissance explique comme impossible la recherche/l’investigation de ce qui a force-d’essence-spirituelle et concentre le coup d’œil uniquement sur l’être-là corporel-terrestre de l'humain et de la nature. L'impulsion spirituelle du thomisme n'était donc plus liée par la suite à ce nouveau courant, la science de la nature alla son propre chemin. La tentative du Goetheanisme, au XIXe siècle, de réunir de nouveau les mondes naturel et spirituel dans la recherche n'a pas été saisie par l'environnement et les deux courants sont restés séparés jusqu'à ce que la science de l’esprit du XXe siècle en provoque de nouveau la synthèse. Ces phases de développement s'expriment, entre autres, dans les mots suivants de Rudolf Steiner dans ces conférences :

« Parce que l'âge de science de la nature a émergé et que la scolastique n'a pas prévu le changement frontal vers la science de la nature, le kantianisme est apparu, ce qui s’est au fond dégagé comme subjectivité....

 Dans la conception du monde de Goethe repose le début de ce qui doit en fait venir du thomisme seulement avec un changement de front vers la science de la nature, en ce qu’il s'élève au niveau de développement actuel, en devenant un véritable courant du développement/de l’évolution...

L'accomplissement complet de ce Goetheanisme, il sera cependant donné lorsque l'on a une science de l’esprit qui, de sa propre force, produit de l’éclaircissement/de l’explication sur les faits de science de la nature.... La philosophie thomiste vit en s'enflammant au  Goetheanisme, qui, au 13ème siècle, avait encore une forme abstraite, elle continue à vivre dans notre présent comme science de l’esprit. »

 Et à la fin de ces conférences sur le thomisme, il a dit en résumant :

« Ces considération ont été faites afin de prouver que dans la haute-scolastique du 13ème siècle en occident, une culmination de l’évolution spirituelle s’est montrée et que le temps présent a toutes les raisons de répondre à la nature particulière de ce point culminant du développement spirituel européen, que nous pouvons apprendre infiniment beaucoup d'une telle réponse ; nous pouvons apprendre avant toutes choses par rapport à ce que nous pouvons apprendre dans le sens le plus éminent : ce que nous devons appeler l'approfondissement de notre vie des idées, afin que nous puissions sortir de tout nominalisme, afin que nous puissions redécouvrir la christianisation des idées, le christianisme, qui pénètre dans l'être spirituel, dont l'humain doit quand-même venir/faire souche, quand il est totalement honnête et sincère vis-à-vis de soi-même, rien d’autre ne peut le satisfaire que la conscience de son origine spirituelle. »

[400]

Nous avions accentué au début de ces considérations biographiques que le dirigeant/leader spirituel ne renverse jamais seulement, comme le fait le révolutionnaire, mais avec la nouveauté/le neuf qu'il donne, rattache toujours aussi aux évolutions et aux actes spirituels du passé. Le travail de Rudolf Steiner peut donc seulement être compris à partir de ces deux composantes, ce qu'il a créé comme quelque chose de nouveau et ce qu’il a préparé de terrain pour la nouvelle graine de l'histoire du passé de l’esprit. Il faut être prêt à s’occuper tout aussi intensément, par exemple, de l’acte d’esprit d'un Aristote, d’un Thomas d'Aquin, quand on veut comprendre la biographie de celui qui apporte le renouveau spirituel de notre temps dans son contexte historique mondial. C'est tout de suite par cela que le grand pas de développement rendu justice au passé et au présent devient plus clair, que Rudolf Steiner a accompli par la science de l’esprit. Avec ces conférences de Dornach pour la Pentecôte 1920, un autre aperçu des liens spirituels de l'évolution globale fut donné à cause de cela.

C'est tout de suite la raison pour laquelle le travail de Rudolf Steiner a trouvé tant d'approbations enthousiastes dans le cœur des humains, mais aussi tant d'opposition amère, parce que ce n'était pas possible de classer son œuvre d’ensemble dans un quelque des schémas de pensée actuels, des visions du monde partiales ou des aspirations extérieures. C’est pourquoi, chaque tentative de l'attirer complètement dans l'une ou l'autre sphère de pensée ou de pouvoir devait échouer, et ceux qui représentaient ces tendances devaient reconnaître toujours de nouveau que son travail ne pouvait être ni subordonné à leur propre sphère, ni rejeté avec l'un des mots-clés habituels avec lesquels on aimait marquer les autres et ainsi les encapsuler de la totalité. Les adversaires n'ont pas manqué de tentatives dans les deux sens, mais toutes les deux se sont toujours avérés voués à l'échec. C'est pourquoi, dans les années à venir, nous trouverons tant d'aberrations de ces adversaires dans le domaine du non-objectif, du faux, de la calomnie et de la haine contre celui qui a brisé les barrières bien protégées des conventions. La dernière conférence de Rudolf Steiner avant son prochain voyage a donc été consacrée le 5 juin au thème : « La vérité sur l'anthroposophie et sa défense contre la contrevérité »**(in 255b). Une période de forte lutte spirituelle commença maintenant avec ceux qui croyaient pouvoir s'opposer à cette nouvelle impulsion.

 La première conférence après son arrivée à Stuttgart le 8 juin a porté sur le thème « Le chemin vers une pensée saine et la situation de vie des humains actuels** », la seconde (le 10 juin) sur « L'éducation et l'enseignement vis-à-vis de la situation mondiale actuelle** » (les 2 in ga 335). Lors de la troisième conférence publique du 12 juin, il a ensuite parlé de son œuvre centrale « Le Goetheanum à Dornach », illustrant ce qu'il avait accompli avec des photographies de son œuvre artistique (in ga 289). Le 17 juin, il a donné une conférence à l'Université technique de Stuttgart sur " Geisteswissenschaft, Naturwissenschaft und Technik " (Science de l’esprit, science de la nature et technique – in ga 073a). [401]

 Comme ancien étudiant de l'Université technique de Vienne et grâce à ses recherches approfondies depuis lors, il pouvait maintenant, à l'âge de 60 ans, comme conférencier à l'Université technique de Stuttgart, donner de précieux résultats et suggestions dans ce domaine de pratique aussi. Une soirée d'étude, le 16 juin (in ga 337a - http://www.triarticulation.fr/Institut/FG/Articles/1920-06-001.html ), a également apporté d'importantes informations sur un autre domaine de la pratique de la vie, la classification correcte des tâches du foncier dans l'organisme social. Il s'est d'abord penché sur les efforts de réforme de personnalités telles que Damaschke et d'autres à l'époque, puis il a donné des lignes directrices sur la manière dont la relation entre le foncier et les facteurs restant de la communauté sociale pourrait être organisée de manière organique saine.

Tandis que dans ces conférences et soirées d'études les problèmes de l'éducation, de la technique, du foncier étaient clarifiés dans le sens d'une réorganisation sociale globale, il se consacra durant la journée à de nombreuses conférences et discussions avec le corps enseignant sur l'expansion de l'école Waldorf et son cercle de travail en constante expansion.

 Les exigences en temps et ce force de Rudolf Steiner s’étaient tellement intensifiées de tous les côtés qu'il voyageait entre Dornach et Stuttgart à des intervalles de plus en plus courts. Ainsi après trois semaines à Stuttgart, il est donc retourné à Dornach pour les trois semaines suivantes, pour travailler à nouveau à Stuttgart pendant une semaine, pour retourner à Dornach, etc. Dans les mois qui ont suivi, ces visites se sont succédé à de courts rythmes.

 Nous avions déjà mentionné que naturellement aussi l'opposition à Rudolf Steiner, qui s'inquiétait de ses activités et de ses succès dans tous les domaines, était maintenant désireuse de défendre/maintenir ses propres obstacles étroits et, comme toujours dans l'histoire, de faire tomber/tirer dans la poussière le grand et le nouveau qui apparaissait ici, ou de l’entraver par des obstacles et des attaques au fil de sa libre progression/marche en avant. C'est pour cette raison que Rudolf Steiner fut contraint dans sa première conférence à son retour à Dornach de traiter des faussetés flagrantes dans le pamphlet d'un pasteur agressif et de marquer comme telles les accusations et distorsions qui étaient irascibles/passionnées et sans aucune expertise et qui manquaient de tout niveau décent. C'est de telle source qu'il reçut dans les années qui suivirent les abus et les attaques les plus abominables. Lui-même ne s'est jamais abaissé dans la défense au niveau où de telles attaques ont été menées, et l'histoire a finalement montré que ces ennemis haineux de l'époque n'appartiennent aujourd'hui qu'à un chapitre ennuyeux du passé, alors que l'œuvre spirituelle de Rudolf Steiner a des amis et des aides sur tous les continents. Mais à cette époque, il devait aussi marcher dans ce marais, ce qui lui imposait de nombreux soucis, une consommation d'énergie inutile, des fardeaux et des souffrances indicibles. Nous ne voulons pas accabler le lecteur avec les détails dégoûtants des tactiques haineuses [402], qui étaient alors systématiquement et indistinctement organisées contre lui dans les méthodes appliquées, parce qu’on ne sort pas le contenu des poubelles du passé de leurs fosses, et quiconque a une tendance à de telles choses peut les visiter dans ses décharges/amoncellements de déchets. Mais il est nécessaire d'établir les faits historiques, dont on pourra avoir honte un jour, que la personnalité de Rudolf Steiner, qui, par son œuvre pleine de grandeur et de bonté, n'a apporté que des choses fécondes au progrès de l'humanité, a été bombardée de certains côtés par une telle saleté. Seul un homme pur dans toute sa nature pouvait traverser cette sphère de haine et de mensonge d'une manière telle qu'il soit complètement dégagé. Celui qui a expérimenté en ces temps-là, comment, au milieu de cette conduite bruyante de ses adversaires, il a continué son chemin droit, sans hésitation et avec détermination, a pu apprendre en même temps que tout coup mauvais et trompeur, qui est porté contre un tel homme, retombe à la fin seulement sur l'agresseur lui-même et lui imprime le stigmate (NDT Kainsmal : le signe de Dieu sur Cain pour le meurtre de son frère). Ce que Rudolf Steiner a nécessairement utilisé en ces temps-là en force pour repousser ces forces d’opposition a peut-être été temporairement retiré des forces de la construction dans le détail et dans le temps, car le dépassement de ces forces opposées par un être humain est une augmentation de force qui, offert au tout comme un sacrifice, octroie quand-même, les valeurs éternelles d'invincibilité et de continuité spirituelle. Le beau tableau de Dürer du chevalier entre la mort et le diable s’imprime au regard intérieur lorsqu'il revient sur l'être et l'action de Rudolf Steiner à l'époque (NDT : l'image n'est pas dans le livre) .

Si nous tournons maintenant à nouveau notre regard vers le progrès calme et sûr du travail de science de l’esprit, ainsi nous trouverons, au cours de ces mêmes mois, une multitude d'impulsions de croissance fortes. Après avoir payé le tribu à la défense contre de tels adversaires et s’être ensuite confronté dans d'autres sphères avec les apôtres du déclin dans ces conférences de Dornach, avant tout la parole induisant en erreur d'Oswald Spengler sur le « Déclin de l'Occident », il a de nouveau suivi l'appel de tous ceux qui espéraient recevoir de lui une explication sur la construction de l'Occident, que ce soit dans le cercle de ses élèves et collaborateurs ou dans celui des nombreuses personnes qui étaient disposées à examiner ses pensées avec compréhension. Le 8 juillet, à l'invitation de la « Freie Studentenschaft » (compagnie libre des étudiants), il a parlé à Berne de « L'anthroposophie, son essence et ses fondements philosophiques » (in ga 336). Son œuvre philosophique fondamentale « La philosophie de la liberté » a donc déjà été publiée aujourd'hui à plus de 30 000 exemplaires en allemand et en traductions dans le monde entier*.

* Rudolf Steiner : « La philosophie de la liberté », « Vérité et science », "Les énigmes de la philosophie", « Les fondements d'une épistémologie de la vision du monde de Goethe », « La vision du monde de Goethe », « Philosophie et anthroposophie », « Formation pratique du penser » ; voir C. Unger : "Aus der Sprache der Bewußtseinseele" (De la langue de l’âme de conscience); Dr Heinrich Leiste : "Geisteswissenschaftliche Metaphysik" (Métaphysique de science de l’esprit), "Von der Philosophie der Freiheit zur Christosophie"(De la philosophie de la liberté à la christologie).

 [403] Ce qu'il a ajouté depuis la parution de cette première œuvre, c'est passé avec les ondes spirituelles de la propagation dans de si vastes sphères de la conscience terrestre que l'appel des puissances retardatrices de ce qui est passé ne peut plus le rattraper ou l'arrêter. Qu'ils aimeraient prêcher la « chute de l'Occident » ou le retour aux pouvoirs d'hier, les générations futures suivront au cours du temps ce qui peut conduire à l'aube de ce qui vient.

Tandis qu'il donnait tout d’abord au corps étudiant la possibilité de connaître les fondements philosophiques, il introduisit à nouveau plus profondément, à Dornach, dans les semaines qui suivirent, ses élèves dans la structure des forces du temps actuel, aussi dans les forces rajeunissantes qui, avec la naissance de chaque être humain des mondes spirituels, de la sphère de « l'innatalité », dans les lois du domaine où règne l'immortalité, à la « communion spirituelle » de l'humain de la terre avec les forces créatives du monde, dans la mission terrestre qui grandit de telles vues, et dans les vérités qui aident que la Christologie est capable de donner à notre temps.

 

Déjà l'année précédente, peu après la fin de la guerre mondiale, dans une conférence du 12 juin 1919, il avait signalé un symptôme du temps qui pouvait être utilisé pour reconnaître comment, dans les âmes humaines descendant sur terre par les portes de la naissance et délaissant la terre par la mort, des changements se produisent dans les temps modernes. Par les souffrances des nouveau-nés de l'époque et le flot croissant des armées de morts pendant la guerre mondiale avaient été soulevées ainsi maintes graves questions. Et c'est pourquoi Rudolf Steiner attira aussi l'attention sur un phénomène qui était à observer dans une mesure croissante à cette époque :

« J’aimerais partir d'un tel phénomène, que l'on remarque à peine aujourd'hui parmi les multiples événements tempétueux. Il est considérée comme insignifiant et peu net, mais il est là pour celui qui a acquis la possibilité de regarder la vie d'un point de vue réaliste à partir d'un soubassement spirituel.

 

C'est maintenant depuis environ 7, 8, 10 ans - cela peut paraître paradoxal, mais c'est vrai - c'est depuis environ 7, 8, 10 ans, que pour l'observateur véritable de la vie, les enfants qui naissent, naissent avec un visage complètement différent qu'avant. Certes, on ne s'en rend pas compte parce qu'on ne fait pas attention à de telles choses, parce qu'aujourd'hui on ne fait pas attention du tout aux choses les plus importantes de la vie. Mais quiconque a acquis un œil pour de telles choses sait que sur le visage de nombreux enfants nés depuis 7, 8 ou 10 ans, il y a quelque chose comme de la turbidité, comme de la retenue envers le monde. On voudrait dire : dès les premiers jours, dès les premières semaines, on le remarque dans la physionomie des visages d'enfants : il y a quelque chose de « différent » qu'avant.

Et si l'on regarde ce fait étrange, qui semble encore paradoxal pour l'humain moderne, on constate que les âmes des enfants qui se mettent au monde par la naissance portent déjà en elles, en passant par la conception et la naissance, ce qui donne alors à leur visage l'expression mélancolique presque dès la naissance, peut-être souvent cachée derrière tous les sourires, qui ne se stockait pas tant sur le visage de l'enfant auparavant. Et dans les âmes, inconsciemment évidemment, quelque chose vit de l'humeur/l’ambiance  de « ne pas vouloir entrer » dans la vie.  [404]

Les âmes qui aujourd'hui passent par la naissance - comme je l'ai dit, cela fait presque 10 ans - ressentent quelque chose comme un obstacle et un obstacle pour entrer dans ce monde physique.

C’est donc ainsi que l'humain, avant d'entrer dans le monde physique par la conception et la naissance, traverse quelque chose dans le monde spirituel, traverse un événement important qui jette ses rayons, active ses effets dans la vie qui vient. - Les humains meurent ici sur terre, ils passent par la porte de la mort, ils déposent le corps physique, amènent leur âme dans le monde spirituel. Cette âme porte encore en elle les effets de tout ce qu'elle a vécu et expérimenté ici dans le monde physique. Cette âme, en franchissant la porte de la mort, ressemble fondamentalement aux effets de ce qui est directement vécu ici dans la vie terrestre.

 Ces âmes qui ont maintenant franchi la porte de la mort rencontrent - c'est un événement qui n'est qu'un fait ; je peux seulement vous le raconter parce que ces choses peuvent seulement être sortie du monde spirituel par l'expérience - elles rencontrent ces âmes qui se préparent à descendre dans un corps physique dans le temps qui vient. Et c'est un événement important : cette rencontre des âmes qui viennent de passer la porte de la mort avec celles qui entreront bientôt dans le monde physique par la porte de la naissance. Cet événement a quelque chose de déterminant. Il s'agit, pour ainsi dire, d'inoculer aux âmes descendantes quelque chose comme une représentation de ce qu'elles vont rencontrer ici. Et c'est de cette rencontre que vient l'impulsion qui imprime la mélancolie particulière aux enfants qui entrent aujourd'hui dans le monde. D'une certaine manière, ils ne veulent pas entrer dans ce monde dont ils ont fait l'expérience à travers cette rencontre. Car ils savent combien leur « plumage spirituel » est, pour ainsi dire, déconcerté par ce que l'humanité, plongée dans des convictions matérialistes et aussi dans l'action matérialiste, traverse aujourd'hui sur terre.

  Cet événement, qui peut naturellement seulement être observé spirituellement, jette, entre autres choses, une lumière œuvrant fortement sur tout notre présent, sur ce présent, que l'on ne peut comprendre qu’à partir de tels soubassements, mais que l'on devrait aussi comprendre de tels soubassements . »

 C'est pourquoi Rudolf Steiner a parlé dans ces conférences de Dornach de juillet 1920 de ces domaines de l'existence prénatale et de l'influence des âmes humaines incarnées sur terre sur le progrès de la vie de civilisation. Créer pour ces générations à venir, à travers une vision du monde à la mesure de l’esprit, l'éducation et l'ordre social, une sphère terrestre vivable et spirituellement féconde, tout son travail y a été orienté. - Outre les conférences d'introduction à ces tâches, les questions sociales de l'époque ont fait l'objet de discussions en soirée au cours de ces semaines, et la formation artistique a été exercée par le travail artistique sur l’édifice, l'eurythmie et tous les arts appliqués.

 Fin juillet, il s'est de nouveau rendu pendant une semaine au groupe de travail de Stuttgart pour participer à une cérémonie de clôture de l'école Waldorf le 23 juillet avant le début des vacances d'été. Rudolf Steiner a accordé une grande importance à la conception festive et artistique de ces fêtes scolaires tout au long de l'année. Dans les jours qui suivirent, il donna deux conférences publiques dans la grande salle comble de la Maison Siegle avec les thèmes caractéristiques : « Réalité spirituelle et illusion contemporaine » et « A qui est permis de parler contre la chute de l'Occident ? » (in ga 335) [405]

Il voyait un danger dans la popularisation alors menaçante des idées de Spengler sur le déclin inévitable de l'Occident, qu'il a combattu à plusieurs reprises avec énergie et assurance à partir de la substance de sa science de l’esprit, qui incarnait précisément les forces pour une renaissance de la culture occidentale.

 Le mois d'août marque maintenant une ouverte aux premiers cours universitaires au Goetheanum en septembre. Les conférences du mois d'août à Dornach furent surtout consacrées au développement de l’enseignement sur les sens présentés en 1916 comme base pour clarifier le rapport entre l'humain et le monde. La conférence du 8 août a porté sur les relations particulières des douze secteurs sensoriels avec les nouvelles capacités d'imagination, d'inspiration et d'intuition à déployer. La connaissance et la formation de jugements dans les problèmes de la tri-articulation de l'organisme humain et social ont ensuite été encouragées dans des conférences et des discussions. Et l'application de ces pensées à la contemplation de la structure d’âme et des talents particuliers des peuples d'Orient, du Milieu et de l'Occident a été clarifiée (in ga 199).

Le 8 septembre, il s'est entretenu avec des enseignants de la région de Dornach sur la pédagogie et l'eurythmie. La conférence du 12 septembre, « L'origine suprasensible de l'artistique » (in ga 271) est parue dans la presse écrite depuis lors, tout comme de nombreuses autres conférences importantes sur l'art. Il décrit comment l'art imprime sur le monde terrestre ce qui vient en l'humain du prénatal et s'entrelace avec l'immortel.

La semaine suivante, Rudolf Steiner est à nouveau actif à Stuttgart et à Berlin. A Stuttgart, du 15 au 22 septembre, il a donné le « Second Cours Pédagogique » en quatre conférences pour le corps enseignant (ga 302a).

Pendant la période de la Saint-Michel en 1920, furent ouverts les premiers cours universitaires du Goetheanum, de l' « Université libre pour la science de l'esprit » à Dornach. Cette cérémonie a eu lieu pour la première fois dans la grande salle en dôme du Goetheanum. Rudolf Steiner a souligné que le bâtiment dans son ensemble n'était pas encore achevé et que l'aide et l'énergie de nombreuses personnes seraient appelées à l'achever, mais c'était pour nous tous une expérience émouvante dans l'histoire du développement de ce mouvement spirituel, exactement sept ans après la pose officielle de la première pierre de ce bâtiment, d'écouter pour la première fois les paroles, dans l'immense salle à coupole, de celui qui avait créé tout cela en connaissance de l'esprit et à force d'action. Je n'oublierai jamais l'image de ce moment où nous attendions cet événement lors d'un prélude musical par orgue et orchestre. L'ambiance sérieuse et solennelle des quelque 1200 personnes qui se sont rassemblées pour la première fois dans cette salle, les colonnes puissantes et artistiquement formées qui menaient organiquement dans la sphère de l'énorme coupole, l'abondance de lumière qui affluait des grandes fenêtres artistiquement façonnées et baignait ce monde plastique de formes avec son éclat coloré, une unité sublime qui, comme un être vivant, prenait en soi les humains pleins d’attente, pulsée d'un flot mutuel de recevoir et de donner, qui s'est déroulé entre chaque humain et le bâtiment enveloppant comme un premier souffle qui donne la vie en cette heure de naissance. Et dans cette « Maison de la Parole », qui exprimait l'unité suprême de la puissance créatrice de l'esprit avec l'incarnation extérieure dans sa forme conçue, Rudolf Steiner s'adressait pour la première fois aux humains :

 « D'une humeur touchée et avec une âme sérieuse, je prononce maintenant cette première des paroles qui, dans cette salle, doivent être consacrées à la science de l’esprit. L'ambiance doit être sérieuse. La situation critique du temps est à l'arrière-plan, et tout ce qui a conduit de la vie négative de l’esprit à cette situation critique du temps. Mais devant mon âme aujourd'hui se trouve aussi tout ce qui a été fait depuis ce temps par des âmes qui comprennent et s'enthousiasment pour le développement de l'avenir spirituel de l'humanité, afin que ce bâtiment, dans lequel nous commençons maintenant le premier cours universitaire en science de l’esprit, puisse au moins être conduit jusqu'à ce stade. Il doit être pensé, très reconnaissant, de l'esprit, à partir de la direction de la science pensée ici, à cette belle attitude et sa force qui était là chez tous les aides matériels et spirituels à ce qui devrait venir ici. Et avant toutes choses, j’aimerais maintenant m'adresser aux nombreux amis de notre chose qui sont venus ici pour ce cours. Ceux qui sont venus ici pour ce cours montrent qu'ils attendent au moins quelque chose de ce qui se fait ici, quelque chose que la grande misère de notre temps, la nature spéciale de notre vie de l’esprit exige dans le présent.

 Vous annoncez, en apparaissant ici et en voulant entendre le cours, dans un certain sens, comment vous attendez de ces expériences spirituelles que soit essayé d'entendre ici l'appel puissant du temps, et que l'on veuille s'efforcer de servir les tâches vers lesquelles cet appel du temps indique. »

 Il parla maintenant de l'ancienne unité de la science, de l'art et de la religion dans les centres de mystères du passé :

« Il y a eu des périodes de l’évolution humaine où il n'y avait pas d'institutions d’enseignement séparées, pas d'églises séparées, pas d'institutions artistiques séparées, il y avait un ouvrage unifié, qui était à la fois reconnu artistiquement et religieux par nature : Des lieux que l'on peut appeler des mystères, où était cultivé un art qui était à la fois religion et science, où était cultivée une religion qui, dans ses cultes, exprimait les aspirations artistiques de l'époque, où était cultivée une science qui, de la spiritualité dont elle est issue, conduit directement aux sources divines de l'existence humaine/l’être-là humain et du monde qui devraient être vécues dans le sentiment religieux. »

 Il a décrit la fragmentation funeste de cette unité au cours des derniers siècles, la perte des forces créatrices spirituelles et cosmiques dans l'art, le chemin vers l'athéisme et l'agnosticisme dans la religion et la science, et la naissance d'une nouvelle synthèse des trois sphères humaines les plus élevées de la vie par la connaissance des mondes suprasensibles dans la science de l’esprit du 20e siècle. [407]

 « Nous aimerions apporter de manière créative trois forces nouvelles à la révélation à partir de sources spirituelles : à nouveau un art visionnaire, une reconnaissance du suprasensible pour la renaissance de l'âme et de l'esprit dans cette religion dont l'humeur/l’ambiance doit être formée de cet art et de cette science.

Ce qui devrait naître comme une force, nous n'avons pas seulement la conviction, mais nous qui travaillons ici en avons une connaissance : que nous pouvons porter dans les différentes branches de la vie humaine de culture, dans tous les détails de notre vie sociale frémissante actuelle ce qui peut provenir, pour l’être-là vivant de l'humanité, de la nouvelle Trinité, de l'art visionnaire, de la science saisissant spirituellement, de la religion vivant la renaissance dans le suprasensible. Ce bâtiment devrait être dédié à cette tâche. Comme il serait beau si je pouvais parler aujourd'hui du fait que ce bâtiment serait achevé, que ce bâtiment pourrait être remis à sa destination, qu'après sept ans de travaux - parce qu'il y a sept ans nous avons posé la première pierre de ce bâtiment ici - après sept ans de travaux, ce bâtiment pourrait être remis à ses objectifs. Je ne le peux pas. Car il reste encore beaucoup à faire avant que ce bâtiment puisse être achevé. Nous ne sommes donc pas sur le point d'ouvrir ce bâtiment aujourd'hui, mais nous voulons mettre provisoirement devant le monde ce que nous croyons avoir à dire au monde de notre courant spirituel dans ce cours universitaire, même dans ce bâtiment inachevé.

 Et ainsi, ceux qui sont apparus à ce cours, justement pas conduits dans le bâtiment fini, mais – j’aimerai dire – tout d’abord conduits dedans, de sorte que, peut-être comme nous attendons, attendons confiants, entendront ici, gagneront la conviction : Oui, cette construction doit être terminée. Et ainsi nous est permis d’espérer qu’à ceux chez qui nous trouverons peut-être de la compréhension nous grandirons des aides dans toutes les formes possibles et nécessaires pour l’achèvement de cette construction qui est la nôtre.

C'est pourquoi je n'en suis pas moins reconnaissant, à partir de l'esprit de notre science de l’esprit, à tous ceux qui ont amené ce bâtiment à son stade actuel. De cette gratitude et de cette satisfaction, je m'adresse tout d'abord à ceux qui, anciens ou jeunes membres de la société anthroposophique, sont venus en si grand nombre aujourd'hui pour travailler avec nous sur ce qui doit être élaboré dans un esprit nouveau pour le progrès de l'humanité.

 Je me tourne en particulier vers ces visiteurs de notre cours qui font partie de la population étudiante des différents pays. Je voudrais leur dire, à eux, à ces étudiants, que cela m’apporte la plus grande satisfaction de les voir ici, parce que je crois que, même si cela fait longtemps que je n'ai pas été étudiant, je me permet de me sentir encore parmi eux dans le sens correct et le meilleur du terme. Car ce qui a été décrit ici comme une aspiration à atteindre doit d'abord et avant tout être atteint par un esprit et un zèle/une ardeur de jeunesse. Combinez votre force juvénile avec le sérieux qui vit dans ceux qui travaillent ici pour la science de l'esprit à partir de la grave nécessité des temps, et il doit réussir, cette réussite dont le besoin du temps exige tant. Soyez donc les bienvenus ! »

 Dans ce cours universitaire, qui, dans les années qui suivirent, fut complété et élargi par de nombreux autres cours, un nouveau centre d'unité de connaissance et d'action devait être confronté aux courants de fragmentation et de déclin dans la civilisation de l'Occident :

 « Il devrait être opposée ici quelque chose de la force d'une volonté artistique, d'un discernement, d'une volonté religieuse-sincère et sociale qui peut conduire à l’ascension, à la construction d'une nouvelle civilisation. C'est pourquoi, par modestie, mais néanmoins par la conviction gagnée par la science de l’esprit elle-même, que la parole soit adressée à tous ceux que nous aimons tant voir ici aujourd'hui, qui veulent s'unir à nous pour le travail, qui devrait seulement exprimer dans quel esprit, dans quel sens nous voulons être réunis ici :

 Pour nous tourner vers la lumière
Dans les moments sombres de besoin,
Pour le rouge du matin de l’esprit
Qui envoient les regards/coup d’œil de l'âme:
que ce soit volonté des humains,
et qu’elle reste pour et pour. »

 Rudolf Steiner a lui-même ouvert ce travail universitaire au Goetheanum avec un cours scientifique et artistique. Le cours d'ouverture de science de la nature s'intitulait « Les limites de la connaissance de la nature » (ga 322). Depuis lors, ces conférences ont été publiées sous forme de livre* par la Section des sciences de la nature du Goetheanum. Il s'est concentré ici sur la question de savoir si l'homme devait vraiment accepter comme définitif le fameux mot Du Bois-Reymond, qu'il avait prononcé en 1872 à l'Assemblée des chercheurs sur la nature et médecins allemands comme le résultat de la science de la nature occidentale, l'« ignorabimus », le mot des frontières insurmontables du savoir. De cette décision dépend non seulement le sort futur de la science, mais aussi tout but de la pensée et de la volonté humaines et sociales futures. Quand l'humain considère que tout ce qui ne repose pas dans le domaine du monde des sens est inaccessible pour la recherche et le savoir humains, alors les portes lui sont fermées qui mènent aux mondes dont il est lui-même issu, dans lesquels sont à  trouver les forces créatives du monde, de l'homme, de la communauté sociale. Avec la reconnaissance de ces « limites de la connaissance de la nature », la pensée est condamnée à la moitié, à l'irréalité, à une existence/un être-là d'ombre, à un dépérissement, qui ne donne plus aucune perspective un nouveau développement. Les huit conférences que Rudolf Steiner tenait maintenant ont montré avec la méthodologie exacte de la science de l’esprit que ces frontières posées par l’humain lui-même sont arbitraires, que lorsqu'il continue de former et d’entraîner ses organes de connaissance, il peut connaître non seulement le domaine au-delà de la matière sensible-matérielle, mais peut aussi reconnaître l'esprit actif dans les phénomènes de la nature :

« En ce que nous empruntons de tels chemins de la connaissance, comme je les ai caractérisés, nous prenons conscience de la façon dont nous sommes organisés à partir du monde extérieur. Nous poursuivons consciemment ce qui en nous fait corps et vit, en ce qu’avant toutes choses nous recevons un sens clair pour ce que de l'esprit est disponible dans le monde extérieur. C'est tout de suite à travers la phénoménologie que nous parvenons à voir clairement comment de l'esprit est dans le monde extérieur. Ce n'est pas quand nous mettons en mouvement une métaphysique abstraite, mais c'est tout de suite par la phénoménologie que nous arrivons à la connaissance de l'esprit, en ce que nous percevons, quand nous élevons à la conscience ce que nous faisons sinon inconsciemment, en ce que nous percevons, comment le spirituel pénètre en nous par le monde des sens et nous organise nous-mêmes. »

 * Rudolf Steiner : "Les limites de la connaissance de la nature." (ga 322)

[409] Nous devons laisser l'étude détaillée de ces étapes de développement au lecteur lui-même, qui a maintenant aussi le matériel de travail sous forme de livre.

 La Hochschule für Geisteswissenschaft, fondée par Rudolf Steiner, avait pour tâche d'élaborer le donné à partir de ces nouveaux aspects, non pas par « métaphysique abstraite », mais en formant les organes de connaissance et la phénoménologie concrète dans toutes les directions de la recherche. Ce premier cours a donc d’abord apporté 32 conférences d'autres intervenants sur la philosophie, la théologie, l'histoire, la linguistique, la physique, les mathématiques, la chimie, la biologie, la médecine, la jurisprudence, la pédagogie, l'économie nationale et les pratiques économiques, etc.

Rudolf Steiner dit plus tard, à propos de ce premier cours universitaire, qu'il a pu constater à l'époque à quel point la construction était la meilleure pierre de touche/probation dans son monde de formes artistiques, que l'un ou l'autre professeur était capable de parler ou non de l'unité organique qui devait être fondée ici, et que beaucoup de ce que les intervenants avaient alors apporté dans le bâtiment « n'avait pas été développé de la même manière que la construction elle-même ». Nous y reviendrons (voir février 1923). Mais il a été donné un objectif que tout le monde pouvait s'efforcer d'atteindre sans cesse dans les années à venir, et tout le monde pouvait mettre sa force à l'épreuve et l’entraîner pour l'atteindre. L'objectif est de féconder tous les domaines de la vie à partir du noyau le plus profond de la science de l’esprit et de les conduire vers un nouveau synopsis. Car c'est dans cette unité que réside la nostalgie des Goetheanistes du passé, le sens de la culture, que le XXe siècle est désormais appelé à créer et dont il est capable.

Ce que Rudolf Steiner a inauguré lui-même avec ses conférences sur les « limites de la connaissance de la nature » ne sera, comme toujours dans l'histoire, reconnu dans sa signification que dans le futur. Il a ouvert les digues inhibitrices à la force de connaissance des humains et leur a ouvert de nouvelles sphères dont la fertilité est inépuisable.

Alors que l'un de ses deux cours universitaires était consacré à la science, l'autre, qui a eu lieu en même temps, a servi l'art. Les arts de la sculpture et de la peinture pouvaient donc parler à travers leurs actes dans le bâtiment environnant, et des représentations d'eurythmie avaient embellies la fête. Rudolf Steiner a également parlé de « l’art de la récitation et de la déclamation », l'art de la parole, qui a été parfaitement illustré par la récitation par Mme Marie Steiner d'un tableau  du drame mystère « La porte de l’initiation » et de strophes de « Iphigenie » de Goethe. Ces conférences sont également disponibles aujourd'hui sous forme de livre* pour tous les amis et élèves de la formation artistique de la parole.

* Rudolf Steiner : "Die Kunst der Rezitation und Deklamation" (L'art de la récitation et de la déclamation) avec des ajouts provenant de conférences sur des sujets connexes ; voir aussi : "Sprachgestaltung und dramatische Kunst" (Formation de la parole et art dramatique).

[410] La conférence d'Albert Steffen sur "Die Krisis im Leben des Künstlers" (La crise dans la vie de l'artiste), dans laquelle il a démontré les tournants décisifs de la vie et de l'œuvre de Goethe et Schiller, et décrit, dans son grand art de façonnement de la parole, les bases spirituelles de l’œuvre créative du poète, du musicien et du peintre, a offert une expérience artistique lors de ce congrès. Ici aussi on a pu faire l'expérience de la source commune de connaissances spirituelles-scientifiques et de la création artistique. Ainsi, les conférences de Rudolf Steiner, l'art de récitation de Madame Marie Steiner et cette conférence d'Albert Steffen à l'ouverture de ce travail au Goetheanum ont déjà servi de modèles pour l’ouvrage du temps à venir.

Pendant ces trois semaines, Rudolf Steiner a encore donné trois conférences spéciales sur « la pensée de l’édifice de Dornach » et aussi une série de quatre conférences médicales : « Physiologie-thérapeutique sur la base de la science de l'esprit » (ga 314). Lors des réunions des groupes de travail individuels dans leur spécialité, des réunions d'étudiants, etc. il a également pris une part active à la discussion.

Dans son discours de clôture du 16 octobre, il a donné un aperçu de ces trois semaines du premier cours universitaire au Goetheanum et l'a terminé par un appel aux nombreuses personnes venues de nombreux pays du monde entier qui s'étaient réunies ici pour donner à nouveau au monde cette abondance de nouvelles impulsions :

« Ce que l'on veut ici sera fini, mais seulement quand ceux qui ont vu ici, entendu ici, senti ici, sortent dans le monde et chacun continue à travailler selon sa force à sa place. Alors chacun sera une pierre angulaire. C'est alors que se déploiera cette grande construction de la vie spirituelle, de l'être artistique, de l'efficacité sociale, dont nous avons vraiment et nécessairement besoin aujourd'hui pour le rétablissement de la santé de l'humanité.

C'est pourquoi cette conférence de clôture sur l’essence et les objectifs du bâtiment de Dornach s'intitulait « Le bâtiment de l'humanité ».

La deuxième quinzaine d'octobre s'est à nouveau concentrée sur le travail intensif de l'équipe de Dornach. Dans ces contextes plus intimes, il poursuivit ses considérations sur les « considérations historiques symptomatologiques », à partir de l'époque des années 700 après J.-C., par exemple la dispute entre le théologien Alcuin et les Grecs, jusqu'à la confrontation de Goethe et Schiller avec les questions sociales de leur époque, dans le « Conte » de Goethe et les « Lettres esthétiques » de Schiller, dans leurs rapports comme humains du Milieu aux puissances spirituelles de l'Est et de l'Ouest. Il a poursuivi ces observations historiques jusqu'au Goetheanisme et à la christologie du XXe siècle.

Le 31 octobre a eu lieu une réunion pour la constitution de la « Société anthroposophique en Suisse ». Les branches suisses, qui existaient depuis le début du mouvement, avaient mené à bien leur travail intensif sans constitution formelle d'une organisation commune, d'autant plus que la présence constante de Rudolf Steiner et le travail du Goetheanum avaient fourni le centre commun du travail. [411]

Cependant, étant donné qu'un certain nombre de nouvelles tâches d'organisation ont dû être accomplies en raison de l'activité publique accrue et de l'intérêt sans cesse croissant d'autres milieux, la constitution formelle d'un groupe national dédié à cette tâche particulière a également été entreprise. Rudolf Steiner avait fortement incité la branche du Goetheanum qui s'était constituée peu de temps auparavant à se consacrer tout particulièrement à la belle et importante fonction d'hôte pour les nombreux visiteurs venus du monde entier à Dornach.

Du 8 au 23 novembre, il s'est de nouveau rendu en Allemagne et a donné une série de conférences publiques à Stuttgart sur « La crise spirituelle du présent et les forces du progrès humain », tout comme  Freiburg i. B. sur « Les grandes questions du temps et la connaissance anthroposophique de l’esprit ». Une série de représentations d'eurythmie a donné la contribution de l'art à ce progrès.

De fin novembre jusqu'à la fin de l'année, il a mis toutes ses forces au service des travaux du bâtiment de Dornach. Ce rythme d'expansion au loin et de concentration au centre s'est manifesté cette année dans un battement de pouls rapide et vivifiant. Rudolf Steiner a donc été revu pendant la journée - en alternance avec le marteau et le burin - dans le cercle des sculpteurs ou dans les salles de travail et de pratique des peintres, des eurythmistes, en conversation avec les collaborateurs scientifiques ou les nombreux visiteurs, et le soir au milieu de tous ces créateurs, comme professeur qui approfondissait la substance fondamentale commune de science de l’esprit. Dans la première de ces conférences du soir, il a donc aussi parlé de l'harmonie des trois sphères chez l'humain lui-même, l'homme-chef/tête, l'homme-membre et le rythme vivant de la respiration et de la circulation, qui relie et tisse les deux pôles. Il a montré comment la sagesse tissée au rythme de l'organisme vivant crée l'équilibre et l'harmonie entre l'élément de la beauté et de la force, et que c'est tout de suite par cela que l'humain est prédisposé au développement de facultés aussi diverses.

 Des conférences publiques à Bâle, Berne, Zurich et Olten ont à nouveau apporté l’élargissement de la sphère d'activité dans l'environnement, qui a été suivi par la concentration sur une nouvelle impulsion à Dornach pendant la période de Noël. Cette fois, pour Noël, il a donné quatre conférences sur « La recherche de la nouvelle Isis, la divine Sophia », du 23 au 26 décembre (in ga 202). Il désigna l'arbre de Noël comme symbole de l'arbre du paradis et ramena les auditeurs à l'époque où la vieille sagesse des étoiles était incarnée, par exemple en Egypte, dans le monde d'images de la légende d'Isis.  [412]

Pour la rédemption de l'intellectualisme mourant, notre temps a besoin d'un nouveau don d'imagination pénétrée par l'esprit, d'une nouvelle légende d'Isis, qui donne des vérités spirituelles en image à la conscience au stade actuel del’évolution. La connaissance perdue des anciens mystères du pouvoir divin de "Sophia" doit renaître à un nouveau niveau d'évolution dansl'anthroposophie et l'humain doit maintenant marcher sur le chemin des pouvoirs créatifs par sa propre force intérieure. L'art créatif peut être étendu par laformation de la force de d'imagination consciente de l'esprit, la connaissance de la nature par l'atteinte pratique de la faculté à l'inspiration et à l'intuition.Face à l'étrangeté de l’esprit/l’aliénation spirituelle, à la résignation et à l'incapacité de l'époque, il promouvait comme ambiance de Noël la « naissancedu capable » en tout être humain, afin que la puissance du Christ et la sagesse des puissances du monde spirituel puissent lui devenir des aides dansses actions. C'est pourquoi aussi tout ouvrage en ces temps difficiles se tenait dans les signes du plan des monde de faire naître cette « naissancedes capables » au milieu de la chute apparente de l'Occident, qui ne connaît pas de chute mais cherche l'ascension à partir de la « Sophia »,la sagesse du développement spirituel. [413]

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