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GA337a - Œuvres complètes de Rudolf Steiner :

IDÉES SOCIALE - RÉALITÉ SOCIALE - PRATIQUE SOCIALE Volume I 




PREMIÈRE SOIREE D'ÉTUDES, Stuttgart, 30 juillet 1919.

L'histoire du mouvement social.

ERSTER STUDIENABEND, Stuttgart, 30. Juli 1919.

Zur Geschichte der sozialen Bewegung.

 


 

Les références Rudolf Steiner Œuvres complètes ga 337a  103-137 1999  30071919



Original





Traducteur: FG v.01 - 05/2022 Editeur: SITE

Rudolf Steiner : Mes très chers présents ! Je ne vais pas anticiper ce soir sur ce qui doit être mis en place ici en tant que soirées d'étude qui se tiendront sur la base du livre "Les points essentiels de la question sociale", mais je vais essayer de vous donner une sorte d'introduction à ces soirées. Par cette introduction, je voudrais vous faire ressentir les points de vue qui ont présidé à l'écriture de ce livre. Il a été écrit avant tout en fonction de l'actualité immédiate, de la conviction que la question sociale a elle aussi pris une nouvelle forme à la suite des événements actuels et qu'il est nécessaire de parler aujourd'hui de la question sociale d'une manière tout à fait différente de celle dont on parlait, de quelque côté que ce soit, de la question sociale avant la catastrophe de la guerre mondiale. Avec ce livre, on a en quelque sorte essayé, à ce moment de l'évolution de l'humanité où la question sociale devient particulièrement urgente et où tout homme qui vit consciemment aujourd'hui, qui ne vit pas la vie de l'humanité en somnolant et en dormant, devrait savoir quelque chose sur ce qui doit se passer dans le sens de ce qu'on appelle habituellement la question sociale. Il serait peut-être bon de jeter un petit coup d'œil en arrière aujourd'hui. J'aurai peut-être à mentionner des choses - mais nous les présenterons sous un jour un peu différent de celui dans lequel elles ont été présentées -, j'aurai à mentionner des choses que vous connaissez en partie.

01

Rudolf Steiner: Meine sehr verehrten Anwesenden! Ich werde heute Abend nicht demjenigen vorgreifen, was hier eigentlich eingerichtet werden soll als Studienabende, die abgehalten werden auf Grundlage des Buches «Die Kernpunkte der Sozialen Frage», sondern ich werde versuchen, Ihnen eine Art von Einleitung zu diesen Abenden zu geben. Ich möchte durch diese Einleitung in Ihnen eine Empfindung davon hervorrufen, aus welchen Gesichtspunkten heraus dieses Buch geschrieben worden ist. Es ist vor allen Dingen geschrieben worden aus der unmittelbaren Gegenwart heraus, aus der Überzeugung, daß auch die soziale Frage durch die Ereignisse der Gegenwart eine neue Gestalt angenommen hat und daß es notwendig ist, heute über die soziale Frage ganz anders zu reden, als von irgendeiner Seite her über die soziale Frage vor der Weltkriegskatastrophe geredet worden ist. Mit diesem Buch ist gewis­sermaßen versucht worden, jetzt in diesem Zeitpunkte der Mensch­heitsentwicklung, in welchem die soziale Frage ganz besonders dringend wird und in welchem eigentlich jeder Mensch, der be­wußt heute mitlebt, der nicht schläfrig und schlafend das Leben der Menschheit mitlebt, etwas wissen sollte über das, was zu geschehen hat im Sinne dessen, was man gewöhnlich die soziale Frage nennt. Da wird es vielleicht zunächst ganz gut sein, wenn wir heute ein bißchen zurückblicken. Ich werde ja dabei vielleicht Dinge zu erwähnen haben -- aber wir werden sie dann in ein etwas anderes Licht rücken, als sie gerückt worden sind —, ich werde Dinge zu erwähnen haben, welche Ihnen zum Teil bekannt sind.

Vous savez probablement que ce qui est dit aujourd'hui sur la question sociale est dit depuis relativement longtemps. Et on cite aujourd'hui les noms de Proudhon, Fourier, Louis Blanc comme les premiers à avoir traité la question sociale jusqu'au milieu du XIXe siècle. Vous savez aussi que la manière dont cette question sociale a été traitée jusqu'au milieu du XIXe siècle est appelée par les représentants actuels, du moins par de nombreux représentants actuels de la question sociale, "l'ère des utopies sociales". Il est bon de préciser ce que l'on entend par là lorsque l'on dit qu'à son premier stade, la question sociale est apparue de telle sorte qu'elle vivait dans un "âge des utopies". Mais on ne peut pas parler de cette chose dans un sens absolu, on ne peut en fait parler qu'à partir des sentiments des représentants de la question sociale dans le présent. Ils ressentent les choses comme je veux les décrire maintenant. Ils sentent que toutes les questions sociales qui sont apparues à l'époque dont je veux parler en premier lieu étaient au stade de l'utopie. Et qu'est-ce que les gens entendent par là quand ils disent que la question sociale était alors au stade de l'utopie ? Ils entendent par là - on l'a déjà remarqué à l'époque ; Saint-Simon et Fourier l'ont bien remarqué - qu'il y a, même après la Révolution française, des humains d'une certaine minorité sociale qui sont en possession des moyens de production et aussi d'autres biens humains, et qu'il y a un grand nombre d'autres humains - c'est même la majorité - qui ne sont pas en possession de tels biens. Ces personnes ne peuvent travailler sur les moyens de production qu'en se mettant au service de ceux qui possèdent les moyens de production et aussi la terre - elles n'ont en fait rien d'autre qu'elles-mêmes et leur force de travail. On a noté que la vie de cette grande masse de l'humanité est une vie de détresse, en grande partie dans la pauvreté, par opposition à ceux qui sont en minorité ; et on a fait allusion à la situation de la minorité et à la situation de la majorité.

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Sie wissen ja wahrscheinlich, daß man das, was heute zur sozia­len Frage vorgebracht wird, seit verhältnismäßig langer Zeit vor­bringt. Und es werden ja auch heute die Namen Proudhon, Fourier, Louis Blanc genannt als die ersten, die bis in die Mitte des 19. Jahrhunderts hinein die soziale Frage behandelt haben. Sie wissen ja auch, daß die Art, wie diese soziale Frage bis in die Mitte des 19.$ Jahrhunderts hinein behandelt wurde, von den heutigen Vertretern, wenigstens von vielen heutigen Vertretern der sozialen Frage, genannt wird «das Zeitalter der sozialen Utopien». Es ist gut, sich klarzumachen, was man eigentlich damit meint, wenn man sagt: In ihrem ersten Stadium trat die soziale Frage so auf, daß sie in einem «Zeitalter der Utopien» lebte. Aber man kann über diese Sache nicht im absoluten Sinne reden, sondern man kann eigentlich nur aus den Empfindungen der Vertreter der sozialen Frage in der Gegenwart reden. Die empfinden so, wie ich es jetzt schildern will. Sie empfinden, daß alle sozialen Fragen, die in dem Zeitalter auftraten, wovon ich zuerst sprechen will, im Stadium der Utopie waren. Und was verstehen die Leute darunter, wenn sie sagen, die soziale Frage war damals im Stadium der Utopie? Darunter verstehen sie das hat man ja auch schon dazumal bemerkt; Saint-Simon und Fourier haben es gut bemerkt —, daß da sind, auch nach der Französischen Revolution, Menschen einer gewissen sozialen Minderheit, welche im Besitz der Produktionsmittel und auch anderer menschlicher Güter sind, und daß da sind eine große Anzahl von anderen Menschen — es ist sogar die Mehrzahl —, welche nicht in solchem Besitze sind. Diese Menschen können an den Produktionsmitteln nur dadurch arbeiten, daß sie in die Dienste derjenigen treten, die die Produktionsmittel und auch den Boden besitzen — sie haben im Grunde genommen nichts anderes als sich selbst und ihre Arbeitskraft. Man hat bemerkt, daß das Leben dieser großen Masse der Menschheit eine Bedrängnis ist, zum großen Teil in Armut verläuft im Gegensatz zu denjenigen, die in der Minderheit sind; und man hat hingewiesen auf die Lage der Minderheit und auf die Lage der Mehrheit.

Ceux qui ont écrit sur cette situation sociale de l'humanité, comme Saint-Simon et Fourier, mais aussi Proudhon, sont partis d'un certain postulat. Ils sont partis du principe qu'il était nécessaire d'attirer l'attention des humains sur ce point : Voyez, la grande masse vit dans la misère, dans l'absence de liberté, dans la dépendance économique, ce n'est pas une existence digne de l'humain pour la grande masse. Il faut changer cela. - Et on a alors imaginé toutes sortes de moyens par lesquels cette inégalité entre les humains pouvait être modifiée. Mais il y avait toujours une certaine condition préalable, et cette condition préalable était que l'on se disait : si l'on sait ce qui fonde l'inégalité et si l'on a des paroles suffisamment fortes, si l'on a une conscience morale suffisante pour attirer fortement l'attention sur le fait que la grande majorité des humains vit dans la dépendance économique et juridique et est pauvre, alors ce discours touchera les cœurs, les âmes de la minorité, des nantis, de la minorité la plus favorisée. Et c'est en faisant comprendre à cette minorité que les choses ne peuvent pas rester en l'état, qu'il faut apporter des changements, qu'il faut mettre en place un autre ordre social, qu'un autre ordre social sera instauré. La condition préalable était donc que les humains se laissent entraîner à faire quelque chose pour la libération de la grande masse de l'humanité à partir de l'élan de leur âme. Et on proposait alors ce qu'il fallait faire. Et on pensait que si la minorité, si les gens qui sont les dirigeants, les leaders, comprenaient que ce qu'on voulait faire était bien, alors il y aurait une amélioration générale de la situation de l'humanité.

03

Diejenigen, die nun so wie Saint-Simon und Fourier wie auch noch Proudhon über diese soziale Lage der Menschheit geschrieben haben, die sind von einer gewissen Voraussetzung ausgegangen. Sie sind ausgegangen von der Voraussetzung, daß man notwendig habe, die Menschen darauf hinzuweisen: Seht, die große Masse lebt in Elend, in Unfreiheit, in wirtschaftlicher Abhängigkeit, das ist für die große Masse kein menschenwürdiges Dasein. Das muß geändert werden. — Und man hat dann allerlei Mittel ausersonnen, durch welche diese Ungleichheit unter den Menschen geändert werden kann. Aber es war immer eine bestimmte Voraussetzung da, und diese Voraussetzung war, daß man sich sagte: Wenn man weiß, worinnen die Ungleichheit begründet ist und wenn man eindringliche Worte genug hat, wenn man sittliches Bewußtsein selbst genug hat, um stark darauf hinzuweisen, daß die große Mehrzahl der Menschen in wirtschaftlicher und rechtlicher Abhängigkeit lebt und arm ist, so wird diese Rede die Herzen, die Seelen der Minderheit, der Begüterten, der begünstigteren Minderheit ergreifen. Und es wird dadurch, daß diese Minderheit einsieht, so kann es nicht bleiben, man muß Änderungen herbeiführen, es muß eine andere Gesellschaftsordnung kommen, es wird dadurch eine andere Gesellschaftsordnung herbeigeführt werden. Also die Voraussetzung war die, daß die Menschen sich herbeilassen wer den, aus ihrem innersten Seelenantrieb heraus etwas zur Befreiung der großen Masse der Menschheit zu tun. Und dann schlug man vor, was man tun sollte. Und man glaubte, wenn die Minderheit, wenn die Menschen, die die leitenden, führenden Menschen sind, einsehen, daß das gut ist, was man tun will, dann wird eine all gemeine Besserung der Lage der Menschheit eintreten.

Beaucoup de choses extrêmement intelligentes ont été dites de ce côté-là, mais tout ce qui a été entrepris dans ce sens est aujourd'hui considéré comme utopique par la plupart des représentants de la question sociale. Cela signifie qu'aujourd'hui, on ne compte plus sur le fait qu'il suffise de dire : c'est ainsi qu'il faudrait organiser le monde, et l'inégalité économique, politique et juridique des humains cesserait. - Il ne sert à rien aujourd'hui d'en appeler à la compréhension, au discernement des humains qui sont favorisés, qui sont dans le privilège, qui sont en possession des moyens de production et autres. Si je dois exprimer ce qui a été perdu au cours de la deuxième moitié du XIXe siècle, je dois dire que l'on a perdu la foi en la compréhension et en la bonne volonté des humains. C'est pourquoi les représentants de la question sociale, dont je parle maintenant, se disent : on peut élaborer de beaux plans sur la manière d'aménager le monde des humains, mais il n'en résultera rien ; car on aura beau prêcher de beaux plans, on aura beau faire appel aux cœurs et aux âmes des minorités dirigeantes avec des paroles touchantes, il ne se passera rien. Tout cela, ce sont des idées sans valeur, et les idées sans valeur qui imaginent l'avenir sont en réalité, pour parler en termes populaires, des utopies. Il ne sert donc à rien, dit-on, d'imaginer quoi que ce soit dans l'avenir, car il n'y aura personne pour renoncer à ses intérêts, pour être saisi par sa conscience, par son sens moral, etc. - La foi dans la conscience et le discernement moral a justement été perdue dans les cercles les plus larges, notamment chez les représentants de la question sociale. On se dit que les humains n'agissent pas du tout en fonction de leur discernement lorsqu'ils prennent des mesures sociales ou lorsqu'ils mènent leur vie sociale, ils agissent en fonction de leur intérêt. Et les possédants ont bien entendu intérêt à rester dans leurs possessions. Les privilégiés sociaux ont intérêt à conserver leurs privilèges sociaux. C'est pourquoi il est illusoire de compter sur le fait qu'il suffit de dire aux gens de faire ceci ou cela. Ils ne le font pas, parce qu'ils n'agissent pas en fonction de leur compréhension, mais en fonction de leur intérêt.

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Es ist sehr viel außerordentlich Gescheites gesagt worden von dieser Seite her, allein alles dasjenige, was in dieser Richtung unternommen worden ist, das empfindet man heute bei den meisten Vertretern der sozialen Frage als utopisch. Das heißt, man rechnet heute nicht mehr darauf, daß man nur zu sagen braucht: So müßte man die Welt einrichten, dann würde die wirtschaftliche und politische und rechtliche Ungleichheit der Menschen aufhören. — Esnützt heute nichts, an das Verständnis zu appellieren, an die Einsicht der Menschen, die begünstigt sind, die im Vorrecht sind, dieim Besitz sind der Produktionsmittel und dergleichen. Wenn ich ausdrücken soll, was da im Laufe der zweiten Hälfte des 19. Jahrhunderts verloren worden ist, so muß ich sagen, verloren worden ist der Glaube an die Einsicht und an den guten Willen der Menschen. Daher sagen sich die Vertreter der sozialen Frage, die ich jetzt meine: Schöne Pläne ausdenken, wie man die Menschenwelt einrichten soll, das kann man, aber dabei kommt nichts heraus; denn wenn man noch so schöne Pläne predigt, wenn man mit noch so rührenden Worten appelliert an die Herzen, an die Seelen der regierenden Minderheiten, so wird doch nichts geschehen. Das alles sind wertlose Ideen, und wertlose Ideen, welche die Zukunft ausmalen, das sind eben in Wirklichkeit, populär gesprochen, Utopien. Es hat also gar keinen Zweck, so sagt man, irgend etwas auszumalen, was in der Zukunft geschehen soll, denn es wird niemand da sein, der von seinen Interessen losläßt, der ergriffen werden kann in bezug auf sein Gewissen, in bezug auf seine sittliche Einsicht und so weiter. — Den Glauben an Gewissen und sittliche Einsicht hat man eben in weitesten Kreisen, namentlich bei den Vertretern der sozialen Frage, verloren. Man sagt sich, die Menschen handeln ja gar nicht nach ihrer Einsicht, wenn sie soziale Einrichtungen treffen oder wenn sie ihr soziales Leben führen, sie handeln nach ihrem Interesse. Und die Besitzenden haben selbstverständlich ein Interesse daran, in ihrem Besitz zu bleiben. Die sozial Bevorrechteten haben ein Interesse an der Erhaltung der sozialen Vorrechte. Daher ist es eine Illusion, darauf zu rechnen, daß man nur zu sagen braucht, die Leute sollen das oder jenes machen. Sie tun es eben nicht, weil sie nicht aus ihrer Einsicht, sondern aus ihrem Interesse heraus handeln.

Au sens le plus large, on peut dire que Karl Marx a peu à peu - mais vraiment peu à peu - adhéré à cette vue. On peut décrire toute une série d'époques dans la vie de Karl Marx. Dans sa jeunesse, Marx était aussi un penseur idéaliste et il pensait encore, dans le sens que je viens de caractériser, à la faisabilité des utopies. Mais c'est justement lui, et après lui son ami Engels, qui s'est écarté de la manière la plus radicale de ce calcul sur le discernement des humains. Et si je caractérise en général ce qui est en fait une grande histoire, je peux dire ceci : Karl Marx est finalement parvenu à la conviction que les choses ne pouvaient pas s'améliorer dans le monde d'une autre manière qu'en faisant appel aux humains qui n'ont pas intérêt à ce que leurs biens, leurs privilèges leur soient conservés. Ceux qui ont intérêt à ce que leurs biens soient préservés, ceux-là, on ne peut absolument pas les voir, on doit les laisser complètement de côté, car ils ne se laisseront jamais aller à faire quoi que ce soit, même si on leur fait de beaux sermons. En revanche, il y a justement la grande masse des ouvriers prolétaires [qui n'ont rien à perdre en termes de biens]. Karl Marx lui-même a vécu dans cette conviction à l'époque où ce que l'on appelle aujourd'hui le prolétariat était en train de naître en Europe centrale ; il a vu le prolétariat naître en Europe centrale à partir d'autres conditions économiques. Plus tard, lorsqu'il vivait en Angleterre, c'était un peu différent. Mais à l'époque où Karl Marx est passé de l'idéaliste au matérialiste économique, c'était encore comme si le prolétariat moderne était en train d'émerger en Europe centrale. Et maintenant, il se disait : ce prolétariat moderne a des intérêts tout à fait différents de ceux de la minorité dirigeante, car il se compose d'humains qui ne possèdent rien d'autre que leur force de travail, d'humains qui ne peuvent pas vivre autrement qu'en mettant leur force de travail au service des possédants, notamment au service des possesseurs des moyens de production. Lorsque ces travailleurs quittent leur travail, ils sont - c'était particulièrement vrai à l'époque, de la manière la plus radicale - jetés à la rue. Ils n'ont rien d'autre devant eux que la possibilité d'un front pour ceux qui sont les propriétaires des moyens de production. Ces gens ont un tout autre intérêt que ceux qui possèdent. Ils ont intérêt à ce que tout l'ordre social antérieur prenne fin, à ce que cet ordre social soit transformé. Il n'est pas nécessaire de leur prêcher de manière à ce qu'ils comprennent, mais seulement de manière à ce que leur égoïsme et leur intérêt soient saisis. On peut compter sur cela. Prêcher à ceux sur le discernement desquels on doit compter ne donne aucun résultat, car les humains n'agissent pas par discernement, ils n'agissent que par intérêt. Donc, on ne peut pas s'adresser à ceux chez qui on devrait faire appel au discernement, mais on doit faire appel aux intérêts de ceux qui ne peuvent pas faire autrement que de s'engager pour les temps modernes par contrainte intérieure. C'est l'égoïsme vers lequel Karl Marx a évolué. C'est pourquoi il n'a plus cru que le progrès de l'humanité vers des conditions sociales plus récentes pouvait provenir d'une autre œuvre humaine que celle du prolétariat lui-même. Selon Karl Marx, le prolétariat ne peut aspirer à un renouvellement des conditions sociales humaines qu'à partir de ses propres intérêts, de ses intérêts individuels et égoïstes. Et c'est ainsi que le prolétariat, non pas par philanthropie, mais par intérêt égoïste, libérera tout le reste de l'humanité, parce qu'il ne peut y avoir rien d'autre que ce qu'accomplissent les humains qui ne sont pas attachés aux vieux biens et qui n'ont rien à perdre des vieux biens en cas de transformation.

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Im umfassendsten Sinne, so kann man sagen, hat sich nach und nach -- aber wirklich erst nach und nach — zu dieser Ansicht Karl Marx bekannt. Man kann in dem Leben von Karl Marx eine ganze Anzahl von Epochen schildern. Marx war in seiner Jugend auch ein idealistischer Denker und hat auch noch in dem Sinn, wie ich es eben charakterisiert habe, an die Realisierbarkeit von Utopien gedacht. Aber er war es gerade, und nach ihm dann auch sein Freund Engels, der in der allerradikalsten Weise von dieser Rechnung auf die Einsicht der Menschen abgekommen ist. Und wenn ich im allgemeinen etwas charakterisiere, was eigentlich eine große Geschichte ist, so kann ich das folgende sagen: Karl Marx ist zuletzt zu der Überzeugung gekommen, daß es in der Welt nicht auf eine andere Art besser werden könne als dadurch, daß man diejenigen Menschen aufruft, die nicht ein Interesse daran haben, daß ihre Güter, daß ihre Vorrechte ihnen erhalten bleiben. Auf die, die ein Interesse haben, daß ihre Güter ihnen erhalten bleiben, auf diese könne man überhaupt nicht sehen, diese müsse man ganz aus der Rechnung lassen, denn sie würden sich niemals herbeilassen, irgendwie darauf einzugehen, wenn man ihnen noch so schön predigt. Demgegenüber gibt es gerade die große Masse der proletarischen Arbeiter, [die nichts an Gütern zu verlieren haben]. Karl Marx selbst lebte sich ja in diese Überzeugung hinein in der Zeit, als in Mitteleuropa das im Grunde erst entstand, was man heute das Proletariat nennt; er sah das Proletariat in Mitteleuropa erst entstehen aus anderen Wirtschaftsverhältnissen heraus. Als er später in England lebte, war das ja etwas anders. Aber in der Zeit, als Karl Marx sich vom Idealisten zum ökonomischen Materialisten entwickelte, da war es noch so, daß eigentlich in Mitteleuropa das moderne Proletariat erst heraufkam. Und nun sagte er sich: Dieses moderne Proletariat, das hat ganz andere Interessen als die leitende, führende Minderheit, denn es besteht aus Menschen, die nichts besitzen als ihre Arbeitskraft, aus Menschen, die auf keine andere Weise leben können als dadurch, daß sie ihre Arbeitskraft in den Dienst der Besitzenden, namentlich in den Dienst der Besitzenden der Produktionsmittel, stellen. Wenn diese Arbeiter ihre Arbeit verlassen, dann sind sie — das galt besonders für die damalige Zeit in radikalster Weise —, dann sind sie auf die Straße geworfen. Sie haben nichts anderes vor sich als die Möglichkeit einer Fron für diejenigen, die die Besitzer der Produktionsmittel sind. Diese Menschen haben ein ganz anderes Interesse als die Besitzenden. Sie haben ein Interesse daran, daß die ganze frühere Gesellschaftsord­nung aufhört, daß diese Gesellschaftsordnung umgewandelt wird. Denen braucht man nicht so zu predigen, daß ihre Einsicht ergrif­fen wird, sondern nur so, daß ihr Egoismus, ihr Interesse ergriffen werden. Darauf kann man sich verlassen. Zu predigen denjenigen, auf deren Einsicht man zählen soll, dabei kommt nichts heraus, denn die Menschen handeln nicht aus Einsicht, sie handeln nur nach Interessen. Also, man kann sich nicht an diejenigen wenden, bei denen man an die Einsicht appellieren müßte, sondern man muß an die Interessen derjenigen appellieren, die nicht anders können, als aus innerem Zwang heraus für die neuere Zeit eintreten. Das ist der Egoismus, zu dem Karl Marx sich hinentwickelt hat. Daher hat er nicht mehr geglaubt, daß der Fortschritt der Menschheit zu neueren sozialen Zuständen von anderem Menschenwerke herkommen könne als von dem Werke des Proletariats selbst. Das Proletariat könne nur, so meint Karl Marx, aus seinen Interessen, aus seinen einzelegoistischen Interessen her, eine Erneuerung der menschlichen sozialen Zustände erstreben. Und damit wird das Proletariat, aber jetzt nicht aus Menschenfreundlichkeit, sondern aus egoistischem Interesse, auch die ganze übrige Menschheit befreien, weil es nichts anderes mehr geben kann als dasjenige, was die Menschen bewirken, die nicht an alten Gütern hängen und bei einer Umwandlung nichts von alten Gütern zu verlieren haben.

On se dit donc : d'un côté, il y a les cercles dirigeants, leaders, qui ont certains droits qui leur ont été conférés dans le passé ou qui leur ont été imposés dans le passé, qui se sont transmis par héritage dans leurs familles, et ils s'y accrochent. Ces cercles dirigeants sont en possession de ceci ou de cela, qu'ils transmettent à leur tour au sein de leur cercle, de leur famille et ainsi de suite. Ces cercles ont toujours quelque chose à perdre lors d'une transformation, car bien sûr, s'ils ne perdaient rien, aucune transformation n'aurait lieu. Il s'agit en effet que ceux qui n'ont rien reçoivent quelque chose, donc ceux qui ont quelque chose ne peuvent que perdre. On ne pourrait donc faire appel au discernement que si ce discernement donnait à la classe dirigeante possédante l'impulsion de vouloir perdre quelque chose. Ils n'acceptent pas cela. - C'était le point de vue de Karl Marx. Il faut donc faire appel à ceux qui n'ont rien à perdre. C'est pourquoi le "Manifeste communiste" de 1848 se termine par ces mots : "Les prolétaires n'ont rien à perdre que leurs chaînes, mais ils ont tout à gagner. Prolétaires de tous les pays, unissez-vous !".

06

Man sagt sich also: Da sind auf der einen Seite die leitenden, führenden Kreise, die haben gewisse Rechte, die ihnen in früheren Zeiten verliehen worden sind oder die in früheren Zeiten von ihnen erzwungen worden sind, die sich vererbt haben in ihren Familien, an denen halten sie fest. Diese leitenden, führenden Kreise sind im Besitz von dem oder jenem, das vererben sie wiederum weiter innerhalb ihrer Kreise, ihrer Familie und so weiter. Diese Kreise haben bei einer Umwandlung immer etwas zu verlieren, denn selbstverständlich, wenn sie nichts verlören, würde ja keine Umwandlung geschehen. Es handelt sich ja darum, daß diejenigen, die nichts haben, etwas bekommen sollen, daher können diejenigen, die etwas haben, nur verlieren. Also man könnte nur an die Einsicht appellieren, wenn diese Einsicht der besitzenden, führenden Klasse den Impuls eingeben würde, etwas verlieren zu wollen. Darauf lassen sie sich nicht ein. — Das war die Anschauung von Karl Marx. Man muß also an diejenigen appellieren, die nichts zu verlieren haben. Deshalb schließt auch im Jahre 1848 das «Kommunistische Manifest» mit den Worten: «Proletarier haben nichts zu verlieren als ihre Ketten, sie haben aber alles zu gewinnen. Prole­tarier aller Länder, vereinigt euch!»

Eh bien, vous voyez, c'est devenu en quelque sorte une conviction depuis la publication du Manifeste communiste. Et aujourd'hui, alors que certains sentiments, déjà sous l'influence de cette conception, vivent justement dans la majorité du prolétariat, on ne peut plus vraiment s'imaginer quel énorme bouleversement s'est opéré dans la conception socialiste vers le milieu du XIXe siècle. Mais il serait bon que vous preniez quelque chose comme l'"Évangile d'un pauvre pécheur" de Weitling, un compagnon tailleur, qui a été écrit pas si longtemps avant le Manifeste communiste, et que vous le compariez à tout ce qui a été écrit après la parution du Manifeste communiste. Dans cet "Évangile d'un pauvre pécheur", vraiment empreint d'une authentique sensibilité prolétarienne, règne un langage ardent, on peut même dire poétique dans un certain sens, mais un langage qui veut absolument faire appel à la bonne volonté, au discernement des humains. C'est la conviction de Weitling que l'on peut faire quelque chose avec la bonne volonté des humains. Et cette conviction ne s'est affaiblie que vers le milieu du XIXe siècle. Et l'acte par lequel elle s'est affaiblie est justement la publication du Manifeste communiste. Et depuis cette époque, depuis 1848, nous pouvons en fait suivre ce que nous appelons aujourd'hui la question sociale. Car si nous voulions parler aujourd'hui comme Saint-Simon, comme Fourier, comme Weitling, oui, nous prêcherions aujourd'hui vraiment la sourde oreille. Car jusqu'à un certain point, il est tout à fait exact que l'on ne peut rien entreprendre dans la question sociale si l'on fait appel à la compréhension des cercles dirigeants, leaders, qui ont quelque chose. C'est tout à fait vrai. Ils ne le savent même pas s'ils le font, car des forces inconscientes jouent un rôle extrêmement important dans l'âme humaine.

07

Nun sehen Sie, das ist seit der Veröffentlichung des Kommu­nistischen Manifests gewissermaßen eine Überzeugung geworden. Und heute, wo gewisse Empfindungen, die schon unter dem Einfluß dieser Anschauung stehen, eben in der Majorität des Proletariats leben, heute kann man sich gar nicht mehr richtig vorstellen, was für ein ungeheurer Umschwung in der sozialisti­schen Anschauung um die Mitte des 19. Jahrhunderts sich voll­zogen hat. Aber es wäre gut, wenn Sie sich herbeiließen, so etwas zu nehmen wie das «Evangelium eines armen Sünders» von Weitling, einem Schneidergesellen, das gar nicht so lange Zeit vor dem Kommunistischen Manifest geschrieben worden ist, und wenn Sie das vergleichen würden mit alle dem, was nach dem Erscheinen des Kommunistischen Manifestes geschrieben ist. In diesem wirklich von echter proletarischer Empfindung eingege­benen «Evangelium eines armen Sünders» herrscht eine, man kann sagen, in gewissem Sinne sogar poetische, glühende Sprache, aber durchaus eine Sprache, die appellieren will an den guten Willen, an die Einsicht der Menschen. Das ist Weitlings Überzeu­gung, daß man etwas anfangen könne mit dem guten Willen der Menschen. Und diese Überzeugung, die ist erst um die Mitte des 19. Jahrhunderts geschwunden. Und die Tat, durch die sie ge­schwunden ist, ist eben die Publikation des Kommunistischen Manifestes. Und seit der Zeit, seit dem Jahre 1848, können wir eigentlich das verfolgen, was wir heute die soziale Frage nennen. Denn wenn wir heute so reden wollten wie Saint-Simon, wie Fourier, wie Weitling -- ja, wir würden heute wirklich ganz tauben Ohren predigen. Denn bis zu einem gewissen Grade ist es durchaus richtig, daß man in der sozialen Frage nichts an­fangen kann, wenn man an die Einsicht der leitenden, führenden Kreise appelliert, die etwas haben. Das ist schon richtig. Die leitenden, führenden Kreise haben das zwar niemals zugegeben, sie werden es auch heute kaum zugeben — sie wissen es gar nicht einmal, wenn sie es doch tun, denn da spielen unbewußte Kräfte in der menschlichen Seele eine außerordentlich große Rolle.

Vous voyez, au cours du XIXe siècle, notre culture spirituelle est presque entièrement devenue une phrase. Et le fait que nous vivions dans la phrase en ce qui concerne la culture spirituelle est un fait social beaucoup plus important qu'on ne le pense habituellement. Et donc, naturellement, les membres des cercles dirigeants, des cercles de direction, disent aussi toutes sortes de belles choses sur la question sociale, et ils sont eux-mêmes souvent convaincus qu'ils ont déjà la bonne volonté. Mais en réalité, ils ne font que le croire, ce n'est qu'une illusion ; dès que quelque chose de réel est entrepris dans ce domaine, il apparaît immédiatement qu'il s'agit d'une illusion. Nous en parlerons plus tard. Mais comme je l'ai dit, nous ne pouvons plus parler aujourd'hui comme nous le faisions à l'époque des utopies. C'est la véritable conquête de Karl Marx, qui a montré comment l'humanité est aujourd'hui tellement empêtrée dans l'illusionnisme que c'est un non-sens de compter sur autre chose que l'égoïsme. Il faut compter avec cela ; on ne peut donc rien obtenir si l'on veut compter d'une manière ou d'une autre sur l'altruisme, sur la bonne volonté, sur les principes moraux des humains - je dis toujours "en ce qui concerne la question sociale". Et ce revirement, qui nous a conduits à devoir parler aujourd'hui d'une toute autre manière que l'on pouvait par exemple encore parler de la question sociale dans la première moitié du XIXe siècle, ce revirement est justement arrivé avec le Manifeste communiste. Mais tout n'est pas arrivé d'un seul coup, mais il était tout de même possible qu'après le Manifeste communiste, jusque dans les années soixante, comme vous le savez tous - certains jeunes socialistes ont déjà oublié cette époque -, cette toute autre forme de pensée sociale, la forme de Ferdinand Lassalle, ait touché les cœurs et les âmes. Et même après la mort de Lassalle, survenue en 1864, ce qui était le socialisme de Lassalle s'est poursuivi. Lassalle fait partie de ces gens qui, malgré l'avènement d'un autre mode de pensée, comptaient encore sur la force de frappe des idées. Lassalle voulait encore saisir les humains en tant que tels dans leur compréhension, dans leur volonté sociale avant tout. Mais de plus en plus, cette nuance lassallienne diminuait et l'autre nuance, la nuance marxiste, qui ne voulait compter que sur les intérêts de cette partie de la population humaine qui ne possédait qu'elle-même et sa force de travail, prenait le dessus. Mais ce n'était pas si rapide. Une telle façon de penser ne s'est développée que peu à peu dans l'humanité.

08

Sehen Sie, es ist ja nun einmal unsere geistige Kultur im Laufe des 19. Jahrhunderts fast ganz zur Phrase geworden. Und daß wir mit Bezug auf die geistige Kultur in der Phrase leben, ist eine viel wichtigere soziale Tatsache, als man gewöhnlich meint. Und so reden natürlich die Angehörigen der leitenden, führenden Kreise auch über die soziale Frage allerlei schöne Dinge, und sie sind selbst oftmals überzeugt, daß sie schon den guten Willen hätten. Aber in Wirklichkeit glauben sie das nur, es ist nur ihre Illusion; in dem Augenblick, wo irgend etwas Reales in dieser Beziehung in Angriff genommen wird, kommt es auch gleich heraus, daß das eine Illusion ist. Davon wollen wir nachher noch sprechen. Aber wie gesagt, so können wir heute nicht mehr reden, wie im Zeitalter der Utopien geredet worden ist. Das ist die wirkliche Errungenschaft, die durch Karl Marx gekommen ist, daß er gezeigt hat, wie heute die Menschheit so in den Illusionismus hineinverstrickt ist, daß es ein Unsinn ist, auf etwas anderes zu rechnen als auf den Egoismus. Es muß damit einmal gerechnet werden; es kann daher gar nichts erreicht werden, wenn man auf die Selbstlosigkeit, auf den guten Willen, auf die sittlichen Grundsätze der Menschen — ich sage immer «in bezug auf die Soziale Frage» — irgendwie rechnen will. Und dieser Umschwung, der dazu geführt hat, daß wir eben heute ganz anders reden müssen, als zum Beispiel noch in der ersten Hälfte des 19. Jahrhunderts geredet werden konnte mit Bezug auf die soziale Frage, dieser Umschwung ist eben mit dem Kommunistischen Manifest gekommen. Aber es ist nicht alles auf einmal gekommen, sondern es war ja immerhin möglich, daß auch nach dem Kommunistischen Manifest noch bis in die sechziger Jahre hinein, wie Sie alle wissen werden — manche jüngere Sozialisten haben ja die Zeit schon vergessen —, diese ganz andere Art des sozialen Denkens, die Art des Ferdinand Lassalle, die Herzen, die Seelen ergriffen hat. Und auch nach dem Tode von Lassalle, der 1864 erfolgt ist, hat sich noch fortgesetzt dasjenige, was Lassallescher Sozialismus war. Lassalle gehört durchaus zu den Menschen, die, trotzdem die andere Denkweise schon heraufgekommen war, noch rechneten auf die Schlagkraft der Ideen. Lassalle wollte durchaus noch die Menschen als solche ergreifen in ihrer Einsicht, in ihrem sozialen Wollen vor allen Dingen. Aber immer mehr und mehr nahm diese Lassallesche Schattierung ab und nahm überhand die andere, die marxistische Schattierung, die nur rechnen wollte auf die Interessen desjenigen Teiles der menschlichen Bevölkerung, der nur sich selbst besaß und seine Arbeitskraft. Aber es ging immerhin nicht so schnell. Solch eine Denkweise entwickelte sich erst nach und nach in der Menschheit.

Dans les années soixante, soixante-dix, et même encore dans les années quatre-vingt, les gens qui appartenaient au prolétariat ou qui faisaient partie des gens politiquement ou socialement dépendants - même s'ils n'étaient pas exactement des prolétaires - jugeaient en quelque sorte moralement leur dépendance et condamnaient moralement les milieux non dépendants de la population humaine. Selon leur conscience, c'était de la mauvaise volonté de la part des cercles dirigeants, leaders, de la population humaine, qu'ils laissent la grande masse du prolétariat dans la dépendance, qu'ils la payent mal, etc. Si je peux m'exprimer trivialement, je peux dire que dans les années soixante, soixante-dix, jusque dans les années quatre-vingt, on fabriquait beaucoup d'indignation sociale et on parlait du point de vue de l'indignation sociale. Puis, au milieu des années quatre-vingt, l'étrange revirement s'est vraiment produit. Les personnalités les plus en vue du mouvement social ont alors complètement cessé de parler de la question sociale sur la base de l'indignation morale dans les années 80. C'était l'époque où les leaders sociaux, que vous, les plus jeunes, avez seulement vus mourir, étaient grands et plus ou moins encore animés par l'ardeur de leur jeunesse : Adler, Pernerstorfer, Wilhelm Liebknecht, Auer, Bebel, Singer et ainsi de suite. Ces dirigeants plus âgés ont justement cessé de plus en plus de prêcher ce socialisme d'indignation à l'époque, dans les années 80. Je voudrais dire que ces dirigeants du socialisme ont exprimé leur conviction intime lorsqu'ils ont transposé l'ancien socialisme d'indignation dans leur nouvelle vision socialiste du monde. Vous trouverez que ce que je vous dis maintenant ne figure dans aucun livre sur l'histoire du socialisme. Mais ceux qui ont vécu à l'époque et qui ont participé à cela savent que les gens, lorsqu'ils étaient livrés à eux-mêmes, parlaient ainsi.

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In den sechziger, siebziger Jahren, auch noch in den achtziger Jahren war es durchaus so, daß die Leute, die dem Proletariat angehörten oder die zu den Leuten gehörten, die politisch oder sozial abhängig — wenn auch nicht gerade Proletarier — waren, ihre Abhängigkeit gewissermaßen moralisch beurteilten und daß sie die nicht-abhängigen Kreise der menschlichen Bevölkerung moralisch verurteilten. Ihrem Bewußtsein nach war es böser Wille der leitenden, führenden Kreise der menschlichen Bevölkerung, daß sie die große Masse des Proletariats in Abhängigkeit ließen, daß sie sie schlecht bezahlten und so weiter. Wenn ich es trivial ausdrücken darf, so kann ich sagen, in den sechziger, siebziger Jahren, bis in die achtziger Jahre hinein, wurde viel soziale Entrüstung fabriziert und vom Standpunkt der sozialen Entrüstung aus gesprochen. Dann trat in der Mitte der achtziger Jahre der merkwürdige Umschwung eigentlich erst so recht ein. Die mehr führenden Persönlichkeiten der sozialen Bewegung, die hörten dann in den achtziger Jahren ganz auf, aus moralischer Entrüstung heraus über die soziale Frage zu sprechen. Das war ja die Zeit, in der groß waren und mehr oder weniger noch von jugendlichem Feuereifer durchglüht waren diejenigen sozialen Führer, die Sie, die Sie jünger sind, nur noch haben sterben sehen: Adler, Pernerstorfer, Wilhelm Liebknecht, Auer, Bebel, Singer und so weiter. Diese älteren Führer hörten gerade damals in den achtziger Jahren immer mehr auf, diesen Entrü­stungssozialismus zu predigen. Ich möchte es so ausdrücken, daß diese Führer des Sozialismus ihre innerste Überzeugung aussprachen, als sie damals den alten Entrüstungssozialismus überleiteten in ihre neuere sozialistische Weltanschauung. Sie werden finden, was ich Ihnen jetzt sage, das stehe ja in keinem Buche über die Geschichte des Sozialismus. Aber wer dazumal gelebt hat und das mitgemacht hat, der weiß, daß die Leute, wenn sie sich selbst überlassen waren, so geredet haben.

Supposons que dans les années quatre-vingt, des dirigeants du socialisme se soient réunis pour discuter avec des bourgeois [purs] dans leurs convictions, et supposons qu'il y ait eu une troisième sorte : des bourgeois idéalistes qui voulaient du bien à tous les humains, qui auraient été d'accord pour rendre tous les humains heureux. Il aurait pu arriver que les bourgeois déclarent qu'il faut toujours qu'il y ait des gens pauvres et des gens riches, et ainsi de suite, car c'est la seule façon de maintenir la société humaine. Alors peut-être que la voix de l'un de ces idéalistes qui s'indignaient de voir tant de gens vivre dans la pauvreté et la dépendance se serait élevée. Un tel humain aurait peut-être dit : "Oui, il faut y parvenir, il faut faire comprendre à ces gens qui possèdent, aux entrepreneurs, aux capitalistes, qu'ils doivent renoncer à leurs biens, qu'ils doivent prendre des mesures qui permettront à la grande masse de changer de situation, et ainsi de suite. - De très beaux discours auraient pu être prononcés sur cette base. Mais alors, quelqu'un qui, à l'époque, venait de s'initier au socialisme et à son évolution, aurait élevé la voix et dit : "Qu'est-ce que vous racontez, vous êtes un enfant ; tout cela n'est qu'enfantillages, absurdités ! Les gens qui sont des capitalistes, des entrepreneurs, ce sont tous de pauvres sbires, ils ne savent rien d'autre que ce qu'on leur a inculqué depuis des générations. S'ils entendaient dire qu'ils devraient faire autrement, ils ne pourraient même pas le faire, car ils ne sauraient pas comment s'y prendre. Cela ne rentre pas du tout dans leur crâne que l'on puisse faire quelque chose différemment. Il ne faut pas accuser les gens, il ne faut pas condamner moralement les gens, ils ne sont pas du tout à condamner moralement ; les gars ont grandi dans ce milieu, ces pauvres sbires, dans tout ce milieu, et ça les inspire avec les idées qu'ils ont. Les accuser moralement, c'est ne rien comprendre aux lois de l'évolution de l'humanité, c'est se bercer d'illusions. Ces humains ne peuvent jamais vouloir que le monde prenne une autre forme. Parler d'eux avec indignation, c'est de l'enfantillage pur et simple. Tout cela est devenu ainsi par nécessité, et cela ne peut devenir différent que par nécessité. Vous voyez, on ne peut rien faire avec ces gars qui croient pouvoir prêcher aux possédants, aux capitalistes, qu'il faut instaurer un nouvel ordre mondial, on ne peut rien faire avec ces gars ; on ne peut pas instaurer un nouvel ordre mondial avec eux ; ils ne font que s'adonner à la croyance que l'on peut accuser ces pauvres sbires de capitalistes de faire un autre monde. - Je dois dire les choses un peu clairement, c'est pourquoi certaines choses sont dites avec des contours nets, mais de telle manière que vous avez pu entendre partout les discours dont je parle. Quand on les écrivait, on les retouchait un peu, on les écrivait un peu différemment, mais c'était la base. Puis ils ont continué à parler : avec ces gars - ce sont des idéalistes, ils se représentent le monde en termes d'idéologie -, on ne peut rien faire avec eux. Nous devons compter sur ceux qui n'ont rien, qui veulent donc quelque chose de différent de leurs intérêts que ceux liés aux intérêts capitalistes. Et ceux-là n'aspireront pas non plus à un changement de situation en vertu d'un quelconque principe moral, mais uniquement par convoitise, pour avoir plus que ce qu'ils avaient jusqu'à présent, pour avoir une existence indépendante.

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Nehmen wir einmal an, es seien in den achtziger Jahren solche führenden Leute des Sozialismus zu einer Diskussion zusammengekommen mit solchen, die [reine] Bourgeois waren in ihren Gesinnungen, und nehmen wir an, es wäre noch eine dritte Sorte dabeigewesen: Bourgeois, die Idealisten waren und allen Menschen Gutes wünschten, die damit einverstanden gewesen wären, alle Menschen glücklich zu machen. Da hätte es geschehen können, daß die Bourgeois erklärten, es müsse immer Leute geben, die arm sind, und solche, die reich sind, und so weiter, denn nur das könne die menschliche Gesellschaft aufrechterhalten. Dann hätte sich vielleicht die Stimme eines von denjenigen erhoben, welche Idealisten waren, die da entrüstet waren darüber, daß so viele Leute in Armut und Abhängigkeit leben mußten. So einer hätte dann vielleicht gesagt: Ja, das muß erreicht werden, daß klargemacht wird diesen besitzenden Leuten, den Unternehmern, den Kapitalisten, daß sie loslassen müssen von ihrem Besitz, daß sie Einrichtungen treffen müssen, durch welche die große Masse in eine andere Lage kommt, und dergleichen. — Da könnten sehr schöne Reden gehalten werden aus diesen Tönen heraus. Dann aber hätte solch einer seine Stimme erhoben, der damals sich gerade hineinfand in den Sozialismus und seinen Werdegang, und hätte gesagt: Was reden Sie da, Sie sind ein Kind; das ist alles Kinderei, alles Unsinn! Die Leute, die da Kapitalisten sind, die Unternehmer sind, das sind alles arme Hascherin, die wissen nichts anderes, als was ihnen eingebleut worden ist von Generationen her. Wenn die auch hören, sie sollten es anders machen, dann könnten sie es nicht einmal, denn sie kämen nicht darauf, wie sie es machen sollten. So etwas geht gar nicht in ihre Schädel hinein, daß man etwas anders machen kann. Man darf nicht die Leute anklagen, man darf nicht die Leute moralisch verurteilen, die sind gar nicht moralisch zu verurteilen; die Kerle sind da hineingewachsen, diese armen Hascherin, in das ganze Milieu, und das inspiriert sie mit den Ideen, die sie haben. Sie moralisch anklagen heißt, nichts verstehen von den Gesetzen der Menschheitsentwicklung, heißt, sich Illusionen hingeben. Diese Menschen können niemals wollen, daß die Welt eine andere Form annimmt. Mit Entrüstung von ihnen zu sprechen, ist die pure Kinderei. Das ist alles notwendig so geworden, und anders kann das auch wiederum nur durch Notwendigkeit werden. Seht ihr, mit solchen kindischen Kerlen, die da glauben, sie könnten den Besitzenden, den Kapitalisten predigen, es solle eine neue Weltordnung heraufgeführt werden, mit solchen kindischen Kerlen kann man nichts anfangen; mit ihnen ist keine neue Weltordnung herbeizuführen; die geben sich nur dem Glauben hin, daß man anklagen kann diese armen Hascherin von Kapitalisten, daß sie eine andere Welt machen sollten. — Ich muß die Sache etwas deutlich aussprechen, daher ist manches in scharfen Konturen gesagt, aber doch so, daß Sie die Reden, von denen ich spreche, durchaus überall hören konnten. Wenn sie geschrieben wurden, dann wurden sie ja ein bißchen retuschiert, ein bißchen anders geschrieben, aber das lag zugrunde. Dann redeten sie weiter: Mit diesen Kerlen — das sind Idealisten, die stellen sich die Welt im Sinne einer Ideologie vor —, mit denen ist nichts anzufangen. Wir müssen uns auf diejenigen verlassen, die nichts haben, die daher etwas anderes wollen aus ihren Interessen heraus als die, die mit kapitalistischen Interessen verbunden sind. Und die werden auch nicht aus irgendeinem moralischen Grundsatz eine Änderung der Lebenslage anstreben, sondern nur aus Begehrlichkeit, um mehr zu haben als sie bisher hatten, um ein unabhängiges Dasein zu haben.

Cette manière de penser est apparue de plus en plus dans les années quatre-vingt, de ne plus concevoir l'évolution de l'humanité dans le sens où l'individu est particulièrement responsable de ce qu'il fait, mais qu'il fait ce qu'il doit faire en raison de la situation économique. Le capitaliste, l'entrepreneur, écrase les autres dans la plus grande innocence. Celui qui est prolétaire, non pas en vertu d'un principe moral, mais en toute innocence, en raison d'une nécessité humaine, va révolutionner et prendre les moyens de production, le capital, des mains de ceux qui justement le possèdent. Cela doit se dérouler comme une nécessité historique. - Cette façon de penser monta.

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Diese Denkweise kam in den achtziger Jahren immer mehr und mehr herauf, die Menschheitsentwicklung nicht mehr in dem Sinne aufzufassen, daß der einzelne Mensch besonders verantwortlich ist für das, was er tut, sondern daß er tut, was er aus der wirtschaft­lichen Lage heraus tun muß. Der Kapitalist, der Unternehmer, schindet die anderen in höchster Unschuld. Derjenige, der Proletarier ist, der wird nicht aus einem sittlichen Grundsatz, sondern in aller Unschuld aus einer menschlichen Notwendigkeit heraus revolutionieren und die Produktionsmittel, das Kapital, aus den Händen derjenigen nehmen, die es eben haben. Das muß sich abspielen als eine geschichtliche Notwendigkeit. — Diese Denkweise kam herauf.

Eh bien, voyez-vous, ce n'est qu'en 1891, au congrès d'Erfurt, que tout le lassallianisme, qui était encore basé sur la compréhension des humains, s'est transformé en croyance dans le soi-disant "programme d'Erfurt", qui était destiné à faire du marxisme la vision officielle du prolétariat. Si vous lisez les programmes des congrès de Gotha et d'Eisenach, vous y trouverez deux revendications authentiquement prolétariennes de l'époque, qui sont encore liées au lassallianisme. La première revendication était l'abolition du rapport salarial ; la deuxième revendication était l'égalité politique de tous les humains, l'abolition de tous les privilèges politiques. Toutes les revendications prolétariennes jusqu'aux années 1990, jusqu'au congrès d'Erfurt qui a apporté le grand changement, sont parties de ces deux revendications. Regardez une fois ces deux revendications exactement et comparez-les avec les principales revendications du congrès d'Erfurt. Quelles sont les principales revendications du congrès d'Erfurt ? Ce sont les suivantes : Transfert de la propriété privée des moyens de production à la propriété commune ; gestion de toute la production de biens, de toute la production par une sorte de grande coopérative, en laquelle l'État actuel doit se transformer. Comparez l'ancien programme, qui était le programme prolétarien des années quatre-vingt, avec celui qui est issu du programme du parti d'Erfurt et qui existe depuis les années quatre-vingt-dix. Vous verrez que dans l'ancien programme de Gotha et d'Eisenach, les exigences du socialisme sont encore des exigences purement humaines : égalité politique de tous les humains, abolition du rapport salarial dégradant. Au début des années quatre-vingt-dix, ce que je vous ai décrit comme l'état d'esprit qui s'est développé au cours des années quatre-vingt a déjà agi. Ce qui était encore une exigence de l'humanité s'est transformé en une exigence purement économique. Vous ne lisez plus rien sur l'idéal d'abolir le rapport salarial, vous ne lisez que des revendications économiques.

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Nun, sehen Sie, es war eigentlich erst im Jahre 1891 auf dem Erfurter Parteitag, als dann aller Lassallianismus, der eben doch noch auf die Einsicht der Menschen basiert war, überging in den Glauben an das sogenannte «Erfurter Programm», welches bestimmt war, den Marxismus zur offiziellen Anschauung des Proletariats zu machen. Lesen Sie die Programme des Gothaer, des Eisenacher Parteitages durch, da werden Sie zwei Forderungen finden als echt proletarische Forderungen der damaligen Zeit, die noch zusammenhängen mit Las sallianismus. Die erste Forderung war: die Abschaffung des Lohnverhältnisses; die zweite Forderung war: die politische Gleichstellung aller Menschen, die Abschaffung aller politischen Vorrechte. Auf diese beiden Forderungen gingen alle proletarischen Forderungen aus bis zu den neunziger Jahren, bis zu dem Erfurter Parteitag, der den großen Umschwung brachte. Schauen Sie einmal diese beiden Forderungen genau an, und vergleichen Sie sie mit den Hauptforderungen des Erfurter Parteitages. Welches sind nun die Hauptforderungen des Erfurter Parteitages? Es sind: Überführung des Privateigentums an Produktionsmitteln in das gemeinschaftliche Eigentum; Verwaltung aller Gütererzeugung, aller Produktion durch eine Art große Genossenschaft, in welche sich umzuwandeln hat der bisherige Staat. Vergleichen Sie das ehemalige Programm, welches das proletarische Programm der achtziger Jahre war, mit demjenigen, was aus dem Erfurter Parteiprogramm hervorgegangen ist und seit den neunziger Jahren existiert. Sie werden sehen, im alten Gothaer und Eisenacher Programm sind die Forderungen des Sozialismus noch rein menschliche Forderungen: politische Gleichheit aller Menschen, Abschaffung des entwürdigenden Lohnverhältnisses. Im Anfang der neunziger Jahre hat schon gewirkt dasjenige, was ich Ihnen charakterisiert habe als die Gesinnung, die im Laufe der achtziger Jahre her­aufgekommen ist. Da ist verwandelt worden das, was noch mehr Menschheitsforderung war, in eine rein wirtschaftliche Forderung. Da lesen Sie nichts mehr von dem Ideal, das Lohnverhältnis ab­zuschaffen, da lesen Sie nur von Wirtschaftsforderungen.

Eh bien, vous voyez, ces choses sont liées à la formation progressive de l'idée que l'on avait de la réalisation extérieure d'un meilleur état social de l'humanité. Il a souvent été dit par ces gens qui avaient encore des idéaux : ah, quel dommage cela fait-il de tout casser, il faut bien qu'un autre ordre se mette en place ; il faut donc qu'il y ait une révolution, il faut que tout soit cassé, il faut qu'il y ait une grande claque, car c'est seulement de là que peut naître un meilleur ordre social. - C'est ce que disaient encore certaines personnes dans les années 80, qui étaient de bons socialistes idéalistes. On leur répondait par d'autres, ceux qui étaient à la hauteur, qui étaient devenus les leaders - ceux qui, comme je l'ai dit, sont maintenant enterrés -, qui disaient : tout cela n'a pas de sens, des révolutions aussi soudaines n'ont aucun sens. La seule chose qui ait un sens, c'est que nous abandonnions le capitalisme à lui-même. Nous voyons bien qu'auparavant, il n'y avait que de petits capitalistes, puis ils sont devenus grands ; ils se sont associés à d'autres, sont devenus des groupes de capitalistes. Les capitaux se sont de plus en plus concentrés. C'est dans ce processus que nous nous trouvons, à savoir que les capitaux sont de plus en plus concentrés. Le temps viendra où il n'y aura plus que quelques grands trusts et consortiums capitalistes. Il sera alors nécessaire que le prolétariat, en tant que classe non possédante, transmette un beau jour, de manière tout à fait pacifique, par voie parlementaire, la propriété capitaliste, les moyens de production, à la propriété commune. Cela peut être très bien fait, mais il faut attendre. D'ici là, les choses doivent évoluer. Le capitalisme, qui est en fait un enfant innocent, n'y peut rien s'il est inhumain - c'est la nécessité historique qui l'impose. Mais il travaille aussi à l'avance, car il concentre les capitaux ; ils sont alors bien groupés, il suffit qu'ils soient repris par la collectivité. Il ne s'agit pas d'une révolution rapide, mais d'une évolution lente.

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Nun, sehen Sie, diese Sachen hängen dann zusammen mit dem allmählichen Ausbilden der Idee, die man hatte über die äußerliche Herbeiführung eines besseren sozialen Zustandes der Menschheit. Es ist auch oftmals von solchen Leuten, die noch Ideale hatten, gesagt worden: Ach, was schadet es denn, wenn man alles kurz und klein schlägt, es muß ja eine andere Ord­nung herbeigeführt werden; also, es muß eine Revolution kom­men, es muß alles kurz und klein geschlagen werden, es muß der große Kladderadatsch kommen, denn nur daraus kann eine bessere Gesellschaftsordnung entstehen. — Das sagten noch man­che Leute in den achtziger Jahren, die gute, idealistische Sozia­listen waren. Denen wurde geantwortet von den anderen, die auf der Höhe der Zeit standen, die die Führer geworden waren — diejenigen, die jetzt, wie ich sagte, begraben sind —, die sagten: Das hat alles keinen Sinn, solche plötzlichen Revolutionen sind sinnlos. Das einzige, was Sinn hat, das ist, daß wir den Kapita­lismus sich selber überlassen. Wir sehen ja, früher gab es nur kleine Kapitalisten, dann sind es große geworden; sie haben sich zusammengetan mit anderen, sind zu Kapitalistengruppen ge­worden. Die Kapitalien haben sich immer mehr konzentriert. In diesem Prozeß sind wir drinnen, daß die Kapitalien immer mehr und mehr konzentriert werden. Dann wird die Zeit kommen, wo eigentlich nur noch einige wenige große kapitalistische Trusts, Konsortien vorhanden sind. Dann wird es nur noch notwendig sein, daß das Proletariat, als die nichtbesitzende Klas­se, eines schönen Tages auf ganz friedliche Weise, auf parlamen­tarischem Wege, den Kapitalistenbesitz, die Produktionsmittel, überführt in den Gemeinschaftsbesitz. Das kann ganz gut ge­macht werden, aber man muß abwarten. Bis dahin müssen sich die Dinge entwickeln. Der Kapitalismus, der eigentlich ein unschuldiges Kind ist, kann ja nichts dafür, daß er menschenschin­derisch ist — das bringt die geschichtliche Notwendigkeit herauf. Er arbeitet aber auch vor, denn er konzentriert die Kapitalien; sie sind dann schön beieinander, dann brauchen sie nur über­nommen zu werden von der Allgemeinheit. Nichts von rascher Revolution, sondern langsame Entwicklung.

Vous voyez, le secret de la vision, le secret public de la vision, qui est à la base de tout cela, a été joliment expliqué par Engels dans les années 90. Il a dit : "Pourquoi des révolutions rapides ? Ce qui se passe lentement dans le développement du nouveau capitalisme, ce regroupement des capitaux, cette concentration des capitaux, tout cela travaille pour nous. Nous n'avons pas besoin de créer une communauté, les capitalistes le font déjà. Nous n'avons qu'à le transformer en propriété prolétarienne. C'est pourquoi - dit Engels - les rôles se sont en fait inversés. Nous, qui représentons le prolétariat, n'avons pas à nous plaindre de l'évolution, ce sont les autres qui doivent se plaindre. Car les gars qui sont aujourd'hui dans les cercles des possédants doivent se dire : nous accumulons les capitaux, mais nous les accumulons pour les autres. Voyez, ces types doivent en fait s'inquiéter de perdre leurs capitaux ; ils ont les joues creuses, ils se dessèchent à force de se demander ce qui va se passer. En tant que socialistes, nous nous épanouissons très bien dans cette évolution. Engels dit que nous avons les muscles saillants et les joues pleines et que nous ressemblons à la vie éternelle. - C'est ce que dit Engels dans une introduction qu'il a écrite dans les années 1990, en décrivant comment ce qui se développe est tout à fait juste, et comment il suffit d'attendre le développement, qui est en fait assuré par le capitalisme lui-même. Cette évolution débouche ensuite sur le transfert de ce que le capitalisme a d'abord concentré dans la propriété commune de ceux qui n'avaient rien jusqu'alors. - C'était en fait l'état d'esprit dans lequel les cercles dirigeants du prolétariat sont entrés au XXe siècle.

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Sehen Sie, das Geheimnis der Anschauung, das öffentliche Ge­heimnis der Anschauung, das da zugrundeliegt, hat ja in den neun­ziger Jahren Engels schön auseinandergesetzt. Er hat gesagt: Wozu schnelle Revolutionen? Dasjenige, was langsam geschieht unter der Entwicklung des neueren Kapitalismus, dieses Zusammenrotten der Kapitalien, dieses Konzentrieren der Kapitalien, das arbeitet ja alles für uns. Wir brauchen nicht erst eine Gemeinsamkeit herzustellen, die Kapitalisten machen das schon. Wir brauchen es nur überzuführen in den proletarischen Besitz. Daher — sagt Engels — haben sich eigentlich die Rollen vertauscht. Wir, die wir das Pro­letariat vertreten, haben uns ja gar nicht zu beklagen über die Entwicklung, die anderen haben sich zu beklagen. Denn die Kerle, die heute in den Kreisen der besitzenden Leute sind, die müssen sich sagen: Wir sammeln die Kapitalien an, aber für die anderen sammeln wir sie an. Seht, die Kerle müssen sich eigentlich sorgen, daß sie ihre Kapitalien verlieren; die kriegen eingefallene Backen, die werden dürr von diesen Sorgen, was da werden soll. Wir gedei­hen gerade als Sozialisten sehr gut in dieser Entwicklung drin. Wir kriegen, sagt Engels, pralle Muskeln und volle Backen und sehen aus wie das ewige Leben. — Das sagt Engels in einer Einleitung, die er in den neunziger Jahren schrieb, indem er charakterisierte, wie es ganz recht ist, was sich da herausentwickelt, und wie man nur abzuwarten brauchte die Entwicklung, die eigentlich durch den Kapitalismus von selber besorgt wird. Diese Entwicklung mündet dann ein in die Überführung desjenigen, was der Kapitalismus erst konzentriert hat, in den Gemeinbesitz derer, die bisher nichts gehabt haben. — Das war eigentlich die Stimmung, in der das 20. Jahrhundert von den führenden Kreisen des Proletariats betreten worden ist.

Et c'est ainsi qu'on a pensé, surtout depuis l'époque où le marxisme n'a plus été pris comme dans les années 1990, mais où il a été soumis à une révision, comme on disait, à l'époque où sont apparus les révisionnistes, c'est-à-dire ceux qui sont encore vivants aujourd'hui, mais qui sont des vieux, comme Bernstein par exemple. C'est donc là que les révisionnistes sont arrivés. Ils disaient qu'il était possible d'encourager un peu toute l'évolution, car si les travailleurs se contentent de travailler jusqu'à ce que les capitalistes aient tout rassemblé, ils seront encore dans le besoin avant, notamment lorsqu'ils seront âgés, ils n'auront rien. On a donc créé des assurances et ainsi de suite ; et surtout, on a veillé à s'approprier ce que les classes dirigeantes avaient comme institutions dans la vie politique. Vous savez, c'est à cette époque qu'est née la vie syndicale.

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Und so hat man gedacht, besonders seit der Zeit, in der der Marxismus nicht mehr so genommen worden ist wie in den neunziger Jahren, sondern als er einer Revision, wie man sagte, unterzogen worden ist, in der Zeit, als die Revisionisten auftraten, also diejenigen, die heute noch leben, aber alte Leute sind, wie zum Beispiel Bernstein. Da kamen also die Revisionisten. Die sagten, man kann die ganze Entwicklung etwas fördern, denn wenn die Arbeiter bloß arbeiten, bis die Kapitalisten alles zusammengescharrt haben, werden sie doch vorher noch Not leiden, namentlich im Alter haben sie nichts. Da wurden dann Versicherungen gemacht und so weiter; und vor allen Dingen sah man darauf, daß man dasjenige, was die führenden Klassen hatten als Einrichtungen im politischen Leben, daß man sich das auch aneignete. Sie wissen, damals entstand ja namentlich auch das gewerkschaftliche Leben.

Et à l'intérieur du parti socialiste, il y avait deux tendances fortement divergentes : le parti syndical et le parti politique proprement dit, comme on disait alors. Le parti politique se tenait plus sur le terrain, une révolution soudaine ne servirait à rien, l'évolution devait se dérouler comme je viens de le décrire. Il s'agissait donc de tout préparer pour le moment où le capitalisme serait suffisamment concentré et où le prolétariat aurait la majorité dans les parlements. Tout doit être poursuivi par la voie du parlementarisme, de l'appropriation de la majorité, afin qu'au moment où les moyens de production seront transférés à la propriété commune, il y ait aussi la majorité pour ce transfert. C'est notamment dans ce groupe de personnes qui pensaient tout du parti politique que l'on ne pensait pas beaucoup au mouvement syndical à la fin du XIXe siècle. À cette époque, celui-ci s'efforçait justement d'instaurer une sorte de compétition ordonnée entre lui et les entrepreneurs, afin d'obtenir de temps en temps des entreprises des augmentations de salaire et des choses similaires. Bref, on s'est arrangé pour imiter le système de négociations réciproques qui existait entre les milieux dirigeants, entre les dirigeants eux-mêmes, et on l'a étendu aux relations entre les milieux dirigeants et le prolétariat. Vous savez que les représentants du système socialiste proprement politique ont particulièrement accusé ceux qui sont devenus les plus bourgeois du mouvement syndical. Et à la fin des années quatre-vingt-dix et au début du XXe siècle, on pouvait voir partout, chez ceux qui étaient plus orientés vers le système politique, un grand mépris pour les gens qui s'étaient entièrement plongés dans la vie syndicale, notamment les typographes, qui avaient à leur tour développé un tout autre système de vie syndical, jusqu'à l'extrême.

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Und innerhalb der sozialistischen Partei waren das die zwei stark divergierenden Richtungen: die ausgesprochene Gewerkschaftspartei und die eigentliche, wie man damals sagte, politische Partei. Die politische Partei stand mehr auf dem Boden, eine plötzliche Revolution nütze nichts, die Entwicklung müsse so vor sich gehen, wie ich es eben beschrieben habe. Daher handle es sich darum, daß alles vorbereitet werde auf den einen Zeitpunkt, wo der Kapitalismus genügend konzentriert ist und das Proletariat in den Parlamenten die Majorität hat. Es müsse alles auf dem Wege des Parlamentarismus, der Aneignung der Majorität, fortgetrieben werden, damit an dem Zeitpunkte, wo die Produktionsmittel in den Gemeinbesitz übernommen werden sollten, dann auch die Majorität für diese Überführung da ist. Namentlich in dieser Gruppe von Leuten, die alles von der politischen Partei hielten, da hielt man am Ende des 19. Jahrhunderts nicht sehr viel von der gewerkschaftlichen Bewegung. Diese setzte sich in jener Zeit eben dafür ein, so eine Art Wettkampf in geordneter Art zwischen sich und den Unterneh­mern einzurichten, um von Zeit zu Zeit immer wieder von den Unternehmungen Lohnerhöhungen und ähnliche Dinge herauszu­bekommen. Kurz, man stellte sich so ein, daß man nachmachte jenes System gegenseitiger Verhandlungen, wie es unter den leitenden, führenden Kreisen untereinander selbst vorhanden war, daß man dieses auch ausdehnte auf das Verhältnis zwischen den leitenden Kreisen und dem Proletariat. Sie wissen ja, daß ganz besonders angeklagt wurden von den Vertretern des eigentlich politischen sozialistischen Systems diejenigen, die dann am meisten bürgerlich wurden unter der Gewerkschaftsbewegung. Und am Ende der neunziger Jahre und am Anfang des 20. Jahrhunderts konnte man überall sehen bei denjenigen, die mehr auf das politische System eingerichtet waren, die große Verachtung für jene Leute, die sich ganz eingefuchst hatten auf das gewerkschaftliche Leben, namentlich zum Beispiel die Buchdrucker, die wiederum ein ganz anderes System gewerkschaftlichen Lebens bis zum Extrem ausgebildet hatten.

Il s'agissait de deux tendances très distinctes dans la vie sociale : les syndicalistes et ceux qui penchaient plutôt vers le parti politique. Et au sein des syndicats, les typographes de l'association des typographes étaient justement les garçons modèles ; ils étaient les garçons modèles qui avaient acquis la pleine reconnaissance des cercles bourgeois. Et je crois que, de même que l'on a eu une certaine crainte, une certaine inquiétude à l'égard du parti politique socialiste, on a vu peu à peu émerger avec une grande satisfaction des gens aussi braves que les gens de l'association des typographes. On se disait à leur sujet : ils s'embourgeoisent, on peut toujours négocier avec eux, ça se passe très bien. S'ils s'en prennent à leurs salaires, nous nous en prenons à nos prix, que nous exigeons. Ça marche. - Et, n'est-ce pas, c'était aussi possible pour les années suivantes, et les gens ne pensent pas plus loin. On était donc très satisfait de cette formation exemplaire du développement syndical. Eh bien, si j'omets quelques nuances, on peut dire que ces deux directions se sont plus ou moins développées jusqu'à l'époque où la catastrophe de la guerre mondiale les a surpris. Mais malheureusement, les gens n'ont pas appris de cette catastrophe mondiale tout ce qui aurait dû être appris en ce qui concerne la question sociale.

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Das waren zwei ganz streng voneinander geschiedene Richtungen im sozialen Leben: die Gewerkschafter und diejenigen, die mehr der politischen Partei zuneigten. Und innerhalb der Gewerkschaften waren ja die Buchdrucker im Buchdruckerverband geradezu die Musterknaben; sie waren diejenigen Musterknaben, die sich ja auch die volle Anerkennung der bürgerlichen Kreise erworben hatten. Und ich glaube, daß ebenso, wie man eine gewisse Angst gehabt hat, eine gewisse Sorge gehabt hat über die politische sozialistische Partei, so hat man nach und nach mit großer Befriedigung heraufkommen sehen solche braven Leute wie die Leute im Buchdruckerverband. Von denen sagte man sich: Die verbürgerlichen sich, mit denen kann man immer verhandeln, das geht ganz gut. Wenn die aufschlagen mit ihren Löhnen, dann schlagen wir auf mit unseren Preisen, die wir fordern. Das geht. — Und, nicht wahr, für die nächsten Jahre ging es auch, und weiter denken die Leute ja auch nicht. Also da war man mit dieser musterhaften Ausbildung der gewerkschaftlichen Entwicklung sehr zufrieden. Nun ja, wenn ich einiges auslasse, was mehr Nuancen sind, kann man sagen, daß sich dann diese beiden Richtungen mehr oder weniger herausgebildet haben bis in die Zeiten, die dann überrascht worden sind von der Weltkriegskatastrophe. Aber da haben die Leute leider von dieser Weltkriegskatastrophe ja nicht alles gelernt, was mit Be‑zug auf die soziale Frage eigentlich hätte gelernt werden sollen.

N'est-ce pas, si l'on considère les rapports à l'est de l'Europe, en Europe centrale, si l'on fait abstraction du monde anglo-américain et en partie du monde roman, si l'on se limite donc à l'Europe centrale et orientale, on peut dire qu'il n'y a rien de juste dans cette histoire, que l'on a toujours définie ainsi : Les capitaux se concentrent et, lorsque l'on aura la majorité dans les parlements, les capitaux seront transférés à la communauté, et ainsi de suite. - La catastrophe de la guerre mondiale a fait en sorte que l'on ne puisse pas s'y attendre aussi facilement aujourd'hui. Ceux qui s'attendaient à une révolution quelconque ont souvent été considérés comme des enfants, mais au fond, que s'est-il passé au cours des quatre ou cinq dernières années ? Gardons à l'esprit ce qui s'est passé de manière claire et nette. N'est-ce pas, vous l'avez souvent entendu, ce qui s'est passé au cours des quatre ou cinq dernières années : en juillet 1914, les gouvernements sont devenus un peu "tordus" - ou très "tordus" - et ont poussé les gens à la guerre mondiale. Les gens ont cru qu'il y avait une guerre mondiale, que des batailles avaient eu lieu - mais avec les moyens de guerre modernes, avec les moyens mécaniques, il y avait quelque chose de tout à fait différent que dans les guerres précédentes. Il n'y avait plus aucune possibilité que quelqu'un devienne un général particulièrement célèbre, car tout dépendait finalement de la quantité de munitions et d'autres moyens de guerre dont disposait l'un des deux partis, si l'un fabriquait mieux que l'autre les moyens de guerre mécaniques ou avait découvert un gaz et d'autres choses de ce genre que les autres n'avaient pas. D'abord l'un gagnait, puis l'autre découvrait à nouveau quelque chose, puis le premier à nouveau ; tout cela était une guerre terriblement mécanique. Et tout ce qui a été dit sur ce qui s'est passé ici et là de la part des humains, c'était sous l'influence de la phrase, c'était tout à fait de la phrase. Et peu à peu, l'humanité moderne comprendra, même en Europe centrale, tout ce qu'il y a eu comme phrases dans le fait que l'un ou l'autre, qui n'était en fait rien d'autre qu'un soldat moyen un peu tordu, a été transformé en un grand général en Europe centrale. Ces choses n'ont été possibles que sous l'influence de la phrase. Eh bien, c'est ce qui s'est passé.

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Nicht wahr, sobald man nun betrachtet die Verhältnisse im Osten von Europa, in Mitteleuropa, wenn man absieht von der eigentlich anglo-amerikanischen Welt und zum Teil auch von der romanischen Welt, wenn man sich also auf Mittel- und Osteuropa beschränkt, so kann man sagen, mit dieser Geschichte ist eigentlich nichts Rechtes geworden, die man immer so definiert hat: Die Kapitalien konzentrieren sich, und, wenn man in den Parlamenten die Majorität haben wird, dann werden die Kapitalien in den Besitz der Gemeinschaft übergeführt werden und so weiter. — Daß das nicht so glatt erwartet werden kann heute, dafür hat die Welt­kriegskatastrophe gesorgt. Diejenigen sind ja oftmals als kindisch hingestellt worden, die irgendeine Revolution erwartet haben, aber im Grunde genommen, was ist denn geschehen in den letzten vier bis fünf Jahren? Halten wir uns das ganz klar und deutlich vor Augen, was geschehen ist. Nicht wahr, Sie haben es ja auch öfter gehört, was in den letzten vier bis fünf Jahren geschehen ist: Im Juli 1914 sind die Regierungen ein bißchen «verdreht» geworden — oder stark «verdreht» geworden — und haben die Leute in den Weltkrieg gehetzt. Da haben die Leute geglaubt, es sei ein Weltkrieg da, es haben Schlachten stattgefunden — aber mit den modernen Kriegs­mitteln, mit den Maschinenmitteln, war etwas ganz anderes da als in früheren Kriegen. Es ist doch keine Möglichkeit mehr da ge­wesen, daß irgendeiner ein besonders berühmter Feldherr wurde, denn schließlich kam es nur darauf an, ob eine Partei die größere Menge an Munition hatte und sonstige Mittel der Kriegführung, ob eine Partei die mechanischen Kriegsmittel besser herstellte als die andere oder ein Gas entdeckt hatte und dergleichen, das die ande­ren nicht hatten. Erst siegte der eine, dann entdeckte der andere wieder etwas, dann wieder der erste; das Ganze war eine furchtbar mechanische Kriegführung. Und alles, was geredet worden ist über dasjenige, was da und dort geschehen ist von seiten der Menschen, das war unter dem Einfluß der Phrase geschehen, es war durchaus Phrase. Und nach und nach wird die moderne Menschheit einsehen, auch in Mitteleuropa, was alles als Phrase drinnengesteckt hat, wenn der eine oder andere, der eigentlich nichts anderes war als ein etwas verdrehter Durchschnittssoldat, zu einem großen Feldherrn gemacht worden ist in Mitteleuropa. Diese Dinge sind nur unter dem Einfluß der Phrase möglich geworden. Nun ja, das war eben so.

Mais que s'est-il passé en réalité ? Les gens ne l'ont pas remarqué à cause des événements extérieurs. Alors que les gens croyaient qu'une guerre mondiale avait été menée - qui n'était en fait qu'un masque -, une révolution s'est en réalité produite. En réalité, une révolution s'est produite pendant ces quatre ou cinq ans. Mais les gens ne le savent pas encore aujourd'hui, ils n'y prêtent pas attention. La guerre est l'extérieur, le masque ; la vérité, c'est que la révolution a eu lieu. Et parce que la révolution a eu lieu, la société d'Europe centrale et orientale se trouve aujourd'hui dans un tout autre état, et on ne peut rien faire de ce que les gens avaient envisagé pour les situations antérieures. Aujourd'hui, il est nécessaire de réorganiser toutes les idées que l'on se faisait auparavant, de penser les choses de manière totalement nouvelle. C'est ce qu'a tenté de faire le livre "Les points essentiels de la question sociale" : tenir compte de la situation dans laquelle les événements récents nous ont placés. Il n'est donc pas étonnant que les membres des partis socialistes, qui ne peuvent pas suivre le mouvement assez rapidement, se méprennent sur ce livre. Si les gens acceptaient une seule fois d'examiner leurs propres pensées - d'examiner un peu ce qu'ils disent vouloir -, ils verraient à quel point ils vivent sous l'influence des idées qu'ils se sont faites jusqu'en 1914. C'est la vieille habitude.

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Nun, was ist denn aber in Wirklichkeit geschehen? Das haben die Leute vor lauter äußeren Ereignissen nicht gemerkt. Während die Leute glaubten, daß ein Weltkrieg geführt worden sei — der eigentlich nur eine Maske war —, hat sich in Wirklichkeit eine Revolution vollzogen. In Wirklichkeit ist eine Revolution geschehen in diesen vier bis fünf Jahren. Das wissen die Leute heute nur noch nicht, das beachten sie heute noch nicht. Der Krieg ist die Außenseite, die Maske; die Wahrheit ist die, daß sich die Revolution vollzogen hat. Und weil sich die Revolution vollzogen hat, ist heute die Gesellschaft Mittel- und Osteuropas in einer ganz anderen Verfassung, und man kann nichts anfangen mit dem, was die Leute bedacht hatten für frühere Lagen. Heute ist es notwendig, daß all die Gedanken, die man sich früher gemacht hat, ganz neu geordnet werden, daß man ganz neu über die Dinge denkt. Und das ist versucht worden mit dem Buche «Die Kernpunkte der Sozialen Frage»: ganz richtig zu rechnen mit der Lage, in die wir gekommen sind durch die allerjüngsten Ereignisse. Daher ist es kein Wunder, daß die Menschen in den sozialistischen Parteien, die nicht schnell genug mitkommen können, diesem Buch Mißverständnis über Mißverständnis entgegenbringen. Wenn die Menschen nur einmal sich darauf einließen, ihre eigenen Gedanken zu prüfen — ein bißchen zu prüfen dasjenige, wovon sie sagen, daß sie es wollen —, dann würden sie sehen, wie sehr sie leben unter dem Einfluß der Ideen, die sie sich bis zum Jahre 1914 gemacht haben. Das ist die alte Gewohnheit.

N'est-ce pas, ces idées que l'on a eues jusqu'en 1914, elles se sont tellement incrustées dans l'environnement des humains qu'elles ne peuvent plus en sortir maintenant. Et quelle est la conséquence ? La conséquence, c'est que malgré la nécessité d'une nouvelle action aujourd'hui, malgré la révolution qui s'est produite en Europe centrale et orientale, malgré la nécessité de construire aujourd'hui - non pas selon les anciennes idées, mais selon les nouvelles idées -, malgré tout cela, les gens prêchent les anciennes idées. Et que sont aujourd'hui les partis, y compris les partis socialistes ? Les partis socialistes sont ceux qui continuent à prêcher aujourd'hui tel ou tel évangile socialiste, à l'ancienne manière, comme ils l'ont fait jusqu'en juillet 1914, car il n'y a pas de différence dans ces programmes de parti par rapport aux anciens - tout au plus la différence qui vient de l'extérieur. Pour celui qui connaît les choses, il y a terriblement peu de nouveautés, voire rien de nouveau, dans les différents groupes de partis. Les vieilles idées sont toujours véhiculées aujourd'hui. Maintenant oui, il y a une petite différence : si l'on a un chaudron en cuivre et que l'on tape dessus, cela sonne ; si l'on tape de la même manière sur un tonneau en bois, cela sonne différemment ; mais le coup peut être tout à fait le même. Cela dépend alors de ce sur quoi on tape, si cela sonne différemment. Et c'est ce qui se passe aujourd'hui lorsque les gens se mettent à parler de leurs programmes de parti. Ce qui est contenu dans ces anciens programmes de parti, c'est en fait le vieux garde-fou du parti ; c'est seulement parce qu'il y a maintenant d'autres conditions sociales que cela sonne aujourd'hui un peu différemment, comme cela sonne différemment dans une chaudière en cuivre ou dans un tonneau en bois. Lorsque les socialistes indépendants, les socialistes majoritaires ou les communistes parlent, ils prononcent de vieilles phrases de parti, et cela sonne différemment parce qu'il n'y a pas un chaudron en cuivre, mais un tonneau en bois. En vérité, on n'a rien appris du tout, du tout, du tout, de bien des côtés. Mais ce qui compte, c'est qu'on apprenne quelque chose, que cette terrible guerre mondiale, comme on l'appelle, mais qui était en fait une révolution mondiale, nous dise quelque chose.

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Nicht wahr, diese Ideen, die man bis 1914 gehabt hat, die haben sich so eingefressen in die Umgebung der Menschen, daß sie jetzt nicht wieder herauskommen. Und was ist die Folge? Die Folge ist: Trotzdem heute ein neues Handeln notwendig ist, trotzdem sich die Revolution vollzogen hat in Ost- und Mitteleuropa, trotzdem wir heute notwendig haben, einen Aufbau zu vollziehen — nicht nach alten Ideen, sondern nach neuen Ideen —, trotz alledem predigen die Leute die alten Ideen. Und was sind heute die Parteien, auch die sozialistischen Parteien? Die sozialistischen Parteien sind diejenigen, die in der alten Weise, wie sie bis zum Juli 1914 gepredigt haben, dieses oder jenes sozialistische Evangelium auch heute weiter predigen, denn ein Unterschied ist bei diesen Parteiprogrammen nicht gegenüber den früheren — höchstens der Unterschied, der von außen kommt. Für den, der die Dinge kennt, für den wird in der einzelnen Parteigruppierung furchtbar wenig Neues, ja gar nichts Neues gesagt. Die alten Ladenhüter von Gedanken werden auch heute noch verzapft. Nun ja, es ist ja ein bißchen ein Unterschied: Wenn man einen kupfernen Kessel hat und klopft daran, dann klingt es; klopft man genauso auf ein hölzernes Faß, dann klingt es anders; aber das Klopfen kann ganz dasselbe sein. Es hängt dann von dem ab, worauf man klopft, ob es anders klingt. Und so ist es heute, wenn die Leute ihre Parteiprogramme verzapfen. Das, was in diesen alten Parteiprogrammen enthalten ist, das ist eigentlich der alte Parteiladenhüter; nur weil jetzt andere soziale Verhältnisse da sind, klingt es heute etwas anders, so wie es anders klingt bei einem kupfernen Kessel oder bei einem hölzernen Faß. Wenn die Unabhängigen Sozialisten oder die Mehrheitssozialisten oder die Kommunisten reden — sie reden eben alte Parteiphrasen, und es klingt anders, weil nicht ein kupferner Kessel, sondern ein hölzernes Faß da ist. In Wahrheit hat man auf vielen Seiten eben gar, gar, gar nichts gelernt. Aber darauf kommt es an, daß man etwas lernt, daß einem dieser furchtbare Weltkrieg, wie man ihn nennt, der aber eigentlich eine Weltrevolution war, irgend etwas sagt.

Et là, on peut vraiment dire que dans les masses les plus larges, on est préparé à entendre quelque chose de nouveau. Mais dans les grandes masses, on écoute ce que disent les dirigeants. Il y a une bonne compréhension, un bon sens chez les masses populaires non éduquées, et on a toujours pu compter sur la compréhension lorsqu'on propose quelque chose de vraiment moderne, quelque chose qui peut être qualifié de moderne dans le meilleur sens du terme. Cela s'explique en partie par le fait que les masses ne sont pas éduquées. Mais dès que les gens entrent dans le type d'éducation que l'on peut avoir depuis les trois ou quatre derniers siècles, cette caractéristique d'inculture disparaît. Si l'on considère l'enseignement bourgeois actuel, de l'école primaire jusqu'à l'université - et ce sera encore pire lorsque l'école unique socialiste sera fondée, car tout ce que l'école primaire bourgeoise a fait de mal y sera présent dans la plus grande mesure -, on voit bien que l'enseignement bourgeois n'a pas de sens : ce qui se fait dans les écoles forme les esprits et les rend étrangers à la vie. Il faut sortir de tout cela, il faut vraiment se mettre sur ses propres jambes dans la vie spirituelle si l'on veut sortir de cette méformation. Mais, voyez-vous, c'est grâce à cette méformation que les dirigeants prolétariens, grands et petits, sont devenus ainsi. Ils ont dû s'approprier cette formation ; cette formation se trouve dans nos écoles et dans les écrits populaires, elle se trouve partout. Et c'est là que l'on commence à avoir le cerveau desséché et que l'on n'est plus accessible aux faits, mais que l'on s'arrête aux programmes de parti et aux opinions que l'on a greffés et martelés. Même la révolution mondiale peut alors arriver, on continue à siffler les vieux programmes.

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Und da kann man wirklich schon sagen: In den breitesten Mas­sen ist man vorbereitet darauf, etwas Neues zu hören. Aber bei den breiten Massen ist das so: Da wird zugehört dem, was die Führer sagen. Es ist ein gutes Verständnis da, ein guter, gesunder Men­schenverstand in den breiten, unverbildeten Massen, und man konnte eigentlich immer auf Verständnis rechnen, wenn man etwas richtig Zeitgemäßes, etwas im besten Sinne des Wortes zeitgemäß zu Nennendes vorbringt. Das ist zum Teil darauf zurückzuführen, daß die Massen unverbildet sind. Aber sobald sich die Menschen in die Art der Schulung hineinbegeben, die man haben kann seit den letzten drei bis vier Jahrhunderten, da hört diese Eigenschaft des Unverbildetseins auf. Wenn man dasjenige, was die heutige bürgerliche Schulbildung ist, von der Volksschule bis hinauf zur Universität, betrachtet — und am ärgsten wird es sein, wenn jetzt die sozialistische Einheitsschule gegründet wird, da wird alles im größten Maße vorhanden sein, was von der bürgerlichen Volksschule verbrochen worden ist —, da sieht man: Was da verzapft wird in den Schulen, das verbildet die Köpfe, das macht sie dem Leben fremd. Man muß aus dem ganzen Zeug herauskommen, man muß sich wirklich im geistigen Leben auf eigene Beine stellen, wenn man aus dieser Verbildung herauskommen will. Aber sehen Sie, durch diese Verbildung sind die großen und kleinen proletarischen Führer so geworden. Sie mußten sich diese Bildung aneignen; diese Bildung steckt in unseren Schulen und in den populären Schriften, überall steckt sie drinnen. Und da fängt man dann an, so ein vertrocknetes Gehirn zu kriegen und nicht mehr für die Tatsachen zugänglich zu sein, sondern bei Parteiprogrammen und Meinungen, die man sich eingepfropft und eingehämmert hat, bei denen bleibt man stehen. Da kann dann selbst die Weltrevolution kommen, man pfeift immer noch die alten Programme darauf los.

Vous voyez, c'est essentiellement ce sort qui a été réservé à ce qui a été voulu dans de nombreuses directions avec ce livre "Les points essentiels de la question sociale" et les conférences. On y a vraiment tenu compte de ce dont le prolétariat a absolument besoin aujourd'hui, de ce qui est nécessaire compte tenu de la situation actuelle. On l'a compris au début [dans le prolétariat], mais ensuite ceux qui sont les dirigeants du prolétariat dans les différents groupes de partis ne l'ont pas compris. Cela dit, je ne veux pas être trop injuste et je ne veux pas presser la vérité ; je ne veux pas affirmer que ces dirigeants, par exemple, ne comprennent pas ce livre, car je ne peux pas supposer qu'ils l'ont lu, qu'ils le connaissent. Je n'affirmerais pas quelque chose de juste si je disais : ils ne peuvent pas comprendre ce livre. Mais ils ne peuvent absolument pas se décider à comprendre que quelque chose d'autre soit nécessaire que ce qu'ils pensent depuis des décennies. Leur cerveau est devenu trop sec, trop rigide pour cela. Et c'est pourquoi ils s'en tiennent à ce qu'ils ont pensé depuis longtemps et trouvent que ce qui est le contraire de toute utopie, c'est une utopie. Car, voyez-vous, le livre "Les points essentiels" tient pleinement compte du fait qu'on ne peut plus aujourd'hui se mouvoir dans des utopies dans le sens des Saint-Simon, Fourier, Proudhon et ainsi de suite, mais aussi du fait qu'on ne peut plus jamais se placer du point de vue : L'évolution se fera d'elle-même. Car ce que Marx et Engels ont vu, ce qui s'est développé [à leur époque], ce dont ils ont tiré leurs conclusions, on ne peut plus en tirer de conclusions aujourd'hui, car la guerre mondiale l'a balayé, il n'est plus là sous sa forme véritable. Celui qui dit aujourd'hui la même chose que Marx et Engels, dit quelque chose que Marx n'aurait jamais dit. Il a eu peur de ses partisans, car il a dit : en ce qui me concerne, je ne suis pas marxiste. - Et aujourd'hui, il dirait : à l'époque, les faits étaient encore différents ; à l'époque, je tirais mes conclusions de faits qui n'avaient pas encore été modifiés, changés, comme la guerre mondiale a tout changé par la suite.

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Sehen Sie, dieses Schicksal hat im wesentlichen dasjenige erfahren, was mit diesem Buche «Die Kernpunkte der Sozialen Frage» und den Vorträgen in vieler Richtung gewollt worden ist. Da wurde einmal wirklich mit dem gerechnet, was das Proletariat heute unbedingt braucht, was notwendig ist aus der Zeitlage heraus. Das verstand man auch anfangs [im Proletariat], aber dann verstanden es diejenigen nicht, die die Führer des Proletariats in den verschiedenen Parteigruppierungen sind. Das heißt, ich will ja nicht allzu ungerecht sein, und ich will nicht die Wahrheit pressen; ich will nicht behaupten, daß zum Beispiel diese Führer dieses Buch nicht verstehen, denn ich kann nicht annehmen, daß sie es gelesen haben, daß sie es kennen. Ich würde nicht etwas Richtiges behaupten, wenn ich sagte: sie können das Buch nicht verstehen. Aber sie können sich überhaupt nicht entschließen zu verstehen, daß etwas anderes notwendig sein soll, als das, was sie seit Jahrzehnten denken. Dazu ist ihr Gehirn zu trocken, zu steif geworden. Und daher bleiben sie stehen bei dem, was sie seit langer Zeit gedacht haben und finden, daß dasjenige, was das Gegenteil von aller Utopie ist, daß das eine Utopie sei. Denn sehen Sie, das Buch «Die Kernpunkte» rechnet voll damit, daß man heute nicht mehr im Sinne der Saint-Simon, Fourier, Proudhon und so weiter in Utopien sich bewegen kann, aber auch damit, daß man nimmermehr sich auf den Standpunkt stellen kann: Die Entwicklung wird es schon von selber geben. Denn das, was Marx und Engels gesehen haben, was sich [zu ihren Zeiten] entwickelte, woraus sie ihre Schlüsse gezogen haben, aus dem kann man heute nicht mehr Schlüsse ziehen, denn das hat der Weltkrieg weggefegt, das ist in seiner wahren Gestalt nicht mehr da. Wer heute dasselbe sagt wie Marx und Engels, der sagt etwas, was Marx niemals gesagt hätte. Dem ist angst und bange geworden gerade vor seinen Anhängern, denn er hat gesagt: Was mich anbetrifft, ich bin kein Marxist. — Und heute würde er sagen: Damals waren die Tatsachen noch andere; damals habe ich meine Schlüsse gezogen aus Tatsachen, die noch nicht so modifiziert, so verändert worden sind, wie der Weltkrieg alles verändert hat nachher.

Mais, voyez-vous, ces humains qui ne peuvent rien apprendre des événements, qui ont aujourd'hui la même attitude que les anciens catholiques vis-à-vis de leurs évêques et de leurs papes, ne peuvent même pas imaginer qu'une chose telle que le marxisme doit être développée dans le sens des faits. C'est ce que font les socialistes, mais aussi les bourgeois. Les cercles les plus larges le font ainsi. Les bourgeois le font naturellement de manière somnolente, l'âme complètement endormie, les autres le font de telle sorte qu'ils se trouvent au milieu et voient l'effondrement, mais qu'ils ne veulent pas s'attendre aux faits qui se révèlent ainsi. Aujourd'hui, nous avons justement besoin que quelque chose de nouveau arrive parmi les humains. Et c'est pourquoi il est nécessaire de comprendre quelque chose [comme la triarticulation] qui n'est pas une utopie, mais qui compte justement avec les faits. Si, de ce côté, on appelle ce qui compte ainsi avec les faits, l'ergotage, on pourrait en fait être tout à fait satisfait. Car si les gens appellent ce qu'ils font avancer une ligne droite, alors il faut, pour faire quelque chose de raisonnable, tirer dans le sens du poil, pour amener ce qui est déraisonnable dans une autre direction, raisonnable. Mais vous voyez, ceux qui comprennent encore ce qui est raisonnable devraient approfondir ce qui est présenté ici. Et c'est à cela que peuvent servir ces soirées.

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Aber sehen Sie, diejenigen Menschen, die nichts lernen können von den Ereignissen, die heute von einer Gesinnung sind, wie die alten Katholiken ihren Bischöfen und Päpsten gegenüber waren, die können sich gar nicht denken, daß so etwas, wie es der Marxismus ist, auch fortentwickelt werden muß im Sinne der Tatsachen.Sie sehen immer noch die alten Tatsachen vor sich, und deshalbpfeifen und fauchen die Leute noch immer dasselbe, was sie gepfif‑fen und gefaucht haben vor dem Weltkrieg. So machen es die Sozialisten, aber auch die Bürgerlichen. Die weitesten Kreise machenes so. Die Bürgerlichen machen es natürlich ganz schläfrig, mit völlig verschlafener Seele, die anderen machen es so, daß sie aller­dings mitten drinnen stehen und den Zusammenbruch sehen, daß sie aber nicht mit den Tatsachen, die sich dadurch offenbaren, rech­nen wollen. Wir haben eben heute notwendig, daß etwas Neues unter die Menschen kommt. Und deshalb ist es nötig, so etwas zu verstehen [wie die Dreigliederung], die keine Utopie ist, sondern die gerade mit den Tatsachen rechnet. Wenn von jener Seite das­jenige, was so mit den Tatsachen rechnet, Quertreiberei genannt wird, so könnte man eigentlich ganz zufrieden sein. Denn wenn die Leute das, was sie vorwärtstreiben, eine gerade Linie nennen, dann muß man, um etwas Vernünftiges zu betreiben, in die Quere hin­einschießen, um das Unvernünftige in andere, in vernünftige Rich­tung zu bringen. Aber sehen Sie, diejenigen, die das Vernünftige doch noch einsehen, die sollten sich vertiefen in das, was hier vor­gebracht wird. Und dazu können ja diese Abende da sein.

Non, il y a longtemps que l'on a essayé de mettre en pratique ce que l'on a tiré des faits. Et c'est ainsi que nous nous sommes réunis depuis des semaines - je n'ai pas besoin de répéter toutes ces choses, vous pouvez encore poser des questions ou discuter des pour et des contre à l'issue de cet exposé -, nous nous sommes réunis depuis des semaines pour mettre sur pied ce que nous appelons le corps des conseils d'entreprise. Nous avons essayé de créer ces conseils d'entreprise à partir des faits actuels nécessaires, de les créer vraiment de telle sorte qu'ils viennent de la simple vie de l'économie, qu'ils ne viennent pas de la vie politique, qui ne peut pas constituer la base de la vie de l'économie. Car si l'on regarde les faits en face aujourd'hui, il faut se tenir strictement sur le terrain de l'organisme social triarticulé. Et celui qui ne veut pas de cette triarticulation aujourd'hui va à l'encontre de la nécessité historique de l'évolution de l'humanité. Aujourd'hui, il doit en être ainsi, comme je l'ai souvent expliqué : que la vie spirituelle soit placée sur elle-même, que la vie économique soit placée sur elle-même, que la vie de droit ou politique soit administrée démocratiquement. Et dans la vie économique, le premier pas vers un façonnement réellement social doit être fait avec les conseils d'entreprise. Mais comment cela peut-il se faire ? Uniquement en posant d'abord la question : maintenant oui, il y a l'impulsion de l'organisme social triarticulé, c'est nouveau par rapport à toutes les anciennes momies de parti ; y a-t-il quelque chose d'autre de nouveau ? Les imbéciles prétendent aujourd'hui que les idées ne font que tourbillonner dans l'air. Si l'on écoute les discussions, elles apportent toutes sortes de choses négatives, mais elles n'apportent rien qui puisse être mis en parallèle avec la triarticulation de l'organisme social. Tout cela n'est que de l'eau de rose lorsque les socialistes affirment que les idées ne font que pendre dans l'air - comme cela a été dit dans une revue nouvellement créée, lors d'une discussion sur la triarticulation.

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Nicht wahr, es ist ja längst dasjenige, was da aus den Tatsachen herausgeholt wird, versucht worden, in die Praxis hineinzutragen. Und so haben wir uns seit Wochen versammelt — ich brauche alle diese Dinge nicht zu wiederholen, Sie können ja auch im Anschluß an diesen Vortrag noch Fragen stellen oder pro und contra disku­tieren —, wir haben uns seit Wochen versammelt, um das, was wir Betriebsräteschaft nennen, auf die Beine zu bringen. Wir haben versucht, diese Betriebsräteschaft aus den gegenwärtig notwendi­gen Tatsachen heraus zu schaffen, wirklich so sie zu schaffen, daß sie aus dem bloßen Wirtschaftsleben kommen, daß sie nicht kom­men aus dem politischen Leben, das nicht die Grundlage des Wirt­schaftslebens abgeben kann. Denn man muß, wenn man heute den Tatsachen ins Auge schaut, streng stehen auf dem Boden des drei­gliedrigen sozialen Organismus. Und derjenige, der heute diese Dreigliederung nicht will, der handelt der geschichtlichen Notwen­digkeit der Menschheitsentwicklung entgegen. Heute muß das so sein, wie ich es oftmals ausgeführt habe: daß das geistige Leben auf sich gestellt wird, daß das wirtschaftliche Leben auf sich gestellt wird, daß das Rechts- oder politische Leben demokratisch verwal­tet wird. Und im wirtschaftlichen Leben soll der erste Anfang zu einer wirklich sozialen Gestaltung mit den Betriebsräten gemacht werden. Wodurch kann aber das nur geschehen? Nur dadurch, daß man zuerst die Frage aufstellt: Nun ja, da ist der Impuls des dreigliedrigen sozialen Organismus, der ist neu gegenüber allen früheren Parteimumien; ist noch etwas anderes Neues da? Blödlinge behaupten heute, daß die Ideen nur so durch die Luft schwirren würden. Hört man die Diskussionen an, so bringen sie allerlei Negatives, aber sie bringen nichts, was der Dreigliederung des sozialen Organismus an die Seite zu stellen wäre. Das ist alles Wischiwaschi, wenn da von sozialistischer Seite herkommt, daß die Ideen nur so in der Luft hängen — wie das gesagt worden ist in einer neu begründeten Zeitschrift in einer Besprechung der Dreigliederung.

Il s'agit tout d'abord qu’on lance la question et d'y voir clair : N'y a-t-il rien d'autre ? Ensuite, on s'en tient d'abord à la triarticulation de l'organisme social, jusqu'à ce qu'on puisse la réfuter de manière objective, jusqu'à ce qu'on puisse placer à côté d'elle des choses objectivement équivalentes. On ne peut plus discuter des anciens programmes de parti, c'est la guerre mondiale qui en a discuté ; celui qui a vraiment de la compréhension sait que ces anciennes idées de parti sont réfutées par la catastrophe de la guerre mondiale. Mais alors, si l'on ne peut pas répondre à cette question en plaçant à côté quelque chose d'objectivement équivalent, et si l'on veut aller plus loin, alors on peut honnêtement se dire : nous travaillons donc dans le sens de la triarticulation de l'organisme social. Disons-le franchement : les anciennes structures de parti ont perdu leur signification ; il faut travailler dans le sens de la triarticulation.

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Es handelt sich erstens darum, daß man die Frage aufwirft und sich darüber klar wird: Ist nichts anderes da? Dann hält man sich zunächst an die Dreigliederung des sozialen Organismus, bis man sie in sachlicher Weise widerlegen kann, bis man sachlich Gleichwertiges daneben stellen kann. Über die alten Parteiprogramme kann man nicht mehr diskutieren, darüber hat der Weltkrieg diskutiert; wer wirklich Verständnis hat, der weiß, daß diese alten Parteimumien durch die Weltkriegskatastrophe widerlegt sind. Dann aber, wenn man diese Frage nicht dadurch beantworten kann, daß man etwas sachlich Gleichwertiges daneben stellt, und wenn man weitergehen will, dann kann man ehrlich sich sagen: Also arbeiten wir im Sinne der Dreigliederung des sozialen Organismus. Sagen wir uns ehrlich: Die alten Parteizusammenhänge haben ihre Bedeutung verloren; es muß im Sinne der Dreigliederung gearbeitet werden.

Lorsque j'ai pris la parole avant-hier à Mannheim, un monsieur s'est présenté à la fin et a dit : "Ce que Steiner a dit est bien, mais ce n'est pas ce que nous voulons ; nous ne voulons pas ajouter un nouveau parti à tous les anciens partis. Les gens qui veulent une telle chose doivent entrer dans les anciens partis et y travailler. -- Je ne pouvais que répondre : j'ai suivi la vie politique de très près depuis longtemps, alors que le monsieur qui parlait n'était pas encore né. Et bien que j'aie été familiarisé par ma vie avec tout ce qui fonctionnait socialement comme force, je n'ai jamais pu agir au sein d'un parti quelconque ou m'y tenir, et il ne me vient pas à l'esprit, à la fin de ma sixième décennie, de devenir un humain de parti : je ne veux rien avoir à faire ni avec un autre parti ni avec un parti que j'aurais fondé moi-même. Je ne veux pas non plus avoir affaire à un parti que j'aurais fondé moi-même ; personne ne doit craindre qu'un nouveau parti soit fondé par moi. Car j'ai appris que chaque parti, par la force des choses, devient stupide au bout d'un certain temps, précisément parce que je ne me suis jamais engagé dans aucun parti. Et j'ai appris à plaindre les gens qui n'ont pas compris cela. C'est pourquoi personne ne doit craindre qu'un nouveau parti vienne s'ajouter aux anciens. C'est pourquoi nous n'avons pas fondé de nouveau parti, mais la Fédération pour la triarticulation de l'organisme social s'est réunie pour représenter les idées de l'organisme triarticulé, dont le caractère non utopiste, dont le caractère réel est tout de même perçu par un certain nombre de personnes. Les personnes qui le reconnaissent devraient aussi l'affirmer honnêtement et sincèrement.

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Als ich vorgestern in Mannheim gesprochen habe, trat zuletzt ein Herr auf, der sagte: Was da der Steiner gesagt hat, ist schön, aber es ist nicht das, was wir wollen; wir wollen nicht zu allen alten Parteien noch eine neue Partei. Die Leute, die so etwas wollen, die sollen in die alten Parteien eintreten und darin wirken. -- Ich konnte darauf nur sagen: Ich habe das politische Leben längst sehr genau verfolgt, als der Herr, der da sprach, noch lange nicht geboren war. Und ichhabe, trotzdem ich mit allem bekanntgeworden bin durch mein Leben, was sozial irgendwie als Kraft funktionierte, ich habe doch niemals innerhalb irgendeiner Partei gewirkt oder darinnen stehen können, und es fällt mir nicht ein, jetzt, am Ende meines sechsten Lebensjahrzehnts, irgendwie ein Parteimensch zu werden: Weder mit einer andern Partei noch mit einer selbstgegründeten möchte ich irgend etwas zu tun haben. Also auch nicht mit einer selbstgegründeten Partei möchte ich etwas zu tun haben; das braucht niemand zu fürchten, daß durch mich eine neue Partei gegründet wird. Denn daß jede Partei durch Naturnotwendigkeit nach einiger Zeit töricht wird, das habe ich gelernt, gerade indem ich mich niemals mit irgendeiner Partei eingelassen habe. Und ich habe gelernt, die Leute zu bedauern, die das nicht durchschauen. Daher braucht niemand zu fürchten, daß zu den alten Parteien eine neue Partei kommt. Deshalb ist auch von uns nicht eine neue Partei gegründet worden, sondern der Bund für Dreigliederung des sozialen Organismus hat sich zusammengeschlossen, um die Ideen des dreigliedrigen Organismus zu vertreten, deren nicht-utopistischer Charakter, deren Wirklichkeitscharakter eben doch von einer Anzahl von Menschen durchschaut wird. Die Menschen, die das einsehen, die sollten aber auch ehrlich und aufrichtig sich dazu bekennen.

Car cela non plus ne doit pas arriver : Il y a une pièce de théâtre dans laquelle un coq chante à l'aube, et chaque fois que le coq a chanté, le soleil se lève. Eh bien, le coq ne peut pas voir le contexte, c'est pourquoi il croit que lorsqu'il chante, c'est que le soleil répond à son appel, qu'il vient parce qu'il a chanté, qu'il a fait en sorte que le soleil se lève. - Enfin, si quelqu'un dans la vie non sociale se laisse aller à une telle illusion, comme ce coq qui chante sur le fumier et veut faire se lever le soleil, cela ne fait rien. Mais si, dans certaines circonstances, il arrivait que l'idée des conseils d'entreprise véritablement économiques prospère sur le sol de l'organisme triarticulé et que les personnes qui s'en occupent veuillent nier l'origine, à savoir que l'impulsion de la triarticulation a mis cette idée en mouvement, et si ces personnes croient que parce qu'on a chanté, les conseils d'entreprise vont venir, alors ce serait la même erreur, et une erreur très fatale. Mais cela ne doit pas arriver. Ce qui se passe dans cette direction [les conseils d'entreprise], ce qui a été entrepris ici, ne doit pas être dissocié, cela doit rester en rapport avec l'impulsion bien comprise de la triarticulation de l'organisme social. Et ceux qui veulent réaliser les conseils d'entreprise dans le sens de cette impulsion ne peuvent jamais accepter que les conseils d'entreprise soient créés de manière unilatérale et que l'on ne crie que "conseils d'entreprise, conseils d'entreprise". Ce n'est pas suffisant. Cela n'a de sens que si l'on aspire en même temps à tout ce qui doit être recherché par l'impulsion de l'organisme social triarticulé. C'est ce qui est important. Car si vous voulez vraiment comprendre ce qui est écrit dans les "points essentiels", vous devez vous placer du point de vue que l'on peut apprendre des faits que les quatre ou cinq dernières années ont offerts. Pour celui qui voit clair dans ces faits, ils apparaissent comme s'il avait vécu des siècles, et pour celui qui voit les programmes des partis comme si leurs promoteurs avaient dormi pendant des siècles. Aujourd'hui, cela doit être envisagé clairement et sans réserve.

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Denn auch das darf nicht geschehen: Es gibt ein Theaterstück, da kräht ein Hahn in der Früh, und immer, wenn der Hahn gekräht hat, geht die Sonne auf. Nun ja, der Hahn kann nicht den Zusammenhang durchschauen, daher glaubt er, wenn er kräht, dann folge die Sonne seinem Ruf, sie komme, weil er gekräht hat, er habe bewirkt, daß die Sonne aufgeht. — Wenn schließlich jemand im nicht-sozialen Leben sich einer solchen Täuschung hingibt, wie dieser Hahn, der auf dem Mist kräht und die Sonne aufgehen machen will, so macht es nichts. Wenn aber unter Umständen es hier geschehen würde, daß die Idee der wirklich wirtschaftlichen Betriebsräte gedeiht auf dem Boden des dreigliedrigen Organismus und diejenigen Menschen, die das pflegen, verleugnen wollten etwa den Ursprung, nämlich daß der Impuls der Dreigliederung diese Idee in Fluß gebracht hat, und wenn diese Menschen glauben, weil man gekräht habe, kämen die Betriebsräte, dann wäre das derselbe Irrtum, und zwar ein sehr verhängnisvoller Irrtum. Das darf aber nicht kommen. Das, was in dieser Richtung [der Betriebsräte] geschieht, was in Angriff genommen worden ist hier, das darf nicht losgelöst werden, es muß im Zusammenhang bleiben mit dem richtig verstandenen Impuls der Dreigliederung des sozialen Organismus. Und diejenigen, die im Sinne dieses Impulses die Betriebsräteschaft verwirklichen wollen, die können sich niemals darauf einlassen, daß etwa in einseitiger Weise bloß die Betriebsräteschaft gegründet würde und immer nur gekräht würde «Betriebsräte, Betriebsräte». Damit ist es nicht genug. Das hat nur einen Sinn, wenn man zugleich anstrebt alles, was durch den Impuls des dreigliedrigen sozialen Organismus angestrebt werden soll. Das ist es, worauf es ankommt. Denn wollen Sie wirklich das verstehen, was in den «Kernpunkten» steht, dann müssen Sie sich auf den Standpunkt stellen, den man lernen kann aus den Tatsachen, die die letzten vier bis fünf Jahre geboten haben. Wer diese Tatsachen durchschaut, auf den wirken sie so, als wenn er Jahrhunderte durchlebt hätte, und auf den wirken die Parteiprogramme so, als wenn ihre Träger Jahrhunderte geschlafen hätten. Heute muß dieses klar und rückhaltlos ins Auge gefaßt werden.

Ce que je viens de vous raconter, j'aurais bien sûr tout aussi bien pu l'écrire en préambule de ce livre. Seulement, on a pu constater ces derniers mois à quel point les programmes des partis sont actuellement rigides et stériles. Mais il serait utile que cela figure en préambule de ce livre. Je vous ai raconté aujourd'hui beaucoup de choses qui n'y figurent pas, puisque vous avez décidé, me semble-t-il, de vous réunir ici pour étudier correctement les graves questions sociales actuelles dans le prolongement de ce livre. Mais avant de s'y atteler, il faut déjà se rendre compte que l'on ne peut pas continuer à trottiner dans le vieux style des programmes et des modèles de parti, mais que l'on doit se décider à aborder aujourd'hui les faits conformément à la réalité et à tirer un trait sur tout ce qui ne tient pas compte de ces nouveaux faits. Ce n'est qu'ainsi que vous comprendrez correctement ce qui doit être réalisé, précisément avec cette impulsion vers un organisme social triarticulé. Et vous le comprendrez de la bonne manière si vous trouvez que chaque phrase de ce livre est susceptible d'être mise en pratique, d'être transformée en réalité immédiate. Et la plupart de ceux qui disent qu'ils ne comprennent pas ou qu'il s'agit d'utopies et autres, n'ont tout simplement pas le courage de penser assez fort aujourd'hui pour que les pensées puissent intervenir dans la réalité. Ceux qui crient toujours "dictature du prolétariat", "conquête du pouvoir", "socialisme", pensent généralement très peu. Il n'est donc pas possible d'intervenir dans la réalité avec ces modèles de mots. Mais ils viennent ensuite dire qu'on ne propose [avec les "points essentiels"] que quelque chose qui est une utopie. Ce n'est que dans l'esprit des gens qui n'y comprennent rien que cela devient une utopie.

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Das, was ich Ihnen jetzt erzählt habe, das hätte ich natürlich ebensogut als Vorrede in dieses Buch schreiben können. Allein, man hat ja erst in den letzten Monaten gesehen, wie steif und unfruchtbar die Parteiprogramme gegenwärtig sind. Aber es wäre schon nützlich, wenn gerade das als Vorrede in diesem Buche stehen würde. Vieles, was nicht darin steht, habe ich Ihnen heute erzählt, da Sie, wie mir scheint, beschlossen haben, hier zusammenzukommen, um in Anknüpfung an dieses Buch die ernsten sozialen Fragen der Gegenwart sachgemäß zu studieren. Aber bevor man sich an das macht, muß man sich schon klarmachen, daß man nicht forttrotteln kann in dem alten Stil der Parteiprogramme und Parteischablonen, sondern daß man sich dazu entschließen muß, heutedie Tatsachen wirklichkeitsgemäß anzufassen und einen Strich zumachen unter alles das, was nicht rechnet mit diesen neuen Tat‑sachen. Nur dadurch werden Sie das, was erreicht werden soll gerade mit diesem Impuls vorn dreigliedrigen sozialen Organismus, in der richtigen Weise auffassen. Und Sie werden es in der richtigen Weise auffassen, wenn Sie finden, daß jeder Satz in diesem Buch dazu angetan ist, Tat werden zu können, umgesetzt werden zu können in unmittelbare Wirklichkeit. Und die meisten, die sagen, sie würden das nicht verstehen oder es seien Utopien und dergleichen, denen fehlt einfach der Mut, die Courage, heute so stark zu denken, daß die Gedanken in die Wirklichkeit eingreifen können. Diejenigen, die immer krähen «Diktatur des Proletariats», «Eroberung der Macht», «Sozialismus», die denken zumeist sehr wenig dabei. Es kann daher mit diesen Wortschablonen nicht in die Wirklichkeit eingegriffen werden. Dann aber kommen diese und sagen, da würde [mit den «Kernpunkten»] nur etwas geboten, was eine Utopie ist. Eine Utopie wird es erst in den Köpfen von den Leuten, die nichts davon verstehen.

C'est pourquoi il faudrait faire comprendre à ces gens ce que Goethe a dit un jour, sous une forme un peu différente et en se référant à autre chose, en se moquant du physiologiste Haller, qui était un naturaliste ossifié. Haller avait inventé la parole :

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Deshalb sollte man diesen Leuten klarmachen, was, in einer etwas veränderten Form mit Bezug auf etwas anderes, Goethe einmal gesagt hat, indem er gelacht hat über den Physiologen Haller, der ein verknöcherter Naturforscher war. Haller hatte das Wort geprägt:

aucun esprit créé ne pénètre à l'intérieur de la nature.

Heureux celui à qui elle indique seulement l'enveloppe extérieure ! Cela répugnait à Goethe, et il disait : "À l'intérieur de la nature" - ô philistin ! - "Aucun esprit créé ne pénètre". "Heureux celui à qui elle indique seulement l'enveloppe extérieure !" J'entends cela se répéter depuis soixante ans, je le maudis, mais en cachette.

La nature n'a ni noyau ni enveloppe, elle est tout en une seule fois.

Examine-toi donc le plus possible pour savoir si tu es le noyau ou la coquille !

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Ins Innere der Natur Dringt kein erschaffner Geist.

Glückselig, wem sie nur Die äußere Schale weist! Das widerstrebte Goethe, und er sagte: «Ins Innere der Natur» — O, du Philister! — «Dringt kein erschaffner Geist.» «Glückselig, wem sie nur Die äußere Schale weist!» Das hör ich sechzig Jahre wiederholen, Ich fluche drauf, aber verstohlen.

Natur hat weder Kern Noch Schale, Alles ist sie mit einem Male.

Dich prüfe du nur allermeist, Ob du Kern oder Schale seist!

Ceux qui parlent de la triarticulation de l'organisme social comme d'une utopie, on aimerait aussi leur dire : "Examine-toi seulement si ce qui hante ton cerveau est soi-même une utopie ou une réalité. -- On trouvera alors que tous les corbeaux ont la plupart du temps des utopies à l'intérieur et que la réalité dans leur propre tête devient donc aussi une utopie ou une idéologie, ou comme ils l'appellent alors. C'est pourquoi il est si difficile aujourd'hui de faire passer la réalité, parce que les gens se sont tellement barré l'accès à la réalité.

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Diejenigen, die von der Dreigliederung des sozialen Organismus als von einer Utopie sprechen, zu denen möchte man auch so sagen: Dich prüfe du nur zuallermeist, ob das in deinem Gehirn drinnen Spukende selber Utopie oder Wirklichkeit ist. -- Da wird man finden, daß all die Kräher zumeist Utopien drinnen haben und deshalb die Wirklichkeit in ihrem eigenen Kopfe auch eine Utopie wird oder eine Ideologie oder wie sie es dann nennen. Deshalb ist es heute so schwer, mit der Wirklichkeit durchzudringen, weil die Leute sich so verbaut haben den Zugang zu der Wirklichkeit.

Mais nous devons nous dire que nous devons travailler sérieusement, sinon nous ne pourrons pas passer de notre volonté à l'action ; et c'est ce qui importe, que nous passions de notre volonté à l'action. Et si nous devions renoncer à tout, parce que nous le reconnaissons comme une erreur, alors nous devrions, pour pouvoir passer du vouloir à l'action, nous tourner vers la vérité, que nous voulons percer à jour en tant que vérité, car rien d'autre ne peut conduire du vouloir à l'action que la poursuite impitoyable et courageuse de la vérité. Cela devrait en fait être écrit comme une devise, comme un slogan, avant les études de ces soirées. Je voulais vous présenter ce soir une préface à ces soirées d'étude. J'espère que ce préambule ne vous empêchera pas de cultiver ces études de telle sorte qu'enfin, avant qu'il ne soit trop tard, des pensées qui portent en elles des germes d'action puissent s'insérer dans le monde de manière fructueuse.

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Das aber müssen wir uns sagen, daß wir ernstlich arbeiten müssen, sonst werden wir nicht überführen können unser Wollen in die Tat; und darauf kommt es an, daß wir unser Wollen in die Tat überführen. Und wenn wir von allem Abschied nehmen müßten, weil wir es als einen Irrtum erkennen, so müßten wir, um vom Wollen zur Tat kommen zu können, uns doch zur Wahrheit wenden, die wir als Wahrheit durchschauen wollen, denn nichts anderes kann vom Wollen zur Tat führen, als das rücksichtslose, couragierte Verfolgen der Wahrheit. Das sollte eigentlich als eine Devise, als ein Motto, vor die Studien dieser Abende geschrieben werden. Ich wollte Ihnen heute Abend eine Vorrede halten zu diesen Studienabenden. Ich hoffe, daß diese Vorrede Sie nicht abhält, diese Studien so zu pflegen, daß endlich wirklich, ehe es zu spät wird, Gedanken, die Tatenkeime in sich tragen, sich fruchtbar in die Welt hineinstellen können.

Nous aurons l'occasion d'en discuter.

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Es wird die Gelegenheit zu einer Aussprache gegeben.

#diffPF


Rudolf Steiner : Le livre "Les points essentiels de la question sociale" est écrit d'une manière particulière, et ce pour deux raisons : premièrement, il est écrit de telle manière qu'il est en fait entièrement tiré de la réalité. Certaines personnes qui lisent le livre n'y pensent pas. Je peux aussi comprendre que cela ne soit pas pleinement pris en compte aujourd'hui. J'ai déjà parlé ici, dans ce cercle - mais tous ceux qui sont là aujourd'hui n'étaient pas présents - de la façon dont les gens pensent vraiment aujourd'hui. J'ai notamment fait référence à l'exemple du professeur d'économie nationale, Lujo Brentano, qui l'a si bien présenté dans le dernier numéro de la "Feuille jaune" ; je veux le répéter brièvement, car je veux m'y rattacher un peu. Cette lumière de la théorie d'économie politique/de peuple actuelle de l'université - il est le premier, pour ainsi dire - a développé le concept d'entrepreneur et a tenté de caractériser les caractéristiques de l'entrepreneur à partir de sa pensée éclairée. Je n'ai pas besoin d'énumérer la première et la deuxième caractéristique ; la troisième est que l'entrepreneur est celui qui met ses moyens de production au service de l'ordre social à son propre compte et à ses propres risques. Il a maintenant cette notion d'entrepreneur, et il l'applique. Il arrive alors à l'étrange résultat que l'ouvrier prolétarien d'aujourd'hui est en fait aussi un entrepreneur, car il correspond à son concept d'entrepreneur en ce qui concerne la première, la deuxième et la troisième caractéristique. Car l'ouvrier a sa propre force de travail comme moyen de production ; il en dispose, et par rapport à celle-ci, il s'adresse au processus social à son propre compte et à ses propres risques. - Ainsi, cette lumière de l'économie de peuple intègre très bien le concept de travailleur prolétarien dans son concept d'entrepreneur. Vous voyez, c'est ainsi que pensent justement les humains qui se font des concepts qui n'ont aucun sens ; ils n'ont aucun sens si l'on exige des concepts qui doivent être réellement applicables à la réalité. Mais même si vous ne l'acceptez peut-être pas, on peut dire tranquillement que plus de quatre-vingt-dix pour cent de tout ce qui est enseigné ou imprimé aujourd'hui utilise de tels concepts ; si on veut les appliquer à la réalité, cela ne marche pas plus que le concept d'entrepreneur de Lujo Brentano. C'est ainsi dans la science, c'est ainsi dans la science sociale, c'est ainsi partout, c'est pourquoi les gens ont désappris à comprendre ce qui travaille avec des concepts conformes à la réalité.

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Rudolf Steiner: Das Buch «Die Kernpunkte der Sozialen Frage» ist ja nach zweifacher ichtung in einer besonderen Art geschrie­ben, Erstens ist es so geschrieben, daß es tatsächlich ganz aus der Wirklichkeit heraus stammt. Das bedenken manche Leute nicht, die das Buch lesen. Ich kann auch begreifen, daß das heute nicht voll bedacht wird. Ich habe schon einmal hier in diesem Kreise — aber es waren nicht alle die da, die heute da sind — davon gesprochen, wie nun wirklich die Leute heute denken. Ich habe namentlich hingewiesen auf das Beispiel des Professors der Nationalökonomie, Lujo Brentano, der das so nett geliefert hat in der vorigen Nummer des «Gelben Blattes»; ich will es kurz wiederholen, weil ich daran etwas anknüpfen will. Da hat diese Leuchte der heutigen Volkswirtschaftslehre der Universität — er ist ja der Erste sozusagen — den Begriff des Unternehmers entwickelt und hat versucht, aus seinem erleuchteten Denken heraus die Merkmale des Unternehmers zu charakterisieren. Das erste und zweite Merkmal brauche ich nicht aufzuzählen; als drittes gibt er an, daß der Unternehmer derjenige ist, der seine Produktionsmittel auf eigene Rechnung und Gefahr in den Dienst der sozialen Ordnung stellt. Nun hat er diesen Begriff des Unternehmers, und den wendet er nun an. Da kommt er zu dem merkwürdigen Resultat, daß der proletarische Arbeiter von heute eigentlich auch ein Unternehmer ist, denn er entspricht diesem seinem Begriff des Unternehmers in bezug auf die erste, zweite und dritte Eigenschaft. Denn der Arbeiter hat seine eigene Arbeitskraft als Produktionsmittel; darüber verfügt er, in bezug auf diese wendet er sich an den sozialen Prozeß auf eigene Rechnung und Gefahr. — So bringt diese Leuchte der Volkswirtschaft den Begriff des proletarischen Arbeitnehmers in seinen Begriff des Unternehmers sehr gut hinein. Sehen Sie, so denken eben die Menschen, die sich Begriffe machen, die gar keinen Sinn haben; sie haben keinen Sinn, wenn Begriffe verlangt werden, die auf die Wirklichkeit wirklich anwendbar sein sollen. Aber so wenig Sie das vielleicht auch annehmen werden, man kann ruhig sagen: Weit über neunzig Prozent alles desjenigen, was heute gelehrt oder gedruckt wird, das operiert mit solchen Begriffen; wenn man sie anwenden will auf die Wirklichkeit, so geht es ebensowenig wie bei Lujo Brentanos Begriff vom Unternehmer. So ist es in der Wissenschaft, so ist es in der Sozialwissenschaft, so ist es überall, daher haben die Leute verlernt, überhaupt das zu verstehen, was mit wirklichkeitsgemäßen Begriffen arbeitet.

Prenez par exemple la base de la triarticulation de l'organisme social. N'est-ce pas, on peut les poser de différentes manières, ces bases, parce que la vie a besoin de nombreuses bases. Mais l'une d'entre elles est que l'on sait que l'époque récente a vu l'émergence de ce que l'on pourrait appeler l'impulsion de la démocratie. La démocratie doit consister en ce que tout humain devenu majeur puisse établir son rapport de droit dans des parlements démocratiques, directement ou indirectement par rapport à tout autre humain devenu majeur. Mais justement, si l'on veut honnêtement et sincèrement instaurer cette démocratie dans le monde, on ne peut pas gérer les affaires spirituelles dans le sens de cette démocratie, car chaque humain devenu majeur devrait alors décider de ce qu'il ne comprend pas. Les affaires spirituelles doivent être réglées à partir de la compréhension de la chose, c'est-à-dire qu'elles doivent être placées sur elles-mêmes ; elles ne peuvent donc absolument pas être administrées dans un parlement démocratique, mais elles doivent avoir leur propre administration, qui ne peut pas être démocratique, mais qui doit être issue de la chose. Il en va de même dans la vie de l'économie ; la chose doit être gérée à partir de l'expérience économique et du vivre dedans la vie de l'économie. C'est pourquoi la vie de l'économie d'un côté et la vie de l'esprit de l'autre doivent être séparées du parlement démocratique. C'est ainsi que naît l'organisme social triarticulé.

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Nehmen Sie einmal die Grundlage der Dreigliederung des sozialen Organismus. Nicht wahr, man kann sie in der verschiedensten Weise legen, diese Grundlagen, weil das Leben viele Grundlagen braucht. Aber eine ist diese, daß man weiß: in der neueren Zeit ist das heraufgezogen, was man nennen könnte den Impuls der Demokratie. Die Demokratie muß darin bestehen, daß jeder mündig gewordene Mensch sein Rechtsverhältnis festsetzen kann in demokratischen Parlamenten -- mittelbar oder unmittelbar gegenüber jedem anderen mündig gewordenen Menschen. Aber gerade wenn man ehrlich und aufrichtig diese Demokratie in die Welt setzen will, dann kann man die geistigen Angelegenheiten nicht im Sinne dieser Demokratie verwalten, denn da würde entscheiden müssen jeder mündig gewordene Mensch über das, was er nicht versteht. Die geistigen Angelegenheiten müssen aus dem Verständnis heraus für die Sache geregelt werden, das heißt auf sich selbst gestellt werden; sie können also überhaupt nicht in einem demokratischen Parlament verwaltet werden, sondern sie müssen ihre eigene Verwaltung haben, die nicht demokratisch sein kann, sondern die aus der Sache heraus sein muß. Ebenso ist es im Wirtschaftsleben; da muß aus der wirtschaftlichen Erfahrung und dem Drinnenleben im Wirtschaftsleben die Sache verwaltet werden. Daher muß ausgeschieden werden aus dem demokratischen Parlament das Wirtschaftsleben auf der einen Seite und das Geistesleben auf der anderen Seite. Daraus entsteht der dreigegliederte soziale Organismus.

Là y a maintenant à Tübingen le professeur Heck, c'est lui - j'en ai déjà parlé - qui a dit qu'il ne fallait absolument pas se laisser aller à dire que le rapport salarial habituel, où l'on est rémunéré pour son travail, avait quelque chose d'humiliant pour le prolétaire, car Caruso était aussi dans un rapport salarial. La différence ne serait pas de principe : Caruso chante et reçoit son salaire, et le prolétaire ordinaire travaille et reçoit aussi son salaire ; et lui, en tant que professeur, reçoit aussi son salaire lorsqu'il donne une conférence. La seule différence entre Caruso et le prolétaire serait que Caruso reçoit trente à quarante mille marks pour une soirée et le prolétaire un peu moins. Mais il ne s'agit pas d'une différence de principe, seulement d'une différence concernant la somme de la rémunération. Et donc, selon ce professeur plein d'esprit, on n'a pas besoin de ressentir quelque chose de dégradant dans la rémunération ; lui non plus ne le ressent pas ainsi. - Ce n'est qu'une parenthèse. Mais ce professeur intelligent a également écrit un long article contre la triarticulation. Là, il part de ce que si l'on articule en trois, on en arrive à trois parlements. - Et maintenant, il montre que ce n'est pas possible avec trois parlements, car il dit : dans le parlement économique, le petit artisan ne comprendra pas le point de vue du grand industriel, et ainsi de suite. - C'est là que le bon professeur s'est fait ses idées sur la triarticulation, et contre ces idées - que je trouve encore bien plus stupides que le professeur Heck ne les trouve ; je les critiquerais aussi jusqu'à la moelle -, il s'en prend à elles, mais il les a faites lui-même. Il s'agit en effet de ne pas juxtaposer trois parlements, mais d'en retirer ce qui n'a pas sa place dans un parlement. Il fait simplement trois parlements et dit : ce n'est pas possible. - C'est ainsi que l'on vit dans des concepts étrangers à la réalité et que l'on juge les autres en fonction de ceux-ci.

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Da gibt es nun in Tübingen den Professor Heck, das ist der — ich habe schon davon gesprochen —, der gesagt hat, man brauche sich durchaus nicht herbeizulassen zu sagen, daß das gewöhnliche Lohnverhältnis, wo man entlohnt wird für seine Arbeit, etwas Erniedrigendes hätte für den Proletarier, denn Caruso stehe ja auch im Lohnverhältnis. Der Unterschied wäre kein prinzipieller: Caru­so singe und bekomme seinen Lohn, und der gewöhnliche Prole­tarier arbeite und bekomme auch seinen Lohn; und er als Professor bekomme auch seinen Lohn, wenn er vortrage. 1 er Unterschied zwischen Caruso und dem Proletarier wäre nur der, daß Caruso für einen Abend dreißig- bis vierzigtausend Mark bekommt und der Proletarier etwas weniger. Aber das sei kein prinzipieller Unterschied, sondern nur ein Unterschied in bezug auf die Summe der Entlohnung. Und so braucht man, so meint dieser geistreiche Professor, in der Entlohnung durchaus nicht etwas Entwürdigendes zu fühlen; er fühle das auch nicht so. — Das nur nebenbei. Aber nun hat dieser gescheite Professor auch einen langen Artikel geschrieben gegen die Dreigliederung. Da geht er aus davon: Gliedern wir dreifach, dann kommen wir ja zu drei Parlamenten. — Und jetzt zeigt er, daß das nicht geht mit drei Parlamenten, denn er sagt: Im Wirtschaftsparlament wird der kleine Handwerker nicht verstehen die Standpunkte des Großindustriellen und so weiter. — Da hat sich der gute Professor seine Ideen über die Dreigliederung gemacht, und gegen diese Ideen — die ich noch viel dümmer finde als Professor Heck sie findet; die würde ich auch in Grund und Boden hinein kritisieren —, gegen die geht er an, aber die hat er selbst gemacht. Es handelt sich nämlich darum, daß nicht drei Parlamente nebeneinanderstehen, sondern daß herausgenommen wird das, was in kein Parlament gehört. Er macht einfach drei Parlamente und sagt: Das geht nicht. — So lebt man in wirklichkeitsfremden Begriffen und beurteilt das andere auch danach.

Maintenant, dans l'économie nationale, la théorie d'économie de peuple, est presque seulement inclus ce que sont des concepts irréels. Mais, voyez-vous, je ne pourrais pas, maintenant que le temps presse, écrire une bibliothèque entière dans laquelle seraient répertoriés tous les concepts d'économie de peuple. C'est pourquoi se trouve naturellement dans les "points essentiels" une multitude de concepts qui doivent être abordés/discutés de manière appropriée. Il me suffit par exemple d'attirer l'attention sur ce qui suit :

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Nun ist gerade in die Nationalökonomie, in die Volkswirtschaftslehre, fast nur das eingezogen, was unwirkliche Begriffe sind. Aber sehen Sie, ich könnte doch nicht jetzt, wo die Zeit drängt, eine ganze Bibliothek schreiben, worin alle volkswirtschaftlichen Begriffe aufgeführt werden. Daher finden sich natürlich in den «Kernpunkten» eine Menge von Begriffen, die sachgemäß besprochen werden müssen. Ich brauche zum Beispiel nur auf folgendes aufmerksam zu machen:

N'est-il pas vrai qu'à une époque que nous avons dépassée, les relations sociales étaient essentiellement le fruit de la conquête ? Un territoire quelconque était occupé par un peuple ou une race ; un autre peuple faisait irruption et conquérait le territoire. Les races ou les peuples qui étaient auparavant à l'intérieur ont été soumis au travail. Le peuple conquérant a pris le sol en possession, ce qui a créé un certain rapport entre les conquérants et les conquis. Les conquérants, du fait qu'ils étaient des conquérants, avaient le sol en possession. De ce fait, ils étaient les plus forts économiquement, les conquis étaient les plus faibles économiquement, et il s'en est formé ce qui est devenu un rapport de droit. C'est pourquoi, à presque toutes les époques anciennes de l'évolution historique, on a des rapports de droit fondés sur des conquêtes, c'est-à-dire des privilèges et des droits de désavantage. Les temps sont maintenant venus où il n'était plus possible de conquérir librement. Vous pouvez étudier la différence entre la conquête libre et la conquête liée en regardant par exemple le début du Moyen Âge. Vous pouvez étudier comment certains peuples, les Goths, sont descendus vers le sud, mais dans des régions entièrement occupées ; ils ont alors été amenés, en ce qui concerne l'ordre social, à faire autre chose que les Francs, qui sont allés vers l'ouest et n'y ont pas trouvé de régions entièrement occupées. Cela a donné naissance à d'autres droits de conquête. À l'époque moderne, ce ne sont pas seulement les droits fonciers issus des conquêtes qui ont agi, mais aussi les droits des humains qui avaient des privilèges de possession et qui pouvaient désormais s'approprier les moyens de production grâce au pouvoir économique. La possession des moyens de production, c'est-à-dire la propriété privée des capitaux, s'est ajoutée au droit foncier au sens actuel du terme. Cela a donné lieu à des rapports de droit issus de rapports économiques. Comme vous le voyez, ces rapports de droit sont nés tout seuls à partir de rapports économiques.

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Nicht wahr, in einer Zeit, über die wir hinaus sind, da entstanden soziale Verhältnisse im Grunde genommen einzig und allein durch Eroberung. Irgendein Territorium wurde von einem Volke oder von einer Rasse besetzt; ein anderes Volk brach herein und eroberte das Gebiet. Diejenigen Rassen oder Völker, die früher drinnen waren, wurden heruntergedrängt zur Arbeit. Das erobernde Volk nahm den Boden in Besitz, und dadurch entstand ein gewisses Verhältnis zwischen Eroberern und Eroberten. Die Eroberer hatten dadurch, daß sie Eroberer waren, den Boden in Besitz. Dadurch waren sie die wirtschaftlich Starken, die Eroberten waren die wirtschaftlich Schwachen, und es bildete sich das heraus, was ein Rechtsverhältnis wurde. Daher hat man in fast allen älteren Epochen im geschichtlichen Werden durch Eroberungen begründete Rechtsverhältnisse, das heißt Vorrechte und Benachteiligungsrechte. Nun kamen die Zeiten herbei, in denen nicht mehr frei erobert werden konnte. Sie können den Unterschied studieren im freien und gebundenen Erobern, wenn Sie zum Beispiel sich das frühe Mittelalter ansehen. Sie können studieren, wie gewisse Völkerschaften, die Goten, hinuntergedrungen waren nach dem Süden, aber in vollbesetzte Gebiete; da wurden sie zu anderem veranlaßt in bezug auf die soziale Ordnung als die Franken, die nach dem Westen zogen und dort nicht vollbesetzte Gebiete fanden. Dadurch entstanden andere Erobererrechte. In der neueren Zeit wirkten dann nicht allein die von Grund und Boden abhängigen Rechte, welche aus Eroberungen hervorgegangen waren, es kamen dazu die Rechte derjenigen Menschen, die Vorrechte aus Besitz hatten und die jetzt durch wirtschaftliche Macht sich aneignen konnten die Produktionsmittel. Da kam zu dem, was Bodenrecht ist im heutigen Sinne, der Besitz der Produktionsmittel dazu, das heißt der Privatbesitz von Kapitalien. Das ergab dann Rechtsverhältnisse aus wirtschaftlichen Verhältnissen heraus. Sie sehen, es sind diese Rechtsverhältnisse ganz allein aus den wirtschaftlichen Verhältnissen heraus entstanden.

Maintenant, les humains viennent et veulent des notions de pouvoir économique, d'importance économique de la terre, ils veulent des concepts de moyens d'exploitation, de moyens de production, de capitaux, etc., mais ils n'ont pas vraiment de compréhension profonde du cours des choses. Ils prennent alors les faits superficiels et n'arrivent pas à comprendre ce qui se cache derrière les droits fonciers, derrière les rapports de force en ce qui concerne les moyens de production. Bien sûr, toutes ces choses sont prises en compte dans mon livre. Là est pensé correctement ; là est, quand est parlé de droits, à partir de la conscience de la manière dont le droit s'est développé à travers les siècles ; quand on parle de capital, on parle de la conscience de comment dont le capital est devenu. Là est évité soigneusement d'utiliser un concept qui n'est pas entièrement saisi à partir de sa genèse ; c'est pourquoi ces concepts se présentent différemment que dans les manuels habituels d'aujourd'hui.

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Nun kommen die Menschen und wollen Begriffe von wirtschaftlicher Macht, von der wirtschaftlichen Bedeutung des Grund und Bodens, sie wollen Begriffe der Betriebsmittel, der Produktionsmittel, der Kapitalien und so weiter haben. ja, aber sie habenkeine wirklich tiefere Einsicht in den Gang der Dinge. Da nehmensie dann die oberflächlichen Tatsachen und kommen nicht darauf,was eigentlich hinter den Bodenrechten, hinter den Machtverhältnissen in bezug auf die Produktionsmittel steckt. Natürlich, alle diese Dinge sind in meinem Buche berücksichtigt. Da ist richtig gedacht; da ist, wenn von Rechten gesprochen wird, aus dem Bewußtsein heraus gesprochen, wie das Recht durch Jahrhunderte hindurch entstanden ist; da ist, wenn von Kapital gesprochen wird, aus dem Bewußtsein heraus gesprochen, wie das Kapital geworden ist. Da ist sorgfältig vermieden, einen Begriff anzuwenden, der nicht vollständig aus der Entstehung heraus gefaßt ist; daher nehmen sich diese Begriffe anders aus als in den gewöhnlichen heutigen Lehrbüchern.

Mais aussi quelque chose d'autre est pris en compte. Prenons un fait précis, n'est-ce pas, le fait que le protestantisme est né un jour. Dans les livres d'histoire, on raconte très souvent que Tetzel a parcouru l'Europe centrale et que les gens étaient indignés par la vente des indulgences et autres choses de ce genre. Mais ce n'était pas seulement cela, ce n'est qu'une vision superficielle. L'élément principal était le fait qu'il y avait à Gênes une banque pour le compte de laquelle - et non pour le compte du pape - ce marchand d'indulgences se déplaçait en Allemagne, car cette banque avait accordé des crédits au pape pour ses autres besoins. Toute cette histoire était une entreprise capitaliste. Cet exemple du commerce des indulgences en tant qu'entreprise capitaliste, où même le spirituel a été négocié, vous permet d'étudier - ou plutôt, si l'on commence à étudier, on arrive peu à peu à la conclusion - que finalement, tout pouvoir du capital se ramène à la suprématie du spirituel. Si vous étudiez comment le capital a acquis son pouvoir, vous trouverez partout la suprématie du spirituel. Et c'est vraiment ainsi. N'est-ce pas, celui qui est intelligent, celui qui est débrouillard, a un pouvoir plus grand que celui qui n'est pas intelligent, qui n'est pas débrouillard. Et c'est ainsi que naissent, de façon justifiée ou non, beaucoup de choses qui sont des concentrations de capital. Il faut en tenir compte lorsqu'on envisage le concept de capital. Ces études réelles permettent de comprendre que le capital repose sur le développement du pouvoir spirituel et que le pouvoir de l'ancien esprit théocratique est venu s'ajouter aux droits fonciers, aux droits de conquête, d'un autre côté. L'ancienne Église est à l'origine d'une grande partie de ce qui a ensuite été transféré dans le capitalisme moderne. Il existe un lien secret entre le pouvoir capitaliste moderne et le pouvoir de l'ancienne Église. Et tout cela s'est rassemblé en un méli-mélo dans l'État de pouvoir moderne. Là-dedans, vous trouvez les restes de l'ancienne théocratie, les restes des anciennes conquêtes. Et finalement, les conquêtes modernes sont venues s'y ajouter, et la conquête la plus moderne serait maintenant la conquête de l'État par le socialisme. Mais en réalité, ce n'est pas ainsi qu'il faut procéder. Il doit y avoir quelque chose de nouveau, qui fasse complètement table rase de ces anciens concepts et impulsions. C'est pourquoi il est important que nous nous penchions aussi, dans nos études, sur les notions qui sont à la base de tout cela. Nous devons aujourd'hui expliquer précisément à tous ceux qui veulent parler de choses sociales ce qu'est le droit, ce qu'est le pouvoir et ce qui est en réalité un bien [économique], un bien sous forme de marchandises et autres. C'est dans ce domaine que les plus grandes erreurs sont commises. Je veux par exemple attirer votre attention sur l'une d'entre elles ; si vous n'y êtes pas attentifs, vous comprendrez mal beaucoup de choses dans mon livre.

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Aber auch noch etwas anderes ist berücksichtigt. Nehmen wir eine bestimmte Tatsache, nicht wahr, die Tatsache, wie der Protestantismus einmal entstanden ist. In den Geschichtsbüchern wird es ja sehr häufig so erzählt, daß der Tetzel herumgezogen ist innerhalb Mitteleuropas und daß die Leute entrüstet waren über den Ablaßverkauf und dergleichen. Aber das war es nicht allein, das ist nur die Oberflächenansicht. Die Hauptsache, die dahinter stak, war die Tatsache, daß es in Genua ein Bankhaus gab, in dessen Auftrag — nicht im Auftrag des Papstes — dieser Ablaßkrämer in Deutschland herumzog, denn dieses Bankhaus hatte dem Papst für seine anderen Bedürfnisse Kredite gewährt. Die ganze Geschichte war eine kapitalistische Unternehmung. An diesem Beispiel des Ablaßhandels als einer kapitalistischen Unternehmung, wo sogar auch mit Geistigem gehandelt worden ist, an diesem Beispiel können Sie studieren — oder besser gesagt, wenn man da anfängt zu studieren, kommt man allmählich darauf —, daß schließlich alle Kapitalmacht zurückgeht auf die Übermacht des Geistigen. Studieren Sie, wie das Kapital eigentlich zu seiner Macht gekommen ist, so finden Sie überall die Übermacht des Geistigen. Und so ist es wirklich. Nicht wahr, wer schlau ist, wer findig ist, der hat eine größere Macht als derjenige, der nicht schlau, der nicht findig ist. Und auf diese Art entsteht gerechtfertigterweise — oder auch ungerechtfertigterweise — vieles, was Zusammenscharrung des Kapitals ist. Das muß berücksichtigt werden, wenn man ins Auge faßt den Kapitalbegriff. Bei solchen realen Studien kommt man dahinter, daß Kapital auf Entfaltung der geistigen Macht beruht und daß zu den Grund- und Bodenrechten, zu den Erobererrechten, von anderer Seite hinzugekommen ist die Macht des alten theokratischen Geistes. Von der alten Kirche ist viel von dem ausgegangen, was dann übergegangen ist eigentlich in den modernen Kapitalismus. Es gibt einen geheimen Zusammenhang zwischen der modernen kapitalistischen Macht und der Macht der alten Kirche. Und das alles hat sich zu einem Kuddelmuddel zusammengezogen in den modernen Machtstaat. Da drinnen finden Sie die Überreste der alten Theokratie, die Überreste der alten Eroberungen. Und schließlich kamen die modernen Eroberungen dazu, und die allermodernste Eroberung soll jetzt die Eroberung des Staates durch den Sozialismus sein. Aber so darf man es in Wirklichkeit nicht machen. Es muß etwas Neues werden, was mit diesen alten Begriffen und Impulsen vollständig aufräumt. Daher wird es darauf ankommen, daß wir uns bei unseren Studien auch befassen mit den Begriffen, die hier zugrundeliegen. Wir müssen heute jedem, der über soziale Sachen reden will, genau Aufschluß geben darüber, was Recht ist, was Macht ist und was in Wirklichkeit ein [wirtschaftliches] Gut ist, ein Gut in Form von Waren und dergleichen. Auf diesem Gebiet werden die größten Fehler gemacht. Ich will zum Beispiel auf einen aufmerksam machen; wenn Sie darauf nicht aufmerksam sind, werden Sie vieles in meinem Buche mißverstehen.

Aujourd'hui, on pense souvent que la marchandise est du travail stocké, que le capital est aussi du travail stocké. - Vous pouvez dire qu'il est inoffensif d'avoir de telles notions. Ce n'est pas inoffensif, car de tels concepts empoisonnent toute la pensée sociale. Vous voyez, qu'en est-il du travail - le travail en tant que dépense/application de force de travail ? Oui, il y a une grande différence entre, par exemple, utiliser ma force musculaire physique en faisant du sport et couper du bois. Si je fais du sport, j'use ma force musculaire physique ; je peux être aussi fatigué et devoir remplacer ma force musculaire autant que celui qui coupe du bois. Je peux appliquer la même quantité de travail au sport qu'à la coupe de bois. La différence ne réside pas dans le fait que la force de travail doit être remplacée - elle doit bien sûr être remplacée - mais dans le fait que l'une des forces de travail est utilisée uniquement pour moi, dans un sens égoïste, l'autre dans un sens social pour la société. C'est la fonction sociale qui différencie ces choses. Si je dis maintenant que quelque chose est du travail accumulé, je ne tiens pas compte du fait que le travail cesse en fait d'être dans une chose quelconque au moment où l'on ne travaille plus. Je ne peux pas dire que le capital est du travail accumulé, mais je dois dire que le travail n'existe que tant qu'il est effectué. Mais dans notre ordre social actuel, le capital conserve le pouvoir d'appeler à nouveau le travail à tout moment. Ce n'est pas dans le fait que le capital soit du travail accumulé que réside la fatalité, comme le pense Marx, mais dans le fait que le capital donne le pouvoir d'appeler à son service un nouveau travail - non pas un travail accumulé - mais un nouveau travail. Il dépend beaucoup de cela, et il dépendra encore beaucoup de cela, que l'on parvienne à des notions claires, fondées sur la réalité, sur ces choses. Et c'est à partir de telles notions, qui sont maintenant totalement ancrées dans la réalité, que ce livre est écrit. Il ne tient pas compte de ces notions, qui étaient tout à fait utiles pour l'éducation du prolétariat. Mais aujourd'hui, alors que l'on doit construire quelque chose, ces notions n'ont plus de sens.

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Es herrscht heute vielfach die Ansicht, daß Ware aufgespeicherte Arbeit ist, daß auch Kapital aufgespeicherte Arbeit ist. — Sie können sagen, es sei harmlos, solche Begriffe zu haben. Es ist nicht harmlos, denn solche Begriffe vergiften das ganze soziale Denken. Sehen Sie, wie ist es eigentlich mit der Arbeit — Arbeit als Aufwendung von Arbeitskraft? Ja, da verhält es sich so, daß ein großer Unterschied ist, ob ich zum Beispiel meine physische Muskelkraftabnütze, indem ich Sport treibe, oder ob ich Holz hacke. Wenn ichSport treibe, da nütze ich meine physische Muskelkraft ab; ichkann geradeso müde werden und meine Muskelkraft wieder erset‑zen müssen wie einer, der Holz hackt. Dieselbe Menge von Arbeitkann ich anwenden auf den Sport wie auf das Holzhacken. Der Unterschied ist nicht da in bezug darauf, daß die Arbeitskraft wieder ersetzt werden muß — sie muß natürlich ersetzt werden —, sondern der Unterschied besteht darin, daß die eine Arbeitskraft angewendet wird nur für mich, im egoistischen Sinn, die andere im sozialen Sinn für die Gesellschaft. Durch die soziale Funktion unterscheiden sich diese Dinge. Sage ich jetzt, irgend etwas ist aufgespeicherte Arbeit, so berücksichtige ich nicht, daß die Arbeit eigentlich aufhört, in irgendeiner Sache drinnen zu sein in dem Augenblick, wo nicht mehr gearbeitet wird. Nicht kann ich sagen: Das Kapital ist aufgespeicherte Arbeit —, sondern ich muß sagen: Die Arbeit ist nur so lange da, als sie verrichtet wird. Aber in unserer heutigen sozialen Ordnung behält das Kapital die Macht, die Arbeit jederzeit wiederum aufzurufen. Nicht in dem liegt das Verhängnisvolle, was Marx meint, daß Kapital aufgespeicherte Arbeit ist, sondern in der Einrichtung, daß Kapital die Macht gibt, neue Arbeit — nicht aufgespeicherte Arbeit —, sondern neue Arbeit immer wiederum in seinen Dienst zu stellen. Davon hängt viel ab, und davon wird weiter viel abhängen, daß man zu klaren, in der Wirklichkeit fußenden Begriffen über diese Dinge kommt. Und von solchen Begriffen, die nun ganz drinnenstecken in der Wirklichkeit, geht dieses mein Buch aus. Das rechnet nicht mit solchen Begriffen, die ganz nützlich waren für die Erziehung des Proletariats. Aber heute, wo man etwas bauen soll, haben sie keinen Sinn mehr, diese Begriffe.

Vous voyez, quand je dis que le capital est du travail accumulé, c'est bon pour l'éducation du prolétariat ; il a reçu les sentiments qu'il devait recevoir. Il n'était pas important que le concept soit fondamentalement faux - on peut éduquer même avec des concepts fondamentalement faux. Mais on ne peut construire quelque chose qu'avec des concepts corrects. C'est pourquoi nous avons aujourd'hui besoin de concepts corrects dans tous les domaines de l'économie de peuple et nous ne pouvons pas continuer à travailler avec des concepts erronés. Ce n'est pas par frivolité que je dis que l'on peut aussi éduquer avec des concepts erronés, mais en vertu des principes généraux de l'éducation. Vous voyez, lorsque vous racontez des contes de fées aux enfants, vous ne voulez pas non plus construire avec ces choses que vous développez ; dans l'éducation, quelque chose d'autre entre en ligne de compte que ce qui entre en ligne de compte pour la construction dans la réalité physique. Il faut travailler avec des concepts réels. Un concept tel que "le capital est du travail accumulé" n'est pas un concept. Le capital est un pouvoir et confère le pouvoir de mettre à tout moment à son service le travail qui se crée. C'est un vrai concept avec une logique de fait. Il faut travailler avec des concepts vrais dans ces domaines. C'est ce qui a été tenté dans les "points essentiels". C'est pourquoi je pense qu'une grande partie de ce qui n'y figure pas en termes de définition des termes, de caractéristiques des termes, doit être élaborée. Et celui qui peut contribuer à l'élaboration de ce dont on a besoin pour comprendre le mode de pensée, la base de ce livre, apportera une très bonne contribution à ces soirées d'étude. C'est donc ce qui compte, mes très chers présents, c'est ce qui compte tout particulièrement.

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Sehen Sie, wenn ich sage: Kapital ist aufgespeicherte Arbeit —, so ist das gut für die Erziehung des Proletariats; es bekam die Gefühle, die es bekommen sollte. Da kam es nicht darauf an, daß der Begriff grundfalsch ist — erziehen kann man auch mit grundfalschen Begriffen. Aber etwas aufbauen, das kann man nur mit richtigen Begriffen. Daher brauchen wir heute auf allen Gebieten der Volkswirtschaft richtige Begriffe und können nicht weiter mit falschen Begriffen arbeiten. Das sage ich nicht aus Frivolität, daß man auch mit falschen Begriffen erziehen kann, sondern aus allgemeinen Erziehungsgrundsätzen heraus. Sehen Sie, wenn Sie Kindern Märchen erzählen, dann wollen Sie ja auch nicht mit diesen Dingen, die Sie da herausentwickeln, bauen; bei der Erziehung kommt etwas anderes in Betracht, als in Betracht kommt beim Aufbauen in der physischen Wirklichkeit. Da muß mit wirklichen Begriffen gearbeitet werden. Solch ein Begriff wie «Kapital ist aufgespeicherte Arbeit», das ist kein Begriff. Kapital ist Macht und verleiht Macht, jederzeit neu entstehende Arbeit in seinen Dienst zu stellen. Das ist ein wirklicher Begriff mit Tatsachenlogik. Mit wahren Begriffen muß man arbeiten auf diesen Gebieten. Das ist versucht worden in den «Kernpunkten». Daher glaube ich, daß viel von dem, was da nicht drinnensteht an Definition der Begriffe, an Charakteristik der Begriffe, daß das erarbeitet werden muß. Und wer dann dazu beitragen kann, daß dies erarbeitet wird, was man braucht, um das zu verstehen, was die Denkweise, die Grundlage dieses Buches ist, der wird sehr Gutes beitragen zu diesen Studienabenden. Also darauf kommt es an, meine sehr verehrten Anwesenden, darauf kommt es ganz besonders an.

Oui, n'est-ce pas, il faudrait écrire un dictionnaire si l'on voulait clarifier tous les termes - mais ce qu'est le "capital" peut maintenant être réglé en une seule soirée d'étude de ce genre. Sans que l'on ait clairement compris aujourd'hui : qu'est-ce que le capital ? Qu'est-ce que la marchandise ? Qu'est-ce que le travail ? Qu'est-ce que le droit ? -, sans ces notions, on ne peut pas avancer. Et ces notions sont tout à fait confuses dans les cercles les plus larges ; elles doivent avant tout être rectifiées. Aujourd'hui, on se désespère quand on parle de l'ordre social avec des gens ; ils ne peuvent pas participer parce qu'ils n'ont pas appris à maîtriser la réalité. C'est ce qu'il faut faire.

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Ja, nicht wahr, man müßte ein Lexikon schreiben, wenn man alle Begriffe klarmachen wollte —, aber was «Kapital» ist, das kann jetzt an einem einzigen solchen Studienabend erledigt werden. Ohne daß man heute klar begriffen hat: Was ist eigentlich Kapital? Was ist Ware? Was ist Arbeit? Was ist Recht? —, ohne diese Begriffe kommt man nicht weiter. Und diese Begriffe sind ganz konfus in den weitesten Kreisen; sie müssen vor allen Dingen richtiggestellt werden. Man verzweifelt heute ja geradezu, wenn man redet mit Leuten über die soziale Ordnung; sie können nicht mit, weil sie nicht gelernt haben, die Wirklichkeit zu beherrschen. Das ist dasjenige, was namentlich besorgt werden sollte.

Derrière la guerre une révolution ? + ajustement des concepts dans les fondements voir #


PREMIÈRE SÉANCE D'ÉTUDES, Stuttgart, 30 juillet 1919.

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ERSTER STUDIENABEND, Stuttgart, 30. Juli 1919.

L'histoire du mouvement social.

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Zur Geschichte der sozialen Bewegung .

Rudolf Steiner : Mes très chers présents ! Je ne vais pas anticiper ce soir sur ce qui doit être mis en place ici en tant que soirées d'étude qui se tiendront sur la base du livre "Les points essentiels de la question sociale", mais je vais essayer de vous donner une sorte d'introduction à ces soirées. Par cette introduction, je voudrais vous faire ressentir les points de vue qui ont présidé à l'écriture de ce livre. Il a été écrit avant tout en fonction de l'actualité immédiate, de la conviction que la question sociale a elle aussi pris une nouvelle forme à la suite des événements actuels et qu'il est nécessaire de parler aujourd'hui de la question sociale d'une manière tout à fait différente de celle dont on parlait, de quelque côté que ce soit, de la question sociale avant la catastrophe de la guerre mondiale. Avec ce livre, on a en quelque sorte essayé, à ce moment de l'évolution de l'humanité où la question sociale devient particulièrement urgente et où tout homme qui vit consciemment aujourd'hui, qui ne vit pas la vie de l'humanité en somnolant et en dormant, devrait savoir quelque chose sur ce qui doit se passer dans le sens de ce qu'on appelle habituellement la question sociale. Il serait peut-être bon de jeter un petit coup d'œil en arrière aujourd'hui. J'aurai peut-être à mentionner des choses - mais nous les présenterons sous un jour un peu différent de celui dans lequel elles ont été présentées -, j'aurai à mentionner des choses que vous connaissez en partie.

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Rudolf Steiner: Meine sehr verehrten Anwesenden! Ich werde heute Abend nicht demjenigen vorgreifen, was hier eigentlich eingerichtet werden soll als Studienabende, die abgehalten werden auf Grundlage des Buches «Die Kernpunkte der Sozialen Frage», sondern ich werde versuchen, Ihnen eine Art von Einleitung zu diesen Abenden zu geben. Ich möchte durch diese Einleitung in Ihnen eine Empfindung davon hervorrufen, aus welchen Gesichtspunkten heraus dieses Buch geschrieben worden ist. Es ist vor allen Dingen geschrieben worden aus der unmittelbaren Gegenwart heraus, aus der Überzeugung, daß auch die soziale Frage durch die Ereignisse der Gegenwart eine neue Gestalt angenommen hat und daß es notwendig ist, heute über die soziale Frage ganz anders zu reden, als von irgendeiner Seite her über die soziale Frage vor der Weltkriegskatastrophe geredet worden ist. Mit diesem Buch ist gewis­sermaßen versucht worden, jetzt in diesem Zeitpunkte der Mensch­heitsentwicklung, in welchem die soziale Frage ganz besonders dringend wird und in welchem eigentlich jeder Mensch, der be­wußt heute mitlebt, der nicht schläfrig und schlafend das Leben der Menschheit mitlebt, etwas wissen sollte über das, was zu geschehen hat im Sinne dessen, was man gewöhnlich die soziale Frage nennt. Da wird es vielleicht zunächst ganz gut sein, wenn wir heute ein bißchen zurückblicken. Ich werde ja dabei vielleicht Dinge zu erwähnen haben -- aber wir werden sie dann in ein etwas anderes Licht rücken, als sie gerückt worden sind —, ich werde Dinge zu erwähnen haben, welche Ihnen zum Teil bekannt sind.

Vous savez probablement que ce qui est dit aujourd'hui sur la question sociale est dit depuis relativement longtemps. Et on cite aujourd'hui les noms de Proudhon, Fourier, Louis Blanc comme les premiers à avoir traité la question sociale jusqu'au milieu du XIXe siècle. Vous savez aussi que la manière dont cette question sociale a été traitée jusqu'au milieu du XIXe siècle est appelée par les représentants actuels, du moins par de nombreux représentants actuels de la question sociale, "l'ère des utopies sociales". Il est bon de préciser ce que l'on entend par là lorsque l'on dit qu'à son premier stade, la question sociale est apparue de telle sorte qu'elle vivait dans un "âge des utopies". Mais on ne peut pas parler de cette chose dans un sens absolu, on ne peut en fait parler qu'à partir des sentiments des représentants de la question sociale dans le présent. Ils ressentent les choses comme je veux les décrire maintenant. Ils sentent que toutes les questions sociales qui sont apparues à l'époque dont je veux parler en premier lieu étaient au stade de l'utopie. Et qu'est-ce que les gens entendent par là quand ils disent que la question sociale était alors au stade de l'utopie ? Ils entendent par là - on l'a déjà remarqué à l'époque ; Saint-Simon et Fourier l'ont bien remarqué - qu'il y a, même après la Révolution française, des humains d'une certaine minorité sociale qui sont en possession des moyens de production et aussi d'autres biens humains, et qu'il y a un grand nombre d'autres humains - c'est même la majorité - qui ne sont pas en possession de tels biens. Ces personnes ne peuvent travailler sur les moyens de production qu'en se mettant au service de ceux qui possèdent les moyens de production et aussi la terre - elles n'ont en fait rien d'autre qu'elles-mêmes et leur force de travail. On a noté que la vie de cette grande masse de l'humanité est une vie de détresse, en grande partie dans la pauvreté, par opposition à ceux qui sont en minorité ; et on a fait allusion à la situation de la minorité et à la situation de la majorité.

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Sie wissen ja wahrscheinlich, daß man das, was heute zur sozia­len Frage vorgebracht wird, seit verhältnismäßig langer Zeit vor­bringt. Und es werden ja auch heute die Namen Proudhon, Fourier, Louis Blanc genannt als die ersten, die bis in die Mitte des 19. Jahrhunderts hinein die soziale Frage behandelt haben. Sie wissen ja auch, daß die Art, wie diese soziale Frage bis in die Mitte des 19.$ Jahrhunderts hinein behandelt wurde, von den heutigen Vertretern, wenigstens von vielen heutigen Vertretern der sozialen Frage, genannt wird «das Zeitalter der sozialen Utopien». Es ist gut, sich klarzumachen, was man eigentlich damit meint, wenn man sagt: In ihrem ersten Stadium trat die soziale Frage so auf, daß sie in einem «Zeitalter der Utopien» lebte. Aber man kann über diese Sache nicht im absoluten Sinne reden, sondern man kann eigentlich nur aus den Empfindungen der Vertreter der sozialen Frage in der Gegenwart reden. Die empfinden so, wie ich es jetzt schildern will. Sie empfinden, daß alle sozialen Fragen, die in dem Zeitalter auftraten, wovon ich zuerst sprechen will, im Stadium der Utopie waren. Und was verstehen die Leute darunter, wenn sie sagen, die soziale Frage war damals im Stadium der Utopie? Darunter verstehen sie das hat man ja auch schon dazumal bemerkt; Saint-Simon und Fourier haben es gut bemerkt —, daß da sind, auch nach der Französischen Revolution, Menschen einer gewissen sozialen Minderheit, welche im Besitz der Produktionsmittel und auch anderer menschlicher Güter sind, und daß da sind eine große Anzahl von anderen Menschen — es ist sogar die Mehrzahl —, welche nicht in solchem Besitze sind. Diese Menschen können an den Produktionsmitteln nur dadurch arbeiten, daß sie in die Dienste derjenigen treten, die die Produktionsmittel und auch den Boden besitzen — sie haben im Grunde genommen nichts anderes als sich selbst und ihre Arbeitskraft. Man hat bemerkt, daß das Leben dieser großen Masse der Menschheit eine Bedrängnis ist, zum großen Teil in Armut verläuft im Gegensatz zu denjenigen, die in der Minderheit sind; und man hat hingewiesen auf die Lage der Minderheit und auf die Lage der Mehrheit.

Ceux qui ont écrit sur cette situation sociale de l'humanité, comme Saint-Simon et Fourier, mais aussi Proudhon, sont partis d'un certain postulat. Ils sont partis du principe qu'il était nécessaire d'attirer l'attention des humains sur ce point : Voyez, la grande masse vit dans la misère, dans l'absence de liberté, dans la dépendance économique, ce n'est pas une existence digne de l'humain pour la grande masse. Il faut changer cela. - Et on a alors imaginé toutes sortes de moyens par lesquels cette inégalité entre les humains pouvait être modifiée. Mais il y avait toujours une certaine condition préalable, et cette condition préalable était que l'on se disait : si l'on sait ce qui fonde l'inégalité et si l'on a des paroles suffisamment fortes, si l'on a une conscience morale suffisante pour attirer fortement l'attention sur le fait que la grande majorité des humains vit dans la dépendance économique et juridique et est pauvre, alors ce discours touchera les cœurs, les âmes de la minorité, des nantis, de la minorité la plus favorisée. Et c'est en faisant comprendre à cette minorité que les choses ne peuvent pas rester en l'état, qu'il faut apporter des changements, qu'il faut mettre en place un autre ordre social, qu'un autre ordre social sera instauré. La condition préalable était donc que les humains se laissent entraîner à faire quelque chose pour la libération de la grande masse de l'humanité à partir de l'élan de leur âme. Et on proposait alors ce qu'il fallait faire. Et on pensait que si la minorité, si les gens qui sont les dirigeants, les leaders, comprenaient que ce qu'on voulait faire était bien, alors il y aurait une amélioration générale de la situation de l'humanité.

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Diejenigen, die nun so wie Saint-Simon und Fourier wie auch noch Proudhon über diese soziale Lage der Menschheit geschrieben haben, die sind von einer gewissen Voraussetzung ausgegangen. Sie sind ausgegangen von der Voraussetzung, daß man notwendig habe, die Menschen darauf hinzuweisen: Seht, die große Masse lebt in Elend, in Unfreiheit, in wirtschaftlicher Abhängigkeit, das ist für die große Masse kein menschenwürdiges Dasein. Das muß geändert werden. — Und man hat dann allerlei Mittel ausersonnen, durch welche diese Ungleichheit unter den Menschen geändert werden kann. Aber es war immer eine bestimmte Voraussetzung da, und diese Voraussetzung war, daß man sich sagte: Wenn man weiß, worinnen die Ungleichheit begründet ist und wenn man eindringliche Worte genug hat, wenn man sittliches Bewußtsein selbst genug hat, um stark darauf hinzuweisen, daß die große Mehrzahl der Menschen in wirtschaftlicher und rechtlicher Abhängigkeit lebt und arm ist, so wird diese Rede die Herzen, die Seelen der Minderheit, der Begüterten, der begünstigteren Minderheit ergreifen. Und es wird dadurch, daß diese Minderheit einsieht, so kann es nicht bleiben, man muß Änderungen herbeiführen, es muß eine andere Gesellschaftsordnung kommen, es wird dadurch eine andere Gesellschaftsordnung herbeigeführt werden. Also die Voraussetzung war die, daß die Menschen sich herbeilassen wer den, aus ihrem innersten Seelenantrieb heraus etwas zur Befreiung der großen Masse der Menschheit zu tun. Und dann schlug man vor, was man tun sollte. Und man glaubte, wenn die Minderheit, wenn die Menschen, die die leitenden, führenden Menschen sind, einsehen, daß das gut ist, was man tun will, dann wird eine all gemeine Besserung der Lage der Menschheit eintreten.

Beaucoup de choses extrêmement intelligentes ont été dites de ce côté-là, mais tout ce qui a été entrepris dans ce sens est aujourd'hui considéré comme utopique par la plupart des représentants de la question sociale. Cela signifie qu'aujourd'hui, on ne compte plus sur le fait qu'il suffise de dire : c'est ainsi qu'il faudrait organiser le monde, et l'inégalité économique, politique et juridique des humains cesserait. - Il ne sert à rien aujourd'hui d'en appeler à la compréhension, au discernement des humains qui sont favorisés, qui sont dans le privilège, qui sont en possession des moyens de production et autres. Si je dois exprimer ce qui a été perdu au cours de la deuxième moitié du XIXe siècle, je dois dire que l'on a perdu la foi en la compréhension et en la bonne volonté des humains. C'est pourquoi les représentants de la question sociale, dont je parle maintenant, se disent : on peut élaborer de beaux plans sur la manière d'aménager le monde des humains, mais il n'en résultera rien ; car on aura beau prêcher de beaux plans, on aura beau faire appel aux cœurs et aux âmes des minorités dirigeantes avec des paroles touchantes, il ne se passera rien. Tout cela, ce sont des idées sans valeur, et les idées sans valeur qui imaginent l'avenir sont en réalité, pour parler en termes populaires, des utopies. Il ne sert donc à rien, dit-on, d'imaginer quoi que ce soit dans l'avenir, car il n'y aura personne pour renoncer à ses intérêts, pour être saisi par sa conscience, par son sens moral, etc. - La foi dans la conscience et le discernement moral a justement été perdue dans les cercles les plus larges, notamment chez les représentants de la question sociale. On se dit que les humains n'agissent pas du tout en fonction de leur discernement lorsqu'ils prennent des mesures sociales ou lorsqu'ils mènent leur vie sociale, ils agissent en fonction de leur intérêt. Et les possédants ont bien entendu intérêt à rester dans leurs possessions. Les privilégiés sociaux ont intérêt à conserver leurs privilèges sociaux. C'est pourquoi il est illusoire de compter sur le fait qu'il suffit de dire aux gens de faire ceci ou cela. Ils ne le font pas, parce qu'ils n'agissent pas en fonction de leur compréhension, mais en fonction de leur intérêt.

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Es ist sehr viel außerordentlich Gescheites gesagt worden von dieser Seite her, allein alles dasjenige, was in dieser Richtung unternommen worden ist, das empfindet man heute bei den meisten Vertretern der sozialen Frage als utopisch. Das heißt, man rechnet heute nicht mehr darauf, daß man nur zu sagen braucht: So müßte man die Welt einrichten, dann würde die wirtschaftliche und politische und rechtliche Ungleichheit der Menschen aufhören. — Esnützt heute nichts, an das Verständnis zu appellieren, an die Einsicht der Menschen, die begünstigt sind, die im Vorrecht sind, dieim Besitz sind der Produktionsmittel und dergleichen. Wenn ich ausdrücken soll, was da im Laufe der zweiten Hälfte des 19. Jahrhunderts verloren worden ist, so muß ich sagen, verloren worden ist der Glaube an die Einsicht und an den guten Willen der Menschen. Daher sagen sich die Vertreter der sozialen Frage, die ich jetzt meine: Schöne Pläne ausdenken, wie man die Menschenwelt einrichten soll, das kann man, aber dabei kommt nichts heraus; denn wenn man noch so schöne Pläne predigt, wenn man mit noch so rührenden Worten appelliert an die Herzen, an die Seelen der regierenden Minderheiten, so wird doch nichts geschehen. Das alles sind wertlose Ideen, und wertlose Ideen, welche die Zukunft ausmalen, das sind eben in Wirklichkeit, populär gesprochen, Utopien. Es hat also gar keinen Zweck, so sagt man, irgend etwas auszumalen, was in der Zukunft geschehen soll, denn es wird niemand da sein, der von seinen Interessen losläßt, der ergriffen werden kann in bezug auf sein Gewissen, in bezug auf seine sittliche Einsicht und so weiter. — Den Glauben an Gewissen und sittliche Einsicht hat man eben in weitesten Kreisen, namentlich bei den Vertretern der sozialen Frage, verloren. Man sagt sich, die Menschen handeln ja gar nicht nach ihrer Einsicht, wenn sie soziale Einrichtungen treffen oder wenn sie ihr soziales Leben führen, sie handeln nach ihrem Interesse. Und die Besitzenden haben selbstverständlich ein Interesse daran, in ihrem Besitz zu bleiben. Die sozial Bevorrechteten haben ein Interesse an der Erhaltung der sozialen Vorrechte. Daher ist es eine Illusion, darauf zu rechnen, daß man nur zu sagen braucht, die Leute sollen das oder jenes machen. Sie tun es eben nicht, weil sie nicht aus ihrer Einsicht, sondern aus ihrem Interesse heraus handeln.

Au sens le plus large, on peut dire que Karl Marx a peu à peu - mais vraiment peu à peu - adhéré à cette vue. On peut décrire toute une série d'époques dans la vie de Karl Marx. Dans sa jeunesse, Marx était aussi un penseur idéaliste et il pensait encore, dans le sens que je viens de caractériser, à la faisabilité des utopies. Mais c'est justement lui, et après lui son ami Engels, qui s'est écarté de la manière la plus radicale de ce calcul sur le discernement des humains. Et si je caractérise en général ce qui est en fait une grande histoire, je peux dire ceci : Karl Marx est finalement parvenu à la conviction que les choses ne pouvaient pas s'améliorer dans le monde d'une autre manière qu'en faisant appel aux humains qui n'ont pas intérêt à ce que leurs biens, leurs privilèges leur soient conservés. Ceux qui ont intérêt à ce que leurs biens soient préservés, ceux-là, on ne peut absolument pas les voir, on doit les laisser complètement de côté, car ils ne se laisseront jamais aller à faire quoi que ce soit, même si on leur fait de beaux sermons. En revanche, il y a justement la grande masse des ouvriers prolétaires [qui n'ont rien à perdre en termes de biens]. Karl Marx lui-même a vécu dans cette conviction à l'époque où ce que l'on appelle aujourd'hui le prolétariat était en train de naître en Europe centrale ; il a vu le prolétariat naître en Europe centrale à partir d'autres conditions économiques. Plus tard, lorsqu'il vivait en Angleterre, c'était un peu différent. Mais à l'époque où Karl Marx est passé de l'idéaliste au matérialiste économique, c'était encore comme si le prolétariat moderne était en train d'émerger en Europe centrale. Et maintenant, il se disait : ce prolétariat moderne a des intérêts tout à fait différents de ceux de la minorité dirigeante, car il se compose d'humains qui ne possèdent rien d'autre que leur force de travail, d'humains qui ne peuvent pas vivre autrement qu'en mettant leur force de travail au service des possédants, notamment au service des possesseurs des moyens de production. Lorsque ces travailleurs quittent leur travail, ils sont - c'était particulièrement vrai à l'époque, de la manière la plus radicale - jetés à la rue. Ils n'ont rien d'autre devant eux que la possibilité d'un front pour ceux qui sont les propriétaires des moyens de production. Ces gens ont un tout autre intérêt que ceux qui possèdent. Ils ont intérêt à ce que tout l'ordre social antérieur prenne fin, à ce que cet ordre social soit transformé. Il n'est pas nécessaire de leur prêcher de manière à ce qu'ils comprennent, mais seulement de manière à ce que leur égoïsme et leur intérêt soient saisis. On peut compter sur cela. Prêcher à ceux sur le discernement desquels on doit compter ne donne aucun résultat, car les humains n'agissent pas par discernement, ils n'agissent que par intérêt. Donc, on ne peut pas s'adresser à ceux chez qui on devrait faire appel au discernement, mais on doit faire appel aux intérêts de ceux qui ne peuvent pas faire autrement que de s'engager pour les temps modernes par contrainte intérieure. C'est l'égoïsme vers lequel Karl Marx a évolué. C'est pourquoi il n'a plus cru que le progrès de l'humanité vers des conditions sociales plus récentes pouvait provenir d'une autre œuvre humaine que celle du prolétariat lui-même. Selon Karl Marx, le prolétariat ne peut aspirer à un renouvellement des conditions sociales humaines qu'à partir de ses propres intérêts, de ses intérêts individuels et égoïstes. Et c'est ainsi que le prolétariat, non pas par philanthropie, mais par intérêt égoïste, libérera tout le reste de l'humanité, parce qu'il ne peut y avoir rien d'autre que ce qu'accomplissent les humains qui ne sont pas attachés aux vieux biens et qui n'ont rien à perdre des vieux biens en cas de transformation.

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Im umfassendsten Sinne, so kann man sagen, hat sich nach und nach -- aber wirklich erst nach und nach — zu dieser Ansicht Karl Marx bekannt. Man kann in dem Leben von Karl Marx eine ganze Anzahl von Epochen schildern. Marx war in seiner Jugend auch ein idealistischer Denker und hat auch noch in dem Sinn, wie ich es eben charakterisiert habe, an die Realisierbarkeit von Utopien gedacht. Aber er war es gerade, und nach ihm dann auch sein Freund Engels, der in der allerradikalsten Weise von dieser Rechnung auf die Einsicht der Menschen abgekommen ist. Und wenn ich im allgemeinen etwas charakterisiere, was eigentlich eine große Geschichte ist, so kann ich das folgende sagen: Karl Marx ist zuletzt zu der Überzeugung gekommen, daß es in der Welt nicht auf eine andere Art besser werden könne als dadurch, daß man diejenigen Menschen aufruft, die nicht ein Interesse daran haben, daß ihre Güter, daß ihre Vorrechte ihnen erhalten bleiben. Auf die, die ein Interesse haben, daß ihre Güter ihnen erhalten bleiben, auf diese könne man überhaupt nicht sehen, diese müsse man ganz aus der Rechnung lassen, denn sie würden sich niemals herbeilassen, irgendwie darauf einzugehen, wenn man ihnen noch so schön predigt. Demgegenüber gibt es gerade die große Masse der proletarischen Arbeiter, [die nichts an Gütern zu verlieren haben]. Karl Marx selbst lebte sich ja in diese Überzeugung hinein in der Zeit, als in Mitteleuropa das im Grunde erst entstand, was man heute das Proletariat nennt; er sah das Proletariat in Mitteleuropa erst entstehen aus anderen Wirtschaftsverhältnissen heraus. Als er später in England lebte, war das ja etwas anders. Aber in der Zeit, als Karl Marx sich vom Idealisten zum ökonomischen Materialisten entwickelte, da war es noch so, daß eigentlich in Mitteleuropa das moderne Proletariat erst heraufkam. Und nun sagte er sich: Dieses moderne Proletariat, das hat ganz andere Interessen als die leitende, führende Minderheit, denn es besteht aus Menschen, die nichts besitzen als ihre Arbeitskraft, aus Menschen, die auf keine andere Weise leben können als dadurch, daß sie ihre Arbeitskraft in den Dienst der Besitzenden, namentlich in den Dienst der Besitzenden der Produktionsmittel, stellen. Wenn diese Arbeiter ihre Arbeit verlassen, dann sind sie — das galt besonders für die damalige Zeit in radikalster Weise —, dann sind sie auf die Straße geworfen. Sie haben nichts anderes vor sich als die Möglichkeit einer Fron für diejenigen, die die Besitzer der Produktionsmittel sind. Diese Menschen haben ein ganz anderes Interesse als die Besitzenden. Sie haben ein Interesse daran, daß die ganze frühere Gesellschaftsord­nung aufhört, daß diese Gesellschaftsordnung umgewandelt wird. Denen braucht man nicht so zu predigen, daß ihre Einsicht ergrif­fen wird, sondern nur so, daß ihr Egoismus, ihr Interesse ergriffen werden. Darauf kann man sich verlassen. Zu predigen denjenigen, auf deren Einsicht man zählen soll, dabei kommt nichts heraus, denn die Menschen handeln nicht aus Einsicht, sie handeln nur nach Interessen. Also, man kann sich nicht an diejenigen wenden, bei denen man an die Einsicht appellieren müßte, sondern man muß an die Interessen derjenigen appellieren, die nicht anders können, als aus innerem Zwang heraus für die neuere Zeit eintreten. Das ist der Egoismus, zu dem Karl Marx sich hinentwickelt hat. Daher hat er nicht mehr geglaubt, daß der Fortschritt der Menschheit zu neueren sozialen Zuständen von anderem Menschenwerke herkommen könne als von dem Werke des Proletariats selbst. Das Proletariat könne nur, so meint Karl Marx, aus seinen Interessen, aus seinen einzelegoistischen Interessen her, eine Erneuerung der menschlichen sozialen Zustände erstreben. Und damit wird das Proletariat, aber jetzt nicht aus Menschenfreundlichkeit, sondern aus egoistischem Interesse, auch die ganze übrige Menschheit befreien, weil es nichts anderes mehr geben kann als dasjenige, was die Menschen bewirken, die nicht an alten Gütern hängen und bei einer Umwandlung nichts von alten Gütern zu verlieren haben.

On se dit donc : d'un côté, il y a les cercles dirigeants, leaders, qui ont certains droits qui leur ont été conférés dans le passé ou qui leur ont été imposés dans le passé, qui se sont transmis par héritage dans leurs familles, et ils s'y accrochent. Ces cercles dirigeants sont en possession de ceci ou de cela, qu'ils transmettent à leur tour au sein de leur cercle, de leur famille et ainsi de suite. Ces cercles ont toujours quelque chose à perdre lors d'une transformation, car bien sûr, s'ils ne perdaient rien, aucune transformation n'aurait lieu. Il s'agit en effet que ceux qui n'ont rien reçoivent quelque chose, donc ceux qui ont quelque chose ne peuvent que perdre. On ne pourrait donc faire appel au discernement que si ce discernement donnait à la classe dirigeante possédante l'impulsion de vouloir perdre quelque chose. Ils n'acceptent pas cela. - C'était le point de vue de Karl Marx. Il faut donc faire appel à ceux qui n'ont rien à perdre. C'est pourquoi le "Manifeste communiste" de 1848 se termine par ces mots : "Les prolétaires n'ont rien à perdre que leurs chaînes, mais ils ont tout à gagner. Prolétaires de tous les pays, unissez-vous !".

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Man sagt sich also: Da sind auf der einen Seite die leitenden, führenden Kreise, die haben gewisse Rechte, die ihnen in früheren Zeiten verliehen worden sind oder die in früheren Zeiten von ihnen erzwungen worden sind, die sich vererbt haben in ihren Familien, an denen halten sie fest. Diese leitenden, führenden Kreise sind im Besitz von dem oder jenem, das vererben sie wiederum weiter innerhalb ihrer Kreise, ihrer Familie und so weiter. Diese Kreise haben bei einer Umwandlung immer etwas zu verlieren, denn selbstverständlich, wenn sie nichts verlören, würde ja keine Umwandlung geschehen. Es handelt sich ja darum, daß diejenigen, die nichts haben, etwas bekommen sollen, daher können diejenigen, die etwas haben, nur verlieren. Also man könnte nur an die Einsicht appellieren, wenn diese Einsicht der besitzenden, führenden Klasse den Impuls eingeben würde, etwas verlieren zu wollen. Darauf lassen sie sich nicht ein. — Das war die Anschauung von Karl Marx. Man muß also an diejenigen appellieren, die nichts zu verlieren haben. Deshalb schließt auch im Jahre 1848 das «Kommunistische Manifest» mit den Worten: «Proletarier haben nichts zu verlieren als ihre Ketten, sie haben aber alles zu gewinnen. Prole­tarier aller Länder, vereinigt euch!»

Eh bien, vous voyez, c'est devenu en quelque sorte une conviction depuis la publication du Manifeste communiste. Et aujourd'hui, alors que certains sentiments, déjà sous l'influence de cette conception, vivent justement dans la majorité du prolétariat, on ne peut plus vraiment s'imaginer quel énorme bouleversement s'est opéré dans la conception socialiste vers le milieu du XIXe siècle. Mais il serait bon que vous preniez quelque chose comme l'"Évangile d'un pauvre pécheur" de Weitling, un compagnon tailleur, qui a été écrit pas si longtemps avant le Manifeste communiste, et que vous le compariez à tout ce qui a été écrit après la parution du Manifeste communiste. Dans cet "Évangile d'un pauvre pécheur", vraiment empreint d'une authentique sensibilité prolétarienne, règne un langage ardent, on peut même dire poétique dans un certain sens, mais un langage qui veut absolument faire appel à la bonne volonté, au discernement des humains. C'est la conviction de Weitling que l'on peut faire quelque chose avec la bonne volonté des humains. Et cette conviction ne s'est affaiblie que vers le milieu du XIXe siècle. Et l'acte par lequel elle s'est affaiblie est justement la publication du Manifeste communiste. Et depuis cette époque, depuis 1848, nous pouvons en fait suivre ce que nous appelons aujourd'hui la question sociale. Car si nous voulions parler aujourd'hui comme Saint-Simon, comme Fourier, comme Weitling, oui, nous prêcherions aujourd'hui vraiment la sourde oreille. Car jusqu'à un certain point, il est tout à fait exact que l'on ne peut rien entreprendre dans la question sociale si l'on fait appel à la compréhension des cercles dirigeants, leaders, qui ont quelque chose. C'est tout à fait vrai. Ils ne le savent même pas s'ils le font, car des forces inconscientes jouent un rôle extrêmement important dans l'âme humaine.

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Nun sehen Sie, das ist seit der Veröffentlichung des Kommu­nistischen Manifests gewissermaßen eine Überzeugung geworden. Und heute, wo gewisse Empfindungen, die schon unter dem Einfluß dieser Anschauung stehen, eben in der Majorität des Proletariats leben, heute kann man sich gar nicht mehr richtig vorstellen, was für ein ungeheurer Umschwung in der sozialisti­schen Anschauung um die Mitte des 19. Jahrhunderts sich voll­zogen hat. Aber es wäre gut, wenn Sie sich herbeiließen, so etwas zu nehmen wie das «Evangelium eines armen Sünders» von Weitling, einem Schneidergesellen, das gar nicht so lange Zeit vor dem Kommunistischen Manifest geschrieben worden ist, und wenn Sie das vergleichen würden mit alle dem, was nach dem Erscheinen des Kommunistischen Manifestes geschrieben ist. In diesem wirklich von echter proletarischer Empfindung eingege­benen «Evangelium eines armen Sünders» herrscht eine, man kann sagen, in gewissem Sinne sogar poetische, glühende Sprache, aber durchaus eine Sprache, die appellieren will an den guten Willen, an die Einsicht der Menschen. Das ist Weitlings Überzeu­gung, daß man etwas anfangen könne mit dem guten Willen der Menschen. Und diese Überzeugung, die ist erst um die Mitte des 19. Jahrhunderts geschwunden. Und die Tat, durch die sie ge­schwunden ist, ist eben die Publikation des Kommunistischen Manifestes. Und seit der Zeit, seit dem Jahre 1848, können wir eigentlich das verfolgen, was wir heute die soziale Frage nennen. Denn wenn wir heute so reden wollten wie Saint-Simon, wie Fourier, wie Weitling -- ja, wir würden heute wirklich ganz tauben Ohren predigen. Denn bis zu einem gewissen Grade ist es durchaus richtig, daß man in der sozialen Frage nichts an­fangen kann, wenn man an die Einsicht der leitenden, führenden Kreise appelliert, die etwas haben. Das ist schon richtig. Die leitenden, führenden Kreise haben das zwar niemals zugegeben, sie werden es auch heute kaum zugeben — sie wissen es gar nicht einmal, wenn sie es doch tun, denn da spielen unbewußte Kräfte in der menschlichen Seele eine außerordentlich große Rolle.

Vous voyez, au cours du XIXe siècle, notre culture spirituelle est presque entièrement devenue une phrase. Et le fait que nous vivions dans la phrase en ce qui concerne la culture spirituelle est un fait social beaucoup plus important qu'on ne le pense habituellement. Et donc, naturellement, les membres des cercles dirigeants, des cercles de direction, disent aussi toutes sortes de belles choses sur la question sociale, et ils sont eux-mêmes souvent convaincus qu'ils ont déjà la bonne volonté. Mais en réalité, ils ne font que le croire, ce n'est qu'une illusion ; dès que quelque chose de réel est entrepris dans ce domaine, il apparaît immédiatement qu'il s'agit d'une illusion. Nous en parlerons plus tard. Mais comme je l'ai dit, nous ne pouvons plus parler aujourd'hui comme nous le faisions à l'époque des utopies. C'est la véritable conquête de Karl Marx, qui a montré comment l'humanité est aujourd'hui tellement empêtrée dans l'illusionnisme que c'est un non-sens de compter sur autre chose que l'égoïsme. Il faut compter avec cela ; on ne peut donc rien obtenir si l'on veut compter d'une manière ou d'une autre sur l'altruisme, sur la bonne volonté, sur les principes moraux des humains - je dis toujours "en ce qui concerne la question sociale". Et ce revirement, qui nous a conduits à devoir parler aujourd'hui d'une toute autre manière que l'on pouvait par exemple encore parler de la question sociale dans la première moitié du XIXe siècle, ce revirement est justement arrivé avec le Manifeste communiste. Mais tout n'est pas arrivé d'un seul coup, mais il était tout de même possible qu'après le Manifeste communiste, jusque dans les années soixante, comme vous le savez tous - certains jeunes socialistes ont déjà oublié cette époque -, cette toute autre forme de pensée sociale, la forme de Ferdinand Lassalle, ait touché les cœurs et les âmes. Et même après la mort de Lassalle, survenue en 1864, ce qui était le socialisme de Lassalle s'est poursuivi. Lassalle fait partie de ces gens qui, malgré l'avènement d'un autre mode de pensée, comptaient encore sur la force de frappe des idées. Lassalle voulait encore saisir les humains en tant que tels dans leur compréhension, dans leur volonté sociale avant tout. Mais de plus en plus, cette nuance lassallienne diminuait et l'autre nuance, la nuance marxiste, qui ne voulait compter que sur les intérêts de cette partie de la population humaine qui ne possédait qu'elle-même et sa force de travail, prenait le dessus. Mais ce n'était pas si rapide. Une telle façon de penser ne s'est développée que peu à peu dans l'humanité.

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Sehen Sie, es ist ja nun einmal unsere geistige Kultur im Laufe des 19. Jahrhunderts fast ganz zur Phrase geworden. Und daß wir mit Bezug auf die geistige Kultur in der Phrase leben, ist eine viel wichtigere soziale Tatsache, als man gewöhnlich meint. Und so reden natürlich die Angehörigen der leitenden, führenden Kreise auch über die soziale Frage allerlei schöne Dinge, und sie sind selbst oftmals überzeugt, daß sie schon den guten Willen hätten. Aber in Wirklichkeit glauben sie das nur, es ist nur ihre Illusion; in dem Augenblick, wo irgend etwas Reales in dieser Beziehung in Angriff genommen wird, kommt es auch gleich heraus, daß das eine Illusion ist. Davon wollen wir nachher noch sprechen. Aber wie gesagt, so können wir heute nicht mehr reden, wie im Zeitalter der Utopien geredet worden ist. Das ist die wirkliche Errungenschaft, die durch Karl Marx gekommen ist, daß er gezeigt hat, wie heute die Menschheit so in den Illusionismus hineinverstrickt ist, daß es ein Unsinn ist, auf etwas anderes zu rechnen als auf den Egoismus. Es muß damit einmal gerechnet werden; es kann daher gar nichts erreicht werden, wenn man auf die Selbstlosigkeit, auf den guten Willen, auf die sittlichen Grundsätze der Menschen — ich sage immer «in bezug auf die Soziale Frage» — irgendwie rechnen will. Und dieser Umschwung, der dazu geführt hat, daß wir eben heute ganz anders reden müssen, als zum Beispiel noch in der ersten Hälfte des 19. Jahrhunderts geredet werden konnte mit Bezug auf die soziale Frage, dieser Umschwung ist eben mit dem Kommunistischen Manifest gekommen. Aber es ist nicht alles auf einmal gekommen, sondern es war ja immerhin möglich, daß auch nach dem Kommunistischen Manifest noch bis in die sechziger Jahre hinein, wie Sie alle wissen werden — manche jüngere Sozialisten haben ja die Zeit schon vergessen —, diese ganz andere Art des sozialen Denkens, die Art des Ferdinand Lassalle, die Herzen, die Seelen ergriffen hat. Und auch nach dem Tode von Lassalle, der 1864 erfolgt ist, hat sich noch fortgesetzt dasjenige, was Lassallescher Sozialismus war. Lassalle gehört durchaus zu den Menschen, die, trotzdem die andere Denkweise schon heraufgekommen war, noch rechneten auf die Schlagkraft der Ideen. Lassalle wollte durchaus noch die Menschen als solche ergreifen in ihrer Einsicht, in ihrem sozialen Wollen vor allen Dingen. Aber immer mehr und mehr nahm diese Lassallesche Schattierung ab und nahm überhand die andere, die marxistische Schattierung, die nur rechnen wollte auf die Interessen desjenigen Teiles der menschlichen Bevölkerung, der nur sich selbst besaß und seine Arbeitskraft. Aber es ging immerhin nicht so schnell. Solch eine Denkweise entwickelte sich erst nach und nach in der Menschheit.

Dans les années soixante, soixante-dix, et même encore dans les années quatre-vingt, les gens qui appartenaient au prolétariat ou qui faisaient partie des gens politiquement ou socialement dépendants - même s'ils n'étaient pas exactement des prolétaires - jugeaient en quelque sorte moralement leur dépendance et condamnaient moralement les milieux non dépendants de la population humaine. Selon leur conscience, c'était de la mauvaise volonté de la part des cercles dirigeants, leaders, de la population humaine, qu'ils laissent la grande masse du prolétariat dans la dépendance, qu'ils la payent mal, etc. Si je peux m'exprimer trivialement, je peux dire que dans les années soixante, soixante-dix, jusque dans les années quatre-vingt, on fabriquait beaucoup d'indignation sociale et on parlait du point de vue de l'indignation sociale. Puis, au milieu des années quatre-vingt, l'étrange revirement s'est vraiment produit. Les personnalités les plus en vue du mouvement social ont alors complètement cessé de parler de la question sociale sur la base de l'indignation morale dans les années 80. C'était l'époque où les leaders sociaux, que vous, les plus jeunes, avez seulement vus mourir, étaient grands et plus ou moins encore animés par l'ardeur de leur jeunesse : Adler, Pernerstorfer, Wilhelm Liebknecht, Auer, Bebel, Singer et ainsi de suite. Ces dirigeants plus âgés ont justement cessé de plus en plus de prêcher ce socialisme d'indignation à l'époque, dans les années 80. Je voudrais dire que ces dirigeants du socialisme ont exprimé leur conviction intime lorsqu'ils ont transposé l'ancien socialisme d'indignation dans leur nouvelle vision socialiste du monde. Vous trouverez que ce que je vous dis maintenant ne figure dans aucun livre sur l'histoire du socialisme. Mais ceux qui ont vécu à l'époque et qui ont participé à cela savent que les gens, lorsqu'ils étaient livrés à eux-mêmes, parlaient ainsi.

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In den sechziger, siebziger Jahren, auch noch in den achtziger Jahren war es durchaus so, daß die Leute, die dem Proletariat angehörten oder die zu den Leuten gehörten, die politisch oder sozial abhängig — wenn auch nicht gerade Proletarier — waren, ihre Abhängigkeit gewissermaßen moralisch beurteilten und daß sie die nicht-abhängigen Kreise der menschlichen Bevölkerung moralisch verurteilten. Ihrem Bewußtsein nach war es böser Wille der leitenden, führenden Kreise der menschlichen Bevölkerung, daß sie die große Masse des Proletariats in Abhängigkeit ließen, daß sie sie schlecht bezahlten und so weiter. Wenn ich es trivial ausdrücken darf, so kann ich sagen, in den sechziger, siebziger Jahren, bis in die achtziger Jahre hinein, wurde viel soziale Entrüstung fabriziert und vom Standpunkt der sozialen Entrüstung aus gesprochen. Dann trat in der Mitte der achtziger Jahre der merkwürdige Umschwung eigentlich erst so recht ein. Die mehr führenden Persönlichkeiten der sozialen Bewegung, die hörten dann in den achtziger Jahren ganz auf, aus moralischer Entrüstung heraus über die soziale Frage zu sprechen. Das war ja die Zeit, in der groß waren und mehr oder weniger noch von jugendlichem Feuereifer durchglüht waren diejenigen sozialen Führer, die Sie, die Sie jünger sind, nur noch haben sterben sehen: Adler, Pernerstorfer, Wilhelm Liebknecht, Auer, Bebel, Singer und so weiter. Diese älteren Führer hörten gerade damals in den achtziger Jahren immer mehr auf, diesen Entrü­stungssozialismus zu predigen. Ich möchte es so ausdrücken, daß diese Führer des Sozialismus ihre innerste Überzeugung aussprachen, als sie damals den alten Entrüstungssozialismus überleiteten in ihre neuere sozialistische Weltanschauung. Sie werden finden, was ich Ihnen jetzt sage, das stehe ja in keinem Buche über die Geschichte des Sozialismus. Aber wer dazumal gelebt hat und das mitgemacht hat, der weiß, daß die Leute, wenn sie sich selbst überlassen waren, so geredet haben.

Supposons que dans les années quatre-vingt, des dirigeants du socialisme se soient réunis pour discuter avec des bourgeois [purs] dans leurs convictions, et supposons qu'il y ait eu une troisième sorte : des bourgeois idéalistes qui voulaient du bien à tous les humains, qui auraient été d'accord pour rendre tous les humains heureux. Il aurait pu arriver que les bourgeois déclarent qu'il faut toujours qu'il y ait des gens pauvres et des gens riches, et ainsi de suite, car c'est la seule façon de maintenir la société humaine. Alors peut-être que la voix de l'un de ces idéalistes qui s'indignaient de voir tant de gens vivre dans la pauvreté et la dépendance se serait élevée. Un tel humain aurait peut-être dit : "Oui, il faut y parvenir, il faut faire comprendre à ces gens qui possèdent, aux entrepreneurs, aux capitalistes, qu'ils doivent renoncer à leurs biens, qu'ils doivent prendre des mesures qui permettront à la grande masse de changer de situation, et ainsi de suite. - De très beaux discours auraient pu être prononcés sur cette base. Mais alors, quelqu'un qui, à l'époque, venait de s'initier au socialisme et à son évolution, aurait élevé la voix et dit : "Qu'est-ce que vous racontez, vous êtes un enfant ; tout cela n'est qu'enfantillages, absurdités ! Les gens qui sont des capitalistes, des entrepreneurs, ce sont tous de pauvres sbires, ils ne savent rien d'autre que ce qu'on leur a inculqué depuis des générations. S'ils entendaient dire qu'ils devraient faire autrement, ils ne pourraient même pas le faire, car ils ne sauraient pas comment s'y prendre. Cela ne rentre pas du tout dans leur crâne que l'on puisse faire quelque chose différemment. Il ne faut pas accuser les gens, il ne faut pas condamner moralement les gens, ils ne sont pas du tout à condamner moralement ; les gars ont grandi dans ce milieu, ces pauvres sbires, dans tout ce milieu, et ça les inspire avec les idées qu'ils ont. Les accuser moralement, c'est ne rien comprendre aux lois de l'évolution de l'humanité, c'est se bercer d'illusions. Ces humains ne peuvent jamais vouloir que le monde prenne une autre forme. Parler d'eux avec indignation, c'est de l'enfantillage pur et simple. Tout cela est devenu ainsi par nécessité, et cela ne peut devenir différent que par nécessité. Vous voyez, on ne peut rien faire avec ces gars qui croient pouvoir prêcher aux possédants, aux capitalistes, qu'il faut instaurer un nouvel ordre mondial, on ne peut rien faire avec ces gars ; on ne peut pas instaurer un nouvel ordre mondial avec eux ; ils ne font que s'adonner à la croyance que l'on peut accuser ces pauvres sbires de capitalistes de faire un autre monde. - Je dois dire les choses un peu clairement, c'est pourquoi certaines choses sont dites avec des contours nets, mais de telle manière que vous avez pu entendre partout les discours dont je parle. Quand on les écrivait, on les retouchait un peu, on les écrivait un peu différemment, mais c'était la base. Puis ils ont continué à parler : avec ces gars - ce sont des idéalistes, ils se représentent le monde en termes d'idéologie -, on ne peut rien faire avec eux. Nous devons compter sur ceux qui n'ont rien, qui veulent donc quelque chose de différent de leurs intérêts que ceux liés aux intérêts capitalistes. Et ceux-là n'aspireront pas non plus à un changement de situation en vertu d'un quelconque principe moral, mais uniquement par convoitise, pour avoir plus que ce qu'ils avaient jusqu'à présent, pour avoir une existence indépendante.

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Nehmen wir einmal an, es seien in den achtziger Jahren solche führenden Leute des Sozialismus zu einer Diskussion zusammengekommen mit solchen, die [reine] Bourgeois waren in ihren Gesinnungen, und nehmen wir an, es wäre noch eine dritte Sorte dabeigewesen: Bourgeois, die Idealisten waren und allen Menschen Gutes wünschten, die damit einverstanden gewesen wären, alle Menschen glücklich zu machen. Da hätte es geschehen können, daß die Bourgeois erklärten, es müsse immer Leute geben, die arm sind, und solche, die reich sind, und so weiter, denn nur das könne die menschliche Gesellschaft aufrechterhalten. Dann hätte sich vielleicht die Stimme eines von denjenigen erhoben, welche Idealisten waren, die da entrüstet waren darüber, daß so viele Leute in Armut und Abhängigkeit leben mußten. So einer hätte dann vielleicht gesagt: Ja, das muß erreicht werden, daß klargemacht wird diesen besitzenden Leuten, den Unternehmern, den Kapitalisten, daß sie loslassen müssen von ihrem Besitz, daß sie Einrichtungen treffen müssen, durch welche die große Masse in eine andere Lage kommt, und dergleichen. — Da könnten sehr schöne Reden gehalten werden aus diesen Tönen heraus. Dann aber hätte solch einer seine Stimme erhoben, der damals sich gerade hineinfand in den Sozialismus und seinen Werdegang, und hätte gesagt: Was reden Sie da, Sie sind ein Kind; das ist alles Kinderei, alles Unsinn! Die Leute, die da Kapitalisten sind, die Unternehmer sind, das sind alles arme Hascherin, die wissen nichts anderes, als was ihnen eingebleut worden ist von Generationen her. Wenn die auch hören, sie sollten es anders machen, dann könnten sie es nicht einmal, denn sie kämen nicht darauf, wie sie es machen sollten. So etwas geht gar nicht in ihre Schädel hinein, daß man etwas anders machen kann. Man darf nicht die Leute anklagen, man darf nicht die Leute moralisch verurteilen, die sind gar nicht moralisch zu verurteilen; die Kerle sind da hineingewachsen, diese armen Hascherin, in das ganze Milieu, und das inspiriert sie mit den Ideen, die sie haben. Sie moralisch anklagen heißt, nichts verstehen von den Gesetzen der Menschheitsentwicklung, heißt, sich Illusionen hingeben. Diese Menschen können niemals wollen, daß die Welt eine andere Form annimmt. Mit Entrüstung von ihnen zu sprechen, ist die pure Kinderei. Das ist alles notwendig so geworden, und anders kann das auch wiederum nur durch Notwendigkeit werden. Seht ihr, mit solchen kindischen Kerlen, die da glauben, sie könnten den Besitzenden, den Kapitalisten predigen, es solle eine neue Weltordnung heraufgeführt werden, mit solchen kindischen Kerlen kann man nichts anfangen; mit ihnen ist keine neue Weltordnung herbeizuführen; die geben sich nur dem Glauben hin, daß man anklagen kann diese armen Hascherin von Kapitalisten, daß sie eine andere Welt machen sollten. — Ich muß die Sache etwas deutlich aussprechen, daher ist manches in scharfen Konturen gesagt, aber doch so, daß Sie die Reden, von denen ich spreche, durchaus überall hören konnten. Wenn sie geschrieben wurden, dann wurden sie ja ein bißchen retuschiert, ein bißchen anders geschrieben, aber das lag zugrunde. Dann redeten sie weiter: Mit diesen Kerlen — das sind Idealisten, die stellen sich die Welt im Sinne einer Ideologie vor —, mit denen ist nichts anzufangen. Wir müssen uns auf diejenigen verlassen, die nichts haben, die daher etwas anderes wollen aus ihren Interessen heraus als die, die mit kapitalistischen Interessen verbunden sind. Und die werden auch nicht aus irgendeinem moralischen Grundsatz eine Änderung der Lebenslage anstreben, sondern nur aus Begehrlichkeit, um mehr zu haben als sie bisher hatten, um ein unabhängiges Dasein zu haben.

Cette manière de penser est apparue de plus en plus dans les années quatre-vingt, de ne plus concevoir l'évolution de l'humanité dans le sens où l'individu est particulièrement responsable de ce qu'il fait, mais qu'il fait ce qu'il doit faire en raison de la situation économique. Le capitaliste, l'entrepreneur, écrase les autres dans la plus grande innocence. Celui qui est prolétaire, non pas en vertu d'un principe moral, mais en toute innocence, en raison d'une nécessité humaine, va révolutionner et prendre les moyens de production, le capital, des mains de ceux qui justement le possèdent. Cela doit se dérouler comme une nécessité historique. - Cette façon de penser monta.

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Diese Denkweise kam in den achtziger Jahren immer mehr und mehr herauf, die Menschheitsentwicklung nicht mehr in dem Sinne aufzufassen, daß der einzelne Mensch besonders verantwortlich ist für das, was er tut, sondern daß er tut, was er aus der wirtschaft­lichen Lage heraus tun muß. Der Kapitalist, der Unternehmer, schindet die anderen in höchster Unschuld. Derjenige, der Proletarier ist, der wird nicht aus einem sittlichen Grundsatz, sondern in aller Unschuld aus einer menschlichen Notwendigkeit heraus revolutionieren und die Produktionsmittel, das Kapital, aus den Händen derjenigen nehmen, die es eben haben. Das muß sich abspielen als eine geschichtliche Notwendigkeit. — Diese Denkweise kam herauf.

Eh bien, voyez-vous, ce n'est qu'en 1891, au congrès d'Erfurt, que tout le lassallianisme, qui était encore basé sur la compréhension des humains, s'est transformé en croyance dans le soi-disant "programme d'Erfurt", qui était destiné à faire du marxisme la vision officielle du prolétariat. Si vous lisez les programmes des congrès de Gotha et d'Eisenach, vous y trouverez deux revendications authentiquement prolétariennes de l'époque, qui sont encore liées au lassallianisme. La première revendication était l'abolition du rapport salarial ; la deuxième revendication était l'égalité politique de tous les humains, l'abolition de tous les privilèges politiques. Toutes les revendications prolétariennes jusqu'aux années 1990, jusqu'au congrès d'Erfurt qui a apporté le grand changement, sont parties de ces deux revendications. Regardez une fois ces deux revendications exactement et comparez-les avec les principales revendications du congrès d'Erfurt. Quelles sont les principales revendications du congrès d'Erfurt ? Ce sont les suivantes : Transfert de la propriété privée des moyens de production à la propriété commune ; gestion de toute la production de biens, de toute la production par une sorte de grande coopérative, en laquelle l'État actuel doit se transformer. Comparez l'ancien programme, qui était le programme prolétarien des années quatre-vingt, avec celui qui est issu du programme du parti d'Erfurt et qui existe depuis les années quatre-vingt-dix. Vous verrez que dans l'ancien programme de Gotha et d'Eisenach, les exigences du socialisme sont encore des exigences purement humaines : égalité politique de tous les humains, abolition du rapport salarial dégradant. Au début des années quatre-vingt-dix, ce que je vous ai décrit comme l'état d'esprit qui s'est développé au cours des années quatre-vingt a déjà agi. Ce qui était encore une exigence de l'humanité s'est transformé en une exigence purement économique. Vous ne lisez plus rien sur l'idéal d'abolir le rapport salarial, vous ne lisez que des revendications économiques.

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Nun, sehen Sie, es war eigentlich erst im Jahre 1891 auf dem Erfurter Parteitag, als dann aller Lassallianismus, der eben doch noch auf die Einsicht der Menschen basiert war, überging in den Glauben an das sogenannte «Erfurter Programm», welches bestimmt war, den Marxismus zur offiziellen Anschauung des Proletariats zu machen. Lesen Sie die Programme des Gothaer, des Eisenacher Parteitages durch, da werden Sie zwei Forderungen finden als echt proletarische Forderungen der damaligen Zeit, die noch zusammenhängen mit Las sallianismus. Die erste Forderung war: die Abschaffung des Lohnverhältnisses; die zweite Forderung war: die politische Gleichstellung aller Menschen, die Abschaffung aller politischen Vorrechte. Auf diese beiden Forderungen gingen alle proletarischen Forderungen aus bis zu den neunziger Jahren, bis zu dem Erfurter Parteitag, der den großen Umschwung brachte. Schauen Sie einmal diese beiden Forderungen genau an, und vergleichen Sie sie mit den Hauptforderungen des Erfurter Parteitages. Welches sind nun die Hauptforderungen des Erfurter Parteitages? Es sind: Überführung des Privateigentums an Produktionsmitteln in das gemeinschaftliche Eigentum; Verwaltung aller Gütererzeugung, aller Produktion durch eine Art große Genossenschaft, in welche sich umzuwandeln hat der bisherige Staat. Vergleichen Sie das ehemalige Programm, welches das proletarische Programm der achtziger Jahre war, mit demjenigen, was aus dem Erfurter Parteiprogramm hervorgegangen ist und seit den neunziger Jahren existiert. Sie werden sehen, im alten Gothaer und Eisenacher Programm sind die Forderungen des Sozialismus noch rein menschliche Forderungen: politische Gleichheit aller Menschen, Abschaffung des entwürdigenden Lohnverhältnisses. Im Anfang der neunziger Jahre hat schon gewirkt dasjenige, was ich Ihnen charakterisiert habe als die Gesinnung, die im Laufe der achtziger Jahre her­aufgekommen ist. Da ist verwandelt worden das, was noch mehr Menschheitsforderung war, in eine rein wirtschaftliche Forderung. Da lesen Sie nichts mehr von dem Ideal, das Lohnverhältnis ab­zuschaffen, da lesen Sie nur von Wirtschaftsforderungen.

Eh bien, vous voyez, ces choses sont liées à la formation progressive de l'idée que l'on avait de la réalisation extérieure d'un meilleur état social de l'humanité. Il a souvent été dit par ces gens qui avaient encore des idéaux : ah, quel dommage cela fait-il de tout casser, il faut bien qu'un autre ordre se mette en place ; il faut donc qu'il y ait une révolution, il faut que tout soit cassé, il faut qu'il y ait une grande claque, car c'est seulement de là que peut naître un meilleur ordre social. - C'est ce que disaient encore certaines personnes dans les années 80, qui étaient de bons socialistes idéalistes. On leur répondait par d'autres, ceux qui étaient à la hauteur, qui étaient devenus les leaders - ceux qui, comme je l'ai dit, sont maintenant enterrés -, qui disaient : tout cela n'a pas de sens, des révolutions aussi soudaines n'ont aucun sens. La seule chose qui ait un sens, c'est que nous abandonnions le capitalisme à lui-même. Nous voyons bien qu'auparavant, il n'y avait que de petits capitalistes, puis ils sont devenus grands ; ils se sont associés à d'autres, sont devenus des groupes de capitalistes. Les capitaux se sont de plus en plus concentrés. C'est dans ce processus que nous nous trouvons, à savoir que les capitaux sont de plus en plus concentrés. Le temps viendra où il n'y aura plus que quelques grands trusts et consortiums capitalistes. Il sera alors nécessaire que le prolétariat, en tant que classe non possédante, transmette un beau jour, de manière tout à fait pacifique, par voie parlementaire, la propriété capitaliste, les moyens de production, à la propriété commune. Cela peut être très bien fait, mais il faut attendre. D'ici là, les choses doivent évoluer. Le capitalisme, qui est en fait un enfant innocent, n'y peut rien s'il est inhumain - c'est la nécessité historique qui l'impose. Mais il travaille aussi à l'avance, car il concentre les capitaux ; ils sont alors bien groupés, il suffit qu'ils soient repris par la collectivité. Il ne s'agit pas d'une révolution rapide, mais d'une évolution lente.

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Nun, sehen Sie, diese Sachen hängen dann zusammen mit dem allmählichen Ausbilden der Idee, die man hatte über die äußerliche Herbeiführung eines besseren sozialen Zustandes der Menschheit. Es ist auch oftmals von solchen Leuten, die noch Ideale hatten, gesagt worden: Ach, was schadet es denn, wenn man alles kurz und klein schlägt, es muß ja eine andere Ord­nung herbeigeführt werden; also, es muß eine Revolution kom­men, es muß alles kurz und klein geschlagen werden, es muß der große Kladderadatsch kommen, denn nur daraus kann eine bessere Gesellschaftsordnung entstehen. — Das sagten noch man­che Leute in den achtziger Jahren, die gute, idealistische Sozia­listen waren. Denen wurde geantwortet von den anderen, die auf der Höhe der Zeit standen, die die Führer geworden waren — diejenigen, die jetzt, wie ich sagte, begraben sind —, die sagten: Das hat alles keinen Sinn, solche plötzlichen Revolutionen sind sinnlos. Das einzige, was Sinn hat, das ist, daß wir den Kapita­lismus sich selber überlassen. Wir sehen ja, früher gab es nur kleine Kapitalisten, dann sind es große geworden; sie haben sich zusammengetan mit anderen, sind zu Kapitalistengruppen ge­worden. Die Kapitalien haben sich immer mehr konzentriert. In diesem Prozeß sind wir drinnen, daß die Kapitalien immer mehr und mehr konzentriert werden. Dann wird die Zeit kommen, wo eigentlich nur noch einige wenige große kapitalistische Trusts, Konsortien vorhanden sind. Dann wird es nur noch notwendig sein, daß das Proletariat, als die nichtbesitzende Klas­se, eines schönen Tages auf ganz friedliche Weise, auf parlamen­tarischem Wege, den Kapitalistenbesitz, die Produktionsmittel, überführt in den Gemeinschaftsbesitz. Das kann ganz gut ge­macht werden, aber man muß abwarten. Bis dahin müssen sich die Dinge entwickeln. Der Kapitalismus, der eigentlich ein unschuldiges Kind ist, kann ja nichts dafür, daß er menschenschin­derisch ist — das bringt die geschichtliche Notwendigkeit herauf. Er arbeitet aber auch vor, denn er konzentriert die Kapitalien; sie sind dann schön beieinander, dann brauchen sie nur über­nommen zu werden von der Allgemeinheit. Nichts von rascher Revolution, sondern langsame Entwicklung.

Vous voyez, le secret de la vision, le secret public de la vision, qui est à la base de tout cela, a été joliment expliqué par Engels dans les années 90. Il a dit : "Pourquoi des révolutions rapides ? Ce qui se passe lentement dans le développement du nouveau capitalisme, ce regroupement des capitaux, cette concentration des capitaux, tout cela travaille pour nous. Nous n'avons pas besoin de créer une communauté, les capitalistes le font déjà. Nous n'avons qu'à le transformer en propriété prolétarienne. C'est pourquoi - dit Engels - les rôles se sont en fait inversés. Nous, qui représentons le prolétariat, n'avons pas à nous plaindre de l'évolution, ce sont les autres qui doivent se plaindre. Car les gars qui sont aujourd'hui dans les cercles des possédants doivent se dire : nous accumulons les capitaux, mais nous les accumulons pour les autres. Voyez, ces types doivent en fait s'inquiéter de perdre leurs capitaux ; ils ont les joues creuses, ils se dessèchent à force de se demander ce qui va se passer. En tant que socialistes, nous nous épanouissons très bien dans cette évolution. Engels dit que nous avons les muscles saillants et les joues pleines et que nous ressemblons à la vie éternelle. - C'est ce que dit Engels dans une introduction qu'il a écrite dans les années 1990, en décrivant comment ce qui se développe est tout à fait juste, et comment il suffit d'attendre le développement, qui est en fait assuré par le capitalisme lui-même. Cette évolution débouche ensuite sur le transfert de ce que le capitalisme a d'abord concentré dans la propriété commune de ceux qui n'avaient rien jusqu'alors. - C'était en fait l'état d'esprit dans lequel les cercles dirigeants du prolétariat sont entrés au XXe siècle.

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Sehen Sie, das Geheimnis der Anschauung, das öffentliche Ge­heimnis der Anschauung, das da zugrundeliegt, hat ja in den neun­ziger Jahren Engels schön auseinandergesetzt. Er hat gesagt: Wozu schnelle Revolutionen? Dasjenige, was langsam geschieht unter der Entwicklung des neueren Kapitalismus, dieses Zusammenrotten der Kapitalien, dieses Konzentrieren der Kapitalien, das arbeitet ja alles für uns. Wir brauchen nicht erst eine Gemeinsamkeit herzustellen, die Kapitalisten machen das schon. Wir brauchen es nur überzuführen in den proletarischen Besitz. Daher — sagt Engels — haben sich eigentlich die Rollen vertauscht. Wir, die wir das Pro­letariat vertreten, haben uns ja gar nicht zu beklagen über die Entwicklung, die anderen haben sich zu beklagen. Denn die Kerle, die heute in den Kreisen der besitzenden Leute sind, die müssen sich sagen: Wir sammeln die Kapitalien an, aber für die anderen sammeln wir sie an. Seht, die Kerle müssen sich eigentlich sorgen, daß sie ihre Kapitalien verlieren; die kriegen eingefallene Backen, die werden dürr von diesen Sorgen, was da werden soll. Wir gedei­hen gerade als Sozialisten sehr gut in dieser Entwicklung drin. Wir kriegen, sagt Engels, pralle Muskeln und volle Backen und sehen aus wie das ewige Leben. — Das sagt Engels in einer Einleitung, die er in den neunziger Jahren schrieb, indem er charakterisierte, wie es ganz recht ist, was sich da herausentwickelt, und wie man nur abzuwarten brauchte die Entwicklung, die eigentlich durch den Kapitalismus von selber besorgt wird. Diese Entwicklung mündet dann ein in die Überführung desjenigen, was der Kapitalismus erst konzentriert hat, in den Gemeinbesitz derer, die bisher nichts gehabt haben. — Das war eigentlich die Stimmung, in der das 20. Jahrhundert von den führenden Kreisen des Proletariats betreten worden ist.

Et c'est ainsi qu'on a pensé, surtout depuis l'époque où le marxisme n'a plus été pris comme dans les années 1990, mais où il a été soumis à une révision, comme on disait, à l'époque où sont apparus les révisionnistes, c'est-à-dire ceux qui sont encore vivants aujourd'hui, mais qui sont des vieux, comme Bernstein par exemple. C'est donc là que les révisionnistes sont arrivés. Ils disaient qu'il était possible d'encourager un peu toute l'évolution, car si les travailleurs se contentent de travailler jusqu'à ce que les capitalistes aient tout rassemblé, ils seront encore dans le besoin avant, notamment lorsqu'ils seront âgés, ils n'auront rien. On a donc créé des assurances et ainsi de suite ; et surtout, on a veillé à s'approprier ce que les classes dirigeantes avaient comme institutions dans la vie politique. Vous savez, c'est à cette époque qu'est née la vie syndicale.

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Und so hat man gedacht, besonders seit der Zeit, in der der Marxismus nicht mehr so genommen worden ist wie in den neunziger Jahren, sondern als er einer Revision, wie man sagte, unterzogen worden ist, in der Zeit, als die Revisionisten auftraten, also diejenigen, die heute noch leben, aber alte Leute sind, wie zum Beispiel Bernstein. Da kamen also die Revisionisten. Die sagten, man kann die ganze Entwicklung etwas fördern, denn wenn die Arbeiter bloß arbeiten, bis die Kapitalisten alles zusammengescharrt haben, werden sie doch vorher noch Not leiden, namentlich im Alter haben sie nichts. Da wurden dann Versicherungen gemacht und so weiter; und vor allen Dingen sah man darauf, daß man dasjenige, was die führenden Klassen hatten als Einrichtungen im politischen Leben, daß man sich das auch aneignete. Sie wissen, damals entstand ja namentlich auch das gewerkschaftliche Leben.

Et à l'intérieur du parti socialiste, il y avait deux tendances fortement divergentes : le parti syndical et le parti politique proprement dit, comme on disait alors. Le parti politique se tenait plus sur le terrain, une révolution soudaine ne servirait à rien, l'évolution devait se dérouler comme je viens de le décrire. Il s'agissait donc de tout préparer pour le moment où le capitalisme serait suffisamment concentré et où le prolétariat aurait la majorité dans les parlements. Tout doit être poursuivi par la voie du parlementarisme, de l'appropriation de la majorité, afin qu'au moment où les moyens de production seront transférés à la propriété commune, il y ait aussi la majorité pour ce transfert. C'est notamment dans ce groupe de personnes qui pensaient tout du parti politique que l'on ne pensait pas beaucoup au mouvement syndical à la fin du XIXe siècle. À cette époque, celui-ci s'efforçait justement d'instaurer une sorte de compétition ordonnée entre lui et les entrepreneurs, afin d'obtenir de temps en temps des entreprises des augmentations de salaire et des choses similaires. Bref, on s'est arrangé pour imiter le système de négociations réciproques qui existait entre les milieux dirigeants, entre les dirigeants eux-mêmes, et on l'a étendu aux relations entre les milieux dirigeants et le prolétariat. Vous savez que les représentants du système socialiste proprement politique ont particulièrement accusé ceux qui sont devenus les plus bourgeois du mouvement syndical. Et à la fin des années quatre-vingt-dix et au début du XXe siècle, on pouvait voir partout, chez ceux qui étaient plus orientés vers le système politique, un grand mépris pour les gens qui s'étaient entièrement plongés dans la vie syndicale, notamment les typographes, qui avaient à leur tour développé un tout autre système de vie syndical, jusqu'à l'extrême.

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Und innerhalb der sozialistischen Partei waren das die zwei stark divergierenden Richtungen: die ausgesprochene Gewerkschaftspartei und die eigentliche, wie man damals sagte, politische Partei. Die politische Partei stand mehr auf dem Boden, eine plötzliche Revolution nütze nichts, die Entwicklung müsse so vor sich gehen, wie ich es eben beschrieben habe. Daher handle es sich darum, daß alles vorbereitet werde auf den einen Zeitpunkt, wo der Kapitalismus genügend konzentriert ist und das Proletariat in den Parlamenten die Majorität hat. Es müsse alles auf dem Wege des Parlamentarismus, der Aneignung der Majorität, fortgetrieben werden, damit an dem Zeitpunkte, wo die Produktionsmittel in den Gemeinbesitz übernommen werden sollten, dann auch die Majorität für diese Überführung da ist. Namentlich in dieser Gruppe von Leuten, die alles von der politischen Partei hielten, da hielt man am Ende des 19. Jahrhunderts nicht sehr viel von der gewerkschaftlichen Bewegung. Diese setzte sich in jener Zeit eben dafür ein, so eine Art Wettkampf in geordneter Art zwischen sich und den Unterneh­mern einzurichten, um von Zeit zu Zeit immer wieder von den Unternehmungen Lohnerhöhungen und ähnliche Dinge herauszu­bekommen. Kurz, man stellte sich so ein, daß man nachmachte jenes System gegenseitiger Verhandlungen, wie es unter den leitenden, führenden Kreisen untereinander selbst vorhanden war, daß man dieses auch ausdehnte auf das Verhältnis zwischen den leitenden Kreisen und dem Proletariat. Sie wissen ja, daß ganz besonders angeklagt wurden von den Vertretern des eigentlich politischen sozialistischen Systems diejenigen, die dann am meisten bürgerlich wurden unter der Gewerkschaftsbewegung. Und am Ende der neunziger Jahre und am Anfang des 20. Jahrhunderts konnte man überall sehen bei denjenigen, die mehr auf das politische System eingerichtet waren, die große Verachtung für jene Leute, die sich ganz eingefuchst hatten auf das gewerkschaftliche Leben, namentlich zum Beispiel die Buchdrucker, die wiederum ein ganz anderes System gewerkschaftlichen Lebens bis zum Extrem ausgebildet hatten.

Il s'agissait de deux tendances très distinctes dans la vie sociale : les syndicalistes et ceux qui penchaient plutôt vers le parti politique. Et au sein des syndicats, les typographes de l'association des typographes étaient justement les garçons modèles ; ils étaient les garçons modèles qui avaient acquis la pleine reconnaissance des cercles bourgeois. Et je crois que, de même que l'on a eu une certaine crainte, une certaine inquiétude à l'égard du parti politique socialiste, on a vu peu à peu émerger avec une grande satisfaction des gens aussi braves que les gens de l'association des typographes. On se disait à leur sujet : ils s'embourgeoisent, on peut toujours négocier avec eux, ça se passe très bien. S'ils s'en prennent à leurs salaires, nous nous en prenons à nos prix, que nous exigeons. Ça marche. - Et, n'est-ce pas, c'était aussi possible pour les années suivantes, et les gens ne pensent pas plus loin. On était donc très satisfait de cette formation exemplaire du développement syndical. Eh bien, si j'omets quelques nuances, on peut dire que ces deux directions se sont plus ou moins développées jusqu'à l'époque où la catastrophe de la guerre mondiale les a surpris. Mais malheureusement, les gens n'ont pas appris de cette catastrophe mondiale tout ce qui aurait dû être appris en ce qui concerne la question sociale.

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Das waren zwei ganz streng voneinander geschiedene Richtungen im sozialen Leben: die Gewerkschafter und diejenigen, die mehr der politischen Partei zuneigten. Und innerhalb der Gewerkschaften waren ja die Buchdrucker im Buchdruckerverband geradezu die Musterknaben; sie waren diejenigen Musterknaben, die sich ja auch die volle Anerkennung der bürgerlichen Kreise erworben hatten. Und ich glaube, daß ebenso, wie man eine gewisse Angst gehabt hat, eine gewisse Sorge gehabt hat über die politische sozialistische Partei, so hat man nach und nach mit großer Befriedigung heraufkommen sehen solche braven Leute wie die Leute im Buchdruckerverband. Von denen sagte man sich: Die verbürgerlichen sich, mit denen kann man immer verhandeln, das geht ganz gut. Wenn die aufschlagen mit ihren Löhnen, dann schlagen wir auf mit unseren Preisen, die wir fordern. Das geht. — Und, nicht wahr, für die nächsten Jahre ging es auch, und weiter denken die Leute ja auch nicht. Also da war man mit dieser musterhaften Ausbildung der gewerkschaftlichen Entwicklung sehr zufrieden. Nun ja, wenn ich einiges auslasse, was mehr Nuancen sind, kann man sagen, daß sich dann diese beiden Richtungen mehr oder weniger herausgebildet haben bis in die Zeiten, die dann überrascht worden sind von der Weltkriegskatastrophe. Aber da haben die Leute leider von dieser Weltkriegskatastrophe ja nicht alles gelernt, was mit Be‑zug auf die soziale Frage eigentlich hätte gelernt werden sollen.

N'est-ce pas, si l'on considère les rapports à l'est de l'Europe, en Europe centrale, si l'on fait abstraction du monde anglo-américain et en partie du monde roman, si l'on se limite donc à l'Europe centrale et orientale, on peut dire qu'il n'y a rien de juste dans cette histoire, que l'on a toujours définie ainsi : Les capitaux se concentrent et, lorsque l'on aura la majorité dans les parlements, les capitaux seront transférés à la communauté, et ainsi de suite. - La catastrophe de la guerre mondiale a fait en sorte que l'on ne puisse pas s'y attendre aussi facilement aujourd'hui. Ceux qui s'attendaient à une révolution quelconque ont souvent été considérés comme des enfants, mais au fond, que s'est-il passé au cours des quatre ou cinq dernières années ? Gardons à l'esprit ce qui s'est passé de manière claire et nette. N'est-ce pas, vous l'avez souvent entendu, ce qui s'est passé au cours des quatre ou cinq dernières années : en juillet 1914, les gouvernements sont devenus un peu "tordus" - ou très "tordus" - et ont poussé les gens à la guerre mondiale. Les gens ont cru qu'il y avait une guerre mondiale, que des batailles avaient eu lieu - mais avec les moyens de guerre modernes, avec les moyens mécaniques, il y avait quelque chose de tout à fait différent que dans les guerres précédentes. Il n'y avait plus aucune possibilité que quelqu'un devienne un général particulièrement célèbre, car tout dépendait finalement de la quantité de munitions et d'autres moyens de guerre dont disposait l'un des deux partis, si l'un fabriquait mieux que l'autre les moyens de guerre mécaniques ou avait découvert un gaz et d'autres choses de ce genre que les autres n'avaient pas. D'abord l'un gagnait, puis l'autre découvrait à nouveau quelque chose, puis le premier à nouveau ; tout cela était une guerre terriblement mécanique. Et tout ce qui a été dit sur ce qui s'est passé ici et là de la part des humains, c'était sous l'influence de la phrase, c'était tout à fait de la phrase. Et peu à peu, l'humanité moderne comprendra, même en Europe centrale, tout ce qu'il y a eu comme phrases dans le fait que l'un ou l'autre, qui n'était en fait rien d'autre qu'un soldat moyen un peu tordu, a été transformé en un grand général en Europe centrale. Ces choses n'ont été possibles que sous l'influence de la phrase. Eh bien, c'est ce qui s'est passé.

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Nicht wahr, sobald man nun betrachtet die Verhältnisse im Osten von Europa, in Mitteleuropa, wenn man absieht von der eigentlich anglo-amerikanischen Welt und zum Teil auch von der romanischen Welt, wenn man sich also auf Mittel- und Osteuropa beschränkt, so kann man sagen, mit dieser Geschichte ist eigentlich nichts Rechtes geworden, die man immer so definiert hat: Die Kapitalien konzentrieren sich, und, wenn man in den Parlamenten die Majorität haben wird, dann werden die Kapitalien in den Besitz der Gemeinschaft übergeführt werden und so weiter. — Daß das nicht so glatt erwartet werden kann heute, dafür hat die Welt­kriegskatastrophe gesorgt. Diejenigen sind ja oftmals als kindisch hingestellt worden, die irgendeine Revolution erwartet haben, aber im Grunde genommen, was ist denn geschehen in den letzten vier bis fünf Jahren? Halten wir uns das ganz klar und deutlich vor Augen, was geschehen ist. Nicht wahr, Sie haben es ja auch öfter gehört, was in den letzten vier bis fünf Jahren geschehen ist: Im Juli 1914 sind die Regierungen ein bißchen «verdreht» geworden — oder stark «verdreht» geworden — und haben die Leute in den Weltkrieg gehetzt. Da haben die Leute geglaubt, es sei ein Weltkrieg da, es haben Schlachten stattgefunden — aber mit den modernen Kriegs­mitteln, mit den Maschinenmitteln, war etwas ganz anderes da als in früheren Kriegen. Es ist doch keine Möglichkeit mehr da ge­wesen, daß irgendeiner ein besonders berühmter Feldherr wurde, denn schließlich kam es nur darauf an, ob eine Partei die größere Menge an Munition hatte und sonstige Mittel der Kriegführung, ob eine Partei die mechanischen Kriegsmittel besser herstellte als die andere oder ein Gas entdeckt hatte und dergleichen, das die ande­ren nicht hatten. Erst siegte der eine, dann entdeckte der andere wieder etwas, dann wieder der erste; das Ganze war eine furchtbar mechanische Kriegführung. Und alles, was geredet worden ist über dasjenige, was da und dort geschehen ist von seiten der Menschen, das war unter dem Einfluß der Phrase geschehen, es war durchaus Phrase. Und nach und nach wird die moderne Menschheit einsehen, auch in Mitteleuropa, was alles als Phrase drinnengesteckt hat, wenn der eine oder andere, der eigentlich nichts anderes war als ein etwas verdrehter Durchschnittssoldat, zu einem großen Feldherrn gemacht worden ist in Mitteleuropa. Diese Dinge sind nur unter dem Einfluß der Phrase möglich geworden. Nun ja, das war eben so.

Mais que s'est-il passé en réalité ? Les gens ne l'ont pas remarqué à cause des événements extérieurs. Alors que les gens croyaient qu'une guerre mondiale avait été menée - qui n'était en fait qu'un masque -, une révolution s'est en réalité produite. En réalité, une révolution s'est produite pendant ces quatre ou cinq ans. Mais les gens ne le savent pas encore aujourd'hui, ils n'y prêtent pas attention. La guerre est l'extérieur, le masque ; la vérité, c'est que la révolution a eu lieu. Et parce que la révolution a eu lieu, la société d'Europe centrale et orientale se trouve aujourd'hui dans un tout autre état, et on ne peut rien faire de ce que les gens avaient envisagé pour les situations antérieures. Aujourd'hui, il est nécessaire de réorganiser toutes les idées que l'on se faisait auparavant, de penser les choses de manière totalement nouvelle. C'est ce qu'a tenté de faire le livre "Les points essentiels de la question sociale" : tenir compte de la situation dans laquelle les événements récents nous ont placés. Il n'est donc pas étonnant que les membres des partis socialistes, qui ne peuvent pas suivre le mouvement assez rapidement, se méprennent sur ce livre. Si les gens acceptaient une seule fois d'examiner leurs propres pensées - d'examiner un peu ce qu'ils disent vouloir -, ils verraient à quel point ils vivent sous l'influence des idées qu'ils se sont faites jusqu'en 1914. C'est la vieille habitude.

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Nun, was ist denn aber in Wirklichkeit geschehen? Das haben die Leute vor lauter äußeren Ereignissen nicht gemerkt. Während die Leute glaubten, daß ein Weltkrieg geführt worden sei — der eigentlich nur eine Maske war —, hat sich in Wirklichkeit eine Revolution vollzogen. In Wirklichkeit ist eine Revolution geschehen in diesen vier bis fünf Jahren. Das wissen die Leute heute nur noch nicht, das beachten sie heute noch nicht. Der Krieg ist die Außenseite, die Maske; die Wahrheit ist die, daß sich die Revolution vollzogen hat. Und weil sich die Revolution vollzogen hat, ist heute die Gesellschaft Mittel- und Osteuropas in einer ganz anderen Verfassung, und man kann nichts anfangen mit dem, was die Leute bedacht hatten für frühere Lagen. Heute ist es notwendig, daß all die Gedanken, die man sich früher gemacht hat, ganz neu geordnet werden, daß man ganz neu über die Dinge denkt. Und das ist versucht worden mit dem Buche «Die Kernpunkte der Sozialen Frage»: ganz richtig zu rechnen mit der Lage, in die wir gekommen sind durch die allerjüngsten Ereignisse. Daher ist es kein Wunder, daß die Menschen in den sozialistischen Parteien, die nicht schnell genug mitkommen können, diesem Buch Mißverständnis über Mißverständnis entgegenbringen. Wenn die Menschen nur einmal sich darauf einließen, ihre eigenen Gedanken zu prüfen — ein bißchen zu prüfen dasjenige, wovon sie sagen, daß sie es wollen —, dann würden sie sehen, wie sehr sie leben unter dem Einfluß der Ideen, die sie sich bis zum Jahre 1914 gemacht haben. Das ist die alte Gewohnheit.

N'est-ce pas, ces idées que l'on a eues jusqu'en 1914, elles se sont tellement incrustées dans l'environnement des humains qu'elles ne peuvent plus en sortir maintenant. Et quelle est la conséquence ? La conséquence, c'est que malgré la nécessité d'une nouvelle action aujourd'hui, malgré la révolution qui s'est produite en Europe centrale et orientale, malgré la nécessité de construire aujourd'hui - non pas selon les anciennes idées, mais selon les nouvelles idées -, malgré tout cela, les gens prêchent les anciennes idées. Et que sont aujourd'hui les partis, y compris les partis socialistes ? Les partis socialistes sont ceux qui continuent à prêcher aujourd'hui tel ou tel évangile socialiste, à l'ancienne manière, comme ils l'ont fait jusqu'en juillet 1914, car il n'y a pas de différence dans ces programmes de parti par rapport aux anciens - tout au plus la différence qui vient de l'extérieur. Pour celui qui connaît les choses, il y a terriblement peu de nouveautés, voire rien de nouveau, dans les différents groupes de partis. Les vieilles idées sont toujours véhiculées aujourd'hui. Maintenant oui, il y a une petite différence : si l'on a un chaudron en cuivre et que l'on tape dessus, cela sonne ; si l'on tape de la même manière sur un tonneau en bois, cela sonne différemment ; mais le coup peut être tout à fait le même. Cela dépend alors de ce sur quoi on tape, si cela sonne différemment. Et c'est ce qui se passe aujourd'hui lorsque les gens se mettent à parler de leurs programmes de parti. Ce qui est contenu dans ces anciens programmes de parti, c'est en fait le vieux garde-fou du parti ; c'est seulement parce qu'il y a maintenant d'autres conditions sociales que cela sonne aujourd'hui un peu différemment, comme cela sonne différemment dans une chaudière en cuivre ou dans un tonneau en bois. Lorsque les socialistes indépendants, les socialistes majoritaires ou les communistes parlent, ils prononcent de vieilles phrases de parti, et cela sonne différemment parce qu'il n'y a pas un chaudron en cuivre, mais un tonneau en bois. En vérité, on n'a rien appris du tout, du tout, du tout, de bien des côtés. Mais ce qui compte, c'est qu'on apprenne quelque chose, que cette terrible guerre mondiale, comme on l'appelle, mais qui était en fait une révolution mondiale, nous dise quelque chose.

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Nicht wahr, diese Ideen, die man bis 1914 gehabt hat, die haben sich so eingefressen in die Umgebung der Menschen, daß sie jetzt nicht wieder herauskommen. Und was ist die Folge? Die Folge ist: Trotzdem heute ein neues Handeln notwendig ist, trotzdem sich die Revolution vollzogen hat in Ost- und Mitteleuropa, trotzdem wir heute notwendig haben, einen Aufbau zu vollziehen — nicht nach alten Ideen, sondern nach neuen Ideen —, trotz alledem predigen die Leute die alten Ideen. Und was sind heute die Parteien, auch die sozialistischen Parteien? Die sozialistischen Parteien sind diejenigen, die in der alten Weise, wie sie bis zum Juli 1914 gepredigt haben, dieses oder jenes sozialistische Evangelium auch heute weiter predigen, denn ein Unterschied ist bei diesen Parteiprogrammen nicht gegenüber den früheren — höchstens der Unterschied, der von außen kommt. Für den, der die Dinge kennt, für den wird in der einzelnen Parteigruppierung furchtbar wenig Neues, ja gar nichts Neues gesagt. Die alten Ladenhüter von Gedanken werden auch heute noch verzapft. Nun ja, es ist ja ein bißchen ein Unterschied: Wenn man einen kupfernen Kessel hat und klopft daran, dann klingt es; klopft man genauso auf ein hölzernes Faß, dann klingt es anders; aber das Klopfen kann ganz dasselbe sein. Es hängt dann von dem ab, worauf man klopft, ob es anders klingt. Und so ist es heute, wenn die Leute ihre Parteiprogramme verzapfen. Das, was in diesen alten Parteiprogrammen enthalten ist, das ist eigentlich der alte Parteiladenhüter; nur weil jetzt andere soziale Verhältnisse da sind, klingt es heute etwas anders, so wie es anders klingt bei einem kupfernen Kessel oder bei einem hölzernen Faß. Wenn die Unabhängigen Sozialisten oder die Mehrheitssozialisten oder die Kommunisten reden — sie reden eben alte Parteiphrasen, und es klingt anders, weil nicht ein kupferner Kessel, sondern ein hölzernes Faß da ist. In Wahrheit hat man auf vielen Seiten eben gar, gar, gar nichts gelernt. Aber darauf kommt es an, daß man etwas lernt, daß einem dieser furchtbare Weltkrieg, wie man ihn nennt, der aber eigentlich eine Weltrevolution war, irgend etwas sagt.

Et là, on peut vraiment dire que dans les masses les plus larges, on est préparé à entendre quelque chose de nouveau. Mais dans les grandes masses, on écoute ce que disent les dirigeants. Il y a une bonne compréhension, un bon sens chez les masses populaires non éduquées, et on a toujours pu compter sur la compréhension lorsqu'on propose quelque chose de vraiment moderne, quelque chose qui peut être qualifié de moderne dans le meilleur sens du terme. Cela s'explique en partie par le fait que les masses ne sont pas éduquées. Mais dès que les gens entrent dans le type d'éducation que l'on peut avoir depuis les trois ou quatre derniers siècles, cette caractéristique d'inculture disparaît. Si l'on considère l'enseignement bourgeois actuel, de l'école primaire jusqu'à l'université - et ce sera encore pire lorsque l'école unique socialiste sera fondée, car tout ce que l'école primaire bourgeoise a fait de mal y sera présent dans la plus grande mesure -, on voit bien que l'enseignement bourgeois n'a pas de sens : ce qui se fait dans les écoles forme les esprits et les rend étrangers à la vie. Il faut sortir de tout cela, il faut vraiment se mettre sur ses propres jambes dans la vie spirituelle si l'on veut sortir de cette méformation. Mais, voyez-vous, c'est grâce à cette méformation que les dirigeants prolétariens, grands et petits, sont devenus ainsi. Ils ont dû s'approprier cette formation ; cette formation se trouve dans nos écoles et dans les écrits populaires, elle se trouve partout. Et c'est là que l'on commence à avoir le cerveau desséché et que l'on n'est plus accessible aux faits, mais que l'on s'arrête aux programmes de parti et aux opinions que l'on a greffés et martelés. Même la révolution mondiale peut alors arriver, on continue à siffler les vieux programmes.

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Und da kann man wirklich schon sagen: In den breitesten Mas­sen ist man vorbereitet darauf, etwas Neues zu hören. Aber bei den breiten Massen ist das so: Da wird zugehört dem, was die Führer sagen. Es ist ein gutes Verständnis da, ein guter, gesunder Men­schenverstand in den breiten, unverbildeten Massen, und man konnte eigentlich immer auf Verständnis rechnen, wenn man etwas richtig Zeitgemäßes, etwas im besten Sinne des Wortes zeitgemäß zu Nennendes vorbringt. Das ist zum Teil darauf zurückzuführen, daß die Massen unverbildet sind. Aber sobald sich die Menschen in die Art der Schulung hineinbegeben, die man haben kann seit den letzten drei bis vier Jahrhunderten, da hört diese Eigenschaft des Unverbildetseins auf. Wenn man dasjenige, was die heutige bürgerliche Schulbildung ist, von der Volksschule bis hinauf zur Universität, betrachtet — und am ärgsten wird es sein, wenn jetzt die sozialistische Einheitsschule gegründet wird, da wird alles im größten Maße vorhanden sein, was von der bürgerlichen Volksschule verbrochen worden ist —, da sieht man: Was da verzapft wird in den Schulen, das verbildet die Köpfe, das macht sie dem Leben fremd. Man muß aus dem ganzen Zeug herauskommen, man muß sich wirklich im geistigen Leben auf eigene Beine stellen, wenn man aus dieser Verbildung herauskommen will. Aber sehen Sie, durch diese Verbildung sind die großen und kleinen proletarischen Führer so geworden. Sie mußten sich diese Bildung aneignen; diese Bildung steckt in unseren Schulen und in den populären Schriften, überall steckt sie drinnen. Und da fängt man dann an, so ein vertrocknetes Gehirn zu kriegen und nicht mehr für die Tatsachen zugänglich zu sein, sondern bei Parteiprogrammen und Meinungen, die man sich eingepfropft und eingehämmert hat, bei denen bleibt man stehen. Da kann dann selbst die Weltrevolution kommen, man pfeift immer noch die alten Programme darauf los.

Vous voyez, c'est essentiellement ce sort qui a été réservé à ce qui a été voulu dans de nombreuses directions avec ce livre "Les points essentiels de la question sociale" et les conférences. On y a vraiment tenu compte de ce dont le prolétariat a absolument besoin aujourd'hui, de ce qui est nécessaire compte tenu de la situation actuelle. On l'a compris au début [dans le prolétariat], mais ensuite ceux qui sont les dirigeants du prolétariat dans les différents groupes de partis ne l'ont pas compris. Cela dit, je ne veux pas être trop injuste et je ne veux pas presser la vérité ; je ne veux pas affirmer que ces dirigeants, par exemple, ne comprennent pas ce livre, car je ne peux pas supposer qu'ils l'ont lu, qu'ils le connaissent. Je n'affirmerais pas quelque chose de juste si je disais : ils ne peuvent pas comprendre ce livre. Mais ils ne peuvent absolument pas se décider à comprendre que quelque chose d'autre soit nécessaire que ce qu'ils pensent depuis des décennies. Leur cerveau est devenu trop sec, trop rigide pour cela. Et c'est pourquoi ils s'en tiennent à ce qu'ils ont pensé depuis longtemps et trouvent que ce qui est le contraire de toute utopie, c'est une utopie. Car, voyez-vous, le livre "Les points essentiels" tient pleinement compte du fait qu'on ne peut plus aujourd'hui se mouvoir dans des utopies dans le sens des Saint-Simon, Fourier, Proudhon et ainsi de suite, mais aussi du fait qu'on ne peut plus jamais se placer du point de vue : L'évolution se fera d'elle-même. Car ce que Marx et Engels ont vu, ce qui s'est développé [à leur époque], ce dont ils ont tiré leurs conclusions, on ne peut plus en tirer de conclusions aujourd'hui, car la guerre mondiale l'a balayé, il n'est plus là sous sa forme véritable. Celui qui dit aujourd'hui la même chose que Marx et Engels, dit quelque chose que Marx n'aurait jamais dit. Il a eu peur de ses partisans, car il a dit : en ce qui me concerne, je ne suis pas marxiste. - Et aujourd'hui, il dirait : à l'époque, les faits étaient encore différents ; à l'époque, je tirais mes conclusions de faits qui n'avaient pas encore été modifiés, changés, comme la guerre mondiale a tout changé par la suite.

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Sehen Sie, dieses Schicksal hat im wesentlichen dasjenige erfahren, was mit diesem Buche «Die Kernpunkte der Sozialen Frage» und den Vorträgen in vieler Richtung gewollt worden ist. Da wurde einmal wirklich mit dem gerechnet, was das Proletariat heute unbedingt braucht, was notwendig ist aus der Zeitlage heraus. Das verstand man auch anfangs [im Proletariat], aber dann verstanden es diejenigen nicht, die die Führer des Proletariats in den verschiedenen Parteigruppierungen sind. Das heißt, ich will ja nicht allzu ungerecht sein, und ich will nicht die Wahrheit pressen; ich will nicht behaupten, daß zum Beispiel diese Führer dieses Buch nicht verstehen, denn ich kann nicht annehmen, daß sie es gelesen haben, daß sie es kennen. Ich würde nicht etwas Richtiges behaupten, wenn ich sagte: sie können das Buch nicht verstehen. Aber sie können sich überhaupt nicht entschließen zu verstehen, daß etwas anderes notwendig sein soll, als das, was sie seit Jahrzehnten denken. Dazu ist ihr Gehirn zu trocken, zu steif geworden. Und daher bleiben sie stehen bei dem, was sie seit langer Zeit gedacht haben und finden, daß dasjenige, was das Gegenteil von aller Utopie ist, daß das eine Utopie sei. Denn sehen Sie, das Buch «Die Kernpunkte» rechnet voll damit, daß man heute nicht mehr im Sinne der Saint-Simon, Fourier, Proudhon und so weiter in Utopien sich bewegen kann, aber auch damit, daß man nimmermehr sich auf den Standpunkt stellen kann: Die Entwicklung wird es schon von selber geben. Denn das, was Marx und Engels gesehen haben, was sich [zu ihren Zeiten] entwickelte, woraus sie ihre Schlüsse gezogen haben, aus dem kann man heute nicht mehr Schlüsse ziehen, denn das hat der Weltkrieg weggefegt, das ist in seiner wahren Gestalt nicht mehr da. Wer heute dasselbe sagt wie Marx und Engels, der sagt etwas, was Marx niemals gesagt hätte. Dem ist angst und bange geworden gerade vor seinen Anhängern, denn er hat gesagt: Was mich anbetrifft, ich bin kein Marxist. — Und heute würde er sagen: Damals waren die Tatsachen noch andere; damals habe ich meine Schlüsse gezogen aus Tatsachen, die noch nicht so modifiziert, so verändert worden sind, wie der Weltkrieg alles verändert hat nachher.

Mais, voyez-vous, ces humains qui ne peuvent rien apprendre des événements, qui ont aujourd'hui la même attitude que les anciens catholiques vis-à-vis de leurs évêques et de leurs papes, ne peuvent même pas imaginer qu'une chose telle que le marxisme doit être développée dans le sens des faits. C'est ce que font les socialistes, mais aussi les bourgeois. Les cercles les plus larges le font ainsi. Les bourgeois le font naturellement de manière somnolente, l'âme complètement endormie, les autres le font de telle sorte qu'ils se trouvent au milieu et voient l'effondrement, mais qu'ils ne veulent pas s'attendre aux faits qui se révèlent ainsi. Aujourd'hui, nous avons justement besoin que quelque chose de nouveau arrive parmi les humains. Et c'est pourquoi il est nécessaire de comprendre quelque chose [comme la triarticulation] qui n'est pas une utopie, mais qui compte justement avec les faits. Si, de ce côté, on appelle ce qui compte ainsi avec les faits, l'ergotage, on pourrait en fait être tout à fait satisfait. Car si les gens appellent ce qu'ils font avancer une ligne droite, alors il faut, pour faire quelque chose de raisonnable, tirer dans le sens du poil, pour amener ce qui est déraisonnable dans une autre direction, raisonnable. Mais vous voyez, ceux qui comprennent encore ce qui est raisonnable devraient approfondir ce qui est présenté ici. Et c'est à cela que peuvent servir ces soirées.

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Aber sehen Sie, diejenigen Menschen, die nichts lernen können von den Ereignissen, die heute von einer Gesinnung sind, wie die alten Katholiken ihren Bischöfen und Päpsten gegenüber waren, die können sich gar nicht denken, daß so etwas, wie es der Marxismus ist, auch fortentwickelt werden muß im Sinne der Tatsachen.Sie sehen immer noch die alten Tatsachen vor sich, und deshalbpfeifen und fauchen die Leute noch immer dasselbe, was sie gepfif‑fen und gefaucht haben vor dem Weltkrieg. So machen es die Sozialisten, aber auch die Bürgerlichen. Die weitesten Kreise machenes so. Die Bürgerlichen machen es natürlich ganz schläfrig, mit völlig verschlafener Seele, die anderen machen es so, daß sie aller­dings mitten drinnen stehen und den Zusammenbruch sehen, daß sie aber nicht mit den Tatsachen, die sich dadurch offenbaren, rech­nen wollen. Wir haben eben heute notwendig, daß etwas Neues unter die Menschen kommt. Und deshalb ist es nötig, so etwas zu verstehen [wie die Dreigliederung], die keine Utopie ist, sondern die gerade mit den Tatsachen rechnet. Wenn von jener Seite das­jenige, was so mit den Tatsachen rechnet, Quertreiberei genannt wird, so könnte man eigentlich ganz zufrieden sein. Denn wenn die Leute das, was sie vorwärtstreiben, eine gerade Linie nennen, dann muß man, um etwas Vernünftiges zu betreiben, in die Quere hin­einschießen, um das Unvernünftige in andere, in vernünftige Rich­tung zu bringen. Aber sehen Sie, diejenigen, die das Vernünftige doch noch einsehen, die sollten sich vertiefen in das, was hier vor­gebracht wird. Und dazu können ja diese Abende da sein.

Non, il y a longtemps que l'on a essayé de mettre en pratique ce que l'on a tiré des faits. Et c'est ainsi que nous nous sommes réunis depuis des semaines - je n'ai pas besoin de répéter toutes ces choses, vous pouvez encore poser des questions ou discuter des pour et des contre à l'issue de cet exposé -, nous nous sommes réunis depuis des semaines pour mettre sur pied ce que nous appelons le corps des conseils d'entreprise. Nous avons essayé de créer ces conseils d'entreprise à partir des faits actuels nécessaires, de les créer vraiment de telle sorte qu'ils viennent de la simple vie de l'économie, qu'ils ne viennent pas de la vie politique, qui ne peut pas constituer la base de la vie de l'économie. Car si l'on regarde les faits en face aujourd'hui, il faut se tenir strictement sur le terrain de l'organisme social triarticulé. Et celui qui ne veut pas de cette triarticulation aujourd'hui va à l'encontre de la nécessité historique de l'évolution de l'humanité. Aujourd'hui, il doit en être ainsi, comme je l'ai souvent expliqué : que la vie spirituelle soit placée sur elle-même, que la vie économique soit placée sur elle-même, que la vie de droit ou politique soit administrée démocratiquement. Et dans la vie économique, le premier pas vers un façonnement réellement social doit être fait avec les conseils d'entreprise. Mais comment cela peut-il se faire ? Uniquement en posant d'abord la question : maintenant oui, il y a l'impulsion de l'organisme social triarticulé, c'est nouveau par rapport à toutes les anciennes momies de parti ; y a-t-il quelque chose d'autre de nouveau ? Les imbéciles prétendent aujourd'hui que les idées ne font que tourbillonner dans l'air. Si l'on écoute les discussions, elles apportent toutes sortes de choses négatives, mais elles n'apportent rien qui puisse être mis en parallèle avec la triarticulation de l'organisme social. Tout cela n'est que de l'eau de rose lorsque les socialistes affirment que les idées ne font que pendre dans l'air - comme cela a été dit dans une revue nouvellement créée, lors d'une discussion sur la triarticulation.

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Nicht wahr, es ist ja längst dasjenige, was da aus den Tatsachen herausgeholt wird, versucht worden, in die Praxis hineinzutragen. Und so haben wir uns seit Wochen versammelt — ich brauche alle diese Dinge nicht zu wiederholen, Sie können ja auch im Anschluß an diesen Vortrag noch Fragen stellen oder pro und contra disku­tieren —, wir haben uns seit Wochen versammelt, um das, was wir Betriebsräteschaft nennen, auf die Beine zu bringen. Wir haben versucht, diese Betriebsräteschaft aus den gegenwärtig notwendi­gen Tatsachen heraus zu schaffen, wirklich so sie zu schaffen, daß sie aus dem bloßen Wirtschaftsleben kommen, daß sie nicht kom­men aus dem politischen Leben, das nicht die Grundlage des Wirt­schaftslebens abgeben kann. Denn man muß, wenn man heute den Tatsachen ins Auge schaut, streng stehen auf dem Boden des drei­gliedrigen sozialen Organismus. Und derjenige, der heute diese Dreigliederung nicht will, der handelt der geschichtlichen Notwen­digkeit der Menschheitsentwicklung entgegen. Heute muß das so sein, wie ich es oftmals ausgeführt habe: daß das geistige Leben auf sich gestellt wird, daß das wirtschaftliche Leben auf sich gestellt wird, daß das Rechts- oder politische Leben demokratisch verwal­tet wird. Und im wirtschaftlichen Leben soll der erste Anfang zu einer wirklich sozialen Gestaltung mit den Betriebsräten gemacht werden. Wodurch kann aber das nur geschehen? Nur dadurch, daß man zuerst die Frage aufstellt: Nun ja, da ist der Impuls des dreigliedrigen sozialen Organismus, der ist neu gegenüber allen früheren Parteimumien; ist noch etwas anderes Neues da? Blödlinge behaupten heute, daß die Ideen nur so durch die Luft schwirren würden. Hört man die Diskussionen an, so bringen sie allerlei Negatives, aber sie bringen nichts, was der Dreigliederung des sozialen Organismus an die Seite zu stellen wäre. Das ist alles Wischiwaschi, wenn da von sozialistischer Seite herkommt, daß die Ideen nur so in der Luft hängen — wie das gesagt worden ist in einer neu begründeten Zeitschrift in einer Besprechung der Dreigliederung.

Il s'agit tout d'abord qu’on lance la question et d'y voir clair : N'y a-t-il rien d'autre ? Ensuite, on s'en tient d'abord à la triarticulation de l'organisme social, jusqu'à ce qu'on puisse la réfuter de manière objective, jusqu'à ce qu'on puisse placer à côté d'elle des choses objectivement équivalentes. On ne peut plus discuter des anciens programmes de parti, c'est la guerre mondiale qui en a discuté ; celui qui a vraiment de la compréhension sait que ces anciennes idées de parti sont réfutées par la catastrophe de la guerre mondiale. Mais alors, si l'on ne peut pas répondre à cette question en plaçant à côté quelque chose d'objectivement équivalent, et si l'on veut aller plus loin, alors on peut honnêtement se dire : nous travaillons donc dans le sens de la triarticulation de l'organisme social. Disons-le franchement : les anciennes structures de parti ont perdu leur signification ; il faut travailler dans le sens de la triarticulation.

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Es handelt sich erstens darum, daß man die Frage aufwirft und sich darüber klar wird: Ist nichts anderes da? Dann hält man sich zunächst an die Dreigliederung des sozialen Organismus, bis man sie in sachlicher Weise widerlegen kann, bis man sachlich Gleichwertiges daneben stellen kann. Über die alten Parteiprogramme kann man nicht mehr diskutieren, darüber hat der Weltkrieg diskutiert; wer wirklich Verständnis hat, der weiß, daß diese alten Parteimumien durch die Weltkriegskatastrophe widerlegt sind. Dann aber, wenn man diese Frage nicht dadurch beantworten kann, daß man etwas sachlich Gleichwertiges daneben stellt, und wenn man weitergehen will, dann kann man ehrlich sich sagen: Also arbeiten wir im Sinne der Dreigliederung des sozialen Organismus. Sagen wir uns ehrlich: Die alten Parteizusammenhänge haben ihre Bedeutung verloren; es muß im Sinne der Dreigliederung gearbeitet werden.

Lorsque j'ai pris la parole avant-hier à Mannheim, un monsieur s'est présenté à la fin et a dit : "Ce que Steiner a dit est bien, mais ce n'est pas ce que nous voulons ; nous ne voulons pas ajouter un nouveau parti à tous les anciens partis. Les gens qui veulent une telle chose doivent entrer dans les anciens partis et y travailler. -- Je ne pouvais que répondre : j'ai suivi la vie politique de très près depuis longtemps, alors que le monsieur qui parlait n'était pas encore né. Et bien que j'aie été familiarisé par ma vie avec tout ce qui fonctionnait socialement comme force, je n'ai jamais pu agir au sein d'un parti quelconque ou m'y tenir, et il ne me vient pas à l'esprit, à la fin de ma sixième décennie, de devenir un humain de parti : je ne veux rien avoir à faire ni avec un autre parti ni avec un parti que j'aurais fondé moi-même. Je ne veux pas non plus avoir affaire à un parti que j'aurais fondé moi-même ; personne ne doit craindre qu'un nouveau parti soit fondé par moi. Car j'ai appris que chaque parti, par la force des choses, devient stupide au bout d'un certain temps, précisément parce que je ne me suis jamais engagé dans aucun parti. Et j'ai appris à plaindre les gens qui n'ont pas compris cela. C'est pourquoi personne ne doit craindre qu'un nouveau parti vienne s'ajouter aux anciens. C'est pourquoi nous n'avons pas fondé de nouveau parti, mais la Fédération pour la triarticulation de l'organisme social s'est réunie pour représenter les idées de l'organisme triarticulé, dont le caractère non utopiste, dont le caractère réel est tout de même perçu par un certain nombre de personnes. Les personnes qui le reconnaissent devraient aussi l'affirmer honnêtement et sincèrement.

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Als ich vorgestern in Mannheim gesprochen habe, trat zuletzt ein Herr auf, der sagte: Was da der Steiner gesagt hat, ist schön, aber es ist nicht das, was wir wollen; wir wollen nicht zu allen alten Parteien noch eine neue Partei. Die Leute, die so etwas wollen, die sollen in die alten Parteien eintreten und darin wirken. -- Ich konnte darauf nur sagen: Ich habe das politische Leben längst sehr genau verfolgt, als der Herr, der da sprach, noch lange nicht geboren war. Und ichhabe, trotzdem ich mit allem bekanntgeworden bin durch mein Leben, was sozial irgendwie als Kraft funktionierte, ich habe doch niemals innerhalb irgendeiner Partei gewirkt oder darinnen stehen können, und es fällt mir nicht ein, jetzt, am Ende meines sechsten Lebensjahrzehnts, irgendwie ein Parteimensch zu werden: Weder mit einer andern Partei noch mit einer selbstgegründeten möchte ich irgend etwas zu tun haben. Also auch nicht mit einer selbstgegründeten Partei möchte ich etwas zu tun haben; das braucht niemand zu fürchten, daß durch mich eine neue Partei gegründet wird. Denn daß jede Partei durch Naturnotwendigkeit nach einiger Zeit töricht wird, das habe ich gelernt, gerade indem ich mich niemals mit irgendeiner Partei eingelassen habe. Und ich habe gelernt, die Leute zu bedauern, die das nicht durchschauen. Daher braucht niemand zu fürchten, daß zu den alten Parteien eine neue Partei kommt. Deshalb ist auch von uns nicht eine neue Partei gegründet worden, sondern der Bund für Dreigliederung des sozialen Organismus hat sich zusammengeschlossen, um die Ideen des dreigliedrigen Organismus zu vertreten, deren nicht-utopistischer Charakter, deren Wirklichkeitscharakter eben doch von einer Anzahl von Menschen durchschaut wird. Die Menschen, die das einsehen, die sollten aber auch ehrlich und aufrichtig sich dazu bekennen.

Car cela non plus ne doit pas arriver : Il y a une pièce de théâtre dans laquelle un coq chante à l'aube, et chaque fois que le coq a chanté, le soleil se lève. Eh bien, le coq ne peut pas voir le contexte, c'est pourquoi il croit que lorsqu'il chante, c'est que le soleil répond à son appel, qu'il vient parce qu'il a chanté, qu'il a fait en sorte que le soleil se lève. - Enfin, si quelqu'un dans la vie non sociale se laisse aller à une telle illusion, comme ce coq qui chante sur le fumier et veut faire se lever le soleil, cela ne fait rien. Mais si, dans certaines circonstances, il arrivait que l'idée des conseils d'entreprise véritablement économiques prospère sur le sol de l'organisme triarticulé et que les personnes qui s'en occupent veuillent nier l'origine, à savoir que l'impulsion de la triarticulation a mis cette idée en mouvement, et si ces personnes croient que parce qu'on a chanté, les conseils d'entreprise vont venir, alors ce serait la même erreur, et une erreur très fatale. Mais cela ne doit pas arriver. Ce qui se passe dans cette direction [les conseils d'entreprise], ce qui a été entrepris ici, ne doit pas être dissocié, cela doit rester en rapport avec l'impulsion bien comprise de la triarticulation de l'organisme social. Et ceux qui veulent réaliser les conseils d'entreprise dans le sens de cette impulsion ne peuvent jamais accepter que les conseils d'entreprise soient créés de manière unilatérale et que l'on ne crie que "conseils d'entreprise, conseils d'entreprise". Ce n'est pas suffisant. Cela n'a de sens que si l'on aspire en même temps à tout ce qui doit être recherché par l'impulsion de l'organisme social triarticulé. C'est ce qui est important. Car si vous voulez vraiment comprendre ce qui est écrit dans les "points essentiels", vous devez vous placer du point de vue que l'on peut apprendre des faits que les quatre ou cinq dernières années ont offerts. Pour celui qui voit clair dans ces faits, ils apparaissent comme s'il avait vécu des siècles, et pour celui qui voit les programmes des partis comme si leurs promoteurs avaient dormi pendant des siècles. Aujourd'hui, cela doit être envisagé clairement et sans réserve.

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Denn auch das darf nicht geschehen: Es gibt ein Theaterstück, da kräht ein Hahn in der Früh, und immer, wenn der Hahn gekräht hat, geht die Sonne auf. Nun ja, der Hahn kann nicht den Zusammenhang durchschauen, daher glaubt er, wenn er kräht, dann folge die Sonne seinem Ruf, sie komme, weil er gekräht hat, er habe bewirkt, daß die Sonne aufgeht. — Wenn schließlich jemand im nicht-sozialen Leben sich einer solchen Täuschung hingibt, wie dieser Hahn, der auf dem Mist kräht und die Sonne aufgehen machen will, so macht es nichts. Wenn aber unter Umständen es hier geschehen würde, daß die Idee der wirklich wirtschaftlichen Betriebsräte gedeiht auf dem Boden des dreigliedrigen Organismus und diejenigen Menschen, die das pflegen, verleugnen wollten etwa den Ursprung, nämlich daß der Impuls der Dreigliederung diese Idee in Fluß gebracht hat, und wenn diese Menschen glauben, weil man gekräht habe, kämen die Betriebsräte, dann wäre das derselbe Irrtum, und zwar ein sehr verhängnisvoller Irrtum. Das darf aber nicht kommen. Das, was in dieser Richtung [der Betriebsräte] geschieht, was in Angriff genommen worden ist hier, das darf nicht losgelöst werden, es muß im Zusammenhang bleiben mit dem richtig verstandenen Impuls der Dreigliederung des sozialen Organismus. Und diejenigen, die im Sinne dieses Impulses die Betriebsräteschaft verwirklichen wollen, die können sich niemals darauf einlassen, daß etwa in einseitiger Weise bloß die Betriebsräteschaft gegründet würde und immer nur gekräht würde «Betriebsräte, Betriebsräte». Damit ist es nicht genug. Das hat nur einen Sinn, wenn man zugleich anstrebt alles, was durch den Impuls des dreigliedrigen sozialen Organismus angestrebt werden soll. Das ist es, worauf es ankommt. Denn wollen Sie wirklich das verstehen, was in den «Kernpunkten» steht, dann müssen Sie sich auf den Standpunkt stellen, den man lernen kann aus den Tatsachen, die die letzten vier bis fünf Jahre geboten haben. Wer diese Tatsachen durchschaut, auf den wirken sie so, als wenn er Jahrhunderte durchlebt hätte, und auf den wirken die Parteiprogramme so, als wenn ihre Träger Jahrhunderte geschlafen hätten. Heute muß dieses klar und rückhaltlos ins Auge gefaßt werden.

Ce que je viens de vous raconter, j'aurais bien sûr tout aussi bien pu l'écrire en préambule de ce livre. Seulement, on a pu constater ces derniers mois à quel point les programmes des partis sont actuellement rigides et stériles. Mais il serait utile que cela figure en préambule de ce livre. Je vous ai raconté aujourd'hui beaucoup de choses qui n'y figurent pas, puisque vous avez décidé, me semble-t-il, de vous réunir ici pour étudier correctement les graves questions sociales actuelles dans le prolongement de ce livre. Mais avant de s'y atteler, il faut déjà se rendre compte que l'on ne peut pas continuer à trottiner dans le vieux style des programmes et des modèles de parti, mais que l'on doit se décider à aborder aujourd'hui les faits conformément à la réalité et à tirer un trait sur tout ce qui ne tient pas compte de ces nouveaux faits. Ce n'est qu'ainsi que vous comprendrez correctement ce qui doit être réalisé, précisément avec cette impulsion vers un organisme social triarticulé. Et vous le comprendrez de la bonne manière si vous trouvez que chaque phrase de ce livre est susceptible d'être mise en pratique, d'être transformée en réalité immédiate. Et la plupart de ceux qui disent qu'ils ne comprennent pas ou qu'il s'agit d'utopies et autres, n'ont tout simplement pas le courage de penser assez fort aujourd'hui pour que les pensées puissent intervenir dans la réalité. Ceux qui crient toujours "dictature du prolétariat", "conquête du pouvoir", "socialisme", pensent généralement très peu. Il n'est donc pas possible d'intervenir dans la réalité avec ces modèles de mots. Mais ils viennent ensuite dire qu'on ne propose [avec les "points essentiels"] que quelque chose qui est une utopie. Ce n'est que dans l'esprit des gens qui n'y comprennent rien que cela devient une utopie.

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Das, was ich Ihnen jetzt erzählt habe, das hätte ich natürlich ebensogut als Vorrede in dieses Buch schreiben können. Allein, man hat ja erst in den letzten Monaten gesehen, wie steif und unfruchtbar die Parteiprogramme gegenwärtig sind. Aber es wäre schon nützlich, wenn gerade das als Vorrede in diesem Buche stehen würde. Vieles, was nicht darin steht, habe ich Ihnen heute erzählt, da Sie, wie mir scheint, beschlossen haben, hier zusammenzukommen, um in Anknüpfung an dieses Buch die ernsten sozialen Fragen der Gegenwart sachgemäß zu studieren. Aber bevor man sich an das macht, muß man sich schon klarmachen, daß man nicht forttrotteln kann in dem alten Stil der Parteiprogramme und Parteischablonen, sondern daß man sich dazu entschließen muß, heutedie Tatsachen wirklichkeitsgemäß anzufassen und einen Strich zumachen unter alles das, was nicht rechnet mit diesen neuen Tat‑sachen. Nur dadurch werden Sie das, was erreicht werden soll gerade mit diesem Impuls vorn dreigliedrigen sozialen Organismus, in der richtigen Weise auffassen. Und Sie werden es in der richtigen Weise auffassen, wenn Sie finden, daß jeder Satz in diesem Buch dazu angetan ist, Tat werden zu können, umgesetzt werden zu können in unmittelbare Wirklichkeit. Und die meisten, die sagen, sie würden das nicht verstehen oder es seien Utopien und dergleichen, denen fehlt einfach der Mut, die Courage, heute so stark zu denken, daß die Gedanken in die Wirklichkeit eingreifen können. Diejenigen, die immer krähen «Diktatur des Proletariats», «Eroberung der Macht», «Sozialismus», die denken zumeist sehr wenig dabei. Es kann daher mit diesen Wortschablonen nicht in die Wirklichkeit eingegriffen werden. Dann aber kommen diese und sagen, da würde [mit den «Kernpunkten»] nur etwas geboten, was eine Utopie ist. Eine Utopie wird es erst in den Köpfen von den Leuten, die nichts davon verstehen.

C'est pourquoi il faudrait faire comprendre à ces gens ce que Goethe a dit un jour, sous une forme un peu différente et en se référant à autre chose, en se moquant du physiologiste Haller, qui était un naturaliste ossifié. Haller avait inventé la parole :

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Deshalb sollte man diesen Leuten klarmachen, was, in einer etwas veränderten Form mit Bezug auf etwas anderes, Goethe einmal gesagt hat, indem er gelacht hat über den Physiologen Haller, der ein verknöcherter Naturforscher war. Haller hatte das Wort geprägt:

aucun esprit créé ne pénètre à l'intérieur de la nature.

Heureux celui à qui elle indique seulement l'enveloppe extérieure ! Cela répugnait à Goethe, et il disait : "À l'intérieur de la nature" - ô philistin ! - "Aucun esprit créé ne pénètre". "Heureux celui à qui elle indique seulement l'enveloppe extérieure !" J'entends cela se répéter depuis soixante ans, je le maudis, mais en cachette.

La nature n'a ni noyau ni enveloppe, elle est tout en une seule fois.

Examine-toi donc le plus possible pour savoir si tu es le noyau ou la coquille !

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Ins Innere der Natur Dringt kein erschaffner Geist.

Glückselig, wem sie nur Die äußere Schale weist! Das widerstrebte Goethe, und er sagte: «Ins Innere der Natur» — O, du Philister! — «Dringt kein erschaffner Geist.» «Glückselig, wem sie nur Die äußere Schale weist!» Das hör ich sechzig Jahre wiederholen, Ich fluche drauf, aber verstohlen.

Natur hat weder Kern Noch Schale, Alles ist sie mit einem Male.

Dich prüfe du nur allermeist, Ob du Kern oder Schale seist!

Ceux qui parlent de la triarticulation de l'organisme social comme d'une utopie, on aimerait aussi leur dire : "Examine-toi seulement si ce qui hante ton cerveau est soi-même une utopie ou une réalité. -- On trouvera alors que tous les corbeaux ont la plupart du temps des utopies à l'intérieur et que la réalité dans leur propre tête devient donc aussi une utopie ou une idéologie, ou comme ils l'appellent alors. C'est pourquoi il est si difficile aujourd'hui de faire passer la réalité, parce que les gens se sont tellement barré l'accès à la réalité.

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Diejenigen, die von der Dreigliederung des sozialen Organismus als von einer Utopie sprechen, zu denen möchte man auch so sagen: Dich prüfe du nur zuallermeist, ob das in deinem Gehirn drinnen Spukende selber Utopie oder Wirklichkeit ist. -- Da wird man finden, daß all die Kräher zumeist Utopien drinnen haben und deshalb die Wirklichkeit in ihrem eigenen Kopfe auch eine Utopie wird oder eine Ideologie oder wie sie es dann nennen. Deshalb ist es heute so schwer, mit der Wirklichkeit durchzudringen, weil die Leute sich so verbaut haben den Zugang zu der Wirklichkeit.

Mais nous devons nous dire que nous devons travailler sérieusement, sinon nous ne pourrons pas passer de notre volonté à l'action ; et c'est ce qui importe, que nous passions de notre volonté à l'action. Et si nous devions renoncer à tout, parce que nous le reconnaissons comme une erreur, alors nous devrions, pour pouvoir passer du vouloir à l'action, nous tourner vers la vérité, que nous voulons percer à jour en tant que vérité, car rien d'autre ne peut conduire du vouloir à l'action que la poursuite impitoyable et courageuse de la vérité. Cela devrait en fait être écrit comme une devise, comme un slogan, avant les études de ces soirées. Je voulais vous présenter ce soir une préface à ces soirées d'étude. J'espère que ce préambule ne vous empêchera pas de cultiver ces études de telle sorte qu'enfin, avant qu'il ne soit trop tard, des pensées qui portent en elles des germes d'action puissent s'insérer dans le monde de manière fructueuse.

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Das aber müssen wir uns sagen, daß wir ernstlich arbeiten müssen, sonst werden wir nicht überführen können unser Wollen in die Tat; und darauf kommt es an, daß wir unser Wollen in die Tat überführen. Und wenn wir von allem Abschied nehmen müßten, weil wir es als einen Irrtum erkennen, so müßten wir, um vom Wollen zur Tat kommen zu können, uns doch zur Wahrheit wenden, die wir als Wahrheit durchschauen wollen, denn nichts anderes kann vom Wollen zur Tat führen, als das rücksichtslose, couragierte Verfolgen der Wahrheit. Das sollte eigentlich als eine Devise, als ein Motto, vor die Studien dieser Abende geschrieben werden. Ich wollte Ihnen heute Abend eine Vorrede halten zu diesen Studienabenden. Ich hoffe, daß diese Vorrede Sie nicht abhält, diese Studien so zu pflegen, daß endlich wirklich, ehe es zu spät wird, Gedanken, die Tatenkeime in sich tragen, sich fruchtbar in die Welt hineinstellen können.

Nous aurons l'occasion d'en discuter.

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Es wird die Gelegenheit zu einer Aussprache gegeben.

Rudolf Steiner : Le livre "Les points essentiels de la question sociale" est écrit d'une manière particulière, et ce pour deux raisons : premièrement, il est écrit de telle manière qu'il est en fait entièrement tiré de la réalité. Certaines personnes qui lisent le livre n'y pensent pas. Je peux aussi comprendre que cela ne soit pas pleinement pris en compte aujourd'hui. J'ai déjà parlé ici, dans ce cercle - mais tous ceux qui sont là aujourd'hui n'étaient pas présents - de la façon dont les gens pensent vraiment aujourd'hui. J'ai notamment fait référence à l'exemple du professeur d'économie nationale, Lujo Brentano, qui l'a si bien présenté dans le dernier numéro de la "Feuille jaune" ; je veux le répéter brièvement, car je veux m'y rattacher un peu. Cette lumière de la théorie d'économie politique/de peuple actuelle de l'université - il est le premier, pour ainsi dire - a développé le concept d'entrepreneur et a tenté de caractériser les caractéristiques de l'entrepreneur à partir de sa pensée éclairée. Je n'ai pas besoin d'énumérer la première et la deuxième caractéristique ; la troisième est que l'entrepreneur est celui qui met ses moyens de production au service de l'ordre social à son propre compte et à ses propres risques. Il a maintenant cette notion d'entrepreneur, et il l'applique. Il arrive alors à l'étrange résultat que l'ouvrier prolétarien d'aujourd'hui est en fait aussi un entrepreneur, car il correspond à son concept d'entrepreneur en ce qui concerne la première, la deuxième et la troisième caractéristique. Car l'ouvrier a sa propre force de travail comme moyen de production ; il en dispose, et par rapport à celle-ci, il s'adresse au processus social à son propre compte et à ses propres risques. - Ainsi, cette lumière de l'économie de peuple intègre très bien le concept de travailleur prolétarien dans son concept d'entrepreneur. Vous voyez, c'est ainsi que pensent justement les humains qui se font des concepts qui n'ont aucun sens ; ils n'ont aucun sens si l'on exige des concepts qui doivent être réellement applicables à la réalité. Mais même si vous ne l'acceptez peut-être pas, on peut dire tranquillement que plus de quatre-vingt-dix pour cent de tout ce qui est enseigné ou imprimé aujourd'hui utilise de tels concepts ; si on veut les appliquer à la réalité, cela ne marche pas plus que le concept d'entrepreneur de Lujo Brentano. C'est ainsi dans la science, c'est ainsi dans la science sociale, c'est ainsi partout, c'est pourquoi les gens ont désappris à comprendre ce qui travaille avec des concepts conformes à la réalité.

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Rudolf Steiner: Das Buch «Die Kernpunkte der Sozialen Frage» ist ja nach zweifacher ichtung in einer besonderen Art geschrie­ben, Erstens ist es so geschrieben, daß es tatsächlich ganz aus der Wirklichkeit heraus stammt. Das bedenken manche Leute nicht, die das Buch lesen. Ich kann auch begreifen, daß das heute nicht voll bedacht wird. Ich habe schon einmal hier in diesem Kreise — aber es waren nicht alle die da, die heute da sind — davon gesprochen, wie nun wirklich die Leute heute denken. Ich habe namentlich hingewiesen auf das Beispiel des Professors der Nationalökonomie, Lujo Brentano, der das so nett geliefert hat in der vorigen Nummer des «Gelben Blattes»; ich will es kurz wiederholen, weil ich daran etwas anknüpfen will. Da hat diese Leuchte der heutigen Volkswirtschaftslehre der Universität — er ist ja der Erste sozusagen — den Begriff des Unternehmers entwickelt und hat versucht, aus seinem erleuchteten Denken heraus die Merkmale des Unternehmers zu charakterisieren. Das erste und zweite Merkmal brauche ich nicht aufzuzählen; als drittes gibt er an, daß der Unternehmer derjenige ist, der seine Produktionsmittel auf eigene Rechnung und Gefahr in den Dienst der sozialen Ordnung stellt. Nun hat er diesen Begriff des Unternehmers, und den wendet er nun an. Da kommt er zu dem merkwürdigen Resultat, daß der proletarische Arbeiter von heute eigentlich auch ein Unternehmer ist, denn er entspricht diesem seinem Begriff des Unternehmers in bezug auf die erste, zweite und dritte Eigenschaft. Denn der Arbeiter hat seine eigene Arbeitskraft als Produktionsmittel; darüber verfügt er, in bezug auf diese wendet er sich an den sozialen Prozeß auf eigene Rechnung und Gefahr. — So bringt diese Leuchte der Volkswirtschaft den Begriff des proletarischen Arbeitnehmers in seinen Begriff des Unternehmers sehr gut hinein. Sehen Sie, so denken eben die Menschen, die sich Begriffe machen, die gar keinen Sinn haben; sie haben keinen Sinn, wenn Begriffe verlangt werden, die auf die Wirklichkeit wirklich anwendbar sein sollen. Aber so wenig Sie das vielleicht auch annehmen werden, man kann ruhig sagen: Weit über neunzig Prozent alles desjenigen, was heute gelehrt oder gedruckt wird, das operiert mit solchen Begriffen; wenn man sie anwenden will auf die Wirklichkeit, so geht es ebensowenig wie bei Lujo Brentanos Begriff vom Unternehmer. So ist es in der Wissenschaft, so ist es in der Sozialwissenschaft, so ist es überall, daher haben die Leute verlernt, überhaupt das zu verstehen, was mit wirklichkeitsgemäßen Begriffen arbeitet.

Prenez par exemple la base de la triarticulation de l'organisme social. N'est-ce pas, on peut les poser de différentes manières, ces bases, parce que la vie a besoin de nombreuses bases. Mais l'une d'entre elles est que l'on sait que l'époque récente a vu l'émergence de ce que l'on pourrait appeler l'impulsion de la démocratie. La démocratie doit consister en ce que tout humain devenu majeur puisse établir son rapport de droit dans des parlements démocratiques, directement ou indirectement par rapport à tout autre humain devenu majeur. Mais justement, si l'on veut honnêtement et sincèrement instaurer cette démocratie dans le monde, on ne peut pas gérer les affaires spirituelles dans le sens de cette démocratie, car chaque humain devenu majeur devrait alors décider de ce qu'il ne comprend pas. Les affaires spirituelles doivent être réglées à partir de la compréhension de la chose, c'est-à-dire qu'elles doivent être placées sur elles-mêmes ; elles ne peuvent donc absolument pas être administrées dans un parlement démocratique, mais elles doivent avoir leur propre administration, qui ne peut pas être démocratique, mais qui doit être issue de la chose. Il en va de même dans la vie de l'économie ; la chose doit être gérée à partir de l'expérience économique et du vivre dedans la vie de l'économie. C'est pourquoi la vie de l'économie d'un côté et la vie de l'esprit de l'autre doivent être séparées du parlement démocratique. C'est ainsi que naît l'organisme social triarticulé.

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Nehmen Sie einmal die Grundlage der Dreigliederung des sozialen Organismus. Nicht wahr, man kann sie in der verschiedensten Weise legen, diese Grundlagen, weil das Leben viele Grundlagen braucht. Aber eine ist diese, daß man weiß: in der neueren Zeit ist das heraufgezogen, was man nennen könnte den Impuls der Demokratie. Die Demokratie muß darin bestehen, daß jeder mündig gewordene Mensch sein Rechtsverhältnis festsetzen kann in demokratischen Parlamenten -- mittelbar oder unmittelbar gegenüber jedem anderen mündig gewordenen Menschen. Aber gerade wenn man ehrlich und aufrichtig diese Demokratie in die Welt setzen will, dann kann man die geistigen Angelegenheiten nicht im Sinne dieser Demokratie verwalten, denn da würde entscheiden müssen jeder mündig gewordene Mensch über das, was er nicht versteht. Die geistigen Angelegenheiten müssen aus dem Verständnis heraus für die Sache geregelt werden, das heißt auf sich selbst gestellt werden; sie können also überhaupt nicht in einem demokratischen Parlament verwaltet werden, sondern sie müssen ihre eigene Verwaltung haben, die nicht demokratisch sein kann, sondern die aus der Sache heraus sein muß. Ebenso ist es im Wirtschaftsleben; da muß aus der wirtschaftlichen Erfahrung und dem Drinnenleben im Wirtschaftsleben die Sache verwaltet werden. Daher muß ausgeschieden werden aus dem demokratischen Parlament das Wirtschaftsleben auf der einen Seite und das Geistesleben auf der anderen Seite. Daraus entsteht der dreigegliederte soziale Organismus.

Là y a maintenant à Tübingen le professeur Heck, c'est lui - j'en ai déjà parlé - qui a dit qu'il ne fallait absolument pas se laisser aller à dire que le rapport salarial habituel, où l'on est rémunéré pour son travail, avait quelque chose d'humiliant pour le prolétaire, car Caruso était aussi dans un rapport salarial. La différence ne serait pas de principe : Caruso chante et reçoit son salaire, et le prolétaire ordinaire travaille et reçoit aussi son salaire ; et lui, en tant que professeur, reçoit aussi son salaire lorsqu'il donne une conférence. 1 a seule différence entre Caruso et le prolétaire serait que Caruso reçoit trente à quarante mille marks pour une soirée et le prolétaire un peu moins. Mais il ne s'agit pas d'une différence de principe, seulement d'une différence concernant la somme de la rémunération. Et donc, selon ce professeur plein d'esprit, on n'a pas besoin de ressentir quelque chose de dégradant dans la rémunération ; lui non plus ne le ressent pas ainsi. - Ce n'est qu'une parenthèse. Mais ce professeur intelligent a également écrit un long article contre la triarticulation. Là, il part de ce que si l'on articule en trois, on en arrive à trois parlements. - Et maintenant, il montre que ce n'est pas possible avec trois parlements, car il dit : dans le parlement économique, le petit artisan ne comprendra pas le point de vue du grand industriel, et ainsi de suite. - C'est là que le bon professeur s'est fait ses idées sur la triarticulation, et contre ces idées - que je trouve encore bien plus stupides que le professeur Heck ne les trouve ; je les critiquerais aussi jusqu'à la moelle -, il s'en prend à elles, mais il les a faites lui-même. Il s'agit en effet de ne pas juxtaposer trois parlements, mais d'en retirer ce qui n'a pas sa place dans un parlement. Il fait simplement trois parlements et dit : ce n'est pas possible. - C'est ainsi que l'on vit dans des concepts étrangers à la réalité et que l'on juge les autres en fonction de ceux-ci.

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Da gibt es nun in Tübingen den Professor Heck, das ist der — ich habe schon davon gesprochen —, der gesagt hat, man brauche sich durchaus nicht herbeizulassen zu sagen, daß das gewöhnliche Lohnverhältnis, wo man entlohnt wird für seine Arbeit, etwas Erniedrigendes hätte für den Proletarier, denn Caruso stehe ja auch im Lohnverhältnis. Der Unterschied wäre kein prinzipieller: Caru­so singe und bekomme seinen Lohn, und der gewöhnliche Prole­tarier arbeite und bekomme auch seinen Lohn; und er als Professor bekomme auch seinen Lohn, wenn er vortrage. 1 er Unterschied zwischen Caruso und dem Proletarier wäre nur der, daß Caruso für einen Abend dreißig- bis vierzigtausend Mark bekommt und der Proletarier etwas weniger. Aber das sei kein prinzipieller Unterschied, sondern nur ein Unterschied in bezug auf die Summe der Entlohnung. Und so braucht man, so meint dieser geistreiche Professor, in der Entlohnung durchaus nicht etwas Entwürdigendes zu fühlen; er fühle das auch nicht so. — Das nur nebenbei. Aber nun hat dieser gescheite Professor auch einen langen Artikel geschrieben gegen die Dreigliederung. Da geht er aus davon: Gliedern wir dreifach, dann kommen wir ja zu drei Parlamenten. — Und jetzt zeigt er, daß das nicht geht mit drei Parlamenten, denn er sagt: Im Wirtschaftsparlament wird der kleine Handwerker nicht verstehen die Standpunkte des Großindustriellen und so weiter. — Da hat sich der gute Professor seine Ideen über die Dreigliederung gemacht, und gegen diese Ideen — die ich noch viel dümmer finde als Professor Heck sie findet; die würde ich auch in Grund und Boden hinein kritisieren —, gegen die geht er an, aber die hat er selbst gemacht. Es handelt sich nämlich darum, daß nicht drei Parlamente nebeneinanderstehen, sondern daß herausgenommen wird das, was in kein Parlament gehört. Er macht einfach drei Parlamente und sagt: Das geht nicht. — So lebt man in wirklichkeitsfremden Begriffen und beurteilt das andere auch danach.

Maintenant, dans l'économie nationale, la théorie d'économie de peuple, est presque seulement inclus ce que sont des concepts irréels. Mais, voyez-vous, je ne pourrais pas, maintenant que le temps presse, écrire une bibliothèque entière dans laquelle seraient répertoriés tous les concepts d'économie de peuple. C'est pourquoi se trouve naturellement dans les "points essentiels" une multitude de concepts qui doivent être abordés/discutés de manière appropriée. Il me suffit par exemple d'attirer l'attention sur ce qui suit :

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Nun ist gerade in die Nationalökonomie, in die Volkswirtschaftslehre, fast nur das eingezogen, was unwirkliche Begriffe sind. Aber sehen Sie, ich könnte doch nicht jetzt, wo die Zeit drängt, eine ganze Bibliothek schreiben, worin alle volkswirtschaftlichen Begriffe aufgeführt werden. Daher finden sich natürlich in den «Kernpunkten» eine Menge von Begriffen, die sachgemäß besprochen werden müssen. Ich brauche zum Beispiel nur auf folgendes aufmerksam zu machen:

N'est-il pas vrai qu'à une époque que nous avons dépassée, les relations sociales étaient essentiellement le fruit de la conquête ? Un territoire quelconque était occupé par un peuple ou une race ; un autre peuple faisait irruption et conquérait le territoire. Les races ou les peuples qui étaient auparavant à l'intérieur ont été soumis au travail. Le peuple conquérant a pris le sol en possession, ce qui a créé un certain rapport entre les conquérants et les conquis. Les conquérants, du fait qu'ils étaient des conquérants, avaient le sol en possession. De ce fait, ils étaient les plus forts économiquement, les conquis étaient les plus faibles économiquement, et il s'en est formé ce qui est devenu un rapport de droit. C'est pourquoi, à presque toutes les époques anciennes de l'évolution historique, on a des rapports de droit fondés sur des conquêtes, c'est-à-dire des privilèges et des droits de désavantage. Les temps sont maintenant venus où il n'était plus possible de conquérir librement. Vous pouvez étudier la différence entre la conquête libre et la conquête liée en regardant par exemple le début du Moyen Âge. Vous pouvez étudier comment certains peuples, les Goths, sont descendus vers le sud, mais dans des régions entièrement occupées ; ils ont alors été amenés, en ce qui concerne l'ordre social, à faire autre chose que les Francs, qui sont allés vers l'ouest et n'y ont pas trouvé de régions entièrement occupées. Cela a donné naissance à d'autres droits de conquête. À l'époque moderne, ce ne sont pas seulement les droits fonciers issus des conquêtes qui ont agi, mais aussi les droits des humains qui avaient des privilèges de possession et qui pouvaient désormais s'approprier les moyens de production grâce au pouvoir économique. La possession des moyens de production, c'est-à-dire la propriété privée des capitaux, s'est ajoutée au droit foncier au sens actuel du terme. Cela a donné lieu à des rapports de droit issus de rapports économiques. Comme vous le voyez, ces rapports de droit sont nés tout seuls à partir de rapports économiques.

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Nicht wahr, in einer Zeit, über die wir hinaus sind, da entstanden soziale Verhältnisse im Grunde genommen einzig und allein durch Eroberung. Irgendein Territorium wurde von einem Volke oder von einer Rasse besetzt; ein anderes Volk brach herein und eroberte das Gebiet. Diejenigen Rassen oder Völker, die früher drinnen waren, wurden heruntergedrängt zur Arbeit. Das erobernde Volk nahm den Boden in Besitz, und dadurch entstand ein gewisses Verhältnis zwischen Eroberern und Eroberten. Die Eroberer hatten dadurch, daß sie Eroberer waren, den Boden in Besitz. Dadurch waren sie die wirtschaftlich Starken, die Eroberten waren die wirtschaftlich Schwachen, und es bildete sich das heraus, was ein Rechtsverhältnis wurde. Daher hat man in fast allen älteren Epochen im geschichtlichen Werden durch Eroberungen begründete Rechtsverhältnisse, das heißt Vorrechte und Benachteiligungsrechte. Nun kamen die Zeiten herbei, in denen nicht mehr frei erobert werden konnte. Sie können den Unterschied studieren im freien und gebundenen Erobern, wenn Sie zum Beispiel sich das frühe Mittelalter ansehen. Sie können studieren, wie gewisse Völkerschaften, die Goten, hinuntergedrungen waren nach dem Süden, aber in vollbesetzte Gebiete; da wurden sie zu anderem veranlaßt in bezug auf die soziale Ordnung als die Franken, die nach dem Westen zogen und dort nicht vollbesetzte Gebiete fanden. Dadurch entstanden andere Erobererrechte. In der neueren Zeit wirkten dann nicht allein die von Grund und Boden abhängigen Rechte, welche aus Eroberungen hervorgegangen waren, es kamen dazu die Rechte derjenigen Menschen, die Vorrechte aus Besitz hatten und die jetzt durch wirtschaftliche Macht sich aneignen konnten die Produktionsmittel. Da kam zu dem, was Bodenrecht ist im heutigen Sinne, der Besitz der Produktionsmittel dazu, das heißt der Privatbesitz von Kapitalien. Das ergab dann Rechtsverhältnisse aus wirtschaftlichen Verhältnissen heraus. Sie sehen, es sind diese Rechtsverhältnisse ganz allein aus den wirtschaftlichen Verhältnissen heraus entstanden.

Maintenant, les humains viennent et veulent des notions de pouvoir économique, d'importance économique de la terre, ils veulent des concepts de moyens d'exploitation, de moyens de production, de capitaux, etc., mais ils n'ont pas vraiment de compréhension profonde du cours des choses. Ils prennent alors les faits superficiels et n'arrivent pas à comprendre ce qui se cache derrière les droits fonciers, derrière les rapports de force en ce qui concerne les moyens de production. Bien sûr, toutes ces choses sont prises en compte dans mon livre. Là est pensé correctement ; là est, quand est parlé de droits, à partir de la conscience de la manière dont le droit s'est développé à travers les siècles ; quand on parle de capital, on parle de la conscience de comment dont le capital est devenu. Là est évité soigneusement d'utiliser un concept qui n'est pas entièrement saisi à partir de sa genèse ; c'est pourquoi ces concepts se présentent différemment que dans les manuels habituels d'aujourd'hui.

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Nun kommen die Menschen und wollen Begriffe von wirtschaftlicher Macht, von der wirtschaftlichen Bedeutung des Grund und Bodens, sie wollen Begriffe der Betriebsmittel, der Produktionsmittel, der Kapitalien und so weiter haben. ja, aber sie habenkeine wirklich tiefere Einsicht in den Gang der Dinge. Da nehmensie dann die oberflächlichen Tatsachen und kommen nicht darauf,was eigentlich hinter den Bodenrechten, hinter den Machtverhältnissen in bezug auf die Produktionsmittel steckt. Natürlich, alle diese Dinge sind in meinem Buche berücksichtigt. Da ist richtig gedacht; da ist, wenn von Rechten gesprochen wird, aus dem Bewußtsein heraus gesprochen, wie das Recht durch Jahrhunderte hindurch entstanden ist; da ist, wenn von Kapital gesprochen wird, aus dem Bewußtsein heraus gesprochen, wie das Kapital geworden ist. Da ist sorgfältig vermieden, einen Begriff anzuwenden, der nicht vollständig aus der Entstehung heraus gefaßt ist; daher nehmen sich diese Begriffe anders aus als in den gewöhnlichen heutigen Lehrbüchern.

Mais aussi quelque chose d'autre est pris en compte. Prenons un fait précis, n'est-ce pas, le fait que le protestantisme est né un jour. Dans les livres d'histoire, on raconte très souvent que Tetzel a parcouru l'Europe centrale et que les gens étaient indignés par la vente des indulgences et autres choses de ce genre. Mais ce n'était pas seulement cela, ce n'est qu'une vision superficielle. L'élément principal était le fait qu'il y avait à Gênes une banque pour le compte de laquelle - et non pour le compte du pape - ce marchand d'indulgences se déplaçait en Allemagne, car cette banque avait accordé des crédits au pape pour ses autres besoins. Toute cette histoire était une entreprise capitaliste. Cet exemple du commerce des indulgences en tant qu'entreprise capitaliste, où même le spirituel a été négocié, vous permet d'étudier - ou plutôt, si l'on commence à étudier, on arrive peu à peu à la conclusion - que finalement, tout pouvoir du capital se ramène à la suprématie du spirituel. Si vous étudiez comment le capital a acquis son pouvoir, vous trouverez partout la suprématie du spirituel. Et c'est vraiment ainsi. N'est-ce pas, celui qui est intelligent, celui qui est débrouillard, a un pouvoir plus grand que celui qui n'est pas intelligent, qui n'est pas débrouillard. Et c'est ainsi que naissent, de façon justifiée ou non, beaucoup de choses qui sont des concentrations de capital. Il faut en tenir compte lorsqu'on envisage le concept de capital. Ces études réelles permettent de comprendre que le capital repose sur le développement du pouvoir spirituel et que le pouvoir de l'ancien esprit théocratique est venu s'ajouter aux droits fonciers, aux droits de conquête, d'un autre côté. L'ancienne Église est à l'origine d'une grande partie de ce qui a ensuite été transféré dans le capitalisme moderne. Il existe un lien secret entre le pouvoir capitaliste moderne et le pouvoir de l'ancienne Église. Et tout cela s'est rassemblé en un méli-mélo dans l'État de pouvoir moderne. Là-dedans, vous trouvez les restes de l'ancienne théocratie, les restes des anciennes conquêtes. Et finalement, les conquêtes modernes sont venues s'y ajouter, et la conquête la plus moderne serait maintenant la conquête de l'État par le socialisme. Mais en réalité, ce n'est pas ainsi qu'il faut procéder. Il doit y avoir quelque chose de nouveau, qui fasse complètement table rase de ces anciens concepts et impulsions. C'est pourquoi il est important que nous nous penchions aussi, dans nos études, sur les notions qui sont à la base de tout cela. Nous devons aujourd'hui expliquer précisément à tous ceux qui veulent parler de choses sociales ce qu'est le droit, ce qu'est le pouvoir et ce qui est en réalité un bien [économique], un bien sous forme de marchandises et autres. C'est dans ce domaine que les plus grandes erreurs sont commises. Je veux par exemple attirer votre attention sur l'une d'entre elles ; si vous n'y êtes pas attentifs, vous comprendrez mal beaucoup de choses dans mon livre.

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Aber auch noch etwas anderes ist berücksichtigt. Nehmen wir eine bestimmte Tatsache, nicht wahr, die Tatsache, wie der Protestantismus einmal entstanden ist. In den Geschichtsbüchern wird es ja sehr häufig so erzählt, daß der Tetzel herumgezogen ist innerhalb Mitteleuropas und daß die Leute entrüstet waren über den Ablaßverkauf und dergleichen. Aber das war es nicht allein, das ist nur die Oberflächenansicht. Die Hauptsache, die dahinter stak, war die Tatsache, daß es in Genua ein Bankhaus gab, in dessen Auftrag — nicht im Auftrag des Papstes — dieser Ablaßkrämer in Deutschland herumzog, denn dieses Bankhaus hatte dem Papst für seine anderen Bedürfnisse Kredite gewährt. Die ganze Geschichte war eine kapitalistische Unternehmung. An diesem Beispiel des Ablaßhandels als einer kapitalistischen Unternehmung, wo sogar auch mit Geistigem gehandelt worden ist, an diesem Beispiel können Sie studieren — oder besser gesagt, wenn man da anfängt zu studieren, kommt man allmählich darauf —, daß schließlich alle Kapitalmacht zurückgeht auf die Übermacht des Geistigen. Studieren Sie, wie das Kapital eigentlich zu seiner Macht gekommen ist, so finden Sie überall die Übermacht des Geistigen. Und so ist es wirklich. Nicht wahr, wer schlau ist, wer findig ist, der hat eine größere Macht als derjenige, der nicht schlau, der nicht findig ist. Und auf diese Art entsteht gerechtfertigterweise — oder auch ungerechtfertigterweise — vieles, was Zusammenscharrung des Kapitals ist. Das muß berücksichtigt werden, wenn man ins Auge faßt den Kapitalbegriff. Bei solchen realen Studien kommt man dahinter, daß Kapital auf Entfaltung der geistigen Macht beruht und daß zu den Grund- und Bodenrechten, zu den Erobererrechten, von anderer Seite hinzugekommen ist die Macht des alten theokratischen Geistes. Von der alten Kirche ist viel von dem ausgegangen, was dann übergegangen ist eigentlich in den modernen Kapitalismus. Es gibt einen geheimen Zusammenhang zwischen der modernen kapitalistischen Macht und der Macht der alten Kirche. Und das alles hat sich zu einem Kuddelmuddel zusammengezogen in den modernen Machtstaat. Da drinnen finden Sie die Überreste der alten Theokratie, die Überreste der alten Eroberungen. Und schließlich kamen die modernen Eroberungen dazu, und die allermodernste Eroberung soll jetzt die Eroberung des Staates durch den Sozialismus sein. Aber so darf man es in Wirklichkeit nicht machen. Es muß etwas Neues werden, was mit diesen alten Begriffen und Impulsen vollständig aufräumt. Daher wird es darauf ankommen, daß wir uns bei unseren Studien auch befassen mit den Begriffen, die hier zugrundeliegen. Wir müssen heute jedem, der über soziale Sachen reden will, genau Aufschluß geben darüber, was Recht ist, was Macht ist und was in Wirklichkeit ein [wirtschaftliches] Gut ist, ein Gut in Form von Waren und dergleichen. Auf diesem Gebiet werden die größten Fehler gemacht. Ich will zum Beispiel auf einen aufmerksam machen; wenn Sie darauf nicht aufmerksam sind, werden Sie vieles in meinem Buche mißverstehen.

Aujourd'hui, on pense souvent que la marchandise est du travail stocké, que le capital est aussi du travail stocké. - Vous pouvez dire qu'il est inoffensif d'avoir de telles notions. Ce n'est pas inoffensif, car de tels concepts empoisonnent toute la pensée sociale. Vous voyez, qu'en est-il du travail - le travail en tant que dépense/application de force de travail ? Oui, il y a une grande différence entre, par exemple, utiliser ma force musculaire physique en faisant du sport et couper du bois. Si je fais du sport, j'use ma force musculaire physique ; je peux être aussi fatigué et devoir remplacer ma force musculaire autant que celui qui coupe du bois. Je peux appliquer la même quantité de travail au sport qu'à la coupe de bois. La différence ne réside pas dans le fait que la force de travail doit être remplacée - elle doit bien sûr être remplacée - mais dans le fait que l'une des forces de travail est utilisée uniquement pour moi, dans un sens égoïste, l'autre dans un sens social pour la société. C'est la fonction sociale qui différencie ces choses. Si je dis maintenant que quelque chose est du travail accumulé, je ne tiens pas compte du fait que le travail cesse en fait d'être dans une chose quelconque au moment où l'on ne travaille plus. Je ne peux pas dire que le capital est du travail accumulé, mais je dois dire que le travail n'existe que tant qu'il est effectué. Mais dans notre ordre social actuel, le capital conserve le pouvoir d'appeler à nouveau le travail à tout moment. Ce n'est pas dans le fait que le capital soit du travail accumulé que réside la fatalité, comme le pense Marx, mais dans le fait que le capital donne le pouvoir d'appeler à son service un nouveau travail - non pas un travail accumulé - mais un nouveau travail. Il dépend beaucoup de cela, et il dépendra encore beaucoup de cela, que l'on parvienne à des notions claires, fondées sur la réalité, sur ces choses. Et c'est à partir de telles notions, qui sont maintenant totalement ancrées dans la réalité, que ce livre est écrit. Il ne tient pas compte de ces notions, qui étaient tout à fait utiles pour l'éducation du prolétariat. Mais aujourd'hui, alors que l'on doit construire quelque chose, ces notions n'ont plus de sens.

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Es herrscht heute vielfach die Ansicht, daß Ware aufgespeicherte Arbeit ist, daß auch Kapital aufgespeicherte Arbeit ist. — Sie können sagen, es sei harmlos, solche Begriffe zu haben. Es ist nicht harmlos, denn solche Begriffe vergiften das ganze soziale Denken. Sehen Sie, wie ist es eigentlich mit der Arbeit — Arbeit als Aufwendung von Arbeitskraft? Ja, da verhält es sich so, daß ein großer Unterschied ist, ob ich zum Beispiel meine physische Muskelkraftabnütze, indem ich Sport treibe, oder ob ich Holz hacke. Wenn ichSport treibe, da nütze ich meine physische Muskelkraft ab; ichkann geradeso müde werden und meine Muskelkraft wieder erset‑zen müssen wie einer, der Holz hackt. Dieselbe Menge von Arbeitkann ich anwenden auf den Sport wie auf das Holzhacken. Der Unterschied ist nicht da in bezug darauf, daß die Arbeitskraft wieder ersetzt werden muß — sie muß natürlich ersetzt werden —, sondern der Unterschied besteht darin, daß die eine Arbeitskraft angewendet wird nur für mich, im egoistischen Sinn, die andere im sozialen Sinn für die Gesellschaft. Durch die soziale Funktion unterscheiden sich diese Dinge. Sage ich jetzt, irgend etwas ist aufgespeicherte Arbeit, so berücksichtige ich nicht, daß die Arbeit eigentlich aufhört, in irgendeiner Sache drinnen zu sein in dem Augenblick, wo nicht mehr gearbeitet wird. Nicht kann ich sagen: Das Kapital ist aufgespeicherte Arbeit —, sondern ich muß sagen: Die Arbeit ist nur so lange da, als sie verrichtet wird. Aber in unserer heutigen sozialen Ordnung behält das Kapital die Macht, die Arbeit jederzeit wiederum aufzurufen. Nicht in dem liegt das Verhängnisvolle, was Marx meint, daß Kapital aufgespeicherte Arbeit ist, sondern in der Einrichtung, daß Kapital die Macht gibt, neue Arbeit — nicht aufgespeicherte Arbeit —, sondern neue Arbeit immer wiederum in seinen Dienst zu stellen. Davon hängt viel ab, und davon wird weiter viel abhängen, daß man zu klaren, in der Wirklichkeit fußenden Begriffen über diese Dinge kommt. Und von solchen Begriffen, die nun ganz drinnenstecken in der Wirklichkeit, geht dieses mein Buch aus. Das rechnet nicht mit solchen Begriffen, die ganz nützlich waren für die Erziehung des Proletariats. Aber heute, wo man etwas bauen soll, haben sie keinen Sinn mehr, diese Begriffe.

Vous voyez, quand je dis que le capital est du travail accumulé, c'est bon pour l'éducation du prolétariat ; il a reçu les sentiments qu'il devait recevoir. Il n'était pas important que le concept soit fondamentalement faux - on peut éduquer même avec des concepts fondamentalement faux. Mais on ne peut construire quelque chose qu'avec des concepts corrects. C'est pourquoi nous avons aujourd'hui besoin de concepts corrects dans tous les domaines de l'économie de peuple et nous ne pouvons pas continuer à travailler avec des concepts erronés. Ce n'est pas par frivolité que je dis que l'on peut aussi éduquer avec des concepts erronés, mais en vertu des principes généraux de l'éducation. Vous voyez, lorsque vous racontez des contes de fées aux enfants, vous ne voulez pas non plus construire avec ces choses que vous développez ; dans l'éducation, quelque chose d'autre entre en ligne de compte que ce qui entre en ligne de compte pour la construction dans la réalité physique. Il faut travailler avec des concepts réels. Un concept tel que "le capital est du travail accumulé" n'est pas un concept. Le capital est un pouvoir et confère le pouvoir de mettre à tout moment à son service le travail qui se crée. C'est un vrai concept avec une logique de fait. Il faut travailler avec des concepts vrais dans ces domaines. C'est ce qui a été tenté dans les "points essentiels". C'est pourquoi je pense qu'une grande partie de ce qui n'y figure pas en termes de définition des termes, de caractéristiques des termes, doit être élaborée. Et celui qui peut contribuer à l'élaboration de ce dont on a besoin pour comprendre le mode de pensée, la base de ce livre, apportera une très bonne contribution à ces soirées d'étude. C'est donc ce qui compte, mes très chers présents, c'est ce qui compte tout particulièrement.

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Sehen Sie, wenn ich sage: Kapital ist aufgespeicherte Arbeit —, so ist das gut für die Erziehung des Proletariats; es bekam die Gefühle, die es bekommen sollte. Da kam es nicht darauf an, daß der Begriff grundfalsch ist — erziehen kann man auch mit grundfalschen Begriffen. Aber etwas aufbauen, das kann man nur mit richtigen Begriffen. Daher brauchen wir heute auf allen Gebieten der Volkswirtschaft richtige Begriffe und können nicht weiter mit falschen Begriffen arbeiten. Das sage ich nicht aus Frivolität, daß man auch mit falschen Begriffen erziehen kann, sondern aus allgemeinen Erziehungsgrundsätzen heraus. Sehen Sie, wenn Sie Kindern Märchen erzählen, dann wollen Sie ja auch nicht mit diesen Dingen, die Sie da herausentwickeln, bauen; bei der Erziehung kommt etwas anderes in Betracht, als in Betracht kommt beim Aufbauen in der physischen Wirklichkeit. Da muß mit wirklichen Begriffen gearbeitet werden. Solch ein Begriff wie «Kapital ist aufgespeicherte Arbeit», das ist kein Begriff. Kapital ist Macht und verleiht Macht, jederzeit neu entstehende Arbeit in seinen Dienst zu stellen. Das ist ein wirklicher Begriff mit Tatsachenlogik. Mit wahren Begriffen muß man arbeiten auf diesen Gebieten. Das ist versucht worden in den «Kernpunkten». Daher glaube ich, daß viel von dem, was da nicht drinnensteht an Definition der Begriffe, an Charakteristik der Begriffe, daß das erarbeitet werden muß. Und wer dann dazu beitragen kann, daß dies erarbeitet wird, was man braucht, um das zu verstehen, was die Denkweise, die Grundlage dieses Buches ist, der wird sehr Gutes beitragen zu diesen Studienabenden. Also darauf kommt es an, meine sehr verehrten Anwesenden, darauf kommt es ganz besonders an.

Oui, n'est-ce pas, il faudrait écrire un dictionnaire si l'on voulait clarifier tous les termes - mais ce qu'est le "capital" peut maintenant être réglé en une seule soirée d'étude de ce genre. Sans que l'on ait clairement compris aujourd'hui : qu'est-ce que le capital ? Qu'est-ce que la marchandise ? Qu'est-ce que le travail ? Qu'est-ce que le droit ? -, sans ces notions, on ne peut pas avancer. Et ces notions sont tout à fait confuses dans les cercles les plus larges ; elles doivent avant tout être rectifiées. Aujourd'hui, on se désespère quand on parle de l'ordre social avec des gens ; ils ne peuvent pas participer parce qu'ils n'ont pas appris à maîtriser la réalité. C'est ce qu'il faut faire.

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Ja, nicht wahr, man müßte ein Lexikon schreiben, wenn man alle Begriffe klarmachen wollte —, aber was «Kapital» ist, das kann jetzt an einem einzigen solchen Studienabend erledigt werden. Ohne daß man heute klar begriffen hat: Was ist eigentlich Kapital? Was ist Ware? Was ist Arbeit? Was ist Recht? —, ohne diese Begriffe kommt man nicht weiter. Und diese Begriffe sind ganz konfus in den weitesten Kreisen; sie müssen vor allen Dingen richtiggestellt werden. Man verzweifelt heute ja geradezu, wenn man redet mit Leuten über die soziale Ordnung; sie können nicht mit, weil sie nicht gelernt haben, die Wirklichkeit zu beherrschen. Das ist dasjenige, was namentlich besorgt werden sollte.

 

Français seulement


PREMIÈRE SÉANCE D'ÉTUDES, Stuttgart, 30 juillet 1919.

L'histoire du mouvement social.

01
Rudolf Steiner : Mes très chers présents ! Je ne vais pas anticiper ce soir sur ce qui doit être mis en place ici en tant que soirées d'étude qui se tiendront sur la base du livre "Les points essentiels de la question sociale", mais je vais essayer de vous donner une sorte d'introduction à ces soirées. Par cette introduction, je voudrais vous faire ressentir les points de vue qui ont présidé à l'écriture de ce livre. Il a été écrit avant tout en fonction de l'actualité immédiate, de la conviction que la question sociale a elle aussi pris une nouvelle forme à la suite des événements actuels et qu'il est nécessaire de parler aujourd'hui de la question sociale d'une manière tout à fait différente de celle dont on parlait, de quelque côté que ce soit, de la question sociale avant la catastrophe de la guerre mondiale. Avec ce livre, on a en quelque sorte essayé, à ce moment de l'évolution de l'humanité où la question sociale devient particulièrement urgente et où tout homme qui vit consciemment aujourd'hui, qui ne vit pas la vie de l'humanité en somnolant et en dormant, devrait savoir quelque chose sur ce qui doit se passer dans le sens de ce qu'on appelle habituellement la question sociale. Il serait peut-être bon de jeter un petit coup d'œil en arrière aujourd'hui. J'aurai peut-être à mentionner des choses - mais nous les présenterons sous un jour un peu différent de celui dans lequel elles ont été présentées -, j'aurai à mentionner des choses que vous connaissez en partie.
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Vous savez probablement que ce qui est dit aujourd'hui sur la question sociale est dit depuis relativement longtemps. Et on cite aujourd'hui les noms de Proudhon, Fourier, Louis Blanc comme les premiers à avoir traité la question sociale jusqu'au milieu du XIXe siècle. Vous savez aussi que la manière dont cette question sociale a été traitée jusqu'au milieu du XIXe siècle est appelée par les représentants actuels, du moins par de nombreux représentants actuels de la question sociale, "l'ère des utopies sociales". Il est bon de préciser ce que l'on entend par là lorsque l'on dit qu'à son premier stade, la question sociale est apparue de telle sorte qu'elle vivait dans un "âge des utopies". Mais on ne peut pas parler de cette chose dans un sens absolu, on ne peut en fait parler qu'à partir des sentiments des représentants de la question sociale dans le présent. Ils ressentent les choses comme je veux les décrire maintenant. Ils sentent que toutes les questions sociales qui sont apparues à l'époque dont je veux parler en premier lieu étaient au stade de l'utopie. Et qu'est-ce que les gens entendent par là quand ils disent que la question sociale était alors au stade de l'utopie ? Ils entendent par là - on l'a déjà remarqué à l'époque ; Saint-Simon et Fourier l'ont bien remarqué - qu'il y a, même après la Révolution française, des humains d'une certaine minorité sociale qui sont en possession des moyens de production et aussi d'autres biens humains, et qu'il y a un grand nombre d'autres humains - c'est même la majorité - qui ne sont pas en possession de tels biens. Ces personnes ne peuvent travailler sur les moyens de production qu'en se mettant au service de ceux qui possèdent les moyens de production et aussi la terre - elles n'ont en fait rien d'autre qu'elles-mêmes et leur force de travail. On a noté que la vie de cette grande masse de l'humanité est une vie de détresse, en grande partie dans la pauvreté, par opposition à ceux qui sont en minorité ; et on a fait allusion à la situation de la minorité et à la situation de la majorité.
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Ceux qui ont écrit sur cette situation sociale de l'humanité, comme Saint-Simon et Fourier, mais aussi Proudhon, sont partis d'un certain postulat. Ils sont partis du principe qu'il était nécessaire d'attirer l'attention des humains sur ce point : Voyez, la grande masse vit dans la misère, dans l'absence de liberté, dans la dépendance économique, ce n'est pas une existence digne de l'humain pour la grande masse. Il faut changer cela. - Et on a alors imaginé toutes sortes de moyens par lesquels cette inégalité entre les humains pouvait être modifiée. Mais il y avait toujours une certaine condition préalable, et cette condition préalable était que l'on se disait : si l'on sait ce qui fonde l'inégalité et si l'on a des paroles suffisamment fortes, si l'on a une conscience morale suffisante pour attirer fortement l'attention sur le fait que la grande majorité des humains vit dans la dépendance économique et juridique et est pauvre, alors ce discours touchera les cœurs, les âmes de la minorité, des nantis, de la minorité la plus favorisée. Et c'est en faisant comprendre à cette minorité que les choses ne peuvent pas rester en l'état, qu'il faut apporter des changements, qu'il faut mettre en place un autre ordre social, qu'un autre ordre social sera instauré. La condition préalable était donc que les humains se laissent entraîner à faire quelque chose pour la libération de la grande masse de l'humanité à partir de l'élan de leur âme. Et on proposait alors ce qu'il fallait faire. Et on pensait que si la minorité, si les gens qui sont les dirigeants, les leaders, comprenaient que ce qu'on voulait faire était bien, alors il y aurait une amélioration générale de la situation de l'humanité.
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Beaucoup de choses extrêmement intelligentes ont été dites de ce côté-là, mais tout ce qui a été entrepris dans ce sens est aujourd'hui considéré comme utopique par la plupart des représentants de la question sociale. Cela signifie qu'aujourd'hui, on ne compte plus sur le fait qu'il suffise de dire : c'est ainsi qu'il faudrait organiser le monde, et l'inégalité économique, politique et juridique des humains cesserait. - Il ne sert à rien aujourd'hui d'en appeler à la compréhension, au discernement des humains qui sont favorisés, qui sont dans le privilège, qui sont en possession des moyens de production et autres. Si je dois exprimer ce qui a été perdu au cours de la deuxième moitié du XIXe siècle, je dois dire que l'on a perdu la foi en la compréhension et en la bonne volonté des humains. C'est pourquoi les représentants de la question sociale, dont je parle maintenant, se disent : on peut élaborer de beaux plans sur la manière d'aménager le monde des humains, mais il n'en résultera rien ; car on aura beau prêcher de beaux plans, on aura beau faire appel aux cœurs et aux âmes des minorités dirigeantes avec des paroles touchantes, il ne se passera rien. Tout cela, ce sont des idées sans valeur, et les idées sans valeur qui imaginent l'avenir sont en réalité, pour parler en termes populaires, des utopies. Il ne sert donc à rien, dit-on, d'imaginer quoi que ce soit dans l'avenir, car il n'y aura personne pour renoncer à ses intérêts, pour être saisi par sa conscience, par son sens moral, etc. - La foi dans la conscience et le discernement moral a justement été perdue dans les cercles les plus larges, notamment chez les représentants de la question sociale. On se dit que les humains n'agissent pas du tout en fonction de leur discernement lorsqu'ils prennent des mesures sociales ou lorsqu'ils mènent leur vie sociale, ils agissent en fonction de leur intérêt. Et les possédants ont bien entendu intérêt à rester dans leurs possessions. Les privilégiés sociaux ont intérêt à conserver leurs privilèges sociaux. C'est pourquoi il est illusoire de compter sur le fait qu'il suffit de dire aux gens de faire ceci ou cela. Ils ne le font pas, parce qu'ils n'agissent pas en fonction de leur compréhension, mais en fonction de leur intérêt.
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Au sens le plus large, on peut dire que Karl Marx a peu à peu - mais vraiment peu à peu - adhéré à cette vue. On peut décrire toute une série d'époques dans la vie de Karl Marx. Dans sa jeunesse, Marx était aussi un penseur idéaliste et il pensait encore, dans le sens que je viens de caractériser, à la faisabilité des utopies. Mais c'est justement lui, et après lui son ami Engels, qui s'est écarté de la manière la plus radicale de ce calcul sur le discernement des humains. Et si je caractérise en général ce qui est en fait une grande histoire, je peux dire ceci : Karl Marx est finalement parvenu à la conviction que les choses ne pouvaient pas s'améliorer dans le monde d'une autre manière qu'en faisant appel aux humains qui n'ont pas intérêt à ce que leurs biens, leurs privilèges leur soient conservés. Ceux qui ont intérêt à ce que leurs biens soient préservés, ceux-là, on ne peut absolument pas les voir, on doit les laisser complètement de côté, car ils ne se laisseront jamais aller à faire quoi que ce soit, même si on leur fait de beaux sermons. En revanche, il y a justement la grande masse des ouvriers prolétaires [qui n'ont rien à perdre en termes de biens]. Karl Marx lui-même a vécu dans cette conviction à l'époque où ce que l'on appelle aujourd'hui le prolétariat était en train de naître en Europe centrale ; il a vu le prolétariat naître en Europe centrale à partir d'autres conditions économiques. Plus tard, lorsqu'il vivait en Angleterre, c'était un peu différent. Mais à l'époque où Karl Marx est passé de l'idéaliste au matérialiste économique, c'était encore comme si le prolétariat moderne était en train d'émerger en Europe centrale. Et maintenant, il se disait : ce prolétariat moderne a des intérêts tout à fait différents de ceux de la minorité dirigeante, car il se compose d'humains qui ne possèdent rien d'autre que leur force de travail, d'humains qui ne peuvent pas vivre autrement qu'en mettant leur force de travail au service des possédants, notamment au service des possesseurs des moyens de production. Lorsque ces travailleurs quittent leur travail, ils sont - c'était particulièrement vrai à l'époque, de la manière la plus radicale - jetés à la rue. Ils n'ont rien d'autre devant eux que la possibilité d'un front pour ceux qui sont les propriétaires des moyens de production. Ces gens ont un tout autre intérêt que ceux qui possèdent. Ils ont intérêt à ce que tout l'ordre social antérieur prenne fin, à ce que cet ordre social soit transformé. Il n'est pas nécessaire de leur prêcher de manière à ce qu'ils comprennent, mais seulement de manière à ce que leur égoïsme et leur intérêt soient saisis. On peut compter sur cela. Prêcher à ceux sur le discernement desquels on doit compter ne donne aucun résultat, car les humains n'agissent pas par discernement, ils n'agissent que par intérêt. Donc, on ne peut pas s'adresser à ceux chez qui on devrait faire appel au discernement, mais on doit faire appel aux intérêts de ceux qui ne peuvent pas faire autrement que de s'engager pour les temps modernes par contrainte intérieure. C'est l'égoïsme vers lequel Karl Marx a évolué. C'est pourquoi il n'a plus cru que le progrès de l'humanité vers des conditions sociales plus récentes pouvait provenir d'une autre œuvre humaine que celle du prolétariat lui-même. Selon Karl Marx, le prolétariat ne peut aspirer à un renouvellement des conditions sociales humaines qu'à partir de ses propres intérêts, de ses intérêts individuels et égoïstes. Et c'est ainsi que le prolétariat, non pas par philanthropie, mais par intérêt égoïste, libérera tout le reste de l'humanité, parce qu'il ne peut y avoir rien d'autre que ce qu'accomplissent les humains qui ne sont pas attachés aux vieux biens et qui n'ont rien à perdre des vieux biens en cas de transformation.
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On se dit donc : d'un côté, il y a les cercles dirigeants, leaders, qui ont certains droits qui leur ont été conférés dans le passé ou qui leur ont été imposés dans le passé, qui se sont transmis par héritage dans leurs familles, et ils s'y accrochent. Ces cercles dirigeants sont en possession de ceci ou de cela, qu'ils transmettent à leur tour au sein de leur cercle, de leur famille et ainsi de suite. Ces cercles ont toujours quelque chose à perdre lors d'une transformation, car bien sûr, s'ils ne perdaient rien, aucune transformation n'aurait lieu. Il s'agit en effet que ceux qui n'ont rien reçoivent quelque chose, donc ceux qui ont quelque chose ne peuvent que perdre. On ne pourrait donc faire appel au discernement que si ce discernement donnait à la classe dirigeante possédante l'impulsion de vouloir perdre quelque chose. Ils n'acceptent pas cela. - C'était le point de vue de Karl Marx. Il faut donc faire appel à ceux qui n'ont rien à perdre. C'est pourquoi le "Manifeste communiste" de 1848 se termine par ces mots : "Les prolétaires n'ont rien à perdre que leurs chaînes, mais ils ont tout à gagner. Prolétaires de tous les pays, unissez-vous !".
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 Eh bien, vous voyez, c'est devenu en quelque sorte une conviction depuis la publication du Manifeste communiste. Et aujourd'hui, alors que certains sentiments, déjà sous l'influence de cette conception, vivent justement dans la majorité du prolétariat, on ne peut plus vraiment s'imaginer quel énorme bouleversement s'est opéré dans la conception socialiste vers le milieu du XIXe siècle. Mais il serait bon que vous preniez quelque chose comme l'"Évangile d'un pauvre pécheur" de Weitling, un compagnon tailleur, qui a été écrit pas si longtemps avant le Manifeste communiste, et que vous le compariez à tout ce qui a été écrit après la parution du Manifeste communiste. Dans cet "Évangile d'un pauvre pécheur", vraiment empreint d'une authentique sensibilité prolétarienne, règne un langage ardent, on peut même dire poétique dans un certain sens, mais un langage qui veut absolument faire appel à la bonne volonté, au discernement des humains. C'est la conviction de Weitling que l'on peut faire quelque chose avec la bonne volonté des humains. Et cette conviction ne s'est affaiblie que vers le milieu du XIXe siècle. Et l'acte par lequel elle s'est affaiblie est justement la publication du Manifeste communiste. Et depuis cette époque, depuis 1848, nous pouvons en fait suivre ce que nous appelons aujourd'hui la question sociale. Car si nous voulions parler aujourd'hui comme Saint-Simon, comme Fourier, comme Weitling, oui, nous prêcherions aujourd'hui vraiment la sourde oreille. Car jusqu'à un certain point, il est tout à fait exact que l'on ne peut rien entreprendre dans la question sociale si l'on fait appel à la compréhension des cercles dirigeants, leaders, qui ont quelque chose. C'est tout à fait vrai. Ils ne le savent même pas s'ils le font, car des forces inconscientes jouent un rôle extrêmement important dans l'âme humaine.
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Vous voyez, au cours du XIXe siècle, notre culture spirituelle est presque entièrement devenue une phrase. Et le fait que nous vivions dans la phrase en ce qui concerne la culture spirituelle est un fait social beaucoup plus important qu'on ne le pense habituellement. Et donc, naturellement, les membres des cercles dirigeants, des cercles de direction, disent aussi toutes sortes de belles choses sur la question sociale, et ils sont eux-mêmes souvent convaincus qu'ils ont déjà la bonne volonté. Mais en réalité, ils ne font que le croire, ce n'est qu'une illusion ; dès que quelque chose de réel est entrepris dans ce domaine, il apparaît immédiatement qu'il s'agit d'une illusion. Nous en parlerons plus tard. Mais comme je l'ai dit, nous ne pouvons plus parler aujourd'hui comme nous le faisions à l'époque des utopies. C'est la véritable conquête de Karl Marx, qui a montré comment l'humanité est aujourd'hui tellement empêtrée dans l'illusionnisme que c'est un non-sens de compter sur autre chose que l'égoïsme. Il faut compter avec cela ; on ne peut donc rien obtenir si l'on veut compter d'une manière ou d'une autre sur l'altruisme, sur la bonne volonté, sur les principes moraux des humains - je dis toujours "en ce qui concerne la question sociale". Et ce revirement, qui nous a conduits à devoir parler aujourd'hui d'une toute autre manière que l'on pouvait par exemple encore parler de la question sociale dans la première moitié du XIXe siècle, ce revirement est justement arrivé avec le Manifeste communiste. Mais tout n'est pas arrivé d'un seul coup, mais il était tout de même possible qu'après le Manifeste communiste, jusque dans les années soixante, comme vous le savez tous - certains jeunes socialistes ont déjà oublié cette époque -, cette toute autre forme de pensée sociale, la forme de Ferdinand Lassalle, ait touché les cœurs et les âmes. Et même après la mort de Lassalle, survenue en 1864, ce qui était le socialisme de Lassalle s'est poursuivi. Lassalle fait partie de ces gens qui, malgré l'avènement d'un autre mode de pensée, comptaient encore sur la force de frappe des idées. Lassalle voulait encore saisir les humains en tant que tels dans leur compréhension, dans leur volonté sociale avant tout. Mais de plus en plus, cette nuance lassallienne diminuait et l'autre nuance, la nuance marxiste, qui ne voulait compter que sur les intérêts de cette partie de la population humaine qui ne possédait qu'elle-même et sa force de travail, prenait le dessus. Mais ce n'était pas si rapide. Une telle façon de penser ne s'est développée que peu à peu dans l'humanité.
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Dans les années soixante, soixante-dix, et même encore dans les années quatre-vingt, les gens qui appartenaient au prolétariat ou qui faisaient partie des gens politiquement ou socialement dépendants - même s'ils n'étaient pas exactement des prolétaires - jugeaient en quelque sorte moralement leur dépendance et condamnaient moralement les milieux non dépendants de la population humaine. Selon leur conscience, c'était de la mauvaise volonté de la part des cercles dirigeants, leaders, de la population humaine, qu'ils laissent la grande masse du prolétariat dans la dépendance, qu'ils la payent mal, etc. Si je peux m'exprimer trivialement, je peux dire que dans les années soixante, soixante-dix, jusque dans les années quatre-vingt, on fabriquait beaucoup d'indignation sociale et on parlait du point de vue de l'indignation sociale. Puis, au milieu des années quatre-vingt, l'étrange revirement s'est vraiment produit. Les personnalités les plus en vue du mouvement social ont alors complètement cessé de parler de la question sociale sur la base de l'indignation morale dans les années 80. C'était l'époque où les leaders sociaux, que vous, les plus jeunes, avez seulement vus mourir, étaient grands et plus ou moins encore animés par l'ardeur de leur jeunesse : Adler, Pernerstorfer, Wilhelm Liebknecht, Auer, Bebel, Singer et ainsi de suite. Ces dirigeants plus âgés ont justement cessé de plus en plus de prêcher ce socialisme d'indignation à l'époque, dans les années 80. Je voudrais dire que ces dirigeants du socialisme ont exprimé leur conviction intime lorsqu'ils ont transposé l'ancien socialisme d'indignation dans leur nouvelle vision socialiste du monde. Vous trouverez que ce que je vous dis maintenant ne figure dans aucun livre sur l'histoire du socialisme. Mais ceux qui ont vécu à l'époque et qui ont participé à cela savent que les gens, lorsqu'ils étaient livrés à eux-mêmes, parlaient ainsi.
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Supposons que dans les années quatre-vingt, des dirigeants du socialisme se soient réunis pour discuter avec des bourgeois [purs] dans leurs convictions, et supposons qu'il y ait eu une troisième sorte : des bourgeois idéalistes qui voulaient du bien à tous les humains, qui auraient été d'accord pour rendre tous les humains heureux. Il aurait pu arriver que les bourgeois déclarent qu'il faut toujours qu'il y ait des gens pauvres et des gens riches, et ainsi de suite, car c'est la seule façon de maintenir la société humaine. Alors peut-être que la voix de l'un de ces idéalistes qui s'indignaient de voir tant de gens vivre dans la pauvreté et la dépendance se serait élevée. Un tel humain aurait peut-être dit : "Oui, il faut y parvenir, il faut faire comprendre à ces gens qui possèdent, aux entrepreneurs, aux capitalistes, qu'ils doivent renoncer à leurs biens, qu'ils doivent prendre des mesures qui permettront à la grande masse de changer de situation, et ainsi de suite. - De très beaux discours auraient pu être prononcés sur cette base. Mais alors, quelqu'un qui, à l'époque, venait de s'initier au socialisme et à son évolution, aurait élevé la voix et dit : "Qu'est-ce que vous racontez, vous êtes un enfant ; tout cela n'est qu'enfantillages, absurdités ! Les gens qui sont des capitalistes, des entrepreneurs, ce sont tous de pauvres sbires, ils ne savent rien d'autre que ce qu'on leur a inculqué depuis des générations. S'ils entendaient dire qu'ils devraient faire autrement, ils ne pourraient même pas le faire, car ils ne sauraient pas comment s'y prendre. Cela ne rentre pas du tout dans leur crâne que l'on puisse faire quelque chose différemment. Il ne faut pas accuser les gens, il ne faut pas condamner moralement les gens, ils ne sont pas du tout à condamner moralement ; les gars ont grandi dans ce milieu, ces pauvres sbires, dans tout ce milieu, et ça les inspire avec les idées qu'ils ont. Les accuser moralement, c'est ne rien comprendre aux lois de l'évolution de l'humanité, c'est se bercer d'illusions. Ces humains ne peuvent jamais vouloir que le monde prenne une autre forme. Parler d'eux avec indignation, c'est de l'enfantillage pur et simple. Tout cela est devenu ainsi par nécessité, et cela ne peut devenir différent que par nécessité. Vous voyez, on ne peut rien faire avec ces gars qui croient pouvoir prêcher aux possédants, aux capitalistes, qu'il faut instaurer un nouvel ordre mondial, on ne peut rien faire avec ces gars ; on ne peut pas instaurer un nouvel ordre mondial avec eux ; ils ne font que s'adonner à la croyance que l'on peut accuser ces pauvres sbires de capitalistes de faire un autre monde. - Je dois dire les choses un peu clairement, c'est pourquoi certaines choses sont dites avec des contours nets, mais de telle manière que vous avez pu entendre partout les discours dont je parle. Quand on les écrivait, on les retouchait un peu, on les écrivait un peu différemment, mais c'était la base. Puis ils ont continué à parler : avec ces gars - ce sont des idéalistes, ils se représentent le monde en termes d'idéologie -, on ne peut rien faire avec eux. Nous devons compter sur ceux qui n'ont rien, qui veulent donc quelque chose de différent de leurs intérêts que ceux liés aux intérêts capitalistes. Et ceux-là n'aspireront pas non plus à un changement de situation en vertu d'un quelconque principe moral, mais uniquement par convoitise, pour avoir plus que ce qu'ils avaient jusqu'à présent, pour avoir une existence indépendante.
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Cette manière de penser est apparue de plus en plus dans les années quatre-vingt, de ne plus concevoir l'évolution de l'humanité dans le sens où l'individu est particulièrement responsable de ce qu'il fait, mais qu'il fait ce qu'il doit faire en raison de la situation économique. Le capitaliste, l'entrepreneur, écrase les autres dans la plus grande innocence. Celui qui est prolétaire, non pas en vertu d'un principe moral, mais en toute innocence, en raison d'une nécessité humaine, va révolutionner et prendre les moyens de production, le capital, des mains de ceux qui justement le possèdent. Cela doit se dérouler comme une nécessité historique. - Cette façon de penser monta.
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Eh bien, voyez-vous, ce n'est qu'en 1891, au congrès d'Erfurt, que tout le lassallianisme, qui était encore basé sur la compréhension des humains, s'est transformé en croyance dans le soi-disant "programme d'Erfurt", qui était destiné à faire du marxisme la vision officielle du prolétariat. Si vous lisez les programmes des congrès de Gotha et d'Eisenach, vous y trouverez deux revendications authentiquement prolétariennes de l'époque, qui sont encore liées au lassallianisme. La première revendication était l'abolition du rapport salarial ; la deuxième revendication était l'égalité politique de tous les humains, l'abolition de tous les privilèges politiques. Toutes les revendications prolétariennes jusqu'aux années 1990, jusqu'au congrès d'Erfurt qui a apporté le grand changement, sont parties de ces deux revendications. Regardez une fois ces deux revendications exactement et comparez-les avec les principales revendications du congrès d'Erfurt. Quelles sont les principales revendications du congrès d'Erfurt ? Ce sont les suivantes : Transfert de la propriété privée des moyens de production à la propriété commune ; gestion de toute la production de biens, de toute la production par une sorte de grande coopérative, en laquelle l'État actuel doit se transformer. Comparez l'ancien programme, qui était le programme prolétarien des années quatre-vingt, avec celui qui est issu du programme du parti d'Erfurt et qui existe depuis les années quatre-vingt-dix. Vous verrez que dans l'ancien programme de Gotha et d'Eisenach, les exigences du socialisme sont encore des exigences purement humaines : égalité politique de tous les humains, abolition du rapport salarial dégradant. Au début des années quatre-vingt-dix, ce que je vous ai décrit comme l'état d'esprit qui s'est développé au cours des années quatre-vingt a déjà agi. Ce qui était encore une exigence de l'humanité s'est transformé en une exigence purement économique. Vous ne lisez plus rien sur l'idéal d'abolir le rapport salarial, vous ne lisez que des revendications économiques.
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Eh bien, vous voyez, ces choses sont liées à la formation progressive de l'idée que l'on avait de la réalisation extérieure d'un meilleur état social de l'humanité. Il a souvent été dit par ces gens qui avaient encore des idéaux : ah, quel dommage cela fait-il de tout casser, il faut bien qu'un autre ordre se mette en place ; il faut donc qu'il y ait une révolution, il faut que tout soit cassé, il faut qu'il y ait une grande claque, car c'est seulement de là que peut naître un meilleur ordre social. - C'est ce que disaient encore certaines personnes dans les années 80, qui étaient de bons socialistes idéalistes. On leur répondait par d'autres, ceux qui étaient à la hauteur, qui étaient devenus les leaders - ceux qui, comme je l'ai dit, sont maintenant enterrés -, qui disaient : tout cela n'a pas de sens, des révolutions aussi soudaines n'ont aucun sens. La seule chose qui ait un sens, c'est que nous abandonnions le capitalisme à lui-même. Nous voyons bien qu'auparavant, il n'y avait que de petits capitalistes, puis ils sont devenus grands ; ils se sont associés à d'autres, sont devenus des groupes de capitalistes. Les capitaux se sont de plus en plus concentrés. C'est dans ce processus que nous nous trouvons, à savoir que les capitaux sont de plus en plus concentrés. Le temps viendra où il n'y aura plus que quelques grands trusts et consortiums capitalistes. Il sera alors nécessaire que le prolétariat, en tant que classe non possédante, transmette un beau jour, de manière tout à fait pacifique, par voie parlementaire, la propriété capitaliste, les moyens de production, à la propriété commune. Cela peut être très bien fait, mais il faut attendre. D'ici là, les choses doivent évoluer. Le capitalisme, qui est en fait un enfant innocent, n'y peut rien s'il est inhumain - c'est la nécessité historique qui l'impose. Mais il travaille aussi à l'avance, car il concentre les capitaux ; ils sont alors bien groupés, il suffit qu'ils soient repris par la collectivité. Il ne s'agit pas d'une révolution rapide, mais d'une évolution lente.
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Vous voyez, le secret de la vision, le secret public de la vision, qui est à la base de tout cela, a été joliment expliqué par Engels dans les années 90. Il a dit : "Pourquoi des révolutions rapides ? Ce qui se passe lentement dans le développement du nouveau capitalisme, ce regroupement des capitaux, cette concentration des capitaux, tout cela travaille pour nous. Nous n'avons pas besoin de créer une communauté, les capitalistes le font déjà. Nous n'avons qu'à le transformer en propriété prolétarienne. C'est pourquoi - dit Engels - les rôles se sont en fait inversés. Nous, qui représentons le prolétariat, n'avons pas à nous plaindre de l'évolution, ce sont les autres qui doivent se plaindre. Car les gars qui sont aujourd'hui dans les cercles des possédants doivent se dire : nous accumulons les capitaux, mais nous les accumulons pour les autres. Voyez, ces types doivent en fait s'inquiéter de perdre leurs capitaux ; ils ont les joues creuses, ils se dessèchent à force de se demander ce qui va se passer. En tant que socialistes, nous nous épanouissons très bien dans cette évolution. Engels dit que nous avons les muscles saillants et les joues pleines et que nous ressemblons à la vie éternelle. - C'est ce que dit Engels dans une introduction qu'il a écrite dans les années 1990, en décrivant comment ce qui se développe est tout à fait juste, et comment il suffit d'attendre le développement, qui est en fait assuré par le capitalisme lui-même. Cette évolution débouche ensuite sur le transfert de ce que le capitalisme a d'abord concentré dans la propriété commune de ceux qui n'avaient rien jusqu'alors. - C'était en fait l'état d'esprit dans lequel les cercles dirigeants du prolétariat sont entrés au XXe siècle.
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Et c'est ainsi qu'on a pensé, surtout depuis l'époque où le marxisme n'a plus été pris comme dans les années 1990, mais où il a été soumis à une révision, comme on disait, à l'époque où sont apparus les révisionnistes, c'est-à-dire ceux qui sont encore vivants aujourd'hui, mais qui sont des vieux, comme Bernstein par exemple. C'est donc là que les révisionnistes sont arrivés. Ils disaient qu'il était possible d'encourager un peu toute l'évolution, car si les travailleurs se contentent de travailler jusqu'à ce que les capitalistes aient tout rassemblé, ils seront encore dans le besoin avant, notamment lorsqu'ils seront âgés, ils n'auront rien. On a donc créé des assurances et ainsi de suite ; et surtout, on a veillé à s'approprier ce que les classes dirigeantes avaient comme institutions dans la vie politique. Vous savez, c'est à cette époque qu'est née la vie syndicale.
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Et à l'intérieur du parti socialiste, il y avait deux tendances fortement divergentes : le parti syndical et le parti politique proprement dit, comme on disait alors. Le parti politique se tenait plus sur le terrain, une révolution soudaine ne servirait à rien, l'évolution devait se dérouler comme je viens de le décrire. Il s'agissait donc de tout préparer pour le moment où le capitalisme serait suffisamment concentré et où le prolétariat aurait la majorité dans les parlements. Tout doit être poursuivi par la voie du parlementarisme, de l'appropriation de la majorité, afin qu'au moment où les moyens de production seront transférés à la propriété commune, il y ait aussi la majorité pour ce transfert. C'est notamment dans ce groupe de personnes qui pensaient tout du parti politique que l'on ne pensait pas beaucoup au mouvement syndical à la fin du XIXe siècle. À cette époque, celui-ci s'efforçait justement d'instaurer une sorte de compétition ordonnée entre lui et les entrepreneurs, afin d'obtenir de temps en temps des entreprises des augmentations de salaire et des choses similaires. Bref, on s'est arrangé pour imiter le système de négociations réciproques qui existait entre les milieux dirigeants, entre les dirigeants eux-mêmes, et on l'a étendu aux relations entre les milieux dirigeants et le prolétariat. Vous savez que les représentants du système socialiste proprement politique ont particulièrement accusé ceux qui sont devenus les plus bourgeois du mouvement syndical. Et à la fin des années quatre-vingt-dix et au début du XXe siècle, on pouvait voir partout, chez ceux qui étaient plus orientés vers le système politique, un grand mépris pour les gens qui s'étaient entièrement plongés dans la vie syndicale, notamment les typographes, qui avaient à leur tour développé un tout autre système de vie syndical, jusqu'à l'extrême.
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Il s'agissait de deux tendances très distinctes dans la vie sociale : les syndicalistes et ceux qui penchaient plutôt vers le parti politique. Et au sein des syndicats, les typographes de l'association des typographes étaient justement les garçons modèles ; ils étaient les garçons modèles qui avaient acquis la pleine reconnaissance des cercles bourgeois. Et je crois que, de même que l'on a eu une certaine crainte, une certaine inquiétude à l'égard du parti politique socialiste, on a vu peu à peu émerger avec une grande satisfaction des gens aussi braves que les gens de l'association des typographes. On se disait à leur sujet : ils s'embourgeoisent, on peut toujours négocier avec eux, ça se passe très bien. S'ils s'en prennent à leurs salaires, nous nous en prenons à nos prix, que nous exigeons. Ça marche. - Et, n'est-ce pas, c'était aussi possible pour les années suivantes, et les gens ne pensent pas plus loin. On était donc très satisfait de cette formation exemplaire du développement syndical. Eh bien, si j'omets quelques nuances, on peut dire que ces deux directions se sont plus ou moins développées jusqu'à l'époque où la catastrophe de la guerre mondiale les a surpris. Mais malheureusement, les gens n'ont pas appris de cette catastrophe mondiale tout ce qui aurait dû être appris en ce qui concerne la question sociale.
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N'est-ce pas, si l'on considère les rapports à l'est de l'Europe, en Europe centrale, si l'on fait abstraction du monde anglo-américain et en partie du monde roman, si l'on se limite donc à l'Europe centrale et orientale, on peut dire qu'il n'y a rien de juste dans cette histoire, que l'on a toujours définie ainsi : Les capitaux se concentrent et, lorsque l'on aura la majorité dans les parlements, les capitaux seront transférés à la communauté, et ainsi de suite. - La catastrophe de la guerre mondiale a fait en sorte que l'on ne puisse pas s'y attendre aussi facilement aujourd'hui. Ceux qui s'attendaient à une révolution quelconque ont souvent été considérés comme des enfants, mais au fond, que s'est-il passé au cours des quatre ou cinq dernières années ? Gardons à l'esprit ce qui s'est passé de manière claire et nette. N'est-ce pas, vous l'avez souvent entendu, ce qui s'est passé au cours des quatre ou cinq dernières années : en juillet 1914, les gouvernements sont devenus un peu "tordus" - ou très "tordus" - et ont poussé les gens à la guerre mondiale. Les gens ont cru qu'il y avait une guerre mondiale, que des batailles avaient eu lieu - mais avec les moyens de guerre modernes, avec les moyens mécaniques, il y avait quelque chose de tout à fait différent que dans les guerres précédentes. Il n'y avait plus aucune possibilité que quelqu'un devienne un général particulièrement célèbre, car tout dépendait finalement de la quantité de munitions et d'autres moyens de guerre dont disposait l'un des deux partis, si l'un fabriquait mieux que l'autre les moyens de guerre mécaniques ou avait découvert un gaz et d'autres choses de ce genre que les autres n'avaient pas. D'abord l'un gagnait, puis l'autre découvrait à nouveau quelque chose, puis le premier à nouveau ; tout cela était une guerre terriblement mécanique. Et tout ce qui a été dit sur ce qui s'est passé ici et là de la part des humains, c'était sous l'influence de la phrase, c'était tout à fait de la phrase. Et peu à peu, l'humanité moderne comprendra, même en Europe centrale, tout ce qu'il y a eu comme phrases dans le fait que l'un ou l'autre, qui n'était en fait rien d'autre qu'un soldat moyen un peu tordu, a été transformé en un grand général en Europe centrale. Ces choses n'ont été possibles que sous l'influence de la phrase. Eh bien, c'est ce qui s'est passé.
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Mais que s'est-il passé en réalité ? Les gens ne l'ont pas remarqué à cause des événements extérieurs. Alors que les gens croyaient qu'une guerre mondiale avait été menée - qui n'était en fait qu'un masque -, une révolution s'est en réalité produite. En réalité, une révolution s'est produite pendant ces quatre ou cinq ans. Mais les gens ne le savent pas encore aujourd'hui, ils n'y prêtent pas attention. La guerre est l'extérieur, le masque ; la vérité, c'est que la révolution a eu lieu. Et parce que la révolution a eu lieu, la société d'Europe centrale et orientale se trouve aujourd'hui dans un tout autre état, et on ne peut rien faire de ce que les gens avaient envisagé pour les situations antérieures. Aujourd'hui, il est nécessaire de réorganiser toutes les idées que l'on se faisait auparavant, de penser les choses de manière totalement nouvelle. C'est ce qu'a tenté de faire le livre "Les points essentiels de la question sociale" : tenir compte de la situation dans laquelle les événements récents nous ont placés. Il n'est donc pas étonnant que les membres des partis socialistes, qui ne peuvent pas suivre le mouvement assez rapidement, se méprennent sur ce livre. Si les gens acceptaient une seule fois d'examiner leurs propres pensées - d'examiner un peu ce qu'ils disent vouloir -, ils verraient à quel point ils vivent sous l'influence des idées qu'ils se sont faites jusqu'en 1914. C'est la vieille habitude.
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N'est-ce pas, ces idées que l'on a eues jusqu'en 1914, elles se sont tellement incrustées dans l'environnement des humains qu'elles ne peuvent plus en sortir maintenant. Et quelle est la conséquence ? La conséquence, c'est que malgré la nécessité d'une nouvelle action aujourd'hui, malgré la révolution qui s'est produite en Europe centrale et orientale, malgré la nécessité de construire aujourd'hui - non pas selon les anciennes idées, mais selon les nouvelles idées -, malgré tout cela, les gens prêchent les anciennes idées. Et que sont aujourd'hui les partis, y compris les partis socialistes ? Les partis socialistes sont ceux qui continuent à prêcher aujourd'hui tel ou tel évangile socialiste, à l'ancienne manière, comme ils l'ont fait jusqu'en juillet 1914, car il n'y a pas de différence dans ces programmes de parti par rapport aux anciens - tout au plus la différence qui vient de l'extérieur. Pour celui qui connaît les choses, il y a terriblement peu de nouveautés, voire rien de nouveau, dans les différents groupes de partis. Les vieilles idées sont toujours véhiculées aujourd'hui. Maintenant oui, il y a une petite différence : si l'on a un chaudron en cuivre et que l'on tape dessus, cela sonne ; si l'on tape de la même manière sur un tonneau en bois, cela sonne différemment ; mais le coup peut être tout à fait le même. Cela dépend alors de ce sur quoi on tape, si cela sonne différemment. Et c'est ce qui se passe aujourd'hui lorsque les gens se mettent à parler de leurs programmes de parti. Ce qui est contenu dans ces anciens programmes de parti, c'est en fait le vieux garde-fou du parti ; c'est seulement parce qu'il y a maintenant d'autres conditions sociales que cela sonne aujourd'hui un peu différemment, comme cela sonne différemment dans une chaudière en cuivre ou dans un tonneau en bois. Lorsque les socialistes indépendants, les socialistes majoritaires ou les communistes parlent, ils prononcent de vieilles phrases de parti, et cela sonne différemment parce qu'il n'y a pas un chaudron en cuivre, mais un tonneau en bois. En vérité, on n'a rien appris du tout, du tout, du tout, de bien des côtés. Mais ce qui compte, c'est qu'on apprenne quelque chose, que cette terrible guerre mondiale, comme on l'appelle, mais qui était en fait une révolution mondiale, nous dise quelque chose.
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Et là, on peut vraiment dire que dans les masses les plus larges, on est préparé à entendre quelque chose de nouveau. Mais dans les grandes masses, on écoute ce que disent les dirigeants. Il y a une bonne compréhension, un bon sens chez les masses populaires non éduquées, et on a toujours pu compter sur la compréhension lorsqu'on propose quelque chose de vraiment moderne, quelque chose qui peut être qualifié de moderne dans le meilleur sens du terme. Cela s'explique en partie par le fait que les masses ne sont pas éduquées. Mais dès que les gens entrent dans le type d'éducation que l'on peut avoir depuis les trois ou quatre derniers siècles, cette caractéristique d'inculture disparaît. Si l'on considère l'enseignement bourgeois actuel, de l'école primaire jusqu'à l'université - et ce sera encore pire lorsque l'école unique socialiste sera fondée, car tout ce que l'école primaire bourgeoise a fait de mal y sera présent dans la plus grande mesure -, on voit bien que l'enseignement bourgeois n'a pas de sens : ce qui se fait dans les écoles forme les esprits et les rend étrangers à la vie. Il faut sortir de tout cela, il faut vraiment se mettre sur ses propres jambes dans la vie spirituelle si l'on veut sortir de cette méformation. Mais, voyez-vous, c'est grâce à cette méformation que les dirigeants prolétariens, grands et petits, sont devenus ainsi. Ils ont dû s'approprier cette formation ; cette formation se trouve dans nos écoles et dans les écrits populaires, elle se trouve partout. Et c'est là que l'on commence à avoir le cerveau desséché et que l'on n'est plus accessible aux faits, mais que l'on s'arrête aux programmes de parti et aux opinions que l'on a greffés et martelés. Même la révolution mondiale peut alors arriver, on continue à siffler les vieux programmes.
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Vous voyez, c'est essentiellement ce sort qui a été réservé à ce qui a été voulu dans de nombreuses directions avec ce livre "Les points essentiels de la question sociale" et les conférences. On y a vraiment tenu compte de ce dont le prolétariat a absolument besoin aujourd'hui, de ce qui est nécessaire compte tenu de la situation actuelle. On l'a compris au début [dans le prolétariat], mais ensuite ceux qui sont les dirigeants du prolétariat dans les différents groupes de partis ne l'ont pas compris. Cela dit, je ne veux pas être trop injuste et je ne veux pas presser la vérité ; je ne veux pas affirmer que ces dirigeants, par exemple, ne comprennent pas ce livre, car je ne peux pas supposer qu'ils l'ont lu, qu'ils le connaissent. Je n'affirmerais pas quelque chose de juste si je disais : ils ne peuvent pas comprendre ce livre. Mais ils ne peuvent absolument pas se décider à comprendre que quelque chose d'autre soit nécessaire que ce qu'ils pensent depuis des décennies. Leur cerveau est devenu trop sec, trop rigide pour cela. Et c'est pourquoi ils s'en tiennent à ce qu'ils ont pensé depuis longtemps et trouvent que ce qui est le contraire de toute utopie, c'est une utopie. Car, voyez-vous, le livre "Les points essentiels" tient pleinement compte du fait qu'on ne peut plus aujourd'hui se mouvoir dans des utopies dans le sens des Saint-Simon, Fourier, Proudhon et ainsi de suite, mais aussi du fait qu'on ne peut plus jamais se placer du point de vue : L'évolution se fera d'elle-même. Car ce que Marx et Engels ont vu, ce qui s'est développé [à leur époque], ce dont ils ont tiré leurs conclusions, on ne peut plus en tirer de conclusions aujourd'hui, car la guerre mondiale l'a balayé, il n'est plus là sous sa forme véritable. Celui qui dit aujourd'hui la même chose que Marx et Engels, dit quelque chose que Marx n'aurait jamais dit. Il a eu peur de ses partisans, car il a dit : en ce qui me concerne, je ne suis pas marxiste. - Et aujourd'hui, il dirait : à l'époque, les faits étaient encore différents ; à l'époque, je tirais mes conclusions de faits qui n'avaient pas encore été modifiés, changés, comme la guerre mondiale a tout changé par la suite.
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Mais, voyez-vous, ces humains qui ne peuvent rien apprendre des événements, qui ont aujourd'hui la même attitude que les anciens catholiques vis-à-vis de leurs évêques et de leurs papes, ne peuvent même pas imaginer qu'une chose telle que le marxisme doit être développée dans le sens des faits. C'est ce que font les socialistes, mais aussi les bourgeois. Les cercles les plus larges le font ainsi. Les bourgeois le font naturellement de manière somnolente, l'âme complètement endormie, les autres le font de telle sorte qu'ils se trouvent au milieu et voient l'effondrement, mais qu'ils ne veulent pas s'attendre aux faits qui se révèlent ainsi. Aujourd'hui, nous avons justement besoin que quelque chose de nouveau arrive parmi les humains. Et c'est pourquoi il est nécessaire de comprendre quelque chose [comme la triarticulation] qui n'est pas une utopie, mais qui compte justement avec les faits. Si, de ce côté, on appelle ce qui compte ainsi avec les faits, l'ergotage, on pourrait en fait être tout à fait satisfait. Car si les gens appellent ce qu'ils font avancer une ligne droite, alors il faut, pour faire quelque chose de raisonnable, tirer dans le sens du poil, pour amener ce qui est déraisonnable dans une autre direction, raisonnable. Mais vous voyez, ceux qui comprennent encore ce qui est raisonnable devraient approfondir ce qui est présenté ici. Et c'est à cela que peuvent servir ces soirées.
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Non, il y a longtemps que l'on a essayé de mettre en pratique ce que l'on a tiré des faits. Et c'est ainsi que nous nous sommes réunis depuis des semaines - je n'ai pas besoin de répéter toutes ces choses, vous pouvez encore poser des questions ou discuter des pour et des contre à l'issue de cet exposé -, nous nous sommes réunis depuis des semaines pour mettre sur pied ce que nous appelons le corps des conseils d'entreprise. Nous avons essayé de créer ces conseils d'entreprise à partir des faits actuels nécessaires, de les créer vraiment de telle sorte qu'ils viennent de la simple vie de l'économie, qu'ils ne viennent pas de la vie politique, qui ne peut pas constituer la base de la vie de l'économie. Car si l'on regarde les faits en face aujourd'hui, il faut se tenir strictement sur le terrain de l'organisme social triarticulé. Et celui qui ne veut pas de cette triarticulation aujourd'hui va à l'encontre de la nécessité historique de l'évolution de l'humanité. Aujourd'hui, il doit en être ainsi, comme je l'ai souvent expliqué : que la vie spirituelle soit placée sur elle-même, que la vie économique soit placée sur elle-même, que la vie de droit ou politique soit administrée démocratiquement. Et dans la vie économique, le premier pas vers un façonnement réellement social doit être fait avec les conseils d'entreprise. Mais comment cela peut-il se faire ? Uniquement en posant d'abord la question : maintenant oui, il y a l'impulsion de l'organisme social triarticulé, c'est nouveau par rapport à toutes les anciennes momies de parti ; y a-t-il quelque chose d'autre de nouveau ? Les imbéciles prétendent aujourd'hui que les idées ne font que tourbillonner dans l'air. Si l'on écoute les discussions, elles apportent toutes sortes de choses négatives, mais elles n'apportent rien qui puisse être mis en parallèle avec la triarticulation de l'organisme social. Tout cela n'est que de l'eau de rose lorsque les socialistes affirment que les idées ne font que pendre dans l'air - comme cela a été dit dans une revue nouvellement créée, lors d'une discussion sur la triarticulation.
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Il s'agit tout d'abord qu’on lance la question et d'y voir clair : N'y a-t-il rien d'autre ? Ensuite, on s'en tient d'abord à la triarticulation de l'organisme social, jusqu'à ce qu'on puisse la réfuter de manière objective, jusqu'à ce qu'on puisse placer à côté d'elle des choses objectivement équivalentes. On ne peut plus discuter des anciens programmes de parti, c'est la guerre mondiale qui en a discuté ; celui qui a vraiment de la compréhension sait que ces anciennes idées de parti sont réfutées par la catastrophe de la guerre mondiale. Mais alors, si l'on ne peut pas répondre à cette question en plaçant à côté quelque chose d'objectivement équivalent, et si l'on veut aller plus loin, alors on peut honnêtement se dire : nous travaillons donc dans le sens de la triarticulation de l'organisme social. Disons-le franchement : les anciennes structures de parti ont perdu leur signification ; il faut travailler dans le sens de la triarticulation.
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Lorsque j'ai pris la parole avant-hier à Mannheim, un monsieur s'est présenté à la fin et a dit : "Ce que Steiner a dit est bien, mais ce n'est pas ce que nous voulons ; nous ne voulons pas ajouter un nouveau parti à tous les anciens partis. Les gens qui veulent une telle chose doivent entrer dans les anciens partis et y travailler. -- Je ne pouvais que répondre : j'ai suivi la vie politique de très près depuis longtemps, alors que le monsieur qui parlait n'était pas encore né. Et bien que j'aie été familiarisé par ma vie avec tout ce qui fonctionnait socialement comme force, je n'ai jamais pu agir au sein d'un parti quelconque ou m'y tenir, et il ne me vient pas à l'esprit, à la fin de ma sixième décennie, de devenir un humain de parti : je ne veux rien avoir à faire ni avec un autre parti ni avec un parti que j'aurais fondé moi-même. Je ne veux pas non plus avoir affaire à un parti que j'aurais fondé moi-même ; personne ne doit craindre qu'un nouveau parti soit fondé par moi. Car j'ai appris que chaque parti, par la force des choses, devient stupide au bout d'un certain temps, précisément parce que je ne me suis jamais engagé dans aucun parti. Et j'ai appris à plaindre les gens qui n'ont pas compris cela. C'est pourquoi personne ne doit craindre qu'un nouveau parti vienne s'ajouter aux anciens. C'est pourquoi nous n'avons pas fondé de nouveau parti, mais la Fédération pour la triarticulation de l'organisme social s'est réunie pour représenter les idées de l'organisme triarticulé, dont le caractère non utopiste, dont le caractère réel est tout de même perçu par un certain nombre de personnes. Les personnes qui le reconnaissent devraient aussi l'affirmer honnêtement et sincèrement.
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Car cela non plus ne doit pas arriver : Il y a une pièce de théâtre dans laquelle un coq chante à l'aube, et chaque fois que le coq a chanté, le soleil se lève. Eh bien, le coq ne peut pas voir le contexte, c'est pourquoi il croit que lorsqu'il chante, c'est que le soleil répond à son appel, qu'il vient parce qu'il a chanté, qu'il a fait en sorte que le soleil se lève. - Enfin, si quelqu'un dans la vie non sociale se laisse aller à une telle illusion, comme ce coq qui chante sur le fumier et veut faire se lever le soleil, cela ne fait rien. Mais si, dans certaines circonstances, il arrivait que l'idée des conseils d'entreprise véritablement économiques prospère sur le sol de l'organisme triarticulé et que les personnes qui s'en occupent veuillent nier l'origine, à savoir que l'impulsion de la triarticulation a mis cette idée en mouvement, et si ces personnes croient que parce qu'on a chanté, les conseils d'entreprise vont venir, alors ce serait la même erreur, et une erreur très fatale. Mais cela ne doit pas arriver. Ce qui se passe dans cette direction [les conseils d'entreprise], ce qui a été entrepris ici, ne doit pas être dissocié, cela doit rester en rapport avec l'impulsion bien comprise de la triarticulation de l'organisme social. Et ceux qui veulent réaliser les conseils d'entreprise dans le sens de cette impulsion ne peuvent jamais accepter que les conseils d'entreprise soient créés de manière unilatérale et que l'on ne crie que "conseils d'entreprise, conseils d'entreprise". Ce n'est pas suffisant. Cela n'a de sens que si l'on aspire en même temps à tout ce qui doit être recherché par l'impulsion de l'organisme social triarticulé. C'est ce qui est important. Car si vous voulez vraiment comprendre ce qui est écrit dans les "points essentiels", vous devez vous placer du point de vue que l'on peut apprendre des faits que les quatre ou cinq dernières années ont offerts. Pour celui qui voit clair dans ces faits, ils apparaissent comme s'il avait vécu des siècles, et pour celui qui voit les programmes des partis comme si leurs promoteurs avaient dormi pendant des siècles. Aujourd'hui, cela doit être envisagé clairement et sans réserve.
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Ce que je viens de vous raconter, j'aurais bien sûr tout aussi bien pu l'écrire en préambule de ce livre. Seulement, on a pu constater ces derniers mois à quel point les programmes des partis sont actuellement rigides et stériles. Mais il serait utile que cela figure en préambule de ce livre. Je vous ai raconté aujourd'hui beaucoup de choses qui n'y figurent pas, puisque vous avez décidé, me semble-t-il, de vous réunir ici pour étudier correctement les graves questions sociales actuelles dans le prolongement de ce livre. Mais avant de s'y atteler, il faut déjà se rendre compte que l'on ne peut pas continuer à trottiner dans le vieux style des programmes et des modèles de parti, mais que l'on doit se décider à aborder aujourd'hui les faits conformément à la réalité et à tirer un trait sur tout ce qui ne tient pas compte de ces nouveaux faits. Ce n'est qu'ainsi que vous comprendrez correctement ce qui doit être réalisé, précisément avec cette impulsion vers un organisme social triarticulé. Et vous le comprendrez de la bonne manière si vous trouvez que chaque phrase de ce livre est susceptible d'être mise en pratique, d'être transformée en réalité immédiate. Et la plupart de ceux qui disent qu'ils ne comprennent pas ou qu'il s'agit d'utopies et autres, n'ont tout simplement pas le courage de penser assez fort aujourd'hui pour que les pensées puissent intervenir dans la réalité. Ceux qui crient toujours "dictature du prolétariat", "conquête du pouvoir", "socialisme", pensent généralement très peu. Il n'est donc pas possible d'intervenir dans la réalité avec ces modèles de mots. Mais ils viennent ensuite dire qu'on ne propose [avec les "points essentiels"] que quelque chose qui est une utopie. Ce n'est que dans l'esprit des gens qui n'y comprennent rien que cela devient une utopie.
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C'est pourquoi il faudrait faire comprendre à ces gens ce que Goethe a dit un jour, sous une forme un peu différente et en se référant à autre chose, en se moquant du physiologiste Haller, qui était un naturaliste ossifié. Haller avait inventé la parole :
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 aucun esprit créé ne pénètre à l'intérieur de la nature.
Heureux celui à qui elle indique seulement l'enveloppe extérieure ! Cela répugnait à Goethe, et il disait : "À l'intérieur de la nature" - ô philistin ! - "Aucun esprit créé ne pénètre". "Heureux celui à qui elle indique seulement l'enveloppe extérieure !" J'entends cela se répéter depuis soixante ans, je le maudis, mais en cachette.
La nature n'a ni noyau ni enveloppe, elle est tout en une seule fois.
Examine-toi donc le plus possible pour savoir si tu es le noyau ou la coquille !
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Ceux qui parlent de la triarticulation de l'organisme social comme d'une utopie, on aimerait aussi leur dire : "Examine-toi seulement si ce qui hante ton cerveau est soi-même une utopie ou une réalité. -- On trouvera alors que tous les corbeaux ont la plupart du temps des utopies à l'intérieur et que la réalité dans leur propre tête devient donc aussi une utopie ou une idéologie, ou comme ils l'appellent alors. C'est pourquoi il est si difficile aujourd'hui de faire passer la réalité, parce que les gens se sont tellement barré l'accès à la réalité.
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Mais nous devons nous dire que nous devons travailler sérieusement, sinon nous ne pourrons pas passer de notre volonté à l'action ; et c'est ce qui importe, que nous passions de notre volonté à l'action. Et si nous devions renoncer à tout, parce que nous le reconnaissons comme une erreur, alors nous devrions, pour pouvoir passer du vouloir à l'action, nous tourner vers la vérité, que nous voulons percer à jour en tant que vérité, car rien d'autre ne peut conduire du vouloir à l'action que la poursuite impitoyable et courageuse de la vérité. Cela devrait en fait être écrit comme une devise, comme un slogan, avant les études de ces soirées. Je voulais vous présenter ce soir une préface à ces soirées d'étude. J'espère que ce préambule ne vous empêchera pas de cultiver ces études de telle sorte qu'enfin, avant qu'il ne soit trop tard, des pensées qui portent en elles des germes d'action puissent s'insérer dans le monde de manière fructueuse.
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Nous aurons l'occasion d'en discuter.
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#diffPF

Rudolf Steiner : Le livre "Les points essentiels de la question sociale" est écrit d'une manière particulière, et ce pour deux raisons : premièrement, il est écrit de telle manière qu'il est en fait entièrement tiré de la réalité. Certaines personnes qui lisent le livre n'y pensent pas. Je peux aussi comprendre que cela ne soit pas pleinement pris en compte aujourd'hui. J'ai déjà parlé ici, dans ce cercle - mais tous ceux qui sont là aujourd'hui n'étaient pas présents - de la façon dont les gens pensent vraiment aujourd'hui. J'ai notamment fait référence à l'exemple du professeur d'économie nationale, Lujo Brentano, qui l'a si bien présenté dans le dernier numéro de la "Feuille jaune" ; je veux le répéter brièvement, car je veux m'y rattacher un peu. Cette lumière de la théorie d'économie politique/de peuple actuelle de l'université - il est le premier, pour ainsi dire - a développé le concept d'entrepreneur et a tenté de caractériser les caractéristiques de l'entrepreneur à partir de sa pensée éclairée. Je n'ai pas besoin d'énumérer la première et la deuxième caractéristique ; la troisième est que l'entrepreneur est celui qui met ses moyens de production au service de l'ordre social à son propre compte et à ses propres risques. Il a maintenant cette notion d'entrepreneur, et il l'applique. Il arrive alors à l'étrange résultat que l'ouvrier prolétarien d'aujourd'hui est en fait aussi un entrepreneur, car il correspond à son concept d'entrepreneur en ce qui concerne la première, la deuxième et la troisième caractéristique. Car l'ouvrier a sa propre force de travail comme moyen de production ; il en dispose, et par rapport à celle-ci, il s'adresse au processus social à son propre compte et à ses propres risques. - Ainsi, cette lumière de l'économie de peuple intègre très bien le concept de travailleur prolétarien dans son concept d'entrepreneur. Vous voyez, c'est ainsi que pensent justement les humains qui se font des concepts qui n'ont aucun sens ; ils n'ont aucun sens si l'on exige des concepts qui doivent être réellement applicables à la réalité. Mais même si vous ne l'acceptez peut-être pas, on peut dire tranquillement que plus de quatre-vingt-dix pour cent de tout ce qui est enseigné ou imprimé aujourd'hui utilise de tels concepts ; si on veut les appliquer à la réalité, cela ne marche pas plus que le concept d'entrepreneur de Lujo Brentano. C'est ainsi dans la science, c'est ainsi dans la science sociale, c'est ainsi partout, c'est pourquoi les gens ont désappris à comprendre ce qui travaille avec des concepts conformes à la réalité.
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Prenez par exemple la base de la triarticulation de l'organisme social. N'est-ce pas, on peut les poser de différentes manières, ces bases, parce que la vie a besoin de nombreuses bases. Mais l'une d'entre elles est que l'on sait que l'époque récente a vu l'émergence de ce que l'on pourrait appeler l'impulsion de la démocratie. La démocratie doit consister en ce que tout humain devenu majeur puisse établir son rapport de droit dans des parlements démocratiques, directement ou indirectement par rapport à tout autre humain devenu majeur. Mais justement, si l'on veut honnêtement et sincèrement instaurer cette démocratie dans le monde, on ne peut pas gérer les affaires spirituelles dans le sens de cette démocratie, car chaque humain devenu majeur devrait alors décider de ce qu'il ne comprend pas. Les affaires spirituelles doivent être réglées à partir de la compréhension de la chose, c'est-à-dire qu'elles doivent être placées sur elles-mêmes ; elles ne peuvent donc absolument pas être administrées dans un parlement démocratique, mais elles doivent avoir leur propre administration, qui ne peut pas être démocratique, mais qui doit être issue de la chose. Il en va de même dans la vie de l'économie ; la chose doit être gérée à partir de l'expérience économique et du vivre dedans la vie de l'économie. C'est pourquoi la vie de l'économie d'un côté et la vie de l'esprit de l'autre doivent être séparées du parlement démocratique. C'est ainsi que naît l'organisme social triarticulé.
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Là y a maintenant à Tübingen le professeur Heck, c'est lui - j'en ai déjà parlé - qui a dit qu'il ne fallait absolument pas se laisser aller à dire que le rapport salarial habituel, où l'on est rémunéré pour son travail, avait quelque chose d'humiliant pour le prolétaire, car Caruso était aussi dans un rapport salarial. La différence ne serait pas de principe : Caruso chante et reçoit son salaire, et le prolétaire ordinaire travaille et reçoit aussi son salaire ; et lui, en tant que professeur, reçoit aussi son salaire lorsqu'il donne une conférence. La seule différence entre Caruso et le prolétaire serait que Caruso reçoit trente à quarante mille marks pour une soirée et le prolétaire un peu moins. Mais il ne s'agit pas d'une différence de principe, seulement d'une différence concernant la somme de la rémunération. Et donc, selon ce professeur plein d'esprit, on n'a pas besoin de ressentir quelque chose de dégradant dans la rémunération ; lui non plus ne le ressent pas ainsi. - Ce n'est qu'une parenthèse. Mais ce professeur intelligent a également écrit un long article contre la triarticulation. Là, il part de ce que si l'on articule en trois, on en arrive à trois parlements. - Et maintenant, il montre que ce n'est pas possible avec trois parlements, car il dit : dans le parlement économique, le petit artisan ne comprendra pas le point de vue du grand industriel, et ainsi de suite. - C'est là que le bon professeur s'est fait ses idées sur la triarticulation, et contre ces idées - que je trouve encore bien plus stupides que le professeur Heck ne les trouve ; je les critiquerais aussi jusqu'à la moelle -, il s'en prend à elles, mais il les a faites lui-même. Il s'agit en effet de ne pas juxtaposer trois parlements, mais d'en retirer ce qui n'a pas sa place dans un parlement. Il fait simplement trois parlements et dit : ce n'est pas possible. - C'est ainsi que l'on vit dans des concepts étrangers à la réalité et que l'on juge les autres en fonction de ceux-ci.
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Maintenant, dans l'économie nationale, la théorie d'économie de peuple, est presque seulement inclus ce que sont des concepts irréels. Mais, voyez-vous, je ne pourrais pas, maintenant que le temps presse, écrire une bibliothèque entière dans laquelle seraient répertoriés tous les concepts d'économie de peuple. C'est pourquoi se trouve naturellement dans les "points essentiels" une multitude de concepts qui doivent être abordés/discutés de manière appropriée. Il me suffit par exemple d'attirer l'attention sur ce qui suit :
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N'est-il pas vrai qu'à une époque que nous avons dépassée, les relations sociales étaient essentiellement le fruit de la conquête ? Un territoire quelconque était occupé par un peuple ou une race ; un autre peuple faisait irruption et conquérait le territoire. Les races ou les peuples qui étaient auparavant à l'intérieur ont été soumis au travail. Le peuple conquérant a pris le sol en possession, ce qui a créé un certain rapport entre les conquérants et les conquis. Les conquérants, du fait qu'ils étaient des conquérants, avaient le sol en possession. De ce fait, ils étaient les plus forts économiquement, les conquis étaient les plus faibles économiquement, et il s'en est formé ce qui est devenu un rapport de droit. C'est pourquoi, à presque toutes les époques anciennes de l'évolution historique, on a des rapports de droit fondés sur des conquêtes, c'est-à-dire des privilèges et des droits de désavantage. Les temps sont maintenant venus où il n'était plus possible de conquérir librement. Vous pouvez étudier la différence entre la conquête libre et la conquête liée en regardant par exemple le début du Moyen Âge. Vous pouvez étudier comment certains peuples, les Goths, sont descendus vers le sud, mais dans des régions entièrement occupées ; ils ont alors été amenés, en ce qui concerne l'ordre social, à faire autre chose que les Francs, qui sont allés vers l'ouest et n'y ont pas trouvé de régions entièrement occupées. Cela a donné naissance à d'autres droits de conquête. À l'époque moderne, ce ne sont pas seulement les droits fonciers issus des conquêtes qui ont agi, mais aussi les droits des humains qui avaient des privilèges de possession et qui pouvaient désormais s'approprier les moyens de production grâce au pouvoir économique. La possession des moyens de production, c'est-à-dire la propriété privée des capitaux, s'est ajoutée au droit foncier au sens actuel du terme. Cela a donné lieu à des rapports de droit issus de rapports économiques. Comme vous le voyez, ces rapports de droit sont nés tout seuls à partir de rapports économiques.
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Maintenant, les humains viennent et veulent des notions de pouvoir économique, d'importance économique de la terre, ils veulent des concepts de moyens d'exploitation, de moyens de production, de capitaux, etc., mais ils n'ont pas vraiment de compréhension profonde du cours des choses. Ils prennent alors les faits superficiels et n'arrivent pas à comprendre ce qui se cache derrière les droits fonciers, derrière les rapports de force en ce qui concerne les moyens de production. Bien sûr, toutes ces choses sont prises en compte dans mon livre. Là est pensé correctement ; là est, quand est parlé de droits, à partir de la conscience de la manière dont le droit s'est développé à travers les siècles ; quand on parle de capital, on parle de la conscience de comment dont le capital est devenu. Là est évité soigneusement d'utiliser un concept qui n'est pas entièrement saisi à partir de sa genèse ; c'est pourquoi ces concepts se présentent différemment que dans les manuels habituels d'aujourd'hui.
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Mais aussi quelque chose d'autre est pris en compte. Prenons un fait précis, n'est-ce pas, le fait que le protestantisme est né un jour. Dans les livres d'histoire, on raconte très souvent que Tetzel a parcouru l'Europe centrale et que les gens étaient indignés par la vente des indulgences et autres choses de ce genre. Mais ce n'était pas seulement cela, ce n'est qu'une vision superficielle. L'élément principal était le fait qu'il y avait à Gênes une banque pour le compte de laquelle - et non pour le compte du pape - ce marchand d'indulgences se déplaçait en Allemagne, car cette banque avait accordé des crédits au pape pour ses autres besoins. Toute cette histoire était une entreprise capitaliste. Cet exemple du commerce des indulgences en tant qu'entreprise capitaliste, où même le spirituel a été négocié, vous permet d'étudier - ou plutôt, si l'on commence à étudier, on arrive peu à peu à la conclusion - que finalement, tout pouvoir du capital se ramène à la suprématie du spirituel. Si vous étudiez comment le capital a acquis son pouvoir, vous trouverez partout la suprématie du spirituel. Et c'est vraiment ainsi. N'est-ce pas, celui qui est intelligent, celui qui est débrouillard, a un pouvoir plus grand que celui qui n'est pas intelligent, qui n'est pas débrouillard. Et c'est ainsi que naissent, de façon justifiée ou non, beaucoup de choses qui sont des concentrations de capital. Il faut en tenir compte lorsqu'on envisage le concept de capital. Ces études réelles permettent de comprendre que le capital repose sur le développement du pouvoir spirituel et que le pouvoir de l'ancien esprit théocratique est venu s'ajouter aux droits fonciers, aux droits de conquête, d'un autre côté. L'ancienne Église est à l'origine d'une grande partie de ce qui a ensuite été transféré dans le capitalisme moderne. Il existe un lien secret entre le pouvoir capitaliste moderne et le pouvoir de l'ancienne Église. Et tout cela s'est rassemblé en un méli-mélo dans l'État de pouvoir moderne. Là-dedans, vous trouvez les restes de l'ancienne théocratie, les restes des anciennes conquêtes. Et finalement, les conquêtes modernes sont venues s'y ajouter, et la conquête la plus moderne serait maintenant la conquête de l'État par le socialisme. Mais en réalité, ce n'est pas ainsi qu'il faut procéder. Il doit y avoir quelque chose de nouveau, qui fasse complètement table rase de ces anciens concepts et impulsions. C'est pourquoi il est important que nous nous penchions aussi, dans nos études, sur les notions qui sont à la base de tout cela. Nous devons aujourd'hui expliquer précisément à tous ceux qui veulent parler de choses sociales ce qu'est le droit, ce qu'est le pouvoir et ce qui est en réalité un bien [économique], un bien sous forme de marchandises et autres. C'est dans ce domaine que les plus grandes erreurs sont commises. Je veux par exemple attirer votre attention sur l'une d'entre elles ; si vous n'y êtes pas attentifs, vous comprendrez mal beaucoup de choses dans mon livre.
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Aujourd'hui, on pense souvent que la marchandise est du travail stocké, que le capital est aussi du travail stocké. - Vous pouvez dire qu'il est inoffensif d'avoir de telles notions. Ce n'est pas inoffensif, car de tels concepts empoisonnent toute la pensée sociale. Vous voyez, qu'en est-il du travail - le travail en tant que dépense/application de force de travail ? Oui, il y a une grande différence entre, par exemple, utiliser ma force musculaire physique en faisant du sport et couper du bois. Si je fais du sport, j'use ma force musculaire physique ; je peux être aussi fatigué et devoir remplacer ma force musculaire autant que celui qui coupe du bois. Je peux appliquer la même quantité de travail au sport qu'à la coupe de bois. La différence ne réside pas dans le fait que la force de travail doit être remplacée - elle doit bien sûr être remplacée - mais dans le fait que l'une des forces de travail est utilisée uniquement pour moi, dans un sens égoïste, l'autre dans un sens social pour la société. C'est la fonction sociale qui différencie ces choses. Si je dis maintenant que quelque chose est du travail accumulé, je ne tiens pas compte du fait que le travail cesse en fait d'être dans une chose quelconque au moment où l'on ne travaille plus. Je ne peux pas dire que le capital est du travail accumulé, mais je dois dire que le travail n'existe que tant qu'il est effectué. Mais dans notre ordre social actuel, le capital conserve le pouvoir d'appeler à nouveau le travail à tout moment. Ce n'est pas dans le fait que le capital soit du travail accumulé que réside la fatalité, comme le pense Marx, mais dans le fait que le capital donne le pouvoir d'appeler à son service un nouveau travail - non pas un travail accumulé - mais un nouveau travail. Il dépend beaucoup de cela, et il dépendra encore beaucoup de cela, que l'on parvienne à des notions claires, fondées sur la réalité, sur ces choses. Et c'est à partir de telles notions, qui sont maintenant totalement ancrées dans la réalité, que ce livre est écrit. Il ne tient pas compte de ces notions, qui étaient tout à fait utiles pour l'éducation du prolétariat. Mais aujourd'hui, alors que l'on doit construire quelque chose, ces notions n'ont plus de sens.
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Vous voyez, quand je dis que le capital est du travail accumulé, c'est bon pour l'éducation du prolétariat ; il a reçu les sentiments qu'il devait recevoir. Il n'était pas important que le concept soit fondamentalement faux - on peut éduquer même avec des concepts fondamentalement faux. Mais on ne peut construire quelque chose qu'avec des concepts corrects. C'est pourquoi nous avons aujourd'hui besoin de concepts corrects dans tous les domaines de l'économie de peuple et nous ne pouvons pas continuer à travailler avec des concepts erronés. Ce n'est pas par frivolité que je dis que l'on peut aussi éduquer avec des concepts erronés, mais en vertu des principes généraux de l'éducation. Vous voyez, lorsque vous racontez des contes de fées aux enfants, vous ne voulez pas non plus construire avec ces choses que vous développez ; dans l'éducation, quelque chose d'autre entre en ligne de compte que ce qui entre en ligne de compte pour la construction dans la réalité physique. Il faut travailler avec des concepts réels. Un concept tel que "le capital est du travail accumulé" n'est pas un concept. Le capital est un pouvoir et confère le pouvoir de mettre à tout moment à son service le travail qui se crée. C'est un vrai concept avec une logique de fait. Il faut travailler avec des concepts vrais dans ces domaines. C'est ce qui a été tenté dans les "points essentiels". C'est pourquoi je pense qu'une grande partie de ce qui n'y figure pas en termes de définition des termes, de caractéristiques des termes, doit être élaborée. Et celui qui peut contribuer à l'élaboration de ce dont on a besoin pour comprendre le mode de pensée, la base de ce livre, apportera une très bonne contribution à ces soirées d'étude. C'est donc ce qui compte, mes très chers présents, c'est ce qui compte tout particulièrement.
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Oui, n'est-ce pas, il faudrait écrire un dictionnaire si l'on voulait clarifier tous les termes - mais ce qu'est le "capital" peut maintenant être réglé en une seule soirée d'étude de ce genre. Sans que l'on ait clairement compris aujourd'hui : qu'est-ce que le capital ? Qu'est-ce que la marchandise ? Qu'est-ce que le travail ? Qu'est-ce que le droit ? -, sans ces notions, on ne peut pas avancer. Et ces notions sont tout à fait confuses dans les cercles les plus larges ; elles doivent avant tout être rectifiées. Aujourd'hui, on se désespère quand on parle de l'ordre social avec des gens ; ils ne peuvent pas participer parce qu'ils n'ont pas appris à maîtriser la réalité. C'est ce qu'il faut faire.
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Derrière la guerre une révolution ? + ajustement des concepts dans les fondements voir #

PREMIÈRE SÉANCE D'ÉTUDES, Stuttgart, 30 juillet 1919.
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L'histoire du mouvement social.
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Rudolf Steiner : Mes très chers présents ! Je ne vais pas anticiper ce soir sur ce qui doit être mis en place ici en tant que soirées d'étude qui se tiendront sur la base du livre "Les points essentiels de la question sociale", mais je vais essayer de vous donner une sorte d'introduction à ces soirées. Par cette introduction, je voudrais vous faire ressentir les points de vue qui ont présidé à l'écriture de ce livre. Il a été écrit avant tout en fonction de l'actualité immédiate, de la conviction que la question sociale a elle aussi pris une nouvelle forme à la suite des événements actuels et qu'il est nécessaire de parler aujourd'hui de la question sociale d'une manière tout à fait différente de celle dont on parlait, de quelque côté que ce soit, de la question sociale avant la catastrophe de la guerre mondiale. Avec ce livre, on a en quelque sorte essayé, à ce moment de l'évolution de l'humanité où la question sociale devient particulièrement urgente et où tout homme qui vit consciemment aujourd'hui, qui ne vit pas la vie de l'humanité en somnolant et en dormant, devrait savoir quelque chose sur ce qui doit se passer dans le sens de ce qu'on appelle habituellement la question sociale. Il serait peut-être bon de jeter un petit coup d'œil en arrière aujourd'hui. J'aurai peut-être à mentionner des choses - mais nous les présenterons sous un jour un peu différent de celui dans lequel elles ont été présentées -, j'aurai à mentionner des choses que vous connaissez en partie.
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Vous savez probablement que ce qui est dit aujourd'hui sur la question sociale est dit depuis relativement longtemps. Et on cite aujourd'hui les noms de Proudhon, Fourier, Louis Blanc comme les premiers à avoir traité la question sociale jusqu'au milieu du XIXe siècle. Vous savez aussi que la manière dont cette question sociale a été traitée jusqu'au milieu du XIXe siècle est appelée par les représentants actuels, du moins par de nombreux représentants actuels de la question sociale, "l'ère des utopies sociales". Il est bon de préciser ce que l'on entend par là lorsque l'on dit qu'à son premier stade, la question sociale est apparue de telle sorte qu'elle vivait dans un "âge des utopies". Mais on ne peut pas parler de cette chose dans un sens absolu, on ne peut en fait parler qu'à partir des sentiments des représentants de la question sociale dans le présent. Ils ressentent les choses comme je veux les décrire maintenant. Ils sentent que toutes les questions sociales qui sont apparues à l'époque dont je veux parler en premier lieu étaient au stade de l'utopie. Et qu'est-ce que les gens entendent par là quand ils disent que la question sociale était alors au stade de l'utopie ? Ils entendent par là - on l'a déjà remarqué à l'époque ; Saint-Simon et Fourier l'ont bien remarqué - qu'il y a, même après la Révolution française, des humains d'une certaine minorité sociale qui sont en possession des moyens de production et aussi d'autres biens humains, et qu'il y a un grand nombre d'autres humains - c'est même la majorité - qui ne sont pas en possession de tels biens. Ces personnes ne peuvent travailler sur les moyens de production qu'en se mettant au service de ceux qui possèdent les moyens de production et aussi la terre - elles n'ont en fait rien d'autre qu'elles-mêmes et leur force de travail. On a noté que la vie de cette grande masse de l'humanité est une vie de détresse, en grande partie dans la pauvreté, par opposition à ceux qui sont en minorité ; et on a fait allusion à la situation de la minorité et à la situation de la majorité.
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Ceux qui ont écrit sur cette situation sociale de l'humanité, comme Saint-Simon et Fourier, mais aussi Proudhon, sont partis d'un certain postulat. Ils sont partis du principe qu'il était nécessaire d'attirer l'attention des humains sur ce point : Voyez, la grande masse vit dans la misère, dans l'absence de liberté, dans la dépendance économique, ce n'est pas une existence digne de l'humain pour la grande masse. Il faut changer cela. - Et on a alors imaginé toutes sortes de moyens par lesquels cette inégalité entre les humains pouvait être modifiée. Mais il y avait toujours une certaine condition préalable, et cette condition préalable était que l'on se disait : si l'on sait ce qui fonde l'inégalité et si l'on a des paroles suffisamment fortes, si l'on a une conscience morale suffisante pour attirer fortement l'attention sur le fait que la grande majorité des humains vit dans la dépendance économique et juridique et est pauvre, alors ce discours touchera les cœurs, les âmes de la minorité, des nantis, de la minorité la plus favorisée. Et c'est en faisant comprendre à cette minorité que les choses ne peuvent pas rester en l'état, qu'il faut apporter des changements, qu'il faut mettre en place un autre ordre social, qu'un autre ordre social sera instauré. La condition préalable était donc que les humains se laissent entraîner à faire quelque chose pour la libération de la grande masse de l'humanité à partir de l'élan de leur âme. Et on proposait alors ce qu'il fallait faire. Et on pensait que si la minorité, si les gens qui sont les dirigeants, les leaders, comprenaient que ce qu'on voulait faire était bien, alors il y aurait une amélioration générale de la situation de l'humanité.
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Beaucoup de choses extrêmement intelligentes ont été dites de ce côté-là, mais tout ce qui a été entrepris dans ce sens est aujourd'hui considéré comme utopique par la plupart des représentants de la question sociale. Cela signifie qu'aujourd'hui, on ne compte plus sur le fait qu'il suffise de dire : c'est ainsi qu'il faudrait organiser le monde, et l'inégalité économique, politique et juridique des humains cesserait. - Il ne sert à rien aujourd'hui d'en appeler à la compréhension, au discernement des humains qui sont favorisés, qui sont dans le privilège, qui sont en possession des moyens de production et autres. Si je dois exprimer ce qui a été perdu au cours de la deuxième moitié du XIXe siècle, je dois dire que l'on a perdu la foi en la compréhension et en la bonne volonté des humains. C'est pourquoi les représentants de la question sociale, dont je parle maintenant, se disent : on peut élaborer de beaux plans sur la manière d'aménager le monde des humains, mais il n'en résultera rien ; car on aura beau prêcher de beaux plans, on aura beau faire appel aux cœurs et aux âmes des minorités dirigeantes avec des paroles touchantes, il ne se passera rien. Tout cela, ce sont des idées sans valeur, et les idées sans valeur qui imaginent l'avenir sont en réalité, pour parler en termes populaires, des utopies. Il ne sert donc à rien, dit-on, d'imaginer quoi que ce soit dans l'avenir, car il n'y aura personne pour renoncer à ses intérêts, pour être saisi par sa conscience, par son sens moral, etc. - La foi dans la conscience et le discernement moral a justement été perdue dans les cercles les plus larges, notamment chez les représentants de la question sociale. On se dit que les humains n'agissent pas du tout en fonction de leur discernement lorsqu'ils prennent des mesures sociales ou lorsqu'ils mènent leur vie sociale, ils agissent en fonction de leur intérêt. Et les possédants ont bien entendu intérêt à rester dans leurs possessions. Les privilégiés sociaux ont intérêt à conserver leurs privilèges sociaux. C'est pourquoi il est illusoire de compter sur le fait qu'il suffit de dire aux gens de faire ceci ou cela. Ils ne le font pas, parce qu'ils n'agissent pas en fonction de leur compréhension, mais en fonction de leur intérêt.
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Au sens le plus large, on peut dire que Karl Marx a peu à peu - mais vraiment peu à peu - adhéré à cette vue. On peut décrire toute une série d'époques dans la vie de Karl Marx. Dans sa jeunesse, Marx était aussi un penseur idéaliste et il pensait encore, dans le sens que je viens de caractériser, à la faisabilité des utopies. Mais c'est justement lui, et après lui son ami Engels, qui s'est écarté de la manière la plus radicale de ce calcul sur le discernement des humains. Et si je caractérise en général ce qui est en fait une grande histoire, je peux dire ceci : Karl Marx est finalement parvenu à la conviction que les choses ne pouvaient pas s'améliorer dans le monde d'une autre manière qu'en faisant appel aux humains qui n'ont pas intérêt à ce que leurs biens, leurs privilèges leur soient conservés. Ceux qui ont intérêt à ce que leurs biens soient préservés, ceux-là, on ne peut absolument pas les voir, on doit les laisser complètement de côté, car ils ne se laisseront jamais aller à faire quoi que ce soit, même si on leur fait de beaux sermons. En revanche, il y a justement la grande masse des ouvriers prolétaires [qui n'ont rien à perdre en termes de biens]. Karl Marx lui-même a vécu dans cette conviction à l'époque où ce que l'on appelle aujourd'hui le prolétariat était en train de naître en Europe centrale ; il a vu le prolétariat naître en Europe centrale à partir d'autres conditions économiques. Plus tard, lorsqu'il vivait en Angleterre, c'était un peu différent. Mais à l'époque où Karl Marx est passé de l'idéaliste au matérialiste économique, c'était encore comme si le prolétariat moderne était en train d'émerger en Europe centrale. Et maintenant, il se disait : ce prolétariat moderne a des intérêts tout à fait différents de ceux de la minorité dirigeante, car il se compose d'humains qui ne possèdent rien d'autre que leur force de travail, d'humains qui ne peuvent pas vivre autrement qu'en mettant leur force de travail au service des possédants, notamment au service des possesseurs des moyens de production. Lorsque ces travailleurs quittent leur travail, ils sont - c'était particulièrement vrai à l'époque, de la manière la plus radicale - jetés à la rue. Ils n'ont rien d'autre devant eux que la possibilité d'un front pour ceux qui sont les propriétaires des moyens de production. Ces gens ont un tout autre intérêt que ceux qui possèdent. Ils ont intérêt à ce que tout l'ordre social antérieur prenne fin, à ce que cet ordre social soit transformé. Il n'est pas nécessaire de leur prêcher de manière à ce qu'ils comprennent, mais seulement de manière à ce que leur égoïsme et leur intérêt soient saisis. On peut compter sur cela. Prêcher à ceux sur le discernement desquels on doit compter ne donne aucun résultat, car les humains n'agissent pas par discernement, ils n'agissent que par intérêt. Donc, on ne peut pas s'adresser à ceux chez qui on devrait faire appel au discernement, mais on doit faire appel aux intérêts de ceux qui ne peuvent pas faire autrement que de s'engager pour les temps modernes par contrainte intérieure. C'est l'égoïsme vers lequel Karl Marx a évolué. C'est pourquoi il n'a plus cru que le progrès de l'humanité vers des conditions sociales plus récentes pouvait provenir d'une autre œuvre humaine que celle du prolétariat lui-même. Selon Karl Marx, le prolétariat ne peut aspirer à un renouvellement des conditions sociales humaines qu'à partir de ses propres intérêts, de ses intérêts individuels et égoïstes. Et c'est ainsi que le prolétariat, non pas par philanthropie, mais par intérêt égoïste, libérera tout le reste de l'humanité, parce qu'il ne peut y avoir rien d'autre que ce qu'accomplissent les humains qui ne sont pas attachés aux vieux biens et qui n'ont rien à perdre des vieux biens en cas de transformation.
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On se dit donc : d'un côté, il y a les cercles dirigeants, leaders, qui ont certains droits qui leur ont été conférés dans le passé ou qui leur ont été imposés dans le passé, qui se sont transmis par héritage dans leurs familles, et ils s'y accrochent. Ces cercles dirigeants sont en possession de ceci ou de cela, qu'ils transmettent à leur tour au sein de leur cercle, de leur famille et ainsi de suite. Ces cercles ont toujours quelque chose à perdre lors d'une transformation, car bien sûr, s'ils ne perdaient rien, aucune transformation n'aurait lieu. Il s'agit en effet que ceux qui n'ont rien reçoivent quelque chose, donc ceux qui ont quelque chose ne peuvent que perdre. On ne pourrait donc faire appel au discernement que si ce discernement donnait à la classe dirigeante possédante l'impulsion de vouloir perdre quelque chose. Ils n'acceptent pas cela. - C'était le point de vue de Karl Marx. Il faut donc faire appel à ceux qui n'ont rien à perdre. C'est pourquoi le "Manifeste communiste" de 1848 se termine par ces mots : "Les prolétaires n'ont rien à perdre que leurs chaînes, mais ils ont tout à gagner. Prolétaires de tous les pays, unissez-vous !".
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 Eh bien, vous voyez, c'est devenu en quelque sorte une conviction depuis la publication du Manifeste communiste. Et aujourd'hui, alors que certains sentiments, déjà sous l'influence de cette conception, vivent justement dans la majorité du prolétariat, on ne peut plus vraiment s'imaginer quel énorme bouleversement s'est opéré dans la conception socialiste vers le milieu du XIXe siècle. Mais il serait bon que vous preniez quelque chose comme l'"Évangile d'un pauvre pécheur" de Weitling, un compagnon tailleur, qui a été écrit pas si longtemps avant le Manifeste communiste, et que vous le compariez à tout ce qui a été écrit après la parution du Manifeste communiste. Dans cet "Évangile d'un pauvre pécheur", vraiment empreint d'une authentique sensibilité prolétarienne, règne un langage ardent, on peut même dire poétique dans un certain sens, mais un langage qui veut absolument faire appel à la bonne volonté, au discernement des humains. C'est la conviction de Weitling que l'on peut faire quelque chose avec la bonne volonté des humains. Et cette conviction ne s'est affaiblie que vers le milieu du XIXe siècle. Et l'acte par lequel elle s'est affaiblie est justement la publication du Manifeste communiste. Et depuis cette époque, depuis 1848, nous pouvons en fait suivre ce que nous appelons aujourd'hui la question sociale. Car si nous voulions parler aujourd'hui comme Saint-Simon, comme Fourier, comme Weitling, oui, nous prêcherions aujourd'hui vraiment la sourde oreille. Car jusqu'à un certain point, il est tout à fait exact que l'on ne peut rien entreprendre dans la question sociale si l'on fait appel à la compréhension des cercles dirigeants, leaders, qui ont quelque chose. C'est tout à fait vrai. Ils ne le savent même pas s'ils le font, car des forces inconscientes jouent un rôle extrêmement important dans l'âme humaine.
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Vous voyez, au cours du XIXe siècle, notre culture spirituelle est presque entièrement devenue une phrase. Et le fait que nous vivions dans la phrase en ce qui concerne la culture spirituelle est un fait social beaucoup plus important qu'on ne le pense habituellement. Et donc, naturellement, les membres des cercles dirigeants, des cercles de direction, disent aussi toutes sortes de belles choses sur la question sociale, et ils sont eux-mêmes souvent convaincus qu'ils ont déjà la bonne volonté. Mais en réalité, ils ne font que le croire, ce n'est qu'une illusion ; dès que quelque chose de réel est entrepris dans ce domaine, il apparaît immédiatement qu'il s'agit d'une illusion. Nous en parlerons plus tard. Mais comme je l'ai dit, nous ne pouvons plus parler aujourd'hui comme nous le faisions à l'époque des utopies. C'est la véritable conquête de Karl Marx, qui a montré comment l'humanité est aujourd'hui tellement empêtrée dans l'illusionnisme que c'est un non-sens de compter sur autre chose que l'égoïsme. Il faut compter avec cela ; on ne peut donc rien obtenir si l'on veut compter d'une manière ou d'une autre sur l'altruisme, sur la bonne volonté, sur les principes moraux des humains - je dis toujours "en ce qui concerne la question sociale". Et ce revirement, qui nous a conduits à devoir parler aujourd'hui d'une toute autre manière que l'on pouvait par exemple encore parler de la question sociale dans la première moitié du XIXe siècle, ce revirement est justement arrivé avec le Manifeste communiste. Mais tout n'est pas arrivé d'un seul coup, mais il était tout de même possible qu'après le Manifeste communiste, jusque dans les années soixante, comme vous le savez tous - certains jeunes socialistes ont déjà oublié cette époque -, cette toute autre forme de pensée sociale, la forme de Ferdinand Lassalle, ait touché les cœurs et les âmes. Et même après la mort de Lassalle, survenue en 1864, ce qui était le socialisme de Lassalle s'est poursuivi. Lassalle fait partie de ces gens qui, malgré l'avènement d'un autre mode de pensée, comptaient encore sur la force de frappe des idées. Lassalle voulait encore saisir les humains en tant que tels dans leur compréhension, dans leur volonté sociale avant tout. Mais de plus en plus, cette nuance lassallienne diminuait et l'autre nuance, la nuance marxiste, qui ne voulait compter que sur les intérêts de cette partie de la population humaine qui ne possédait qu'elle-même et sa force de travail, prenait le dessus. Mais ce n'était pas si rapide. Une telle façon de penser ne s'est développée que peu à peu dans l'humanité.
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Dans les années soixante, soixante-dix, et même encore dans les années quatre-vingt, les gens qui appartenaient au prolétariat ou qui faisaient partie des gens politiquement ou socialement dépendants - même s'ils n'étaient pas exactement des prolétaires - jugeaient en quelque sorte moralement leur dépendance et condamnaient moralement les milieux non dépendants de la population humaine. Selon leur conscience, c'était de la mauvaise volonté de la part des cercles dirigeants, leaders, de la population humaine, qu'ils laissent la grande masse du prolétariat dans la dépendance, qu'ils la payent mal, etc. Si je peux m'exprimer trivialement, je peux dire que dans les années soixante, soixante-dix, jusque dans les années quatre-vingt, on fabriquait beaucoup d'indignation sociale et on parlait du point de vue de l'indignation sociale. Puis, au milieu des années quatre-vingt, l'étrange revirement s'est vraiment produit. Les personnalités les plus en vue du mouvement social ont alors complètement cessé de parler de la question sociale sur la base de l'indignation morale dans les années 80. C'était l'époque où les leaders sociaux, que vous, les plus jeunes, avez seulement vus mourir, étaient grands et plus ou moins encore animés par l'ardeur de leur jeunesse : Adler, Pernerstorfer, Wilhelm Liebknecht, Auer, Bebel, Singer et ainsi de suite. Ces dirigeants plus âgés ont justement cessé de plus en plus de prêcher ce socialisme d'indignation à l'époque, dans les années 80. Je voudrais dire que ces dirigeants du socialisme ont exprimé leur conviction intime lorsqu'ils ont transposé l'ancien socialisme d'indignation dans leur nouvelle vision socialiste du monde. Vous trouverez que ce que je vous dis maintenant ne figure dans aucun livre sur l'histoire du socialisme. Mais ceux qui ont vécu à l'époque et qui ont participé à cela savent que les gens, lorsqu'ils étaient livrés à eux-mêmes, parlaient ainsi.
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Supposons que dans les années quatre-vingt, des dirigeants du socialisme se soient réunis pour discuter avec des bourgeois [purs] dans leurs convictions, et supposons qu'il y ait eu une troisième sorte : des bourgeois idéalistes qui voulaient du bien à tous les humains, qui auraient été d'accord pour rendre tous les humains heureux. Il aurait pu arriver que les bourgeois déclarent qu'il faut toujours qu'il y ait des gens pauvres et des gens riches, et ainsi de suite, car c'est la seule façon de maintenir la société humaine. Alors peut-être que la voix de l'un de ces idéalistes qui s'indignaient de voir tant de gens vivre dans la pauvreté et la dépendance se serait élevée. Un tel humain aurait peut-être dit : "Oui, il faut y parvenir, il faut faire comprendre à ces gens qui possèdent, aux entrepreneurs, aux capitalistes, qu'ils doivent renoncer à leurs biens, qu'ils doivent prendre des mesures qui permettront à la grande masse de changer de situation, et ainsi de suite. - De très beaux discours auraient pu être prononcés sur cette base. Mais alors, quelqu'un qui, à l'époque, venait de s'initier au socialisme et à son évolution, aurait élevé la voix et dit : "Qu'est-ce que vous racontez, vous êtes un enfant ; tout cela n'est qu'enfantillages, absurdités ! Les gens qui sont des capitalistes, des entrepreneurs, ce sont tous de pauvres sbires, ils ne savent rien d'autre que ce qu'on leur a inculqué depuis des générations. S'ils entendaient dire qu'ils devraient faire autrement, ils ne pourraient même pas le faire, car ils ne sauraient pas comment s'y prendre. Cela ne rentre pas du tout dans leur crâne que l'on puisse faire quelque chose différemment. Il ne faut pas accuser les gens, il ne faut pas condamner moralement les gens, ils ne sont pas du tout à condamner moralement ; les gars ont grandi dans ce milieu, ces pauvres sbires, dans tout ce milieu, et ça les inspire avec les idées qu'ils ont. Les accuser moralement, c'est ne rien comprendre aux lois de l'évolution de l'humanité, c'est se bercer d'illusions. Ces humains ne peuvent jamais vouloir que le monde prenne une autre forme. Parler d'eux avec indignation, c'est de l'enfantillage pur et simple. Tout cela est devenu ainsi par nécessité, et cela ne peut devenir différent que par nécessité. Vous voyez, on ne peut rien faire avec ces gars qui croient pouvoir prêcher aux possédants, aux capitalistes, qu'il faut instaurer un nouvel ordre mondial, on ne peut rien faire avec ces gars ; on ne peut pas instaurer un nouvel ordre mondial avec eux ; ils ne font que s'adonner à la croyance que l'on peut accuser ces pauvres sbires de capitalistes de faire un autre monde. - Je dois dire les choses un peu clairement, c'est pourquoi certaines choses sont dites avec des contours nets, mais de telle manière que vous avez pu entendre partout les discours dont je parle. Quand on les écrivait, on les retouchait un peu, on les écrivait un peu différemment, mais c'était la base. Puis ils ont continué à parler : avec ces gars - ce sont des idéalistes, ils se représentent le monde en termes d'idéologie -, on ne peut rien faire avec eux. Nous devons compter sur ceux qui n'ont rien, qui veulent donc quelque chose de différent de leurs intérêts que ceux liés aux intérêts capitalistes. Et ceux-là n'aspireront pas non plus à un changement de situation en vertu d'un quelconque principe moral, mais uniquement par convoitise, pour avoir plus que ce qu'ils avaient jusqu'à présent, pour avoir une existence indépendante.
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Cette manière de penser est apparue de plus en plus dans les années quatre-vingt, de ne plus concevoir l'évolution de l'humanité dans le sens où l'individu est particulièrement responsable de ce qu'il fait, mais qu'il fait ce qu'il doit faire en raison de la situation économique. Le capitaliste, l'entrepreneur, écrase les autres dans la plus grande innocence. Celui qui est prolétaire, non pas en vertu d'un principe moral, mais en toute innocence, en raison d'une nécessité humaine, va révolutionner et prendre les moyens de production, le capital, des mains de ceux qui justement le possèdent. Cela doit se dérouler comme une nécessité historique. - Cette façon de penser monta.
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Eh bien, voyez-vous, ce n'est qu'en 1891, au congrès d'Erfurt, que tout le lassallianisme, qui était encore basé sur la compréhension des humains, s'est transformé en croyance dans le soi-disant "programme d'Erfurt", qui était destiné à faire du marxisme la vision officielle du prolétariat. Si vous lisez les programmes des congrès de Gotha et d'Eisenach, vous y trouverez deux revendications authentiquement prolétariennes de l'époque, qui sont encore liées au lassallianisme. La première revendication était l'abolition du rapport salarial ; la deuxième revendication était l'égalité politique de tous les humains, l'abolition de tous les privilèges politiques. Toutes les revendications prolétariennes jusqu'aux années 1990, jusqu'au congrès d'Erfurt qui a apporté le grand changement, sont parties de ces deux revendications. Regardez une fois ces deux revendications exactement et comparez-les avec les principales revendications du congrès d'Erfurt. Quelles sont les principales revendications du congrès d'Erfurt ? Ce sont les suivantes : Transfert de la propriété privée des moyens de production à la propriété commune ; gestion de toute la production de biens, de toute la production par une sorte de grande coopérative, en laquelle l'État actuel doit se transformer. Comparez l'ancien programme, qui était le programme prolétarien des années quatre-vingt, avec celui qui est issu du programme du parti d'Erfurt et qui existe depuis les années quatre-vingt-dix. Vous verrez que dans l'ancien programme de Gotha et d'Eisenach, les exigences du socialisme sont encore des exigences purement humaines : égalité politique de tous les humains, abolition du rapport salarial dégradant. Au début des années quatre-vingt-dix, ce que je vous ai décrit comme l'état d'esprit qui s'est développé au cours des années quatre-vingt a déjà agi. Ce qui était encore une exigence de l'humanité s'est transformé en une exigence purement économique. Vous ne lisez plus rien sur l'idéal d'abolir le rapport salarial, vous ne lisez que des revendications économiques.
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Eh bien, vous voyez, ces choses sont liées à la formation progressive de l'idée que l'on avait de la réalisation extérieure d'un meilleur état social de l'humanité. Il a souvent été dit par ces gens qui avaient encore des idéaux : ah, quel dommage cela fait-il de tout casser, il faut bien qu'un autre ordre se mette en place ; il faut donc qu'il y ait une révolution, il faut que tout soit cassé, il faut qu'il y ait une grande claque, car c'est seulement de là que peut naître un meilleur ordre social. - C'est ce que disaient encore certaines personnes dans les années 80, qui étaient de bons socialistes idéalistes. On leur répondait par d'autres, ceux qui étaient à la hauteur, qui étaient devenus les leaders - ceux qui, comme je l'ai dit, sont maintenant enterrés -, qui disaient : tout cela n'a pas de sens, des révolutions aussi soudaines n'ont aucun sens. La seule chose qui ait un sens, c'est que nous abandonnions le capitalisme à lui-même. Nous voyons bien qu'auparavant, il n'y avait que de petits capitalistes, puis ils sont devenus grands ; ils se sont associés à d'autres, sont devenus des groupes de capitalistes. Les capitaux se sont de plus en plus concentrés. C'est dans ce processus que nous nous trouvons, à savoir que les capitaux sont de plus en plus concentrés. Le temps viendra où il n'y aura plus que quelques grands trusts et consortiums capitalistes. Il sera alors nécessaire que le prolétariat, en tant que classe non possédante, transmette un beau jour, de manière tout à fait pacifique, par voie parlementaire, la propriété capitaliste, les moyens de production, à la propriété commune. Cela peut être très bien fait, mais il faut attendre. D'ici là, les choses doivent évoluer. Le capitalisme, qui est en fait un enfant innocent, n'y peut rien s'il est inhumain - c'est la nécessité historique qui l'impose. Mais il travaille aussi à l'avance, car il concentre les capitaux ; ils sont alors bien groupés, il suffit qu'ils soient repris par la collectivité. Il ne s'agit pas d'une révolution rapide, mais d'une évolution lente.
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Vous voyez, le secret de la vision, le secret public de la vision, qui est à la base de tout cela, a été joliment expliqué par Engels dans les années 90. Il a dit : "Pourquoi des révolutions rapides ? Ce qui se passe lentement dans le développement du nouveau capitalisme, ce regroupement des capitaux, cette concentration des capitaux, tout cela travaille pour nous. Nous n'avons pas besoin de créer une communauté, les capitalistes le font déjà. Nous n'avons qu'à le transformer en propriété prolétarienne. C'est pourquoi - dit Engels - les rôles se sont en fait inversés. Nous, qui représentons le prolétariat, n'avons pas à nous plaindre de l'évolution, ce sont les autres qui doivent se plaindre. Car les gars qui sont aujourd'hui dans les cercles des possédants doivent se dire : nous accumulons les capitaux, mais nous les accumulons pour les autres. Voyez, ces types doivent en fait s'inquiéter de perdre leurs capitaux ; ils ont les joues creuses, ils se dessèchent à force de se demander ce qui va se passer. En tant que socialistes, nous nous épanouissons très bien dans cette évolution. Engels dit que nous avons les muscles saillants et les joues pleines et que nous ressemblons à la vie éternelle. - C'est ce que dit Engels dans une introduction qu'il a écrite dans les années 1990, en décrivant comment ce qui se développe est tout à fait juste, et comment il suffit d'attendre le développement, qui est en fait assuré par le capitalisme lui-même. Cette évolution débouche ensuite sur le transfert de ce que le capitalisme a d'abord concentré dans la propriété commune de ceux qui n'avaient rien jusqu'alors. - C'était en fait l'état d'esprit dans lequel les cercles dirigeants du prolétariat sont entrés au XXe siècle.
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Et c'est ainsi qu'on a pensé, surtout depuis l'époque où le marxisme n'a plus été pris comme dans les années 1990, mais où il a été soumis à une révision, comme on disait, à l'époque où sont apparus les révisionnistes, c'est-à-dire ceux qui sont encore vivants aujourd'hui, mais qui sont des vieux, comme Bernstein par exemple. C'est donc là que les révisionnistes sont arrivés. Ils disaient qu'il était possible d'encourager un peu toute l'évolution, car si les travailleurs se contentent de travailler jusqu'à ce que les capitalistes aient tout rassemblé, ils seront encore dans le besoin avant, notamment lorsqu'ils seront âgés, ils n'auront rien. On a donc créé des assurances et ainsi de suite ; et surtout, on a veillé à s'approprier ce que les classes dirigeantes avaient comme institutions dans la vie politique. Vous savez, c'est à cette époque qu'est née la vie syndicale.
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Et à l'intérieur du parti socialiste, il y avait deux tendances fortement divergentes : le parti syndical et le parti politique proprement dit, comme on disait alors. Le parti politique se tenait plus sur le terrain, une révolution soudaine ne servirait à rien, l'évolution devait se dérouler comme je viens de le décrire. Il s'agissait donc de tout préparer pour le moment où le capitalisme serait suffisamment concentré et où le prolétariat aurait la majorité dans les parlements. Tout doit être poursuivi par la voie du parlementarisme, de l'appropriation de la majorité, afin qu'au moment où les moyens de production seront transférés à la propriété commune, il y ait aussi la majorité pour ce transfert. C'est notamment dans ce groupe de personnes qui pensaient tout du parti politique que l'on ne pensait pas beaucoup au mouvement syndical à la fin du XIXe siècle. À cette époque, celui-ci s'efforçait justement d'instaurer une sorte de compétition ordonnée entre lui et les entrepreneurs, afin d'obtenir de temps en temps des entreprises des augmentations de salaire et des choses similaires. Bref, on s'est arrangé pour imiter le système de négociations réciproques qui existait entre les milieux dirigeants, entre les dirigeants eux-mêmes, et on l'a étendu aux relations entre les milieux dirigeants et le prolétariat. Vous savez que les représentants du système socialiste proprement politique ont particulièrement accusé ceux qui sont devenus les plus bourgeois du mouvement syndical. Et à la fin des années quatre-vingt-dix et au début du XXe siècle, on pouvait voir partout, chez ceux qui étaient plus orientés vers le système politique, un grand mépris pour les gens qui s'étaient entièrement plongés dans la vie syndicale, notamment les typographes, qui avaient à leur tour développé un tout autre système de vie syndical, jusqu'à l'extrême.
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Il s'agissait de deux tendances très distinctes dans la vie sociale : les syndicalistes et ceux qui penchaient plutôt vers le parti politique. Et au sein des syndicats, les typographes de l'association des typographes étaient justement les garçons modèles ; ils étaient les garçons modèles qui avaient acquis la pleine reconnaissance des cercles bourgeois. Et je crois que, de même que l'on a eu une certaine crainte, une certaine inquiétude à l'égard du parti politique socialiste, on a vu peu à peu émerger avec une grande satisfaction des gens aussi braves que les gens de l'association des typographes. On se disait à leur sujet : ils s'embourgeoisent, on peut toujours négocier avec eux, ça se passe très bien. S'ils s'en prennent à leurs salaires, nous nous en prenons à nos prix, que nous exigeons. Ça marche. - Et, n'est-ce pas, c'était aussi possible pour les années suivantes, et les gens ne pensent pas plus loin. On était donc très satisfait de cette formation exemplaire du développement syndical. Eh bien, si j'omets quelques nuances, on peut dire que ces deux directions se sont plus ou moins développées jusqu'à l'époque où la catastrophe de la guerre mondiale les a surpris. Mais malheureusement, les gens n'ont pas appris de cette catastrophe mondiale tout ce qui aurait dû être appris en ce qui concerne la question sociale.
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N'est-ce pas, si l'on considère les rapports à l'est de l'Europe, en Europe centrale, si l'on fait abstraction du monde anglo-américain et en partie du monde roman, si l'on se limite donc à l'Europe centrale et orientale, on peut dire qu'il n'y a rien de juste dans cette histoire, que l'on a toujours définie ainsi : Les capitaux se concentrent et, lorsque l'on aura la majorité dans les parlements, les capitaux seront transférés à la communauté, et ainsi de suite. - La catastrophe de la guerre mondiale a fait en sorte que l'on ne puisse pas s'y attendre aussi facilement aujourd'hui. Ceux qui s'attendaient à une révolution quelconque ont souvent été considérés comme des enfants, mais au fond, que s'est-il passé au cours des quatre ou cinq dernières années ? Gardons à l'esprit ce qui s'est passé de manière claire et nette. N'est-ce pas, vous l'avez souvent entendu, ce qui s'est passé au cours des quatre ou cinq dernières années : en juillet 1914, les gouvernements sont devenus un peu "tordus" - ou très "tordus" - et ont poussé les gens à la guerre mondiale. Les gens ont cru qu'il y avait une guerre mondiale, que des batailles avaient eu lieu - mais avec les moyens de guerre modernes, avec les moyens mécaniques, il y avait quelque chose de tout à fait différent que dans les guerres précédentes. Il n'y avait plus aucune possibilité que quelqu'un devienne un général particulièrement célèbre, car tout dépendait finalement de la quantité de munitions et d'autres moyens de guerre dont disposait l'un des deux partis, si l'un fabriquait mieux que l'autre les moyens de guerre mécaniques ou avait découvert un gaz et d'autres choses de ce genre que les autres n'avaient pas. D'abord l'un gagnait, puis l'autre découvrait à nouveau quelque chose, puis le premier à nouveau ; tout cela était une guerre terriblement mécanique. Et tout ce qui a été dit sur ce qui s'est passé ici et là de la part des humains, c'était sous l'influence de la phrase, c'était tout à fait de la phrase. Et peu à peu, l'humanité moderne comprendra, même en Europe centrale, tout ce qu'il y a eu comme phrases dans le fait que l'un ou l'autre, qui n'était en fait rien d'autre qu'un soldat moyen un peu tordu, a été transformé en un grand général en Europe centrale. Ces choses n'ont été possibles que sous l'influence de la phrase. Eh bien, c'est ce qui s'est passé.
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Mais que s'est-il passé en réalité ? Les gens ne l'ont pas remarqué à cause des événements extérieurs. Alors que les gens croyaient qu'une guerre mondiale avait été menée - qui n'était en fait qu'un masque -, une révolution s'est en réalité produite. En réalité, une révolution s'est produite pendant ces quatre ou cinq ans. Mais les gens ne le savent pas encore aujourd'hui, ils n'y prêtent pas attention. La guerre est l'extérieur, le masque ; la vérité, c'est que la révolution a eu lieu. Et parce que la révolution a eu lieu, la société d'Europe centrale et orientale se trouve aujourd'hui dans un tout autre état, et on ne peut rien faire de ce que les gens avaient envisagé pour les situations antérieures. Aujourd'hui, il est nécessaire de réorganiser toutes les idées que l'on se faisait auparavant, de penser les choses de manière totalement nouvelle. C'est ce qu'a tenté de faire le livre "Les points essentiels de la question sociale" : tenir compte de la situation dans laquelle les événements récents nous ont placés. Il n'est donc pas étonnant que les membres des partis socialistes, qui ne peuvent pas suivre le mouvement assez rapidement, se méprennent sur ce livre. Si les gens acceptaient une seule fois d'examiner leurs propres pensées - d'examiner un peu ce qu'ils disent vouloir -, ils verraient à quel point ils vivent sous l'influence des idées qu'ils se sont faites jusqu'en 1914. C'est la vieille habitude.
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N'est-ce pas, ces idées que l'on a eues jusqu'en 1914, elles se sont tellement incrustées dans l'environnement des humains qu'elles ne peuvent plus en sortir maintenant. Et quelle est la conséquence ? La conséquence, c'est que malgré la nécessité d'une nouvelle action aujourd'hui, malgré la révolution qui s'est produite en Europe centrale et orientale, malgré la nécessité de construire aujourd'hui - non pas selon les anciennes idées, mais selon les nouvelles idées -, malgré tout cela, les gens prêchent les anciennes idées. Et que sont aujourd'hui les partis, y compris les partis socialistes ? Les partis socialistes sont ceux qui continuent à prêcher aujourd'hui tel ou tel évangile socialiste, à l'ancienne manière, comme ils l'ont fait jusqu'en juillet 1914, car il n'y a pas de différence dans ces programmes de parti par rapport aux anciens - tout au plus la différence qui vient de l'extérieur. Pour celui qui connaît les choses, il y a terriblement peu de nouveautés, voire rien de nouveau, dans les différents groupes de partis. Les vieilles idées sont toujours véhiculées aujourd'hui. Maintenant oui, il y a une petite différence : si l'on a un chaudron en cuivre et que l'on tape dessus, cela sonne ; si l'on tape de la même manière sur un tonneau en bois, cela sonne différemment ; mais le coup peut être tout à fait le même. Cela dépend alors de ce sur quoi on tape, si cela sonne différemment. Et c'est ce qui se passe aujourd'hui lorsque les gens se mettent à parler de leurs programmes de parti. Ce qui est contenu dans ces anciens programmes de parti, c'est en fait le vieux garde-fou du parti ; c'est seulement parce qu'il y a maintenant d'autres conditions sociales que cela sonne aujourd'hui un peu différemment, comme cela sonne différemment dans une chaudière en cuivre ou dans un tonneau en bois. Lorsque les socialistes indépendants, les socialistes majoritaires ou les communistes parlent, ils prononcent de vieilles phrases de parti, et cela sonne différemment parce qu'il n'y a pas un chaudron en cuivre, mais un tonneau en bois. En vérité, on n'a rien appris du tout, du tout, du tout, de bien des côtés. Mais ce qui compte, c'est qu'on apprenne quelque chose, que cette terrible guerre mondiale, comme on l'appelle, mais qui était en fait une révolution mondiale, nous dise quelque chose.
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Et là, on peut vraiment dire que dans les masses les plus larges, on est préparé à entendre quelque chose de nouveau. Mais dans les grandes masses, on écoute ce que disent les dirigeants. Il y a une bonne compréhension, un bon sens chez les masses populaires non éduquées, et on a toujours pu compter sur la compréhension lorsqu'on propose quelque chose de vraiment moderne, quelque chose qui peut être qualifié de moderne dans le meilleur sens du terme. Cela s'explique en partie par le fait que les masses ne sont pas éduquées. Mais dès que les gens entrent dans le type d'éducation que l'on peut avoir depuis les trois ou quatre derniers siècles, cette caractéristique d'inculture disparaît. Si l'on considère l'enseignement bourgeois actuel, de l'école primaire jusqu'à l'université - et ce sera encore pire lorsque l'école unique socialiste sera fondée, car tout ce que l'école primaire bourgeoise a fait de mal y sera présent dans la plus grande mesure -, on voit bien que l'enseignement bourgeois n'a pas de sens : ce qui se fait dans les écoles forme les esprits et les rend étrangers à la vie. Il faut sortir de tout cela, il faut vraiment se mettre sur ses propres jambes dans la vie spirituelle si l'on veut sortir de cette méformation. Mais, voyez-vous, c'est grâce à cette méformation que les dirigeants prolétariens, grands et petits, sont devenus ainsi. Ils ont dû s'approprier cette formation ; cette formation se trouve dans nos écoles et dans les écrits populaires, elle se trouve partout. Et c'est là que l'on commence à avoir le cerveau desséché et que l'on n'est plus accessible aux faits, mais que l'on s'arrête aux programmes de parti et aux opinions que l'on a greffés et martelés. Même la révolution mondiale peut alors arriver, on continue à siffler les vieux programmes.
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Vous voyez, c'est essentiellement ce sort qui a été réservé à ce qui a été voulu dans de nombreuses directions avec ce livre "Les points essentiels de la question sociale" et les conférences. On y a vraiment tenu compte de ce dont le prolétariat a absolument besoin aujourd'hui, de ce qui est nécessaire compte tenu de la situation actuelle. On l'a compris au début [dans le prolétariat], mais ensuite ceux qui sont les dirigeants du prolétariat dans les différents groupes de partis ne l'ont pas compris. Cela dit, je ne veux pas être trop injuste et je ne veux pas presser la vérité ; je ne veux pas affirmer que ces dirigeants, par exemple, ne comprennent pas ce livre, car je ne peux pas supposer qu'ils l'ont lu, qu'ils le connaissent. Je n'affirmerais pas quelque chose de juste si je disais : ils ne peuvent pas comprendre ce livre. Mais ils ne peuvent absolument pas se décider à comprendre que quelque chose d'autre soit nécessaire que ce qu'ils pensent depuis des décennies. Leur cerveau est devenu trop sec, trop rigide pour cela. Et c'est pourquoi ils s'en tiennent à ce qu'ils ont pensé depuis longtemps et trouvent que ce qui est le contraire de toute utopie, c'est une utopie. Car, voyez-vous, le livre "Les points essentiels" tient pleinement compte du fait qu'on ne peut plus aujourd'hui se mouvoir dans des utopies dans le sens des Saint-Simon, Fourier, Proudhon et ainsi de suite, mais aussi du fait qu'on ne peut plus jamais se placer du point de vue : L'évolution se fera d'elle-même. Car ce que Marx et Engels ont vu, ce qui s'est développé [à leur époque], ce dont ils ont tiré leurs conclusions, on ne peut plus en tirer de conclusions aujourd'hui, car la guerre mondiale l'a balayé, il n'est plus là sous sa forme véritable. Celui qui dit aujourd'hui la même chose que Marx et Engels, dit quelque chose que Marx n'aurait jamais dit. Il a eu peur de ses partisans, car il a dit : en ce qui me concerne, je ne suis pas marxiste. - Et aujourd'hui, il dirait : à l'époque, les faits étaient encore différents ; à l'époque, je tirais mes conclusions de faits qui n'avaient pas encore été modifiés, changés, comme la guerre mondiale a tout changé par la suite.
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Mais, voyez-vous, ces humains qui ne peuvent rien apprendre des événements, qui ont aujourd'hui la même attitude que les anciens catholiques vis-à-vis de leurs évêques et de leurs papes, ne peuvent même pas imaginer qu'une chose telle que le marxisme doit être développée dans le sens des faits. C'est ce que font les socialistes, mais aussi les bourgeois. Les cercles les plus larges le font ainsi. Les bourgeois le font naturellement de manière somnolente, l'âme complètement endormie, les autres le font de telle sorte qu'ils se trouvent au milieu et voient l'effondrement, mais qu'ils ne veulent pas s'attendre aux faits qui se révèlent ainsi. Aujourd'hui, nous avons justement besoin que quelque chose de nouveau arrive parmi les humains. Et c'est pourquoi il est nécessaire de comprendre quelque chose [comme la triarticulation] qui n'est pas une utopie, mais qui compte justement avec les faits. Si, de ce côté, on appelle ce qui compte ainsi avec les faits, l'ergotage, on pourrait en fait être tout à fait satisfait. Car si les gens appellent ce qu'ils font avancer une ligne droite, alors il faut, pour faire quelque chose de raisonnable, tirer dans le sens du poil, pour amener ce qui est déraisonnable dans une autre direction, raisonnable. Mais vous voyez, ceux qui comprennent encore ce qui est raisonnable devraient approfondir ce qui est présenté ici. Et c'est à cela que peuvent servir ces soirées.
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Non, il y a longtemps que l'on a essayé de mettre en pratique ce que l'on a tiré des faits. Et c'est ainsi que nous nous sommes réunis depuis des semaines - je n'ai pas besoin de répéter toutes ces choses, vous pouvez encore poser des questions ou discuter des pour et des contre à l'issue de cet exposé -, nous nous sommes réunis depuis des semaines pour mettre sur pied ce que nous appelons le corps des conseils d'entreprise. Nous avons essayé de créer ces conseils d'entreprise à partir des faits actuels nécessaires, de les créer vraiment de telle sorte qu'ils viennent de la simple vie de l'économie, qu'ils ne viennent pas de la vie politique, qui ne peut pas constituer la base de la vie de l'économie. Car si l'on regarde les faits en face aujourd'hui, il faut se tenir strictement sur le terrain de l'organisme social triarticulé. Et celui qui ne veut pas de cette triarticulation aujourd'hui va à l'encontre de la nécessité historique de l'évolution de l'humanité. Aujourd'hui, il doit en être ainsi, comme je l'ai souvent expliqué : que la vie spirituelle soit placée sur elle-même, que la vie économique soit placée sur elle-même, que la vie de droit ou politique soit administrée démocratiquement. Et dans la vie économique, le premier pas vers un façonnement réellement social doit être fait avec les conseils d'entreprise. Mais comment cela peut-il se faire ? Uniquement en posant d'abord la question : maintenant oui, il y a l'impulsion de l'organisme social triarticulé, c'est nouveau par rapport à toutes les anciennes momies de parti ; y a-t-il quelque chose d'autre de nouveau ? Les imbéciles prétendent aujourd'hui que les idées ne font que tourbillonner dans l'air. Si l'on écoute les discussions, elles apportent toutes sortes de choses négatives, mais elles n'apportent rien qui puisse être mis en parallèle avec la triarticulation de l'organisme social. Tout cela n'est que de l'eau de rose lorsque les socialistes affirment que les idées ne font que pendre dans l'air - comme cela a été dit dans une revue nouvellement créée, lors d'une discussion sur la triarticulation.
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Il s'agit tout d'abord qu’on lance la question et d'y voir clair : N'y a-t-il rien d'autre ? Ensuite, on s'en tient d'abord à la triarticulation de l'organisme social, jusqu'à ce qu'on puisse la réfuter de manière objective, jusqu'à ce qu'on puisse placer à côté d'elle des choses objectivement équivalentes. On ne peut plus discuter des anciens programmes de parti, c'est la guerre mondiale qui en a discuté ; celui qui a vraiment de la compréhension sait que ces anciennes idées de parti sont réfutées par la catastrophe de la guerre mondiale. Mais alors, si l'on ne peut pas répondre à cette question en plaçant à côté quelque chose d'objectivement équivalent, et si l'on veut aller plus loin, alors on peut honnêtement se dire : nous travaillons donc dans le sens de la triarticulation de l'organisme social. Disons-le franchement : les anciennes structures de parti ont perdu leur signification ; il faut travailler dans le sens de la triarticulation.
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Lorsque j'ai pris la parole avant-hier à Mannheim, un monsieur s'est présenté à la fin et a dit : "Ce que Steiner a dit est bien, mais ce n'est pas ce que nous voulons ; nous ne voulons pas ajouter un nouveau parti à tous les anciens partis. Les gens qui veulent une telle chose doivent entrer dans les anciens partis et y travailler. -- Je ne pouvais que répondre : j'ai suivi la vie politique de très près depuis longtemps, alors que le monsieur qui parlait n'était pas encore né. Et bien que j'aie été familiarisé par ma vie avec tout ce qui fonctionnait socialement comme force, je n'ai jamais pu agir au sein d'un parti quelconque ou m'y tenir, et il ne me vient pas à l'esprit, à la fin de ma sixième décennie, de devenir un humain de parti : je ne veux rien avoir à faire ni avec un autre parti ni avec un parti que j'aurais fondé moi-même. Je ne veux pas non plus avoir affaire à un parti que j'aurais fondé moi-même ; personne ne doit craindre qu'un nouveau parti soit fondé par moi. Car j'ai appris que chaque parti, par la force des choses, devient stupide au bout d'un certain temps, précisément parce que je ne me suis jamais engagé dans aucun parti. Et j'ai appris à plaindre les gens qui n'ont pas compris cela. C'est pourquoi personne ne doit craindre qu'un nouveau parti vienne s'ajouter aux anciens. C'est pourquoi nous n'avons pas fondé de nouveau parti, mais la Fédération pour la triarticulation de l'organisme social s'est réunie pour représenter les idées de l'organisme triarticulé, dont le caractère non utopiste, dont le caractère réel est tout de même perçu par un certain nombre de personnes. Les personnes qui le reconnaissent devraient aussi l'affirmer honnêtement et sincèrement.
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Car cela non plus ne doit pas arriver : Il y a une pièce de théâtre dans laquelle un coq chante à l'aube, et chaque fois que le coq a chanté, le soleil se lève. Eh bien, le coq ne peut pas voir le contexte, c'est pourquoi il croit que lorsqu'il chante, c'est que le soleil répond à son appel, qu'il vient parce qu'il a chanté, qu'il a fait en sorte que le soleil se lève. - Enfin, si quelqu'un dans la vie non sociale se laisse aller à une telle illusion, comme ce coq qui chante sur le fumier et veut faire se lever le soleil, cela ne fait rien. Mais si, dans certaines circonstances, il arrivait que l'idée des conseils d'entreprise véritablement économiques prospère sur le sol de l'organisme triarticulé et que les personnes qui s'en occupent veuillent nier l'origine, à savoir que l'impulsion de la triarticulation a mis cette idée en mouvement, et si ces personnes croient que parce qu'on a chanté, les conseils d'entreprise vont venir, alors ce serait la même erreur, et une erreur très fatale. Mais cela ne doit pas arriver. Ce qui se passe dans cette direction [les conseils d'entreprise], ce qui a été entrepris ici, ne doit pas être dissocié, cela doit rester en rapport avec l'impulsion bien comprise de la triarticulation de l'organisme social. Et ceux qui veulent réaliser les conseils d'entreprise dans le sens de cette impulsion ne peuvent jamais accepter que les conseils d'entreprise soient créés de manière unilatérale et que l'on ne crie que "conseils d'entreprise, conseils d'entreprise". Ce n'est pas suffisant. Cela n'a de sens que si l'on aspire en même temps à tout ce qui doit être recherché par l'impulsion de l'organisme social triarticulé. C'est ce qui est important. Car si vous voulez vraiment comprendre ce qui est écrit dans les "points essentiels", vous devez vous placer du point de vue que l'on peut apprendre des faits que les quatre ou cinq dernières années ont offerts. Pour celui qui voit clair dans ces faits, ils apparaissent comme s'il avait vécu des siècles, et pour celui qui voit les programmes des partis comme si leurs promoteurs avaient dormi pendant des siècles. Aujourd'hui, cela doit être envisagé clairement et sans réserve.
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Ce que je viens de vous raconter, j'aurais bien sûr tout aussi bien pu l'écrire en préambule de ce livre. Seulement, on a pu constater ces derniers mois à quel point les programmes des partis sont actuellement rigides et stériles. Mais il serait utile que cela figure en préambule de ce livre. Je vous ai raconté aujourd'hui beaucoup de choses qui n'y figurent pas, puisque vous avez décidé, me semble-t-il, de vous réunir ici pour étudier correctement les graves questions sociales actuelles dans le prolongement de ce livre. Mais avant de s'y atteler, il faut déjà se rendre compte que l'on ne peut pas continuer à trottiner dans le vieux style des programmes et des modèles de parti, mais que l'on doit se décider à aborder aujourd'hui les faits conformément à la réalité et à tirer un trait sur tout ce qui ne tient pas compte de ces nouveaux faits. Ce n'est qu'ainsi que vous comprendrez correctement ce qui doit être réalisé, précisément avec cette impulsion vers un organisme social triarticulé. Et vous le comprendrez de la bonne manière si vous trouvez que chaque phrase de ce livre est susceptible d'être mise en pratique, d'être transformée en réalité immédiate. Et la plupart de ceux qui disent qu'ils ne comprennent pas ou qu'il s'agit d'utopies et autres, n'ont tout simplement pas le courage de penser assez fort aujourd'hui pour que les pensées puissent intervenir dans la réalité. Ceux qui crient toujours "dictature du prolétariat", "conquête du pouvoir", "socialisme", pensent généralement très peu. Il n'est donc pas possible d'intervenir dans la réalité avec ces modèles de mots. Mais ils viennent ensuite dire qu'on ne propose [avec les "points essentiels"] que quelque chose qui est une utopie. Ce n'est que dans l'esprit des gens qui n'y comprennent rien que cela devient une utopie.
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C'est pourquoi il faudrait faire comprendre à ces gens ce que Goethe a dit un jour, sous une forme un peu différente et en se référant à autre chose, en se moquant du physiologiste Haller, qui était un naturaliste ossifié. Haller avait inventé la parole :
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 aucun esprit créé ne pénètre à l'intérieur de la nature.
Heureux celui à qui elle indique seulement l'enveloppe extérieure ! Cela répugnait à Goethe, et il disait : "À l'intérieur de la nature" - ô philistin ! - "Aucun esprit créé ne pénètre". "Heureux celui à qui elle indique seulement l'enveloppe extérieure !" J'entends cela se répéter depuis soixante ans, je le maudis, mais en cachette.
La nature n'a ni noyau ni enveloppe, elle est tout en une seule fois.
Examine-toi donc le plus possible pour savoir si tu es le noyau ou la coquille !
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Ceux qui parlent de la triarticulation de l'organisme social comme d'une utopie, on aimerait aussi leur dire : "Examine-toi seulement si ce qui hante ton cerveau est soi-même une utopie ou une réalité. -- On trouvera alors que tous les corbeaux ont la plupart du temps des utopies à l'intérieur et que la réalité dans leur propre tête devient donc aussi une utopie ou une idéologie, ou comme ils l'appellent alors. C'est pourquoi il est si difficile aujourd'hui de faire passer la réalité, parce que les gens se sont tellement barré l'accès à la réalité.
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Mais nous devons nous dire que nous devons travailler sérieusement, sinon nous ne pourrons pas passer de notre volonté à l'action ; et c'est ce qui importe, que nous passions de notre volonté à l'action. Et si nous devions renoncer à tout, parce que nous le reconnaissons comme une erreur, alors nous devrions, pour pouvoir passer du vouloir à l'action, nous tourner vers la vérité, que nous voulons percer à jour en tant que vérité, car rien d'autre ne peut conduire du vouloir à l'action que la poursuite impitoyable et courageuse de la vérité. Cela devrait en fait être écrit comme une devise, comme un slogan, avant les études de ces soirées. Je voulais vous présenter ce soir une préface à ces soirées d'étude. J'espère que ce préambule ne vous empêchera pas de cultiver ces études de telle sorte qu'enfin, avant qu'il ne soit trop tard, des pensées qui portent en elles des germes d'action puissent s'insérer dans le monde de manière fructueuse.
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Nous aurons l'occasion d'en discuter.
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Rudolf Steiner : Le livre "Les points essentiels de la question sociale" est écrit d'une manière particulière, et ce pour deux raisons : premièrement, il est écrit de telle manière qu'il est en fait entièrement tiré de la réalité. Certaines personnes qui lisent le livre n'y pensent pas. Je peux aussi comprendre que cela ne soit pas pleinement pris en compte aujourd'hui. J'ai déjà parlé ici, dans ce cercle - mais tous ceux qui sont là aujourd'hui n'étaient pas présents - de la façon dont les gens pensent vraiment aujourd'hui. J'ai notamment fait référence à l'exemple du professeur d'économie nationale, Lujo Brentano, qui l'a si bien présenté dans le dernier numéro de la "Feuille jaune" ; je veux le répéter brièvement, car je veux m'y rattacher un peu. Cette lumière de la théorie d'économie politique/de peuple actuelle de l'université - il est le premier, pour ainsi dire - a développé le concept d'entrepreneur et a tenté de caractériser les caractéristiques de l'entrepreneur à partir de sa pensée éclairée. Je n'ai pas besoin d'énumérer la première et la deuxième caractéristique ; la troisième est que l'entrepreneur est celui qui met ses moyens de production au service de l'ordre social à son propre compte et à ses propres risques. Il a maintenant cette notion d'entrepreneur, et il l'applique. Il arrive alors à l'étrange résultat que l'ouvrier prolétarien d'aujourd'hui est en fait aussi un entrepreneur, car il correspond à son concept d'entrepreneur en ce qui concerne la première, la deuxième et la troisième caractéristique. Car l'ouvrier a sa propre force de travail comme moyen de production ; il en dispose, et par rapport à celle-ci, il s'adresse au processus social à son propre compte et à ses propres risques. - Ainsi, cette lumière de l'économie de peuple intègre très bien le concept de travailleur prolétarien dans son concept d'entrepreneur. Vous voyez, c'est ainsi que pensent justement les humains qui se font des concepts qui n'ont aucun sens ; ils n'ont aucun sens si l'on exige des concepts qui doivent être réellement applicables à la réalité. Mais même si vous ne l'acceptez peut-être pas, on peut dire tranquillement que plus de quatre-vingt-dix pour cent de tout ce qui est enseigné ou imprimé aujourd'hui utilise de tels concepts ; si on veut les appliquer à la réalité, cela ne marche pas plus que le concept d'entrepreneur de Lujo Brentano. C'est ainsi dans la science, c'est ainsi dans la science sociale, c'est ainsi partout, c'est pourquoi les gens ont désappris à comprendre ce qui travaille avec des concepts conformes à la réalité.
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Prenez par exemple la base de la triarticulation de l'organisme social. N'est-ce pas, on peut les poser de différentes manières, ces bases, parce que la vie a besoin de nombreuses bases. Mais l'une d'entre elles est que l'on sait que l'époque récente a vu l'émergence de ce que l'on pourrait appeler l'impulsion de la démocratie. La démocratie doit consister en ce que tout humain devenu majeur puisse établir son rapport de droit dans des parlements démocratiques, directement ou indirectement par rapport à tout autre humain devenu majeur. Mais justement, si l'on veut honnêtement et sincèrement instaurer cette démocratie dans le monde, on ne peut pas gérer les affaires spirituelles dans le sens de cette démocratie, car chaque humain devenu majeur devrait alors décider de ce qu'il ne comprend pas. Les affaires spirituelles doivent être réglées à partir de la compréhension de la chose, c'est-à-dire qu'elles doivent être placées sur elles-mêmes ; elles ne peuvent donc absolument pas être administrées dans un parlement démocratique, mais elles doivent avoir leur propre administration, qui ne peut pas être démocratique, mais qui doit être issue de la chose. Il en va de même dans la vie de l'économie ; la chose doit être gérée à partir de l'expérience économique et du vivre dedans la vie de l'économie. C'est pourquoi la vie de l'économie d'un côté et la vie de l'esprit de l'autre doivent être séparées du parlement démocratique. C'est ainsi que naît l'organisme social triarticulé.
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Là y a maintenant à Tübingen le professeur Heck, c'est lui - j'en ai déjà parlé - qui a dit qu'il ne fallait absolument pas se laisser aller à dire que le rapport salarial habituel, où l'on est rémunéré pour son travail, avait quelque chose d'humiliant pour le prolétaire, car Caruso était aussi dans un rapport salarial. La différence ne serait pas de principe : Caruso chante et reçoit son salaire, et le prolétaire ordinaire travaille et reçoit aussi son salaire ; et lui, en tant que professeur, reçoit aussi son salaire lorsqu'il donne une conférence. La seule différence entre Caruso et le prolétaire serait que Caruso reçoit trente à quarante mille marks pour une soirée et le prolétaire un peu moins. Mais il ne s'agit pas d'une différence de principe, seulement d'une différence concernant la somme de la rémunération. Et donc, selon ce professeur plein d'esprit, on n'a pas besoin de ressentir quelque chose de dégradant dans la rémunération ; lui non plus ne le ressent pas ainsi. - Ce n'est qu'une parenthèse. Mais ce professeur intelligent a également écrit un long article contre la triarticulation. Là, il part de ce que si l'on articule en trois, on en arrive à trois parlements. - Et maintenant, il montre que ce n'est pas possible avec trois parlements, car il dit : dans le parlement économique, le petit artisan ne comprendra pas le point de vue du grand industriel, et ainsi de suite. - C'est là que le bon professeur s'est fait ses idées sur la triarticulation, et contre ces idées - que je trouve encore bien plus stupides que le professeur Heck ne les trouve ; je les critiquerais aussi jusqu'à la moelle -, il s'en prend à elles, mais il les a faites lui-même. Il s'agit en effet de ne pas juxtaposer trois parlements, mais d'en retirer ce qui n'a pas sa place dans un parlement. Il fait simplement trois parlements et dit : ce n'est pas possible. - C'est ainsi que l'on vit dans des concepts étrangers à la réalité et que l'on juge les autres en fonction de ceux-ci.
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Maintenant, dans l'économie nationale, la théorie d'économie de peuple, est presque seulement inclus ce que sont des concepts irréels. Mais, voyez-vous, je ne pourrais pas, maintenant que le temps presse, écrire une bibliothèque entière dans laquelle seraient répertoriés tous les concepts d'économie de peuple. C'est pourquoi se trouve naturellement dans les "points essentiels" une multitude de concepts qui doivent être abordés/discutés de manière appropriée. Il me suffit par exemple d'attirer l'attention sur ce qui suit :
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N'est-il pas vrai qu'à une époque que nous avons dépassée, les relations sociales étaient essentiellement le fruit de la conquête ? Un territoire quelconque était occupé par un peuple ou une race ; un autre peuple faisait irruption et conquérait le territoire. Les races ou les peuples qui étaient auparavant à l'intérieur ont été soumis au travail. Le peuple conquérant a pris le sol en possession, ce qui a créé un certain rapport entre les conquérants et les conquis. Les conquérants, du fait qu'ils étaient des conquérants, avaient le sol en possession. De ce fait, ils étaient les plus forts économiquement, les conquis étaient les plus faibles économiquement, et il s'en est formé ce qui est devenu un rapport de droit. C'est pourquoi, à presque toutes les époques anciennes de l'évolution historique, on a des rapports de droit fondés sur des conquêtes, c'est-à-dire des privilèges et des droits de désavantage. Les temps sont maintenant venus où il n'était plus possible de conquérir librement. Vous pouvez étudier la différence entre la conquête libre et la conquête liée en regardant par exemple le début du Moyen Âge. Vous pouvez étudier comment certains peuples, les Goths, sont descendus vers le sud, mais dans des régions entièrement occupées ; ils ont alors été amenés, en ce qui concerne l'ordre social, à faire autre chose que les Francs, qui sont allés vers l'ouest et n'y ont pas trouvé de régions entièrement occupées. Cela a donné naissance à d'autres droits de conquête. À l'époque moderne, ce ne sont pas seulement les droits fonciers issus des conquêtes qui ont agi, mais aussi les droits des humains qui avaient des privilèges de possession et qui pouvaient désormais s'approprier les moyens de production grâce au pouvoir économique. La possession des moyens de production, c'est-à-dire la propriété privée des capitaux, s'est ajoutée au droit foncier au sens actuel du terme. Cela a donné lieu à des rapports de droit issus de rapports économiques. Comme vous le voyez, ces rapports de droit sont nés tout seuls à partir de rapports économiques.
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Maintenant, les humains viennent et veulent des notions de pouvoir économique, d'importance économique de la terre, ils veulent des concepts de moyens d'exploitation, de moyens de production, de capitaux, etc., mais ils n'ont pas vraiment de compréhension profonde du cours des choses. Ils prennent alors les faits superficiels et n'arrivent pas à comprendre ce qui se cache derrière les droits fonciers, derrière les rapports de force en ce qui concerne les moyens de production. Bien sûr, toutes ces choses sont prises en compte dans mon livre. Là est pensé correctement ; là est, quand est parlé de droits, à partir de la conscience de la manière dont le droit s'est développé à travers les siècles ; quand on parle de capital, on parle de la conscience de comment dont le capital est devenu. Là est évité soigneusement d'utiliser un concept qui n'est pas entièrement saisi à partir de sa genèse ; c'est pourquoi ces concepts se présentent différemment que dans les manuels habituels d'aujourd'hui.
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Mais aussi quelque chose d'autre est pris en compte. Prenons un fait précis, n'est-ce pas, le fait que le protestantisme est né un jour. Dans les livres d'histoire, on raconte très souvent que Tetzel a parcouru l'Europe centrale et que les gens étaient indignés par la vente des indulgences et autres choses de ce genre. Mais ce n'était pas seulement cela, ce n'est qu'une vision superficielle. L'élément principal était le fait qu'il y avait à Gênes une banque pour le compte de laquelle - et non pour le compte du pape - ce marchand d'indulgences se déplaçait en Allemagne, car cette banque avait accordé des crédits au pape pour ses autres besoins. Toute cette histoire était une entreprise capitaliste. Cet exemple du commerce des indulgences en tant qu'entreprise capitaliste, où même le spirituel a été négocié, vous permet d'étudier - ou plutôt, si l'on commence à étudier, on arrive peu à peu à la conclusion - que finalement, tout pouvoir du capital se ramène à la suprématie du spirituel. Si vous étudiez comment le capital a acquis son pouvoir, vous trouverez partout la suprématie du spirituel. Et c'est vraiment ainsi. N'est-ce pas, celui qui est intelligent, celui qui est débrouillard, a un pouvoir plus grand que celui qui n'est pas intelligent, qui n'est pas débrouillard. Et c'est ainsi que naissent, de façon justifiée ou non, beaucoup de choses qui sont des concentrations de capital. Il faut en tenir compte lorsqu'on envisage le concept de capital. Ces études réelles permettent de comprendre que le capital repose sur le développement du pouvoir spirituel et que le pouvoir de l'ancien esprit théocratique est venu s'ajouter aux droits fonciers, aux droits de conquête, d'un autre côté. L'ancienne Église est à l'origine d'une grande partie de ce qui a ensuite été transféré dans le capitalisme moderne. Il existe un lien secret entre le pouvoir capitaliste moderne et le pouvoir de l'ancienne Église. Et tout cela s'est rassemblé en un méli-mélo dans l'État de pouvoir moderne. Là-dedans, vous trouvez les restes de l'ancienne théocratie, les restes des anciennes conquêtes. Et finalement, les conquêtes modernes sont venues s'y ajouter, et la conquête la plus moderne serait maintenant la conquête de l'État par le socialisme. Mais en réalité, ce n'est pas ainsi qu'il faut procéder. Il doit y avoir quelque chose de nouveau, qui fasse complètement table rase de ces anciens concepts et impulsions. C'est pourquoi il est important que nous nous penchions aussi, dans nos études, sur les notions qui sont à la base de tout cela. Nous devons aujourd'hui expliquer précisément à tous ceux qui veulent parler de choses sociales ce qu'est le droit, ce qu'est le pouvoir et ce qui est en réalité un bien [économique], un bien sous forme de marchandises et autres. C'est dans ce domaine que les plus grandes erreurs sont commises. Je veux par exemple attirer votre attention sur l'une d'entre elles ; si vous n'y êtes pas attentifs, vous comprendrez mal beaucoup de choses dans mon livre.
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Aujourd'hui, on pense souvent que la marchandise est du travail stocké, que le capital est aussi du travail stocké. - Vous pouvez dire qu'il est inoffensif d'avoir de telles notions. Ce n'est pas inoffensif, car de tels concepts empoisonnent toute la pensée sociale. Vous voyez, qu'en est-il du travail - le travail en tant que dépense/application de force de travail ? Oui, il y a une grande différence entre, par exemple, utiliser ma force musculaire physique en faisant du sport et couper du bois. Si je fais du sport, j'use ma force musculaire physique ; je peux être aussi fatigué et devoir remplacer ma force musculaire autant que celui qui coupe du bois. Je peux appliquer la même quantité de travail au sport qu'à la coupe de bois. La différence ne réside pas dans le fait que la force de travail doit être remplacée - elle doit bien sûr être remplacée - mais dans le fait que l'une des forces de travail est utilisée uniquement pour moi, dans un sens égoïste, l'autre dans un sens social pour la société. C'est la fonction sociale qui différencie ces choses. Si je dis maintenant que quelque chose est du travail accumulé, je ne tiens pas compte du fait que le travail cesse en fait d'être dans une chose quelconque au moment où l'on ne travaille plus. Je ne peux pas dire que le capital est du travail accumulé, mais je dois dire que le travail n'existe que tant qu'il est effectué. Mais dans notre ordre social actuel, le capital conserve le pouvoir d'appeler à nouveau le travail à tout moment. Ce n'est pas dans le fait que le capital soit du travail accumulé que réside la fatalité, comme le pense Marx, mais dans le fait que le capital donne le pouvoir d'appeler à son service un nouveau travail - non pas un travail accumulé - mais un nouveau travail. Il dépend beaucoup de cela, et il dépendra encore beaucoup de cela, que l'on parvienne à des notions claires, fondées sur la réalité, sur ces choses. Et c'est à partir de telles notions, qui sont maintenant totalement ancrées dans la réalité, que ce livre est écrit. Il ne tient pas compte de ces notions, qui étaient tout à fait utiles pour l'éducation du prolétariat. Mais aujourd'hui, alors que l'on doit construire quelque chose, ces notions n'ont plus de sens.
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Vous voyez, quand je dis que le capital est du travail accumulé, c'est bon pour l'éducation du prolétariat ; il a reçu les sentiments qu'il devait recevoir. Il n'était pas important que le concept soit fondamentalement faux - on peut éduquer même avec des concepts fondamentalement faux. Mais on ne peut construire quelque chose qu'avec des concepts corrects. C'est pourquoi nous avons aujourd'hui besoin de concepts corrects dans tous les domaines de l'économie de peuple et nous ne pouvons pas continuer à travailler avec des concepts erronés. Ce n'est pas par frivolité que je dis que l'on peut aussi éduquer avec des concepts erronés, mais en vertu des principes généraux de l'éducation. Vous voyez, lorsque vous racontez des contes de fées aux enfants, vous ne voulez pas non plus construire avec ces choses que vous développez ; dans l'éducation, quelque chose d'autre entre en ligne de compte que ce qui entre en ligne de compte pour la construction dans la réalité physique. Il faut travailler avec des concepts réels. Un concept tel que "le capital est du travail accumulé" n'est pas un concept. Le capital est un pouvoir et confère le pouvoir de mettre à tout moment à son service le travail qui se crée. C'est un vrai concept avec une logique de fait. Il faut travailler avec des concepts vrais dans ces domaines. C'est ce qui a été tenté dans les "points essentiels". C'est pourquoi je pense qu'une grande partie de ce qui n'y figure pas en termes de définition des termes, de caractéristiques des termes, doit être élaborée. Et celui qui peut contribuer à l'élaboration de ce dont on a besoin pour comprendre le mode de pensée, la base de ce livre, apportera une très bonne contribution à ces soirées d'étude. C'est donc ce qui compte, mes très chers présents, c'est ce qui compte tout particulièrement.
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Oui, n'est-ce pas, il faudrait écrire un dictionnaire si l'on voulait clarifier tous les termes - mais ce qu'est le "capital" peut maintenant être réglé en une seule soirée d'étude de ce genre. Sans que l'on ait clairement compris aujourd'hui : qu'est-ce que le capital ? Qu'est-ce que la marchandise ? Qu'est-ce que le travail ? Qu'est-ce que le droit ? -, sans ces notions, on ne peut pas avancer. Et ces notions sont tout à fait confuses dans les cercles les plus larges ; elles doivent avant tout être rectifiées. Aujourd'hui, on se désespère quand on parle de l'ordre social avec des gens ; ils ne peuvent pas participer parce qu'ils n'ont pas appris à maîtriser la réalité. C'est ce qu'il faut faire.