Rudolf Steiner : Mes très chers
présents ! Je ne vais pas anticiper ce
soir sur ce qui doit être mis en place
ici en tant que soirées d'étude qui se
tiendront sur la base du livre "Les
points essentiels de la question
sociale", mais je vais essayer de vous
donner une sorte d'introduction à ces
soirées. Par cette introduction, je
voudrais vous faire ressentir les
points de vue qui ont présidé à
l'écriture de ce livre. Il a été écrit
avant tout en fonction de l'actualité
immédiate, de la conviction que la
question sociale a elle aussi pris une
nouvelle forme à la suite des
événements actuels et qu'il est
nécessaire de parler aujourd'hui de la
question sociale d'une manière tout à
fait différente de celle dont on
parlait, de quelque côté que ce soit,
de la question sociale avant la
catastrophe de la guerre mondiale.
Avec ce livre, on a en quelque sorte
essayé, à ce moment de l'évolution de
l'humanité où la question sociale
devient particulièrement urgente et où
tout homme qui vit consciemment
aujourd'hui, qui ne vit pas la vie de
l'humanité en somnolant et en dormant,
devrait savoir quelque chose sur ce
qui doit se passer dans le sens de ce
qu'on appelle habituellement la
question sociale. Il serait peut-être
bon de jeter un petit coup d'œil en
arrière aujourd'hui. J'aurai peut-être
à mentionner des choses - mais nous
les présenterons sous un jour un peu
différent de celui dans lequel elles
ont été présentées -, j'aurai à
mentionner des choses que vous
connaissez en partie.
|
01
|
Rudolf Steiner: Meine sehr verehrten
Anwesenden! Ich werde heute Abend
nicht demjenigen vorgreifen, was hier
eigentlich eingerichtet werden soll
als Studienabende, die abgehalten
werden auf Grundlage des Buches «Die
Kernpunkte der Sozialen Frage»,
sondern ich werde versuchen, Ihnen
eine Art von Einleitung zu diesen
Abenden zu geben. Ich möchte durch
diese Einleitung in Ihnen eine
Empfindung davon hervorrufen, aus
welchen Gesichtspunkten heraus dieses
Buch geschrieben worden ist. Es ist
vor allen Dingen geschrieben worden
aus der unmittelbaren Gegenwart
heraus, aus der Überzeugung, daß auch
die soziale Frage durch die Ereignisse
der Gegenwart eine neue Gestalt
angenommen hat und daß es notwendig
ist, heute über die soziale Frage ganz
anders zu reden, als von irgendeiner
Seite her über die soziale Frage vor
der Weltkriegskatastrophe geredet
worden ist. Mit diesem Buch ist
gewissermaßen versucht worden, jetzt
in diesem Zeitpunkte der
Menschheitsentwicklung, in welchem
die soziale Frage ganz besonders
dringend wird und in welchem
eigentlich jeder Mensch, der bewußt
heute mitlebt, der nicht schläfrig und
schlafend das Leben der Menschheit
mitlebt, etwas wissen sollte über das,
was zu geschehen hat im Sinne dessen,
was man gewöhnlich die soziale Frage
nennt. Da wird es vielleicht zunächst
ganz gut sein, wenn wir heute ein
bißchen zurückblicken. Ich werde ja
dabei vielleicht Dinge zu erwähnen
haben -- aber wir werden sie dann in
ein etwas anderes Licht rücken, als
sie gerückt worden sind —, ich werde
Dinge zu erwähnen haben, welche Ihnen
zum Teil bekannt sind.
|
Vous savez probablement que ce qui
est dit aujourd'hui sur la question
sociale est dit depuis relativement
longtemps. Et on cite aujourd'hui les
noms de Proudhon, Fourier, Louis Blanc
comme les premiers à avoir traité la
question sociale jusqu'au milieu du
XIXe siècle. Vous savez aussi que la
manière dont cette question sociale a
été traitée jusqu'au milieu du XIXe
siècle est appelée par les
représentants actuels, du moins par de
nombreux représentants actuels de la
question sociale, "l'ère des utopies
sociales". Il est bon de préciser ce
que l'on entend par là lorsque l'on
dit qu'à son premier stade, la
question sociale est apparue de telle
sorte qu'elle vivait dans un "âge des
utopies". Mais on ne peut pas parler
de cette chose dans un sens absolu, on
ne peut en fait parler qu'à partir des
sentiments des représentants de la
question sociale dans le présent. Ils
ressentent les choses comme je veux
les décrire maintenant. Ils sentent
que toutes les questions sociales qui
sont apparues à l'époque dont je veux
parler en premier lieu étaient au
stade de l'utopie. Et qu'est-ce que
les gens entendent par là quand ils
disent que la question sociale était
alors au stade de l'utopie ? Ils
entendent par là - on l'a déjà
remarqué à l'époque ; Saint-Simon et
Fourier l'ont bien remarqué - qu'il y
a, même après la Révolution française,
des humains d'une certaine minorité
sociale qui sont en possession des
moyens de production et aussi d'autres
biens humains, et qu'il y a un grand
nombre d'autres humains - c'est même
la majorité - qui ne sont pas en
possession de tels biens. Ces
personnes ne peuvent travailler sur
les moyens de production qu'en se
mettant au service de ceux qui
possèdent les moyens de production et
aussi la terre - elles n'ont en fait
rien d'autre qu'elles-mêmes et leur
force de travail. On a noté que la vie
de cette grande masse de l'humanité
est une vie de détresse, en grande
partie dans la pauvreté, par
opposition à ceux qui sont en minorité
; et on a fait allusion à la situation
de la minorité et à la situation de la
majorité.
|
02
|
Sie wissen ja wahrscheinlich, daß
man das, was heute zur sozialen Frage
vorgebracht wird, seit verhältnismäßig
langer Zeit vorbringt. Und es werden
ja auch heute die Namen Proudhon,
Fourier, Louis Blanc genannt als die
ersten, die bis in die Mitte des 19.
Jahrhunderts hinein die soziale Frage
behandelt haben. Sie wissen ja auch,
daß die Art, wie diese soziale Frage
bis in die Mitte des 19.$ Jahrhunderts
hinein behandelt wurde, von den
heutigen Vertretern, wenigstens von
vielen heutigen Vertretern der
sozialen Frage, genannt wird «das
Zeitalter der sozialen Utopien». Es
ist gut, sich klarzumachen, was man
eigentlich damit meint, wenn man sagt:
In ihrem ersten Stadium trat die
soziale Frage so auf, daß sie in einem
«Zeitalter der Utopien» lebte. Aber
man kann über diese Sache nicht im
absoluten Sinne reden, sondern man
kann eigentlich nur aus den
Empfindungen der Vertreter der
sozialen Frage in der Gegenwart reden.
Die empfinden so, wie ich es jetzt
schildern will. Sie empfinden, daß
alle sozialen Fragen, die in dem
Zeitalter auftraten, wovon ich zuerst
sprechen will, im Stadium der Utopie
waren. Und was verstehen die Leute
darunter, wenn sie sagen, die soziale
Frage war damals im Stadium der
Utopie? Darunter verstehen sie das hat
man ja auch schon dazumal bemerkt;
Saint-Simon und Fourier haben es gut
bemerkt —, daß da sind, auch nach der
Französischen Revolution, Menschen
einer gewissen sozialen Minderheit,
welche im Besitz der Produktionsmittel
und auch anderer menschlicher Güter
sind, und daß da sind eine große
Anzahl von anderen Menschen — es ist
sogar die Mehrzahl —, welche nicht in
solchem Besitze sind. Diese Menschen
können an den Produktionsmitteln nur
dadurch arbeiten, daß sie in die
Dienste derjenigen treten, die die
Produktionsmittel und auch den Boden
besitzen — sie haben im Grunde
genommen nichts anderes als sich
selbst und ihre Arbeitskraft. Man hat
bemerkt, daß das Leben dieser großen
Masse der Menschheit eine Bedrängnis
ist, zum großen Teil in Armut verläuft
im Gegensatz zu denjenigen, die in der
Minderheit sind; und man hat
hingewiesen auf die Lage der
Minderheit und auf die Lage der
Mehrheit.
|
Ceux qui ont écrit sur cette
situation sociale de l'humanité, comme
Saint-Simon et Fourier, mais aussi
Proudhon, sont partis d'un certain
postulat. Ils sont partis du principe
qu'il était nécessaire d'attirer
l'attention des humains sur ce point :
Voyez, la grande masse vit dans la
misère, dans l'absence de liberté,
dans la dépendance économique, ce
n'est pas une existence digne de
l'humain pour la grande masse. Il faut
changer cela. - Et on a alors imaginé
toutes sortes de moyens par lesquels
cette inégalité entre les humains
pouvait être modifiée. Mais il y avait
toujours une certaine condition
préalable, et cette condition
préalable était que l'on se disait :
si l'on sait ce qui fonde l'inégalité
et si l'on a des paroles suffisamment
fortes, si l'on a une conscience
morale suffisante pour attirer
fortement l'attention sur le fait que
la grande majorité des humains vit
dans la dépendance économique et
juridique et est pauvre, alors ce
discours touchera les cœurs, les âmes
de la minorité, des nantis, de la
minorité la plus favorisée. Et c'est
en faisant comprendre à cette minorité
que les choses ne peuvent pas rester
en l'état, qu'il faut apporter des
changements, qu'il faut mettre en
place un autre ordre social, qu'un
autre ordre social sera instauré. La
condition préalable était donc que les
humains se laissent entraîner à faire
quelque chose pour la libération de la
grande masse de l'humanité à partir de
l'élan de leur âme. Et on proposait
alors ce qu'il fallait faire. Et on
pensait que si la minorité, si les
gens qui sont les dirigeants, les
leaders, comprenaient que ce qu'on
voulait faire était bien, alors il y
aurait une amélioration générale de la
situation de l'humanité.
|
03
|
Diejenigen, die nun so wie
Saint-Simon und Fourier wie auch noch
Proudhon über diese soziale Lage der
Menschheit geschrieben haben, die sind
von einer gewissen Voraussetzung
ausgegangen. Sie sind ausgegangen von
der Voraussetzung, daß man notwendig
habe, die Menschen darauf hinzuweisen:
Seht, die große Masse lebt in Elend,
in Unfreiheit, in wirtschaftlicher
Abhängigkeit, das ist für die große
Masse kein menschenwürdiges Dasein.
Das muß geändert werden. — Und man hat
dann allerlei Mittel ausersonnen,
durch welche diese Ungleichheit unter
den Menschen geändert werden kann.
Aber es war immer eine bestimmte
Voraussetzung da, und diese
Voraussetzung war, daß man sich sagte:
Wenn man weiß, worinnen die
Ungleichheit begründet ist und wenn
man eindringliche Worte genug hat,
wenn man sittliches Bewußtsein selbst
genug hat, um stark darauf
hinzuweisen, daß die große Mehrzahl
der Menschen in wirtschaftlicher und
rechtlicher Abhängigkeit lebt und arm
ist, so wird diese Rede die Herzen,
die Seelen der Minderheit, der
Begüterten, der begünstigteren
Minderheit ergreifen. Und es wird
dadurch, daß diese Minderheit
einsieht, so kann es nicht bleiben,
man muß Änderungen herbeiführen, es
muß eine andere Gesellschaftsordnung
kommen, es wird dadurch eine andere
Gesellschaftsordnung herbeigeführt
werden. Also die Voraussetzung war
die, daß die Menschen sich
herbeilassen wer den, aus ihrem
innersten Seelenantrieb heraus etwas
zur Befreiung der großen Masse der
Menschheit zu tun. Und dann schlug man
vor, was man tun sollte. Und man
glaubte, wenn die Minderheit, wenn die
Menschen, die die leitenden, führenden
Menschen sind, einsehen, daß das gut
ist, was man tun will, dann wird eine
all gemeine Besserung der Lage der
Menschheit eintreten.
|
Beaucoup de choses extrêmement
intelligentes ont été dites de ce
côté-là, mais tout ce qui a été
entrepris dans ce sens est aujourd'hui
considéré comme utopique par la
plupart des représentants de la
question sociale. Cela signifie
qu'aujourd'hui, on ne compte plus sur
le fait qu'il suffise de dire : c'est
ainsi qu'il faudrait organiser le
monde, et l'inégalité économique,
politique et juridique des humains
cesserait. - Il ne sert à rien
aujourd'hui d'en appeler à la
compréhension, au discernement des
humains qui sont favorisés, qui sont
dans le privilège, qui sont en
possession des moyens de production et
autres. Si je dois exprimer ce qui a
été perdu au cours de la deuxième
moitié du XIXe siècle, je dois dire
que l'on a perdu la foi en la
compréhension et en la bonne volonté
des humains. C'est pourquoi les
représentants de la question sociale,
dont je parle maintenant, se disent :
on peut élaborer de beaux plans sur la
manière d'aménager le monde des
humains, mais il n'en résultera rien ;
car on aura beau prêcher de beaux
plans, on aura beau faire appel aux
cœurs et aux âmes des minorités
dirigeantes avec des paroles
touchantes, il ne se passera rien.
Tout cela, ce sont des idées sans
valeur, et les idées sans valeur qui
imaginent l'avenir sont en réalité,
pour parler en termes populaires, des
utopies. Il ne sert donc à rien,
dit-on, d'imaginer quoi que ce soit
dans l'avenir, car il n'y aura
personne pour renoncer à ses intérêts,
pour être saisi par sa conscience, par
son sens moral, etc. - La foi dans la
conscience et le discernement moral a
justement été perdue dans les cercles
les plus larges, notamment chez les
représentants de la question sociale.
On se dit que les humains n'agissent
pas du tout en fonction de leur
discernement lorsqu'ils prennent des
mesures sociales ou lorsqu'ils mènent
leur vie sociale, ils agissent en
fonction de leur intérêt. Et les
possédants ont bien entendu intérêt à
rester dans leurs possessions. Les
privilégiés sociaux ont intérêt à
conserver leurs privilèges sociaux.
C'est pourquoi il est illusoire de
compter sur le fait qu'il suffit de
dire aux gens de faire ceci ou cela.
Ils ne le font pas, parce qu'ils
n'agissent pas en fonction de leur
compréhension, mais en fonction de
leur intérêt.
|
04
|
Es ist sehr viel außerordentlich
Gescheites gesagt worden von dieser
Seite her, allein alles dasjenige, was
in dieser Richtung unternommen worden
ist, das empfindet man heute bei den
meisten Vertretern der sozialen Frage
als utopisch. Das heißt, man rechnet
heute nicht mehr darauf, daß man nur
zu sagen braucht: So müßte man die
Welt einrichten, dann würde die
wirtschaftliche und politische und
rechtliche Ungleichheit der Menschen
aufhören. — Esnützt heute nichts, an
das Verständnis zu appellieren, an die
Einsicht der Menschen, die begünstigt
sind, die im Vorrecht sind, dieim
Besitz sind der Produktionsmittel und
dergleichen. Wenn ich ausdrücken soll,
was da im Laufe der zweiten Hälfte des
19. Jahrhunderts verloren worden ist,
so muß ich sagen, verloren worden ist
der Glaube an die Einsicht und an den
guten Willen der Menschen. Daher sagen
sich die Vertreter der sozialen Frage,
die ich jetzt meine: Schöne Pläne
ausdenken, wie man die Menschenwelt
einrichten soll, das kann man, aber
dabei kommt nichts heraus; denn wenn
man noch so schöne Pläne predigt, wenn
man mit noch so rührenden Worten
appelliert an die Herzen, an die
Seelen der regierenden Minderheiten,
so wird doch nichts geschehen. Das
alles sind wertlose Ideen, und
wertlose Ideen, welche die Zukunft
ausmalen, das sind eben in
Wirklichkeit, populär gesprochen,
Utopien. Es hat also gar keinen Zweck,
so sagt man, irgend etwas auszumalen,
was in der Zukunft geschehen soll,
denn es wird niemand da sein, der von
seinen Interessen losläßt, der
ergriffen werden kann in bezug auf
sein Gewissen, in bezug auf seine
sittliche Einsicht und so weiter. —
Den Glauben an Gewissen und sittliche
Einsicht hat man eben in weitesten
Kreisen, namentlich bei den Vertretern
der sozialen Frage, verloren. Man sagt
sich, die Menschen handeln ja gar
nicht nach ihrer Einsicht, wenn sie
soziale Einrichtungen treffen oder
wenn sie ihr soziales Leben führen,
sie handeln nach ihrem Interesse. Und
die Besitzenden haben
selbstverständlich ein Interesse
daran, in ihrem Besitz zu bleiben. Die
sozial Bevorrechteten haben ein
Interesse an der Erhaltung der
sozialen Vorrechte. Daher ist es eine
Illusion, darauf zu rechnen, daß man
nur zu sagen braucht, die Leute sollen
das oder jenes machen. Sie tun es eben
nicht, weil sie nicht aus ihrer
Einsicht, sondern aus ihrem Interesse
heraus handeln.
|
Au sens le plus large, on peut dire
que Karl Marx a peu à peu - mais
vraiment peu à peu - adhéré à cette
vue. On peut décrire toute une série
d'époques dans la vie de Karl Marx.
Dans sa jeunesse, Marx était aussi un
penseur idéaliste et il pensait
encore, dans le sens que je viens de
caractériser, à la faisabilité des
utopies. Mais c'est justement lui, et
après lui son ami Engels, qui s'est
écarté de la manière la plus radicale
de ce calcul sur le discernement des
humains. Et si je caractérise en
général ce qui est en fait une grande
histoire, je peux dire ceci : Karl
Marx est finalement parvenu à la
conviction que les choses ne pouvaient
pas s'améliorer dans le monde d'une
autre manière qu'en faisant appel aux
humains qui n'ont pas intérêt à ce que
leurs biens, leurs privilèges leur
soient conservés. Ceux qui ont intérêt
à ce que leurs biens soient préservés,
ceux-là, on ne peut absolument pas les
voir, on doit les laisser complètement
de côté, car ils ne se laisseront
jamais aller à faire quoi que ce soit,
même si on leur fait de beaux sermons.
En revanche, il y a justement la
grande masse des ouvriers prolétaires
[qui n'ont rien à perdre en termes de
biens]. Karl Marx lui-même a vécu dans
cette conviction à l'époque où ce que
l'on appelle aujourd'hui le
prolétariat était en train de naître
en Europe centrale ; il a vu le
prolétariat naître en Europe centrale
à partir d'autres conditions
économiques. Plus tard, lorsqu'il
vivait en Angleterre, c'était un peu
différent. Mais à l'époque où Karl
Marx est passé de l'idéaliste au
matérialiste économique, c'était
encore comme si le prolétariat moderne
était en train d'émerger en Europe
centrale. Et maintenant, il se disait
: ce prolétariat moderne a des
intérêts tout à fait différents de
ceux de la minorité dirigeante, car il
se compose d'humains qui ne possèdent
rien d'autre que leur force de
travail, d'humains qui ne peuvent pas
vivre autrement qu'en mettant leur
force de travail au service des
possédants, notamment au service des
possesseurs des moyens de production.
Lorsque ces travailleurs quittent leur
travail, ils sont - c'était
particulièrement vrai à l'époque, de
la manière la plus radicale - jetés à
la rue. Ils n'ont rien d'autre devant
eux que la possibilité d'un front pour
ceux qui sont les propriétaires des
moyens de production. Ces gens ont un
tout autre intérêt que ceux qui
possèdent. Ils ont intérêt à ce que
tout l'ordre social antérieur prenne
fin, à ce que cet ordre social soit
transformé. Il n'est pas nécessaire de
leur prêcher de manière à ce qu'ils
comprennent, mais seulement de manière
à ce que leur égoïsme et leur intérêt
soient saisis. On peut compter sur
cela. Prêcher à ceux sur le
discernement desquels on doit compter
ne donne aucun résultat, car les
humains n'agissent pas par
discernement, ils n'agissent que par
intérêt. Donc, on ne peut pas
s'adresser à ceux chez qui on devrait
faire appel au discernement, mais on
doit faire appel aux intérêts de ceux
qui ne peuvent pas faire autrement que
de s'engager pour les temps modernes
par contrainte intérieure. C'est
l'égoïsme vers lequel Karl Marx a
évolué. C'est pourquoi il n'a plus cru
que le progrès de l'humanité vers des
conditions sociales plus récentes
pouvait provenir d'une autre œuvre
humaine que celle du prolétariat
lui-même. Selon Karl Marx, le
prolétariat ne peut aspirer à un
renouvellement des conditions sociales
humaines qu'à partir de ses propres
intérêts, de ses intérêts individuels
et égoïstes. Et c'est ainsi que le
prolétariat, non pas par
philanthropie, mais par intérêt
égoïste, libérera tout le reste de
l'humanité, parce qu'il ne peut y
avoir rien d'autre que ce
qu'accomplissent les humains qui ne
sont pas attachés aux vieux biens et
qui n'ont rien à perdre des vieux
biens en cas de transformation.
|
05
|
Im umfassendsten Sinne, so kann man
sagen, hat sich nach und nach -- aber
wirklich erst nach und nach — zu
dieser Ansicht Karl Marx bekannt. Man
kann in dem Leben von Karl Marx eine
ganze Anzahl von Epochen schildern.
Marx war in seiner Jugend auch ein
idealistischer Denker und hat auch
noch in dem Sinn, wie ich es eben
charakterisiert habe, an die
Realisierbarkeit von Utopien gedacht.
Aber er war es gerade, und nach ihm
dann auch sein Freund Engels, der in
der allerradikalsten Weise von dieser
Rechnung auf die Einsicht der Menschen
abgekommen ist. Und wenn ich im
allgemeinen etwas charakterisiere, was
eigentlich eine große Geschichte ist,
so kann ich das folgende sagen: Karl
Marx ist zuletzt zu der Überzeugung
gekommen, daß es in der Welt nicht auf
eine andere Art besser werden könne
als dadurch, daß man diejenigen
Menschen aufruft, die nicht ein
Interesse daran haben, daß ihre Güter,
daß ihre Vorrechte ihnen erhalten
bleiben. Auf die, die ein Interesse
haben, daß ihre Güter ihnen erhalten
bleiben, auf diese könne man überhaupt
nicht sehen, diese müsse man ganz aus
der Rechnung lassen, denn sie würden
sich niemals herbeilassen, irgendwie
darauf einzugehen, wenn man ihnen noch
so schön predigt. Demgegenüber gibt es
gerade die große Masse der
proletarischen Arbeiter, [die nichts
an Gütern zu verlieren haben]. Karl
Marx selbst lebte sich ja in diese
Überzeugung hinein in der Zeit, als in
Mitteleuropa das im Grunde erst
entstand, was man heute das
Proletariat nennt; er sah das
Proletariat in Mitteleuropa erst
entstehen aus anderen
Wirtschaftsverhältnissen heraus. Als
er später in England lebte, war das ja
etwas anders. Aber in der Zeit, als
Karl Marx sich vom Idealisten zum
ökonomischen Materialisten
entwickelte, da war es noch so, daß
eigentlich in Mitteleuropa das moderne
Proletariat erst heraufkam. Und nun
sagte er sich: Dieses moderne
Proletariat, das hat ganz andere
Interessen als die leitende, führende
Minderheit, denn es besteht aus
Menschen, die nichts besitzen als ihre
Arbeitskraft, aus Menschen, die auf
keine andere Weise leben können als
dadurch, daß sie ihre Arbeitskraft in
den Dienst der Besitzenden, namentlich
in den Dienst der Besitzenden der
Produktionsmittel, stellen. Wenn diese
Arbeiter ihre Arbeit verlassen, dann
sind sie — das galt besonders für die
damalige Zeit in radikalster Weise —,
dann sind sie auf die Straße geworfen.
Sie haben nichts anderes vor sich als
die Möglichkeit einer Fron für
diejenigen, die die Besitzer der
Produktionsmittel sind. Diese Menschen
haben ein ganz anderes Interesse als
die Besitzenden. Sie haben ein
Interesse daran, daß die ganze frühere
Gesellschaftsordnung aufhört, daß
diese Gesellschaftsordnung umgewandelt
wird. Denen braucht man nicht so zu
predigen, daß ihre Einsicht ergriffen
wird, sondern nur so, daß ihr
Egoismus, ihr Interesse ergriffen
werden. Darauf kann man sich
verlassen. Zu predigen denjenigen, auf
deren Einsicht man zählen soll, dabei
kommt nichts heraus, denn die Menschen
handeln nicht aus Einsicht, sie
handeln nur nach Interessen. Also, man
kann sich nicht an diejenigen wenden,
bei denen man an die Einsicht
appellieren müßte, sondern man muß an
die Interessen derjenigen appellieren,
die nicht anders können, als aus
innerem Zwang heraus für die neuere
Zeit eintreten. Das ist der Egoismus,
zu dem Karl Marx sich hinentwickelt
hat. Daher hat er nicht mehr geglaubt,
daß der Fortschritt der Menschheit zu
neueren sozialen Zuständen von anderem
Menschenwerke herkommen könne als von
dem Werke des Proletariats selbst. Das
Proletariat könne nur, so meint Karl
Marx, aus seinen Interessen, aus
seinen einzelegoistischen Interessen
her, eine Erneuerung der menschlichen
sozialen Zustände erstreben. Und damit
wird das Proletariat, aber jetzt nicht
aus Menschenfreundlichkeit, sondern
aus egoistischem Interesse, auch die
ganze übrige Menschheit befreien, weil
es nichts anderes mehr geben kann als
dasjenige, was die Menschen bewirken,
die nicht an alten Gütern hängen und
bei einer Umwandlung nichts von alten
Gütern zu verlieren haben.
|
On se dit donc : d'un côté, il y a
les cercles dirigeants, leaders, qui
ont certains droits qui leur ont été
conférés dans le passé ou qui leur ont
été imposés dans le passé, qui se sont
transmis par héritage dans leurs
familles, et ils s'y accrochent. Ces
cercles dirigeants sont en possession
de ceci ou de cela, qu'ils
transmettent à leur tour au sein de
leur cercle, de leur famille et ainsi
de suite. Ces cercles ont toujours
quelque chose à perdre lors d'une
transformation, car bien sûr, s'ils ne
perdaient rien, aucune transformation
n'aurait lieu. Il s'agit en effet que
ceux qui n'ont rien reçoivent quelque
chose, donc ceux qui ont quelque chose
ne peuvent que perdre. On ne pourrait
donc faire appel au discernement que
si ce discernement donnait à la classe
dirigeante possédante l'impulsion de
vouloir perdre quelque chose. Ils
n'acceptent pas cela. - C'était le
point de vue de Karl Marx. Il faut
donc faire appel à ceux qui n'ont rien
à perdre. C'est pourquoi le "Manifeste
communiste" de 1848 se termine par ces
mots : "Les prolétaires n'ont rien à
perdre que leurs chaînes, mais ils ont
tout à gagner. Prolétaires de tous les
pays, unissez-vous !".
|
06
|
Man sagt sich also: Da sind auf der
einen Seite die leitenden, führenden
Kreise, die haben gewisse Rechte, die
ihnen in früheren Zeiten verliehen
worden sind oder die in früheren
Zeiten von ihnen erzwungen worden
sind, die sich vererbt haben in ihren
Familien, an denen halten sie fest.
Diese leitenden, führenden Kreise sind
im Besitz von dem oder jenem, das
vererben sie wiederum weiter innerhalb
ihrer Kreise, ihrer Familie und so
weiter. Diese Kreise haben bei einer
Umwandlung immer etwas zu verlieren,
denn selbstverständlich, wenn sie
nichts verlören, würde ja keine
Umwandlung geschehen. Es handelt sich
ja darum, daß diejenigen, die nichts
haben, etwas bekommen sollen, daher
können diejenigen, die etwas haben,
nur verlieren. Also man könnte nur an
die Einsicht appellieren, wenn diese
Einsicht der besitzenden, führenden
Klasse den Impuls eingeben würde,
etwas verlieren zu wollen. Darauf
lassen sie sich nicht ein. — Das war
die Anschauung von Karl Marx. Man muß
also an diejenigen appellieren, die
nichts zu verlieren haben. Deshalb
schließt auch im Jahre 1848 das
«Kommunistische Manifest» mit den
Worten: «Proletarier haben nichts zu
verlieren als ihre Ketten, sie haben
aber alles zu gewinnen. Proletarier
aller Länder, vereinigt euch!»
|
Eh bien, vous voyez, c'est devenu en
quelque sorte une conviction depuis la
publication du Manifeste communiste.
Et aujourd'hui, alors que certains
sentiments, déjà sous l'influence de
cette conception, vivent justement
dans la majorité du prolétariat, on ne
peut plus vraiment s'imaginer quel
énorme bouleversement s'est opéré dans
la conception socialiste vers le
milieu du XIXe siècle. Mais il serait
bon que vous preniez quelque chose
comme l'"Évangile d'un pauvre pécheur"
de Weitling, un compagnon tailleur,
qui a été écrit pas si longtemps avant
le Manifeste communiste, et que vous
le compariez à tout ce qui a été écrit
après la parution du Manifeste
communiste. Dans cet "Évangile d'un
pauvre pécheur", vraiment empreint
d'une authentique sensibilité
prolétarienne, règne un langage
ardent, on peut même dire poétique
dans un certain sens, mais un langage
qui veut absolument faire appel à la
bonne volonté, au discernement des
humains. C'est la conviction de
Weitling que l'on peut faire quelque
chose avec la bonne volonté des
humains. Et cette conviction ne s'est
affaiblie que vers le milieu du XIXe
siècle. Et l'acte par lequel elle
s'est affaiblie est justement la
publication du Manifeste communiste.
Et depuis cette époque, depuis 1848,
nous pouvons en fait suivre ce que
nous appelons aujourd'hui la question
sociale. Car si nous voulions parler
aujourd'hui comme Saint-Simon, comme
Fourier, comme Weitling, oui, nous
prêcherions aujourd'hui vraiment la
sourde oreille. Car jusqu'à un certain
point, il est tout à fait exact que
l'on ne peut rien entreprendre dans la
question sociale si l'on fait appel à
la compréhension des cercles
dirigeants, leaders, qui ont quelque
chose. C'est tout à fait vrai. Ils ne
le savent même pas s'ils le font, car
des forces inconscientes jouent un
rôle extrêmement important dans l'âme
humaine.
|
07
|
Nun sehen Sie, das ist seit der
Veröffentlichung des Kommunistischen
Manifests gewissermaßen eine
Überzeugung geworden. Und heute, wo
gewisse Empfindungen, die schon unter
dem Einfluß dieser Anschauung stehen,
eben in der Majorität des Proletariats
leben, heute kann man sich gar nicht
mehr richtig vorstellen, was für ein
ungeheurer Umschwung in der
sozialistischen Anschauung um die
Mitte des 19. Jahrhunderts sich
vollzogen hat. Aber es wäre gut, wenn
Sie sich herbeiließen, so etwas zu
nehmen wie das «Evangelium eines armen
Sünders» von Weitling, einem
Schneidergesellen, das gar nicht so
lange Zeit vor dem Kommunistischen
Manifest geschrieben worden ist, und
wenn Sie das vergleichen würden mit
alle dem, was nach dem Erscheinen des
Kommunistischen Manifestes geschrieben
ist. In diesem wirklich von echter
proletarischer Empfindung
eingegebenen «Evangelium eines armen
Sünders» herrscht eine, man kann
sagen, in gewissem Sinne sogar
poetische, glühende Sprache, aber
durchaus eine Sprache, die appellieren
will an den guten Willen, an die
Einsicht der Menschen. Das ist
Weitlings Überzeugung, daß man etwas
anfangen könne mit dem guten Willen
der Menschen. Und diese Überzeugung,
die ist erst um die Mitte des 19.
Jahrhunderts geschwunden. Und die Tat,
durch die sie geschwunden ist, ist
eben die Publikation des
Kommunistischen Manifestes. Und seit
der Zeit, seit dem Jahre 1848, können
wir eigentlich das verfolgen, was wir
heute die soziale Frage nennen. Denn
wenn wir heute so reden wollten wie
Saint-Simon, wie Fourier, wie Weitling
-- ja, wir würden heute wirklich ganz
tauben Ohren predigen. Denn bis zu
einem gewissen Grade ist es durchaus
richtig, daß man in der sozialen Frage
nichts anfangen kann, wenn man an die
Einsicht der leitenden, führenden
Kreise appelliert, die etwas haben.
Das ist schon richtig. Die leitenden,
führenden Kreise haben das zwar
niemals zugegeben, sie werden es auch
heute kaum zugeben — sie wissen es gar
nicht einmal, wenn sie es doch tun,
denn da spielen unbewußte Kräfte in
der menschlichen Seele eine
außerordentlich große Rolle.
|
Vous voyez, au cours du XIXe siècle,
notre culture spirituelle est presque
entièrement devenue une phrase. Et le
fait que nous vivions dans la phrase
en ce qui concerne la culture
spirituelle est un fait social
beaucoup plus important qu'on ne le
pense habituellement. Et donc,
naturellement, les membres des cercles
dirigeants, des cercles de direction,
disent aussi toutes sortes de belles
choses sur la question sociale, et ils
sont eux-mêmes souvent convaincus
qu'ils ont déjà la bonne volonté. Mais
en réalité, ils ne font que le croire,
ce n'est qu'une illusion ; dès que
quelque chose de réel est entrepris
dans ce domaine, il apparaît
immédiatement qu'il s'agit d'une
illusion. Nous en parlerons plus tard.
Mais comme je l'ai dit, nous ne
pouvons plus parler aujourd'hui comme
nous le faisions à l'époque des
utopies. C'est la véritable conquête
de Karl Marx, qui a montré comment
l'humanité est aujourd'hui tellement
empêtrée dans l'illusionnisme que
c'est un non-sens de compter sur autre
chose que l'égoïsme. Il faut compter
avec cela ; on ne peut donc rien
obtenir si l'on veut compter d'une
manière ou d'une autre sur
l'altruisme, sur la bonne volonté, sur
les principes moraux des humains - je
dis toujours "en ce qui concerne la
question sociale". Et ce revirement,
qui nous a conduits à devoir parler
aujourd'hui d'une toute autre manière
que l'on pouvait par exemple encore
parler de la question sociale dans la
première moitié du XIXe siècle, ce
revirement est justement arrivé avec
le Manifeste communiste. Mais tout
n'est pas arrivé d'un seul coup, mais
il était tout de même possible
qu'après le Manifeste communiste,
jusque dans les années soixante, comme
vous le savez tous - certains jeunes
socialistes ont déjà oublié cette
époque -, cette toute autre forme de
pensée sociale, la forme de Ferdinand
Lassalle, ait touché les cœurs et les
âmes. Et même après la mort de
Lassalle, survenue en 1864, ce qui
était le socialisme de Lassalle s'est
poursuivi. Lassalle fait partie de ces
gens qui, malgré l'avènement d'un
autre mode de pensée, comptaient
encore sur la force de frappe des
idées. Lassalle voulait encore saisir
les humains en tant que tels dans leur
compréhension, dans leur volonté
sociale avant tout. Mais de plus en
plus, cette nuance lassallienne
diminuait et l'autre nuance, la nuance
marxiste, qui ne voulait compter que
sur les intérêts de cette partie de la
population humaine qui ne possédait
qu'elle-même et sa force de travail,
prenait le dessus. Mais ce n'était pas
si rapide. Une telle façon de penser
ne s'est développée que peu à peu dans
l'humanité.
|
08
|
Sehen Sie, es ist ja nun einmal
unsere geistige Kultur im Laufe des
19. Jahrhunderts fast ganz zur Phrase
geworden. Und daß wir mit Bezug auf
die geistige Kultur in der Phrase
leben, ist eine viel wichtigere
soziale Tatsache, als man gewöhnlich
meint. Und so reden natürlich die
Angehörigen der leitenden, führenden
Kreise auch über die soziale Frage
allerlei schöne Dinge, und sie sind
selbst oftmals überzeugt, daß sie
schon den guten Willen hätten. Aber in
Wirklichkeit glauben sie das nur, es
ist nur ihre Illusion; in dem
Augenblick, wo irgend etwas Reales in
dieser Beziehung in Angriff genommen
wird, kommt es auch gleich heraus, daß
das eine Illusion ist. Davon wollen
wir nachher noch sprechen. Aber wie
gesagt, so können wir heute nicht mehr
reden, wie im Zeitalter der Utopien
geredet worden ist. Das ist die
wirkliche Errungenschaft, die durch
Karl Marx gekommen ist, daß er gezeigt
hat, wie heute die Menschheit so in
den Illusionismus hineinverstrickt
ist, daß es ein Unsinn ist, auf etwas
anderes zu rechnen als auf den
Egoismus. Es muß damit einmal
gerechnet werden; es kann daher gar
nichts erreicht werden, wenn man auf
die Selbstlosigkeit, auf den guten
Willen, auf die sittlichen Grundsätze
der Menschen — ich sage immer «in
bezug auf die Soziale Frage» —
irgendwie rechnen will. Und dieser
Umschwung, der dazu geführt hat, daß
wir eben heute ganz anders reden
müssen, als zum Beispiel noch in der
ersten Hälfte des 19. Jahrhunderts
geredet werden konnte mit Bezug auf
die soziale Frage, dieser Umschwung
ist eben mit dem Kommunistischen
Manifest gekommen. Aber es ist nicht
alles auf einmal gekommen, sondern es
war ja immerhin möglich, daß auch nach
dem Kommunistischen Manifest noch bis
in die sechziger Jahre hinein, wie Sie
alle wissen werden — manche jüngere
Sozialisten haben ja die Zeit schon
vergessen —, diese ganz andere Art des
sozialen Denkens, die Art des
Ferdinand Lassalle, die Herzen, die
Seelen ergriffen hat. Und auch nach
dem Tode von Lassalle, der 1864
erfolgt ist, hat sich noch fortgesetzt
dasjenige, was Lassallescher
Sozialismus war. Lassalle gehört
durchaus zu den Menschen, die,
trotzdem die andere Denkweise schon
heraufgekommen war, noch rechneten auf
die Schlagkraft der Ideen. Lassalle
wollte durchaus noch die Menschen als
solche ergreifen in ihrer Einsicht, in
ihrem sozialen Wollen vor allen
Dingen. Aber immer mehr und mehr nahm
diese Lassallesche Schattierung ab und
nahm überhand die andere, die
marxistische Schattierung, die nur
rechnen wollte auf die Interessen
desjenigen Teiles der menschlichen
Bevölkerung, der nur sich selbst besaß
und seine Arbeitskraft. Aber es ging
immerhin nicht so schnell. Solch eine
Denkweise entwickelte sich erst nach
und nach in der Menschheit.
|
Dans les années soixante,
soixante-dix, et même encore dans les
années quatre-vingt, les gens qui
appartenaient au prolétariat ou qui
faisaient partie des gens
politiquement ou socialement
dépendants - même s'ils n'étaient pas
exactement des prolétaires - jugeaient
en quelque sorte moralement leur
dépendance et condamnaient moralement
les milieux non dépendants de la
population humaine. Selon leur
conscience, c'était de la mauvaise
volonté de la part des cercles
dirigeants, leaders, de la population
humaine, qu'ils laissent la grande
masse du prolétariat dans la
dépendance, qu'ils la payent mal, etc.
Si je peux m'exprimer trivialement, je
peux dire que dans les années
soixante, soixante-dix, jusque dans
les années quatre-vingt, on fabriquait
beaucoup d'indignation sociale et on
parlait du point de vue de
l'indignation sociale. Puis, au milieu
des années quatre-vingt, l'étrange
revirement s'est vraiment produit. Les
personnalités les plus en vue du
mouvement social ont alors
complètement cessé de parler de la
question sociale sur la base de
l'indignation morale dans les années
80. C'était l'époque où les leaders
sociaux, que vous, les plus jeunes,
avez seulement vus mourir, étaient
grands et plus ou moins encore animés
par l'ardeur de leur jeunesse : Adler,
Pernerstorfer, Wilhelm Liebknecht,
Auer, Bebel, Singer et ainsi de suite.
Ces dirigeants plus âgés ont justement
cessé de plus en plus de prêcher ce
socialisme d'indignation à l'époque,
dans les années 80. Je voudrais dire
que ces dirigeants du socialisme ont
exprimé leur conviction intime
lorsqu'ils ont transposé l'ancien
socialisme d'indignation dans leur
nouvelle vision socialiste du monde.
Vous trouverez que ce que je vous dis
maintenant ne figure dans aucun livre
sur l'histoire du socialisme. Mais
ceux qui ont vécu à l'époque et qui
ont participé à cela savent que les
gens, lorsqu'ils étaient livrés à
eux-mêmes, parlaient ainsi.
|
09
|
In den sechziger, siebziger Jahren,
auch noch in den achtziger Jahren war
es durchaus so, daß die Leute, die dem
Proletariat angehörten oder die zu den
Leuten gehörten, die politisch oder
sozial abhängig — wenn auch nicht
gerade Proletarier — waren, ihre
Abhängigkeit gewissermaßen moralisch
beurteilten und daß sie die
nicht-abhängigen Kreise der
menschlichen Bevölkerung moralisch
verurteilten. Ihrem Bewußtsein nach
war es böser Wille der leitenden,
führenden Kreise der menschlichen
Bevölkerung, daß sie die große Masse
des Proletariats in Abhängigkeit
ließen, daß sie sie schlecht bezahlten
und so weiter. Wenn ich es trivial
ausdrücken darf, so kann ich sagen, in
den sechziger, siebziger Jahren, bis
in die achtziger Jahre hinein, wurde
viel soziale Entrüstung fabriziert und
vom Standpunkt der sozialen Entrüstung
aus gesprochen. Dann trat in der Mitte
der achtziger Jahre der merkwürdige
Umschwung eigentlich erst so recht
ein. Die mehr führenden
Persönlichkeiten der sozialen
Bewegung, die hörten dann in den
achtziger Jahren ganz auf, aus
moralischer Entrüstung heraus über die
soziale Frage zu sprechen. Das war ja
die Zeit, in der groß waren und mehr
oder weniger noch von jugendlichem
Feuereifer durchglüht waren diejenigen
sozialen Führer, die Sie, die Sie
jünger sind, nur noch haben sterben
sehen: Adler, Pernerstorfer, Wilhelm
Liebknecht, Auer, Bebel, Singer und so
weiter. Diese älteren Führer hörten
gerade damals in den achtziger Jahren
immer mehr auf, diesen
Entrüstungssozialismus zu predigen.
Ich möchte es so ausdrücken, daß diese
Führer des Sozialismus ihre innerste
Überzeugung aussprachen, als sie
damals den alten
Entrüstungssozialismus überleiteten in
ihre neuere sozialistische
Weltanschauung. Sie werden finden, was
ich Ihnen jetzt sage, das stehe ja in
keinem Buche über die Geschichte des
Sozialismus. Aber wer dazumal gelebt
hat und das mitgemacht hat, der weiß,
daß die Leute, wenn sie sich selbst
überlassen waren, so geredet haben.
|
Supposons que dans les années
quatre-vingt, des dirigeants du
socialisme se soient réunis pour
discuter avec des bourgeois [purs]
dans leurs convictions, et supposons
qu'il y ait eu une troisième sorte :
des bourgeois idéalistes qui voulaient
du bien à tous les humains, qui
auraient été d'accord pour rendre tous
les humains heureux. Il aurait pu
arriver que les bourgeois déclarent
qu'il faut toujours qu'il y ait des
gens pauvres et des gens riches, et
ainsi de suite, car c'est la seule
façon de maintenir la société humaine.
Alors peut-être que la voix de l'un de
ces idéalistes qui s'indignaient de
voir tant de gens vivre dans la
pauvreté et la dépendance se serait
élevée. Un tel humain aurait peut-être
dit : "Oui, il faut y parvenir, il
faut faire comprendre à ces gens qui
possèdent, aux entrepreneurs, aux
capitalistes, qu'ils doivent renoncer
à leurs biens, qu'ils doivent prendre
des mesures qui permettront à la
grande masse de changer de situation,
et ainsi de suite. - De très beaux
discours auraient pu être prononcés
sur cette base. Mais alors, quelqu'un
qui, à l'époque, venait de s'initier
au socialisme et à son évolution,
aurait élevé la voix et dit :
"Qu'est-ce que vous racontez, vous
êtes un enfant ; tout cela n'est
qu'enfantillages, absurdités ! Les
gens qui sont des capitalistes, des
entrepreneurs, ce sont tous de pauvres
sbires, ils ne savent rien d'autre que
ce qu'on leur a inculqué depuis des
générations. S'ils entendaient dire
qu'ils devraient faire autrement, ils
ne pourraient même pas le faire, car
ils ne sauraient pas comment s'y
prendre. Cela ne rentre pas du tout
dans leur crâne que l'on puisse faire
quelque chose différemment. Il ne faut
pas accuser les gens, il ne faut pas
condamner moralement les gens, ils ne
sont pas du tout à condamner
moralement ; les gars ont grandi dans
ce milieu, ces pauvres sbires, dans
tout ce milieu, et ça les inspire avec
les idées qu'ils ont. Les accuser
moralement, c'est ne rien comprendre
aux lois de l'évolution de l'humanité,
c'est se bercer d'illusions. Ces
humains ne peuvent jamais vouloir que
le monde prenne une autre forme.
Parler d'eux avec indignation, c'est
de l'enfantillage pur et simple. Tout
cela est devenu ainsi par nécessité,
et cela ne peut devenir différent que
par nécessité. Vous voyez, on ne peut
rien faire avec ces gars qui croient
pouvoir prêcher aux possédants, aux
capitalistes, qu'il faut instaurer un
nouvel ordre mondial, on ne peut rien
faire avec ces gars ; on ne peut pas
instaurer un nouvel ordre mondial avec
eux ; ils ne font que s'adonner à la
croyance que l'on peut accuser ces
pauvres sbires de capitalistes de
faire un autre monde. - Je dois dire
les choses un peu clairement, c'est
pourquoi certaines choses sont dites
avec des contours nets, mais de telle
manière que vous avez pu entendre
partout les discours dont je parle.
Quand on les écrivait, on les
retouchait un peu, on les écrivait un
peu différemment, mais c'était la
base. Puis ils ont continué à parler :
avec ces gars - ce sont des
idéalistes, ils se représentent le
monde en termes d'idéologie -, on ne
peut rien faire avec eux. Nous devons
compter sur ceux qui n'ont rien, qui
veulent donc quelque chose de
différent de leurs intérêts que ceux
liés aux intérêts capitalistes. Et
ceux-là n'aspireront pas non plus à un
changement de situation en vertu d'un
quelconque principe moral, mais
uniquement par convoitise, pour avoir
plus que ce qu'ils avaient jusqu'à
présent, pour avoir une existence
indépendante.
|
10
|
Nehmen wir einmal an, es seien in
den achtziger Jahren solche führenden
Leute des Sozialismus zu einer
Diskussion zusammengekommen mit
solchen, die [reine] Bourgeois waren
in ihren Gesinnungen, und nehmen wir
an, es wäre noch eine dritte Sorte
dabeigewesen: Bourgeois, die
Idealisten waren und allen Menschen
Gutes wünschten, die damit
einverstanden gewesen wären, alle
Menschen glücklich zu machen. Da hätte
es geschehen können, daß die Bourgeois
erklärten, es müsse immer Leute geben,
die arm sind, und solche, die reich
sind, und so weiter, denn nur das
könne die menschliche Gesellschaft
aufrechterhalten. Dann hätte sich
vielleicht die Stimme eines von
denjenigen erhoben, welche Idealisten
waren, die da entrüstet waren darüber,
daß so viele Leute in Armut und
Abhängigkeit leben mußten. So einer
hätte dann vielleicht gesagt: Ja, das
muß erreicht werden, daß klargemacht
wird diesen besitzenden Leuten, den
Unternehmern, den Kapitalisten, daß
sie loslassen müssen von ihrem Besitz,
daß sie Einrichtungen treffen müssen,
durch welche die große Masse in eine
andere Lage kommt, und dergleichen. —
Da könnten sehr schöne Reden gehalten
werden aus diesen Tönen heraus. Dann
aber hätte solch einer seine Stimme
erhoben, der damals sich gerade
hineinfand in den Sozialismus und
seinen Werdegang, und hätte gesagt:
Was reden Sie da, Sie sind ein Kind;
das ist alles Kinderei, alles Unsinn!
Die Leute, die da Kapitalisten sind,
die Unternehmer sind, das sind alles
arme Hascherin, die wissen nichts
anderes, als was ihnen eingebleut
worden ist von Generationen her. Wenn
die auch hören, sie sollten es anders
machen, dann könnten sie es nicht
einmal, denn sie kämen nicht darauf,
wie sie es machen sollten. So etwas
geht gar nicht in ihre Schädel hinein,
daß man etwas anders machen kann. Man
darf nicht die Leute anklagen, man
darf nicht die Leute moralisch
verurteilen, die sind gar nicht
moralisch zu verurteilen; die Kerle
sind da hineingewachsen, diese armen
Hascherin, in das ganze Milieu, und
das inspiriert sie mit den Ideen, die
sie haben. Sie moralisch anklagen
heißt, nichts verstehen von den
Gesetzen der Menschheitsentwicklung,
heißt, sich Illusionen hingeben. Diese
Menschen können niemals wollen, daß
die Welt eine andere Form annimmt. Mit
Entrüstung von ihnen zu sprechen, ist
die pure Kinderei. Das ist alles
notwendig so geworden, und anders kann
das auch wiederum nur durch
Notwendigkeit werden. Seht ihr, mit
solchen kindischen Kerlen, die da
glauben, sie könnten den Besitzenden,
den Kapitalisten predigen, es solle
eine neue Weltordnung heraufgeführt
werden, mit solchen kindischen Kerlen
kann man nichts anfangen; mit ihnen
ist keine neue Weltordnung
herbeizuführen; die geben sich nur dem
Glauben hin, daß man anklagen kann
diese armen Hascherin von
Kapitalisten, daß sie eine andere Welt
machen sollten. — Ich muß die Sache
etwas deutlich aussprechen, daher ist
manches in scharfen Konturen gesagt,
aber doch so, daß Sie die Reden, von
denen ich spreche, durchaus überall
hören konnten. Wenn sie geschrieben
wurden, dann wurden sie ja ein bißchen
retuschiert, ein bißchen anders
geschrieben, aber das lag zugrunde.
Dann redeten sie weiter: Mit diesen
Kerlen — das sind Idealisten, die
stellen sich die Welt im Sinne einer
Ideologie vor —, mit denen ist nichts
anzufangen. Wir müssen uns auf
diejenigen verlassen, die nichts
haben, die daher etwas anderes wollen
aus ihren Interessen heraus als die,
die mit kapitalistischen Interessen
verbunden sind. Und die werden auch
nicht aus irgendeinem moralischen
Grundsatz eine Änderung der Lebenslage
anstreben, sondern nur aus
Begehrlichkeit, um mehr zu haben als
sie bisher hatten, um ein unabhängiges
Dasein zu haben.
|
Cette manière de penser est apparue
de plus en plus dans les années
quatre-vingt, de ne plus concevoir
l'évolution de l'humanité dans le sens
où l'individu est particulièrement
responsable de ce qu'il fait, mais
qu'il fait ce qu'il doit faire en
raison de la situation économique. Le
capitaliste, l'entrepreneur, écrase
les autres dans la plus grande
innocence. Celui qui est prolétaire,
non pas en vertu d'un principe moral,
mais en toute innocence, en raison
d'une nécessité humaine, va
révolutionner et prendre les moyens de
production, le capital, des mains de
ceux qui justement le possèdent. Cela
doit se dérouler comme une nécessité
historique. - Cette façon de penser
monta.
|
11
|
Diese Denkweise kam in den achtziger
Jahren immer mehr und mehr herauf, die
Menschheitsentwicklung nicht mehr in
dem Sinne aufzufassen, daß der
einzelne Mensch besonders
verantwortlich ist für das, was er
tut, sondern daß er tut, was er aus
der wirtschaftlichen Lage heraus tun
muß. Der Kapitalist, der Unternehmer,
schindet die anderen in höchster
Unschuld. Derjenige, der Proletarier
ist, der wird nicht aus einem
sittlichen Grundsatz, sondern in aller
Unschuld aus einer menschlichen
Notwendigkeit heraus revolutionieren
und die Produktionsmittel, das
Kapital, aus den Händen derjenigen
nehmen, die es eben haben. Das muß
sich abspielen als eine geschichtliche
Notwendigkeit. — Diese Denkweise kam
herauf.
|
Eh bien, voyez-vous, ce n'est qu'en
1891, au congrès d'Erfurt, que tout le
lassallianisme, qui était encore basé
sur la compréhension des humains,
s'est transformé en croyance dans le
soi-disant "programme d'Erfurt", qui
était destiné à faire du marxisme la
vision officielle du prolétariat. Si
vous lisez les programmes des congrès
de Gotha et d'Eisenach, vous y
trouverez deux revendications
authentiquement prolétariennes de
l'époque, qui sont encore liées au
lassallianisme. La première
revendication était l'abolition du
rapport salarial ; la deuxième
revendication était l'égalité
politique de tous les humains,
l'abolition de tous les privilèges
politiques. Toutes les revendications
prolétariennes jusqu'aux années 1990,
jusqu'au congrès d'Erfurt qui a
apporté le grand changement, sont
parties de ces deux revendications.
Regardez une fois ces deux
revendications exactement et
comparez-les avec les principales
revendications du congrès d'Erfurt.
Quelles sont les principales
revendications du congrès d'Erfurt ?
Ce sont les suivantes : Transfert de
la propriété privée des moyens de
production à la propriété commune ;
gestion de toute la production de
biens, de toute la production par une
sorte de grande coopérative, en
laquelle l'État actuel doit se
transformer. Comparez l'ancien
programme, qui était le programme
prolétarien des années quatre-vingt,
avec celui qui est issu du programme
du parti d'Erfurt et qui existe depuis
les années quatre-vingt-dix. Vous
verrez que dans l'ancien programme de
Gotha et d'Eisenach, les exigences du
socialisme sont encore des exigences
purement humaines : égalité politique
de tous les humains, abolition du
rapport salarial dégradant. Au début
des années quatre-vingt-dix, ce que je
vous ai décrit comme l'état d'esprit
qui s'est développé au cours des
années quatre-vingt a déjà agi. Ce qui
était encore une exigence de
l'humanité s'est transformé en une
exigence purement économique. Vous ne
lisez plus rien sur l'idéal d'abolir
le rapport salarial, vous ne lisez que
des revendications économiques.
|
12
|
Nun, sehen Sie, es war eigentlich
erst im Jahre 1891 auf dem Erfurter
Parteitag, als dann aller
Lassallianismus, der eben doch noch
auf die Einsicht der Menschen basiert
war, überging in den Glauben an das
sogenannte «Erfurter Programm»,
welches bestimmt war, den Marxismus
zur offiziellen Anschauung des
Proletariats zu machen. Lesen Sie die
Programme des Gothaer, des Eisenacher
Parteitages durch, da werden Sie zwei
Forderungen finden als echt
proletarische Forderungen der
damaligen Zeit, die noch
zusammenhängen mit Las sallianismus.
Die erste Forderung war: die
Abschaffung des Lohnverhältnisses; die
zweite Forderung war: die politische
Gleichstellung aller Menschen, die
Abschaffung aller politischen
Vorrechte. Auf diese beiden
Forderungen gingen alle proletarischen
Forderungen aus bis zu den neunziger
Jahren, bis zu dem Erfurter Parteitag,
der den großen Umschwung brachte.
Schauen Sie einmal diese beiden
Forderungen genau an, und vergleichen
Sie sie mit den Hauptforderungen des
Erfurter Parteitages. Welches sind nun
die Hauptforderungen des Erfurter
Parteitages? Es sind: Überführung des
Privateigentums an Produktionsmitteln
in das gemeinschaftliche Eigentum;
Verwaltung aller Gütererzeugung, aller
Produktion durch eine Art große
Genossenschaft, in welche sich
umzuwandeln hat der bisherige Staat.
Vergleichen Sie das ehemalige
Programm, welches das proletarische
Programm der achtziger Jahre war, mit
demjenigen, was aus dem Erfurter
Parteiprogramm hervorgegangen ist und
seit den neunziger Jahren existiert.
Sie werden sehen, im alten Gothaer und
Eisenacher Programm sind die
Forderungen des Sozialismus noch rein
menschliche Forderungen: politische
Gleichheit aller Menschen, Abschaffung
des entwürdigenden Lohnverhältnisses.
Im Anfang der neunziger Jahre hat
schon gewirkt dasjenige, was ich Ihnen
charakterisiert habe als die
Gesinnung, die im Laufe der achtziger
Jahre heraufgekommen ist. Da ist
verwandelt worden das, was noch mehr
Menschheitsforderung war, in eine rein
wirtschaftliche Forderung. Da lesen
Sie nichts mehr von dem Ideal, das
Lohnverhältnis abzuschaffen, da lesen
Sie nur von Wirtschaftsforderungen.
|
Eh bien, vous voyez, ces choses sont
liées à la formation progressive de
l'idée que l'on avait de la
réalisation extérieure d'un meilleur
état social de l'humanité. Il a
souvent été dit par ces gens qui
avaient encore des idéaux : ah, quel
dommage cela fait-il de tout casser,
il faut bien qu'un autre ordre se
mette en place ; il faut donc qu'il y
ait une révolution, il faut que tout
soit cassé, il faut qu'il y ait une
grande claque, car c'est seulement de
là que peut naître un meilleur ordre
social. - C'est ce que disaient encore
certaines personnes dans les années
80, qui étaient de bons socialistes
idéalistes. On leur répondait par
d'autres, ceux qui étaient à la
hauteur, qui étaient devenus les
leaders - ceux qui, comme je l'ai dit,
sont maintenant enterrés -, qui
disaient : tout cela n'a pas de sens,
des révolutions aussi soudaines n'ont
aucun sens. La seule chose qui ait un
sens, c'est que nous abandonnions le
capitalisme à lui-même. Nous voyons
bien qu'auparavant, il n'y avait que
de petits capitalistes, puis ils sont
devenus grands ; ils se sont associés
à d'autres, sont devenus des groupes
de capitalistes. Les capitaux se sont
de plus en plus concentrés. C'est dans
ce processus que nous nous trouvons, à
savoir que les capitaux sont de plus
en plus concentrés. Le temps viendra
où il n'y aura plus que quelques
grands trusts et consortiums
capitalistes. Il sera alors nécessaire
que le prolétariat, en tant que classe
non possédante, transmette un beau
jour, de manière tout à fait
pacifique, par voie parlementaire, la
propriété capitaliste, les moyens de
production, à la propriété commune.
Cela peut être très bien fait, mais il
faut attendre. D'ici là, les choses
doivent évoluer. Le capitalisme, qui
est en fait un enfant innocent, n'y
peut rien s'il est inhumain - c'est la
nécessité historique qui l'impose.
Mais il travaille aussi à l'avance,
car il concentre les capitaux ; ils
sont alors bien groupés, il suffit
qu'ils soient repris par la
collectivité. Il ne s'agit pas d'une
révolution rapide, mais d'une
évolution lente.
|
13
|
Nun, sehen Sie, diese Sachen hängen
dann zusammen mit dem allmählichen
Ausbilden der Idee, die man hatte über
die äußerliche Herbeiführung eines
besseren sozialen Zustandes der
Menschheit. Es ist auch oftmals von
solchen Leuten, die noch Ideale
hatten, gesagt worden: Ach, was
schadet es denn, wenn man alles kurz
und klein schlägt, es muß ja eine
andere Ordnung herbeigeführt werden;
also, es muß eine Revolution kommen,
es muß alles kurz und klein geschlagen
werden, es muß der große
Kladderadatsch kommen, denn nur daraus
kann eine bessere Gesellschaftsordnung
entstehen. — Das sagten noch manche
Leute in den achtziger Jahren, die
gute, idealistische Sozialisten
waren. Denen wurde geantwortet von den
anderen, die auf der Höhe der Zeit
standen, die die Führer geworden waren
— diejenigen, die jetzt, wie ich
sagte, begraben sind —, die sagten:
Das hat alles keinen Sinn, solche
plötzlichen Revolutionen sind sinnlos.
Das einzige, was Sinn hat, das ist,
daß wir den Kapitalismus sich selber
überlassen. Wir sehen ja, früher gab
es nur kleine Kapitalisten, dann sind
es große geworden; sie haben sich
zusammengetan mit anderen, sind zu
Kapitalistengruppen geworden. Die
Kapitalien haben sich immer mehr
konzentriert. In diesem Prozeß sind
wir drinnen, daß die Kapitalien immer
mehr und mehr konzentriert werden.
Dann wird die Zeit kommen, wo
eigentlich nur noch einige wenige
große kapitalistische Trusts,
Konsortien vorhanden sind. Dann wird
es nur noch notwendig sein, daß das
Proletariat, als die nichtbesitzende
Klasse, eines schönen Tages auf ganz
friedliche Weise, auf
parlamentarischem Wege, den
Kapitalistenbesitz, die
Produktionsmittel, überführt in den
Gemeinschaftsbesitz. Das kann ganz gut
gemacht werden, aber man muß
abwarten. Bis dahin müssen sich die
Dinge entwickeln. Der Kapitalismus,
der eigentlich ein unschuldiges Kind
ist, kann ja nichts dafür, daß er
menschenschinderisch ist — das bringt
die geschichtliche Notwendigkeit
herauf. Er arbeitet aber auch vor,
denn er konzentriert die Kapitalien;
sie sind dann schön beieinander, dann
brauchen sie nur übernommen zu werden
von der Allgemeinheit. Nichts von
rascher Revolution, sondern langsame
Entwicklung.
|
Vous voyez, le secret de la vision,
le secret public de la vision, qui est
à la base de tout cela, a été joliment
expliqué par Engels dans les années
90. Il a dit : "Pourquoi des
révolutions rapides ? Ce qui se passe
lentement dans le développement du
nouveau capitalisme, ce regroupement
des capitaux, cette concentration des
capitaux, tout cela travaille pour
nous. Nous n'avons pas besoin de créer
une communauté, les capitalistes le
font déjà. Nous n'avons qu'à le
transformer en propriété
prolétarienne. C'est pourquoi - dit
Engels - les rôles se sont en fait
inversés. Nous, qui représentons le
prolétariat, n'avons pas à nous
plaindre de l'évolution, ce sont les
autres qui doivent se plaindre. Car
les gars qui sont aujourd'hui dans les
cercles des possédants doivent se dire
: nous accumulons les capitaux, mais
nous les accumulons pour les autres.
Voyez, ces types doivent en fait
s'inquiéter de perdre leurs capitaux ;
ils ont les joues creuses, ils se
dessèchent à force de se demander ce
qui va se passer. En tant que
socialistes, nous nous épanouissons
très bien dans cette évolution. Engels
dit que nous avons les muscles
saillants et les joues pleines et que
nous ressemblons à la vie éternelle. -
C'est ce que dit Engels dans une
introduction qu'il a écrite dans les
années 1990, en décrivant comment ce
qui se développe est tout à fait
juste, et comment il suffit d'attendre
le développement, qui est en fait
assuré par le capitalisme lui-même.
Cette évolution débouche ensuite sur
le transfert de ce que le capitalisme
a d'abord concentré dans la propriété
commune de ceux qui n'avaient rien
jusqu'alors. - C'était en fait l'état
d'esprit dans lequel les cercles
dirigeants du prolétariat sont entrés
au XXe siècle.
|
14
|
Sehen Sie, das Geheimnis der
Anschauung, das öffentliche Geheimnis
der Anschauung, das da zugrundeliegt,
hat ja in den neunziger Jahren Engels
schön auseinandergesetzt. Er hat
gesagt: Wozu schnelle Revolutionen?
Dasjenige, was langsam geschieht unter
der Entwicklung des neueren
Kapitalismus, dieses Zusammenrotten
der Kapitalien, dieses Konzentrieren
der Kapitalien, das arbeitet ja alles
für uns. Wir brauchen nicht erst eine
Gemeinsamkeit herzustellen, die
Kapitalisten machen das schon. Wir
brauchen es nur überzuführen in den
proletarischen Besitz. Daher — sagt
Engels — haben sich eigentlich die
Rollen vertauscht. Wir, die wir das
Proletariat vertreten, haben uns ja
gar nicht zu beklagen über die
Entwicklung, die anderen haben sich zu
beklagen. Denn die Kerle, die heute in
den Kreisen der besitzenden Leute
sind, die müssen sich sagen: Wir
sammeln die Kapitalien an, aber für
die anderen sammeln wir sie an. Seht,
die Kerle müssen sich eigentlich
sorgen, daß sie ihre Kapitalien
verlieren; die kriegen eingefallene
Backen, die werden dürr von diesen
Sorgen, was da werden soll. Wir
gedeihen gerade als Sozialisten sehr
gut in dieser Entwicklung drin. Wir
kriegen, sagt Engels, pralle Muskeln
und volle Backen und sehen aus wie das
ewige Leben. — Das sagt Engels in
einer Einleitung, die er in den
neunziger Jahren schrieb, indem er
charakterisierte, wie es ganz recht
ist, was sich da herausentwickelt, und
wie man nur abzuwarten brauchte die
Entwicklung, die eigentlich durch den
Kapitalismus von selber besorgt wird.
Diese Entwicklung mündet dann ein in
die Überführung desjenigen, was der
Kapitalismus erst konzentriert hat, in
den Gemeinbesitz derer, die bisher
nichts gehabt haben. — Das war
eigentlich die Stimmung, in der das
20. Jahrhundert von den führenden
Kreisen des Proletariats betreten
worden ist.
|
Et c'est ainsi qu'on a pensé,
surtout depuis l'époque où le marxisme
n'a plus été pris comme dans les
années 1990, mais où il a été soumis à
une révision, comme on disait, à
l'époque où sont apparus les
révisionnistes, c'est-à-dire ceux qui
sont encore vivants aujourd'hui, mais
qui sont des vieux, comme Bernstein
par exemple. C'est donc là que les
révisionnistes sont arrivés. Ils
disaient qu'il était possible
d'encourager un peu toute l'évolution,
car si les travailleurs se contentent
de travailler jusqu'à ce que les
capitalistes aient tout rassemblé, ils
seront encore dans le besoin avant,
notamment lorsqu'ils seront âgés, ils
n'auront rien. On a donc créé des
assurances et ainsi de suite ; et
surtout, on a veillé à s'approprier ce
que les classes dirigeantes avaient
comme institutions dans la vie
politique. Vous savez, c'est à cette
époque qu'est née la vie syndicale.
|
15
|
Und so hat man gedacht, besonders
seit der Zeit, in der der Marxismus
nicht mehr so genommen worden ist wie
in den neunziger Jahren, sondern als
er einer Revision, wie man sagte,
unterzogen worden ist, in der Zeit,
als die Revisionisten auftraten, also
diejenigen, die heute noch leben, aber
alte Leute sind, wie zum Beispiel
Bernstein. Da kamen also die
Revisionisten. Die sagten, man kann
die ganze Entwicklung etwas fördern,
denn wenn die Arbeiter bloß arbeiten,
bis die Kapitalisten alles
zusammengescharrt haben, werden sie
doch vorher noch Not leiden,
namentlich im Alter haben sie nichts.
Da wurden dann Versicherungen gemacht
und so weiter; und vor allen Dingen
sah man darauf, daß man dasjenige, was
die führenden Klassen hatten als
Einrichtungen im politischen Leben,
daß man sich das auch aneignete. Sie
wissen, damals entstand ja namentlich
auch das gewerkschaftliche Leben.
|
Et à l'intérieur du parti
socialiste, il y avait deux tendances
fortement divergentes : le parti
syndical et le parti politique
proprement dit, comme on disait alors.
Le parti politique se tenait plus sur
le terrain, une révolution soudaine ne
servirait à rien, l'évolution devait
se dérouler comme je viens de le
décrire. Il s'agissait donc de tout
préparer pour le moment où le
capitalisme serait suffisamment
concentré et où le prolétariat aurait
la majorité dans les parlements. Tout
doit être poursuivi par la voie du
parlementarisme, de l'appropriation de
la majorité, afin qu'au moment où les
moyens de production seront transférés
à la propriété commune, il y ait aussi
la majorité pour ce transfert. C'est
notamment dans ce groupe de personnes
qui pensaient tout du parti politique
que l'on ne pensait pas beaucoup au
mouvement syndical à la fin du XIXe
siècle. À cette époque, celui-ci
s'efforçait justement d'instaurer une
sorte de compétition ordonnée entre
lui et les entrepreneurs, afin
d'obtenir de temps en temps des
entreprises des augmentations de
salaire et des choses similaires.
Bref, on s'est arrangé pour imiter le
système de négociations réciproques
qui existait entre les milieux
dirigeants, entre les dirigeants
eux-mêmes, et on l'a étendu aux
relations entre les milieux dirigeants
et le prolétariat. Vous savez que les
représentants du système socialiste
proprement politique ont
particulièrement accusé ceux qui sont
devenus les plus bourgeois du
mouvement syndical. Et à la fin des
années quatre-vingt-dix et au début du
XXe siècle, on pouvait voir partout,
chez ceux qui étaient plus orientés
vers le système politique, un grand
mépris pour les gens qui s'étaient
entièrement plongés dans la vie
syndicale, notamment les typographes,
qui avaient à leur tour développé un
tout autre système de vie syndical,
jusqu'à l'extrême.
|
16
|
Und innerhalb der sozialistischen
Partei waren das die zwei stark
divergierenden Richtungen: die
ausgesprochene Gewerkschaftspartei und
die eigentliche, wie man damals sagte,
politische Partei. Die politische
Partei stand mehr auf dem Boden, eine
plötzliche Revolution nütze nichts,
die Entwicklung müsse so vor sich
gehen, wie ich es eben beschrieben
habe. Daher handle es sich darum, daß
alles vorbereitet werde auf den einen
Zeitpunkt, wo der Kapitalismus
genügend konzentriert ist und das
Proletariat in den Parlamenten die
Majorität hat. Es müsse alles auf dem
Wege des Parlamentarismus, der
Aneignung der Majorität, fortgetrieben
werden, damit an dem Zeitpunkte, wo
die Produktionsmittel in den
Gemeinbesitz übernommen werden
sollten, dann auch die Majorität für
diese Überführung da ist. Namentlich
in dieser Gruppe von Leuten, die alles
von der politischen Partei hielten, da
hielt man am Ende des 19. Jahrhunderts
nicht sehr viel von der
gewerkschaftlichen Bewegung. Diese
setzte sich in jener Zeit eben dafür
ein, so eine Art Wettkampf in
geordneter Art zwischen sich und den
Unternehmern einzurichten, um von
Zeit zu Zeit immer wieder von den
Unternehmungen Lohnerhöhungen und
ähnliche Dinge herauszubekommen.
Kurz, man stellte sich so ein, daß man
nachmachte jenes System gegenseitiger
Verhandlungen, wie es unter den
leitenden, führenden Kreisen
untereinander selbst vorhanden war,
daß man dieses auch ausdehnte auf das
Verhältnis zwischen den leitenden
Kreisen und dem Proletariat. Sie
wissen ja, daß ganz besonders
angeklagt wurden von den Vertretern
des eigentlich politischen
sozialistischen Systems diejenigen,
die dann am meisten bürgerlich wurden
unter der Gewerkschaftsbewegung. Und
am Ende der neunziger Jahre und am
Anfang des 20. Jahrhunderts konnte man
überall sehen bei denjenigen, die mehr
auf das politische System eingerichtet
waren, die große Verachtung für jene
Leute, die sich ganz eingefuchst
hatten auf das gewerkschaftliche
Leben, namentlich zum Beispiel die
Buchdrucker, die wiederum ein ganz
anderes System gewerkschaftlichen
Lebens bis zum Extrem ausgebildet
hatten.
|
Il s'agissait de deux tendances très
distinctes dans la vie sociale : les
syndicalistes et ceux qui penchaient
plutôt vers le parti politique. Et au
sein des syndicats, les typographes de
l'association des typographes étaient
justement les garçons modèles ; ils
étaient les garçons modèles qui
avaient acquis la pleine
reconnaissance des cercles bourgeois.
Et je crois que, de même que l'on a eu
une certaine crainte, une certaine
inquiétude à l'égard du parti
politique socialiste, on a vu peu à
peu émerger avec une grande
satisfaction des gens aussi braves que
les gens de l'association des
typographes. On se disait à leur sujet
: ils s'embourgeoisent, on peut
toujours négocier avec eux, ça se
passe très bien. S'ils s'en prennent à
leurs salaires, nous nous en prenons à
nos prix, que nous exigeons. Ça
marche. - Et, n'est-ce pas, c'était
aussi possible pour les années
suivantes, et les gens ne pensent pas
plus loin. On était donc très
satisfait de cette formation
exemplaire du développement syndical.
Eh bien, si j'omets quelques nuances,
on peut dire que ces deux directions
se sont plus ou moins développées
jusqu'à l'époque où la catastrophe de
la guerre mondiale les a surpris. Mais
malheureusement, les gens n'ont pas
appris de cette catastrophe mondiale
tout ce qui aurait dû être appris en
ce qui concerne la question sociale.
|
17
|
Das waren zwei ganz streng
voneinander geschiedene Richtungen im
sozialen Leben: die Gewerkschafter und
diejenigen, die mehr der politischen
Partei zuneigten. Und innerhalb der
Gewerkschaften waren ja die
Buchdrucker im Buchdruckerverband
geradezu die Musterknaben; sie waren
diejenigen Musterknaben, die sich ja
auch die volle Anerkennung der
bürgerlichen Kreise erworben hatten.
Und ich glaube, daß ebenso, wie man
eine gewisse Angst gehabt hat, eine
gewisse Sorge gehabt hat über die
politische sozialistische Partei, so
hat man nach und nach mit großer
Befriedigung heraufkommen sehen solche
braven Leute wie die Leute im
Buchdruckerverband. Von denen sagte
man sich: Die verbürgerlichen sich,
mit denen kann man immer verhandeln,
das geht ganz gut. Wenn die
aufschlagen mit ihren Löhnen, dann
schlagen wir auf mit unseren Preisen,
die wir fordern. Das geht. — Und,
nicht wahr, für die nächsten Jahre
ging es auch, und weiter denken die
Leute ja auch nicht. Also da war man
mit dieser musterhaften Ausbildung der
gewerkschaftlichen Entwicklung sehr
zufrieden. Nun ja, wenn ich einiges
auslasse, was mehr Nuancen sind, kann
man sagen, daß sich dann diese beiden
Richtungen mehr oder weniger
herausgebildet haben bis in die
Zeiten, die dann überrascht worden
sind von der Weltkriegskatastrophe.
Aber da haben die Leute leider von
dieser Weltkriegskatastrophe ja nicht
alles gelernt, was mit Be‑zug auf die
soziale Frage eigentlich hätte gelernt
werden sollen.
|
N'est-ce pas, si l'on considère les
rapports à l'est de l'Europe, en
Europe centrale, si l'on fait
abstraction du monde anglo-américain
et en partie du monde roman, si l'on
se limite donc à l'Europe centrale et
orientale, on peut dire qu'il n'y a
rien de juste dans cette histoire, que
l'on a toujours définie ainsi : Les
capitaux se concentrent et, lorsque
l'on aura la majorité dans les
parlements, les capitaux seront
transférés à la communauté, et ainsi
de suite. - La catastrophe de la
guerre mondiale a fait en sorte que
l'on ne puisse pas s'y attendre aussi
facilement aujourd'hui. Ceux qui
s'attendaient à une révolution
quelconque ont souvent été considérés
comme des enfants, mais au fond, que
s'est-il passé au cours des quatre ou
cinq dernières années ? Gardons à
l'esprit ce qui s'est passé de manière
claire et nette. N'est-ce pas, vous
l'avez souvent entendu, ce qui s'est
passé au cours des quatre ou cinq
dernières années : en juillet 1914,
les gouvernements sont devenus un peu
"tordus" - ou très "tordus" - et ont
poussé les gens à la guerre mondiale.
Les gens ont cru qu'il y avait une
guerre mondiale, que des batailles
avaient eu lieu - mais avec les moyens
de guerre modernes, avec les moyens
mécaniques, il y avait quelque chose
de tout à fait différent que dans les
guerres précédentes. Il n'y avait plus
aucune possibilité que quelqu'un
devienne un général particulièrement
célèbre, car tout dépendait finalement
de la quantité de munitions et
d'autres moyens de guerre dont
disposait l'un des deux partis, si
l'un fabriquait mieux que l'autre les
moyens de guerre mécaniques ou avait
découvert un gaz et d'autres choses de
ce genre que les autres n'avaient pas.
D'abord l'un gagnait, puis l'autre
découvrait à nouveau quelque chose,
puis le premier à nouveau ; tout cela
était une guerre terriblement
mécanique. Et tout ce qui a été dit
sur ce qui s'est passé ici et là de la
part des humains, c'était sous
l'influence de la phrase, c'était tout
à fait de la phrase. Et peu à peu,
l'humanité moderne comprendra, même en
Europe centrale, tout ce qu'il y a eu
comme phrases dans le fait que l'un ou
l'autre, qui n'était en fait rien
d'autre qu'un soldat moyen un peu
tordu, a été transformé en un grand
général en Europe centrale. Ces choses
n'ont été possibles que sous
l'influence de la phrase. Eh bien,
c'est ce qui s'est passé.
|
18
|
Nicht wahr, sobald man nun
betrachtet die Verhältnisse im Osten
von Europa, in Mitteleuropa, wenn man
absieht von der eigentlich
anglo-amerikanischen Welt und zum Teil
auch von der romanischen Welt, wenn
man sich also auf Mittel- und
Osteuropa beschränkt, so kann man
sagen, mit dieser Geschichte ist
eigentlich nichts Rechtes geworden,
die man immer so definiert hat: Die
Kapitalien konzentrieren sich, und,
wenn man in den Parlamenten die
Majorität haben wird, dann werden die
Kapitalien in den Besitz der
Gemeinschaft übergeführt werden und so
weiter. — Daß das nicht so glatt
erwartet werden kann heute, dafür hat
die Weltkriegskatastrophe gesorgt.
Diejenigen sind ja oftmals als
kindisch hingestellt worden, die
irgendeine Revolution erwartet haben,
aber im Grunde genommen, was ist denn
geschehen in den letzten vier bis fünf
Jahren? Halten wir uns das ganz klar
und deutlich vor Augen, was geschehen
ist. Nicht wahr, Sie haben es ja auch
öfter gehört, was in den letzten vier
bis fünf Jahren geschehen ist: Im Juli
1914 sind die Regierungen ein bißchen
«verdreht» geworden — oder stark
«verdreht» geworden — und haben die
Leute in den Weltkrieg gehetzt. Da
haben die Leute geglaubt, es sei ein
Weltkrieg da, es haben Schlachten
stattgefunden — aber mit den modernen
Kriegsmitteln, mit den
Maschinenmitteln, war etwas ganz
anderes da als in früheren Kriegen. Es
ist doch keine Möglichkeit mehr da
gewesen, daß irgendeiner ein
besonders berühmter Feldherr wurde,
denn schließlich kam es nur darauf an,
ob eine Partei die größere Menge an
Munition hatte und sonstige Mittel der
Kriegführung, ob eine Partei die
mechanischen Kriegsmittel besser
herstellte als die andere oder ein Gas
entdeckt hatte und dergleichen, das
die anderen nicht hatten. Erst siegte
der eine, dann entdeckte der andere
wieder etwas, dann wieder der erste;
das Ganze war eine furchtbar
mechanische Kriegführung. Und alles,
was geredet worden ist über dasjenige,
was da und dort geschehen ist von
seiten der Menschen, das war unter dem
Einfluß der Phrase geschehen, es war
durchaus Phrase. Und nach und nach
wird die moderne Menschheit einsehen,
auch in Mitteleuropa, was alles als
Phrase drinnengesteckt hat, wenn der
eine oder andere, der eigentlich
nichts anderes war als ein etwas
verdrehter Durchschnittssoldat, zu
einem großen Feldherrn gemacht worden
ist in Mitteleuropa. Diese Dinge sind
nur unter dem Einfluß der Phrase
möglich geworden. Nun ja, das war eben
so.
|
Mais que s'est-il passé en réalité ?
Les gens ne l'ont pas remarqué à cause
des événements extérieurs. Alors que
les gens croyaient qu'une guerre
mondiale avait été menée - qui n'était
en fait qu'un masque -, une révolution
s'est en réalité produite. En réalité,
une révolution s'est produite pendant
ces quatre ou cinq ans. Mais les gens
ne le savent pas encore aujourd'hui,
ils n'y prêtent pas attention. La
guerre est l'extérieur, le masque ; la
vérité, c'est que la révolution a eu
lieu. Et parce que la révolution a eu
lieu, la société d'Europe centrale et
orientale se trouve aujourd'hui dans
un tout autre état, et on ne peut rien
faire de ce que les gens avaient
envisagé pour les situations
antérieures. Aujourd'hui, il est
nécessaire de réorganiser toutes les
idées que l'on se faisait auparavant,
de penser les choses de manière
totalement nouvelle. C'est ce qu'a
tenté de faire le livre "Les points
essentiels de la question sociale" :
tenir compte de la situation dans
laquelle les événements récents nous
ont placés. Il n'est donc pas étonnant
que les membres des partis
socialistes, qui ne peuvent pas suivre
le mouvement assez rapidement, se
méprennent sur ce livre. Si les gens
acceptaient une seule fois d'examiner
leurs propres pensées - d'examiner un
peu ce qu'ils disent vouloir -, ils
verraient à quel point ils vivent sous
l'influence des idées qu'ils se sont
faites jusqu'en 1914. C'est la vieille
habitude.
|
19
|
Nun, was ist denn aber in
Wirklichkeit geschehen? Das haben die
Leute vor lauter äußeren Ereignissen
nicht gemerkt. Während die Leute
glaubten, daß ein Weltkrieg geführt
worden sei — der eigentlich nur eine
Maske war —, hat sich in Wirklichkeit
eine Revolution vollzogen. In
Wirklichkeit ist eine Revolution
geschehen in diesen vier bis fünf
Jahren. Das wissen die Leute heute nur
noch nicht, das beachten sie heute
noch nicht. Der Krieg ist die
Außenseite, die Maske; die Wahrheit
ist die, daß sich die Revolution
vollzogen hat. Und weil sich die
Revolution vollzogen hat, ist heute
die Gesellschaft Mittel- und
Osteuropas in einer ganz anderen
Verfassung, und man kann nichts
anfangen mit dem, was die Leute
bedacht hatten für frühere Lagen.
Heute ist es notwendig, daß all die
Gedanken, die man sich früher gemacht
hat, ganz neu geordnet werden, daß man
ganz neu über die Dinge denkt. Und das
ist versucht worden mit dem Buche «Die
Kernpunkte der Sozialen Frage»: ganz
richtig zu rechnen mit der Lage, in
die wir gekommen sind durch die
allerjüngsten Ereignisse. Daher ist es
kein Wunder, daß die Menschen in den
sozialistischen Parteien, die nicht
schnell genug mitkommen können, diesem
Buch Mißverständnis über
Mißverständnis entgegenbringen. Wenn
die Menschen nur einmal sich darauf
einließen, ihre eigenen Gedanken zu
prüfen — ein bißchen zu prüfen
dasjenige, wovon sie sagen, daß sie es
wollen —, dann würden sie sehen, wie
sehr sie leben unter dem Einfluß der
Ideen, die sie sich bis zum Jahre 1914
gemacht haben. Das ist die alte
Gewohnheit.
|
N'est-ce pas, ces idées que l'on a
eues jusqu'en 1914, elles se sont
tellement incrustées dans
l'environnement des humains qu'elles
ne peuvent plus en sortir maintenant.
Et quelle est la conséquence ? La
conséquence, c'est que malgré la
nécessité d'une nouvelle action
aujourd'hui, malgré la révolution qui
s'est produite en Europe centrale et
orientale, malgré la nécessité de
construire aujourd'hui - non pas selon
les anciennes idées, mais selon les
nouvelles idées -, malgré tout cela,
les gens prêchent les anciennes idées.
Et que sont aujourd'hui les partis, y
compris les partis socialistes ? Les
partis socialistes sont ceux qui
continuent à prêcher aujourd'hui tel
ou tel évangile socialiste, à
l'ancienne manière, comme ils l'ont
fait jusqu'en juillet 1914, car il n'y
a pas de différence dans ces
programmes de parti par rapport aux
anciens - tout au plus la différence
qui vient de l'extérieur. Pour celui
qui connaît les choses, il y a
terriblement peu de nouveautés, voire
rien de nouveau, dans les différents
groupes de partis. Les vieilles idées
sont toujours véhiculées aujourd'hui.
Maintenant oui, il y a une petite
différence : si l'on a un chaudron en
cuivre et que l'on tape dessus, cela
sonne ; si l'on tape de la même
manière sur un tonneau en bois, cela
sonne différemment ; mais le coup peut
être tout à fait le même. Cela dépend
alors de ce sur quoi on tape, si cela
sonne différemment. Et c'est ce qui se
passe aujourd'hui lorsque les gens se
mettent à parler de leurs programmes
de parti. Ce qui est contenu dans ces
anciens programmes de parti, c'est en
fait le vieux garde-fou du parti ;
c'est seulement parce qu'il y a
maintenant d'autres conditions
sociales que cela sonne aujourd'hui un
peu différemment, comme cela sonne
différemment dans une chaudière en
cuivre ou dans un tonneau en bois.
Lorsque les socialistes indépendants,
les socialistes majoritaires ou les
communistes parlent, ils prononcent de
vieilles phrases de parti, et cela
sonne différemment parce qu'il n'y a
pas un chaudron en cuivre, mais un
tonneau en bois. En vérité, on n'a
rien appris du tout, du tout, du tout,
de bien des côtés. Mais ce qui compte,
c'est qu'on apprenne quelque chose,
que cette terrible guerre mondiale,
comme on l'appelle, mais qui était en
fait une révolution mondiale, nous
dise quelque chose.
|
20
|
Nicht wahr, diese Ideen, die man bis
1914 gehabt hat, die haben sich so
eingefressen in die Umgebung der
Menschen, daß sie jetzt nicht wieder
herauskommen. Und was ist die Folge?
Die Folge ist: Trotzdem heute ein
neues Handeln notwendig ist, trotzdem
sich die Revolution vollzogen hat in
Ost- und Mitteleuropa, trotzdem wir
heute notwendig haben, einen Aufbau zu
vollziehen — nicht nach alten Ideen,
sondern nach neuen Ideen —, trotz
alledem predigen die Leute die alten
Ideen. Und was sind heute die
Parteien, auch die sozialistischen
Parteien? Die sozialistischen Parteien
sind diejenigen, die in der alten
Weise, wie sie bis zum Juli 1914
gepredigt haben, dieses oder jenes
sozialistische Evangelium auch heute
weiter predigen, denn ein Unterschied
ist bei diesen Parteiprogrammen nicht
gegenüber den früheren — höchstens der
Unterschied, der von außen kommt. Für
den, der die Dinge kennt, für den wird
in der einzelnen Parteigruppierung
furchtbar wenig Neues, ja gar nichts
Neues gesagt. Die alten Ladenhüter von
Gedanken werden auch heute noch
verzapft. Nun ja, es ist ja ein
bißchen ein Unterschied: Wenn man
einen kupfernen Kessel hat und klopft
daran, dann klingt es; klopft man
genauso auf ein hölzernes Faß, dann
klingt es anders; aber das Klopfen
kann ganz dasselbe sein. Es hängt dann
von dem ab, worauf man klopft, ob es
anders klingt. Und so ist es heute,
wenn die Leute ihre Parteiprogramme
verzapfen. Das, was in diesen alten
Parteiprogrammen enthalten ist, das
ist eigentlich der alte
Parteiladenhüter; nur weil jetzt
andere soziale Verhältnisse da sind,
klingt es heute etwas anders, so wie
es anders klingt bei einem kupfernen
Kessel oder bei einem hölzernen Faß.
Wenn die Unabhängigen Sozialisten oder
die Mehrheitssozialisten oder die
Kommunisten reden — sie reden eben
alte Parteiphrasen, und es klingt
anders, weil nicht ein kupferner
Kessel, sondern ein hölzernes Faß da
ist. In Wahrheit hat man auf vielen
Seiten eben gar, gar, gar nichts
gelernt. Aber darauf kommt es an, daß
man etwas lernt, daß einem dieser
furchtbare Weltkrieg, wie man ihn
nennt, der aber eigentlich eine
Weltrevolution war, irgend etwas sagt.
|
Et là, on peut vraiment dire que
dans les masses les plus larges, on
est préparé à entendre quelque chose
de nouveau. Mais dans les grandes
masses, on écoute ce que disent les
dirigeants. Il y a une bonne
compréhension, un bon sens chez les
masses populaires non éduquées, et on
a toujours pu compter sur la
compréhension lorsqu'on propose
quelque chose de vraiment moderne,
quelque chose qui peut être qualifié
de moderne dans le meilleur sens du
terme. Cela s'explique en partie par
le fait que les masses ne sont pas
éduquées. Mais dès que les gens
entrent dans le type d'éducation que
l'on peut avoir depuis les trois ou
quatre derniers siècles, cette
caractéristique d'inculture disparaît.
Si l'on considère l'enseignement
bourgeois actuel, de l'école primaire
jusqu'à l'université - et ce sera
encore pire lorsque l'école unique
socialiste sera fondée, car tout ce
que l'école primaire bourgeoise a fait
de mal y sera présent dans la plus
grande mesure -, on voit bien que
l'enseignement bourgeois n'a pas de
sens : ce qui se fait dans les écoles
forme les esprits et les rend
étrangers à la vie. Il faut sortir de
tout cela, il faut vraiment se mettre
sur ses propres jambes dans la vie
spirituelle si l'on veut sortir de
cette méformation. Mais, voyez-vous,
c'est grâce à cette méformation que
les dirigeants prolétariens, grands et
petits, sont devenus ainsi. Ils ont dû
s'approprier cette formation ; cette
formation se trouve dans nos écoles et
dans les écrits populaires, elle se
trouve partout. Et c'est là que l'on
commence à avoir le cerveau desséché
et que l'on n'est plus accessible aux
faits, mais que l'on s'arrête aux
programmes de parti et aux opinions
que l'on a greffés et martelés. Même
la révolution mondiale peut alors
arriver, on continue à siffler les
vieux programmes.
|
21
|
Und da kann man wirklich schon
sagen: In den breitesten Massen ist
man vorbereitet darauf, etwas Neues zu
hören. Aber bei den breiten Massen ist
das so: Da wird zugehört dem, was die
Führer sagen. Es ist ein gutes
Verständnis da, ein guter, gesunder
Menschenverstand in den breiten,
unverbildeten Massen, und man konnte
eigentlich immer auf Verständnis
rechnen, wenn man etwas richtig
Zeitgemäßes, etwas im besten Sinne des
Wortes zeitgemäß zu Nennendes
vorbringt. Das ist zum Teil darauf
zurückzuführen, daß die Massen
unverbildet sind. Aber sobald sich die
Menschen in die Art der Schulung
hineinbegeben, die man haben kann seit
den letzten drei bis vier
Jahrhunderten, da hört diese
Eigenschaft des Unverbildetseins auf.
Wenn man dasjenige, was die heutige
bürgerliche Schulbildung ist, von der
Volksschule bis hinauf zur
Universität, betrachtet — und am
ärgsten wird es sein, wenn jetzt die
sozialistische Einheitsschule
gegründet wird, da wird alles im
größten Maße vorhanden sein, was von
der bürgerlichen Volksschule
verbrochen worden ist —, da sieht man:
Was da verzapft wird in den Schulen,
das verbildet die Köpfe, das macht sie
dem Leben fremd. Man muß aus dem
ganzen Zeug herauskommen, man muß sich
wirklich im geistigen Leben auf eigene
Beine stellen, wenn man aus dieser
Verbildung herauskommen will. Aber
sehen Sie, durch diese Verbildung sind
die großen und kleinen proletarischen
Führer so geworden. Sie mußten sich
diese Bildung aneignen; diese Bildung
steckt in unseren Schulen und in den
populären Schriften, überall steckt
sie drinnen. Und da fängt man dann an,
so ein vertrocknetes Gehirn zu kriegen
und nicht mehr für die Tatsachen
zugänglich zu sein, sondern bei
Parteiprogrammen und Meinungen, die
man sich eingepfropft und eingehämmert
hat, bei denen bleibt man stehen. Da
kann dann selbst die Weltrevolution
kommen, man pfeift immer noch die
alten Programme darauf los.
|
Vous voyez, c'est essentiellement ce
sort qui a été réservé à ce qui a été
voulu dans de nombreuses directions
avec ce livre "Les points essentiels
de la question sociale" et les
conférences. On y a vraiment tenu
compte de ce dont le prolétariat a
absolument besoin aujourd'hui, de ce
qui est nécessaire compte tenu de la
situation actuelle. On l'a compris au
début [dans le prolétariat], mais
ensuite ceux qui sont les dirigeants
du prolétariat dans les différents
groupes de partis ne l'ont pas
compris. Cela dit, je ne veux pas être
trop injuste et je ne veux pas presser
la vérité ; je ne veux pas affirmer
que ces dirigeants, par exemple, ne
comprennent pas ce livre, car je ne
peux pas supposer qu'ils l'ont lu,
qu'ils le connaissent. Je
n'affirmerais pas quelque chose de
juste si je disais : ils ne peuvent
pas comprendre ce livre. Mais ils ne
peuvent absolument pas se décider à
comprendre que quelque chose d'autre
soit nécessaire que ce qu'ils pensent
depuis des décennies. Leur cerveau est
devenu trop sec, trop rigide pour
cela. Et c'est pourquoi ils s'en
tiennent à ce qu'ils ont pensé depuis
longtemps et trouvent que ce qui est
le contraire de toute utopie, c'est
une utopie. Car, voyez-vous, le livre
"Les points essentiels" tient
pleinement compte du fait qu'on ne
peut plus aujourd'hui se mouvoir dans
des utopies dans le sens des
Saint-Simon, Fourier, Proudhon et
ainsi de suite, mais aussi du fait
qu'on ne peut plus jamais se placer du
point de vue : L'évolution se fera
d'elle-même. Car ce que Marx et Engels
ont vu, ce qui s'est développé [à leur
époque], ce dont ils ont tiré leurs
conclusions, on ne peut plus en tirer
de conclusions aujourd'hui, car la
guerre mondiale l'a balayé, il n'est
plus là sous sa forme véritable. Celui
qui dit aujourd'hui la même chose que
Marx et Engels, dit quelque chose que
Marx n'aurait jamais dit. Il a eu peur
de ses partisans, car il a dit : en ce
qui me concerne, je ne suis pas
marxiste. - Et aujourd'hui, il dirait
: à l'époque, les faits étaient encore
différents ; à l'époque, je tirais mes
conclusions de faits qui n'avaient pas
encore été modifiés, changés, comme la
guerre mondiale a tout changé par la
suite.
|
22
|
Sehen Sie, dieses Schicksal hat im
wesentlichen dasjenige erfahren, was
mit diesem Buche «Die Kernpunkte der
Sozialen Frage» und den Vorträgen in
vieler Richtung gewollt worden ist. Da
wurde einmal wirklich mit dem
gerechnet, was das Proletariat heute
unbedingt braucht, was notwendig ist
aus der Zeitlage heraus. Das verstand
man auch anfangs [im Proletariat],
aber dann verstanden es diejenigen
nicht, die die Führer des Proletariats
in den verschiedenen
Parteigruppierungen sind. Das heißt,
ich will ja nicht allzu ungerecht
sein, und ich will nicht die Wahrheit
pressen; ich will nicht behaupten, daß
zum Beispiel diese Führer dieses Buch
nicht verstehen, denn ich kann nicht
annehmen, daß sie es gelesen haben,
daß sie es kennen. Ich würde nicht
etwas Richtiges behaupten, wenn ich
sagte: sie können das Buch nicht
verstehen. Aber sie können sich
überhaupt nicht entschließen zu
verstehen, daß etwas anderes notwendig
sein soll, als das, was sie seit
Jahrzehnten denken. Dazu ist ihr
Gehirn zu trocken, zu steif geworden.
Und daher bleiben sie stehen bei dem,
was sie seit langer Zeit gedacht haben
und finden, daß dasjenige, was das
Gegenteil von aller Utopie ist, daß
das eine Utopie sei. Denn sehen Sie,
das Buch «Die Kernpunkte» rechnet voll
damit, daß man heute nicht mehr im
Sinne der Saint-Simon, Fourier,
Proudhon und so weiter in Utopien sich
bewegen kann, aber auch damit, daß man
nimmermehr sich auf den Standpunkt
stellen kann: Die Entwicklung wird es
schon von selber geben. Denn das, was
Marx und Engels gesehen haben, was
sich [zu ihren Zeiten] entwickelte,
woraus sie ihre Schlüsse gezogen
haben, aus dem kann man heute nicht
mehr Schlüsse ziehen, denn das hat der
Weltkrieg weggefegt, das ist in seiner
wahren Gestalt nicht mehr da. Wer
heute dasselbe sagt wie Marx und
Engels, der sagt etwas, was Marx
niemals gesagt hätte. Dem ist angst
und bange geworden gerade vor seinen
Anhängern, denn er hat gesagt: Was
mich anbetrifft, ich bin kein Marxist.
— Und heute würde er sagen: Damals
waren die Tatsachen noch andere;
damals habe ich meine Schlüsse gezogen
aus Tatsachen, die noch nicht so
modifiziert, so verändert worden sind,
wie der Weltkrieg alles verändert hat
nachher.
|
Mais, voyez-vous, ces humains qui ne
peuvent rien apprendre des événements,
qui ont aujourd'hui la même attitude
que les anciens catholiques vis-à-vis
de leurs évêques et de leurs papes, ne
peuvent même pas imaginer qu'une chose
telle que le marxisme doit être
développée dans le sens des faits.
C'est ce que font les socialistes,
mais aussi les bourgeois. Les cercles
les plus larges le font ainsi. Les
bourgeois le font naturellement de
manière somnolente, l'âme complètement
endormie, les autres le font de telle
sorte qu'ils se trouvent au milieu et
voient l'effondrement, mais qu'ils ne
veulent pas s'attendre aux faits qui
se révèlent ainsi. Aujourd'hui, nous
avons justement besoin que quelque
chose de nouveau arrive parmi les
humains. Et c'est pourquoi il est
nécessaire de comprendre quelque chose
[comme la triarticulation] qui n'est
pas une utopie, mais qui compte
justement avec les faits. Si, de ce
côté, on appelle ce qui compte ainsi
avec les faits, l'ergotage, on
pourrait en fait être tout à fait
satisfait. Car si les gens appellent
ce qu'ils font avancer une ligne
droite, alors il faut, pour faire
quelque chose de raisonnable, tirer
dans le sens du poil, pour amener ce
qui est déraisonnable dans une autre
direction, raisonnable. Mais vous
voyez, ceux qui comprennent encore ce
qui est raisonnable devraient
approfondir ce qui est présenté ici.
Et c'est à cela que peuvent servir ces
soirées.
|
23
|
Aber sehen Sie, diejenigen Menschen,
die nichts lernen können von den
Ereignissen, die heute von einer
Gesinnung sind, wie die alten
Katholiken ihren Bischöfen und Päpsten
gegenüber waren, die können sich gar
nicht denken, daß so etwas, wie es der
Marxismus ist, auch fortentwickelt
werden muß im Sinne der Tatsachen.Sie
sehen immer noch die alten Tatsachen
vor sich, und deshalbpfeifen und
fauchen die Leute noch immer dasselbe,
was sie gepfif‑fen und gefaucht haben
vor dem Weltkrieg. So machen es die
Sozialisten, aber auch die
Bürgerlichen. Die weitesten Kreise
machenes so. Die Bürgerlichen machen
es natürlich ganz schläfrig, mit
völlig verschlafener Seele, die
anderen machen es so, daß sie
allerdings mitten drinnen stehen und
den Zusammenbruch sehen, daß sie aber
nicht mit den Tatsachen, die sich
dadurch offenbaren, rechnen wollen.
Wir haben eben heute notwendig, daß
etwas Neues unter die Menschen kommt.
Und deshalb ist es nötig, so etwas zu
verstehen [wie die Dreigliederung],
die keine Utopie ist, sondern die
gerade mit den Tatsachen rechnet. Wenn
von jener Seite dasjenige, was so mit
den Tatsachen rechnet, Quertreiberei
genannt wird, so könnte man eigentlich
ganz zufrieden sein. Denn wenn die
Leute das, was sie vorwärtstreiben,
eine gerade Linie nennen, dann muß
man, um etwas Vernünftiges zu
betreiben, in die Quere
hineinschießen, um das Unvernünftige
in andere, in vernünftige Richtung zu
bringen. Aber sehen Sie, diejenigen,
die das Vernünftige doch noch
einsehen, die sollten sich vertiefen
in das, was hier vorgebracht wird.
Und dazu können ja diese Abende da
sein.
|
Non, il y a longtemps que l'on a
essayé de mettre en pratique ce que
l'on a tiré des faits. Et c'est ainsi
que nous nous sommes réunis depuis des
semaines - je n'ai pas besoin de
répéter toutes ces choses, vous pouvez
encore poser des questions ou discuter
des pour et des contre à l'issue de
cet exposé -, nous nous sommes réunis
depuis des semaines pour mettre sur
pied ce que nous appelons le corps des
conseils d'entreprise. Nous avons
essayé de créer ces conseils
d'entreprise à partir des faits
actuels nécessaires, de les créer
vraiment de telle sorte qu'ils
viennent de la simple vie de
l'économie, qu'ils ne viennent pas de
la vie politique, qui ne peut pas
constituer la base de la vie de
l'économie. Car si l'on regarde les
faits en face aujourd'hui, il faut se
tenir strictement sur le terrain de
l'organisme social triarticulé. Et
celui qui ne veut pas de cette
triarticulation aujourd'hui va à
l'encontre de la nécessité historique
de l'évolution de l'humanité.
Aujourd'hui, il doit en être ainsi,
comme je l'ai souvent expliqué : que
la vie spirituelle soit placée sur
elle-même, que la vie économique soit
placée sur elle-même, que la vie de
droit ou politique soit administrée
démocratiquement. Et dans la vie
économique, le premier pas vers un
façonnement réellement social doit
être fait avec les conseils
d'entreprise. Mais comment cela
peut-il se faire ? Uniquement en
posant d'abord la question :
maintenant oui, il y a l'impulsion de
l'organisme social triarticulé, c'est
nouveau par rapport à toutes les
anciennes momies de parti ; y a-t-il
quelque chose d'autre de nouveau ? Les
imbéciles prétendent aujourd'hui que
les idées ne font que tourbillonner
dans l'air. Si l'on écoute les
discussions, elles apportent toutes
sortes de choses négatives, mais elles
n'apportent rien qui puisse être mis
en parallèle avec la triarticulation
de l'organisme social. Tout cela n'est
que de l'eau de rose lorsque les
socialistes affirment que les idées ne
font que pendre dans l'air - comme
cela a été dit dans une revue
nouvellement créée, lors d'une
discussion sur la triarticulation.
|
24
|
Nicht wahr, es ist ja längst
dasjenige, was da aus den Tatsachen
herausgeholt wird, versucht worden, in
die Praxis hineinzutragen. Und so
haben wir uns seit Wochen versammelt —
ich brauche alle diese Dinge nicht zu
wiederholen, Sie können ja auch im
Anschluß an diesen Vortrag noch Fragen
stellen oder pro und contra
diskutieren —, wir haben uns seit
Wochen versammelt, um das, was wir
Betriebsräteschaft nennen, auf die
Beine zu bringen. Wir haben versucht,
diese Betriebsräteschaft aus den
gegenwärtig notwendigen Tatsachen
heraus zu schaffen, wirklich so sie zu
schaffen, daß sie aus dem bloßen
Wirtschaftsleben kommen, daß sie nicht
kommen aus dem politischen Leben, das
nicht die Grundlage des
Wirtschaftslebens abgeben kann. Denn
man muß, wenn man heute den Tatsachen
ins Auge schaut, streng stehen auf dem
Boden des dreigliedrigen sozialen
Organismus. Und derjenige, der heute
diese Dreigliederung nicht will, der
handelt der geschichtlichen
Notwendigkeit der
Menschheitsentwicklung entgegen. Heute
muß das so sein, wie ich es oftmals
ausgeführt habe: daß das geistige
Leben auf sich gestellt wird, daß das
wirtschaftliche Leben auf sich
gestellt wird, daß das Rechts- oder
politische Leben demokratisch
verwaltet wird. Und im
wirtschaftlichen Leben soll der erste
Anfang zu einer wirklich sozialen
Gestaltung mit den Betriebsräten
gemacht werden. Wodurch kann aber das
nur geschehen? Nur dadurch, daß man
zuerst die Frage aufstellt: Nun ja, da
ist der Impuls des dreigliedrigen
sozialen Organismus, der ist neu
gegenüber allen früheren Parteimumien;
ist noch etwas anderes Neues da?
Blödlinge behaupten heute, daß die
Ideen nur so durch die Luft schwirren
würden. Hört man die Diskussionen an,
so bringen sie allerlei Negatives,
aber sie bringen nichts, was der
Dreigliederung des sozialen Organismus
an die Seite zu stellen wäre. Das ist
alles Wischiwaschi, wenn da von
sozialistischer Seite herkommt, daß
die Ideen nur so in der Luft hängen —
wie das gesagt worden ist in einer neu
begründeten Zeitschrift in einer
Besprechung der Dreigliederung.
|
Il s'agit tout d'abord qu’on lance
la question et d'y voir clair : N'y
a-t-il rien d'autre ? Ensuite, on s'en
tient d'abord à la triarticulation de
l'organisme social, jusqu'à ce qu'on
puisse la réfuter de manière
objective, jusqu'à ce qu'on puisse
placer à côté d'elle des choses
objectivement équivalentes. On ne peut
plus discuter des anciens programmes
de parti, c'est la guerre mondiale qui
en a discuté ; celui qui a vraiment de
la compréhension sait que ces
anciennes idées de parti sont réfutées
par la catastrophe de la guerre
mondiale. Mais alors, si l'on ne peut
pas répondre à cette question en
plaçant à côté quelque chose
d'objectivement équivalent, et si l'on
veut aller plus loin, alors on peut
honnêtement se dire : nous travaillons
donc dans le sens de la
triarticulation de l'organisme social.
Disons-le franchement : les anciennes
structures de parti ont perdu leur
signification ; il faut travailler
dans le sens de la triarticulation.
|
25
|
Es handelt sich erstens darum, daß
man die Frage aufwirft und sich
darüber klar wird: Ist nichts anderes
da? Dann hält man sich zunächst an die
Dreigliederung des sozialen
Organismus, bis man sie in sachlicher
Weise widerlegen kann, bis man
sachlich Gleichwertiges daneben
stellen kann. Über die alten
Parteiprogramme kann man nicht mehr
diskutieren, darüber hat der Weltkrieg
diskutiert; wer wirklich Verständnis
hat, der weiß, daß diese alten
Parteimumien durch die
Weltkriegskatastrophe widerlegt sind.
Dann aber, wenn man diese Frage nicht
dadurch beantworten kann, daß man
etwas sachlich Gleichwertiges daneben
stellt, und wenn man weitergehen will,
dann kann man ehrlich sich sagen: Also
arbeiten wir im Sinne der
Dreigliederung des sozialen
Organismus. Sagen wir uns ehrlich: Die
alten Parteizusammenhänge haben ihre
Bedeutung verloren; es muß im Sinne
der Dreigliederung gearbeitet werden.
|
Lorsque j'ai pris la parole
avant-hier à Mannheim, un monsieur
s'est présenté à la fin et a dit : "Ce
que Steiner a dit est bien, mais ce
n'est pas ce que nous voulons ; nous
ne voulons pas ajouter un nouveau
parti à tous les anciens partis. Les
gens qui veulent une telle chose
doivent entrer dans les anciens partis
et y travailler. -- Je ne pouvais que
répondre : j'ai suivi la vie politique
de très près depuis longtemps, alors
que le monsieur qui parlait n'était
pas encore né. Et bien que j'aie été
familiarisé par ma vie avec tout ce
qui fonctionnait socialement comme
force, je n'ai jamais pu agir au sein
d'un parti quelconque ou m'y tenir, et
il ne me vient pas à l'esprit, à la
fin de ma sixième décennie, de devenir
un humain de parti : je ne veux rien
avoir à faire ni avec un autre parti
ni avec un parti que j'aurais fondé
moi-même. Je ne veux pas non plus
avoir affaire à un parti que j'aurais
fondé moi-même ; personne ne doit
craindre qu'un nouveau parti soit
fondé par moi. Car j'ai appris que
chaque parti, par la force des choses,
devient stupide au bout d'un certain
temps, précisément parce que je ne me
suis jamais engagé dans aucun parti.
Et j'ai appris à plaindre les gens qui
n'ont pas compris cela. C'est pourquoi
personne ne doit craindre qu'un
nouveau parti vienne s'ajouter aux
anciens. C'est pourquoi nous n'avons
pas fondé de nouveau parti, mais la
Fédération pour la triarticulation de
l'organisme social s'est réunie pour
représenter les idées de l'organisme
triarticulé, dont le caractère non
utopiste, dont le caractère réel est
tout de même perçu par un certain
nombre de personnes. Les personnes qui
le reconnaissent devraient aussi
l'affirmer honnêtement et sincèrement.
|
26
|
Als ich vorgestern in Mannheim
gesprochen habe, trat zuletzt ein Herr
auf, der sagte: Was da der Steiner
gesagt hat, ist schön, aber es ist
nicht das, was wir wollen; wir wollen
nicht zu allen alten Parteien noch
eine neue Partei. Die Leute, die so
etwas wollen, die sollen in die alten
Parteien eintreten und darin wirken.
-- Ich konnte darauf nur sagen: Ich
habe das politische Leben längst sehr
genau verfolgt, als der Herr, der da
sprach, noch lange nicht geboren war.
Und ichhabe, trotzdem ich mit allem
bekanntgeworden bin durch mein Leben,
was sozial irgendwie als Kraft
funktionierte, ich habe doch niemals
innerhalb irgendeiner Partei gewirkt
oder darinnen stehen können, und es
fällt mir nicht ein, jetzt, am Ende
meines sechsten Lebensjahrzehnts,
irgendwie ein Parteimensch zu werden:
Weder mit einer andern Partei noch mit
einer selbstgegründeten möchte ich
irgend etwas zu tun haben. Also auch
nicht mit einer selbstgegründeten
Partei möchte ich etwas zu tun haben;
das braucht niemand zu fürchten, daß
durch mich eine neue Partei gegründet
wird. Denn daß jede Partei durch
Naturnotwendigkeit nach einiger Zeit
töricht wird, das habe ich gelernt,
gerade indem ich mich niemals mit
irgendeiner Partei eingelassen habe.
Und ich habe gelernt, die Leute zu
bedauern, die das nicht durchschauen.
Daher braucht niemand zu fürchten, daß
zu den alten Parteien eine neue Partei
kommt. Deshalb ist auch von uns nicht
eine neue Partei gegründet worden,
sondern der Bund für Dreigliederung
des sozialen Organismus hat sich
zusammengeschlossen, um die Ideen des
dreigliedrigen Organismus zu
vertreten, deren nicht-utopistischer
Charakter, deren
Wirklichkeitscharakter eben doch von
einer Anzahl von Menschen durchschaut
wird. Die Menschen, die das einsehen,
die sollten aber auch ehrlich und
aufrichtig sich dazu bekennen.
|
Car cela non plus ne doit pas
arriver : Il y a une pièce de théâtre
dans laquelle un coq chante à l'aube,
et chaque fois que le coq a chanté, le
soleil se lève. Eh bien, le coq ne
peut pas voir le contexte, c'est
pourquoi il croit que lorsqu'il
chante, c'est que le soleil répond à
son appel, qu'il vient parce qu'il a
chanté, qu'il a fait en sorte que le
soleil se lève. - Enfin, si quelqu'un
dans la vie non sociale se laisse
aller à une telle illusion, comme ce
coq qui chante sur le fumier et veut
faire se lever le soleil, cela ne fait
rien. Mais si, dans certaines
circonstances, il arrivait que l'idée
des conseils d'entreprise
véritablement économiques prospère sur
le sol de l'organisme triarticulé et
que les personnes qui s'en occupent
veuillent nier l'origine, à savoir que
l'impulsion de la triarticulation a
mis cette idée en mouvement, et si ces
personnes croient que parce qu'on a
chanté, les conseils d'entreprise vont
venir, alors ce serait la même erreur,
et une erreur très fatale. Mais cela
ne doit pas arriver. Ce qui se passe
dans cette direction [les conseils
d'entreprise], ce qui a été entrepris
ici, ne doit pas être dissocié, cela
doit rester en rapport avec
l'impulsion bien comprise de la
triarticulation de l'organisme social.
Et ceux qui veulent réaliser les
conseils d'entreprise dans le sens de
cette impulsion ne peuvent jamais
accepter que les conseils d'entreprise
soient créés de manière unilatérale et
que l'on ne crie que "conseils
d'entreprise, conseils d'entreprise".
Ce n'est pas suffisant. Cela n'a de
sens que si l'on aspire en même temps
à tout ce qui doit être recherché par
l'impulsion de l'organisme social
triarticulé. C'est ce qui est
important. Car si vous voulez vraiment
comprendre ce qui est écrit dans les
"points essentiels", vous devez vous
placer du point de vue que l'on peut
apprendre des faits que les quatre ou
cinq dernières années ont offerts.
Pour celui qui voit clair dans ces
faits, ils apparaissent comme s'il
avait vécu des siècles, et pour celui
qui voit les programmes des partis
comme si leurs promoteurs avaient
dormi pendant des siècles.
Aujourd'hui, cela doit être envisagé
clairement et sans réserve.
|
27
|
Denn auch das darf nicht geschehen:
Es gibt ein Theaterstück, da kräht ein
Hahn in der Früh, und immer, wenn der
Hahn gekräht hat, geht die Sonne auf.
Nun ja, der Hahn kann nicht den
Zusammenhang durchschauen, daher
glaubt er, wenn er kräht, dann folge
die Sonne seinem Ruf, sie komme, weil
er gekräht hat, er habe bewirkt, daß
die Sonne aufgeht. — Wenn schließlich
jemand im nicht-sozialen Leben sich
einer solchen Täuschung hingibt, wie
dieser Hahn, der auf dem Mist kräht
und die Sonne aufgehen machen will, so
macht es nichts. Wenn aber unter
Umständen es hier geschehen würde, daß
die Idee der wirklich wirtschaftlichen
Betriebsräte gedeiht auf dem Boden des
dreigliedrigen Organismus und
diejenigen Menschen, die das pflegen,
verleugnen wollten etwa den Ursprung,
nämlich daß der Impuls der
Dreigliederung diese Idee in Fluß
gebracht hat, und wenn diese Menschen
glauben, weil man gekräht habe, kämen
die Betriebsräte, dann wäre das
derselbe Irrtum, und zwar ein sehr
verhängnisvoller Irrtum. Das darf aber
nicht kommen. Das, was in dieser
Richtung [der Betriebsräte] geschieht,
was in Angriff genommen worden ist
hier, das darf nicht losgelöst werden,
es muß im Zusammenhang bleiben mit dem
richtig verstandenen Impuls der
Dreigliederung des sozialen
Organismus. Und diejenigen, die im
Sinne dieses Impulses die
Betriebsräteschaft verwirklichen
wollen, die können sich niemals darauf
einlassen, daß etwa in einseitiger
Weise bloß die Betriebsräteschaft
gegründet würde und immer nur gekräht
würde «Betriebsräte, Betriebsräte».
Damit ist es nicht genug. Das hat nur
einen Sinn, wenn man zugleich anstrebt
alles, was durch den Impuls des
dreigliedrigen sozialen Organismus
angestrebt werden soll. Das ist es,
worauf es ankommt. Denn wollen Sie
wirklich das verstehen, was in den
«Kernpunkten» steht, dann müssen Sie
sich auf den Standpunkt stellen, den
man lernen kann aus den Tatsachen, die
die letzten vier bis fünf Jahre
geboten haben. Wer diese Tatsachen
durchschaut, auf den wirken sie so,
als wenn er Jahrhunderte durchlebt
hätte, und auf den wirken die
Parteiprogramme so, als wenn ihre
Träger Jahrhunderte geschlafen hätten.
Heute muß dieses klar und rückhaltlos
ins Auge gefaßt werden.
|
Ce que je viens de vous raconter,
j'aurais bien sûr tout aussi bien pu
l'écrire en préambule de ce livre.
Seulement, on a pu constater ces
derniers mois à quel point les
programmes des partis sont
actuellement rigides et stériles. Mais
il serait utile que cela figure en
préambule de ce livre. Je vous ai
raconté aujourd'hui beaucoup de choses
qui n'y figurent pas, puisque vous
avez décidé, me semble-t-il, de vous
réunir ici pour étudier correctement
les graves questions sociales
actuelles dans le prolongement de ce
livre. Mais avant de s'y atteler, il
faut déjà se rendre compte que l'on ne
peut pas continuer à trottiner dans le
vieux style des programmes et des
modèles de parti, mais que l'on doit
se décider à aborder aujourd'hui les
faits conformément à la réalité et à
tirer un trait sur tout ce qui ne
tient pas compte de ces nouveaux
faits. Ce n'est qu'ainsi que vous
comprendrez correctement ce qui doit
être réalisé, précisément avec cette
impulsion vers un organisme social
triarticulé. Et vous le comprendrez de
la bonne manière si vous trouvez que
chaque phrase de ce livre est
susceptible d'être mise en pratique,
d'être transformée en réalité
immédiate. Et la plupart de ceux qui
disent qu'ils ne comprennent pas ou
qu'il s'agit d'utopies et autres,
n'ont tout simplement pas le courage
de penser assez fort aujourd'hui pour
que les pensées puissent intervenir
dans la réalité. Ceux qui crient
toujours "dictature du prolétariat",
"conquête du pouvoir", "socialisme",
pensent généralement très peu. Il
n'est donc pas possible d'intervenir
dans la réalité avec ces modèles de
mots. Mais ils viennent ensuite dire
qu'on ne propose [avec les "points
essentiels"] que quelque chose qui est
une utopie. Ce n'est que dans l'esprit
des gens qui n'y comprennent rien que
cela devient une utopie.
|
28
|
Das, was ich Ihnen jetzt erzählt
habe, das hätte ich natürlich
ebensogut als Vorrede in dieses Buch
schreiben können. Allein, man hat ja
erst in den letzten Monaten gesehen,
wie steif und unfruchtbar die
Parteiprogramme gegenwärtig sind. Aber
es wäre schon nützlich, wenn gerade
das als Vorrede in diesem Buche stehen
würde. Vieles, was nicht darin steht,
habe ich Ihnen heute erzählt, da Sie,
wie mir scheint, beschlossen haben,
hier zusammenzukommen, um in
Anknüpfung an dieses Buch die ernsten
sozialen Fragen der Gegenwart
sachgemäß zu studieren. Aber bevor man
sich an das macht, muß man sich schon
klarmachen, daß man nicht forttrotteln
kann in dem alten Stil der
Parteiprogramme und Parteischablonen,
sondern daß man sich dazu entschließen
muß, heutedie Tatsachen
wirklichkeitsgemäß anzufassen und
einen Strich zumachen unter alles das,
was nicht rechnet mit diesen neuen
Tat‑sachen. Nur dadurch werden Sie
das, was erreicht werden soll gerade
mit diesem Impuls vorn dreigliedrigen
sozialen Organismus, in der richtigen
Weise auffassen. Und Sie werden es in
der richtigen Weise auffassen, wenn
Sie finden, daß jeder Satz in diesem
Buch dazu angetan ist, Tat werden zu
können, umgesetzt werden zu können in
unmittelbare Wirklichkeit. Und die
meisten, die sagen, sie würden das
nicht verstehen oder es seien Utopien
und dergleichen, denen fehlt einfach
der Mut, die Courage, heute so stark
zu denken, daß die Gedanken in die
Wirklichkeit eingreifen können.
Diejenigen, die immer krähen «Diktatur
des Proletariats», «Eroberung der
Macht», «Sozialismus», die denken
zumeist sehr wenig dabei. Es kann
daher mit diesen Wortschablonen nicht
in die Wirklichkeit eingegriffen
werden. Dann aber kommen diese und
sagen, da würde [mit den
«Kernpunkten»] nur etwas geboten, was
eine Utopie ist. Eine Utopie wird es
erst in den Köpfen von den Leuten, die
nichts davon verstehen.
|
C'est pourquoi il faudrait faire
comprendre à ces gens ce que Goethe a
dit un jour, sous une forme un peu
différente et en se référant à autre
chose, en se moquant du physiologiste
Haller, qui était un naturaliste
ossifié. Haller avait inventé la
parole :
|
29
|
Deshalb sollte man diesen Leuten
klarmachen, was, in einer etwas
veränderten Form mit Bezug auf etwas
anderes, Goethe einmal gesagt hat,
indem er gelacht hat über den
Physiologen Haller, der ein
verknöcherter Naturforscher war.
Haller hatte das Wort geprägt:
|
aucun esprit créé ne pénètre à
l'intérieur de la nature.
Heureux celui à qui elle indique
seulement l'enveloppe extérieure !
Cela répugnait à Goethe, et il disait
: "À l'intérieur de la nature" - ô
philistin ! - "Aucun esprit créé ne
pénètre". "Heureux celui à qui elle
indique seulement l'enveloppe
extérieure !" J'entends cela se
répéter depuis soixante ans, je le
maudis, mais en cachette.
La nature n'a ni noyau ni enveloppe,
elle est tout en une seule fois.
Examine-toi donc le plus possible
pour savoir si tu es le noyau ou la
coquille !
|
30
|
Ins Innere der Natur Dringt kein
erschaffner Geist.
Glückselig, wem sie nur Die äußere
Schale weist! Das widerstrebte Goethe,
und er sagte: «Ins Innere der Natur» —
O, du Philister! — «Dringt kein
erschaffner Geist.» «Glückselig, wem
sie nur Die äußere Schale weist!» Das
hör ich sechzig Jahre wiederholen, Ich
fluche drauf, aber verstohlen.
Natur hat weder Kern Noch Schale,
Alles ist sie mit einem Male.
Dich prüfe du nur allermeist, Ob du
Kern oder Schale seist!
|
Ceux qui parlent de la
triarticulation de l'organisme social
comme d'une utopie, on aimerait aussi
leur dire : "Examine-toi seulement si
ce qui hante ton cerveau est soi-même
une utopie ou une réalité. -- On
trouvera alors que tous les corbeaux
ont la plupart du temps des utopies à
l'intérieur et que la réalité dans
leur propre tête devient donc aussi
une utopie ou une idéologie, ou comme
ils l'appellent alors. C'est pourquoi
il est si difficile aujourd'hui de
faire passer la réalité, parce que les
gens se sont tellement barré l'accès à
la réalité.
|
31
|
Diejenigen, die von der
Dreigliederung des sozialen Organismus
als von einer Utopie sprechen, zu
denen möchte man auch so sagen: Dich
prüfe du nur zuallermeist, ob das in
deinem Gehirn drinnen Spukende selber
Utopie oder Wirklichkeit ist. -- Da
wird man finden, daß all die Kräher
zumeist Utopien drinnen haben und
deshalb die Wirklichkeit in ihrem
eigenen Kopfe auch eine Utopie wird
oder eine Ideologie oder wie sie es
dann nennen. Deshalb ist es heute so
schwer, mit der Wirklichkeit
durchzudringen, weil die Leute sich so
verbaut haben den Zugang zu der
Wirklichkeit.
|
Mais nous devons nous dire que nous
devons travailler sérieusement, sinon
nous ne pourrons pas passer de notre
volonté à l'action ; et c'est ce qui
importe, que nous passions de notre
volonté à l'action. Et si nous devions
renoncer à tout, parce que nous le
reconnaissons comme une erreur, alors
nous devrions, pour pouvoir passer du
vouloir à l'action, nous tourner vers
la vérité, que nous voulons percer à
jour en tant que vérité, car rien
d'autre ne peut conduire du vouloir à
l'action que la poursuite impitoyable
et courageuse de la vérité. Cela
devrait en fait être écrit comme une
devise, comme un slogan, avant les
études de ces soirées. Je voulais vous
présenter ce soir une préface à ces
soirées d'étude. J'espère que ce
préambule ne vous empêchera pas de
cultiver ces études de telle sorte
qu'enfin, avant qu'il ne soit trop
tard, des pensées qui portent en elles
des germes d'action puissent s'insérer
dans le monde de manière fructueuse.
|
32
|
Das aber müssen wir uns sagen, daß
wir ernstlich arbeiten müssen, sonst
werden wir nicht überführen können
unser Wollen in die Tat; und darauf
kommt es an, daß wir unser Wollen in
die Tat überführen. Und wenn wir von
allem Abschied nehmen müßten, weil wir
es als einen Irrtum erkennen, so
müßten wir, um vom Wollen zur Tat
kommen zu können, uns doch zur
Wahrheit wenden, die wir als Wahrheit
durchschauen wollen, denn nichts
anderes kann vom Wollen zur Tat
führen, als das rücksichtslose,
couragierte Verfolgen der Wahrheit.
Das sollte eigentlich als eine Devise,
als ein Motto, vor die Studien dieser
Abende geschrieben werden. Ich wollte
Ihnen heute Abend eine Vorrede halten
zu diesen Studienabenden. Ich hoffe,
daß diese Vorrede Sie nicht abhält,
diese Studien so zu pflegen, daß
endlich wirklich, ehe es zu spät wird,
Gedanken, die Tatenkeime in sich
tragen, sich fruchtbar in die Welt
hineinstellen können.
|
Nous aurons l'occasion d'en
discuter.
|
33
|
Es wird die Gelegenheit zu einer
Aussprache gegeben.
|
#diffPF
Rudolf Steiner : Le livre "Les points
essentiels de la question sociale" est
écrit d'une manière particulière, et
ce pour deux raisons : premièrement,
il est écrit de telle manière qu'il
est en fait entièrement tiré de la
réalité. Certaines personnes qui
lisent le livre n'y pensent pas. Je
peux aussi comprendre que cela ne soit
pas pleinement pris en compte
aujourd'hui. J'ai déjà parlé ici, dans
ce cercle - mais tous ceux qui sont là
aujourd'hui n'étaient pas présents -
de la façon dont les gens pensent
vraiment aujourd'hui. J'ai notamment
fait référence à l'exemple du
professeur d'économie nationale, Lujo
Brentano, qui l'a si bien présenté
dans le dernier numéro de la "Feuille
jaune" ; je veux le répéter
brièvement, car je veux m'y rattacher
un peu. Cette lumière de la théorie
d'économie politique/de peuple
actuelle de l'université - il est le
premier, pour ainsi dire - a développé
le concept d'entrepreneur et a tenté
de caractériser les caractéristiques
de l'entrepreneur à partir de sa
pensée éclairée. Je n'ai pas besoin
d'énumérer la première et la deuxième
caractéristique ; la troisième est que
l'entrepreneur est celui qui met ses
moyens de production au service de
l'ordre social à son propre compte et
à ses propres risques. Il a maintenant
cette notion d'entrepreneur, et il
l'applique. Il arrive alors à
l'étrange résultat que l'ouvrier
prolétarien d'aujourd'hui est en fait
aussi un entrepreneur, car il
correspond à son concept
d'entrepreneur en ce qui concerne la
première, la deuxième et la troisième
caractéristique. Car l'ouvrier a sa
propre force de travail comme moyen de
production ; il en dispose, et par
rapport à celle-ci, il s'adresse au
processus social à son propre compte
et à ses propres risques. - Ainsi,
cette lumière de l'économie de peuple
intègre très bien le concept de
travailleur prolétarien dans son
concept d'entrepreneur. Vous voyez,
c'est ainsi que pensent justement les
humains qui se font des concepts qui
n'ont aucun sens ; ils n'ont aucun
sens si l'on exige des concepts qui
doivent être réellement applicables à
la réalité. Mais même si vous ne
l'acceptez peut-être pas, on peut dire
tranquillement que plus de
quatre-vingt-dix pour cent de tout ce
qui est enseigné ou imprimé
aujourd'hui utilise de tels concepts ;
si on veut les appliquer à la réalité,
cela ne marche pas plus que le concept
d'entrepreneur de Lujo Brentano. C'est
ainsi dans la science, c'est ainsi
dans la science sociale, c'est ainsi
partout, c'est pourquoi les gens ont
désappris à comprendre ce qui
travaille avec des concepts conformes
à la réalité.
|
34
|
Rudolf Steiner: Das Buch «Die
Kernpunkte der Sozialen Frage» ist ja
nach zweifacher ichtung in einer
besonderen Art geschrieben, Erstens
ist es so geschrieben, daß es
tatsächlich ganz aus der Wirklichkeit
heraus stammt. Das bedenken manche
Leute nicht, die das Buch lesen. Ich
kann auch begreifen, daß das heute
nicht voll bedacht wird. Ich habe
schon einmal hier in diesem Kreise —
aber es waren nicht alle die da, die
heute da sind — davon gesprochen, wie
nun wirklich die Leute heute denken.
Ich habe namentlich hingewiesen auf
das Beispiel des Professors der
Nationalökonomie, Lujo Brentano, der
das so nett geliefert hat in der
vorigen Nummer des «Gelben Blattes»;
ich will es kurz wiederholen, weil ich
daran etwas anknüpfen will. Da hat
diese Leuchte der heutigen
Volkswirtschaftslehre der Universität
— er ist ja der Erste sozusagen — den
Begriff des Unternehmers entwickelt
und hat versucht, aus seinem
erleuchteten Denken heraus die
Merkmale des Unternehmers zu
charakterisieren. Das erste und zweite
Merkmal brauche ich nicht aufzuzählen;
als drittes gibt er an, daß der
Unternehmer derjenige ist, der seine
Produktionsmittel auf eigene Rechnung
und Gefahr in den Dienst der sozialen
Ordnung stellt. Nun hat er diesen
Begriff des Unternehmers, und den
wendet er nun an. Da kommt er zu dem
merkwürdigen Resultat, daß der
proletarische Arbeiter von heute
eigentlich auch ein Unternehmer ist,
denn er entspricht diesem seinem
Begriff des Unternehmers in bezug auf
die erste, zweite und dritte
Eigenschaft. Denn der Arbeiter hat
seine eigene Arbeitskraft als
Produktionsmittel; darüber verfügt er,
in bezug auf diese wendet er sich an
den sozialen Prozeß auf eigene
Rechnung und Gefahr. — So bringt diese
Leuchte der Volkswirtschaft den
Begriff des proletarischen
Arbeitnehmers in seinen Begriff des
Unternehmers sehr gut hinein. Sehen
Sie, so denken eben die Menschen, die
sich Begriffe machen, die gar keinen
Sinn haben; sie haben keinen Sinn,
wenn Begriffe verlangt werden, die auf
die Wirklichkeit wirklich anwendbar
sein sollen. Aber so wenig Sie das
vielleicht auch annehmen werden, man
kann ruhig sagen: Weit über neunzig
Prozent alles desjenigen, was heute
gelehrt oder gedruckt wird, das
operiert mit solchen Begriffen; wenn
man sie anwenden will auf die
Wirklichkeit, so geht es ebensowenig
wie bei Lujo Brentanos Begriff vom
Unternehmer. So ist es in der
Wissenschaft, so ist es in der
Sozialwissenschaft, so ist es überall,
daher haben die Leute verlernt,
überhaupt das zu verstehen, was mit
wirklichkeitsgemäßen Begriffen
arbeitet.
|
Prenez par exemple la base de la
triarticulation de l'organisme social.
N'est-ce pas, on peut les poser de
différentes manières, ces bases, parce
que la vie a besoin de nombreuses
bases. Mais l'une d'entre elles est
que l'on sait que l'époque récente a
vu l'émergence de ce que l'on pourrait
appeler l'impulsion de la démocratie.
La démocratie doit consister en ce que
tout humain devenu majeur puisse
établir son rapport de droit dans des
parlements démocratiques, directement
ou indirectement par rapport à tout
autre humain devenu majeur. Mais
justement, si l'on veut honnêtement et
sincèrement instaurer cette démocratie
dans le monde, on ne peut pas gérer
les affaires spirituelles dans le sens
de cette démocratie, car chaque humain
devenu majeur devrait alors décider de
ce qu'il ne comprend pas. Les affaires
spirituelles doivent être réglées à
partir de la compréhension de la
chose, c'est-à-dire qu'elles doivent
être placées sur elles-mêmes ; elles
ne peuvent donc absolument pas être
administrées dans un parlement
démocratique, mais elles doivent avoir
leur propre administration, qui ne
peut pas être démocratique, mais qui
doit être issue de la chose. Il en va
de même dans la vie de l'économie ; la
chose doit être gérée à partir de
l'expérience économique et du vivre
dedans la vie de l'économie. C'est
pourquoi la vie de l'économie d'un
côté et la vie de l'esprit de l'autre
doivent être séparées du parlement
démocratique. C'est ainsi que naît
l'organisme social triarticulé.
|
35
|
Nehmen Sie einmal die Grundlage der
Dreigliederung des sozialen
Organismus. Nicht wahr, man kann sie
in der verschiedensten Weise legen,
diese Grundlagen, weil das Leben viele
Grundlagen braucht. Aber eine ist
diese, daß man weiß: in der neueren
Zeit ist das heraufgezogen, was man
nennen könnte den Impuls der
Demokratie. Die Demokratie muß darin
bestehen, daß jeder mündig gewordene
Mensch sein Rechtsverhältnis
festsetzen kann in demokratischen
Parlamenten -- mittelbar oder
unmittelbar gegenüber jedem anderen
mündig gewordenen Menschen. Aber
gerade wenn man ehrlich und aufrichtig
diese Demokratie in die Welt setzen
will, dann kann man die geistigen
Angelegenheiten nicht im Sinne dieser
Demokratie verwalten, denn da würde
entscheiden müssen jeder mündig
gewordene Mensch über das, was er
nicht versteht. Die geistigen
Angelegenheiten müssen aus dem
Verständnis heraus für die Sache
geregelt werden, das heißt auf sich
selbst gestellt werden; sie können
also überhaupt nicht in einem
demokratischen Parlament verwaltet
werden, sondern sie müssen ihre eigene
Verwaltung haben, die nicht
demokratisch sein kann, sondern die
aus der Sache heraus sein muß. Ebenso
ist es im Wirtschaftsleben; da muß aus
der wirtschaftlichen Erfahrung und dem
Drinnenleben im Wirtschaftsleben die
Sache verwaltet werden. Daher muß
ausgeschieden werden aus dem
demokratischen Parlament das
Wirtschaftsleben auf der einen Seite
und das Geistesleben auf der anderen
Seite. Daraus entsteht der
dreigegliederte soziale Organismus.
|
Là y a maintenant à Tübingen le
professeur Heck, c'est lui - j'en ai
déjà parlé - qui a dit qu'il ne
fallait absolument pas se laisser
aller à dire que le rapport salarial
habituel, où l'on est rémunéré pour
son travail, avait quelque chose
d'humiliant pour le prolétaire, car
Caruso était aussi dans un rapport
salarial. La différence ne serait pas
de principe : Caruso chante et reçoit
son salaire, et le prolétaire
ordinaire travaille et reçoit aussi
son salaire ; et lui, en tant que
professeur, reçoit aussi son salaire
lorsqu'il donne une conférence. La
seule différence entre Caruso et le
prolétaire serait que Caruso reçoit
trente à quarante mille marks pour une
soirée et le prolétaire un peu moins.
Mais il ne s'agit pas d'une différence
de principe, seulement d'une
différence concernant la somme de la
rémunération. Et donc, selon ce
professeur plein d'esprit, on n'a pas
besoin de ressentir quelque chose de
dégradant dans la rémunération ; lui
non plus ne le ressent pas ainsi. - Ce
n'est qu'une parenthèse. Mais ce
professeur intelligent a également
écrit un long article contre la
triarticulation. Là, il part de ce que
si l'on articule en trois, on en
arrive à trois parlements. - Et
maintenant, il montre que ce n'est pas
possible avec trois parlements, car il
dit : dans le parlement économique, le
petit artisan ne comprendra pas le
point de vue du grand industriel, et
ainsi de suite. - C'est là que le bon
professeur s'est fait ses idées sur la
triarticulation, et contre ces idées -
que je trouve encore bien plus
stupides que le professeur Heck ne les
trouve ; je les critiquerais aussi
jusqu'à la moelle -, il s'en prend à
elles, mais il les a faites lui-même.
Il s'agit en effet de ne pas
juxtaposer trois parlements, mais d'en
retirer ce qui n'a pas sa place dans
un parlement. Il fait simplement trois
parlements et dit : ce n'est pas
possible. - C'est ainsi que l'on vit
dans des concepts étrangers à la
réalité et que l'on juge les autres en
fonction de ceux-ci.
|
36
|
Da gibt es nun in Tübingen den
Professor Heck, das ist der — ich habe
schon davon gesprochen —, der gesagt
hat, man brauche sich durchaus nicht
herbeizulassen zu sagen, daß das
gewöhnliche Lohnverhältnis, wo man
entlohnt wird für seine Arbeit, etwas
Erniedrigendes hätte für den
Proletarier, denn Caruso stehe ja auch
im Lohnverhältnis. Der Unterschied
wäre kein prinzipieller: Caruso singe
und bekomme seinen Lohn, und der
gewöhnliche Proletarier arbeite und
bekomme auch seinen Lohn; und er als
Professor bekomme auch seinen Lohn,
wenn er vortrage. 1 er Unterschied
zwischen Caruso und dem Proletarier
wäre nur der, daß Caruso für einen
Abend dreißig- bis vierzigtausend Mark
bekommt und der Proletarier etwas
weniger. Aber das sei kein
prinzipieller Unterschied, sondern nur
ein Unterschied in bezug auf die Summe
der Entlohnung. Und so braucht man, so
meint dieser geistreiche Professor, in
der Entlohnung durchaus nicht etwas
Entwürdigendes zu fühlen; er fühle das
auch nicht so. — Das nur nebenbei.
Aber nun hat dieser gescheite
Professor auch einen langen Artikel
geschrieben gegen die Dreigliederung.
Da geht er aus davon: Gliedern wir
dreifach, dann kommen wir ja zu drei
Parlamenten. — Und jetzt zeigt er, daß
das nicht geht mit drei Parlamenten,
denn er sagt: Im Wirtschaftsparlament
wird der kleine Handwerker nicht
verstehen die Standpunkte des
Großindustriellen und so weiter. — Da
hat sich der gute Professor seine
Ideen über die Dreigliederung gemacht,
und gegen diese Ideen — die ich noch
viel dümmer finde als Professor Heck
sie findet; die würde ich auch in
Grund und Boden hinein kritisieren —,
gegen die geht er an, aber die hat er
selbst gemacht. Es handelt sich
nämlich darum, daß nicht drei
Parlamente nebeneinanderstehen,
sondern daß herausgenommen wird das,
was in kein Parlament gehört. Er macht
einfach drei Parlamente und sagt: Das
geht nicht. — So lebt man in
wirklichkeitsfremden Begriffen und
beurteilt das andere auch danach.
|
Maintenant, dans l'économie
nationale, la théorie d'économie de
peuple, est presque seulement inclus
ce que sont des concepts irréels.
Mais, voyez-vous, je ne pourrais pas,
maintenant que le temps presse, écrire
une bibliothèque entière dans laquelle
seraient répertoriés tous les concepts
d'économie de peuple. C'est pourquoi
se trouve naturellement dans les
"points essentiels" une multitude de
concepts qui doivent être
abordés/discutés de manière
appropriée. Il me suffit par exemple
d'attirer l'attention sur ce qui suit
:
|
37
|
Nun ist gerade in die
Nationalökonomie, in die
Volkswirtschaftslehre, fast nur das
eingezogen, was unwirkliche Begriffe
sind. Aber sehen Sie, ich könnte doch
nicht jetzt, wo die Zeit drängt, eine
ganze Bibliothek schreiben, worin alle
volkswirtschaftlichen Begriffe
aufgeführt werden. Daher finden sich
natürlich in den «Kernpunkten» eine
Menge von Begriffen, die sachgemäß
besprochen werden müssen. Ich brauche
zum Beispiel nur auf folgendes
aufmerksam zu machen:
|
N'est-il pas vrai qu'à une époque
que nous avons dépassée, les relations
sociales étaient essentiellement le
fruit de la conquête ? Un territoire
quelconque était occupé par un peuple
ou une race ; un autre peuple faisait
irruption et conquérait le territoire.
Les races ou les peuples qui étaient
auparavant à l'intérieur ont été
soumis au travail. Le peuple
conquérant a pris le sol en
possession, ce qui a créé un certain
rapport entre les conquérants et les
conquis. Les conquérants, du fait
qu'ils étaient des conquérants,
avaient le sol en possession. De ce
fait, ils étaient les plus forts
économiquement, les conquis étaient
les plus faibles économiquement, et il
s'en est formé ce qui est devenu un
rapport de droit. C'est pourquoi, à
presque toutes les époques anciennes
de l'évolution historique, on a des
rapports de droit fondés sur des
conquêtes, c'est-à-dire des privilèges
et des droits de désavantage. Les
temps sont maintenant venus où il
n'était plus possible de conquérir
librement. Vous pouvez étudier la
différence entre la conquête libre et
la conquête liée en regardant par
exemple le début du Moyen Âge. Vous
pouvez étudier comment certains
peuples, les Goths, sont descendus
vers le sud, mais dans des régions
entièrement occupées ; ils ont alors
été amenés, en ce qui concerne l'ordre
social, à faire autre chose que les
Francs, qui sont allés vers l'ouest et
n'y ont pas trouvé de régions
entièrement occupées. Cela a donné
naissance à d'autres droits de
conquête. À l'époque moderne, ce ne
sont pas seulement les droits fonciers
issus des conquêtes qui ont agi, mais
aussi les droits des humains qui
avaient des privilèges de possession
et qui pouvaient désormais
s'approprier les moyens de production
grâce au pouvoir économique. La
possession des moyens de production,
c'est-à-dire la propriété privée des
capitaux, s'est ajoutée au droit
foncier au sens actuel du terme. Cela
a donné lieu à des rapports de droit
issus de rapports économiques. Comme
vous le voyez, ces rapports de droit
sont nés tout seuls à partir de
rapports économiques.
|
38
|
Nicht wahr, in einer Zeit, über die
wir hinaus sind, da entstanden soziale
Verhältnisse im Grunde genommen einzig
und allein durch Eroberung. Irgendein
Territorium wurde von einem Volke oder
von einer Rasse besetzt; ein anderes
Volk brach herein und eroberte das
Gebiet. Diejenigen Rassen oder Völker,
die früher drinnen waren, wurden
heruntergedrängt zur Arbeit. Das
erobernde Volk nahm den Boden in
Besitz, und dadurch entstand ein
gewisses Verhältnis zwischen Eroberern
und Eroberten. Die Eroberer hatten
dadurch, daß sie Eroberer waren, den
Boden in Besitz. Dadurch waren sie die
wirtschaftlich Starken, die Eroberten
waren die wirtschaftlich Schwachen,
und es bildete sich das heraus, was
ein Rechtsverhältnis wurde. Daher hat
man in fast allen älteren Epochen im
geschichtlichen Werden durch
Eroberungen begründete
Rechtsverhältnisse, das heißt
Vorrechte und Benachteiligungsrechte.
Nun kamen die Zeiten herbei, in denen
nicht mehr frei erobert werden konnte.
Sie können den Unterschied studieren
im freien und gebundenen Erobern, wenn
Sie zum Beispiel sich das frühe
Mittelalter ansehen. Sie können
studieren, wie gewisse Völkerschaften,
die Goten, hinuntergedrungen waren
nach dem Süden, aber in vollbesetzte
Gebiete; da wurden sie zu anderem
veranlaßt in bezug auf die soziale
Ordnung als die Franken, die nach dem
Westen zogen und dort nicht
vollbesetzte Gebiete fanden. Dadurch
entstanden andere Erobererrechte. In
der neueren Zeit wirkten dann nicht
allein die von Grund und Boden
abhängigen Rechte, welche aus
Eroberungen hervorgegangen waren, es
kamen dazu die Rechte derjenigen
Menschen, die Vorrechte aus Besitz
hatten und die jetzt durch
wirtschaftliche Macht sich aneignen
konnten die Produktionsmittel. Da kam
zu dem, was Bodenrecht ist im heutigen
Sinne, der Besitz der
Produktionsmittel dazu, das heißt der
Privatbesitz von Kapitalien. Das ergab
dann Rechtsverhältnisse aus
wirtschaftlichen Verhältnissen heraus.
Sie sehen, es sind diese
Rechtsverhältnisse ganz allein aus den
wirtschaftlichen Verhältnissen heraus
entstanden.
|
Maintenant, les humains viennent et
veulent des notions de pouvoir
économique, d'importance économique de
la terre, ils veulent des concepts de
moyens d'exploitation, de moyens de
production, de capitaux, etc., mais
ils n'ont pas vraiment de
compréhension profonde du cours des
choses. Ils prennent alors les faits
superficiels et n'arrivent pas à
comprendre ce qui se cache derrière
les droits fonciers, derrière les
rapports de force en ce qui concerne
les moyens de production. Bien sûr,
toutes ces choses sont prises en
compte dans mon livre. Là est pensé
correctement ; là est, quand est parlé
de droits, à partir de la conscience
de la manière dont le droit s'est
développé à travers les siècles ;
quand on parle de capital, on parle de
la conscience de comment dont le
capital est devenu. Là est évité
soigneusement d'utiliser un concept
qui n'est pas entièrement saisi à
partir de sa genèse ; c'est pourquoi
ces concepts se présentent
différemment que dans les manuels
habituels d'aujourd'hui.
|
39
|
Nun kommen die Menschen und wollen
Begriffe von wirtschaftlicher Macht,
von der wirtschaftlichen Bedeutung des
Grund und Bodens, sie wollen Begriffe
der Betriebsmittel, der
Produktionsmittel, der Kapitalien und
so weiter haben. ja, aber sie
habenkeine wirklich tiefere Einsicht
in den Gang der Dinge. Da nehmensie
dann die oberflächlichen Tatsachen und
kommen nicht darauf,was eigentlich
hinter den Bodenrechten, hinter den
Machtverhältnissen in bezug auf die
Produktionsmittel steckt. Natürlich,
alle diese Dinge sind in meinem Buche
berücksichtigt. Da ist richtig
gedacht; da ist, wenn von Rechten
gesprochen wird, aus dem Bewußtsein
heraus gesprochen, wie das Recht durch
Jahrhunderte hindurch entstanden ist;
da ist, wenn von Kapital gesprochen
wird, aus dem Bewußtsein heraus
gesprochen, wie das Kapital geworden
ist. Da ist sorgfältig vermieden,
einen Begriff anzuwenden, der nicht
vollständig aus der Entstehung heraus
gefaßt ist; daher nehmen sich diese
Begriffe anders aus als in den
gewöhnlichen heutigen Lehrbüchern.
|
Mais aussi quelque chose d'autre est
pris en compte. Prenons un fait
précis, n'est-ce pas, le fait que le
protestantisme est né un jour. Dans
les livres d'histoire, on raconte très
souvent que Tetzel a parcouru l'Europe
centrale et que les gens étaient
indignés par la vente des indulgences
et autres choses de ce genre. Mais ce
n'était pas seulement cela, ce n'est
qu'une vision superficielle. L'élément
principal était le fait qu'il y avait
à Gênes une banque pour le compte de
laquelle - et non pour le compte du
pape - ce marchand d'indulgences se
déplaçait en Allemagne, car cette
banque avait accordé des crédits au
pape pour ses autres besoins. Toute
cette histoire était une entreprise
capitaliste. Cet exemple du commerce
des indulgences en tant qu'entreprise
capitaliste, où même le spirituel a
été négocié, vous permet d'étudier -
ou plutôt, si l'on commence à étudier,
on arrive peu à peu à la conclusion -
que finalement, tout pouvoir du
capital se ramène à la suprématie du
spirituel. Si vous étudiez comment le
capital a acquis son pouvoir, vous
trouverez partout la suprématie du
spirituel. Et c'est vraiment ainsi.
N'est-ce pas, celui qui est
intelligent, celui qui est
débrouillard, a un pouvoir plus grand
que celui qui n'est pas intelligent,
qui n'est pas débrouillard. Et c'est
ainsi que naissent, de façon justifiée
ou non, beaucoup de choses qui sont
des concentrations de capital. Il faut
en tenir compte lorsqu'on envisage le
concept de capital. Ces études réelles
permettent de comprendre que le
capital repose sur le développement du
pouvoir spirituel et que le pouvoir de
l'ancien esprit théocratique est venu
s'ajouter aux droits fonciers, aux
droits de conquête, d'un autre côté.
L'ancienne Église est à l'origine
d'une grande partie de ce qui a
ensuite été transféré dans le
capitalisme moderne. Il existe un lien
secret entre le pouvoir capitaliste
moderne et le pouvoir de l'ancienne
Église. Et tout cela s'est rassemblé
en un méli-mélo dans l'État de pouvoir
moderne. Là-dedans, vous trouvez les
restes de l'ancienne théocratie, les
restes des anciennes conquêtes. Et
finalement, les conquêtes modernes
sont venues s'y ajouter, et la
conquête la plus moderne serait
maintenant la conquête de l'État par
le socialisme. Mais en réalité, ce
n'est pas ainsi qu'il faut procéder.
Il doit y avoir quelque chose de
nouveau, qui fasse complètement table
rase de ces anciens concepts et
impulsions. C'est pourquoi il est
important que nous nous penchions
aussi, dans nos études, sur les
notions qui sont à la base de tout
cela. Nous devons aujourd'hui
expliquer précisément à tous ceux qui
veulent parler de choses sociales ce
qu'est le droit, ce qu'est le pouvoir
et ce qui est en réalité un bien
[économique], un bien sous forme de
marchandises et autres. C'est dans ce
domaine que les plus grandes erreurs
sont commises. Je veux par exemple
attirer votre attention sur l'une
d'entre elles ; si vous n'y êtes pas
attentifs, vous comprendrez mal
beaucoup de choses dans mon livre.
|
40
|
Aber auch noch etwas anderes ist
berücksichtigt. Nehmen wir eine
bestimmte Tatsache, nicht wahr, die
Tatsache, wie der Protestantismus
einmal entstanden ist. In den
Geschichtsbüchern wird es ja sehr
häufig so erzählt, daß der Tetzel
herumgezogen ist innerhalb
Mitteleuropas und daß die Leute
entrüstet waren über den Ablaßverkauf
und dergleichen. Aber das war es nicht
allein, das ist nur die
Oberflächenansicht. Die Hauptsache,
die dahinter stak, war die Tatsache,
daß es in Genua ein Bankhaus gab, in
dessen Auftrag — nicht im Auftrag des
Papstes — dieser Ablaßkrämer in
Deutschland herumzog, denn dieses
Bankhaus hatte dem Papst für seine
anderen Bedürfnisse Kredite gewährt.
Die ganze Geschichte war eine
kapitalistische Unternehmung. An
diesem Beispiel des Ablaßhandels als
einer kapitalistischen Unternehmung,
wo sogar auch mit Geistigem gehandelt
worden ist, an diesem Beispiel können
Sie studieren — oder besser gesagt,
wenn man da anfängt zu studieren,
kommt man allmählich darauf —, daß
schließlich alle Kapitalmacht
zurückgeht auf die Übermacht des
Geistigen. Studieren Sie, wie das
Kapital eigentlich zu seiner Macht
gekommen ist, so finden Sie überall
die Übermacht des Geistigen. Und so
ist es wirklich. Nicht wahr, wer
schlau ist, wer findig ist, der hat
eine größere Macht als derjenige, der
nicht schlau, der nicht findig ist.
Und auf diese Art entsteht
gerechtfertigterweise — oder auch
ungerechtfertigterweise — vieles, was
Zusammenscharrung des Kapitals ist.
Das muß berücksichtigt werden, wenn
man ins Auge faßt den Kapitalbegriff. Bei
solchen realen Studien kommt man
dahinter, daß Kapital auf Entfaltung
der geistigen Macht beruht und daß
zu den Grund- und Bodenrechten, zu
den Erobererrechten, von anderer
Seite hinzugekommen ist die Macht
des alten theokratischen Geistes.
Von der alten Kirche ist viel von
dem ausgegangen, was dann
übergegangen ist eigentlich in den
modernen Kapitalismus. Es gibt einen
geheimen Zusammenhang zwischen der
modernen kapitalistischen Macht und
der Macht der alten Kirche. Und das
alles hat sich zu einem Kuddelmuddel
zusammengezogen in den modernen
Machtstaat. Da drinnen finden Sie
die Überreste der alten Theokratie,
die Überreste der alten Eroberungen.
Und schließlich kamen die modernen
Eroberungen dazu, und die
allermodernste Eroberung soll jetzt
die Eroberung des Staates durch den
Sozialismus sein. Aber so darf man
es in Wirklichkeit nicht machen. Es
muß etwas Neues werden, was mit
diesen alten Begriffen und Impulsen
vollständig aufräumt. Daher wird es
darauf ankommen, daß wir uns bei
unseren Studien auch befassen mit
den Begriffen, die hier
zugrundeliegen. Wir müssen heute
jedem, der über soziale Sachen reden
will, genau Aufschluß geben darüber,
was Recht ist, was Macht ist und was
in Wirklichkeit ein
[wirtschaftliches] Gut ist, ein Gut
in Form von Waren und dergleichen.
Auf diesem Gebiet werden die größten
Fehler gemacht. Ich will zum
Beispiel auf einen aufmerksam
machen; wenn Sie darauf nicht
aufmerksam sind, werden Sie vieles
in meinem Buche mißverstehen.
|
Aujourd'hui, on pense souvent que la
marchandise est du travail stocké, que
le capital est aussi du travail
stocké. - Vous pouvez dire qu'il est
inoffensif d'avoir de telles notions.
Ce n'est pas inoffensif, car de tels
concepts empoisonnent toute la pensée
sociale. Vous voyez, qu'en est-il du
travail - le travail en tant que
dépense/application de force de
travail ? Oui, il y a une grande
différence entre, par exemple,
utiliser ma force musculaire physique
en faisant du sport et couper du bois.
Si je fais du sport, j'use ma force
musculaire physique ; je peux être
aussi fatigué et devoir remplacer ma
force musculaire autant que celui qui
coupe du bois. Je peux appliquer la
même quantité de travail au sport qu'à
la coupe de bois. La différence ne
réside pas dans le fait que la force
de travail doit être remplacée - elle
doit bien sûr être remplacée - mais
dans le fait que l'une des forces de
travail est utilisée uniquement pour
moi, dans un sens égoïste, l'autre
dans un sens social pour la société.
C'est la fonction sociale qui
différencie ces choses. Si je dis
maintenant que quelque chose est du
travail accumulé, je ne tiens pas
compte du fait que le travail cesse en
fait d'être dans une chose quelconque
au moment où l'on ne travaille plus.
Je ne peux pas dire que le capital est
du travail accumulé, mais je dois dire
que le travail n'existe que tant qu'il
est effectué. Mais dans notre ordre
social actuel, le capital conserve le
pouvoir d'appeler à nouveau le travail
à tout moment. Ce n'est pas dans le
fait que le capital soit du travail
accumulé que réside la fatalité, comme
le pense Marx, mais dans le fait que
le capital donne le pouvoir d'appeler
à son service un nouveau travail - non
pas un travail accumulé - mais un
nouveau travail. Il dépend beaucoup de
cela, et il dépendra encore beaucoup
de cela, que l'on parvienne à des
notions claires, fondées sur la
réalité, sur ces choses. Et c'est à
partir de telles notions, qui sont
maintenant totalement ancrées dans la
réalité, que ce livre est écrit. Il ne
tient pas compte de ces notions, qui
étaient tout à fait utiles pour
l'éducation du prolétariat. Mais
aujourd'hui, alors que l'on doit
construire quelque chose, ces notions
n'ont plus de sens.
|
41
|
Es herrscht heute vielfach die
Ansicht, daß Ware aufgespeicherte
Arbeit ist, daß auch Kapital
aufgespeicherte Arbeit ist. — Sie
können sagen, es sei harmlos, solche
Begriffe zu haben. Es ist nicht
harmlos, denn solche Begriffe
vergiften das ganze soziale Denken.
Sehen Sie, wie ist es eigentlich mit
der Arbeit — Arbeit als Aufwendung von
Arbeitskraft? Ja, da verhält es sich
so, daß ein großer Unterschied ist, ob
ich zum Beispiel meine physische
Muskelkraftabnütze, indem ich Sport
treibe, oder ob ich Holz hacke. Wenn
ichSport treibe, da nütze ich meine
physische Muskelkraft ab; ichkann
geradeso müde werden und meine
Muskelkraft wieder erset‑zen müssen
wie einer, der Holz hackt. Dieselbe
Menge von Arbeitkann ich anwenden auf
den Sport wie auf das Holzhacken. Der
Unterschied ist nicht da in bezug
darauf, daß die Arbeitskraft wieder
ersetzt werden muß — sie muß natürlich
ersetzt werden —, sondern der
Unterschied besteht darin, daß die
eine Arbeitskraft angewendet wird nur
für mich, im egoistischen Sinn, die
andere im sozialen Sinn für die
Gesellschaft. Durch die soziale
Funktion unterscheiden sich diese
Dinge. Sage ich jetzt, irgend etwas
ist aufgespeicherte Arbeit, so
berücksichtige ich nicht, daß die
Arbeit eigentlich aufhört, in
irgendeiner Sache drinnen zu sein in
dem Augenblick, wo nicht mehr
gearbeitet wird. Nicht kann ich sagen:
Das Kapital ist aufgespeicherte Arbeit
—, sondern ich muß sagen: Die Arbeit
ist nur so lange da, als sie
verrichtet wird. Aber in unserer
heutigen sozialen Ordnung behält das
Kapital die Macht, die Arbeit
jederzeit wiederum aufzurufen. Nicht
in dem liegt das Verhängnisvolle, was
Marx meint, daß Kapital
aufgespeicherte Arbeit ist, sondern in
der Einrichtung, daß Kapital die Macht
gibt, neue Arbeit — nicht
aufgespeicherte Arbeit —, sondern neue
Arbeit immer wiederum in seinen Dienst
zu stellen. Davon hängt viel ab, und
davon wird weiter viel abhängen, daß
man zu klaren, in der Wirklichkeit
fußenden Begriffen über diese Dinge
kommt. Und von solchen Begriffen, die
nun ganz drinnenstecken in der
Wirklichkeit, geht dieses mein Buch
aus. Das rechnet nicht mit solchen
Begriffen, die ganz nützlich waren für
die Erziehung des Proletariats. Aber
heute, wo man etwas bauen soll, haben
sie keinen Sinn mehr, diese Begriffe.
|
Vous voyez, quand je dis que le
capital est du travail accumulé, c'est
bon pour l'éducation du prolétariat ;
il a reçu les sentiments qu'il devait
recevoir. Il n'était pas important que
le concept soit fondamentalement faux
- on peut éduquer même avec des
concepts fondamentalement faux. Mais
on ne peut construire quelque chose
qu'avec des concepts corrects. C'est
pourquoi nous avons aujourd'hui besoin
de concepts corrects dans tous les
domaines de l'économie de peuple et
nous ne pouvons pas continuer à
travailler avec des concepts erronés.
Ce n'est pas par frivolité que je dis
que l'on peut aussi éduquer avec des
concepts erronés, mais en vertu des
principes généraux de l'éducation.
Vous voyez, lorsque vous racontez des
contes de fées aux enfants, vous ne
voulez pas non plus construire avec
ces choses que vous développez ; dans
l'éducation, quelque chose d'autre
entre en ligne de compte que ce qui
entre en ligne de compte pour la
construction dans la réalité physique.
Il faut travailler avec des concepts
réels. Un concept tel que "le capital
est du travail accumulé" n'est pas un
concept. Le capital est un pouvoir et
confère le pouvoir de mettre à tout
moment à son service le travail qui se
crée. C'est un vrai concept avec une
logique de fait. Il faut travailler
avec des concepts vrais dans ces
domaines. C'est ce qui a été tenté
dans les "points essentiels". C'est
pourquoi je pense qu'une grande partie
de ce qui n'y figure pas en termes de
définition des termes, de
caractéristiques des termes, doit être
élaborée. Et celui qui peut contribuer
à l'élaboration de ce dont on a besoin
pour comprendre le mode de pensée, la
base de ce livre, apportera une très
bonne contribution à ces soirées
d'étude. C'est donc ce qui compte, mes
très chers présents, c'est ce qui
compte tout particulièrement.
|
42
|
Sehen Sie, wenn ich sage: Kapital
ist aufgespeicherte Arbeit —, so ist
das gut für die Erziehung des
Proletariats; es bekam die Gefühle,
die es bekommen sollte. Da kam es
nicht darauf an, daß der Begriff
grundfalsch ist — erziehen kann man
auch mit grundfalschen Begriffen. Aber
etwas aufbauen, das kann man nur mit
richtigen Begriffen. Daher brauchen
wir heute auf allen Gebieten der
Volkswirtschaft richtige Begriffe und
können nicht weiter mit falschen
Begriffen arbeiten. Das sage ich nicht
aus Frivolität, daß man auch mit
falschen Begriffen erziehen kann,
sondern aus allgemeinen
Erziehungsgrundsätzen heraus. Sehen
Sie, wenn Sie Kindern Märchen
erzählen, dann wollen Sie ja auch
nicht mit diesen Dingen, die Sie da
herausentwickeln, bauen; bei der
Erziehung kommt etwas anderes in
Betracht, als in Betracht kommt beim
Aufbauen in der physischen
Wirklichkeit. Da muß mit wirklichen
Begriffen gearbeitet werden. Solch ein
Begriff wie «Kapital ist
aufgespeicherte Arbeit», das ist kein
Begriff. Kapital ist Macht und
verleiht Macht, jederzeit neu
entstehende Arbeit in seinen Dienst zu
stellen. Das ist ein wirklicher
Begriff mit Tatsachenlogik. Mit wahren
Begriffen muß man arbeiten auf diesen
Gebieten. Das ist versucht worden in
den «Kernpunkten». Daher glaube ich,
daß viel von dem, was da nicht
drinnensteht an Definition der
Begriffe, an Charakteristik der
Begriffe, daß das erarbeitet werden
muß. Und wer dann dazu beitragen kann,
daß dies erarbeitet wird, was man
braucht, um das zu verstehen, was die
Denkweise, die Grundlage dieses Buches
ist, der wird sehr Gutes beitragen zu
diesen Studienabenden. Also darauf
kommt es an, meine sehr verehrten
Anwesenden, darauf kommt es ganz
besonders an.
|
Oui, n'est-ce pas, il faudrait
écrire un dictionnaire si l'on voulait
clarifier tous les termes - mais ce
qu'est le "capital" peut maintenant
être réglé en une seule soirée d'étude
de ce genre. Sans que l'on ait
clairement compris aujourd'hui :
qu'est-ce que le capital ? Qu'est-ce
que la marchandise ? Qu'est-ce que le
travail ? Qu'est-ce que le droit ? -,
sans ces notions, on ne peut pas
avancer. Et ces notions sont tout à
fait confuses dans les cercles les
plus larges ; elles doivent avant tout
être rectifiées. Aujourd'hui, on se
désespère quand on parle de l'ordre
social avec des gens ; ils ne peuvent
pas participer parce qu'ils n'ont pas
appris à maîtriser la réalité. C'est
ce qu'il faut faire.
|
43
|
Ja, nicht wahr, man müßte ein
Lexikon schreiben, wenn man alle
Begriffe klarmachen wollte —, aber was
«Kapital» ist, das kann jetzt an einem
einzigen solchen Studienabend erledigt
werden. Ohne daß man heute klar
begriffen hat: Was ist eigentlich
Kapital? Was ist Ware? Was ist Arbeit?
Was ist Recht? —, ohne diese Begriffe
kommt man nicht weiter. Und diese
Begriffe sind ganz konfus in den
weitesten Kreisen; sie müssen vor
allen Dingen richtiggestellt werden.
Man verzweifelt heute ja geradezu,
wenn man redet mit Leuten über die
soziale Ordnung; sie können nicht mit,
weil sie nicht gelernt haben, die
Wirklichkeit zu beherrschen. Das ist
dasjenige, was namentlich besorgt
werden sollte.
|
Derrière la guerre une révolution ?
+ ajustement des concepts dans les
fondements voir #
PREMIÈRE SÉANCE D'ÉTUDES, Stuttgart,
30 juillet 1919.
|
44
|
ERSTER STUDIENABEND, Stuttgart, 30.
Juli 1919.
|
L'histoire du mouvement social.
|
45
|
Zur Geschichte der sozialen Bewegung
.
|
Rudolf Steiner : Mes très chers
présents ! Je ne vais pas anticiper ce
soir sur ce qui doit être mis en place
ici en tant que soirées d'étude qui se
tiendront sur la base du livre "Les
points essentiels de la question
sociale", mais je vais essayer de vous
donner une sorte d'introduction à ces
soirées. Par cette introduction, je
voudrais vous faire ressentir les
points de vue qui ont présidé à
l'écriture de ce livre. Il a été écrit
avant tout en fonction de l'actualité
immédiate, de la conviction que la
question sociale a elle aussi pris une
nouvelle forme à la suite des
événements actuels et qu'il est
nécessaire de parler aujourd'hui de la
question sociale d'une manière tout à
fait différente de celle dont on
parlait, de quelque côté que ce soit,
de la question sociale avant la
catastrophe de la guerre mondiale.
Avec ce livre, on a en quelque sorte
essayé, à ce moment de l'évolution de
l'humanité où la question sociale
devient particulièrement urgente et où
tout homme qui vit consciemment
aujourd'hui, qui ne vit pas la vie de
l'humanité en somnolant et en dormant,
devrait savoir quelque chose sur ce
qui doit se passer dans le sens de ce
qu'on appelle habituellement la
question sociale. Il serait peut-être
bon de jeter un petit coup d'œil en
arrière aujourd'hui. J'aurai peut-être
à mentionner des choses - mais nous
les présenterons sous un jour un peu
différent de celui dans lequel elles
ont été présentées -, j'aurai à
mentionner des choses que vous
connaissez en partie.
|
46
|
Rudolf Steiner: Meine sehr verehrten
Anwesenden! Ich werde heute Abend
nicht demjenigen vorgreifen, was hier
eigentlich eingerichtet werden soll
als Studienabende, die abgehalten
werden auf Grundlage des Buches «Die
Kernpunkte der Sozialen Frage»,
sondern ich werde versuchen, Ihnen
eine Art von Einleitung zu diesen
Abenden zu geben. Ich möchte durch
diese Einleitung in Ihnen eine
Empfindung davon hervorrufen, aus
welchen Gesichtspunkten heraus dieses
Buch geschrieben worden ist. Es ist
vor allen Dingen geschrieben worden
aus der unmittelbaren Gegenwart
heraus, aus der Überzeugung, daß auch
die soziale Frage durch die Ereignisse
der Gegenwart eine neue Gestalt
angenommen hat und daß es notwendig
ist, heute über die soziale Frage ganz
anders zu reden, als von irgendeiner
Seite her über die soziale Frage vor
der Weltkriegskatastrophe geredet
worden ist. Mit diesem Buch ist
gewissermaßen versucht worden, jetzt
in diesem Zeitpunkte der
Menschheitsentwicklung, in welchem
die soziale Frage ganz besonders
dringend wird und in welchem
eigentlich jeder Mensch, der bewußt
heute mitlebt, der nicht schläfrig und
schlafend das Leben der Menschheit
mitlebt, etwas wissen sollte über das,
was zu geschehen hat im Sinne dessen,
was man gewöhnlich die soziale Frage
nennt. Da wird es vielleicht zunächst
ganz gut sein, wenn wir heute ein
bißchen zurückblicken. Ich werde ja
dabei vielleicht Dinge zu erwähnen
haben -- aber wir werden sie dann in
ein etwas anderes Licht rücken, als
sie gerückt worden sind —, ich werde
Dinge zu erwähnen haben, welche Ihnen
zum Teil bekannt sind.
|
Vous savez probablement que ce qui
est dit aujourd'hui sur la question
sociale est dit depuis relativement
longtemps. Et on cite aujourd'hui les
noms de Proudhon, Fourier, Louis Blanc
comme les premiers à avoir traité la
question sociale jusqu'au milieu du
XIXe siècle. Vous savez aussi que la
manière dont cette question sociale a
été traitée jusqu'au milieu du XIXe
siècle est appelée par les
représentants actuels, du moins par de
nombreux représentants actuels de la
question sociale, "l'ère des utopies
sociales". Il est bon de préciser ce
que l'on entend par là lorsque l'on
dit qu'à son premier stade, la
question sociale est apparue de telle
sorte qu'elle vivait dans un "âge des
utopies". Mais on ne peut pas parler
de cette chose dans un sens absolu, on
ne peut en fait parler qu'à partir des
sentiments des représentants de la
question sociale dans le présent. Ils
ressentent les choses comme je veux
les décrire maintenant. Ils sentent
que toutes les questions sociales qui
sont apparues à l'époque dont je veux
parler en premier lieu étaient au
stade de l'utopie. Et qu'est-ce que
les gens entendent par là quand ils
disent que la question sociale était
alors au stade de l'utopie ? Ils
entendent par là - on l'a déjà
remarqué à l'époque ; Saint-Simon et
Fourier l'ont bien remarqué - qu'il y
a, même après la Révolution française,
des humains d'une certaine minorité
sociale qui sont en possession des
moyens de production et aussi d'autres
biens humains, et qu'il y a un grand
nombre d'autres humains - c'est même
la majorité - qui ne sont pas en
possession de tels biens. Ces
personnes ne peuvent travailler sur
les moyens de production qu'en se
mettant au service de ceux qui
possèdent les moyens de production et
aussi la terre - elles n'ont en fait
rien d'autre qu'elles-mêmes et leur
force de travail. On a noté que la vie
de cette grande masse de l'humanité
est une vie de détresse, en grande
partie dans la pauvreté, par
opposition à ceux qui sont en minorité
; et on a fait allusion à la situation
de la minorité et à la situation de la
majorité.
|
47
|
Sie wissen ja wahrscheinlich, daß
man das, was heute zur sozialen Frage
vorgebracht wird, seit verhältnismäßig
langer Zeit vorbringt. Und es werden
ja auch heute die Namen Proudhon,
Fourier, Louis Blanc genannt als die
ersten, die bis in die Mitte des 19.
Jahrhunderts hinein die soziale Frage
behandelt haben. Sie wissen ja auch,
daß die Art, wie diese soziale Frage
bis in die Mitte des 19.$ Jahrhunderts
hinein behandelt wurde, von den
heutigen Vertretern, wenigstens von
vielen heutigen Vertretern der
sozialen Frage, genannt wird «das
Zeitalter der sozialen Utopien». Es
ist gut, sich klarzumachen, was man
eigentlich damit meint, wenn man sagt:
In ihrem ersten Stadium trat die
soziale Frage so auf, daß sie in einem
«Zeitalter der Utopien» lebte. Aber
man kann über diese Sache nicht im
absoluten Sinne reden, sondern man
kann eigentlich nur aus den
Empfindungen der Vertreter der
sozialen Frage in der Gegenwart reden.
Die empfinden so, wie ich es jetzt
schildern will. Sie empfinden, daß
alle sozialen Fragen, die in dem
Zeitalter auftraten, wovon ich zuerst
sprechen will, im Stadium der Utopie
waren. Und was verstehen die Leute
darunter, wenn sie sagen, die soziale
Frage war damals im Stadium der
Utopie? Darunter verstehen sie das hat
man ja auch schon dazumal bemerkt;
Saint-Simon und Fourier haben es gut
bemerkt —, daß da sind, auch nach der
Französischen Revolution, Menschen
einer gewissen sozialen Minderheit,
welche im Besitz der Produktionsmittel
und auch anderer menschlicher Güter
sind, und daß da sind eine große
Anzahl von anderen Menschen — es ist
sogar die Mehrzahl —, welche nicht in
solchem Besitze sind. Diese Menschen
können an den Produktionsmitteln nur
dadurch arbeiten, daß sie in die
Dienste derjenigen treten, die die
Produktionsmittel und auch den Boden
besitzen — sie haben im Grunde
genommen nichts anderes als sich
selbst und ihre Arbeitskraft. Man hat
bemerkt, daß das Leben dieser großen
Masse der Menschheit eine Bedrängnis
ist, zum großen Teil in Armut verläuft
im Gegensatz zu denjenigen, die in der
Minderheit sind; und man hat
hingewiesen auf die Lage der
Minderheit und auf die Lage der
Mehrheit.
|
Ceux qui ont écrit sur cette
situation sociale de l'humanité, comme
Saint-Simon et Fourier, mais aussi
Proudhon, sont partis d'un certain
postulat. Ils sont partis du principe
qu'il était nécessaire d'attirer
l'attention des humains sur ce point :
Voyez, la grande masse vit dans la
misère, dans l'absence de liberté,
dans la dépendance économique, ce
n'est pas une existence digne de
l'humain pour la grande masse. Il faut
changer cela. - Et on a alors imaginé
toutes sortes de moyens par lesquels
cette inégalité entre les humains
pouvait être modifiée. Mais il y avait
toujours une certaine condition
préalable, et cette condition
préalable était que l'on se disait :
si l'on sait ce qui fonde l'inégalité
et si l'on a des paroles suffisamment
fortes, si l'on a une conscience
morale suffisante pour attirer
fortement l'attention sur le fait que
la grande majorité des humains vit
dans la dépendance économique et
juridique et est pauvre, alors ce
discours touchera les cœurs, les âmes
de la minorité, des nantis, de la
minorité la plus favorisée. Et c'est
en faisant comprendre à cette minorité
que les choses ne peuvent pas rester
en l'état, qu'il faut apporter des
changements, qu'il faut mettre en
place un autre ordre social, qu'un
autre ordre social sera instauré. La
condition préalable était donc que les
humains se laissent entraîner à faire
quelque chose pour la libération de la
grande masse de l'humanité à partir de
l'élan de leur âme. Et on proposait
alors ce qu'il fallait faire. Et on
pensait que si la minorité, si les
gens qui sont les dirigeants, les
leaders, comprenaient que ce qu'on
voulait faire était bien, alors il y
aurait une amélioration générale de la
situation de l'humanité.
|
48
|
Diejenigen, die nun so wie
Saint-Simon und Fourier wie auch noch
Proudhon über diese soziale Lage der
Menschheit geschrieben haben, die sind
von einer gewissen Voraussetzung
ausgegangen. Sie sind ausgegangen von
der Voraussetzung, daß man notwendig
habe, die Menschen darauf hinzuweisen:
Seht, die große Masse lebt in Elend,
in Unfreiheit, in wirtschaftlicher
Abhängigkeit, das ist für die große
Masse kein menschenwürdiges Dasein.
Das muß geändert werden. — Und man hat
dann allerlei Mittel ausersonnen,
durch welche diese Ungleichheit unter
den Menschen geändert werden kann.
Aber es war immer eine bestimmte
Voraussetzung da, und diese
Voraussetzung war, daß man sich sagte:
Wenn man weiß, worinnen die
Ungleichheit begründet ist und wenn
man eindringliche Worte genug hat,
wenn man sittliches Bewußtsein selbst
genug hat, um stark darauf
hinzuweisen, daß die große Mehrzahl
der Menschen in wirtschaftlicher und
rechtlicher Abhängigkeit lebt und arm
ist, so wird diese Rede die Herzen,
die Seelen der Minderheit, der
Begüterten, der begünstigteren
Minderheit ergreifen. Und es wird
dadurch, daß diese Minderheit
einsieht, so kann es nicht bleiben,
man muß Änderungen herbeiführen, es
muß eine andere Gesellschaftsordnung
kommen, es wird dadurch eine andere
Gesellschaftsordnung herbeigeführt
werden. Also die Voraussetzung war
die, daß die Menschen sich
herbeilassen wer den, aus ihrem
innersten Seelenantrieb heraus etwas
zur Befreiung der großen Masse der
Menschheit zu tun. Und dann schlug man
vor, was man tun sollte. Und man
glaubte, wenn die Minderheit, wenn die
Menschen, die die leitenden, führenden
Menschen sind, einsehen, daß das gut
ist, was man tun will, dann wird eine
all gemeine Besserung der Lage der
Menschheit eintreten.
|
Beaucoup de choses extrêmement
intelligentes ont été dites de ce
côté-là, mais tout ce qui a été
entrepris dans ce sens est aujourd'hui
considéré comme utopique par la
plupart des représentants de la
question sociale. Cela signifie
qu'aujourd'hui, on ne compte plus sur
le fait qu'il suffise de dire : c'est
ainsi qu'il faudrait organiser le
monde, et l'inégalité économique,
politique et juridique des humains
cesserait. - Il ne sert à rien
aujourd'hui d'en appeler à la
compréhension, au discernement des
humains qui sont favorisés, qui sont
dans le privilège, qui sont en
possession des moyens de production et
autres. Si je dois exprimer ce qui a
été perdu au cours de la deuxième
moitié du XIXe siècle, je dois dire
que l'on a perdu la foi en la
compréhension et en la bonne volonté
des humains. C'est pourquoi les
représentants de la question sociale,
dont je parle maintenant, se disent :
on peut élaborer de beaux plans sur la
manière d'aménager le monde des
humains, mais il n'en résultera rien ;
car on aura beau prêcher de beaux
plans, on aura beau faire appel aux
cœurs et aux âmes des minorités
dirigeantes avec des paroles
touchantes, il ne se passera rien.
Tout cela, ce sont des idées sans
valeur, et les idées sans valeur qui
imaginent l'avenir sont en réalité,
pour parler en termes populaires, des
utopies. Il ne sert donc à rien,
dit-on, d'imaginer quoi que ce soit
dans l'avenir, car il n'y aura
personne pour renoncer à ses intérêts,
pour être saisi par sa conscience, par
son sens moral, etc. - La foi dans la
conscience et le discernement moral a
justement été perdue dans les cercles
les plus larges, notamment chez les
représentants de la question sociale.
On se dit que les humains n'agissent
pas du tout en fonction de leur
discernement lorsqu'ils prennent des
mesures sociales ou lorsqu'ils mènent
leur vie sociale, ils agissent en
fonction de leur intérêt. Et les
possédants ont bien entendu intérêt à
rester dans leurs possessions. Les
privilégiés sociaux ont intérêt à
conserver leurs privilèges sociaux.
C'est pourquoi il est illusoire de
compter sur le fait qu'il suffit de
dire aux gens de faire ceci ou cela.
Ils ne le font pas, parce qu'ils
n'agissent pas en fonction de leur
compréhension, mais en fonction de
leur intérêt.
|
49
|
Es ist sehr viel außerordentlich
Gescheites gesagt worden von dieser
Seite her, allein alles dasjenige, was
in dieser Richtung unternommen worden
ist, das empfindet man heute bei den
meisten Vertretern der sozialen Frage
als utopisch. Das heißt, man rechnet
heute nicht mehr darauf, daß man nur
zu sagen braucht: So müßte man die
Welt einrichten, dann würde die
wirtschaftliche und politische und
rechtliche Ungleichheit der Menschen
aufhören. — Esnützt heute nichts, an
das Verständnis zu appellieren, an die
Einsicht der Menschen, die begünstigt
sind, die im Vorrecht sind, dieim
Besitz sind der Produktionsmittel und
dergleichen. Wenn ich ausdrücken soll,
was da im Laufe der zweiten Hälfte des
19. Jahrhunderts verloren worden ist,
so muß ich sagen, verloren worden ist
der Glaube an die Einsicht und an den
guten Willen der Menschen. Daher sagen
sich die Vertreter der sozialen Frage,
die ich jetzt meine: Schöne Pläne
ausdenken, wie man die Menschenwelt
einrichten soll, das kann man, aber
dabei kommt nichts heraus; denn wenn
man noch so schöne Pläne predigt, wenn
man mit noch so rührenden Worten
appelliert an die Herzen, an die
Seelen der regierenden Minderheiten,
so wird doch nichts geschehen. Das
alles sind wertlose Ideen, und
wertlose Ideen, welche die Zukunft
ausmalen, das sind eben in
Wirklichkeit, populär gesprochen,
Utopien. Es hat also gar keinen Zweck,
so sagt man, irgend etwas auszumalen,
was in der Zukunft geschehen soll,
denn es wird niemand da sein, der von
seinen Interessen losläßt, der
ergriffen werden kann in bezug auf
sein Gewissen, in bezug auf seine
sittliche Einsicht und so weiter. —
Den Glauben an Gewissen und sittliche
Einsicht hat man eben in weitesten
Kreisen, namentlich bei den Vertretern
der sozialen Frage, verloren. Man sagt
sich, die Menschen handeln ja gar
nicht nach ihrer Einsicht, wenn sie
soziale Einrichtungen treffen oder
wenn sie ihr soziales Leben führen,
sie handeln nach ihrem Interesse. Und
die Besitzenden haben
selbstverständlich ein Interesse
daran, in ihrem Besitz zu bleiben. Die
sozial Bevorrechteten haben ein
Interesse an der Erhaltung der
sozialen Vorrechte. Daher ist es eine
Illusion, darauf zu rechnen, daß man
nur zu sagen braucht, die Leute sollen
das oder jenes machen. Sie tun es eben
nicht, weil sie nicht aus ihrer
Einsicht, sondern aus ihrem Interesse
heraus handeln.
|
Au sens le plus large, on peut dire
que Karl Marx a peu à peu - mais
vraiment peu à peu - adhéré à cette
vue. On peut décrire toute une série
d'époques dans la vie de Karl Marx.
Dans sa jeunesse, Marx était aussi un
penseur idéaliste et il pensait
encore, dans le sens que je viens de
caractériser, à la faisabilité des
utopies. Mais c'est justement lui, et
après lui son ami Engels, qui s'est
écarté de la manière la plus radicale
de ce calcul sur le discernement des
humains. Et si je caractérise en
général ce qui est en fait une grande
histoire, je peux dire ceci : Karl
Marx est finalement parvenu à la
conviction que les choses ne pouvaient
pas s'améliorer dans le monde d'une
autre manière qu'en faisant appel aux
humains qui n'ont pas intérêt à ce que
leurs biens, leurs privilèges leur
soient conservés. Ceux qui ont intérêt
à ce que leurs biens soient préservés,
ceux-là, on ne peut absolument pas les
voir, on doit les laisser complètement
de côté, car ils ne se laisseront
jamais aller à faire quoi que ce soit,
même si on leur fait de beaux sermons.
En revanche, il y a justement la
grande masse des ouvriers prolétaires
[qui n'ont rien à perdre en termes de
biens]. Karl Marx lui-même a vécu dans
cette conviction à l'époque où ce que
l'on appelle aujourd'hui le
prolétariat était en train de naître
en Europe centrale ; il a vu le
prolétariat naître en Europe centrale
à partir d'autres conditions
économiques. Plus tard, lorsqu'il
vivait en Angleterre, c'était un peu
différent. Mais à l'époque où Karl
Marx est passé de l'idéaliste au
matérialiste économique, c'était
encore comme si le prolétariat moderne
était en train d'émerger en Europe
centrale. Et maintenant, il se disait
: ce prolétariat moderne a des
intérêts tout à fait différents de
ceux de la minorité dirigeante, car il
se compose d'humains qui ne possèdent
rien d'autre que leur force de
travail, d'humains qui ne peuvent pas
vivre autrement qu'en mettant leur
force de travail au service des
possédants, notamment au service des
possesseurs des moyens de production.
Lorsque ces travailleurs quittent leur
travail, ils sont - c'était
particulièrement vrai à l'époque, de
la manière la plus radicale - jetés à
la rue. Ils n'ont rien d'autre devant
eux que la possibilité d'un front pour
ceux qui sont les propriétaires des
moyens de production. Ces gens ont un
tout autre intérêt que ceux qui
possèdent. Ils ont intérêt à ce que
tout l'ordre social antérieur prenne
fin, à ce que cet ordre social soit
transformé. Il n'est pas nécessaire de
leur prêcher de manière à ce qu'ils
comprennent, mais seulement de manière
à ce que leur égoïsme et leur intérêt
soient saisis. On peut compter sur
cela. Prêcher à ceux sur le
discernement desquels on doit compter
ne donne aucun résultat, car les
humains n'agissent pas par
discernement, ils n'agissent que par
intérêt. Donc, on ne peut pas
s'adresser à ceux chez qui on devrait
faire appel au discernement, mais on
doit faire appel aux intérêts de ceux
qui ne peuvent pas faire autrement que
de s'engager pour les temps modernes
par contrainte intérieure. C'est
l'égoïsme vers lequel Karl Marx a
évolué. C'est pourquoi il n'a plus cru
que le progrès de l'humanité vers des
conditions sociales plus récentes
pouvait provenir d'une autre œuvre
humaine que celle du prolétariat
lui-même. Selon Karl Marx, le
prolétariat ne peut aspirer à un
renouvellement des conditions sociales
humaines qu'à partir de ses propres
intérêts, de ses intérêts individuels
et égoïstes. Et c'est ainsi que le
prolétariat, non pas par
philanthropie, mais par intérêt
égoïste, libérera tout le reste de
l'humanité, parce qu'il ne peut y
avoir rien d'autre que ce
qu'accomplissent les humains qui ne
sont pas attachés aux vieux biens et
qui n'ont rien à perdre des vieux
biens en cas de transformation.
|
50
|
Im umfassendsten Sinne, so kann man
sagen, hat sich nach und nach -- aber
wirklich erst nach und nach — zu
dieser Ansicht Karl Marx bekannt. Man
kann in dem Leben von Karl Marx eine
ganze Anzahl von Epochen schildern.
Marx war in seiner Jugend auch ein
idealistischer Denker und hat auch
noch in dem Sinn, wie ich es eben
charakterisiert habe, an die
Realisierbarkeit von Utopien gedacht.
Aber er war es gerade, und nach ihm
dann auch sein Freund Engels, der in
der allerradikalsten Weise von dieser
Rechnung auf die Einsicht der Menschen
abgekommen ist. Und wenn ich im
allgemeinen etwas charakterisiere, was
eigentlich eine große Geschichte ist,
so kann ich das folgende sagen: Karl
Marx ist zuletzt zu der Überzeugung
gekommen, daß es in der Welt nicht auf
eine andere Art besser werden könne
als dadurch, daß man diejenigen
Menschen aufruft, die nicht ein
Interesse daran haben, daß ihre Güter,
daß ihre Vorrechte ihnen erhalten
bleiben. Auf die, die ein Interesse
haben, daß ihre Güter ihnen erhalten
bleiben, auf diese könne man überhaupt
nicht sehen, diese müsse man ganz aus
der Rechnung lassen, denn sie würden
sich niemals herbeilassen, irgendwie
darauf einzugehen, wenn man ihnen noch
so schön predigt. Demgegenüber gibt es
gerade die große Masse der
proletarischen Arbeiter, [die nichts
an Gütern zu verlieren haben]. Karl
Marx selbst lebte sich ja in diese
Überzeugung hinein in der Zeit, als in
Mitteleuropa das im Grunde erst
entstand, was man heute das
Proletariat nennt; er sah das
Proletariat in Mitteleuropa erst
entstehen aus anderen
Wirtschaftsverhältnissen heraus. Als
er später in England lebte, war das ja
etwas anders. Aber in der Zeit, als
Karl Marx sich vom Idealisten zum
ökonomischen Materialisten
entwickelte, da war es noch so, daß
eigentlich in Mitteleuropa das moderne
Proletariat erst heraufkam. Und nun
sagte er sich: Dieses moderne
Proletariat, das hat ganz andere
Interessen als die leitende, führende
Minderheit, denn es besteht aus
Menschen, die nichts besitzen als ihre
Arbeitskraft, aus Menschen, die auf
keine andere Weise leben können als
dadurch, daß sie ihre Arbeitskraft in
den Dienst der Besitzenden, namentlich
in den Dienst der Besitzenden der
Produktionsmittel, stellen. Wenn diese
Arbeiter ihre Arbeit verlassen, dann
sind sie — das galt besonders für die
damalige Zeit in radikalster Weise —,
dann sind sie auf die Straße geworfen.
Sie haben nichts anderes vor sich als
die Möglichkeit einer Fron für
diejenigen, die die Besitzer der
Produktionsmittel sind. Diese Menschen
haben ein ganz anderes Interesse als
die Besitzenden. Sie haben ein
Interesse daran, daß die ganze frühere
Gesellschaftsordnung aufhört, daß
diese Gesellschaftsordnung umgewandelt
wird. Denen braucht man nicht so zu
predigen, daß ihre Einsicht ergriffen
wird, sondern nur so, daß ihr
Egoismus, ihr Interesse ergriffen
werden. Darauf kann man sich
verlassen. Zu predigen denjenigen, auf
deren Einsicht man zählen soll, dabei
kommt nichts heraus, denn die Menschen
handeln nicht aus Einsicht, sie
handeln nur nach Interessen. Also, man
kann sich nicht an diejenigen wenden,
bei denen man an die Einsicht
appellieren müßte, sondern man muß an
die Interessen derjenigen appellieren,
die nicht anders können, als aus
innerem Zwang heraus für die neuere
Zeit eintreten. Das ist der Egoismus,
zu dem Karl Marx sich hinentwickelt
hat. Daher hat er nicht mehr geglaubt,
daß der Fortschritt der Menschheit zu
neueren sozialen Zuständen von anderem
Menschenwerke herkommen könne als von
dem Werke des Proletariats selbst. Das
Proletariat könne nur, so meint Karl
Marx, aus seinen Interessen, aus
seinen einzelegoistischen Interessen
her, eine Erneuerung der menschlichen
sozialen Zustände erstreben. Und damit
wird das Proletariat, aber jetzt nicht
aus Menschenfreundlichkeit, sondern
aus egoistischem Interesse, auch die
ganze übrige Menschheit befreien, weil
es nichts anderes mehr geben kann als
dasjenige, was die Menschen bewirken,
die nicht an alten Gütern hängen und
bei einer Umwandlung nichts von alten
Gütern zu verlieren haben.
|
On se dit donc : d'un côté, il y a
les cercles dirigeants, leaders, qui
ont certains droits qui leur ont été
conférés dans le passé ou qui leur ont
été imposés dans le passé, qui se sont
transmis par héritage dans leurs
familles, et ils s'y accrochent. Ces
cercles dirigeants sont en possession
de ceci ou de cela, qu'ils
transmettent à leur tour au sein de
leur cercle, de leur famille et ainsi
de suite. Ces cercles ont toujours
quelque chose à perdre lors d'une
transformation, car bien sûr, s'ils ne
perdaient rien, aucune transformation
n'aurait lieu. Il s'agit en effet que
ceux qui n'ont rien reçoivent quelque
chose, donc ceux qui ont quelque chose
ne peuvent que perdre. On ne pourrait
donc faire appel au discernement que
si ce discernement donnait à la classe
dirigeante possédante l'impulsion de
vouloir perdre quelque chose. Ils
n'acceptent pas cela. - C'était le
point de vue de Karl Marx. Il faut
donc faire appel à ceux qui n'ont rien
à perdre. C'est pourquoi le "Manifeste
communiste" de 1848 se termine par ces
mots : "Les prolétaires n'ont rien à
perdre que leurs chaînes, mais ils ont
tout à gagner. Prolétaires de tous les
pays, unissez-vous !".
|
51
|
Man sagt sich also: Da sind auf der
einen Seite die leitenden, führenden
Kreise, die haben gewisse Rechte, die
ihnen in früheren Zeiten verliehen
worden sind oder die in früheren
Zeiten von ihnen erzwungen worden
sind, die sich vererbt haben in ihren
Familien, an denen halten sie fest.
Diese leitenden, führenden Kreise sind
im Besitz von dem oder jenem, das
vererben sie wiederum weiter innerhalb
ihrer Kreise, ihrer Familie und so
weiter. Diese Kreise haben bei einer
Umwandlung immer etwas zu verlieren,
denn selbstverständlich, wenn sie
nichts verlören, würde ja keine
Umwandlung geschehen. Es handelt sich
ja darum, daß diejenigen, die nichts
haben, etwas bekommen sollen, daher
können diejenigen, die etwas haben,
nur verlieren. Also man könnte nur an
die Einsicht appellieren, wenn diese
Einsicht der besitzenden, führenden
Klasse den Impuls eingeben würde,
etwas verlieren zu wollen. Darauf
lassen sie sich nicht ein. — Das war
die Anschauung von Karl Marx. Man muß
also an diejenigen appellieren, die
nichts zu verlieren haben. Deshalb
schließt auch im Jahre 1848 das
«Kommunistische Manifest» mit den
Worten: «Proletarier haben nichts zu
verlieren als ihre Ketten, sie haben
aber alles zu gewinnen. Proletarier
aller Länder, vereinigt euch!»
|
Eh bien, vous voyez, c'est devenu en
quelque sorte une conviction depuis la
publication du Manifeste communiste.
Et aujourd'hui, alors que certains
sentiments, déjà sous l'influence de
cette conception, vivent justement
dans la majorité du prolétariat, on ne
peut plus vraiment s'imaginer quel
énorme bouleversement s'est opéré dans
la conception socialiste vers le
milieu du XIXe siècle. Mais il serait
bon que vous preniez quelque chose
comme l'"Évangile d'un pauvre pécheur"
de Weitling, un compagnon tailleur,
qui a été écrit pas si longtemps avant
le Manifeste communiste, et que vous
le compariez à tout ce qui a été écrit
après la parution du Manifeste
communiste. Dans cet "Évangile d'un
pauvre pécheur", vraiment empreint
d'une authentique sensibilité
prolétarienne, règne un langage
ardent, on peut même dire poétique
dans un certain sens, mais un langage
qui veut absolument faire appel à la
bonne volonté, au discernement des
humains. C'est la conviction de
Weitling que l'on peut faire quelque
chose avec la bonne volonté des
humains. Et cette conviction ne s'est
affaiblie que vers le milieu du XIXe
siècle. Et l'acte par lequel elle
s'est affaiblie est justement la
publication du Manifeste communiste.
Et depuis cette époque, depuis 1848,
nous pouvons en fait suivre ce que
nous appelons aujourd'hui la question
sociale. Car si nous voulions parler
aujourd'hui comme Saint-Simon, comme
Fourier, comme Weitling, oui, nous
prêcherions aujourd'hui vraiment la
sourde oreille. Car jusqu'à un certain
point, il est tout à fait exact que
l'on ne peut rien entreprendre dans la
question sociale si l'on fait appel à
la compréhension des cercles
dirigeants, leaders, qui ont quelque
chose. C'est tout à fait vrai. Ils ne
le savent même pas s'ils le font, car
des forces inconscientes jouent un
rôle extrêmement important dans l'âme
humaine.
|
52
|
Nun sehen Sie, das ist seit der
Veröffentlichung des Kommunistischen
Manifests gewissermaßen eine
Überzeugung geworden. Und heute, wo
gewisse Empfindungen, die schon unter
dem Einfluß dieser Anschauung stehen,
eben in der Majorität des Proletariats
leben, heute kann man sich gar nicht
mehr richtig vorstellen, was für ein
ungeheurer Umschwung in der
sozialistischen Anschauung um die
Mitte des 19. Jahrhunderts sich
vollzogen hat. Aber es wäre gut, wenn
Sie sich herbeiließen, so etwas zu
nehmen wie das «Evangelium eines armen
Sünders» von Weitling, einem
Schneidergesellen, das gar nicht so
lange Zeit vor dem Kommunistischen
Manifest geschrieben worden ist, und
wenn Sie das vergleichen würden mit
alle dem, was nach dem Erscheinen des
Kommunistischen Manifestes geschrieben
ist. In diesem wirklich von echter
proletarischer Empfindung
eingegebenen «Evangelium eines armen
Sünders» herrscht eine, man kann
sagen, in gewissem Sinne sogar
poetische, glühende Sprache, aber
durchaus eine Sprache, die appellieren
will an den guten Willen, an die
Einsicht der Menschen. Das ist
Weitlings Überzeugung, daß man etwas
anfangen könne mit dem guten Willen
der Menschen. Und diese Überzeugung,
die ist erst um die Mitte des 19.
Jahrhunderts geschwunden. Und die Tat,
durch die sie geschwunden ist, ist
eben die Publikation des
Kommunistischen Manifestes. Und seit
der Zeit, seit dem Jahre 1848, können
wir eigentlich das verfolgen, was wir
heute die soziale Frage nennen. Denn
wenn wir heute so reden wollten wie
Saint-Simon, wie Fourier, wie Weitling
-- ja, wir würden heute wirklich ganz
tauben Ohren predigen. Denn bis zu
einem gewissen Grade ist es durchaus
richtig, daß man in der sozialen Frage
nichts anfangen kann, wenn man an die
Einsicht der leitenden, führenden
Kreise appelliert, die etwas haben.
Das ist schon richtig. Die leitenden,
führenden Kreise haben das zwar
niemals zugegeben, sie werden es auch
heute kaum zugeben — sie wissen es gar
nicht einmal, wenn sie es doch tun,
denn da spielen unbewußte Kräfte in
der menschlichen Seele eine
außerordentlich große Rolle.
|
Vous voyez, au cours du XIXe siècle,
notre culture spirituelle est presque
entièrement devenue une phrase. Et le
fait que nous vivions dans la phrase
en ce qui concerne la culture
spirituelle est un fait social
beaucoup plus important qu'on ne le
pense habituellement. Et donc,
naturellement, les membres des cercles
dirigeants, des cercles de direction,
disent aussi toutes sortes de belles
choses sur la question sociale, et ils
sont eux-mêmes souvent convaincus
qu'ils ont déjà la bonne volonté. Mais
en réalité, ils ne font que le croire,
ce n'est qu'une illusion ; dès que
quelque chose de réel est entrepris
dans ce domaine, il apparaît
immédiatement qu'il s'agit d'une
illusion. Nous en parlerons plus tard.
Mais comme je l'ai dit, nous ne
pouvons plus parler aujourd'hui comme
nous le faisions à l'époque des
utopies. C'est la véritable conquête
de Karl Marx, qui a montré comment
l'humanité est aujourd'hui tellement
empêtrée dans l'illusionnisme que
c'est un non-sens de compter sur autre
chose que l'égoïsme. Il faut compter
avec cela ; on ne peut donc rien
obtenir si l'on veut compter d'une
manière ou d'une autre sur
l'altruisme, sur la bonne volonté, sur
les principes moraux des humains - je
dis toujours "en ce qui concerne la
question sociale". Et ce revirement,
qui nous a conduits à devoir parler
aujourd'hui d'une toute autre manière
que l'on pouvait par exemple encore
parler de la question sociale dans la
première moitié du XIXe siècle, ce
revirement est justement arrivé avec
le Manifeste communiste. Mais tout
n'est pas arrivé d'un seul coup, mais
il était tout de même possible
qu'après le Manifeste communiste,
jusque dans les années soixante, comme
vous le savez tous - certains jeunes
socialistes ont déjà oublié cette
époque -, cette toute autre forme de
pensée sociale, la forme de Ferdinand
Lassalle, ait touché les cœurs et les
âmes. Et même après la mort de
Lassalle, survenue en 1864, ce qui
était le socialisme de Lassalle s'est
poursuivi. Lassalle fait partie de ces
gens qui, malgré l'avènement d'un
autre mode de pensée, comptaient
encore sur la force de frappe des
idées. Lassalle voulait encore saisir
les humains en tant que tels dans leur
compréhension, dans leur volonté
sociale avant tout. Mais de plus en
plus, cette nuance lassallienne
diminuait et l'autre nuance, la nuance
marxiste, qui ne voulait compter que
sur les intérêts de cette partie de la
population humaine qui ne possédait
qu'elle-même et sa force de travail,
prenait le dessus. Mais ce n'était pas
si rapide. Une telle façon de penser
ne s'est développée que peu à peu dans
l'humanité.
|
53
|
Sehen Sie, es ist ja nun einmal
unsere geistige Kultur im Laufe des
19. Jahrhunderts fast ganz zur Phrase
geworden. Und daß wir mit Bezug auf
die geistige Kultur in der Phrase
leben, ist eine viel wichtigere
soziale Tatsache, als man gewöhnlich
meint. Und so reden natürlich die
Angehörigen der leitenden, führenden
Kreise auch über die soziale Frage
allerlei schöne Dinge, und sie sind
selbst oftmals überzeugt, daß sie
schon den guten Willen hätten. Aber in
Wirklichkeit glauben sie das nur, es
ist nur ihre Illusion; in dem
Augenblick, wo irgend etwas Reales in
dieser Beziehung in Angriff genommen
wird, kommt es auch gleich heraus, daß
das eine Illusion ist. Davon wollen
wir nachher noch sprechen. Aber wie
gesagt, so können wir heute nicht mehr
reden, wie im Zeitalter der Utopien
geredet worden ist. Das ist die
wirkliche Errungenschaft, die durch
Karl Marx gekommen ist, daß er gezeigt
hat, wie heute die Menschheit so in
den Illusionismus hineinverstrickt
ist, daß es ein Unsinn ist, auf etwas
anderes zu rechnen als auf den
Egoismus. Es muß damit einmal
gerechnet werden; es kann daher gar
nichts erreicht werden, wenn man auf
die Selbstlosigkeit, auf den guten
Willen, auf die sittlichen Grundsätze
der Menschen — ich sage immer «in
bezug auf die Soziale Frage» —
irgendwie rechnen will. Und dieser
Umschwung, der dazu geführt hat, daß
wir eben heute ganz anders reden
müssen, als zum Beispiel noch in der
ersten Hälfte des 19. Jahrhunderts
geredet werden konnte mit Bezug auf
die soziale Frage, dieser Umschwung
ist eben mit dem Kommunistischen
Manifest gekommen. Aber es ist nicht
alles auf einmal gekommen, sondern es
war ja immerhin möglich, daß auch nach
dem Kommunistischen Manifest noch bis
in die sechziger Jahre hinein, wie Sie
alle wissen werden — manche jüngere
Sozialisten haben ja die Zeit schon
vergessen —, diese ganz andere Art des
sozialen Denkens, die Art des
Ferdinand Lassalle, die Herzen, die
Seelen ergriffen hat. Und auch nach
dem Tode von Lassalle, der 1864
erfolgt ist, hat sich noch fortgesetzt
dasjenige, was Lassallescher
Sozialismus war. Lassalle gehört
durchaus zu den Menschen, die,
trotzdem die andere Denkweise schon
heraufgekommen war, noch rechneten auf
die Schlagkraft der Ideen. Lassalle
wollte durchaus noch die Menschen als
solche ergreifen in ihrer Einsicht, in
ihrem sozialen Wollen vor allen
Dingen. Aber immer mehr und mehr nahm
diese Lassallesche Schattierung ab und
nahm überhand die andere, die
marxistische Schattierung, die nur
rechnen wollte auf die Interessen
desjenigen Teiles der menschlichen
Bevölkerung, der nur sich selbst besaß
und seine Arbeitskraft. Aber es ging
immerhin nicht so schnell. Solch eine
Denkweise entwickelte sich erst nach
und nach in der Menschheit.
|
Dans les années soixante,
soixante-dix, et même encore dans les
années quatre-vingt, les gens qui
appartenaient au prolétariat ou qui
faisaient partie des gens
politiquement ou socialement
dépendants - même s'ils n'étaient pas
exactement des prolétaires - jugeaient
en quelque sorte moralement leur
dépendance et condamnaient moralement
les milieux non dépendants de la
population humaine. Selon leur
conscience, c'était de la mauvaise
volonté de la part des cercles
dirigeants, leaders, de la population
humaine, qu'ils laissent la grande
masse du prolétariat dans la
dépendance, qu'ils la payent mal, etc.
Si je peux m'exprimer trivialement, je
peux dire que dans les années
soixante, soixante-dix, jusque dans
les années quatre-vingt, on fabriquait
beaucoup d'indignation sociale et on
parlait du point de vue de
l'indignation sociale. Puis, au milieu
des années quatre-vingt, l'étrange
revirement s'est vraiment produit. Les
personnalités les plus en vue du
mouvement social ont alors
complètement cessé de parler de la
question sociale sur la base de
l'indignation morale dans les années
80. C'était l'époque où les leaders
sociaux, que vous, les plus jeunes,
avez seulement vus mourir, étaient
grands et plus ou moins encore animés
par l'ardeur de leur jeunesse : Adler,
Pernerstorfer, Wilhelm Liebknecht,
Auer, Bebel, Singer et ainsi de suite.
Ces dirigeants plus âgés ont justement
cessé de plus en plus de prêcher ce
socialisme d'indignation à l'époque,
dans les années 80. Je voudrais dire
que ces dirigeants du socialisme ont
exprimé leur conviction intime
lorsqu'ils ont transposé l'ancien
socialisme d'indignation dans leur
nouvelle vision socialiste du monde.
Vous trouverez que ce que je vous dis
maintenant ne figure dans aucun livre
sur l'histoire du socialisme. Mais
ceux qui ont vécu à l'époque et qui
ont participé à cela savent que les
gens, lorsqu'ils étaient livrés à
eux-mêmes, parlaient ainsi.
|
54
|
In den sechziger, siebziger Jahren,
auch noch in den achtziger Jahren war
es durchaus so, daß die Leute, die dem
Proletariat angehörten oder die zu den
Leuten gehörten, die politisch oder
sozial abhängig — wenn auch nicht
gerade Proletarier — waren, ihre
Abhängigkeit gewissermaßen moralisch
beurteilten und daß sie die
nicht-abhängigen Kreise der
menschlichen Bevölkerung moralisch
verurteilten. Ihrem Bewußtsein nach
war es böser Wille der leitenden,
führenden Kreise der menschlichen
Bevölkerung, daß sie die große Masse
des Proletariats in Abhängigkeit
ließen, daß sie sie schlecht bezahlten
und so weiter. Wenn ich es trivial
ausdrücken darf, so kann ich sagen, in
den sechziger, siebziger Jahren, bis
in die achtziger Jahre hinein, wurde
viel soziale Entrüstung fabriziert und
vom Standpunkt der sozialen Entrüstung
aus gesprochen. Dann trat in der Mitte
der achtziger Jahre der merkwürdige
Umschwung eigentlich erst so recht
ein. Die mehr führenden
Persönlichkeiten der sozialen
Bewegung, die hörten dann in den
achtziger Jahren ganz auf, aus
moralischer Entrüstung heraus über die
soziale Frage zu sprechen. Das war ja
die Zeit, in der groß waren und mehr
oder weniger noch von jugendlichem
Feuereifer durchglüht waren diejenigen
sozialen Führer, die Sie, die Sie
jünger sind, nur noch haben sterben
sehen: Adler, Pernerstorfer, Wilhelm
Liebknecht, Auer, Bebel, Singer und so
weiter. Diese älteren Führer hörten
gerade damals in den achtziger Jahren
immer mehr auf, diesen
Entrüstungssozialismus zu predigen.
Ich möchte es so ausdrücken, daß diese
Führer des Sozialismus ihre innerste
Überzeugung aussprachen, als sie
damals den alten
Entrüstungssozialismus überleiteten in
ihre neuere sozialistische
Weltanschauung. Sie werden finden, was
ich Ihnen jetzt sage, das stehe ja in
keinem Buche über die Geschichte des
Sozialismus. Aber wer dazumal gelebt
hat und das mitgemacht hat, der weiß,
daß die Leute, wenn sie sich selbst
überlassen waren, so geredet haben.
|
Supposons que dans les années
quatre-vingt, des dirigeants du
socialisme se soient réunis pour
discuter avec des bourgeois [purs]
dans leurs convictions, et supposons
qu'il y ait eu une troisième sorte :
des bourgeois idéalistes qui voulaient
du bien à tous les humains, qui
auraient été d'accord pour rendre tous
les humains heureux. Il aurait pu
arriver que les bourgeois déclarent
qu'il faut toujours qu'il y ait des
gens pauvres et des gens riches, et
ainsi de suite, car c'est la seule
façon de maintenir la société humaine.
Alors peut-être que la voix de l'un de
ces idéalistes qui s'indignaient de
voir tant de gens vivre dans la
pauvreté et la dépendance se serait
élevée. Un tel humain aurait peut-être
dit : "Oui, il faut y parvenir, il
faut faire comprendre à ces gens qui
possèdent, aux entrepreneurs, aux
capitalistes, qu'ils doivent renoncer
à leurs biens, qu'ils doivent prendre
des mesures qui permettront à la
grande masse de changer de situation,
et ainsi de suite. - De très beaux
discours auraient pu être prononcés
sur cette base. Mais alors, quelqu'un
qui, à l'époque, venait de s'initier
au socialisme et à son évolution,
aurait élevé la voix et dit :
"Qu'est-ce que vous racontez, vous
êtes un enfant ; tout cela n'est
qu'enfantillages, absurdités ! Les
gens qui sont des capitalistes, des
entrepreneurs, ce sont tous de pauvres
sbires, ils ne savent rien d'autre que
ce qu'on leur a inculqué depuis des
générations. S'ils entendaient dire
qu'ils devraient faire autrement, ils
ne pourraient même pas le faire, car
ils ne sauraient pas comment s'y
prendre. Cela ne rentre pas du tout
dans leur crâne que l'on puisse faire
quelque chose différemment. Il ne faut
pas accuser les gens, il ne faut pas
condamner moralement les gens, ils ne
sont pas du tout à condamner
moralement ; les gars ont grandi dans
ce milieu, ces pauvres sbires, dans
tout ce milieu, et ça les inspire avec
les idées qu'ils ont. Les accuser
moralement, c'est ne rien comprendre
aux lois de l'évolution de l'humanité,
c'est se bercer d'illusions. Ces
humains ne peuvent jamais vouloir que
le monde prenne une autre forme.
Parler d'eux avec indignation, c'est
de l'enfantillage pur et simple. Tout
cela est devenu ainsi par nécessité,
et cela ne peut devenir différent que
par nécessité. Vous voyez, on ne peut
rien faire avec ces gars qui croient
pouvoir prêcher aux possédants, aux
capitalistes, qu'il faut instaurer un
nouvel ordre mondial, on ne peut rien
faire avec ces gars ; on ne peut pas
instaurer un nouvel ordre mondial avec
eux ; ils ne font que s'adonner à la
croyance que l'on peut accuser ces
pauvres sbires de capitalistes de
faire un autre monde. - Je dois dire
les choses un peu clairement, c'est
pourquoi certaines choses sont dites
avec des contours nets, mais de telle
manière que vous avez pu entendre
partout les discours dont je parle.
Quand on les écrivait, on les
retouchait un peu, on les écrivait un
peu différemment, mais c'était la
base. Puis ils ont continué à parler :
avec ces gars - ce sont des
idéalistes, ils se représentent le
monde en termes d'idéologie -, on ne
peut rien faire avec eux. Nous devons
compter sur ceux qui n'ont rien, qui
veulent donc quelque chose de
différent de leurs intérêts que ceux
liés aux intérêts capitalistes. Et
ceux-là n'aspireront pas non plus à un
changement de situation en vertu d'un
quelconque principe moral, mais
uniquement par convoitise, pour avoir
plus que ce qu'ils avaient jusqu'à
présent, pour avoir une existence
indépendante.
|
55
|
Nehmen wir einmal an, es seien in
den achtziger Jahren solche führenden
Leute des Sozialismus zu einer
Diskussion zusammengekommen mit
solchen, die [reine] Bourgeois waren
in ihren Gesinnungen, und nehmen wir
an, es wäre noch eine dritte Sorte
dabeigewesen: Bourgeois, die
Idealisten waren und allen Menschen
Gutes wünschten, die damit
einverstanden gewesen wären, alle
Menschen glücklich zu machen. Da hätte
es geschehen können, daß die Bourgeois
erklärten, es müsse immer Leute geben,
die arm sind, und solche, die reich
sind, und so weiter, denn nur das
könne die menschliche Gesellschaft
aufrechterhalten. Dann hätte sich
vielleicht die Stimme eines von
denjenigen erhoben, welche Idealisten
waren, die da entrüstet waren darüber,
daß so viele Leute in Armut und
Abhängigkeit leben mußten. So einer
hätte dann vielleicht gesagt: Ja, das
muß erreicht werden, daß klargemacht
wird diesen besitzenden Leuten, den
Unternehmern, den Kapitalisten, daß
sie loslassen müssen von ihrem Besitz,
daß sie Einrichtungen treffen müssen,
durch welche die große Masse in eine
andere Lage kommt, und dergleichen. —
Da könnten sehr schöne Reden gehalten
werden aus diesen Tönen heraus. Dann
aber hätte solch einer seine Stimme
erhoben, der damals sich gerade
hineinfand in den Sozialismus und
seinen Werdegang, und hätte gesagt:
Was reden Sie da, Sie sind ein Kind;
das ist alles Kinderei, alles Unsinn!
Die Leute, die da Kapitalisten sind,
die Unternehmer sind, das sind alles
arme Hascherin, die wissen nichts
anderes, als was ihnen eingebleut
worden ist von Generationen her. Wenn
die auch hören, sie sollten es anders
machen, dann könnten sie es nicht
einmal, denn sie kämen nicht darauf,
wie sie es machen sollten. So etwas
geht gar nicht in ihre Schädel hinein,
daß man etwas anders machen kann. Man
darf nicht die Leute anklagen, man
darf nicht die Leute moralisch
verurteilen, die sind gar nicht
moralisch zu verurteilen; die Kerle
sind da hineingewachsen, diese armen
Hascherin, in das ganze Milieu, und
das inspiriert sie mit den Ideen, die
sie haben. Sie moralisch anklagen
heißt, nichts verstehen von den
Gesetzen der Menschheitsentwicklung,
heißt, sich Illusionen hingeben. Diese
Menschen können niemals wollen, daß
die Welt eine andere Form annimmt. Mit
Entrüstung von ihnen zu sprechen, ist
die pure Kinderei. Das ist alles
notwendig so geworden, und anders kann
das auch wiederum nur durch
Notwendigkeit werden. Seht ihr, mit
solchen kindischen Kerlen, die da
glauben, sie könnten den Besitzenden,
den Kapitalisten predigen, es solle
eine neue Weltordnung heraufgeführt
werden, mit solchen kindischen Kerlen
kann man nichts anfangen; mit ihnen
ist keine neue Weltordnung
herbeizuführen; die geben sich nur dem
Glauben hin, daß man anklagen kann
diese armen Hascherin von
Kapitalisten, daß sie eine andere Welt
machen sollten. — Ich muß die Sache
etwas deutlich aussprechen, daher ist
manches in scharfen Konturen gesagt,
aber doch so, daß Sie die Reden, von
denen ich spreche, durchaus überall
hören konnten. Wenn sie geschrieben
wurden, dann wurden sie ja ein bißchen
retuschiert, ein bißchen anders
geschrieben, aber das lag zugrunde.
Dann redeten sie weiter: Mit diesen
Kerlen — das sind Idealisten, die
stellen sich die Welt im Sinne einer
Ideologie vor —, mit denen ist nichts
anzufangen. Wir müssen uns auf
diejenigen verlassen, die nichts
haben, die daher etwas anderes wollen
aus ihren Interessen heraus als die,
die mit kapitalistischen Interessen
verbunden sind. Und die werden auch
nicht aus irgendeinem moralischen
Grundsatz eine Änderung der Lebenslage
anstreben, sondern nur aus
Begehrlichkeit, um mehr zu haben als
sie bisher hatten, um ein unabhängiges
Dasein zu haben.
|
Cette manière de penser est apparue
de plus en plus dans les années
quatre-vingt, de ne plus concevoir
l'évolution de l'humanité dans le sens
où l'individu est particulièrement
responsable de ce qu'il fait, mais
qu'il fait ce qu'il doit faire en
raison de la situation économique. Le
capitaliste, l'entrepreneur, écrase
les autres dans la plus grande
innocence. Celui qui est prolétaire,
non pas en vertu d'un principe moral,
mais en toute innocence, en raison
d'une nécessité humaine, va
révolutionner et prendre les moyens de
production, le capital, des mains de
ceux qui justement le possèdent. Cela
doit se dérouler comme une nécessité
historique. - Cette façon de penser
monta.
|
56
|
Diese Denkweise kam in den achtziger
Jahren immer mehr und mehr herauf, die
Menschheitsentwicklung nicht mehr in
dem Sinne aufzufassen, daß der
einzelne Mensch besonders
verantwortlich ist für das, was er
tut, sondern daß er tut, was er aus
der wirtschaftlichen Lage heraus tun
muß. Der Kapitalist, der Unternehmer,
schindet die anderen in höchster
Unschuld. Derjenige, der Proletarier
ist, der wird nicht aus einem
sittlichen Grundsatz, sondern in aller
Unschuld aus einer menschlichen
Notwendigkeit heraus revolutionieren
und die Produktionsmittel, das
Kapital, aus den Händen derjenigen
nehmen, die es eben haben. Das muß
sich abspielen als eine geschichtliche
Notwendigkeit. — Diese Denkweise kam
herauf.
|
Eh bien, voyez-vous, ce n'est qu'en
1891, au congrès d'Erfurt, que tout le
lassallianisme, qui était encore basé
sur la compréhension des humains,
s'est transformé en croyance dans le
soi-disant "programme d'Erfurt", qui
était destiné à faire du marxisme la
vision officielle du prolétariat. Si
vous lisez les programmes des congrès
de Gotha et d'Eisenach, vous y
trouverez deux revendications
authentiquement prolétariennes de
l'époque, qui sont encore liées au
lassallianisme. La première
revendication était l'abolition du
rapport salarial ; la deuxième
revendication était l'égalité
politique de tous les humains,
l'abolition de tous les privilèges
politiques. Toutes les revendications
prolétariennes jusqu'aux années 1990,
jusqu'au congrès d'Erfurt qui a
apporté le grand changement, sont
parties de ces deux revendications.
Regardez une fois ces deux
revendications exactement et
comparez-les avec les principales
revendications du congrès d'Erfurt.
Quelles sont les principales
revendications du congrès d'Erfurt ?
Ce sont les suivantes : Transfert de
la propriété privée des moyens de
production à la propriété commune ;
gestion de toute la production de
biens, de toute la production par une
sorte de grande coopérative, en
laquelle l'État actuel doit se
transformer. Comparez l'ancien
programme, qui était le programme
prolétarien des années quatre-vingt,
avec celui qui est issu du programme
du parti d'Erfurt et qui existe depuis
les années quatre-vingt-dix. Vous
verrez que dans l'ancien programme de
Gotha et d'Eisenach, les exigences du
socialisme sont encore des exigences
purement humaines : égalité politique
de tous les humains, abolition du
rapport salarial dégradant. Au début
des années quatre-vingt-dix, ce que je
vous ai décrit comme l'état d'esprit
qui s'est développé au cours des
années quatre-vingt a déjà agi. Ce qui
était encore une exigence de
l'humanité s'est transformé en une
exigence purement économique. Vous ne
lisez plus rien sur l'idéal d'abolir
le rapport salarial, vous ne lisez que
des revendications économiques.
|
57
|
Nun, sehen Sie, es war eigentlich
erst im Jahre 1891 auf dem Erfurter
Parteitag, als dann aller
Lassallianismus, der eben doch noch
auf die Einsicht der Menschen basiert
war, überging in den Glauben an das
sogenannte «Erfurter Programm»,
welches bestimmt war, den Marxismus
zur offiziellen Anschauung des
Proletariats zu machen. Lesen Sie die
Programme des Gothaer, des Eisenacher
Parteitages durch, da werden Sie zwei
Forderungen finden als echt
proletarische Forderungen der
damaligen Zeit, die noch
zusammenhängen mit Las sallianismus.
Die erste Forderung war: die
Abschaffung des Lohnverhältnisses; die
zweite Forderung war: die politische
Gleichstellung aller Menschen, die
Abschaffung aller politischen
Vorrechte. Auf diese beiden
Forderungen gingen alle proletarischen
Forderungen aus bis zu den neunziger
Jahren, bis zu dem Erfurter Parteitag,
der den großen Umschwung brachte.
Schauen Sie einmal diese beiden
Forderungen genau an, und vergleichen
Sie sie mit den Hauptforderungen des
Erfurter Parteitages. Welches sind nun
die Hauptforderungen des Erfurter
Parteitages? Es sind: Überführung des
Privateigentums an Produktionsmitteln
in das gemeinschaftliche Eigentum;
Verwaltung aller Gütererzeugung, aller
Produktion durch eine Art große
Genossenschaft, in welche sich
umzuwandeln hat der bisherige Staat.
Vergleichen Sie das ehemalige
Programm, welches das proletarische
Programm der achtziger Jahre war, mit
demjenigen, was aus dem Erfurter
Parteiprogramm hervorgegangen ist und
seit den neunziger Jahren existiert.
Sie werden sehen, im alten Gothaer und
Eisenacher Programm sind die
Forderungen des Sozialismus noch rein
menschliche Forderungen: politische
Gleichheit aller Menschen, Abschaffung
des entwürdigenden Lohnverhältnisses.
Im Anfang der neunziger Jahre hat
schon gewirkt dasjenige, was ich Ihnen
charakterisiert habe als die
Gesinnung, die im Laufe der achtziger
Jahre heraufgekommen ist. Da ist
verwandelt worden das, was noch mehr
Menschheitsforderung war, in eine rein
wirtschaftliche Forderung. Da lesen
Sie nichts mehr von dem Ideal, das
Lohnverhältnis abzuschaffen, da lesen
Sie nur von Wirtschaftsforderungen.
|
Eh bien, vous voyez, ces choses sont
liées à la formation progressive de
l'idée que l'on avait de la
réalisation extérieure d'un meilleur
état social de l'humanité. Il a
souvent été dit par ces gens qui
avaient encore des idéaux : ah, quel
dommage cela fait-il de tout casser,
il faut bien qu'un autre ordre se
mette en place ; il faut donc qu'il y
ait une révolution, il faut que tout
soit cassé, il faut qu'il y ait une
grande claque, car c'est seulement de
là que peut naître un meilleur ordre
social. - C'est ce que disaient encore
certaines personnes dans les années
80, qui étaient de bons socialistes
idéalistes. On leur répondait par
d'autres, ceux qui étaient à la
hauteur, qui étaient devenus les
leaders - ceux qui, comme je l'ai dit,
sont maintenant enterrés -, qui
disaient : tout cela n'a pas de sens,
des révolutions aussi soudaines n'ont
aucun sens. La seule chose qui ait un
sens, c'est que nous abandonnions le
capitalisme à lui-même. Nous voyons
bien qu'auparavant, il n'y avait que
de petits capitalistes, puis ils sont
devenus grands ; ils se sont associés
à d'autres, sont devenus des groupes
de capitalistes. Les capitaux se sont
de plus en plus concentrés. C'est dans
ce processus que nous nous trouvons, à
savoir que les capitaux sont de plus
en plus concentrés. Le temps viendra
où il n'y aura plus que quelques
grands trusts et consortiums
capitalistes. Il sera alors nécessaire
que le prolétariat, en tant que classe
non possédante, transmette un beau
jour, de manière tout à fait
pacifique, par voie parlementaire, la
propriété capitaliste, les moyens de
production, à la propriété commune.
Cela peut être très bien fait, mais il
faut attendre. D'ici là, les choses
doivent évoluer. Le capitalisme, qui
est en fait un enfant innocent, n'y
peut rien s'il est inhumain - c'est la
nécessité historique qui l'impose.
Mais il travaille aussi à l'avance,
car il concentre les capitaux ; ils
sont alors bien groupés, il suffit
qu'ils soient repris par la
collectivité. Il ne s'agit pas d'une
révolution rapide, mais d'une
évolution lente.
|
58
|
Nun, sehen Sie, diese Sachen hängen
dann zusammen mit dem allmählichen
Ausbilden der Idee, die man hatte über
die äußerliche Herbeiführung eines
besseren sozialen Zustandes der
Menschheit. Es ist auch oftmals von
solchen Leuten, die noch Ideale
hatten, gesagt worden: Ach, was
schadet es denn, wenn man alles kurz
und klein schlägt, es muß ja eine
andere Ordnung herbeigeführt werden;
also, es muß eine Revolution kommen,
es muß alles kurz und klein geschlagen
werden, es muß der große
Kladderadatsch kommen, denn nur daraus
kann eine bessere Gesellschaftsordnung
entstehen. — Das sagten noch manche
Leute in den achtziger Jahren, die
gute, idealistische Sozialisten
waren. Denen wurde geantwortet von den
anderen, die auf der Höhe der Zeit
standen, die die Führer geworden waren
— diejenigen, die jetzt, wie ich
sagte, begraben sind —, die sagten:
Das hat alles keinen Sinn, solche
plötzlichen Revolutionen sind sinnlos.
Das einzige, was Sinn hat, das ist,
daß wir den Kapitalismus sich selber
überlassen. Wir sehen ja, früher gab
es nur kleine Kapitalisten, dann sind
es große geworden; sie haben sich
zusammengetan mit anderen, sind zu
Kapitalistengruppen geworden. Die
Kapitalien haben sich immer mehr
konzentriert. In diesem Prozeß sind
wir drinnen, daß die Kapitalien immer
mehr und mehr konzentriert werden.
Dann wird die Zeit kommen, wo
eigentlich nur noch einige wenige
große kapitalistische Trusts,
Konsortien vorhanden sind. Dann wird
es nur noch notwendig sein, daß das
Proletariat, als die nichtbesitzende
Klasse, eines schönen Tages auf ganz
friedliche Weise, auf
parlamentarischem Wege, den
Kapitalistenbesitz, die
Produktionsmittel, überführt in den
Gemeinschaftsbesitz. Das kann ganz gut
gemacht werden, aber man muß
abwarten. Bis dahin müssen sich die
Dinge entwickeln. Der Kapitalismus,
der eigentlich ein unschuldiges Kind
ist, kann ja nichts dafür, daß er
menschenschinderisch ist — das bringt
die geschichtliche Notwendigkeit
herauf. Er arbeitet aber auch vor,
denn er konzentriert die Kapitalien;
sie sind dann schön beieinander, dann
brauchen sie nur übernommen zu werden
von der Allgemeinheit. Nichts von
rascher Revolution, sondern langsame
Entwicklung.
|
Vous voyez, le secret de la vision,
le secret public de la vision, qui est
à la base de tout cela, a été joliment
expliqué par Engels dans les années
90. Il a dit : "Pourquoi des
révolutions rapides ? Ce qui se passe
lentement dans le développement du
nouveau capitalisme, ce regroupement
des capitaux, cette concentration des
capitaux, tout cela travaille pour
nous. Nous n'avons pas besoin de créer
une communauté, les capitalistes le
font déjà. Nous n'avons qu'à le
transformer en propriété
prolétarienne. C'est pourquoi - dit
Engels - les rôles se sont en fait
inversés. Nous, qui représentons le
prolétariat, n'avons pas à nous
plaindre de l'évolution, ce sont les
autres qui doivent se plaindre. Car
les gars qui sont aujourd'hui dans les
cercles des possédants doivent se dire
: nous accumulons les capitaux, mais
nous les accumulons pour les autres.
Voyez, ces types doivent en fait
s'inquiéter de perdre leurs capitaux ;
ils ont les joues creuses, ils se
dessèchent à force de se demander ce
qui va se passer. En tant que
socialistes, nous nous épanouissons
très bien dans cette évolution. Engels
dit que nous avons les muscles
saillants et les joues pleines et que
nous ressemblons à la vie éternelle. -
C'est ce que dit Engels dans une
introduction qu'il a écrite dans les
années 1990, en décrivant comment ce
qui se développe est tout à fait
juste, et comment il suffit d'attendre
le développement, qui est en fait
assuré par le capitalisme lui-même.
Cette évolution débouche ensuite sur
le transfert de ce que le capitalisme
a d'abord concentré dans la propriété
commune de ceux qui n'avaient rien
jusqu'alors. - C'était en fait l'état
d'esprit dans lequel les cercles
dirigeants du prolétariat sont entrés
au XXe siècle.
|
59
|
Sehen Sie, das Geheimnis der
Anschauung, das öffentliche Geheimnis
der Anschauung, das da zugrundeliegt,
hat ja in den neunziger Jahren Engels
schön auseinandergesetzt. Er hat
gesagt: Wozu schnelle Revolutionen?
Dasjenige, was langsam geschieht unter
der Entwicklung des neueren
Kapitalismus, dieses Zusammenrotten
der Kapitalien, dieses Konzentrieren
der Kapitalien, das arbeitet ja alles
für uns. Wir brauchen nicht erst eine
Gemeinsamkeit herzustellen, die
Kapitalisten machen das schon. Wir
brauchen es nur überzuführen in den
proletarischen Besitz. Daher — sagt
Engels — haben sich eigentlich die
Rollen vertauscht. Wir, die wir das
Proletariat vertreten, haben uns ja
gar nicht zu beklagen über die
Entwicklung, die anderen haben sich zu
beklagen. Denn die Kerle, die heute in
den Kreisen der besitzenden Leute
sind, die müssen sich sagen: Wir
sammeln die Kapitalien an, aber für
die anderen sammeln wir sie an. Seht,
die Kerle müssen sich eigentlich
sorgen, daß sie ihre Kapitalien
verlieren; die kriegen eingefallene
Backen, die werden dürr von diesen
Sorgen, was da werden soll. Wir
gedeihen gerade als Sozialisten sehr
gut in dieser Entwicklung drin. Wir
kriegen, sagt Engels, pralle Muskeln
und volle Backen und sehen aus wie das
ewige Leben. — Das sagt Engels in
einer Einleitung, die er in den
neunziger Jahren schrieb, indem er
charakterisierte, wie es ganz recht
ist, was sich da herausentwickelt, und
wie man nur abzuwarten brauchte die
Entwicklung, die eigentlich durch den
Kapitalismus von selber besorgt wird.
Diese Entwicklung mündet dann ein in
die Überführung desjenigen, was der
Kapitalismus erst konzentriert hat, in
den Gemeinbesitz derer, die bisher
nichts gehabt haben. — Das war
eigentlich die Stimmung, in der das
20. Jahrhundert von den führenden
Kreisen des Proletariats betreten
worden ist.
|
Et c'est ainsi qu'on a pensé,
surtout depuis l'époque où le marxisme
n'a plus été pris comme dans les
années 1990, mais où il a été soumis à
une révision, comme on disait, à
l'époque où sont apparus les
révisionnistes, c'est-à-dire ceux qui
sont encore vivants aujourd'hui, mais
qui sont des vieux, comme Bernstein
par exemple. C'est donc là que les
révisionnistes sont arrivés. Ils
disaient qu'il était possible
d'encourager un peu toute l'évolution,
car si les travailleurs se contentent
de travailler jusqu'à ce que les
capitalistes aient tout rassemblé, ils
seront encore dans le besoin avant,
notamment lorsqu'ils seront âgés, ils
n'auront rien. On a donc créé des
assurances et ainsi de suite ; et
surtout, on a veillé à s'approprier ce
que les classes dirigeantes avaient
comme institutions dans la vie
politique. Vous savez, c'est à cette
époque qu'est née la vie syndicale.
|
60
|
Und so hat man gedacht, besonders
seit der Zeit, in der der Marxismus
nicht mehr so genommen worden ist wie
in den neunziger Jahren, sondern als
er einer Revision, wie man sagte,
unterzogen worden ist, in der Zeit,
als die Revisionisten auftraten, also
diejenigen, die heute noch leben, aber
alte Leute sind, wie zum Beispiel
Bernstein. Da kamen also die
Revisionisten. Die sagten, man kann
die ganze Entwicklung etwas fördern,
denn wenn die Arbeiter bloß arbeiten,
bis die Kapitalisten alles
zusammengescharrt haben, werden sie
doch vorher noch Not leiden,
namentlich im Alter haben sie nichts.
Da wurden dann Versicherungen gemacht
und so weiter; und vor allen Dingen
sah man darauf, daß man dasjenige, was
die führenden Klassen hatten als
Einrichtungen im politischen Leben,
daß man sich das auch aneignete. Sie
wissen, damals entstand ja namentlich
auch das gewerkschaftliche Leben.
|
Et à l'intérieur du parti
socialiste, il y avait deux tendances
fortement divergentes : le parti
syndical et le parti politique
proprement dit, comme on disait alors.
Le parti politique se tenait plus sur
le terrain, une révolution soudaine ne
servirait à rien, l'évolution devait
se dérouler comme je viens de le
décrire. Il s'agissait donc de tout
préparer pour le moment où le
capitalisme serait suffisamment
concentré et où le prolétariat aurait
la majorité dans les parlements. Tout
doit être poursuivi par la voie du
parlementarisme, de l'appropriation de
la majorité, afin qu'au moment où les
moyens de production seront transférés
à la propriété commune, il y ait aussi
la majorité pour ce transfert. C'est
notamment dans ce groupe de personnes
qui pensaient tout du parti politique
que l'on ne pensait pas beaucoup au
mouvement syndical à la fin du XIXe
siècle. À cette époque, celui-ci
s'efforçait justement d'instaurer une
sorte de compétition ordonnée entre
lui et les entrepreneurs, afin
d'obtenir de temps en temps des
entreprises des augmentations de
salaire et des choses similaires.
Bref, on s'est arrangé pour imiter le
système de négociations réciproques
qui existait entre les milieux
dirigeants, entre les dirigeants
eux-mêmes, et on l'a étendu aux
relations entre les milieux dirigeants
et le prolétariat. Vous savez que les
représentants du système socialiste
proprement politique ont
particulièrement accusé ceux qui sont
devenus les plus bourgeois du
mouvement syndical. Et à la fin des
années quatre-vingt-dix et au début du
XXe siècle, on pouvait voir partout,
chez ceux qui étaient plus orientés
vers le système politique, un grand
mépris pour les gens qui s'étaient
entièrement plongés dans la vie
syndicale, notamment les typographes,
qui avaient à leur tour développé un
tout autre système de vie syndical,
jusqu'à l'extrême.
|
61
|
Und innerhalb der sozialistischen
Partei waren das die zwei stark
divergierenden Richtungen: die
ausgesprochene Gewerkschaftspartei und
die eigentliche, wie man damals sagte,
politische Partei. Die politische
Partei stand mehr auf dem Boden, eine
plötzliche Revolution nütze nichts,
die Entwicklung müsse so vor sich
gehen, wie ich es eben beschrieben
habe. Daher handle es sich darum, daß
alles vorbereitet werde auf den einen
Zeitpunkt, wo der Kapitalismus
genügend konzentriert ist und das
Proletariat in den Parlamenten die
Majorität hat. Es müsse alles auf dem
Wege des Parlamentarismus, der
Aneignung der Majorität, fortgetrieben
werden, damit an dem Zeitpunkte, wo
die Produktionsmittel in den
Gemeinbesitz übernommen werden
sollten, dann auch die Majorität für
diese Überführung da ist. Namentlich
in dieser Gruppe von Leuten, die alles
von der politischen Partei hielten, da
hielt man am Ende des 19. Jahrhunderts
nicht sehr viel von der
gewerkschaftlichen Bewegung. Diese
setzte sich in jener Zeit eben dafür
ein, so eine Art Wettkampf in
geordneter Art zwischen sich und den
Unternehmern einzurichten, um von
Zeit zu Zeit immer wieder von den
Unternehmungen Lohnerhöhungen und
ähnliche Dinge herauszubekommen.
Kurz, man stellte sich so ein, daß man
nachmachte jenes System gegenseitiger
Verhandlungen, wie es unter den
leitenden, führenden Kreisen
untereinander selbst vorhanden war,
daß man dieses auch ausdehnte auf das
Verhältnis zwischen den leitenden
Kreisen und dem Proletariat. Sie
wissen ja, daß ganz besonders
angeklagt wurden von den Vertretern
des eigentlich politischen
sozialistischen Systems diejenigen,
die dann am meisten bürgerlich wurden
unter der Gewerkschaftsbewegung. Und
am Ende der neunziger Jahre und am
Anfang des 20. Jahrhunderts konnte man
überall sehen bei denjenigen, die mehr
auf das politische System eingerichtet
waren, die große Verachtung für jene
Leute, die sich ganz eingefuchst
hatten auf das gewerkschaftliche
Leben, namentlich zum Beispiel die
Buchdrucker, die wiederum ein ganz
anderes System gewerkschaftlichen
Lebens bis zum Extrem ausgebildet
hatten.
|
Il s'agissait de deux tendances très
distinctes dans la vie sociale : les
syndicalistes et ceux qui penchaient
plutôt vers le parti politique. Et au
sein des syndicats, les typographes de
l'association des typographes étaient
justement les garçons modèles ; ils
étaient les garçons modèles qui
avaient acquis la pleine
reconnaissance des cercles bourgeois.
Et je crois que, de même que l'on a eu
une certaine crainte, une certaine
inquiétude à l'égard du parti
politique socialiste, on a vu peu à
peu émerger avec une grande
satisfaction des gens aussi braves que
les gens de l'association des
typographes. On se disait à leur sujet
: ils s'embourgeoisent, on peut
toujours négocier avec eux, ça se
passe très bien. S'ils s'en prennent à
leurs salaires, nous nous en prenons à
nos prix, que nous exigeons. Ça
marche. - Et, n'est-ce pas, c'était
aussi possible pour les années
suivantes, et les gens ne pensent pas
plus loin. On était donc très
satisfait de cette formation
exemplaire du développement syndical.
Eh bien, si j'omets quelques nuances,
on peut dire que ces deux directions
se sont plus ou moins développées
jusqu'à l'époque où la catastrophe de
la guerre mondiale les a surpris. Mais
malheureusement, les gens n'ont pas
appris de cette catastrophe mondiale
tout ce qui aurait dû être appris en
ce qui concerne la question sociale.
|
62
|
Das waren zwei ganz streng
voneinander geschiedene Richtungen im
sozialen Leben: die Gewerkschafter und
diejenigen, die mehr der politischen
Partei zuneigten. Und innerhalb der
Gewerkschaften waren ja die
Buchdrucker im Buchdruckerverband
geradezu die Musterknaben; sie waren
diejenigen Musterknaben, die sich ja
auch die volle Anerkennung der
bürgerlichen Kreise erworben hatten.
Und ich glaube, daß ebenso, wie man
eine gewisse Angst gehabt hat, eine
gewisse Sorge gehabt hat über die
politische sozialistische Partei, so
hat man nach und nach mit großer
Befriedigung heraufkommen sehen solche
braven Leute wie die Leute im
Buchdruckerverband. Von denen sagte
man sich: Die verbürgerlichen sich,
mit denen kann man immer verhandeln,
das geht ganz gut. Wenn die
aufschlagen mit ihren Löhnen, dann
schlagen wir auf mit unseren Preisen,
die wir fordern. Das geht. — Und,
nicht wahr, für die nächsten Jahre
ging es auch, und weiter denken die
Leute ja auch nicht. Also da war man
mit dieser musterhaften Ausbildung der
gewerkschaftlichen Entwicklung sehr
zufrieden. Nun ja, wenn ich einiges
auslasse, was mehr Nuancen sind, kann
man sagen, daß sich dann diese beiden
Richtungen mehr oder weniger
herausgebildet haben bis in die
Zeiten, die dann überrascht worden
sind von der Weltkriegskatastrophe.
Aber da haben die Leute leider von
dieser Weltkriegskatastrophe ja nicht
alles gelernt, was mit Be‑zug auf die
soziale Frage eigentlich hätte gelernt
werden sollen.
|
N'est-ce pas, si l'on considère les
rapports à l'est de l'Europe, en
Europe centrale, si l'on fait
abstraction du monde anglo-américain
et en partie du monde roman, si l'on
se limite donc à l'Europe centrale et
orientale, on peut dire qu'il n'y a
rien de juste dans cette histoire, que
l'on a toujours définie ainsi : Les
capitaux se concentrent et, lorsque
l'on aura la majorité dans les
parlements, les capitaux seront
transférés à la communauté, et ainsi
de suite. - La catastrophe de la
guerre mondiale a fait en sorte que
l'on ne puisse pas s'y attendre aussi
facilement aujourd'hui. Ceux qui
s'attendaient à une révolution
quelconque ont souvent été considérés
comme des enfants, mais au fond, que
s'est-il passé au cours des quatre ou
cinq dernières années ? Gardons à
l'esprit ce qui s'est passé de manière
claire et nette. N'est-ce pas, vous
l'avez souvent entendu, ce qui s'est
passé au cours des quatre ou cinq
dernières années : en juillet 1914,
les gouvernements sont devenus un peu
"tordus" - ou très "tordus" - et ont
poussé les gens à la guerre mondiale.
Les gens ont cru qu'il y avait une
guerre mondiale, que des batailles
avaient eu lieu - mais avec les moyens
de guerre modernes, avec les moyens
mécaniques, il y avait quelque chose
de tout à fait différent que dans les
guerres précédentes. Il n'y avait plus
aucune possibilité que quelqu'un
devienne un général particulièrement
célèbre, car tout dépendait finalement
de la quantité de munitions et
d'autres moyens de guerre dont
disposait l'un des deux partis, si
l'un fabriquait mieux que l'autre les
moyens de guerre mécaniques ou avait
découvert un gaz et d'autres choses de
ce genre que les autres n'avaient pas.
D'abord l'un gagnait, puis l'autre
découvrait à nouveau quelque chose,
puis le premier à nouveau ; tout cela
était une guerre terriblement
mécanique. Et tout ce qui a été dit
sur ce qui s'est passé ici et là de la
part des humains, c'était sous
l'influence de la phrase, c'était tout
à fait de la phrase. Et peu à peu,
l'humanité moderne comprendra, même en
Europe centrale, tout ce qu'il y a eu
comme phrases dans le fait que l'un ou
l'autre, qui n'était en fait rien
d'autre qu'un soldat moyen un peu
tordu, a été transformé en un grand
général en Europe centrale. Ces choses
n'ont été possibles que sous
l'influence de la phrase. Eh bien,
c'est ce qui s'est passé.
|
63
|
Nicht wahr, sobald man nun
betrachtet die Verhältnisse im Osten
von Europa, in Mitteleuropa, wenn man
absieht von der eigentlich
anglo-amerikanischen Welt und zum Teil
auch von der romanischen Welt, wenn
man sich also auf Mittel- und
Osteuropa beschränkt, so kann man
sagen, mit dieser Geschichte ist
eigentlich nichts Rechtes geworden,
die man immer so definiert hat: Die
Kapitalien konzentrieren sich, und,
wenn man in den Parlamenten die
Majorität haben wird, dann werden die
Kapitalien in den Besitz der
Gemeinschaft übergeführt werden und so
weiter. — Daß das nicht so glatt
erwartet werden kann heute, dafür hat
die Weltkriegskatastrophe gesorgt.
Diejenigen sind ja oftmals als
kindisch hingestellt worden, die
irgendeine Revolution erwartet haben,
aber im Grunde genommen, was ist denn
geschehen in den letzten vier bis fünf
Jahren? Halten wir uns das ganz klar
und deutlich vor Augen, was geschehen
ist. Nicht wahr, Sie haben es ja auch
öfter gehört, was in den letzten vier
bis fünf Jahren geschehen ist: Im Juli
1914 sind die Regierungen ein bißchen
«verdreht» geworden — oder stark
«verdreht» geworden — und haben die
Leute in den Weltkrieg gehetzt. Da
haben die Leute geglaubt, es sei ein
Weltkrieg da, es haben Schlachten
stattgefunden — aber mit den modernen
Kriegsmitteln, mit den
Maschinenmitteln, war etwas ganz
anderes da als in früheren Kriegen. Es
ist doch keine Möglichkeit mehr da
gewesen, daß irgendeiner ein
besonders berühmter Feldherr wurde,
denn schließlich kam es nur darauf an,
ob eine Partei die größere Menge an
Munition hatte und sonstige Mittel der
Kriegführung, ob eine Partei die
mechanischen Kriegsmittel besser
herstellte als die andere oder ein Gas
entdeckt hatte und dergleichen, das
die anderen nicht hatten. Erst siegte
der eine, dann entdeckte der andere
wieder etwas, dann wieder der erste;
das Ganze war eine furchtbar
mechanische Kriegführung. Und alles,
was geredet worden ist über dasjenige,
was da und dort geschehen ist von
seiten der Menschen, das war unter dem
Einfluß der Phrase geschehen, es war
durchaus Phrase. Und nach und nach
wird die moderne Menschheit einsehen,
auch in Mitteleuropa, was alles als
Phrase drinnengesteckt hat, wenn der
eine oder andere, der eigentlich
nichts anderes war als ein etwas
verdrehter Durchschnittssoldat, zu
einem großen Feldherrn gemacht worden
ist in Mitteleuropa. Diese Dinge sind
nur unter dem Einfluß der Phrase
möglich geworden. Nun ja, das war eben
so.
|
Mais que s'est-il passé en réalité ?
Les gens ne l'ont pas remarqué à cause
des événements extérieurs. Alors que
les gens croyaient qu'une guerre
mondiale avait été menée - qui n'était
en fait qu'un masque -, une révolution
s'est en réalité produite. En réalité,
une révolution s'est produite pendant
ces quatre ou cinq ans. Mais les gens
ne le savent pas encore aujourd'hui,
ils n'y prêtent pas attention. La
guerre est l'extérieur, le masque ; la
vérité, c'est que la révolution a eu
lieu. Et parce que la révolution a eu
lieu, la société d'Europe centrale et
orientale se trouve aujourd'hui dans
un tout autre état, et on ne peut rien
faire de ce que les gens avaient
envisagé pour les situations
antérieures. Aujourd'hui, il est
nécessaire de réorganiser toutes les
idées que l'on se faisait auparavant,
de penser les choses de manière
totalement nouvelle. C'est ce qu'a
tenté de faire le livre "Les points
essentiels de la question sociale" :
tenir compte de la situation dans
laquelle les événements récents nous
ont placés. Il n'est donc pas étonnant
que les membres des partis
socialistes, qui ne peuvent pas suivre
le mouvement assez rapidement, se
méprennent sur ce livre. Si les gens
acceptaient une seule fois d'examiner
leurs propres pensées - d'examiner un
peu ce qu'ils disent vouloir -, ils
verraient à quel point ils vivent sous
l'influence des idées qu'ils se sont
faites jusqu'en 1914. C'est la vieille
habitude.
|
64
|
Nun, was ist denn aber in
Wirklichkeit geschehen? Das haben die
Leute vor lauter äußeren Ereignissen
nicht gemerkt. Während die Leute
glaubten, daß ein Weltkrieg geführt
worden sei — der eigentlich nur eine
Maske war —, hat sich in Wirklichkeit
eine Revolution vollzogen. In
Wirklichkeit ist eine Revolution
geschehen in diesen vier bis fünf
Jahren. Das wissen die Leute heute nur
noch nicht, das beachten sie heute
noch nicht. Der Krieg ist die
Außenseite, die Maske; die Wahrheit
ist die, daß sich die Revolution
vollzogen hat. Und weil sich die
Revolution vollzogen hat, ist heute
die Gesellschaft Mittel- und
Osteuropas in einer ganz anderen
Verfassung, und man kann nichts
anfangen mit dem, was die Leute
bedacht hatten für frühere Lagen.
Heute ist es notwendig, daß all die
Gedanken, die man sich früher gemacht
hat, ganz neu geordnet werden, daß man
ganz neu über die Dinge denkt. Und das
ist versucht worden mit dem Buche «Die
Kernpunkte der Sozialen Frage»: ganz
richtig zu rechnen mit der Lage, in
die wir gekommen sind durch die
allerjüngsten Ereignisse. Daher ist es
kein Wunder, daß die Menschen in den
sozialistischen Parteien, die nicht
schnell genug mitkommen können, diesem
Buch Mißverständnis über
Mißverständnis entgegenbringen. Wenn
die Menschen nur einmal sich darauf
einließen, ihre eigenen Gedanken zu
prüfen — ein bißchen zu prüfen
dasjenige, wovon sie sagen, daß sie es
wollen —, dann würden sie sehen, wie
sehr sie leben unter dem Einfluß der
Ideen, die sie sich bis zum Jahre 1914
gemacht haben. Das ist die alte
Gewohnheit.
|
N'est-ce pas, ces idées que l'on a
eues jusqu'en 1914, elles se sont
tellement incrustées dans
l'environnement des humains qu'elles
ne peuvent plus en sortir maintenant.
Et quelle est la conséquence ? La
conséquence, c'est que malgré la
nécessité d'une nouvelle action
aujourd'hui, malgré la révolution qui
s'est produite en Europe centrale et
orientale, malgré la nécessité de
construire aujourd'hui - non pas selon
les anciennes idées, mais selon les
nouvelles idées -, malgré tout cela,
les gens prêchent les anciennes idées.
Et que sont aujourd'hui les partis, y
compris les partis socialistes ? Les
partis socialistes sont ceux qui
continuent à prêcher aujourd'hui tel
ou tel évangile socialiste, à
l'ancienne manière, comme ils l'ont
fait jusqu'en juillet 1914, car il n'y
a pas de différence dans ces
programmes de parti par rapport aux
anciens - tout au plus la différence
qui vient de l'extérieur. Pour celui
qui connaît les choses, il y a
terriblement peu de nouveautés, voire
rien de nouveau, dans les différents
groupes de partis. Les vieilles idées
sont toujours véhiculées aujourd'hui.
Maintenant oui, il y a une petite
différence : si l'on a un chaudron en
cuivre et que l'on tape dessus, cela
sonne ; si l'on tape de la même
manière sur un tonneau en bois, cela
sonne différemment ; mais le coup peut
être tout à fait le même. Cela dépend
alors de ce sur quoi on tape, si cela
sonne différemment. Et c'est ce qui se
passe aujourd'hui lorsque les gens se
mettent à parler de leurs programmes
de parti. Ce qui est contenu dans ces
anciens programmes de parti, c'est en
fait le vieux garde-fou du parti ;
c'est seulement parce qu'il y a
maintenant d'autres conditions
sociales que cela sonne aujourd'hui un
peu différemment, comme cela sonne
différemment dans une chaudière en
cuivre ou dans un tonneau en bois.
Lorsque les socialistes indépendants,
les socialistes majoritaires ou les
communistes parlent, ils prononcent de
vieilles phrases de parti, et cela
sonne différemment parce qu'il n'y a
pas un chaudron en cuivre, mais un
tonneau en bois. En vérité, on n'a
rien appris du tout, du tout, du tout,
de bien des côtés. Mais ce qui compte,
c'est qu'on apprenne quelque chose,
que cette terrible guerre mondiale,
comme on l'appelle, mais qui était en
fait une révolution mondiale, nous
dise quelque chose.
|
65
|
Nicht wahr, diese Ideen, die man bis
1914 gehabt hat, die haben sich so
eingefressen in die Umgebung der
Menschen, daß sie jetzt nicht wieder
herauskommen. Und was ist die Folge?
Die Folge ist: Trotzdem heute ein
neues Handeln notwendig ist, trotzdem
sich die Revolution vollzogen hat in
Ost- und Mitteleuropa, trotzdem wir
heute notwendig haben, einen Aufbau zu
vollziehen — nicht nach alten Ideen,
sondern nach neuen Ideen —, trotz
alledem predigen die Leute die alten
Ideen. Und was sind heute die
Parteien, auch die sozialistischen
Parteien? Die sozialistischen Parteien
sind diejenigen, die in der alten
Weise, wie sie bis zum Juli 1914
gepredigt haben, dieses oder jenes
sozialistische Evangelium auch heute
weiter predigen, denn ein Unterschied
ist bei diesen Parteiprogrammen nicht
gegenüber den früheren — höchstens der
Unterschied, der von außen kommt. Für
den, der die Dinge kennt, für den wird
in der einzelnen Parteigruppierung
furchtbar wenig Neues, ja gar nichts
Neues gesagt. Die alten Ladenhüter von
Gedanken werden auch heute noch
verzapft. Nun ja, es ist ja ein
bißchen ein Unterschied: Wenn man
einen kupfernen Kessel hat und klopft
daran, dann klingt es; klopft man
genauso auf ein hölzernes Faß, dann
klingt es anders; aber das Klopfen
kann ganz dasselbe sein. Es hängt dann
von dem ab, worauf man klopft, ob es
anders klingt. Und so ist es heute,
wenn die Leute ihre Parteiprogramme
verzapfen. Das, was in diesen alten
Parteiprogrammen enthalten ist, das
ist eigentlich der alte
Parteiladenhüter; nur weil jetzt
andere soziale Verhältnisse da sind,
klingt es heute etwas anders, so wie
es anders klingt bei einem kupfernen
Kessel oder bei einem hölzernen Faß.
Wenn die Unabhängigen Sozialisten oder
die Mehrheitssozialisten oder die
Kommunisten reden — sie reden eben
alte Parteiphrasen, und es klingt
anders, weil nicht ein kupferner
Kessel, sondern ein hölzernes Faß da
ist. In Wahrheit hat man auf vielen
Seiten eben gar, gar, gar nichts
gelernt. Aber darauf kommt es an, daß
man etwas lernt, daß einem dieser
furchtbare Weltkrieg, wie man ihn
nennt, der aber eigentlich eine
Weltrevolution war, irgend etwas sagt.
|
Et là, on peut vraiment dire que
dans les masses les plus larges, on
est préparé à entendre quelque chose
de nouveau. Mais dans les grandes
masses, on écoute ce que disent les
dirigeants. Il y a une bonne
compréhension, un bon sens chez les
masses populaires non éduquées, et on
a toujours pu compter sur la
compréhension lorsqu'on propose
quelque chose de vraiment moderne,
quelque chose qui peut être qualifié
de moderne dans le meilleur sens du
terme. Cela s'explique en partie par
le fait que les masses ne sont pas
éduquées. Mais dès que les gens
entrent dans le type d'éducation que
l'on peut avoir depuis les trois ou
quatre derniers siècles, cette
caractéristique d'inculture disparaît.
Si l'on considère l'enseignement
bourgeois actuel, de l'école primaire
jusqu'à l'université - et ce sera
encore pire lorsque l'école unique
socialiste sera fondée, car tout ce
que l'école primaire bourgeoise a fait
de mal y sera présent dans la plus
grande mesure -, on voit bien que
l'enseignement bourgeois n'a pas de
sens : ce qui se fait dans les écoles
forme les esprits et les rend
étrangers à la vie. Il faut sortir de
tout cela, il faut vraiment se mettre
sur ses propres jambes dans la vie
spirituelle si l'on veut sortir de
cette méformation. Mais, voyez-vous,
c'est grâce à cette méformation que
les dirigeants prolétariens, grands et
petits, sont devenus ainsi. Ils ont dû
s'approprier cette formation ; cette
formation se trouve dans nos écoles et
dans les écrits populaires, elle se
trouve partout. Et c'est là que l'on
commence à avoir le cerveau desséché
et que l'on n'est plus accessible aux
faits, mais que l'on s'arrête aux
programmes de parti et aux opinions
que l'on a greffés et martelés. Même
la révolution mondiale peut alors
arriver, on continue à siffler les
vieux programmes.
|
66
|
Und da kann man wirklich schon
sagen: In den breitesten Massen ist
man vorbereitet darauf, etwas Neues zu
hören. Aber bei den breiten Massen ist
das so: Da wird zugehört dem, was die
Führer sagen. Es ist ein gutes
Verständnis da, ein guter, gesunder
Menschenverstand in den breiten,
unverbildeten Massen, und man konnte
eigentlich immer auf Verständnis
rechnen, wenn man etwas richtig
Zeitgemäßes, etwas im besten Sinne des
Wortes zeitgemäß zu Nennendes
vorbringt. Das ist zum Teil darauf
zurückzuführen, daß die Massen
unverbildet sind. Aber sobald sich die
Menschen in die Art der Schulung
hineinbegeben, die man haben kann seit
den letzten drei bis vier
Jahrhunderten, da hört diese
Eigenschaft des Unverbildetseins auf.
Wenn man dasjenige, was die heutige
bürgerliche Schulbildung ist, von der
Volksschule bis hinauf zur
Universität, betrachtet — und am
ärgsten wird es sein, wenn jetzt die
sozialistische Einheitsschule
gegründet wird, da wird alles im
größten Maße vorhanden sein, was von
der bürgerlichen Volksschule
verbrochen worden ist —, da sieht man:
Was da verzapft wird in den Schulen,
das verbildet die Köpfe, das macht sie
dem Leben fremd. Man muß aus dem
ganzen Zeug herauskommen, man muß sich
wirklich im geistigen Leben auf eigene
Beine stellen, wenn man aus dieser
Verbildung herauskommen will. Aber
sehen Sie, durch diese Verbildung sind
die großen und kleinen proletarischen
Führer so geworden. Sie mußten sich
diese Bildung aneignen; diese Bildung
steckt in unseren Schulen und in den
populären Schriften, überall steckt
sie drinnen. Und da fängt man dann an,
so ein vertrocknetes Gehirn zu kriegen
und nicht mehr für die Tatsachen
zugänglich zu sein, sondern bei
Parteiprogrammen und Meinungen, die
man sich eingepfropft und eingehämmert
hat, bei denen bleibt man stehen. Da
kann dann selbst die Weltrevolution
kommen, man pfeift immer noch die
alten Programme darauf los.
|
Vous voyez, c'est essentiellement ce
sort qui a été réservé à ce qui a été
voulu dans de nombreuses directions
avec ce livre "Les points essentiels
de la question sociale" et les
conférences. On y a vraiment tenu
compte de ce dont le prolétariat a
absolument besoin aujourd'hui, de ce
qui est nécessaire compte tenu de la
situation actuelle. On l'a compris au
début [dans le prolétariat], mais
ensuite ceux qui sont les dirigeants
du prolétariat dans les différents
groupes de partis ne l'ont pas
compris. Cela dit, je ne veux pas être
trop injuste et je ne veux pas presser
la vérité ; je ne veux pas affirmer
que ces dirigeants, par exemple, ne
comprennent pas ce livre, car je ne
peux pas supposer qu'ils l'ont lu,
qu'ils le connaissent. Je
n'affirmerais pas quelque chose de
juste si je disais : ils ne peuvent
pas comprendre ce livre. Mais ils ne
peuvent absolument pas se décider à
comprendre que quelque chose d'autre
soit nécessaire que ce qu'ils pensent
depuis des décennies. Leur cerveau est
devenu trop sec, trop rigide pour
cela. Et c'est pourquoi ils s'en
tiennent à ce qu'ils ont pensé depuis
longtemps et trouvent que ce qui est
le contraire de toute utopie, c'est
une utopie. Car, voyez-vous, le livre
"Les points essentiels" tient
pleinement compte du fait qu'on ne
peut plus aujourd'hui se mouvoir dans
des utopies dans le sens des
Saint-Simon, Fourier, Proudhon et
ainsi de suite, mais aussi du fait
qu'on ne peut plus jamais se placer du
point de vue : L'évolution se fera
d'elle-même. Car ce que Marx et Engels
ont vu, ce qui s'est développé [à leur
époque], ce dont ils ont tiré leurs
conclusions, on ne peut plus en tirer
de conclusions aujourd'hui, car la
guerre mondiale l'a balayé, il n'est
plus là sous sa forme véritable. Celui
qui dit aujourd'hui la même chose que
Marx et Engels, dit quelque chose que
Marx n'aurait jamais dit. Il a eu peur
de ses partisans, car il a dit : en ce
qui me concerne, je ne suis pas
marxiste. - Et aujourd'hui, il dirait
: à l'époque, les faits étaient encore
différents ; à l'époque, je tirais mes
conclusions de faits qui n'avaient pas
encore été modifiés, changés, comme la
guerre mondiale a tout changé par la
suite.
|
67
|
Sehen Sie, dieses Schicksal hat im
wesentlichen dasjenige erfahren, was
mit diesem Buche «Die Kernpunkte der
Sozialen Frage» und den Vorträgen in
vieler Richtung gewollt worden ist. Da
wurde einmal wirklich mit dem
gerechnet, was das Proletariat heute
unbedingt braucht, was notwendig ist
aus der Zeitlage heraus. Das verstand
man auch anfangs [im Proletariat],
aber dann verstanden es diejenigen
nicht, die die Führer des Proletariats
in den verschiedenen
Parteigruppierungen sind. Das heißt,
ich will ja nicht allzu ungerecht
sein, und ich will nicht die Wahrheit
pressen; ich will nicht behaupten, daß
zum Beispiel diese Führer dieses Buch
nicht verstehen, denn ich kann nicht
annehmen, daß sie es gelesen haben,
daß sie es kennen. Ich würde nicht
etwas Richtiges behaupten, wenn ich
sagte: sie können das Buch nicht
verstehen. Aber sie können sich
überhaupt nicht entschließen zu
verstehen, daß etwas anderes notwendig
sein soll, als das, was sie seit
Jahrzehnten denken. Dazu ist ihr
Gehirn zu trocken, zu steif geworden.
Und daher bleiben sie stehen bei dem,
was sie seit langer Zeit gedacht haben
und finden, daß dasjenige, was das
Gegenteil von aller Utopie ist, daß
das eine Utopie sei. Denn sehen Sie,
das Buch «Die Kernpunkte» rechnet voll
damit, daß man heute nicht mehr im
Sinne der Saint-Simon, Fourier,
Proudhon und so weiter in Utopien sich
bewegen kann, aber auch damit, daß man
nimmermehr sich auf den Standpunkt
stellen kann: Die Entwicklung wird es
schon von selber geben. Denn das, was
Marx und Engels gesehen haben, was
sich [zu ihren Zeiten] entwickelte,
woraus sie ihre Schlüsse gezogen
haben, aus dem kann man heute nicht
mehr Schlüsse ziehen, denn das hat der
Weltkrieg weggefegt, das ist in seiner
wahren Gestalt nicht mehr da. Wer
heute dasselbe sagt wie Marx und
Engels, der sagt etwas, was Marx
niemals gesagt hätte. Dem ist angst
und bange geworden gerade vor seinen
Anhängern, denn er hat gesagt: Was
mich anbetrifft, ich bin kein Marxist.
— Und heute würde er sagen: Damals
waren die Tatsachen noch andere;
damals habe ich meine Schlüsse gezogen
aus Tatsachen, die noch nicht so
modifiziert, so verändert worden sind,
wie der Weltkrieg alles verändert hat
nachher.
|
Mais, voyez-vous, ces humains qui ne
peuvent rien apprendre des événements,
qui ont aujourd'hui la même attitude
que les anciens catholiques vis-à-vis
de leurs évêques et de leurs papes, ne
peuvent même pas imaginer qu'une chose
telle que le marxisme doit être
développée dans le sens des faits.
C'est ce que font les socialistes,
mais aussi les bourgeois. Les cercles
les plus larges le font ainsi. Les
bourgeois le font naturellement de
manière somnolente, l'âme complètement
endormie, les autres le font de telle
sorte qu'ils se trouvent au milieu et
voient l'effondrement, mais qu'ils ne
veulent pas s'attendre aux faits qui
se révèlent ainsi. Aujourd'hui, nous
avons justement besoin que quelque
chose de nouveau arrive parmi les
humains. Et c'est pourquoi il est
nécessaire de comprendre quelque chose
[comme la triarticulation] qui n'est
pas une utopie, mais qui compte
justement avec les faits. Si, de ce
côté, on appelle ce qui compte ainsi
avec les faits, l'ergotage, on
pourrait en fait être tout à fait
satisfait. Car si les gens appellent
ce qu'ils font avancer une ligne
droite, alors il faut, pour faire
quelque chose de raisonnable, tirer
dans le sens du poil, pour amener ce
qui est déraisonnable dans une autre
direction, raisonnable. Mais vous
voyez, ceux qui comprennent encore ce
qui est raisonnable devraient
approfondir ce qui est présenté ici.
Et c'est à cela que peuvent servir ces
soirées.
|
68
|
Aber sehen Sie, diejenigen Menschen,
die nichts lernen können von den
Ereignissen, die heute von einer
Gesinnung sind, wie die alten
Katholiken ihren Bischöfen und Päpsten
gegenüber waren, die können sich gar
nicht denken, daß so etwas, wie es der
Marxismus ist, auch fortentwickelt
werden muß im Sinne der Tatsachen.Sie
sehen immer noch die alten Tatsachen
vor sich, und deshalbpfeifen und
fauchen die Leute noch immer dasselbe,
was sie gepfif‑fen und gefaucht haben
vor dem Weltkrieg. So machen es die
Sozialisten, aber auch die
Bürgerlichen. Die weitesten Kreise
machenes so. Die Bürgerlichen machen
es natürlich ganz schläfrig, mit
völlig verschlafener Seele, die
anderen machen es so, daß sie
allerdings mitten drinnen stehen und
den Zusammenbruch sehen, daß sie aber
nicht mit den Tatsachen, die sich
dadurch offenbaren, rechnen wollen.
Wir haben eben heute notwendig, daß
etwas Neues unter die Menschen kommt.
Und deshalb ist es nötig, so etwas zu
verstehen [wie die Dreigliederung],
die keine Utopie ist, sondern die
gerade mit den Tatsachen rechnet. Wenn
von jener Seite dasjenige, was so mit
den Tatsachen rechnet, Quertreiberei
genannt wird, so könnte man eigentlich
ganz zufrieden sein. Denn wenn die
Leute das, was sie vorwärtstreiben,
eine gerade Linie nennen, dann muß
man, um etwas Vernünftiges zu
betreiben, in die Quere
hineinschießen, um das Unvernünftige
in andere, in vernünftige Richtung zu
bringen. Aber sehen Sie, diejenigen,
die das Vernünftige doch noch
einsehen, die sollten sich vertiefen
in das, was hier vorgebracht wird.
Und dazu können ja diese Abende da
sein.
|
Non, il y a longtemps que l'on a
essayé de mettre en pratique ce que
l'on a tiré des faits. Et c'est ainsi
que nous nous sommes réunis depuis des
semaines - je n'ai pas besoin de
répéter toutes ces choses, vous pouvez
encore poser des questions ou discuter
des pour et des contre à l'issue de
cet exposé -, nous nous sommes réunis
depuis des semaines pour mettre sur
pied ce que nous appelons le corps des
conseils d'entreprise. Nous avons
essayé de créer ces conseils
d'entreprise à partir des faits
actuels nécessaires, de les créer
vraiment de telle sorte qu'ils
viennent de la simple vie de
l'économie, qu'ils ne viennent pas de
la vie politique, qui ne peut pas
constituer la base de la vie de
l'économie. Car si l'on regarde les
faits en face aujourd'hui, il faut se
tenir strictement sur le terrain de
l'organisme social triarticulé. Et
celui qui ne veut pas de cette
triarticulation aujourd'hui va à
l'encontre de la nécessité historique
de l'évolution de l'humanité.
Aujourd'hui, il doit en être ainsi,
comme je l'ai souvent expliqué : que
la vie spirituelle soit placée sur
elle-même, que la vie économique soit
placée sur elle-même, que la vie de
droit ou politique soit administrée
démocratiquement. Et dans la vie
économique, le premier pas vers un
façonnement réellement social doit
être fait avec les conseils
d'entreprise. Mais comment cela
peut-il se faire ? Uniquement en
posant d'abord la question :
maintenant oui, il y a l'impulsion de
l'organisme social triarticulé, c'est
nouveau par rapport à toutes les
anciennes momies de parti ; y a-t-il
quelque chose d'autre de nouveau ? Les
imbéciles prétendent aujourd'hui que
les idées ne font que tourbillonner
dans l'air. Si l'on écoute les
discussions, elles apportent toutes
sortes de choses négatives, mais elles
n'apportent rien qui puisse être mis
en parallèle avec la triarticulation
de l'organisme social. Tout cela n'est
que de l'eau de rose lorsque les
socialistes affirment que les idées ne
font que pendre dans l'air - comme
cela a été dit dans une revue
nouvellement créée, lors d'une
discussion sur la triarticulation.
|
69
|
Nicht wahr, es ist ja längst
dasjenige, was da aus den Tatsachen
herausgeholt wird, versucht worden, in
die Praxis hineinzutragen. Und so
haben wir uns seit Wochen versammelt —
ich brauche alle diese Dinge nicht zu
wiederholen, Sie können ja auch im
Anschluß an diesen Vortrag noch Fragen
stellen oder pro und contra
diskutieren —, wir haben uns seit
Wochen versammelt, um das, was wir
Betriebsräteschaft nennen, auf die
Beine zu bringen. Wir haben versucht,
diese Betriebsräteschaft aus den
gegenwärtig notwendigen Tatsachen
heraus zu schaffen, wirklich so sie zu
schaffen, daß sie aus dem bloßen
Wirtschaftsleben kommen, daß sie nicht
kommen aus dem politischen Leben, das
nicht die Grundlage des
Wirtschaftslebens abgeben kann. Denn
man muß, wenn man heute den Tatsachen
ins Auge schaut, streng stehen auf dem
Boden des dreigliedrigen sozialen
Organismus. Und derjenige, der heute
diese Dreigliederung nicht will, der
handelt der geschichtlichen
Notwendigkeit der
Menschheitsentwicklung entgegen. Heute
muß das so sein, wie ich es oftmals
ausgeführt habe: daß das geistige
Leben auf sich gestellt wird, daß das
wirtschaftliche Leben auf sich
gestellt wird, daß das Rechts- oder
politische Leben demokratisch
verwaltet wird. Und im
wirtschaftlichen Leben soll der erste
Anfang zu einer wirklich sozialen
Gestaltung mit den Betriebsräten
gemacht werden. Wodurch kann aber das
nur geschehen? Nur dadurch, daß man
zuerst die Frage aufstellt: Nun ja, da
ist der Impuls des dreigliedrigen
sozialen Organismus, der ist neu
gegenüber allen früheren Parteimumien;
ist noch etwas anderes Neues da?
Blödlinge behaupten heute, daß die
Ideen nur so durch die Luft schwirren
würden. Hört man die Diskussionen an,
so bringen sie allerlei Negatives,
aber sie bringen nichts, was der
Dreigliederung des sozialen Organismus
an die Seite zu stellen wäre. Das ist
alles Wischiwaschi, wenn da von
sozialistischer Seite herkommt, daß
die Ideen nur so in der Luft hängen —
wie das gesagt worden ist in einer neu
begründeten Zeitschrift in einer
Besprechung der Dreigliederung.
|
Il s'agit tout d'abord qu’on lance
la question et d'y voir clair : N'y
a-t-il rien d'autre ? Ensuite, on s'en
tient d'abord à la triarticulation de
l'organisme social, jusqu'à ce qu'on
puisse la réfuter de manière
objective, jusqu'à ce qu'on puisse
placer à côté d'elle des choses
objectivement équivalentes. On ne peut
plus discuter des anciens programmes
de parti, c'est la guerre mondiale qui
en a discuté ; celui qui a vraiment de
la compréhension sait que ces
anciennes idées de parti sont réfutées
par la catastrophe de la guerre
mondiale. Mais alors, si l'on ne peut
pas répondre à cette question en
plaçant à côté quelque chose
d'objectivement équivalent, et si l'on
veut aller plus loin, alors on peut
honnêtement se dire : nous travaillons
donc dans le sens de la
triarticulation de l'organisme social.
Disons-le franchement : les anciennes
structures de parti ont perdu leur
signification ; il faut travailler
dans le sens de la triarticulation.
|
70
|
Es handelt sich erstens darum, daß
man die Frage aufwirft und sich
darüber klar wird: Ist nichts anderes
da? Dann hält man sich zunächst an die
Dreigliederung des sozialen
Organismus, bis man sie in sachlicher
Weise widerlegen kann, bis man
sachlich Gleichwertiges daneben
stellen kann. Über die alten
Parteiprogramme kann man nicht mehr
diskutieren, darüber hat der Weltkrieg
diskutiert; wer wirklich Verständnis
hat, der weiß, daß diese alten
Parteimumien durch die
Weltkriegskatastrophe widerlegt sind.
Dann aber, wenn man diese Frage nicht
dadurch beantworten kann, daß man
etwas sachlich Gleichwertiges daneben
stellt, und wenn man weitergehen will,
dann kann man ehrlich sich sagen: Also
arbeiten wir im Sinne der
Dreigliederung des sozialen
Organismus. Sagen wir uns ehrlich: Die
alten Parteizusammenhänge haben ihre
Bedeutung verloren; es muß im Sinne
der Dreigliederung gearbeitet werden.
|
Lorsque j'ai pris la parole
avant-hier à Mannheim, un monsieur
s'est présenté à la fin et a dit : "Ce
que Steiner a dit est bien, mais ce
n'est pas ce que nous voulons ; nous
ne voulons pas ajouter un nouveau
parti à tous les anciens partis. Les
gens qui veulent une telle chose
doivent entrer dans les anciens partis
et y travailler. -- Je ne pouvais que
répondre : j'ai suivi la vie politique
de très près depuis longtemps, alors
que le monsieur qui parlait n'était
pas encore né. Et bien que j'aie été
familiarisé par ma vie avec tout ce
qui fonctionnait socialement comme
force, je n'ai jamais pu agir au sein
d'un parti quelconque ou m'y tenir, et
il ne me vient pas à l'esprit, à la
fin de ma sixième décennie, de devenir
un humain de parti : je ne veux rien
avoir à faire ni avec un autre parti
ni avec un parti que j'aurais fondé
moi-même. Je ne veux pas non plus
avoir affaire à un parti que j'aurais
fondé moi-même ; personne ne doit
craindre qu'un nouveau parti soit
fondé par moi. Car j'ai appris que
chaque parti, par la force des choses,
devient stupide au bout d'un certain
temps, précisément parce que je ne me
suis jamais engagé dans aucun parti.
Et j'ai appris à plaindre les gens qui
n'ont pas compris cela. C'est pourquoi
personne ne doit craindre qu'un
nouveau parti vienne s'ajouter aux
anciens. C'est pourquoi nous n'avons
pas fondé de nouveau parti, mais la
Fédération pour la triarticulation de
l'organisme social s'est réunie pour
représenter les idées de l'organisme
triarticulé, dont le caractère non
utopiste, dont le caractère réel est
tout de même perçu par un certain
nombre de personnes. Les personnes qui
le reconnaissent devraient aussi
l'affirmer honnêtement et sincèrement.
|
71
|
Als ich vorgestern in Mannheim
gesprochen habe, trat zuletzt ein Herr
auf, der sagte: Was da der Steiner
gesagt hat, ist schön, aber es ist
nicht das, was wir wollen; wir wollen
nicht zu allen alten Parteien noch
eine neue Partei. Die Leute, die so
etwas wollen, die sollen in die alten
Parteien eintreten und darin wirken.
-- Ich konnte darauf nur sagen: Ich
habe das politische Leben längst sehr
genau verfolgt, als der Herr, der da
sprach, noch lange nicht geboren war.
Und ichhabe, trotzdem ich mit allem
bekanntgeworden bin durch mein Leben,
was sozial irgendwie als Kraft
funktionierte, ich habe doch niemals
innerhalb irgendeiner Partei gewirkt
oder darinnen stehen können, und es
fällt mir nicht ein, jetzt, am Ende
meines sechsten Lebensjahrzehnts,
irgendwie ein Parteimensch zu werden:
Weder mit einer andern Partei noch mit
einer selbstgegründeten möchte ich
irgend etwas zu tun haben. Also auch
nicht mit einer selbstgegründeten
Partei möchte ich etwas zu tun haben;
das braucht niemand zu fürchten, daß
durch mich eine neue Partei gegründet
wird. Denn daß jede Partei durch
Naturnotwendigkeit nach einiger Zeit
töricht wird, das habe ich gelernt,
gerade indem ich mich niemals mit
irgendeiner Partei eingelassen habe.
Und ich habe gelernt, die Leute zu
bedauern, die das nicht durchschauen.
Daher braucht niemand zu fürchten, daß
zu den alten Parteien eine neue Partei
kommt. Deshalb ist auch von uns nicht
eine neue Partei gegründet worden,
sondern der Bund für Dreigliederung
des sozialen Organismus hat sich
zusammengeschlossen, um die Ideen des
dreigliedrigen Organismus zu
vertreten, deren nicht-utopistischer
Charakter, deren
Wirklichkeitscharakter eben doch von
einer Anzahl von Menschen durchschaut
wird. Die Menschen, die das einsehen,
die sollten aber auch ehrlich und
aufrichtig sich dazu bekennen.
|
Car cela non plus ne doit pas
arriver : Il y a une pièce de théâtre
dans laquelle un coq chante à l'aube,
et chaque fois que le coq a chanté, le
soleil se lève. Eh bien, le coq ne
peut pas voir le contexte, c'est
pourquoi il croit que lorsqu'il
chante, c'est que le soleil répond à
son appel, qu'il vient parce qu'il a
chanté, qu'il a fait en sorte que le
soleil se lève. - Enfin, si quelqu'un
dans la vie non sociale se laisse
aller à une telle illusion, comme ce
coq qui chante sur le fumier et veut
faire se lever le soleil, cela ne fait
rien. Mais si, dans certaines
circonstances, il arrivait que l'idée
des conseils d'entreprise
véritablement économiques prospère sur
le sol de l'organisme triarticulé et
que les personnes qui s'en occupent
veuillent nier l'origine, à savoir que
l'impulsion de la triarticulation a
mis cette idée en mouvement, et si ces
personnes croient que parce qu'on a
chanté, les conseils d'entreprise vont
venir, alors ce serait la même erreur,
et une erreur très fatale. Mais cela
ne doit pas arriver. Ce qui se passe
dans cette direction [les conseils
d'entreprise], ce qui a été entrepris
ici, ne doit pas être dissocié, cela
doit rester en rapport avec
l'impulsion bien comprise de la
triarticulation de l'organisme social.
Et ceux qui veulent réaliser les
conseils d'entreprise dans le sens de
cette impulsion ne peuvent jamais
accepter que les conseils d'entreprise
soient créés de manière unilatérale et
que l'on ne crie que "conseils
d'entreprise, conseils d'entreprise".
Ce n'est pas suffisant. Cela n'a de
sens que si l'on aspire en même temps
à tout ce qui doit être recherché par
l'impulsion de l'organisme social
triarticulé. C'est ce qui est
important. Car si vous voulez vraiment
comprendre ce qui est écrit dans les
"points essentiels", vous devez vous
placer du point de vue que l'on peut
apprendre des faits que les quatre ou
cinq dernières années ont offerts.
Pour celui qui voit clair dans ces
faits, ils apparaissent comme s'il
avait vécu des siècles, et pour celui
qui voit les programmes des partis
comme si leurs promoteurs avaient
dormi pendant des siècles.
Aujourd'hui, cela doit être envisagé
clairement et sans réserve.
|
72
|
Denn auch das darf nicht geschehen:
Es gibt ein Theaterstück, da kräht ein
Hahn in der Früh, und immer, wenn der
Hahn gekräht hat, geht die Sonne auf.
Nun ja, der Hahn kann nicht den
Zusammenhang durchschauen, daher
glaubt er, wenn er kräht, dann folge
die Sonne seinem Ruf, sie komme, weil
er gekräht hat, er habe bewirkt, daß
die Sonne aufgeht. — Wenn schließlich
jemand im nicht-sozialen Leben sich
einer solchen Täuschung hingibt, wie
dieser Hahn, der auf dem Mist kräht
und die Sonne aufgehen machen will, so
macht es nichts. Wenn aber unter
Umständen es hier geschehen würde, daß
die Idee der wirklich wirtschaftlichen
Betriebsräte gedeiht auf dem Boden des
dreigliedrigen Organismus und
diejenigen Menschen, die das pflegen,
verleugnen wollten etwa den Ursprung,
nämlich daß der Impuls der
Dreigliederung diese Idee in Fluß
gebracht hat, und wenn diese Menschen
glauben, weil man gekräht habe, kämen
die Betriebsräte, dann wäre das
derselbe Irrtum, und zwar ein sehr
verhängnisvoller Irrtum. Das darf aber
nicht kommen. Das, was in dieser
Richtung [der Betriebsräte] geschieht,
was in Angriff genommen worden ist
hier, das darf nicht losgelöst werden,
es muß im Zusammenhang bleiben mit dem
richtig verstandenen Impuls der
Dreigliederung des sozialen
Organismus. Und diejenigen, die im
Sinne dieses Impulses die
Betriebsräteschaft verwirklichen
wollen, die können sich niemals darauf
einlassen, daß etwa in einseitiger
Weise bloß die Betriebsräteschaft
gegründet würde und immer nur gekräht
würde «Betriebsräte, Betriebsräte».
Damit ist es nicht genug. Das hat nur
einen Sinn, wenn man zugleich anstrebt
alles, was durch den Impuls des
dreigliedrigen sozialen Organismus
angestrebt werden soll. Das ist es,
worauf es ankommt. Denn wollen Sie
wirklich das verstehen, was in den
«Kernpunkten» steht, dann müssen Sie
sich auf den Standpunkt stellen, den
man lernen kann aus den Tatsachen, die
die letzten vier bis fünf Jahre
geboten haben. Wer diese Tatsachen
durchschaut, auf den wirken sie so,
als wenn er Jahrhunderte durchlebt
hätte, und auf den wirken die
Parteiprogramme so, als wenn ihre
Träger Jahrhunderte geschlafen hätten.
Heute muß dieses klar und rückhaltlos
ins Auge gefaßt werden.
|
Ce que je viens de vous raconter,
j'aurais bien sûr tout aussi bien pu
l'écrire en préambule de ce livre.
Seulement, on a pu constater ces
derniers mois à quel point les
programmes des partis sont
actuellement rigides et stériles. Mais
il serait utile que cela figure en
préambule de ce livre. Je vous ai
raconté aujourd'hui beaucoup de choses
qui n'y figurent pas, puisque vous
avez décidé, me semble-t-il, de vous
réunir ici pour étudier correctement
les graves questions sociales
actuelles dans le prolongement de ce
livre. Mais avant de s'y atteler, il
faut déjà se rendre compte que l'on ne
peut pas continuer à trottiner dans le
vieux style des programmes et des
modèles de parti, mais que l'on doit
se décider à aborder aujourd'hui les
faits conformément à la réalité et à
tirer un trait sur tout ce qui ne
tient pas compte de ces nouveaux
faits. Ce n'est qu'ainsi que vous
comprendrez correctement ce qui doit
être réalisé, précisément avec cette
impulsion vers un organisme social
triarticulé. Et vous le comprendrez de
la bonne manière si vous trouvez que
chaque phrase de ce livre est
susceptible d'être mise en pratique,
d'être transformée en réalité
immédiate. Et la plupart de ceux qui
disent qu'ils ne comprennent pas ou
qu'il s'agit d'utopies et autres,
n'ont tout simplement pas le courage
de penser assez fort aujourd'hui pour
que les pensées puissent intervenir
dans la réalité. Ceux qui crient
toujours "dictature du prolétariat",
"conquête du pouvoir", "socialisme",
pensent généralement très peu. Il
n'est donc pas possible d'intervenir
dans la réalité avec ces modèles de
mots. Mais ils viennent ensuite dire
qu'on ne propose [avec les "points
essentiels"] que quelque chose qui est
une utopie. Ce n'est que dans l'esprit
des gens qui n'y comprennent rien que
cela devient une utopie.
|
73
|
Das, was ich Ihnen jetzt erzählt
habe, das hätte ich natürlich
ebensogut als Vorrede in dieses Buch
schreiben können. Allein, man hat ja
erst in den letzten Monaten gesehen,
wie steif und unfruchtbar die
Parteiprogramme gegenwärtig sind. Aber
es wäre schon nützlich, wenn gerade
das als Vorrede in diesem Buche stehen
würde. Vieles, was nicht darin steht,
habe ich Ihnen heute erzählt, da Sie,
wie mir scheint, beschlossen haben,
hier zusammenzukommen, um in
Anknüpfung an dieses Buch die ernsten
sozialen Fragen der Gegenwart
sachgemäß zu studieren. Aber bevor man
sich an das macht, muß man sich schon
klarmachen, daß man nicht forttrotteln
kann in dem alten Stil der
Parteiprogramme und Parteischablonen,
sondern daß man sich dazu entschließen
muß, heutedie Tatsachen
wirklichkeitsgemäß anzufassen und
einen Strich zumachen unter alles das,
was nicht rechnet mit diesen neuen
Tat‑sachen. Nur dadurch werden Sie
das, was erreicht werden soll gerade
mit diesem Impuls vorn dreigliedrigen
sozialen Organismus, in der richtigen
Weise auffassen. Und Sie werden es in
der richtigen Weise auffassen, wenn
Sie finden, daß jeder Satz in diesem
Buch dazu angetan ist, Tat werden zu
können, umgesetzt werden zu können in
unmittelbare Wirklichkeit. Und die
meisten, die sagen, sie würden das
nicht verstehen oder es seien Utopien
und dergleichen, denen fehlt einfach
der Mut, die Courage, heute so stark
zu denken, daß die Gedanken in die
Wirklichkeit eingreifen können.
Diejenigen, die immer krähen «Diktatur
des Proletariats», «Eroberung der
Macht», «Sozialismus», die denken
zumeist sehr wenig dabei. Es kann
daher mit diesen Wortschablonen nicht
in die Wirklichkeit eingegriffen
werden. Dann aber kommen diese und
sagen, da würde [mit den
«Kernpunkten»] nur etwas geboten, was
eine Utopie ist. Eine Utopie wird es
erst in den Köpfen von den Leuten, die
nichts davon verstehen.
|
C'est pourquoi il faudrait faire
comprendre à ces gens ce que Goethe a
dit un jour, sous une forme un peu
différente et en se référant à autre
chose, en se moquant du physiologiste
Haller, qui était un naturaliste
ossifié. Haller avait inventé la
parole :
|
74
|
Deshalb sollte man diesen Leuten
klarmachen, was, in einer etwas
veränderten Form mit Bezug auf etwas
anderes, Goethe einmal gesagt hat,
indem er gelacht hat über den
Physiologen Haller, der ein
verknöcherter Naturforscher war.
Haller hatte das Wort geprägt:
|
aucun esprit créé ne pénètre à
l'intérieur de la nature.
Heureux celui à qui elle indique
seulement l'enveloppe extérieure !
Cela répugnait à Goethe, et il disait
: "À l'intérieur de la nature" - ô
philistin ! - "Aucun esprit créé ne
pénètre". "Heureux celui à qui elle
indique seulement l'enveloppe
extérieure !" J'entends cela se
répéter depuis soixante ans, je le
maudis, mais en cachette.
La nature n'a ni noyau ni enveloppe,
elle est tout en une seule fois.
Examine-toi donc le plus possible
pour savoir si tu es le noyau ou la
coquille !
|
75
|
Ins Innere der Natur Dringt kein
erschaffner Geist.
Glückselig, wem sie nur Die äußere
Schale weist! Das widerstrebte Goethe,
und er sagte: «Ins Innere der Natur» —
O, du Philister! — «Dringt kein
erschaffner Geist.» «Glückselig, wem
sie nur Die äußere Schale weist!» Das
hör ich sechzig Jahre wiederholen, Ich
fluche drauf, aber verstohlen.
Natur hat weder Kern Noch Schale,
Alles ist sie mit einem Male.
Dich prüfe du nur allermeist, Ob du
Kern oder Schale seist!
|
Ceux qui parlent de la
triarticulation de l'organisme social
comme d'une utopie, on aimerait aussi
leur dire : "Examine-toi seulement si
ce qui hante ton cerveau est soi-même
une utopie ou une réalité. -- On
trouvera alors que tous les corbeaux
ont la plupart du temps des utopies à
l'intérieur et que la réalité dans
leur propre tête devient donc aussi
une utopie ou une idéologie, ou comme
ils l'appellent alors. C'est pourquoi
il est si difficile aujourd'hui de
faire passer la réalité, parce que les
gens se sont tellement barré l'accès à
la réalité.
|
76
|
Diejenigen, die von der
Dreigliederung des sozialen Organismus
als von einer Utopie sprechen, zu
denen möchte man auch so sagen: Dich
prüfe du nur zuallermeist, ob das in
deinem Gehirn drinnen Spukende selber
Utopie oder Wirklichkeit ist. -- Da
wird man finden, daß all die Kräher
zumeist Utopien drinnen haben und
deshalb die Wirklichkeit in ihrem
eigenen Kopfe auch eine Utopie wird
oder eine Ideologie oder wie sie es
dann nennen. Deshalb ist es heute so
schwer, mit der Wirklichkeit
durchzudringen, weil die Leute sich so
verbaut haben den Zugang zu der
Wirklichkeit.
|
Mais nous devons nous dire que nous
devons travailler sérieusement, sinon
nous ne pourrons pas passer de notre
volonté à l'action ; et c'est ce qui
importe, que nous passions de notre
volonté à l'action. Et si nous devions
renoncer à tout, parce que nous le
reconnaissons comme une erreur, alors
nous devrions, pour pouvoir passer du
vouloir à l'action, nous tourner vers
la vérité, que nous voulons percer à
jour en tant que vérité, car rien
d'autre ne peut conduire du vouloir à
l'action que la poursuite impitoyable
et courageuse de la vérité. Cela
devrait en fait être écrit comme une
devise, comme un slogan, avant les
études de ces soirées. Je voulais vous
présenter ce soir une préface à ces
soirées d'étude. J'espère que ce
préambule ne vous empêchera pas de
cultiver ces études de telle sorte
qu'enfin, avant qu'il ne soit trop
tard, des pensées qui portent en elles
des germes d'action puissent s'insérer
dans le monde de manière fructueuse.
|
77
|
Das aber müssen wir uns sagen, daß
wir ernstlich arbeiten müssen, sonst
werden wir nicht überführen können
unser Wollen in die Tat; und darauf
kommt es an, daß wir unser Wollen in
die Tat überführen. Und wenn wir von
allem Abschied nehmen müßten, weil wir
es als einen Irrtum erkennen, so
müßten wir, um vom Wollen zur Tat
kommen zu können, uns doch zur
Wahrheit wenden, die wir als Wahrheit
durchschauen wollen, denn nichts
anderes kann vom Wollen zur Tat
führen, als das rücksichtslose,
couragierte Verfolgen der Wahrheit.
Das sollte eigentlich als eine Devise,
als ein Motto, vor die Studien dieser
Abende geschrieben werden. Ich wollte
Ihnen heute Abend eine Vorrede halten
zu diesen Studienabenden. Ich hoffe,
daß diese Vorrede Sie nicht abhält,
diese Studien so zu pflegen, daß
endlich wirklich, ehe es zu spät wird,
Gedanken, die Tatenkeime in sich
tragen, sich fruchtbar in die Welt
hineinstellen können.
|
Nous aurons l'occasion d'en
discuter.
|
78
|
Es wird die Gelegenheit zu einer
Aussprache gegeben.
|
Rudolf Steiner :
Le livre "Les points essentiels de la
question sociale" est écrit d'une
manière particulière, et ce pour deux
raisons : premièrement, il est écrit
de telle manière qu'il est en fait
entièrement tiré de la réalité.
Certaines personnes qui lisent le
livre n'y pensent pas. Je peux aussi
comprendre que cela ne soit pas
pleinement pris en compte aujourd'hui.
J'ai déjà parlé ici, dans ce cercle -
mais tous ceux qui sont là aujourd'hui
n'étaient pas présents - de la façon
dont les gens pensent vraiment
aujourd'hui. J'ai notamment fait
référence à l'exemple du professeur
d'économie nationale, Lujo Brentano,
qui l'a si bien présenté dans le
dernier numéro de la "Feuille jaune" ;
je veux le répéter brièvement, car je
veux m'y rattacher un peu. Cette
lumière de la théorie d'économie
politique/de peuple actuelle de
l'université - il est le premier, pour
ainsi dire - a développé le concept
d'entrepreneur et a tenté de
caractériser les caractéristiques de
l'entrepreneur à partir de sa pensée
éclairée. Je n'ai pas besoin
d'énumérer la première et la deuxième
caractéristique ; la troisième est que
l'entrepreneur est celui qui met ses
moyens de production au service de
l'ordre social à son propre compte et
à ses propres risques. Il a maintenant
cette notion d'entrepreneur, et il
l'applique. Il arrive alors à
l'étrange résultat que l'ouvrier
prolétarien d'aujourd'hui est en fait
aussi un entrepreneur, car il
correspond à son concept
d'entrepreneur en ce qui concerne la
première, la deuxième et la troisième
caractéristique. Car l'ouvrier a sa
propre force de travail comme moyen de
production ; il en dispose, et par
rapport à celle-ci, il s'adresse au
processus social à son propre compte
et à ses propres risques. - Ainsi,
cette lumière de l'économie de peuple
intègre très bien le concept de
travailleur prolétarien dans son
concept d'entrepreneur. Vous voyez,
c'est ainsi que pensent justement les
humains qui se font des concepts qui
n'ont aucun sens ; ils n'ont aucun
sens si l'on exige des concepts qui
doivent être réellement applicables à
la réalité. Mais même si vous ne
l'acceptez peut-être pas, on peut dire
tranquillement que plus de
quatre-vingt-dix pour cent de tout ce
qui est enseigné ou imprimé
aujourd'hui utilise de tels concepts ;
si on veut les appliquer à la réalité,
cela ne marche pas plus que le concept
d'entrepreneur de Lujo Brentano. C'est
ainsi dans la science, c'est ainsi
dans la science sociale, c'est ainsi
partout, c'est pourquoi les gens ont
désappris à comprendre ce qui
travaille avec des concepts conformes
à la réalité.
|
79
|
Rudolf Steiner: Das Buch «Die
Kernpunkte der Sozialen Frage» ist ja
nach zweifacher ichtung in einer
besonderen Art geschrieben, Erstens
ist es so geschrieben, daß es
tatsächlich ganz aus der Wirklichkeit
heraus stammt. Das bedenken manche
Leute nicht, die das Buch lesen. Ich
kann auch begreifen, daß das heute
nicht voll bedacht wird. Ich habe
schon einmal hier in diesem Kreise —
aber es waren nicht alle die da, die
heute da sind — davon gesprochen, wie
nun wirklich die Leute heute denken.
Ich habe namentlich hingewiesen auf
das Beispiel des Professors der
Nationalökonomie, Lujo Brentano, der
das so nett geliefert hat in der
vorigen Nummer des «Gelben Blattes»;
ich will es kurz wiederholen, weil ich
daran etwas anknüpfen will. Da hat
diese Leuchte der heutigen
Volkswirtschaftslehre der Universität
— er ist ja der Erste sozusagen — den
Begriff des Unternehmers entwickelt
und hat versucht, aus seinem
erleuchteten Denken heraus die
Merkmale des Unternehmers zu
charakterisieren. Das erste und zweite
Merkmal brauche ich nicht aufzuzählen;
als drittes gibt er an, daß der
Unternehmer derjenige ist, der seine
Produktionsmittel auf eigene Rechnung
und Gefahr in den Dienst der sozialen
Ordnung stellt. Nun hat er diesen
Begriff des Unternehmers, und den
wendet er nun an. Da kommt er zu dem
merkwürdigen Resultat, daß der
proletarische Arbeiter von heute
eigentlich auch ein Unternehmer ist,
denn er entspricht diesem seinem
Begriff des Unternehmers in bezug auf
die erste, zweite und dritte
Eigenschaft. Denn der Arbeiter hat
seine eigene Arbeitskraft als
Produktionsmittel; darüber verfügt er,
in bezug auf diese wendet er sich an
den sozialen Prozeß auf eigene
Rechnung und Gefahr. — So bringt diese
Leuchte der Volkswirtschaft den
Begriff des proletarischen
Arbeitnehmers in seinen Begriff des
Unternehmers sehr gut hinein. Sehen
Sie, so denken eben die Menschen, die
sich Begriffe machen, die gar keinen
Sinn haben; sie haben keinen Sinn,
wenn Begriffe verlangt werden, die auf
die Wirklichkeit wirklich anwendbar
sein sollen. Aber so wenig Sie das
vielleicht auch annehmen werden, man
kann ruhig sagen: Weit über neunzig
Prozent alles desjenigen, was heute
gelehrt oder gedruckt wird, das
operiert mit solchen Begriffen; wenn
man sie anwenden will auf die
Wirklichkeit, so geht es ebensowenig
wie bei Lujo Brentanos Begriff vom
Unternehmer. So ist es in der
Wissenschaft, so ist es in der
Sozialwissenschaft, so ist es überall,
daher haben die Leute verlernt,
überhaupt das zu verstehen, was mit
wirklichkeitsgemäßen Begriffen
arbeitet.
|
Prenez par exemple la base de la
triarticulation de l'organisme social.
N'est-ce pas, on peut les poser de
différentes manières, ces bases, parce
que la vie a besoin de nombreuses
bases. Mais l'une d'entre elles est
que l'on sait que l'époque récente a
vu l'émergence de ce que l'on pourrait
appeler l'impulsion de la démocratie.
La démocratie doit consister en ce que
tout humain devenu majeur puisse
établir son rapport de droit dans des
parlements démocratiques, directement
ou indirectement par rapport à tout
autre humain devenu majeur. Mais
justement, si l'on veut honnêtement et
sincèrement instaurer cette démocratie
dans le monde, on ne peut pas gérer
les affaires spirituelles dans le sens
de cette démocratie, car chaque humain
devenu majeur devrait alors décider de
ce qu'il ne comprend pas. Les affaires
spirituelles doivent être réglées à
partir de la compréhension de la
chose, c'est-à-dire qu'elles doivent
être placées sur elles-mêmes ; elles
ne peuvent donc absolument pas être
administrées dans un parlement
démocratique, mais elles doivent avoir
leur propre administration, qui ne
peut pas être démocratique, mais qui
doit être issue de la chose. Il en va
de même dans la vie de l'économie ; la
chose doit être gérée à partir de
l'expérience économique et du vivre
dedans la vie de l'économie. C'est
pourquoi la vie de l'économie d'un
côté et la vie de l'esprit de l'autre
doivent être séparées du parlement
démocratique. C'est ainsi que naît
l'organisme social triarticulé.
|
80
|
Nehmen Sie einmal die Grundlage der
Dreigliederung des sozialen
Organismus. Nicht wahr, man kann sie
in der verschiedensten Weise legen,
diese Grundlagen, weil das Leben viele
Grundlagen braucht. Aber eine ist
diese, daß man weiß: in der neueren
Zeit ist das heraufgezogen, was man
nennen könnte den Impuls der
Demokratie. Die Demokratie muß darin
bestehen, daß jeder mündig gewordene
Mensch sein Rechtsverhältnis
festsetzen kann in demokratischen
Parlamenten -- mittelbar oder
unmittelbar gegenüber jedem anderen
mündig gewordenen Menschen. Aber
gerade wenn man ehrlich und aufrichtig
diese Demokratie in die Welt setzen
will, dann kann man die geistigen
Angelegenheiten nicht im Sinne dieser
Demokratie verwalten, denn da würde
entscheiden müssen jeder mündig
gewordene Mensch über das, was er
nicht versteht. Die geistigen
Angelegenheiten müssen aus dem
Verständnis heraus für die Sache
geregelt werden, das heißt auf sich
selbst gestellt werden; sie können
also überhaupt nicht in einem
demokratischen Parlament verwaltet
werden, sondern sie müssen ihre eigene
Verwaltung haben, die nicht
demokratisch sein kann, sondern die
aus der Sache heraus sein muß. Ebenso
ist es im Wirtschaftsleben; da muß aus
der wirtschaftlichen Erfahrung und dem
Drinnenleben im Wirtschaftsleben die
Sache verwaltet werden. Daher muß
ausgeschieden werden aus dem
demokratischen Parlament das
Wirtschaftsleben auf der einen Seite
und das Geistesleben auf der anderen
Seite. Daraus entsteht der
dreigegliederte soziale Organismus.
|
Là y a maintenant à Tübingen le
professeur Heck, c'est lui - j'en ai
déjà parlé - qui a dit qu'il ne
fallait absolument pas se laisser
aller à dire que le rapport salarial
habituel, où l'on est rémunéré pour
son travail, avait quelque chose
d'humiliant pour le prolétaire, car
Caruso était aussi dans un rapport
salarial. La différence ne serait pas
de principe : Caruso chante et reçoit
son salaire, et le prolétaire
ordinaire travaille et reçoit aussi
son salaire ; et lui, en tant que
professeur, reçoit aussi son salaire
lorsqu'il donne une conférence. 1 a
seule différence entre Caruso et le
prolétaire serait que Caruso reçoit
trente à quarante mille marks pour une
soirée et le prolétaire un peu moins.
Mais il ne s'agit pas d'une différence
de principe, seulement d'une
différence concernant la somme de la
rémunération. Et donc, selon ce
professeur plein d'esprit, on n'a pas
besoin de ressentir quelque chose de
dégradant dans la rémunération ; lui
non plus ne le ressent pas ainsi. - Ce
n'est qu'une parenthèse. Mais ce
professeur intelligent a également
écrit un long article contre la
triarticulation. Là, il part de ce que
si l'on articule en trois, on en
arrive à trois parlements. - Et
maintenant, il montre que ce n'est pas
possible avec trois parlements, car il
dit : dans le parlement économique, le
petit artisan ne comprendra pas le
point de vue du grand industriel, et
ainsi de suite. - C'est là que le bon
professeur s'est fait ses idées sur la
triarticulation, et contre ces idées -
que je trouve encore bien plus
stupides que le professeur Heck ne les
trouve ; je les critiquerais aussi
jusqu'à la moelle -, il s'en prend à
elles, mais il les a faites lui-même.
Il s'agit en effet de ne pas
juxtaposer trois parlements, mais d'en
retirer ce qui n'a pas sa place dans
un parlement. Il fait simplement trois
parlements et dit : ce n'est pas
possible. - C'est ainsi que l'on vit
dans des concepts étrangers à la
réalité et que l'on juge les autres en
fonction de ceux-ci.
|
81
|
Da gibt es nun in Tübingen den
Professor Heck, das ist der — ich habe
schon davon gesprochen —, der gesagt
hat, man brauche sich durchaus nicht
herbeizulassen zu sagen, daß das
gewöhnliche Lohnverhältnis, wo man
entlohnt wird für seine Arbeit, etwas
Erniedrigendes hätte für den
Proletarier, denn Caruso stehe ja auch
im Lohnverhältnis. Der Unterschied
wäre kein prinzipieller: Caruso singe
und bekomme seinen Lohn, und der
gewöhnliche Proletarier arbeite und
bekomme auch seinen Lohn; und er als
Professor bekomme auch seinen Lohn,
wenn er vortrage. 1 er Unterschied
zwischen Caruso und dem Proletarier
wäre nur der, daß Caruso für einen
Abend dreißig- bis vierzigtausend Mark
bekommt und der Proletarier etwas
weniger. Aber das sei kein
prinzipieller Unterschied, sondern nur
ein Unterschied in bezug auf die Summe
der Entlohnung. Und so braucht man, so
meint dieser geistreiche Professor, in
der Entlohnung durchaus nicht etwas
Entwürdigendes zu fühlen; er fühle das
auch nicht so. — Das nur nebenbei.
Aber nun hat dieser gescheite
Professor auch einen langen Artikel
geschrieben gegen die Dreigliederung.
Da geht er aus davon: Gliedern wir
dreifach, dann kommen wir ja zu drei
Parlamenten. — Und jetzt zeigt er, daß
das nicht geht mit drei Parlamenten,
denn er sagt: Im Wirtschaftsparlament
wird der kleine Handwerker nicht
verstehen die Standpunkte des
Großindustriellen und so weiter. — Da
hat sich der gute Professor seine
Ideen über die Dreigliederung gemacht,
und gegen diese Ideen — die ich noch
viel dümmer finde als Professor Heck
sie findet; die würde ich auch in
Grund und Boden hinein kritisieren —,
gegen die geht er an, aber die hat er
selbst gemacht. Es handelt sich
nämlich darum, daß nicht drei
Parlamente nebeneinanderstehen,
sondern daß herausgenommen wird das,
was in kein Parlament gehört. Er macht
einfach drei Parlamente und sagt: Das
geht nicht. — So lebt man in
wirklichkeitsfremden Begriffen und
beurteilt das andere auch danach.
|
Maintenant, dans l'économie
nationale, la théorie d'économie de
peuple, est presque seulement inclus
ce que sont des concepts irréels.
Mais, voyez-vous, je ne pourrais pas,
maintenant que le temps presse, écrire
une bibliothèque entière dans laquelle
seraient répertoriés tous les concepts
d'économie de peuple. C'est pourquoi
se trouve naturellement dans les
"points essentiels" une multitude de
concepts qui doivent être
abordés/discutés de manière
appropriée. Il me suffit par exemple
d'attirer l'attention sur ce qui suit
:
|
082
|
Nun ist gerade in die
Nationalökonomie, in die
Volkswirtschaftslehre, fast nur das
eingezogen, was unwirkliche Begriffe
sind. Aber sehen Sie, ich könnte doch
nicht jetzt, wo die Zeit drängt, eine
ganze Bibliothek schreiben, worin alle
volkswirtschaftlichen Begriffe
aufgeführt werden. Daher finden sich
natürlich in den «Kernpunkten» eine
Menge von Begriffen, die sachgemäß
besprochen werden müssen. Ich brauche
zum Beispiel nur auf folgendes
aufmerksam zu machen:
|
N'est-il pas vrai qu'à une époque
que nous avons dépassée, les relations
sociales étaient essentiellement le
fruit de la conquête ? Un territoire
quelconque était occupé par un peuple
ou une race ; un autre peuple faisait
irruption et conquérait le territoire.
Les races ou les peuples qui étaient
auparavant à l'intérieur ont été
soumis au travail. Le peuple
conquérant a pris le sol en
possession, ce qui a créé un certain
rapport entre les conquérants et les
conquis. Les conquérants, du fait
qu'ils étaient des conquérants,
avaient le sol en possession. De ce
fait, ils étaient les plus forts
économiquement, les conquis étaient
les plus faibles économiquement, et il
s'en est formé ce qui est devenu un
rapport de droit. C'est pourquoi, à
presque toutes les époques anciennes
de l'évolution historique, on a des
rapports de droit fondés sur des
conquêtes, c'est-à-dire des privilèges
et des droits de désavantage. Les
temps sont maintenant venus où il
n'était plus possible de conquérir
librement. Vous pouvez étudier la
différence entre la conquête libre et
la conquête liée en regardant par
exemple le début du Moyen Âge. Vous
pouvez étudier comment certains
peuples, les Goths, sont descendus
vers le sud, mais dans des régions
entièrement occupées ; ils ont alors
été amenés, en ce qui concerne l'ordre
social, à faire autre chose que les
Francs, qui sont allés vers l'ouest et
n'y ont pas trouvé de régions
entièrement occupées. Cela a donné
naissance à d'autres droits de
conquête. À l'époque moderne, ce ne
sont pas seulement les droits fonciers
issus des conquêtes qui ont agi, mais
aussi les droits des humains qui
avaient des privilèges de possession
et qui pouvaient désormais
s'approprier les moyens de production
grâce au pouvoir économique. La
possession des moyens de production,
c'est-à-dire la propriété privée des
capitaux, s'est ajoutée au droit
foncier au sens actuel du terme. Cela
a donné lieu à des rapports de droit
issus de rapports économiques. Comme
vous le voyez, ces rapports de droit
sont nés tout seuls à partir de
rapports économiques.
|
83
|
Nicht wahr, in einer Zeit, über die
wir hinaus sind, da entstanden soziale
Verhältnisse im Grunde genommen einzig
und allein durch Eroberung. Irgendein
Territorium wurde von einem Volke oder
von einer Rasse besetzt; ein anderes
Volk brach herein und eroberte das
Gebiet. Diejenigen Rassen oder Völker,
die früher drinnen waren, wurden
heruntergedrängt zur Arbeit. Das
erobernde Volk nahm den Boden in
Besitz, und dadurch entstand ein
gewisses Verhältnis zwischen Eroberern
und Eroberten. Die Eroberer hatten
dadurch, daß sie Eroberer waren, den
Boden in Besitz. Dadurch waren sie die
wirtschaftlich Starken, die Eroberten
waren die wirtschaftlich Schwachen,
und es bildete sich das heraus, was
ein Rechtsverhältnis wurde. Daher hat
man in fast allen älteren Epochen im
geschichtlichen Werden durch
Eroberungen begründete
Rechtsverhältnisse, das heißt
Vorrechte und Benachteiligungsrechte.
Nun kamen die Zeiten herbei, in denen
nicht mehr frei erobert werden konnte.
Sie können den Unterschied studieren
im freien und gebundenen Erobern, wenn
Sie zum Beispiel sich das frühe
Mittelalter ansehen. Sie können
studieren, wie gewisse Völkerschaften,
die Goten, hinuntergedrungen waren
nach dem Süden, aber in vollbesetzte
Gebiete; da wurden sie zu anderem
veranlaßt in bezug auf die soziale
Ordnung als die Franken, die nach dem
Westen zogen und dort nicht
vollbesetzte Gebiete fanden. Dadurch
entstanden andere Erobererrechte. In
der neueren Zeit wirkten dann nicht
allein die von Grund und Boden
abhängigen Rechte, welche aus
Eroberungen hervorgegangen waren, es
kamen dazu die Rechte derjenigen
Menschen, die Vorrechte aus Besitz
hatten und die jetzt durch
wirtschaftliche Macht sich aneignen
konnten die Produktionsmittel. Da kam
zu dem, was Bodenrecht ist im heutigen
Sinne, der Besitz der
Produktionsmittel dazu, das heißt der
Privatbesitz von Kapitalien. Das ergab
dann Rechtsverhältnisse aus
wirtschaftlichen Verhältnissen heraus.
Sie sehen, es sind diese
Rechtsverhältnisse ganz allein aus den
wirtschaftlichen Verhältnissen heraus
entstanden.
|
Maintenant, les humains viennent et
veulent des notions de pouvoir
économique, d'importance économique de
la terre, ils veulent des concepts de
moyens d'exploitation, de moyens de
production, de capitaux, etc., mais
ils n'ont pas vraiment de
compréhension profonde du cours des
choses. Ils prennent alors les faits
superficiels et n'arrivent pas à
comprendre ce qui se cache derrière
les droits fonciers, derrière les
rapports de force en ce qui concerne
les moyens de production. Bien sûr,
toutes ces choses sont prises en
compte dans mon livre. Là est pensé
correctement ; là est, quand est parlé
de droits, à partir de la conscience
de la manière dont le droit s'est
développé à travers les siècles ;
quand on parle de capital, on parle de
la conscience de comment dont le
capital est devenu. Là est évité
soigneusement d'utiliser un concept
qui n'est pas entièrement saisi à
partir de sa genèse ; c'est pourquoi
ces concepts se présentent
différemment que dans les manuels
habituels d'aujourd'hui.
|
84
|
Nun kommen die Menschen und wollen
Begriffe von wirtschaftlicher Macht,
von der wirtschaftlichen Bedeutung des
Grund und Bodens, sie wollen Begriffe
der Betriebsmittel, der
Produktionsmittel, der Kapitalien und
so weiter haben. ja, aber sie
habenkeine wirklich tiefere Einsicht
in den Gang der Dinge. Da nehmensie
dann die oberflächlichen Tatsachen und
kommen nicht darauf,was eigentlich
hinter den Bodenrechten, hinter den
Machtverhältnissen in bezug auf die
Produktionsmittel steckt. Natürlich,
alle diese Dinge sind in meinem Buche
berücksichtigt. Da ist richtig
gedacht; da ist, wenn von Rechten
gesprochen wird, aus dem Bewußtsein
heraus gesprochen, wie das Recht durch
Jahrhunderte hindurch entstanden ist;
da ist, wenn von Kapital gesprochen
wird, aus dem Bewußtsein heraus
gesprochen, wie das Kapital geworden
ist. Da ist sorgfältig vermieden,
einen Begriff anzuwenden, der nicht
vollständig aus der Entstehung heraus
gefaßt ist; daher nehmen sich diese
Begriffe anders aus als in den
gewöhnlichen heutigen Lehrbüchern.
|
Mais aussi quelque chose d'autre est
pris en compte. Prenons un fait
précis, n'est-ce pas, le fait que le
protestantisme est né un jour. Dans
les livres d'histoire, on raconte très
souvent que Tetzel a parcouru l'Europe
centrale et que les gens étaient
indignés par la vente des indulgences
et autres choses de ce genre. Mais ce
n'était pas seulement cela, ce n'est
qu'une vision superficielle. L'élément
principal était le fait qu'il y avait
à Gênes une banque pour le compte de
laquelle - et non pour le compte du
pape - ce marchand d'indulgences se
déplaçait en Allemagne, car cette
banque avait accordé des crédits au
pape pour ses autres besoins. Toute
cette histoire était une entreprise
capitaliste. Cet exemple du commerce
des indulgences en tant qu'entreprise
capitaliste, où même le spirituel a
été négocié, vous permet d'étudier -
ou plutôt, si l'on commence à étudier,
on arrive peu à peu à la conclusion -
que finalement, tout pouvoir du
capital se ramène à la suprématie du
spirituel. Si vous étudiez comment le
capital a acquis son pouvoir, vous
trouverez partout la suprématie du
spirituel. Et c'est vraiment ainsi.
N'est-ce pas, celui qui est
intelligent, celui qui est
débrouillard, a un pouvoir plus grand
que celui qui n'est pas intelligent,
qui n'est pas débrouillard. Et c'est
ainsi que naissent, de façon justifiée
ou non, beaucoup de choses qui sont
des concentrations de capital. Il faut
en tenir compte lorsqu'on envisage le
concept de capital. Ces études réelles
permettent de comprendre que le
capital repose sur le développement du
pouvoir spirituel et que le pouvoir de
l'ancien esprit théocratique est venu
s'ajouter aux droits fonciers, aux
droits de conquête, d'un autre côté.
L'ancienne Église est à l'origine
d'une grande partie de ce qui a
ensuite été transféré dans le
capitalisme moderne. Il existe un lien
secret entre le pouvoir capitaliste
moderne et le pouvoir de l'ancienne
Église. Et tout cela s'est rassemblé
en un méli-mélo dans l'État de pouvoir
moderne. Là-dedans, vous trouvez les
restes de l'ancienne théocratie, les
restes des anciennes conquêtes. Et
finalement, les conquêtes modernes
sont venues s'y ajouter, et la
conquête la plus moderne serait
maintenant la conquête de l'État par
le socialisme. Mais en réalité, ce
n'est pas ainsi qu'il faut procéder.
Il doit y avoir quelque chose de
nouveau, qui fasse complètement table
rase de ces anciens concepts et
impulsions. C'est pourquoi il est
important que nous nous penchions
aussi, dans nos études, sur les
notions qui sont à la base de tout
cela. Nous devons aujourd'hui
expliquer précisément à tous ceux qui
veulent parler de choses sociales ce
qu'est le droit, ce qu'est le pouvoir
et ce qui est en réalité un bien
[économique], un bien sous forme de
marchandises et autres. C'est dans ce
domaine que les plus grandes erreurs
sont commises. Je veux par exemple
attirer votre attention sur l'une
d'entre elles ; si vous n'y êtes pas
attentifs, vous comprendrez mal
beaucoup de choses dans mon livre.
|
085
|
Aber auch noch etwas anderes ist
berücksichtigt. Nehmen wir eine
bestimmte Tatsache, nicht wahr, die
Tatsache, wie der Protestantismus
einmal entstanden ist. In den
Geschichtsbüchern wird es ja sehr
häufig so erzählt, daß der Tetzel
herumgezogen ist innerhalb
Mitteleuropas und daß die Leute
entrüstet waren über den Ablaßverkauf
und dergleichen. Aber das war es nicht
allein, das ist nur die
Oberflächenansicht. Die Hauptsache,
die dahinter stak, war die Tatsache,
daß es in Genua ein Bankhaus gab, in
dessen Auftrag — nicht im Auftrag des
Papstes — dieser Ablaßkrämer in
Deutschland herumzog, denn dieses
Bankhaus hatte dem Papst für seine
anderen Bedürfnisse Kredite gewährt.
Die ganze Geschichte war eine
kapitalistische Unternehmung. An
diesem Beispiel des Ablaßhandels als
einer kapitalistischen Unternehmung,
wo sogar auch mit Geistigem gehandelt
worden ist, an diesem Beispiel können
Sie studieren — oder besser gesagt,
wenn man da anfängt zu studieren,
kommt man allmählich darauf —, daß
schließlich alle Kapitalmacht
zurückgeht auf die Übermacht des
Geistigen. Studieren Sie, wie das
Kapital eigentlich zu seiner Macht
gekommen ist, so finden Sie überall
die Übermacht des Geistigen. Und so
ist es wirklich. Nicht wahr, wer
schlau ist, wer findig ist, der hat
eine größere Macht als derjenige, der
nicht schlau, der nicht findig ist.
Und auf diese Art entsteht
gerechtfertigterweise — oder auch
ungerechtfertigterweise — vieles, was
Zusammenscharrung des Kapitals ist.
Das muß berücksichtigt werden, wenn
man ins Auge faßt den Kapitalbegriff. Bei
solchen realen Studien kommt man
dahinter, daß Kapital auf Entfaltung
der geistigen Macht beruht und daß
zu den Grund- und Bodenrechten, zu
den Erobererrechten, von anderer
Seite hinzugekommen ist die Macht
des alten theokratischen Geistes.
Von der alten Kirche ist viel von
dem ausgegangen, was dann
übergegangen ist eigentlich in den
modernen Kapitalismus. Es gibt einen
geheimen Zusammenhang zwischen der
modernen kapitalistischen Macht und
der Macht der alten Kirche. Und das
alles hat sich zu einem Kuddelmuddel
zusammengezogen in den modernen
Machtstaat. Da drinnen finden Sie
die Überreste der alten Theokratie,
die Überreste der alten Eroberungen.
Und schließlich kamen die modernen
Eroberungen dazu, und die
allermodernste Eroberung soll jetzt
die Eroberung des Staates durch den
Sozialismus sein. Aber so darf man
es in Wirklichkeit nicht machen. Es
muß etwas Neues werden, was mit
diesen alten Begriffen und Impulsen
vollständig aufräumt. Daher wird es
darauf ankommen, daß wir uns bei
unseren Studien auch befassen mit
den Begriffen, die hier
zugrundeliegen. Wir müssen heute
jedem, der über soziale Sachen reden
will, genau Aufschluß geben darüber,
was Recht ist, was Macht ist und was
in Wirklichkeit ein
[wirtschaftliches] Gut ist, ein Gut
in Form von Waren und dergleichen.
Auf diesem Gebiet werden die größten
Fehler gemacht. Ich will zum
Beispiel auf einen aufmerksam
machen; wenn Sie darauf nicht
aufmerksam sind, werden Sie vieles
in meinem Buche mißverstehen.
|
Aujourd'hui, on pense souvent que la
marchandise est du travail stocké, que
le capital est aussi du travail
stocké. - Vous pouvez dire qu'il est
inoffensif d'avoir de telles notions.
Ce n'est pas inoffensif, car de tels
concepts empoisonnent toute la pensée
sociale. Vous voyez, qu'en est-il du
travail - le travail en tant que
dépense/application de force de
travail ? Oui, il y a une grande
différence entre, par exemple,
utiliser ma force musculaire physique
en faisant du sport et couper du bois.
Si je fais du sport, j'use ma force
musculaire physique ; je peux être
aussi fatigué et devoir remplacer ma
force musculaire autant que celui qui
coupe du bois. Je peux appliquer la
même quantité de travail au sport qu'à
la coupe de bois. La différence ne
réside pas dans le fait que la force
de travail doit être remplacée - elle
doit bien sûr être remplacée - mais
dans le fait que l'une des forces de
travail est utilisée uniquement pour
moi, dans un sens égoïste, l'autre
dans un sens social pour la société.
C'est la fonction sociale qui
différencie ces choses. Si je dis
maintenant que quelque chose est du
travail accumulé, je ne tiens pas
compte du fait que le travail cesse en
fait d'être dans une chose quelconque
au moment où l'on ne travaille plus.
Je ne peux pas dire que le capital est
du travail accumulé, mais je dois dire
que le travail n'existe que tant qu'il
est effectué. Mais dans notre ordre
social actuel, le capital conserve le
pouvoir d'appeler à nouveau le travail
à tout moment. Ce n'est pas dans le
fait que le capital soit du travail
accumulé que réside la fatalité, comme
le pense Marx, mais dans le fait que
le capital donne le pouvoir d'appeler
à son service un nouveau travail - non
pas un travail accumulé - mais un
nouveau travail. Il dépend beaucoup de
cela, et il dépendra encore beaucoup
de cela, que l'on parvienne à des
notions claires, fondées sur la
réalité, sur ces choses. Et c'est à
partir de telles notions, qui sont
maintenant totalement ancrées dans la
réalité, que ce livre est écrit. Il ne
tient pas compte de ces notions, qui
étaient tout à fait utiles pour
l'éducation du prolétariat. Mais
aujourd'hui, alors que l'on doit
construire quelque chose, ces notions
n'ont plus de sens.
|
086
|
Es herrscht heute vielfach die
Ansicht, daß Ware aufgespeicherte
Arbeit ist, daß auch Kapital
aufgespeicherte Arbeit ist. — Sie
können sagen, es sei harmlos, solche
Begriffe zu haben. Es ist nicht
harmlos, denn solche Begriffe
vergiften das ganze soziale Denken.
Sehen Sie, wie ist es eigentlich mit
der Arbeit — Arbeit als Aufwendung von
Arbeitskraft? Ja, da verhält es sich
so, daß ein großer Unterschied ist, ob
ich zum Beispiel meine physische
Muskelkraftabnütze, indem ich Sport
treibe, oder ob ich Holz hacke. Wenn
ichSport treibe, da nütze ich meine
physische Muskelkraft ab; ichkann
geradeso müde werden und meine
Muskelkraft wieder erset‑zen müssen
wie einer, der Holz hackt. Dieselbe
Menge von Arbeitkann ich anwenden auf
den Sport wie auf das Holzhacken. Der
Unterschied ist nicht da in bezug
darauf, daß die Arbeitskraft wieder
ersetzt werden muß — sie muß natürlich
ersetzt werden —, sondern der
Unterschied besteht darin, daß die
eine Arbeitskraft angewendet wird nur
für mich, im egoistischen Sinn, die
andere im sozialen Sinn für die
Gesellschaft. Durch die soziale
Funktion unterscheiden sich diese
Dinge. Sage ich jetzt, irgend etwas
ist aufgespeicherte Arbeit, so
berücksichtige ich nicht, daß die
Arbeit eigentlich aufhört, in
irgendeiner Sache drinnen zu sein in
dem Augenblick, wo nicht mehr
gearbeitet wird. Nicht kann ich sagen:
Das Kapital ist aufgespeicherte Arbeit
—, sondern ich muß sagen: Die Arbeit
ist nur so lange da, als sie
verrichtet wird. Aber in unserer
heutigen sozialen Ordnung behält das
Kapital die Macht, die Arbeit
jederzeit wiederum aufzurufen. Nicht
in dem liegt das Verhängnisvolle, was
Marx meint, daß Kapital
aufgespeicherte Arbeit ist, sondern in
der Einrichtung, daß Kapital die Macht
gibt, neue Arbeit — nicht
aufgespeicherte Arbeit —, sondern neue
Arbeit immer wiederum in seinen Dienst
zu stellen. Davon hängt viel ab, und
davon wird weiter viel abhängen, daß
man zu klaren, in der Wirklichkeit
fußenden Begriffen über diese Dinge
kommt. Und von solchen Begriffen, die
nun ganz drinnenstecken in der
Wirklichkeit, geht dieses mein Buch
aus. Das rechnet nicht mit solchen
Begriffen, die ganz nützlich waren für
die Erziehung des Proletariats. Aber
heute, wo man etwas bauen soll, haben
sie keinen Sinn mehr, diese Begriffe.
|
Vous voyez, quand je dis que le
capital est du travail accumulé, c'est
bon pour l'éducation du prolétariat ;
il a reçu les sentiments qu'il devait
recevoir. Il n'était pas important que
le concept soit fondamentalement faux
- on peut éduquer même avec des
concepts fondamentalement faux. Mais
on ne peut construire quelque chose
qu'avec des concepts corrects. C'est
pourquoi nous avons aujourd'hui besoin
de concepts corrects dans tous les
domaines de l'économie de peuple et
nous ne pouvons pas continuer à
travailler avec des concepts erronés.
Ce n'est pas par frivolité que je dis
que l'on peut aussi éduquer avec des
concepts erronés, mais en vertu des
principes généraux de l'éducation.
Vous voyez, lorsque vous racontez des
contes de fées aux enfants, vous ne
voulez pas non plus construire avec
ces choses que vous développez ; dans
l'éducation, quelque chose d'autre
entre en ligne de compte que ce qui
entre en ligne de compte pour la
construction dans la réalité physique.
Il faut travailler avec des concepts
réels. Un concept tel que "le capital
est du travail accumulé" n'est pas un
concept. Le capital est un pouvoir et
confère le pouvoir de mettre à tout
moment à son service le travail qui se
crée. C'est un vrai concept avec une
logique de fait. Il faut travailler
avec des concepts vrais dans ces
domaines. C'est ce qui a été tenté
dans les "points essentiels". C'est
pourquoi je pense qu'une grande partie
de ce qui n'y figure pas en termes de
définition des termes, de
caractéristiques des termes, doit être
élaborée. Et celui qui peut contribuer
à l'élaboration de ce dont on a besoin
pour comprendre le mode de pensée, la
base de ce livre, apportera une très
bonne contribution à ces soirées
d'étude. C'est donc ce qui compte, mes
très chers présents, c'est ce qui
compte tout particulièrement.
|
87
|
Sehen Sie, wenn ich sage: Kapital
ist aufgespeicherte Arbeit —, so ist
das gut für die Erziehung des
Proletariats; es bekam die Gefühle,
die es bekommen sollte. Da kam es
nicht darauf an, daß der Begriff
grundfalsch ist — erziehen kann man
auch mit grundfalschen Begriffen. Aber
etwas aufbauen, das kann man nur mit
richtigen Begriffen. Daher brauchen
wir heute auf allen Gebieten der
Volkswirtschaft richtige Begriffe und
können nicht weiter mit falschen
Begriffen arbeiten. Das sage ich nicht
aus Frivolität, daß man auch mit
falschen Begriffen erziehen kann,
sondern aus allgemeinen
Erziehungsgrundsätzen heraus. Sehen
Sie, wenn Sie Kindern Märchen
erzählen, dann wollen Sie ja auch
nicht mit diesen Dingen, die Sie da
herausentwickeln, bauen; bei der
Erziehung kommt etwas anderes in
Betracht, als in Betracht kommt beim
Aufbauen in der physischen
Wirklichkeit. Da muß mit wirklichen
Begriffen gearbeitet werden. Solch ein
Begriff wie «Kapital ist
aufgespeicherte Arbeit», das ist kein
Begriff. Kapital ist Macht und
verleiht Macht, jederzeit neu
entstehende Arbeit in seinen Dienst zu
stellen. Das ist ein wirklicher
Begriff mit Tatsachenlogik. Mit wahren
Begriffen muß man arbeiten auf diesen
Gebieten. Das ist versucht worden in
den «Kernpunkten». Daher glaube ich,
daß viel von dem, was da nicht
drinnensteht an Definition der
Begriffe, an Charakteristik der
Begriffe, daß das erarbeitet werden
muß. Und wer dann dazu beitragen kann,
daß dies erarbeitet wird, was man
braucht, um das zu verstehen, was die
Denkweise, die Grundlage dieses Buches
ist, der wird sehr Gutes beitragen zu
diesen Studienabenden. Also darauf
kommt es an, meine sehr verehrten
Anwesenden, darauf kommt es ganz
besonders an.
|
Oui, n'est-ce pas, il faudrait
écrire un dictionnaire si l'on voulait
clarifier tous les termes - mais ce
qu'est le "capital" peut maintenant
être réglé en une seule soirée d'étude
de ce genre. Sans que l'on ait
clairement compris aujourd'hui :
qu'est-ce que le capital ? Qu'est-ce
que la marchandise ? Qu'est-ce que le
travail ? Qu'est-ce que le droit ? -,
sans ces notions, on ne peut pas
avancer. Et ces notions sont tout à
fait confuses dans les cercles les
plus larges ; elles doivent avant tout
être rectifiées. Aujourd'hui, on se
désespère quand on parle de l'ordre
social avec des gens ; ils ne peuvent
pas participer parce qu'ils n'ont pas
appris à maîtriser la réalité. C'est
ce qu'il faut faire.
|
88
|
Ja, nicht wahr, man müßte ein
Lexikon schreiben, wenn man alle
Begriffe klarmachen wollte —, aber was
«Kapital» ist, das kann jetzt an einem
einzigen solchen Studienabend erledigt
werden. Ohne daß man heute klar
begriffen hat: Was ist eigentlich
Kapital? Was ist Ware? Was ist Arbeit?
Was ist Recht? —, ohne diese Begriffe
kommt man nicht weiter. Und diese
Begriffe sind ganz konfus in den
weitesten Kreisen; sie müssen vor
allen Dingen richtiggestellt werden.
Man verzweifelt heute ja geradezu,
wenn man redet mit Leuten über die
soziale Ordnung; sie können nicht mit,
weil sie nicht gelernt haben, die
Wirklichkeit zu beherrschen. Das ist
dasjenige, was namentlich besorgt
werden sollte.
|
Français
seulement
PREMIÈRE SÉANCE D'ÉTUDES, Stuttgart,
30 juillet 1919.
L'histoire du mouvement social.
01
Rudolf Steiner : Mes très chers présents ! Je
ne vais pas anticiper ce soir sur ce qui doit
être mis en place ici en tant que soirées
d'étude qui se tiendront sur la base du livre
"Les points essentiels de la question
sociale", mais je vais essayer de vous donner
une sorte d'introduction à ces soirées. Par
cette introduction, je voudrais vous faire
ressentir les points de vue qui ont présidé à
l'écriture de ce livre. Il a été écrit avant
tout en fonction de l'actualité immédiate, de
la conviction que la question sociale a elle
aussi pris une nouvelle forme à la suite des
événements actuels et qu'il est nécessaire de
parler aujourd'hui de la question sociale
d'une manière tout à fait différente de celle
dont on parlait, de quelque côté que ce soit,
de la question sociale avant la catastrophe de
la guerre mondiale. Avec ce livre, on a en
quelque sorte essayé, à ce moment de
l'évolution de l'humanité où la question
sociale devient particulièrement urgente et où
tout homme qui vit consciemment aujourd'hui,
qui ne vit pas la vie de l'humanité en
somnolant et en dormant, devrait savoir
quelque chose sur ce qui doit se passer dans
le sens de ce qu'on appelle habituellement la
question sociale. Il serait peut-être bon de
jeter un petit coup d'œil en arrière
aujourd'hui. J'aurai peut-être à mentionner
des choses - mais nous les présenterons sous
un jour un peu différent de celui dans lequel
elles ont été présentées -, j'aurai à
mentionner des choses que vous connaissez en
partie.
02
Vous savez probablement que ce qui est dit
aujourd'hui sur la question sociale est dit
depuis relativement longtemps. Et on cite
aujourd'hui les noms de Proudhon, Fourier,
Louis Blanc comme les premiers à avoir traité
la question sociale jusqu'au milieu du XIXe
siècle. Vous savez aussi que la manière dont
cette question sociale a été traitée jusqu'au
milieu du XIXe siècle est appelée par les
représentants actuels, du moins par de
nombreux représentants actuels de la question
sociale, "l'ère des utopies sociales". Il est
bon de préciser ce que l'on entend par là
lorsque l'on dit qu'à son premier stade, la
question sociale est apparue de telle sorte
qu'elle vivait dans un "âge des utopies". Mais
on ne peut pas parler de cette chose dans un
sens absolu, on ne peut en fait parler qu'à
partir des sentiments des représentants de la
question sociale dans le présent. Ils
ressentent les choses comme je veux les
décrire maintenant. Ils sentent que toutes les
questions sociales qui sont apparues à
l'époque dont je veux parler en premier lieu
étaient au stade de l'utopie. Et qu'est-ce que
les gens entendent par là quand ils disent que
la question sociale était alors au stade de
l'utopie ? Ils entendent par là - on l'a déjà
remarqué à l'époque ; Saint-Simon et Fourier
l'ont bien remarqué - qu'il y a, même après la
Révolution française, des humains d'une
certaine minorité sociale qui sont en
possession des moyens de production et aussi
d'autres biens humains, et qu'il y a un grand
nombre d'autres humains - c'est même la
majorité - qui ne sont pas en possession de
tels biens. Ces personnes ne peuvent
travailler sur les moyens de production qu'en
se mettant au service de ceux qui possèdent
les moyens de production et aussi la terre -
elles n'ont en fait rien d'autre
qu'elles-mêmes et leur force de travail. On a
noté que la vie de cette grande masse de
l'humanité est une vie de détresse, en grande
partie dans la pauvreté, par opposition à ceux
qui sont en minorité ; et on a fait allusion à
la situation de la minorité et à la situation
de la majorité.
03
Ceux qui ont écrit sur cette situation sociale
de l'humanité, comme Saint-Simon et Fourier,
mais aussi Proudhon, sont partis d'un certain
postulat. Ils sont partis du principe qu'il
était nécessaire d'attirer l'attention des
humains sur ce point : Voyez, la grande masse
vit dans la misère, dans l'absence de liberté,
dans la dépendance économique, ce n'est pas
une existence digne de l'humain pour la grande
masse. Il faut changer cela. - Et on a alors
imaginé toutes sortes de moyens par lesquels
cette inégalité entre les humains pouvait être
modifiée. Mais il y avait toujours une
certaine condition préalable, et cette
condition préalable était que l'on se disait :
si l'on sait ce qui fonde l'inégalité et si
l'on a des paroles suffisamment fortes, si
l'on a une conscience morale suffisante pour
attirer fortement l'attention sur le fait que
la grande majorité des humains vit dans la
dépendance économique et juridique et est
pauvre, alors ce discours touchera les cœurs,
les âmes de la minorité, des nantis, de la
minorité la plus favorisée. Et c'est en
faisant comprendre à cette minorité que les
choses ne peuvent pas rester en l'état, qu'il
faut apporter des changements, qu'il faut
mettre en place un autre ordre social, qu'un
autre ordre social sera instauré. La condition
préalable était donc que les humains se
laissent entraîner à faire quelque chose pour
la libération de la grande masse de l'humanité
à partir de l'élan de leur âme. Et on
proposait alors ce qu'il fallait faire. Et on
pensait que si la minorité, si les gens qui
sont les dirigeants, les leaders, comprenaient
que ce qu'on voulait faire était bien, alors
il y aurait une amélioration générale de la
situation de l'humanité.
04
Beaucoup de choses extrêmement intelligentes
ont été dites de ce côté-là, mais tout ce qui
a été entrepris dans ce sens est aujourd'hui
considéré comme utopique par la plupart des
représentants de la question sociale. Cela
signifie qu'aujourd'hui, on ne compte plus sur
le fait qu'il suffise de dire : c'est ainsi
qu'il faudrait organiser le monde, et
l'inégalité économique, politique et juridique
des humains cesserait. - Il ne sert à rien
aujourd'hui d'en appeler à la compréhension,
au discernement des humains qui sont
favorisés, qui sont dans le privilège, qui
sont en possession des moyens de production et
autres. Si je dois exprimer ce qui a été perdu
au cours de la deuxième moitié du XIXe siècle,
je dois dire que l'on a perdu la foi en la
compréhension et en la bonne volonté des
humains. C'est pourquoi les représentants de
la question sociale, dont je parle maintenant,
se disent : on peut élaborer de beaux plans
sur la manière d'aménager le monde des
humains, mais il n'en résultera rien ; car on
aura beau prêcher de beaux plans, on aura beau
faire appel aux cœurs et aux âmes des
minorités dirigeantes avec des paroles
touchantes, il ne se passera rien. Tout cela,
ce sont des idées sans valeur, et les idées
sans valeur qui imaginent l'avenir sont en
réalité, pour parler en termes populaires, des
utopies. Il ne sert donc à rien, dit-on,
d'imaginer quoi que ce soit dans l'avenir, car
il n'y aura personne pour renoncer à ses
intérêts, pour être saisi par sa conscience,
par son sens moral, etc. - La foi dans la
conscience et le discernement moral a
justement été perdue dans les cercles les plus
larges, notamment chez les représentants de la
question sociale. On se dit que les humains
n'agissent pas du tout en fonction de leur
discernement lorsqu'ils prennent des mesures
sociales ou lorsqu'ils mènent leur vie
sociale, ils agissent en fonction de leur
intérêt. Et les possédants ont bien entendu
intérêt à rester dans leurs possessions. Les
privilégiés sociaux ont intérêt à conserver
leurs privilèges sociaux. C'est pourquoi il
est illusoire de compter sur le fait qu'il
suffit de dire aux gens de faire ceci ou cela.
Ils ne le font pas, parce qu'ils n'agissent
pas en fonction de leur compréhension, mais en
fonction de leur intérêt.
05
Au sens le plus large, on peut dire que Karl
Marx a peu à peu - mais vraiment peu à peu -
adhéré à cette vue. On peut décrire toute une
série d'époques dans la vie de Karl Marx. Dans
sa jeunesse, Marx était aussi un penseur
idéaliste et il pensait encore, dans le sens
que je viens de caractériser, à la faisabilité
des utopies. Mais c'est justement lui, et
après lui son ami Engels, qui s'est écarté de
la manière la plus radicale de ce calcul sur
le discernement des humains. Et si je
caractérise en général ce qui est en fait une
grande histoire, je peux dire ceci : Karl Marx
est finalement parvenu à la conviction que les
choses ne pouvaient pas s'améliorer dans le
monde d'une autre manière qu'en faisant appel
aux humains qui n'ont pas intérêt à ce que
leurs biens, leurs privilèges leur soient
conservés. Ceux qui ont intérêt à ce que leurs
biens soient préservés, ceux-là, on ne peut
absolument pas les voir, on doit les laisser
complètement de côté, car ils ne se laisseront
jamais aller à faire quoi que ce soit, même si
on leur fait de beaux sermons. En revanche, il
y a justement la grande masse des ouvriers
prolétaires [qui n'ont rien à perdre en termes
de biens]. Karl Marx lui-même a vécu dans
cette conviction à l'époque où ce que l'on
appelle aujourd'hui le prolétariat était en
train de naître en Europe centrale ; il a vu
le prolétariat naître en Europe centrale à
partir d'autres conditions économiques. Plus
tard, lorsqu'il vivait en Angleterre, c'était
un peu différent. Mais à l'époque où Karl Marx
est passé de l'idéaliste au matérialiste
économique, c'était encore comme si le
prolétariat moderne était en train d'émerger
en Europe centrale. Et maintenant, il se
disait : ce prolétariat moderne a des intérêts
tout à fait différents de ceux de la minorité
dirigeante, car il se compose d'humains qui ne
possèdent rien d'autre que leur force de
travail, d'humains qui ne peuvent pas vivre
autrement qu'en mettant leur force de travail
au service des possédants, notamment au
service des possesseurs des moyens de
production. Lorsque ces travailleurs quittent
leur travail, ils sont - c'était
particulièrement vrai à l'époque, de la
manière la plus radicale - jetés à la rue. Ils
n'ont rien d'autre devant eux que la
possibilité d'un front pour ceux qui sont les
propriétaires des moyens de production. Ces
gens ont un tout autre intérêt que ceux qui
possèdent. Ils ont intérêt à ce que tout
l'ordre social antérieur prenne fin, à ce que
cet ordre social soit transformé. Il n'est pas
nécessaire de leur prêcher de manière à ce
qu'ils comprennent, mais seulement de manière
à ce que leur égoïsme et leur intérêt soient
saisis. On peut compter sur cela. Prêcher à
ceux sur le discernement desquels on doit
compter ne donne aucun résultat, car les
humains n'agissent pas par discernement, ils
n'agissent que par intérêt. Donc, on ne peut
pas s'adresser à ceux chez qui on devrait
faire appel au discernement, mais on doit
faire appel aux intérêts de ceux qui ne
peuvent pas faire autrement que de s'engager
pour les temps modernes par contrainte
intérieure. C'est l'égoïsme vers lequel Karl
Marx a évolué. C'est pourquoi il n'a plus cru
que le progrès de l'humanité vers des
conditions sociales plus récentes pouvait
provenir d'une autre œuvre humaine que celle
du prolétariat lui-même. Selon Karl Marx, le
prolétariat ne peut aspirer à un
renouvellement des conditions sociales
humaines qu'à partir de ses propres intérêts,
de ses intérêts individuels et égoïstes. Et
c'est ainsi que le prolétariat, non pas par
philanthropie, mais par intérêt égoïste,
libérera tout le reste de l'humanité, parce
qu'il ne peut y avoir rien d'autre que ce
qu'accomplissent les humains qui ne sont pas
attachés aux vieux biens et qui n'ont rien à
perdre des vieux biens en cas de
transformation.
06
On se dit donc : d'un côté, il y a les cercles
dirigeants, leaders, qui ont certains droits
qui leur ont été conférés dans le passé ou qui
leur ont été imposés dans le passé, qui se
sont transmis par héritage dans leurs
familles, et ils s'y accrochent. Ces cercles
dirigeants sont en possession de ceci ou de
cela, qu'ils transmettent à leur tour au sein
de leur cercle, de leur famille et ainsi de
suite. Ces cercles ont toujours quelque chose
à perdre lors d'une transformation, car bien
sûr, s'ils ne perdaient rien, aucune
transformation n'aurait lieu. Il s'agit en
effet que ceux qui n'ont rien reçoivent
quelque chose, donc ceux qui ont quelque chose
ne peuvent que perdre. On ne pourrait donc
faire appel au discernement que si ce
discernement donnait à la classe dirigeante
possédante l'impulsion de vouloir perdre
quelque chose. Ils n'acceptent pas cela. -
C'était le point de vue de Karl Marx. Il faut
donc faire appel à ceux qui n'ont rien à
perdre. C'est pourquoi le "Manifeste
communiste" de 1848 se termine par ces mots :
"Les prolétaires n'ont rien à perdre que leurs
chaînes, mais ils ont tout à gagner.
Prolétaires de tous les pays,
unissez-vous !".
07
Eh bien, vous voyez, c'est devenu en
quelque sorte une conviction depuis la
publication du Manifeste communiste. Et
aujourd'hui, alors que certains sentiments,
déjà sous l'influence de cette conception,
vivent justement dans la majorité du
prolétariat, on ne peut plus vraiment
s'imaginer quel énorme bouleversement s'est
opéré dans la conception socialiste vers le
milieu du XIXe siècle. Mais il serait bon que
vous preniez quelque chose comme l'"Évangile
d'un pauvre pécheur" de Weitling, un compagnon
tailleur, qui a été écrit pas si longtemps
avant le Manifeste communiste, et que vous le
compariez à tout ce qui a été écrit après la
parution du Manifeste communiste. Dans cet
"Évangile d'un pauvre pécheur", vraiment
empreint d'une authentique sensibilité
prolétarienne, règne un langage ardent, on
peut même dire poétique dans un certain sens,
mais un langage qui veut absolument faire
appel à la bonne volonté, au discernement des
humains. C'est la conviction de Weitling que
l'on peut faire quelque chose avec la bonne
volonté des humains. Et cette conviction ne
s'est affaiblie que vers le milieu du XIXe
siècle. Et l'acte par lequel elle s'est
affaiblie est justement la publication du
Manifeste communiste. Et depuis cette époque,
depuis 1848, nous pouvons en fait suivre ce
que nous appelons aujourd'hui la question
sociale. Car si nous voulions parler
aujourd'hui comme Saint-Simon, comme Fourier,
comme Weitling, oui, nous prêcherions
aujourd'hui vraiment la sourde oreille. Car
jusqu'à un certain point, il est tout à fait
exact que l'on ne peut rien entreprendre dans
la question sociale si l'on fait appel à la
compréhension des cercles dirigeants, leaders,
qui ont quelque chose. C'est tout à fait vrai.
Ils ne le savent même pas s'ils le font, car
des forces inconscientes jouent un rôle
extrêmement important dans l'âme humaine.
08
Vous voyez, au cours du XIXe siècle, notre
culture spirituelle est presque entièrement
devenue une phrase. Et le fait que nous
vivions dans la phrase en ce qui concerne la
culture spirituelle est un fait social
beaucoup plus important qu'on ne le pense
habituellement. Et donc, naturellement, les
membres des cercles dirigeants, des cercles de
direction, disent aussi toutes sortes de
belles choses sur la question sociale, et ils
sont eux-mêmes souvent convaincus qu'ils ont
déjà la bonne volonté. Mais en réalité, ils ne
font que le croire, ce n'est qu'une illusion ;
dès que quelque chose de réel est entrepris
dans ce domaine, il apparaît immédiatement
qu'il s'agit d'une illusion. Nous en parlerons
plus tard. Mais comme je l'ai dit, nous ne
pouvons plus parler aujourd'hui comme nous le
faisions à l'époque des utopies. C'est la
véritable conquête de Karl Marx, qui a montré
comment l'humanité est aujourd'hui tellement
empêtrée dans l'illusionnisme que c'est un
non-sens de compter sur autre chose que
l'égoïsme. Il faut compter avec cela ; on ne
peut donc rien obtenir si l'on veut compter
d'une manière ou d'une autre sur l'altruisme,
sur la bonne volonté, sur les principes moraux
des humains - je dis toujours "en ce qui
concerne la question sociale". Et ce
revirement, qui nous a conduits à devoir
parler aujourd'hui d'une toute autre manière
que l'on pouvait par exemple encore parler de
la question sociale dans la première moitié du
XIXe siècle, ce revirement est justement
arrivé avec le Manifeste communiste. Mais tout
n'est pas arrivé d'un seul coup, mais il était
tout de même possible qu'après le Manifeste
communiste, jusque dans les années soixante,
comme vous le savez tous - certains jeunes
socialistes ont déjà oublié cette époque -,
cette toute autre forme de pensée sociale, la
forme de Ferdinand Lassalle, ait touché les
cœurs et les âmes. Et même après la mort de
Lassalle, survenue en 1864, ce qui était le
socialisme de Lassalle s'est poursuivi.
Lassalle fait partie de ces gens qui, malgré
l'avènement d'un autre mode de pensée,
comptaient encore sur la force de frappe des
idées. Lassalle voulait encore saisir les
humains en tant que tels dans leur
compréhension, dans leur volonté sociale avant
tout. Mais de plus en plus, cette nuance
lassallienne diminuait et l'autre nuance, la
nuance marxiste, qui ne voulait compter que
sur les intérêts de cette partie de la
population humaine qui ne possédait
qu'elle-même et sa force de travail, prenait
le dessus. Mais ce n'était pas si rapide. Une
telle façon de penser ne s'est développée que
peu à peu dans l'humanité.
09
Dans les années soixante, soixante-dix, et
même encore dans les années quatre-vingt, les
gens qui appartenaient au prolétariat ou qui
faisaient partie des gens politiquement ou
socialement dépendants - même s'ils n'étaient
pas exactement des prolétaires - jugeaient en
quelque sorte moralement leur dépendance et
condamnaient moralement les milieux non
dépendants de la population humaine. Selon
leur conscience, c'était de la mauvaise
volonté de la part des cercles dirigeants,
leaders, de la population humaine, qu'ils
laissent la grande masse du prolétariat dans
la dépendance, qu'ils la payent mal, etc. Si
je peux m'exprimer trivialement, je peux dire
que dans les années soixante, soixante-dix,
jusque dans les années quatre-vingt, on
fabriquait beaucoup d'indignation sociale et
on parlait du point de vue de l'indignation
sociale. Puis, au milieu des années
quatre-vingt, l'étrange revirement s'est
vraiment produit. Les personnalités les plus
en vue du mouvement social ont alors
complètement cessé de parler de la question
sociale sur la base de l'indignation morale
dans les années 80. C'était l'époque où les
leaders sociaux, que vous, les plus jeunes,
avez seulement vus mourir, étaient grands et
plus ou moins encore animés par l'ardeur de
leur jeunesse : Adler, Pernerstorfer, Wilhelm
Liebknecht, Auer, Bebel, Singer et ainsi de
suite. Ces dirigeants plus âgés ont justement
cessé de plus en plus de prêcher ce socialisme
d'indignation à l'époque, dans les années 80.
Je voudrais dire que ces dirigeants du
socialisme ont exprimé leur conviction intime
lorsqu'ils ont transposé l'ancien socialisme
d'indignation dans leur nouvelle vision
socialiste du monde. Vous trouverez que ce que
je vous dis maintenant ne figure dans aucun
livre sur l'histoire du socialisme. Mais ceux
qui ont vécu à l'époque et qui ont participé à
cela savent que les gens, lorsqu'ils étaient
livrés à eux-mêmes, parlaient ainsi.
10
Supposons que dans les années quatre-vingt,
des dirigeants du socialisme se soient réunis
pour discuter avec des bourgeois [purs] dans
leurs convictions, et supposons qu'il y ait eu
une troisième sorte : des bourgeois idéalistes
qui voulaient du bien à tous les humains, qui
auraient été d'accord pour rendre tous les
humains heureux. Il aurait pu arriver que les
bourgeois déclarent qu'il faut toujours qu'il
y ait des gens pauvres et des gens riches, et
ainsi de suite, car c'est la seule façon de
maintenir la société humaine. Alors peut-être
que la voix de l'un de ces idéalistes qui
s'indignaient de voir tant de gens vivre dans
la pauvreté et la dépendance se serait élevée.
Un tel humain aurait peut-être dit : "Oui, il
faut y parvenir, il faut faire comprendre à
ces gens qui possèdent, aux entrepreneurs, aux
capitalistes, qu'ils doivent renoncer à leurs
biens, qu'ils doivent prendre des mesures qui
permettront à la grande masse de changer de
situation, et ainsi de suite. - De très beaux
discours auraient pu être prononcés sur cette
base. Mais alors, quelqu'un qui, à l'époque,
venait de s'initier au socialisme et à son
évolution, aurait élevé la voix et dit :
"Qu'est-ce que vous racontez, vous êtes un
enfant ; tout cela n'est qu'enfantillages,
absurdités ! Les gens qui sont des
capitalistes, des entrepreneurs, ce sont tous
de pauvres sbires, ils ne savent rien d'autre
que ce qu'on leur a inculqué depuis des
générations. S'ils entendaient dire qu'ils
devraient faire autrement, ils ne pourraient
même pas le faire, car ils ne sauraient pas
comment s'y prendre. Cela ne rentre pas du
tout dans leur crâne que l'on puisse faire
quelque chose différemment. Il ne faut pas
accuser les gens, il ne faut pas condamner
moralement les gens, ils ne sont pas du tout à
condamner moralement ; les gars ont grandi
dans ce milieu, ces pauvres sbires, dans tout
ce milieu, et ça les inspire avec les idées
qu'ils ont. Les accuser moralement, c'est ne
rien comprendre aux lois de l'évolution de
l'humanité, c'est se bercer d'illusions. Ces
humains ne peuvent jamais vouloir que le monde
prenne une autre forme. Parler d'eux avec
indignation, c'est de l'enfantillage pur et
simple. Tout cela est devenu ainsi par
nécessité, et cela ne peut devenir différent
que par nécessité. Vous voyez, on ne peut rien
faire avec ces gars qui croient pouvoir
prêcher aux possédants, aux capitalistes,
qu'il faut instaurer un nouvel ordre mondial,
on ne peut rien faire avec ces gars ; on ne
peut pas instaurer un nouvel ordre mondial
avec eux ; ils ne font que s'adonner à la
croyance que l'on peut accuser ces pauvres
sbires de capitalistes de faire un autre
monde. - Je dois dire les choses un peu
clairement, c'est pourquoi certaines choses
sont dites avec des contours nets, mais de
telle manière que vous avez pu entendre
partout les discours dont je parle. Quand on
les écrivait, on les retouchait un peu, on les
écrivait un peu différemment, mais c'était la
base. Puis ils ont continué à parler : avec
ces gars - ce sont des idéalistes, ils se
représentent le monde en termes d'idéologie -,
on ne peut rien faire avec eux. Nous devons
compter sur ceux qui n'ont rien, qui veulent
donc quelque chose de différent de leurs
intérêts que ceux liés aux intérêts
capitalistes. Et ceux-là n'aspireront pas non
plus à un changement de situation en vertu
d'un quelconque principe moral, mais
uniquement par convoitise, pour avoir plus que
ce qu'ils avaient jusqu'à présent, pour avoir
une existence indépendante.
11
Cette manière de penser est apparue de plus en
plus dans les années quatre-vingt, de ne plus
concevoir l'évolution de l'humanité dans le
sens où l'individu est particulièrement
responsable de ce qu'il fait, mais qu'il fait
ce qu'il doit faire en raison de la situation
économique. Le capitaliste, l'entrepreneur,
écrase les autres dans la plus grande
innocence. Celui qui est prolétaire, non pas
en vertu d'un principe moral, mais en toute
innocence, en raison d'une nécessité humaine,
va révolutionner et prendre les moyens de
production, le capital, des mains de ceux qui
justement le possèdent. Cela doit se dérouler
comme une nécessité historique. - Cette façon
de penser monta.
12
Eh bien, voyez-vous, ce n'est qu'en 1891, au
congrès d'Erfurt, que tout le lassallianisme,
qui était encore basé sur la compréhension des
humains, s'est transformé en croyance dans le
soi-disant "programme d'Erfurt", qui était
destiné à faire du marxisme la vision
officielle du prolétariat. Si vous lisez les
programmes des congrès de Gotha et d'Eisenach,
vous y trouverez deux revendications
authentiquement prolétariennes de l'époque,
qui sont encore liées au lassallianisme. La
première revendication était l'abolition du
rapport salarial ; la deuxième revendication
était l'égalité politique de tous les humains,
l'abolition de tous les privilèges politiques.
Toutes les revendications prolétariennes
jusqu'aux années 1990, jusqu'au congrès
d'Erfurt qui a apporté le grand changement,
sont parties de ces deux revendications.
Regardez une fois ces deux revendications
exactement et comparez-les avec les
principales revendications du congrès
d'Erfurt. Quelles sont les principales
revendications du congrès d'Erfurt ? Ce sont
les suivantes : Transfert de la propriété
privée des moyens de production à la propriété
commune ; gestion de toute la production de
biens, de toute la production par une sorte de
grande coopérative, en laquelle l'État actuel
doit se transformer. Comparez l'ancien
programme, qui était le programme prolétarien
des années quatre-vingt, avec celui qui est
issu du programme du parti d'Erfurt et qui
existe depuis les années quatre-vingt-dix.
Vous verrez que dans l'ancien programme de
Gotha et d'Eisenach, les exigences du
socialisme sont encore des exigences purement
humaines : égalité politique de tous les
humains, abolition du rapport salarial
dégradant. Au début des années
quatre-vingt-dix, ce que je vous ai décrit
comme l'état d'esprit qui s'est développé au
cours des années quatre-vingt a déjà agi. Ce
qui était encore une exigence de l'humanité
s'est transformé en une exigence purement
économique. Vous ne lisez plus rien sur
l'idéal d'abolir le rapport salarial, vous ne
lisez que des revendications économiques.
13
Eh bien, vous voyez, ces choses sont liées à
la formation progressive de l'idée que l'on
avait de la réalisation extérieure d'un
meilleur état social de l'humanité. Il a
souvent été dit par ces gens qui avaient
encore des idéaux : ah, quel dommage cela
fait-il de tout casser, il faut bien qu'un
autre ordre se mette en place ; il faut donc
qu'il y ait une révolution, il faut que tout
soit cassé, il faut qu'il y ait une grande
claque, car c'est seulement de là que peut
naître un meilleur ordre social. - C'est ce
que disaient encore certaines personnes dans
les années 80, qui étaient de bons socialistes
idéalistes. On leur répondait par d'autres,
ceux qui étaient à la hauteur, qui étaient
devenus les leaders - ceux qui, comme je l'ai
dit, sont maintenant enterrés -, qui disaient
: tout cela n'a pas de sens, des révolutions
aussi soudaines n'ont aucun sens. La seule
chose qui ait un sens, c'est que nous
abandonnions le capitalisme à lui-même. Nous
voyons bien qu'auparavant, il n'y avait que de
petits capitalistes, puis ils sont devenus
grands ; ils se sont associés à d'autres, sont
devenus des groupes de capitalistes. Les
capitaux se sont de plus en plus concentrés.
C'est dans ce processus que nous nous
trouvons, à savoir que les capitaux sont de
plus en plus concentrés. Le temps viendra où
il n'y aura plus que quelques grands trusts et
consortiums capitalistes. Il sera alors
nécessaire que le prolétariat, en tant que
classe non possédante, transmette un beau
jour, de manière tout à fait pacifique, par
voie parlementaire, la propriété capitaliste,
les moyens de production, à la propriété
commune. Cela peut être très bien fait, mais
il faut attendre. D'ici là, les choses doivent
évoluer. Le capitalisme, qui est en fait un
enfant innocent, n'y peut rien s'il est
inhumain - c'est la nécessité historique qui
l'impose. Mais il travaille aussi à l'avance,
car il concentre les capitaux ; ils sont alors
bien groupés, il suffit qu'ils soient repris
par la collectivité. Il ne s'agit pas d'une
révolution rapide, mais d'une évolution lente.
14
Vous voyez, le secret de la vision, le secret
public de la vision, qui est à la base de tout
cela, a été joliment expliqué par Engels dans
les années 90. Il a dit : "Pourquoi des
révolutions rapides ? Ce qui se passe
lentement dans le développement du nouveau
capitalisme, ce regroupement des capitaux,
cette concentration des capitaux, tout cela
travaille pour nous. Nous n'avons pas besoin
de créer une communauté, les capitalistes le
font déjà. Nous n'avons qu'à le transformer en
propriété prolétarienne. C'est pourquoi - dit
Engels - les rôles se sont en fait inversés.
Nous, qui représentons le prolétariat, n'avons
pas à nous plaindre de l'évolution, ce sont
les autres qui doivent se plaindre. Car les
gars qui sont aujourd'hui dans les cercles des
possédants doivent se dire : nous accumulons
les capitaux, mais nous les accumulons pour
les autres. Voyez, ces types doivent en fait
s'inquiéter de perdre leurs capitaux ; ils ont
les joues creuses, ils se dessèchent à force
de se demander ce qui va se passer. En tant
que socialistes, nous nous épanouissons très
bien dans cette évolution. Engels dit que nous
avons les muscles saillants et les joues
pleines et que nous ressemblons à la vie
éternelle. - C'est ce que dit Engels dans une
introduction qu'il a écrite dans les années
1990, en décrivant comment ce qui se développe
est tout à fait juste, et comment il suffit
d'attendre le développement, qui est en fait
assuré par le capitalisme lui-même. Cette
évolution débouche ensuite sur le transfert de
ce que le capitalisme a d'abord concentré dans
la propriété commune de ceux qui n'avaient
rien jusqu'alors. - C'était en fait l'état
d'esprit dans lequel les cercles dirigeants du
prolétariat sont entrés au XXe siècle.
15
Et c'est ainsi qu'on a pensé, surtout depuis
l'époque où le marxisme n'a plus été pris
comme dans les années 1990, mais où il a été
soumis à une révision, comme on disait, à
l'époque où sont apparus les révisionnistes,
c'est-à-dire ceux qui sont encore vivants
aujourd'hui, mais qui sont des vieux, comme
Bernstein par exemple. C'est donc là que les
révisionnistes sont arrivés. Ils disaient
qu'il était possible d'encourager un peu toute
l'évolution, car si les travailleurs se
contentent de travailler jusqu'à ce que les
capitalistes aient tout rassemblé, ils seront
encore dans le besoin avant, notamment
lorsqu'ils seront âgés, ils n'auront rien. On
a donc créé des assurances et ainsi de suite ;
et surtout, on a veillé à s'approprier ce que
les classes dirigeantes avaient comme
institutions dans la vie politique. Vous
savez, c'est à cette époque qu'est née la vie
syndicale.
16
Et à l'intérieur du parti socialiste, il y
avait deux tendances fortement divergentes :
le parti syndical et le parti politique
proprement dit, comme on disait alors. Le
parti politique se tenait plus sur le terrain,
une révolution soudaine ne servirait à rien,
l'évolution devait se dérouler comme je viens
de le décrire. Il s'agissait donc de tout
préparer pour le moment où le capitalisme
serait suffisamment concentré et où le
prolétariat aurait la majorité dans les
parlements. Tout doit être poursuivi par la
voie du parlementarisme, de l'appropriation de
la majorité, afin qu'au moment où les moyens
de production seront transférés à la propriété
commune, il y ait aussi la majorité pour ce
transfert. C'est notamment dans ce groupe de
personnes qui pensaient tout du parti
politique que l'on ne pensait pas beaucoup au
mouvement syndical à la fin du XIXe siècle. À
cette époque, celui-ci s'efforçait justement
d'instaurer une sorte de compétition ordonnée
entre lui et les entrepreneurs, afin d'obtenir
de temps en temps des entreprises des
augmentations de salaire et des choses
similaires. Bref, on s'est arrangé pour imiter
le système de négociations réciproques qui
existait entre les milieux dirigeants, entre
les dirigeants eux-mêmes, et on l'a étendu aux
relations entre les milieux dirigeants et le
prolétariat. Vous savez que les représentants
du système socialiste proprement politique ont
particulièrement accusé ceux qui sont devenus
les plus bourgeois du mouvement syndical. Et à
la fin des années quatre-vingt-dix et au début
du XXe siècle, on pouvait voir partout, chez
ceux qui étaient plus orientés vers le système
politique, un grand mépris pour les gens qui
s'étaient entièrement plongés dans la vie
syndicale, notamment les typographes, qui
avaient à leur tour développé un tout autre
système de vie syndical, jusqu'à l'extrême.
17
Il s'agissait de deux tendances très
distinctes dans la vie sociale : les
syndicalistes et ceux qui penchaient plutôt
vers le parti politique. Et au sein des
syndicats, les typographes de l'association
des typographes étaient justement les garçons
modèles ; ils étaient les garçons modèles qui
avaient acquis la pleine reconnaissance des
cercles bourgeois. Et je crois que, de même
que l'on a eu une certaine crainte, une
certaine inquiétude à l'égard du parti
politique socialiste, on a vu peu à peu
émerger avec une grande satisfaction des gens
aussi braves que les gens de l'association des
typographes. On se disait à leur sujet : ils
s'embourgeoisent, on peut toujours négocier
avec eux, ça se passe très bien. S'ils s'en
prennent à leurs salaires, nous nous en
prenons à nos prix, que nous exigeons. Ça
marche. - Et, n'est-ce pas, c'était aussi
possible pour les années suivantes, et les
gens ne pensent pas plus loin. On était donc
très satisfait de cette formation exemplaire
du développement syndical. Eh bien, si j'omets
quelques nuances, on peut dire que ces deux
directions se sont plus ou moins développées
jusqu'à l'époque où la catastrophe de la
guerre mondiale les a surpris. Mais
malheureusement, les gens n'ont pas appris de
cette catastrophe mondiale tout ce qui aurait
dû être appris en ce qui concerne la question
sociale.
18
N'est-ce pas, si l'on considère les rapports à
l'est de l'Europe, en Europe centrale, si l'on
fait abstraction du monde anglo-américain et
en partie du monde roman, si l'on se limite
donc à l'Europe centrale et orientale, on peut
dire qu'il n'y a rien de juste dans cette
histoire, que l'on a toujours définie ainsi :
Les capitaux se concentrent et, lorsque l'on
aura la majorité dans les parlements, les
capitaux seront transférés à la communauté, et
ainsi de suite. - La catastrophe de la guerre
mondiale a fait en sorte que l'on ne puisse
pas s'y attendre aussi facilement aujourd'hui.
Ceux qui s'attendaient à une révolution
quelconque ont souvent été considérés comme
des enfants, mais au fond, que s'est-il passé
au cours des quatre ou cinq dernières années ?
Gardons à l'esprit ce qui s'est passé de
manière claire et nette. N'est-ce pas, vous
l'avez souvent entendu, ce qui s'est passé au
cours des quatre ou cinq dernières années : en
juillet 1914, les gouvernements sont devenus
un peu "tordus" - ou très "tordus" - et ont
poussé les gens à la guerre mondiale. Les gens
ont cru qu'il y avait une guerre mondiale, que
des batailles avaient eu lieu - mais avec les
moyens de guerre modernes, avec les moyens
mécaniques, il y avait quelque chose de tout à
fait différent que dans les guerres
précédentes. Il n'y avait plus aucune
possibilité que quelqu'un devienne un général
particulièrement célèbre, car tout dépendait
finalement de la quantité de munitions et
d'autres moyens de guerre dont disposait l'un
des deux partis, si l'un fabriquait mieux que
l'autre les moyens de guerre mécaniques ou
avait découvert un gaz et d'autres choses de
ce genre que les autres n'avaient pas. D'abord
l'un gagnait, puis l'autre découvrait à
nouveau quelque chose, puis le premier à
nouveau ; tout cela était une guerre
terriblement mécanique. Et tout ce qui a été
dit sur ce qui s'est passé ici et là de la
part des humains, c'était sous l'influence de
la phrase, c'était tout à fait de la phrase.
Et peu à peu, l'humanité moderne comprendra,
même en Europe centrale, tout ce qu'il y a eu
comme phrases dans le fait que l'un ou
l'autre, qui n'était en fait rien d'autre
qu'un soldat moyen un peu tordu, a été
transformé en un grand général en Europe
centrale. Ces choses n'ont été possibles que
sous l'influence de la phrase. Eh bien, c'est
ce qui s'est passé.
19
Mais que s'est-il passé en réalité ? Les gens
ne l'ont pas remarqué à cause des événements
extérieurs. Alors que les gens croyaient
qu'une guerre mondiale avait été menée - qui
n'était en fait qu'un masque -, une révolution
s'est en réalité produite. En réalité, une
révolution s'est produite pendant ces quatre
ou cinq ans. Mais les gens ne le savent pas
encore aujourd'hui, ils n'y prêtent pas
attention. La guerre est l'extérieur, le
masque ; la vérité, c'est que la révolution a
eu lieu. Et parce que la révolution a eu lieu,
la société d'Europe centrale et orientale se
trouve aujourd'hui dans un tout autre état, et
on ne peut rien faire de ce que les gens
avaient envisagé pour les situations
antérieures. Aujourd'hui, il est nécessaire de
réorganiser toutes les idées que l'on se
faisait auparavant, de penser les choses de
manière totalement nouvelle. C'est ce qu'a
tenté de faire le livre "Les points essentiels
de la question sociale" : tenir compte de la
situation dans laquelle les événements récents
nous ont placés. Il n'est donc pas étonnant
que les membres des partis socialistes, qui ne
peuvent pas suivre le mouvement assez
rapidement, se méprennent sur ce livre. Si les
gens acceptaient une seule fois d'examiner
leurs propres pensées - d'examiner un peu ce
qu'ils disent vouloir -, ils verraient à quel
point ils vivent sous l'influence des idées
qu'ils se sont faites jusqu'en 1914. C'est la
vieille habitude.
20
N'est-ce pas, ces idées que l'on a eues
jusqu'en 1914, elles se sont tellement
incrustées dans l'environnement des humains
qu'elles ne peuvent plus en sortir maintenant.
Et quelle est la conséquence ? La conséquence,
c'est que malgré la nécessité d'une nouvelle
action aujourd'hui, malgré la révolution qui
s'est produite en Europe centrale et
orientale, malgré la nécessité de construire
aujourd'hui - non pas selon les anciennes
idées, mais selon les nouvelles idées -,
malgré tout cela, les gens prêchent les
anciennes idées. Et que sont aujourd'hui les
partis, y compris les partis socialistes ? Les
partis socialistes sont ceux qui continuent à
prêcher aujourd'hui tel ou tel évangile
socialiste, à l'ancienne manière, comme ils
l'ont fait jusqu'en juillet 1914, car il n'y a
pas de différence dans ces programmes de parti
par rapport aux anciens - tout au plus la
différence qui vient de l'extérieur. Pour
celui qui connaît les choses, il y a
terriblement peu de nouveautés, voire rien de
nouveau, dans les différents groupes de
partis. Les vieilles idées sont toujours
véhiculées aujourd'hui. Maintenant oui, il y a
une petite différence : si l'on a un chaudron
en cuivre et que l'on tape dessus, cela sonne
; si l'on tape de la même manière sur un
tonneau en bois, cela sonne différemment ;
mais le coup peut être tout à fait le même.
Cela dépend alors de ce sur quoi on tape, si
cela sonne différemment. Et c'est ce qui se
passe aujourd'hui lorsque les gens se mettent
à parler de leurs programmes de parti. Ce qui
est contenu dans ces anciens programmes de
parti, c'est en fait le vieux garde-fou du
parti ; c'est seulement parce qu'il y a
maintenant d'autres conditions sociales que
cela sonne aujourd'hui un peu différemment,
comme cela sonne différemment dans une
chaudière en cuivre ou dans un tonneau en
bois. Lorsque les socialistes indépendants,
les socialistes majoritaires ou les
communistes parlent, ils prononcent de
vieilles phrases de parti, et cela sonne
différemment parce qu'il n'y a pas un chaudron
en cuivre, mais un tonneau en bois. En vérité,
on n'a rien appris du tout, du tout, du tout,
de bien des côtés. Mais ce qui compte, c'est
qu'on apprenne quelque chose, que cette
terrible guerre mondiale, comme on l'appelle,
mais qui était en fait une révolution
mondiale, nous dise quelque chose.
21
Et là, on peut vraiment dire que dans les
masses les plus larges, on est préparé à
entendre quelque chose de nouveau. Mais dans
les grandes masses, on écoute ce que disent
les dirigeants. Il y a une bonne
compréhension, un bon sens chez les masses
populaires non éduquées, et on a toujours pu
compter sur la compréhension lorsqu'on propose
quelque chose de vraiment moderne, quelque
chose qui peut être qualifié de moderne dans
le meilleur sens du terme. Cela s'explique en
partie par le fait que les masses ne sont pas
éduquées. Mais dès que les gens entrent dans
le type d'éducation que l'on peut avoir depuis
les trois ou quatre derniers siècles, cette
caractéristique d'inculture disparaît. Si l'on
considère l'enseignement bourgeois actuel, de
l'école primaire jusqu'à l'université - et ce
sera encore pire lorsque l'école unique
socialiste sera fondée, car tout ce que
l'école primaire bourgeoise a fait de mal y
sera présent dans la plus grande mesure -, on
voit bien que l'enseignement bourgeois n'a pas
de sens : ce qui se fait dans les écoles forme
les esprits et les rend étrangers à la vie. Il
faut sortir de tout cela, il faut vraiment se
mettre sur ses propres jambes dans la vie
spirituelle si l'on veut sortir de cette
méformation. Mais, voyez-vous, c'est grâce à
cette méformation que les dirigeants
prolétariens, grands et petits, sont devenus
ainsi. Ils ont dû s'approprier cette formation
; cette formation se trouve dans nos écoles et
dans les écrits populaires, elle se trouve
partout. Et c'est là que l'on commence à avoir
le cerveau desséché et que l'on n'est plus
accessible aux faits, mais que l'on s'arrête
aux programmes de parti et aux opinions que
l'on a greffés et martelés. Même la révolution
mondiale peut alors arriver, on continue à
siffler les vieux programmes.
22
Vous voyez, c'est essentiellement ce sort qui
a été réservé à ce qui a été voulu dans de
nombreuses directions avec ce livre "Les
points essentiels de la question sociale" et
les conférences. On y a vraiment tenu compte
de ce dont le prolétariat a absolument besoin
aujourd'hui, de ce qui est nécessaire compte
tenu de la situation actuelle. On l'a compris
au début [dans le prolétariat], mais ensuite
ceux qui sont les dirigeants du prolétariat
dans les différents groupes de partis ne l'ont
pas compris. Cela dit, je ne veux pas être
trop injuste et je ne veux pas presser la
vérité ; je ne veux pas affirmer que ces
dirigeants, par exemple, ne comprennent pas ce
livre, car je ne peux pas supposer qu'ils
l'ont lu, qu'ils le connaissent. Je
n'affirmerais pas quelque chose de juste si je
disais : ils ne peuvent pas comprendre ce
livre. Mais ils ne peuvent absolument pas se
décider à comprendre que quelque chose d'autre
soit nécessaire que ce qu'ils pensent depuis
des décennies. Leur cerveau est devenu trop
sec, trop rigide pour cela. Et c'est pourquoi
ils s'en tiennent à ce qu'ils ont pensé depuis
longtemps et trouvent que ce qui est le
contraire de toute utopie, c'est une utopie.
Car, voyez-vous, le livre "Les points
essentiels" tient pleinement compte du fait
qu'on ne peut plus aujourd'hui se mouvoir dans
des utopies dans le sens des Saint-Simon,
Fourier, Proudhon et ainsi de suite, mais
aussi du fait qu'on ne peut plus jamais se
placer du point de vue : L'évolution se fera
d'elle-même. Car ce que Marx et Engels ont vu,
ce qui s'est développé [à leur époque], ce
dont ils ont tiré leurs conclusions, on ne
peut plus en tirer de conclusions aujourd'hui,
car la guerre mondiale l'a balayé, il n'est
plus là sous sa forme véritable. Celui qui dit
aujourd'hui la même chose que Marx et Engels,
dit quelque chose que Marx n'aurait jamais
dit. Il a eu peur de ses partisans, car il a
dit : en ce qui me concerne, je ne suis pas
marxiste. - Et aujourd'hui, il dirait : à
l'époque, les faits étaient encore différents
; à l'époque, je tirais mes conclusions de
faits qui n'avaient pas encore été modifiés,
changés, comme la guerre mondiale a tout
changé par la suite.
23
Mais, voyez-vous, ces humains qui ne peuvent
rien apprendre des événements, qui ont
aujourd'hui la même attitude que les anciens
catholiques vis-à-vis de leurs évêques et de
leurs papes, ne peuvent même pas imaginer
qu'une chose telle que le marxisme doit être
développée dans le sens des faits. C'est ce
que font les socialistes, mais aussi les
bourgeois. Les cercles les plus larges le font
ainsi. Les bourgeois le font naturellement de
manière somnolente, l'âme complètement
endormie, les autres le font de telle sorte
qu'ils se trouvent au milieu et voient
l'effondrement, mais qu'ils ne veulent pas
s'attendre aux faits qui se révèlent ainsi.
Aujourd'hui, nous avons justement besoin que
quelque chose de nouveau arrive parmi les
humains. Et c'est pourquoi il est nécessaire
de comprendre quelque chose [comme la
triarticulation] qui n'est pas une utopie,
mais qui compte justement avec les faits. Si,
de ce côté, on appelle ce qui compte ainsi
avec les faits, l'ergotage, on pourrait en
fait être tout à fait satisfait. Car si les
gens appellent ce qu'ils font avancer une
ligne droite, alors il faut, pour faire
quelque chose de raisonnable, tirer dans le
sens du poil, pour amener ce qui est
déraisonnable dans une autre direction,
raisonnable. Mais vous voyez, ceux qui
comprennent encore ce qui est raisonnable
devraient approfondir ce qui est présenté ici.
Et c'est à cela que peuvent servir ces
soirées.
24
Non, il y a longtemps que l'on a essayé de
mettre en pratique ce que l'on a tiré des
faits. Et c'est ainsi que nous nous sommes
réunis depuis des semaines - je n'ai pas
besoin de répéter toutes ces choses, vous
pouvez encore poser des questions ou discuter
des pour et des contre à l'issue de cet exposé
-, nous nous sommes réunis depuis des semaines
pour mettre sur pied ce que nous appelons le
corps des conseils d'entreprise. Nous avons
essayé de créer ces conseils d'entreprise à
partir des faits actuels nécessaires, de les
créer vraiment de telle sorte qu'ils viennent
de la simple vie de l'économie, qu'ils ne
viennent pas de la vie politique, qui ne peut
pas constituer la base de la vie de
l'économie. Car si l'on regarde les faits en
face aujourd'hui, il faut se tenir strictement
sur le terrain de l'organisme social
triarticulé. Et celui qui ne veut pas de cette
triarticulation aujourd'hui va à l'encontre de
la nécessité historique de l'évolution de
l'humanité. Aujourd'hui, il doit en être
ainsi, comme je l'ai souvent expliqué : que la
vie spirituelle soit placée sur elle-même, que
la vie économique soit placée sur elle-même,
que la vie de droit ou politique soit
administrée démocratiquement. Et dans la vie
économique, le premier pas vers un façonnement
réellement social doit être fait avec les
conseils d'entreprise. Mais comment cela
peut-il se faire ? Uniquement en posant
d'abord la question : maintenant oui, il y a
l'impulsion de l'organisme social triarticulé,
c'est nouveau par rapport à toutes les
anciennes momies de parti ; y a-t-il quelque
chose d'autre de nouveau ? Les imbéciles
prétendent aujourd'hui que les idées ne font
que tourbillonner dans l'air. Si l'on écoute
les discussions, elles apportent toutes sortes
de choses négatives, mais elles n'apportent
rien qui puisse être mis en parallèle avec la
triarticulation de l'organisme social. Tout
cela n'est que de l'eau de rose lorsque les
socialistes affirment que les idées ne font
que pendre dans l'air - comme cela a été dit
dans une revue nouvellement créée, lors d'une
discussion sur la triarticulation.
25
Il s'agit tout d'abord qu’on lance la question
et d'y voir clair : N'y a-t-il rien d'autre ?
Ensuite, on s'en tient d'abord à la
triarticulation de l'organisme social, jusqu'à
ce qu'on puisse la réfuter de manière
objective, jusqu'à ce qu'on puisse placer à
côté d'elle des choses objectivement
équivalentes. On ne peut plus discuter des
anciens programmes de parti, c'est la guerre
mondiale qui en a discuté ; celui qui a
vraiment de la compréhension sait que ces
anciennes idées de parti sont réfutées par la
catastrophe de la guerre mondiale. Mais alors,
si l'on ne peut pas répondre à cette question
en plaçant à côté quelque chose
d'objectivement équivalent, et si l'on veut
aller plus loin, alors on peut honnêtement se
dire : nous travaillons donc dans le sens de
la triarticulation de l'organisme social.
Disons-le franchement : les anciennes
structures de parti ont perdu leur
signification ; il faut travailler dans le
sens de la triarticulation.
26
Lorsque j'ai pris la parole avant-hier à
Mannheim, un monsieur s'est présenté à la fin
et a dit : "Ce que Steiner a dit est bien,
mais ce n'est pas ce que nous voulons ; nous
ne voulons pas ajouter un nouveau parti à tous
les anciens partis. Les gens qui veulent une
telle chose doivent entrer dans les anciens
partis et y travailler. -- Je ne pouvais que
répondre : j'ai suivi la vie politique de très
près depuis longtemps, alors que le monsieur
qui parlait n'était pas encore né. Et bien que
j'aie été familiarisé par ma vie avec tout ce
qui fonctionnait socialement comme force, je
n'ai jamais pu agir au sein d'un parti
quelconque ou m'y tenir, et il ne me vient pas
à l'esprit, à la fin de ma sixième décennie,
de devenir un humain de parti : je ne veux
rien avoir à faire ni avec un autre parti ni
avec un parti que j'aurais fondé moi-même. Je
ne veux pas non plus avoir affaire à un parti
que j'aurais fondé moi-même ; personne ne doit
craindre qu'un nouveau parti soit fondé par
moi. Car j'ai appris que chaque parti, par la
force des choses, devient stupide au bout d'un
certain temps, précisément parce que je ne me
suis jamais engagé dans aucun parti. Et j'ai
appris à plaindre les gens qui n'ont pas
compris cela. C'est pourquoi personne ne doit
craindre qu'un nouveau parti vienne s'ajouter
aux anciens. C'est pourquoi nous n'avons pas
fondé de nouveau parti, mais la Fédération
pour la triarticulation de l'organisme social
s'est réunie pour représenter les idées de
l'organisme triarticulé, dont le caractère non
utopiste, dont le caractère réel est tout de
même perçu par un certain nombre de personnes.
Les personnes qui le reconnaissent devraient
aussi l'affirmer honnêtement et sincèrement.
27
Car cela non plus ne doit pas arriver : Il y a
une pièce de théâtre dans laquelle un coq
chante à l'aube, et chaque fois que le coq a
chanté, le soleil se lève. Eh bien, le coq ne
peut pas voir le contexte, c'est pourquoi il
croit que lorsqu'il chante, c'est que le
soleil répond à son appel, qu'il vient parce
qu'il a chanté, qu'il a fait en sorte que le
soleil se lève. - Enfin, si quelqu'un dans la
vie non sociale se laisse aller à une telle
illusion, comme ce coq qui chante sur le
fumier et veut faire se lever le soleil, cela
ne fait rien. Mais si, dans certaines
circonstances, il arrivait que l'idée des
conseils d'entreprise véritablement
économiques prospère sur le sol de l'organisme
triarticulé et que les personnes qui s'en
occupent veuillent nier l'origine, à savoir
que l'impulsion de la triarticulation a mis
cette idée en mouvement, et si ces personnes
croient que parce qu'on a chanté, les conseils
d'entreprise vont venir, alors ce serait la
même erreur, et une erreur très fatale. Mais
cela ne doit pas arriver. Ce qui se passe dans
cette direction [les conseils d'entreprise],
ce qui a été entrepris ici, ne doit pas être
dissocié, cela doit rester en rapport avec
l'impulsion bien comprise de la
triarticulation de l'organisme social. Et ceux
qui veulent réaliser les conseils d'entreprise
dans le sens de cette impulsion ne peuvent
jamais accepter que les conseils d'entreprise
soient créés de manière unilatérale et que
l'on ne crie que "conseils d'entreprise,
conseils d'entreprise". Ce n'est pas
suffisant. Cela n'a de sens que si l'on aspire
en même temps à tout ce qui doit être
recherché par l'impulsion de l'organisme
social triarticulé. C'est ce qui est
important. Car si vous voulez vraiment
comprendre ce qui est écrit dans les "points
essentiels", vous devez vous placer du point
de vue que l'on peut apprendre des faits que
les quatre ou cinq dernières années ont
offerts. Pour celui qui voit clair dans ces
faits, ils apparaissent comme s'il avait vécu
des siècles, et pour celui qui voit les
programmes des partis comme si leurs
promoteurs avaient dormi pendant des siècles.
Aujourd'hui, cela doit être envisagé
clairement et sans réserve.
28
Ce que je viens de vous raconter, j'aurais
bien sûr tout aussi bien pu l'écrire en
préambule de ce livre. Seulement, on a pu
constater ces derniers mois à quel point les
programmes des partis sont actuellement
rigides et stériles. Mais il serait utile que
cela figure en préambule de ce livre. Je vous
ai raconté aujourd'hui beaucoup de choses qui
n'y figurent pas, puisque vous avez décidé, me
semble-t-il, de vous réunir ici pour étudier
correctement les graves questions sociales
actuelles dans le prolongement de ce livre.
Mais avant de s'y atteler, il faut déjà se
rendre compte que l'on ne peut pas continuer à
trottiner dans le vieux style des programmes
et des modèles de parti, mais que l'on doit se
décider à aborder aujourd'hui les faits
conformément à la réalité et à tirer un trait
sur tout ce qui ne tient pas compte de ces
nouveaux faits. Ce n'est qu'ainsi que vous
comprendrez correctement ce qui doit être
réalisé, précisément avec cette impulsion vers
un organisme social triarticulé. Et vous le
comprendrez de la bonne manière si vous
trouvez que chaque phrase de ce livre est
susceptible d'être mise en pratique, d'être
transformée en réalité immédiate. Et la
plupart de ceux qui disent qu'ils ne
comprennent pas ou qu'il s'agit d'utopies et
autres, n'ont tout simplement pas le courage
de penser assez fort aujourd'hui pour que les
pensées puissent intervenir dans la réalité.
Ceux qui crient toujours "dictature du
prolétariat", "conquête du pouvoir",
"socialisme", pensent généralement très peu.
Il n'est donc pas possible d'intervenir dans
la réalité avec ces modèles de mots. Mais ils
viennent ensuite dire qu'on ne propose [avec
les "points essentiels"] que quelque chose qui
est une utopie. Ce n'est que dans l'esprit des
gens qui n'y comprennent rien que cela devient
une utopie.
29
C'est pourquoi il faudrait faire comprendre à
ces gens ce que Goethe a dit un jour, sous une
forme un peu différente et en se référant à
autre chose, en se moquant du physiologiste
Haller, qui était un naturaliste ossifié.
Haller avait inventé la parole :
30
aucun esprit créé ne pénètre à
l'intérieur de la nature.
Heureux celui à qui elle indique seulement
l'enveloppe extérieure ! Cela répugnait à
Goethe, et il disait : "À l'intérieur de la
nature" - ô philistin ! - "Aucun esprit créé
ne pénètre". "Heureux celui à qui elle indique
seulement l'enveloppe extérieure !" J'entends
cela se répéter depuis soixante ans, je le
maudis, mais en cachette.
La nature n'a ni noyau ni enveloppe, elle est
tout en une seule fois.
Examine-toi donc le plus possible pour savoir
si tu es le noyau ou la coquille !
31
Ceux qui parlent de la triarticulation de
l'organisme social comme d'une utopie, on
aimerait aussi leur dire : "Examine-toi
seulement si ce qui hante ton cerveau est
soi-même une utopie ou une réalité. -- On
trouvera alors que tous les corbeaux ont la
plupart du temps des utopies à l'intérieur et
que la réalité dans leur propre tête devient
donc aussi une utopie ou une idéologie, ou
comme ils l'appellent alors. C'est pourquoi il
est si difficile aujourd'hui de faire passer
la réalité, parce que les gens se sont
tellement barré l'accès à la réalité.
32
Mais nous devons nous dire que nous devons
travailler sérieusement, sinon nous ne
pourrons pas passer de notre volonté à
l'action ; et c'est ce qui importe, que nous
passions de notre volonté à l'action. Et si
nous devions renoncer à tout, parce que nous
le reconnaissons comme une erreur, alors nous
devrions, pour pouvoir passer du vouloir à
l'action, nous tourner vers la vérité, que
nous voulons percer à jour en tant que vérité,
car rien d'autre ne peut conduire du vouloir à
l'action que la poursuite impitoyable et
courageuse de la vérité. Cela devrait en fait
être écrit comme une devise, comme un slogan,
avant les études de ces soirées. Je voulais
vous présenter ce soir une préface à ces
soirées d'étude. J'espère que ce préambule ne
vous empêchera pas de cultiver ces études de
telle sorte qu'enfin, avant qu'il ne soit trop
tard, des pensées qui portent en elles des
germes d'action puissent s'insérer dans le
monde de manière fructueuse.
33
Nous aurons l'occasion d'en discuter.
34
#diffPF
Rudolf Steiner : Le livre "Les points
essentiels de la question sociale" est écrit
d'une manière particulière, et ce pour deux
raisons : premièrement, il est écrit de telle
manière qu'il est en fait entièrement tiré de
la réalité. Certaines personnes qui lisent le
livre n'y pensent pas. Je peux aussi
comprendre que cela ne soit pas pleinement
pris en compte aujourd'hui. J'ai déjà parlé
ici, dans ce cercle - mais tous ceux qui sont
là aujourd'hui n'étaient pas présents - de la
façon dont les gens pensent vraiment
aujourd'hui. J'ai notamment fait référence à
l'exemple du professeur d'économie nationale,
Lujo Brentano, qui l'a si bien présenté dans
le dernier numéro de la "Feuille jaune" ; je
veux le répéter brièvement, car je veux m'y
rattacher un peu. Cette lumière de la théorie
d'économie politique/de peuple actuelle de
l'université - il est le premier, pour ainsi
dire - a développé le concept d'entrepreneur
et a tenté de caractériser les
caractéristiques de l'entrepreneur à partir de
sa pensée éclairée. Je n'ai pas besoin
d'énumérer la première et la deuxième
caractéristique ; la troisième est que
l'entrepreneur est celui qui met ses moyens de
production au service de l'ordre social à son
propre compte et à ses propres risques. Il a
maintenant cette notion d'entrepreneur, et il
l'applique. Il arrive alors à l'étrange
résultat que l'ouvrier prolétarien
d'aujourd'hui est en fait aussi un
entrepreneur, car il correspond à son concept
d'entrepreneur en ce qui concerne la première,
la deuxième et la troisième caractéristique.
Car l'ouvrier a sa propre force de travail
comme moyen de production ; il en dispose, et
par rapport à celle-ci, il s'adresse au
processus social à son propre compte et à ses
propres risques. - Ainsi, cette lumière de
l'économie de peuple intègre très bien le
concept de travailleur prolétarien dans son
concept d'entrepreneur. Vous voyez, c'est
ainsi que pensent justement les humains qui se
font des concepts qui n'ont aucun sens ; ils
n'ont aucun sens si l'on exige des concepts
qui doivent être réellement applicables à la
réalité. Mais même si vous ne l'acceptez
peut-être pas, on peut dire tranquillement que
plus de quatre-vingt-dix pour cent de tout ce
qui est enseigné ou imprimé aujourd'hui
utilise de tels concepts ; si on veut les
appliquer à la réalité, cela ne marche pas
plus que le concept d'entrepreneur de Lujo
Brentano. C'est ainsi dans la science, c'est
ainsi dans la science sociale, c'est ainsi
partout, c'est pourquoi les gens ont désappris
à comprendre ce qui travaille avec des
concepts conformes à la réalité.
35
Prenez par exemple la base de la
triarticulation de l'organisme social.
N'est-ce pas, on peut les poser de différentes
manières, ces bases, parce que la vie a besoin
de nombreuses bases. Mais l'une d'entre elles
est que l'on sait que l'époque récente a vu
l'émergence de ce que l'on pourrait appeler
l'impulsion de la démocratie. La démocratie
doit consister en ce que tout humain devenu
majeur puisse établir son rapport de droit
dans des parlements démocratiques, directement
ou indirectement par rapport à tout autre
humain devenu majeur. Mais justement, si l'on
veut honnêtement et sincèrement instaurer
cette démocratie dans le monde, on ne peut pas
gérer les affaires spirituelles dans le sens
de cette démocratie, car chaque humain devenu
majeur devrait alors décider de ce qu'il ne
comprend pas. Les affaires spirituelles
doivent être réglées à partir de la
compréhension de la chose, c'est-à-dire
qu'elles doivent être placées sur elles-mêmes
; elles ne peuvent donc absolument pas être
administrées dans un parlement démocratique,
mais elles doivent avoir leur propre
administration, qui ne peut pas être
démocratique, mais qui doit être issue de la
chose. Il en va de même dans la vie de
l'économie ; la chose doit être gérée à partir
de l'expérience économique et du vivre dedans
la vie de l'économie. C'est pourquoi la vie de
l'économie d'un côté et la vie de l'esprit de
l'autre doivent être séparées du parlement
démocratique. C'est ainsi que naît l'organisme
social triarticulé.
36
Là y a maintenant à Tübingen le professeur
Heck, c'est lui - j'en ai déjà parlé - qui a
dit qu'il ne fallait absolument pas se laisser
aller à dire que le rapport salarial habituel,
où l'on est rémunéré pour son travail, avait
quelque chose d'humiliant pour le prolétaire,
car Caruso était aussi dans un rapport
salarial. La différence ne serait pas de
principe : Caruso chante et reçoit son
salaire, et le prolétaire ordinaire travaille
et reçoit aussi son salaire ; et lui, en tant
que professeur, reçoit aussi son salaire
lorsqu'il donne une conférence. La seule
différence entre Caruso et le prolétaire
serait que Caruso reçoit trente à quarante
mille marks pour une soirée et le prolétaire
un peu moins. Mais il ne s'agit pas d'une
différence de principe, seulement d'une
différence concernant la somme de la
rémunération. Et donc, selon ce professeur
plein d'esprit, on n'a pas besoin de ressentir
quelque chose de dégradant dans la
rémunération ; lui non plus ne le ressent pas
ainsi. - Ce n'est qu'une parenthèse. Mais ce
professeur intelligent a également écrit un
long article contre la triarticulation. Là, il
part de ce que si l'on articule en trois, on
en arrive à trois parlements. - Et maintenant,
il montre que ce n'est pas possible avec trois
parlements, car il dit : dans le parlement
économique, le petit artisan ne comprendra pas
le point de vue du grand industriel, et ainsi
de suite. - C'est là que le bon professeur
s'est fait ses idées sur la triarticulation,
et contre ces idées - que je trouve encore
bien plus stupides que le professeur Heck ne
les trouve ; je les critiquerais aussi jusqu'à
la moelle -, il s'en prend à elles, mais il
les a faites lui-même. Il s'agit en effet de
ne pas juxtaposer trois parlements, mais d'en
retirer ce qui n'a pas sa place dans un
parlement. Il fait simplement trois parlements
et dit : ce n'est pas possible. - C'est ainsi
que l'on vit dans des concepts étrangers à la
réalité et que l'on juge les autres en
fonction de ceux-ci.
37
Maintenant, dans l'économie nationale, la
théorie d'économie de peuple, est presque
seulement inclus ce que sont des concepts
irréels. Mais, voyez-vous, je ne pourrais pas,
maintenant que le temps presse, écrire une
bibliothèque entière dans laquelle seraient
répertoriés tous les concepts d'économie de
peuple. C'est pourquoi se trouve naturellement
dans les "points essentiels" une multitude de
concepts qui doivent être abordés/discutés de
manière appropriée. Il me suffit par exemple
d'attirer l'attention sur ce qui suit :
38
N'est-il pas vrai qu'à une époque que nous
avons dépassée, les relations sociales étaient
essentiellement le fruit de la conquête ? Un
territoire quelconque était occupé par un
peuple ou une race ; un autre peuple faisait
irruption et conquérait le territoire. Les
races ou les peuples qui étaient auparavant à
l'intérieur ont été soumis au travail. Le
peuple conquérant a pris le sol en possession,
ce qui a créé un certain rapport entre les
conquérants et les conquis. Les conquérants,
du fait qu'ils étaient des conquérants,
avaient le sol en possession. De ce fait, ils
étaient les plus forts économiquement, les
conquis étaient les plus faibles
économiquement, et il s'en est formé ce qui
est devenu un rapport de droit. C'est
pourquoi, à presque toutes les époques
anciennes de l'évolution historique, on a des
rapports de droit fondés sur des conquêtes,
c'est-à-dire des privilèges et des droits de
désavantage. Les temps sont maintenant venus
où il n'était plus possible de conquérir
librement. Vous pouvez étudier la différence
entre la conquête libre et la conquête liée en
regardant par exemple le début du Moyen Âge.
Vous pouvez étudier comment certains peuples,
les Goths, sont descendus vers le sud, mais
dans des régions entièrement occupées ; ils
ont alors été amenés, en ce qui concerne
l'ordre social, à faire autre chose que les
Francs, qui sont allés vers l'ouest et n'y ont
pas trouvé de régions entièrement occupées.
Cela a donné naissance à d'autres droits de
conquête. À l'époque moderne, ce ne sont pas
seulement les droits fonciers issus des
conquêtes qui ont agi, mais aussi les droits
des humains qui avaient des privilèges de
possession et qui pouvaient désormais
s'approprier les moyens de production grâce au
pouvoir économique. La possession des moyens
de production, c'est-à-dire la propriété
privée des capitaux, s'est ajoutée au droit
foncier au sens actuel du terme. Cela a donné
lieu à des rapports de droit issus de rapports
économiques. Comme vous le voyez, ces rapports
de droit sont nés tout seuls à partir de
rapports économiques.
39
Maintenant, les humains viennent et veulent
des notions de pouvoir économique,
d'importance économique de la terre, ils
veulent des concepts de moyens d'exploitation,
de moyens de production, de capitaux, etc.,
mais ils n'ont pas vraiment de compréhension
profonde du cours des choses. Ils prennent
alors les faits superficiels et n'arrivent pas
à comprendre ce qui se cache derrière les
droits fonciers, derrière les rapports de
force en ce qui concerne les moyens de
production. Bien sûr, toutes ces choses sont
prises en compte dans mon livre. Là est pensé
correctement ; là est, quand est parlé de
droits, à partir de la conscience de la
manière dont le droit s'est développé à
travers les siècles ; quand on parle de
capital, on parle de la conscience de comment
dont le capital est devenu. Là est évité
soigneusement d'utiliser un concept qui n'est
pas entièrement saisi à partir de sa genèse ;
c'est pourquoi ces concepts se présentent
différemment que dans les manuels habituels
d'aujourd'hui.
40
Mais aussi quelque chose d'autre est pris en
compte. Prenons un fait précis, n'est-ce pas,
le fait que le protestantisme est né un jour.
Dans les livres d'histoire, on raconte très
souvent que Tetzel a parcouru l'Europe
centrale et que les gens étaient indignés par
la vente des indulgences et autres choses de
ce genre. Mais ce n'était pas seulement cela,
ce n'est qu'une vision superficielle.
L'élément principal était le fait qu'il y
avait à Gênes une banque pour le compte de
laquelle - et non pour le compte du pape - ce
marchand d'indulgences se déplaçait en
Allemagne, car cette banque avait accordé des
crédits au pape pour ses autres besoins. Toute
cette histoire était une entreprise
capitaliste. Cet exemple du commerce des
indulgences en tant qu'entreprise capitaliste,
où même le spirituel a été négocié, vous
permet d'étudier - ou plutôt, si l'on commence
à étudier, on arrive peu à peu à la conclusion
- que finalement, tout pouvoir du capital se
ramène à la suprématie du spirituel. Si vous
étudiez comment le capital a acquis son
pouvoir, vous trouverez partout la suprématie
du spirituel. Et c'est vraiment ainsi.
N'est-ce pas, celui qui est intelligent, celui
qui est débrouillard, a un pouvoir plus grand
que celui qui n'est pas intelligent, qui n'est
pas débrouillard. Et c'est ainsi que naissent,
de façon justifiée ou non, beaucoup de choses
qui sont des concentrations de capital. Il
faut en tenir compte lorsqu'on envisage le
concept de capital. Ces études réelles
permettent de comprendre que le capital repose
sur le développement du pouvoir spirituel et
que le pouvoir de l'ancien esprit théocratique
est venu s'ajouter aux droits fonciers, aux
droits de conquête, d'un autre côté.
L'ancienne Église est à l'origine d'une grande
partie de ce qui a ensuite été transféré dans
le capitalisme moderne. Il existe un lien
secret entre le pouvoir capitaliste moderne et
le pouvoir de l'ancienne Église. Et tout cela
s'est rassemblé en un méli-mélo dans l'État de
pouvoir moderne. Là-dedans, vous trouvez les
restes de l'ancienne théocratie, les restes
des anciennes conquêtes. Et finalement, les
conquêtes modernes sont venues s'y ajouter, et
la conquête la plus moderne serait maintenant
la conquête de l'État par le socialisme. Mais
en réalité, ce n'est pas ainsi qu'il faut
procéder. Il doit y avoir quelque chose de
nouveau, qui fasse complètement table rase de
ces anciens concepts et impulsions. C'est
pourquoi il est important que nous nous
penchions aussi, dans nos études, sur les
notions qui sont à la base de tout cela. Nous
devons aujourd'hui expliquer précisément à
tous ceux qui veulent parler de choses
sociales ce qu'est le droit, ce qu'est le
pouvoir et ce qui est en réalité un bien
[économique], un bien sous forme de
marchandises et autres. C'est dans ce domaine
que les plus grandes erreurs sont commises. Je
veux par exemple attirer votre attention sur
l'une d'entre elles ; si vous n'y êtes pas
attentifs, vous comprendrez mal beaucoup de
choses dans mon livre.
41
Aujourd'hui, on pense souvent que la
marchandise est du travail stocké, que le
capital est aussi du travail stocké. - Vous
pouvez dire qu'il est inoffensif d'avoir de
telles notions. Ce n'est pas inoffensif, car
de tels concepts empoisonnent toute la pensée
sociale. Vous voyez, qu'en est-il du travail -
le travail en tant que dépense/application de
force de travail ? Oui, il y a une grande
différence entre, par exemple, utiliser ma
force musculaire physique en faisant du sport
et couper du bois. Si je fais du sport, j'use
ma force musculaire physique ; je peux être
aussi fatigué et devoir remplacer ma force
musculaire autant que celui qui coupe du bois.
Je peux appliquer la même quantité de travail
au sport qu'à la coupe de bois. La différence
ne réside pas dans le fait que la force de
travail doit être remplacée - elle doit bien
sûr être remplacée - mais dans le fait que
l'une des forces de travail est utilisée
uniquement pour moi, dans un sens égoïste,
l'autre dans un sens social pour la société.
C'est la fonction sociale qui différencie ces
choses. Si je dis maintenant que quelque chose
est du travail accumulé, je ne tiens pas
compte du fait que le travail cesse en fait
d'être dans une chose quelconque au moment où
l'on ne travaille plus. Je ne peux pas dire
que le capital est du travail accumulé, mais
je dois dire que le travail n'existe que tant
qu'il est effectué. Mais dans notre ordre
social actuel, le capital conserve le pouvoir
d'appeler à nouveau le travail à tout moment.
Ce n'est pas dans le fait que le capital soit
du travail accumulé que réside la fatalité,
comme le pense Marx, mais dans le fait que le
capital donne le pouvoir d'appeler à son
service un nouveau travail - non pas un
travail accumulé - mais un nouveau travail. Il
dépend beaucoup de cela, et il dépendra encore
beaucoup de cela, que l'on parvienne à des
notions claires, fondées sur la réalité, sur
ces choses. Et c'est à partir de telles
notions, qui sont maintenant totalement
ancrées dans la réalité, que ce livre est
écrit. Il ne tient pas compte de ces notions,
qui étaient tout à fait utiles pour
l'éducation du prolétariat. Mais aujourd'hui,
alors que l'on doit construire quelque chose,
ces notions n'ont plus de sens.
42
Vous voyez, quand je dis que le capital est du
travail accumulé, c'est bon pour l'éducation
du prolétariat ; il a reçu les sentiments
qu'il devait recevoir. Il n'était pas
important que le concept soit fondamentalement
faux - on peut éduquer même avec des concepts
fondamentalement faux. Mais on ne peut
construire quelque chose qu'avec des concepts
corrects. C'est pourquoi nous avons
aujourd'hui besoin de concepts corrects dans
tous les domaines de l'économie de peuple et
nous ne pouvons pas continuer à travailler
avec des concepts erronés. Ce n'est pas par
frivolité que je dis que l'on peut aussi
éduquer avec des concepts erronés, mais en
vertu des principes généraux de l'éducation.
Vous voyez, lorsque vous racontez des contes
de fées aux enfants, vous ne voulez pas non
plus construire avec ces choses que vous
développez ; dans l'éducation, quelque chose
d'autre entre en ligne de compte que ce qui
entre en ligne de compte pour la construction
dans la réalité physique. Il faut travailler
avec des concepts réels. Un concept tel que
"le capital est du travail accumulé" n'est pas
un concept. Le capital est un pouvoir et
confère le pouvoir de mettre à tout moment à
son service le travail qui se crée. C'est un
vrai concept avec une logique de fait. Il faut
travailler avec des concepts vrais dans ces
domaines. C'est ce qui a été tenté dans les
"points essentiels". C'est pourquoi je pense
qu'une grande partie de ce qui n'y figure pas
en termes de définition des termes, de
caractéristiques des termes, doit être
élaborée. Et celui qui peut contribuer à
l'élaboration de ce dont on a besoin pour
comprendre le mode de pensée, la base de ce
livre, apportera une très bonne contribution à
ces soirées d'étude. C'est donc ce qui compte,
mes très chers présents, c'est ce qui compte
tout particulièrement.
43
Oui, n'est-ce pas, il faudrait écrire un
dictionnaire si l'on voulait clarifier tous
les termes - mais ce qu'est le "capital" peut
maintenant être réglé en une seule soirée
d'étude de ce genre. Sans que l'on ait
clairement compris aujourd'hui : qu'est-ce que
le capital ? Qu'est-ce que la marchandise ?
Qu'est-ce que le travail ? Qu'est-ce que le
droit ? -, sans ces notions, on ne peut pas
avancer. Et ces notions sont tout à fait
confuses dans les cercles les plus larges ;
elles doivent avant tout être rectifiées.
Aujourd'hui, on se désespère quand on parle de
l'ordre social avec des gens ; ils ne peuvent
pas participer parce qu'ils n'ont pas appris à
maîtriser la réalité. C'est ce qu'il faut
faire.
44
Derrière la guerre une révolution ? +
ajustement des concepts dans les fondements
voir #
PREMIÈRE SÉANCE D'ÉTUDES, Stuttgart,
30 juillet 1919.
45
L'histoire du mouvement social.
46
Rudolf Steiner : Mes très chers présents ! Je
ne vais pas anticiper ce soir sur ce qui doit
être mis en place ici en tant que soirées
d'étude qui se tiendront sur la base du livre
"Les points essentiels de la question
sociale", mais je vais essayer de vous donner
une sorte d'introduction à ces soirées. Par
cette introduction, je voudrais vous faire
ressentir les points de vue qui ont présidé à
l'écriture de ce livre. Il a été écrit avant
tout en fonction de l'actualité immédiate, de
la conviction que la question sociale a elle
aussi pris une nouvelle forme à la suite des
événements actuels et qu'il est nécessaire de
parler aujourd'hui de la question sociale
d'une manière tout à fait différente de celle
dont on parlait, de quelque côté que ce soit,
de la question sociale avant la catastrophe de
la guerre mondiale. Avec ce livre, on a en
quelque sorte essayé, à ce moment de
l'évolution de l'humanité où la question
sociale devient particulièrement urgente et où
tout homme qui vit consciemment aujourd'hui,
qui ne vit pas la vie de l'humanité en
somnolant et en dormant, devrait savoir
quelque chose sur ce qui doit se passer dans
le sens de ce qu'on appelle habituellement la
question sociale. Il serait peut-être bon de
jeter un petit coup d'œil en arrière
aujourd'hui. J'aurai peut-être à mentionner
des choses - mais nous les présenterons sous
un jour un peu différent de celui dans lequel
elles ont été présentées -, j'aurai à
mentionner des choses que vous connaissez en
partie.
47
Vous savez probablement que ce qui est dit
aujourd'hui sur la question sociale est dit
depuis relativement longtemps. Et on cite
aujourd'hui les noms de Proudhon, Fourier,
Louis Blanc comme les premiers à avoir traité
la question sociale jusqu'au milieu du XIXe
siècle. Vous savez aussi que la manière dont
cette question sociale a été traitée jusqu'au
milieu du XIXe siècle est appelée par les
représentants actuels, du moins par de
nombreux représentants actuels de la question
sociale, "l'ère des utopies sociales". Il est
bon de préciser ce que l'on entend par là
lorsque l'on dit qu'à son premier stade, la
question sociale est apparue de telle sorte
qu'elle vivait dans un "âge des utopies". Mais
on ne peut pas parler de cette chose dans un
sens absolu, on ne peut en fait parler qu'à
partir des sentiments des représentants de la
question sociale dans le présent. Ils
ressentent les choses comme je veux les
décrire maintenant. Ils sentent que toutes les
questions sociales qui sont apparues à
l'époque dont je veux parler en premier lieu
étaient au stade de l'utopie. Et qu'est-ce que
les gens entendent par là quand ils disent que
la question sociale était alors au stade de
l'utopie ? Ils entendent par là - on l'a déjà
remarqué à l'époque ; Saint-Simon et Fourier
l'ont bien remarqué - qu'il y a, même après la
Révolution française, des humains d'une
certaine minorité sociale qui sont en
possession des moyens de production et aussi
d'autres biens humains, et qu'il y a un grand
nombre d'autres humains - c'est même la
majorité - qui ne sont pas en possession de
tels biens. Ces personnes ne peuvent
travailler sur les moyens de production qu'en
se mettant au service de ceux qui possèdent
les moyens de production et aussi la terre -
elles n'ont en fait rien d'autre
qu'elles-mêmes et leur force de travail. On a
noté que la vie de cette grande masse de
l'humanité est une vie de détresse, en grande
partie dans la pauvreté, par opposition à ceux
qui sont en minorité ; et on a fait allusion à
la situation de la minorité et à la situation
de la majorité.
48
Ceux qui ont écrit sur cette situation sociale
de l'humanité, comme Saint-Simon et Fourier,
mais aussi Proudhon, sont partis d'un certain
postulat. Ils sont partis du principe qu'il
était nécessaire d'attirer l'attention des
humains sur ce point : Voyez, la grande masse
vit dans la misère, dans l'absence de liberté,
dans la dépendance économique, ce n'est pas
une existence digne de l'humain pour la grande
masse. Il faut changer cela. - Et on a alors
imaginé toutes sortes de moyens par lesquels
cette inégalité entre les humains pouvait être
modifiée. Mais il y avait toujours une
certaine condition préalable, et cette
condition préalable était que l'on se disait :
si l'on sait ce qui fonde l'inégalité et si
l'on a des paroles suffisamment fortes, si
l'on a une conscience morale suffisante pour
attirer fortement l'attention sur le fait que
la grande majorité des humains vit dans la
dépendance économique et juridique et est
pauvre, alors ce discours touchera les cœurs,
les âmes de la minorité, des nantis, de la
minorité la plus favorisée. Et c'est en
faisant comprendre à cette minorité que les
choses ne peuvent pas rester en l'état, qu'il
faut apporter des changements, qu'il faut
mettre en place un autre ordre social, qu'un
autre ordre social sera instauré. La condition
préalable était donc que les humains se
laissent entraîner à faire quelque chose pour
la libération de la grande masse de l'humanité
à partir de l'élan de leur âme. Et on
proposait alors ce qu'il fallait faire. Et on
pensait que si la minorité, si les gens qui
sont les dirigeants, les leaders, comprenaient
que ce qu'on voulait faire était bien, alors
il y aurait une amélioration générale de la
situation de l'humanité.
49
Beaucoup de choses extrêmement intelligentes
ont été dites de ce côté-là, mais tout ce qui
a été entrepris dans ce sens est aujourd'hui
considéré comme utopique par la plupart des
représentants de la question sociale. Cela
signifie qu'aujourd'hui, on ne compte plus sur
le fait qu'il suffise de dire : c'est ainsi
qu'il faudrait organiser le monde, et
l'inégalité économique, politique et juridique
des humains cesserait. - Il ne sert à rien
aujourd'hui d'en appeler à la compréhension,
au discernement des humains qui sont
favorisés, qui sont dans le privilège, qui
sont en possession des moyens de production et
autres. Si je dois exprimer ce qui a été perdu
au cours de la deuxième moitié du XIXe siècle,
je dois dire que l'on a perdu la foi en la
compréhension et en la bonne volonté des
humains. C'est pourquoi les représentants de
la question sociale, dont je parle maintenant,
se disent : on peut élaborer de beaux plans
sur la manière d'aménager le monde des
humains, mais il n'en résultera rien ; car on
aura beau prêcher de beaux plans, on aura beau
faire appel aux cœurs et aux âmes des
minorités dirigeantes avec des paroles
touchantes, il ne se passera rien. Tout cela,
ce sont des idées sans valeur, et les idées
sans valeur qui imaginent l'avenir sont en
réalité, pour parler en termes populaires, des
utopies. Il ne sert donc à rien, dit-on,
d'imaginer quoi que ce soit dans l'avenir, car
il n'y aura personne pour renoncer à ses
intérêts, pour être saisi par sa conscience,
par son sens moral, etc. - La foi dans la
conscience et le discernement moral a
justement été perdue dans les cercles les plus
larges, notamment chez les représentants de la
question sociale. On se dit que les humains
n'agissent pas du tout en fonction de leur
discernement lorsqu'ils prennent des mesures
sociales ou lorsqu'ils mènent leur vie
sociale, ils agissent en fonction de leur
intérêt. Et les possédants ont bien entendu
intérêt à rester dans leurs possessions. Les
privilégiés sociaux ont intérêt à conserver
leurs privilèges sociaux. C'est pourquoi il
est illusoire de compter sur le fait qu'il
suffit de dire aux gens de faire ceci ou cela.
Ils ne le font pas, parce qu'ils n'agissent
pas en fonction de leur compréhension, mais en
fonction de leur intérêt.
50
Au sens le plus large, on peut dire que Karl
Marx a peu à peu - mais vraiment peu à peu -
adhéré à cette vue. On peut décrire toute une
série d'époques dans la vie de Karl Marx. Dans
sa jeunesse, Marx était aussi un penseur
idéaliste et il pensait encore, dans le sens
que je viens de caractériser, à la faisabilité
des utopies. Mais c'est justement lui, et
après lui son ami Engels, qui s'est écarté de
la manière la plus radicale de ce calcul sur
le discernement des humains. Et si je
caractérise en général ce qui est en fait une
grande histoire, je peux dire ceci : Karl Marx
est finalement parvenu à la conviction que les
choses ne pouvaient pas s'améliorer dans le
monde d'une autre manière qu'en faisant appel
aux humains qui n'ont pas intérêt à ce que
leurs biens, leurs privilèges leur soient
conservés. Ceux qui ont intérêt à ce que leurs
biens soient préservés, ceux-là, on ne peut
absolument pas les voir, on doit les laisser
complètement de côté, car ils ne se laisseront
jamais aller à faire quoi que ce soit, même si
on leur fait de beaux sermons. En revanche, il
y a justement la grande masse des ouvriers
prolétaires [qui n'ont rien à perdre en termes
de biens]. Karl Marx lui-même a vécu dans
cette conviction à l'époque où ce que l'on
appelle aujourd'hui le prolétariat était en
train de naître en Europe centrale ; il a vu
le prolétariat naître en Europe centrale à
partir d'autres conditions économiques. Plus
tard, lorsqu'il vivait en Angleterre, c'était
un peu différent. Mais à l'époque où Karl Marx
est passé de l'idéaliste au matérialiste
économique, c'était encore comme si le
prolétariat moderne était en train d'émerger
en Europe centrale. Et maintenant, il se
disait : ce prolétariat moderne a des intérêts
tout à fait différents de ceux de la minorité
dirigeante, car il se compose d'humains qui ne
possèdent rien d'autre que leur force de
travail, d'humains qui ne peuvent pas vivre
autrement qu'en mettant leur force de travail
au service des possédants, notamment au
service des possesseurs des moyens de
production. Lorsque ces travailleurs quittent
leur travail, ils sont - c'était
particulièrement vrai à l'époque, de la
manière la plus radicale - jetés à la rue. Ils
n'ont rien d'autre devant eux que la
possibilité d'un front pour ceux qui sont les
propriétaires des moyens de production. Ces
gens ont un tout autre intérêt que ceux qui
possèdent. Ils ont intérêt à ce que tout
l'ordre social antérieur prenne fin, à ce que
cet ordre social soit transformé. Il n'est pas
nécessaire de leur prêcher de manière à ce
qu'ils comprennent, mais seulement de manière
à ce que leur égoïsme et leur intérêt soient
saisis. On peut compter sur cela. Prêcher à
ceux sur le discernement desquels on doit
compter ne donne aucun résultat, car les
humains n'agissent pas par discernement, ils
n'agissent que par intérêt. Donc, on ne peut
pas s'adresser à ceux chez qui on devrait
faire appel au discernement, mais on doit
faire appel aux intérêts de ceux qui ne
peuvent pas faire autrement que de s'engager
pour les temps modernes par contrainte
intérieure. C'est l'égoïsme vers lequel Karl
Marx a évolué. C'est pourquoi il n'a plus cru
que le progrès de l'humanité vers des
conditions sociales plus récentes pouvait
provenir d'une autre œuvre humaine que celle
du prolétariat lui-même. Selon Karl Marx, le
prolétariat ne peut aspirer à un
renouvellement des conditions sociales
humaines qu'à partir de ses propres intérêts,
de ses intérêts individuels et égoïstes. Et
c'est ainsi que le prolétariat, non pas par
philanthropie, mais par intérêt égoïste,
libérera tout le reste de l'humanité, parce
qu'il ne peut y avoir rien d'autre que ce
qu'accomplissent les humains qui ne sont pas
attachés aux vieux biens et qui n'ont rien à
perdre des vieux biens en cas de
transformation.
51
On se dit donc : d'un côté, il y a les cercles
dirigeants, leaders, qui ont certains droits
qui leur ont été conférés dans le passé ou qui
leur ont été imposés dans le passé, qui se
sont transmis par héritage dans leurs
familles, et ils s'y accrochent. Ces cercles
dirigeants sont en possession de ceci ou de
cela, qu'ils transmettent à leur tour au sein
de leur cercle, de leur famille et ainsi de
suite. Ces cercles ont toujours quelque chose
à perdre lors d'une transformation, car bien
sûr, s'ils ne perdaient rien, aucune
transformation n'aurait lieu. Il s'agit en
effet que ceux qui n'ont rien reçoivent
quelque chose, donc ceux qui ont quelque chose
ne peuvent que perdre. On ne pourrait donc
faire appel au discernement que si ce
discernement donnait à la classe dirigeante
possédante l'impulsion de vouloir perdre
quelque chose. Ils n'acceptent pas cela. -
C'était le point de vue de Karl Marx. Il faut
donc faire appel à ceux qui n'ont rien à
perdre. C'est pourquoi le "Manifeste
communiste" de 1848 se termine par ces mots :
"Les prolétaires n'ont rien à perdre que leurs
chaînes, mais ils ont tout à gagner.
Prolétaires de tous les pays,
unissez-vous !".
52
Eh bien, vous voyez, c'est devenu en
quelque sorte une conviction depuis la
publication du Manifeste communiste. Et
aujourd'hui, alors que certains sentiments,
déjà sous l'influence de cette conception,
vivent justement dans la majorité du
prolétariat, on ne peut plus vraiment
s'imaginer quel énorme bouleversement s'est
opéré dans la conception socialiste vers le
milieu du XIXe siècle. Mais il serait bon que
vous preniez quelque chose comme l'"Évangile
d'un pauvre pécheur" de Weitling, un compagnon
tailleur, qui a été écrit pas si longtemps
avant le Manifeste communiste, et que vous le
compariez à tout ce qui a été écrit après la
parution du Manifeste communiste. Dans cet
"Évangile d'un pauvre pécheur", vraiment
empreint d'une authentique sensibilité
prolétarienne, règne un langage ardent, on
peut même dire poétique dans un certain sens,
mais un langage qui veut absolument faire
appel à la bonne volonté, au discernement des
humains. C'est la conviction de Weitling que
l'on peut faire quelque chose avec la bonne
volonté des humains. Et cette conviction ne
s'est affaiblie que vers le milieu du XIXe
siècle. Et l'acte par lequel elle s'est
affaiblie est justement la publication du
Manifeste communiste. Et depuis cette époque,
depuis 1848, nous pouvons en fait suivre ce
que nous appelons aujourd'hui la question
sociale. Car si nous voulions parler
aujourd'hui comme Saint-Simon, comme Fourier,
comme Weitling, oui, nous prêcherions
aujourd'hui vraiment la sourde oreille. Car
jusqu'à un certain point, il est tout à fait
exact que l'on ne peut rien entreprendre dans
la question sociale si l'on fait appel à la
compréhension des cercles dirigeants, leaders,
qui ont quelque chose. C'est tout à fait vrai.
Ils ne le savent même pas s'ils le font, car
des forces inconscientes jouent un rôle
extrêmement important dans l'âme humaine.
53
Vous voyez, au cours du XIXe siècle, notre
culture spirituelle est presque entièrement
devenue une phrase. Et le fait que nous
vivions dans la phrase en ce qui concerne la
culture spirituelle est un fait social
beaucoup plus important qu'on ne le pense
habituellement. Et donc, naturellement, les
membres des cercles dirigeants, des cercles de
direction, disent aussi toutes sortes de
belles choses sur la question sociale, et ils
sont eux-mêmes souvent convaincus qu'ils ont
déjà la bonne volonté. Mais en réalité, ils ne
font que le croire, ce n'est qu'une illusion ;
dès que quelque chose de réel est entrepris
dans ce domaine, il apparaît immédiatement
qu'il s'agit d'une illusion. Nous en parlerons
plus tard. Mais comme je l'ai dit, nous ne
pouvons plus parler aujourd'hui comme nous le
faisions à l'époque des utopies. C'est la
véritable conquête de Karl Marx, qui a montré
comment l'humanité est aujourd'hui tellement
empêtrée dans l'illusionnisme que c'est un
non-sens de compter sur autre chose que
l'égoïsme. Il faut compter avec cela ; on ne
peut donc rien obtenir si l'on veut compter
d'une manière ou d'une autre sur l'altruisme,
sur la bonne volonté, sur les principes moraux
des humains - je dis toujours "en ce qui
concerne la question sociale". Et ce
revirement, qui nous a conduits à devoir
parler aujourd'hui d'une toute autre manière
que l'on pouvait par exemple encore parler de
la question sociale dans la première moitié du
XIXe siècle, ce revirement est justement
arrivé avec le Manifeste communiste. Mais tout
n'est pas arrivé d'un seul coup, mais il était
tout de même possible qu'après le Manifeste
communiste, jusque dans les années soixante,
comme vous le savez tous - certains jeunes
socialistes ont déjà oublié cette époque -,
cette toute autre forme de pensée sociale, la
forme de Ferdinand Lassalle, ait touché les
cœurs et les âmes. Et même après la mort de
Lassalle, survenue en 1864, ce qui était le
socialisme de Lassalle s'est poursuivi.
Lassalle fait partie de ces gens qui, malgré
l'avènement d'un autre mode de pensée,
comptaient encore sur la force de frappe des
idées. Lassalle voulait encore saisir les
humains en tant que tels dans leur
compréhension, dans leur volonté sociale avant
tout. Mais de plus en plus, cette nuance
lassallienne diminuait et l'autre nuance, la
nuance marxiste, qui ne voulait compter que
sur les intérêts de cette partie de la
population humaine qui ne possédait
qu'elle-même et sa force de travail, prenait
le dessus. Mais ce n'était pas si rapide. Une
telle façon de penser ne s'est développée que
peu à peu dans l'humanité.
54
Dans les années soixante, soixante-dix, et
même encore dans les années quatre-vingt, les
gens qui appartenaient au prolétariat ou qui
faisaient partie des gens politiquement ou
socialement dépendants - même s'ils n'étaient
pas exactement des prolétaires - jugeaient en
quelque sorte moralement leur dépendance et
condamnaient moralement les milieux non
dépendants de la population humaine. Selon
leur conscience, c'était de la mauvaise
volonté de la part des cercles dirigeants,
leaders, de la population humaine, qu'ils
laissent la grande masse du prolétariat dans
la dépendance, qu'ils la payent mal, etc. Si
je peux m'exprimer trivialement, je peux dire
que dans les années soixante, soixante-dix,
jusque dans les années quatre-vingt, on
fabriquait beaucoup d'indignation sociale et
on parlait du point de vue de l'indignation
sociale. Puis, au milieu des années
quatre-vingt, l'étrange revirement s'est
vraiment produit. Les personnalités les plus
en vue du mouvement social ont alors
complètement cessé de parler de la question
sociale sur la base de l'indignation morale
dans les années 80. C'était l'époque où les
leaders sociaux, que vous, les plus jeunes,
avez seulement vus mourir, étaient grands et
plus ou moins encore animés par l'ardeur de
leur jeunesse : Adler, Pernerstorfer, Wilhelm
Liebknecht, Auer, Bebel, Singer et ainsi de
suite. Ces dirigeants plus âgés ont justement
cessé de plus en plus de prêcher ce socialisme
d'indignation à l'époque, dans les années 80.
Je voudrais dire que ces dirigeants du
socialisme ont exprimé leur conviction intime
lorsqu'ils ont transposé l'ancien socialisme
d'indignation dans leur nouvelle vision
socialiste du monde. Vous trouverez que ce que
je vous dis maintenant ne figure dans aucun
livre sur l'histoire du socialisme. Mais ceux
qui ont vécu à l'époque et qui ont participé à
cela savent que les gens, lorsqu'ils étaient
livrés à eux-mêmes, parlaient ainsi.
55
Supposons que dans les années quatre-vingt,
des dirigeants du socialisme se soient réunis
pour discuter avec des bourgeois [purs] dans
leurs convictions, et supposons qu'il y ait eu
une troisième sorte : des bourgeois idéalistes
qui voulaient du bien à tous les humains, qui
auraient été d'accord pour rendre tous les
humains heureux. Il aurait pu arriver que les
bourgeois déclarent qu'il faut toujours qu'il
y ait des gens pauvres et des gens riches, et
ainsi de suite, car c'est la seule façon de
maintenir la société humaine. Alors peut-être
que la voix de l'un de ces idéalistes qui
s'indignaient de voir tant de gens vivre dans
la pauvreté et la dépendance se serait élevée.
Un tel humain aurait peut-être dit : "Oui, il
faut y parvenir, il faut faire comprendre à
ces gens qui possèdent, aux entrepreneurs, aux
capitalistes, qu'ils doivent renoncer à leurs
biens, qu'ils doivent prendre des mesures qui
permettront à la grande masse de changer de
situation, et ainsi de suite. - De très beaux
discours auraient pu être prononcés sur cette
base. Mais alors, quelqu'un qui, à l'époque,
venait de s'initier au socialisme et à son
évolution, aurait élevé la voix et dit :
"Qu'est-ce que vous racontez, vous êtes un
enfant ; tout cela n'est qu'enfantillages,
absurdités ! Les gens qui sont des
capitalistes, des entrepreneurs, ce sont tous
de pauvres sbires, ils ne savent rien d'autre
que ce qu'on leur a inculqué depuis des
générations. S'ils entendaient dire qu'ils
devraient faire autrement, ils ne pourraient
même pas le faire, car ils ne sauraient pas
comment s'y prendre. Cela ne rentre pas du
tout dans leur crâne que l'on puisse faire
quelque chose différemment. Il ne faut pas
accuser les gens, il ne faut pas condamner
moralement les gens, ils ne sont pas du tout à
condamner moralement ; les gars ont grandi
dans ce milieu, ces pauvres sbires, dans tout
ce milieu, et ça les inspire avec les idées
qu'ils ont. Les accuser moralement, c'est ne
rien comprendre aux lois de l'évolution de
l'humanité, c'est se bercer d'illusions. Ces
humains ne peuvent jamais vouloir que le monde
prenne une autre forme. Parler d'eux avec
indignation, c'est de l'enfantillage pur et
simple. Tout cela est devenu ainsi par
nécessité, et cela ne peut devenir différent
que par nécessité. Vous voyez, on ne peut rien
faire avec ces gars qui croient pouvoir
prêcher aux possédants, aux capitalistes,
qu'il faut instaurer un nouvel ordre mondial,
on ne peut rien faire avec ces gars ; on ne
peut pas instaurer un nouvel ordre mondial
avec eux ; ils ne font que s'adonner à la
croyance que l'on peut accuser ces pauvres
sbires de capitalistes de faire un autre
monde. - Je dois dire les choses un peu
clairement, c'est pourquoi certaines choses
sont dites avec des contours nets, mais de
telle manière que vous avez pu entendre
partout les discours dont je parle. Quand on
les écrivait, on les retouchait un peu, on les
écrivait un peu différemment, mais c'était la
base. Puis ils ont continué à parler : avec
ces gars - ce sont des idéalistes, ils se
représentent le monde en termes d'idéologie -,
on ne peut rien faire avec eux. Nous devons
compter sur ceux qui n'ont rien, qui veulent
donc quelque chose de différent de leurs
intérêts que ceux liés aux intérêts
capitalistes. Et ceux-là n'aspireront pas non
plus à un changement de situation en vertu
d'un quelconque principe moral, mais
uniquement par convoitise, pour avoir plus que
ce qu'ils avaient jusqu'à présent, pour avoir
une existence indépendante.
56
Cette manière de penser est apparue de plus en
plus dans les années quatre-vingt, de ne plus
concevoir l'évolution de l'humanité dans le
sens où l'individu est particulièrement
responsable de ce qu'il fait, mais qu'il fait
ce qu'il doit faire en raison de la situation
économique. Le capitaliste, l'entrepreneur,
écrase les autres dans la plus grande
innocence. Celui qui est prolétaire, non pas
en vertu d'un principe moral, mais en toute
innocence, en raison d'une nécessité humaine,
va révolutionner et prendre les moyens de
production, le capital, des mains de ceux qui
justement le possèdent. Cela doit se dérouler
comme une nécessité historique. - Cette façon
de penser monta.
57
Eh bien, voyez-vous, ce n'est qu'en 1891, au
congrès d'Erfurt, que tout le lassallianisme,
qui était encore basé sur la compréhension des
humains, s'est transformé en croyance dans le
soi-disant "programme d'Erfurt", qui était
destiné à faire du marxisme la vision
officielle du prolétariat. Si vous lisez les
programmes des congrès de Gotha et d'Eisenach,
vous y trouverez deux revendications
authentiquement prolétariennes de l'époque,
qui sont encore liées au lassallianisme. La
première revendication était l'abolition du
rapport salarial ; la deuxième revendication
était l'égalité politique de tous les humains,
l'abolition de tous les privilèges politiques.
Toutes les revendications prolétariennes
jusqu'aux années 1990, jusqu'au congrès
d'Erfurt qui a apporté le grand changement,
sont parties de ces deux revendications.
Regardez une fois ces deux revendications
exactement et comparez-les avec les
principales revendications du congrès
d'Erfurt. Quelles sont les principales
revendications du congrès d'Erfurt ? Ce sont
les suivantes : Transfert de la propriété
privée des moyens de production à la propriété
commune ; gestion de toute la production de
biens, de toute la production par une sorte de
grande coopérative, en laquelle l'État actuel
doit se transformer. Comparez l'ancien
programme, qui était le programme prolétarien
des années quatre-vingt, avec celui qui est
issu du programme du parti d'Erfurt et qui
existe depuis les années quatre-vingt-dix.
Vous verrez que dans l'ancien programme de
Gotha et d'Eisenach, les exigences du
socialisme sont encore des exigences purement
humaines : égalité politique de tous les
humains, abolition du rapport salarial
dégradant. Au début des années
quatre-vingt-dix, ce que je vous ai décrit
comme l'état d'esprit qui s'est développé au
cours des années quatre-vingt a déjà agi. Ce
qui était encore une exigence de l'humanité
s'est transformé en une exigence purement
économique. Vous ne lisez plus rien sur
l'idéal d'abolir le rapport salarial, vous ne
lisez que des revendications économiques.
58
Eh bien, vous voyez, ces choses sont liées à
la formation progressive de l'idée que l'on
avait de la réalisation extérieure d'un
meilleur état social de l'humanité. Il a
souvent été dit par ces gens qui avaient
encore des idéaux : ah, quel dommage cela
fait-il de tout casser, il faut bien qu'un
autre ordre se mette en place ; il faut donc
qu'il y ait une révolution, il faut que tout
soit cassé, il faut qu'il y ait une grande
claque, car c'est seulement de là que peut
naître un meilleur ordre social. - C'est ce
que disaient encore certaines personnes dans
les années 80, qui étaient de bons socialistes
idéalistes. On leur répondait par d'autres,
ceux qui étaient à la hauteur, qui étaient
devenus les leaders - ceux qui, comme je l'ai
dit, sont maintenant enterrés -, qui disaient
: tout cela n'a pas de sens, des révolutions
aussi soudaines n'ont aucun sens. La seule
chose qui ait un sens, c'est que nous
abandonnions le capitalisme à lui-même. Nous
voyons bien qu'auparavant, il n'y avait que de
petits capitalistes, puis ils sont devenus
grands ; ils se sont associés à d'autres, sont
devenus des groupes de capitalistes. Les
capitaux se sont de plus en plus concentrés.
C'est dans ce processus que nous nous
trouvons, à savoir que les capitaux sont de
plus en plus concentrés. Le temps viendra où
il n'y aura plus que quelques grands trusts et
consortiums capitalistes. Il sera alors
nécessaire que le prolétariat, en tant que
classe non possédante, transmette un beau
jour, de manière tout à fait pacifique, par
voie parlementaire, la propriété capitaliste,
les moyens de production, à la propriété
commune. Cela peut être très bien fait, mais
il faut attendre. D'ici là, les choses doivent
évoluer. Le capitalisme, qui est en fait un
enfant innocent, n'y peut rien s'il est
inhumain - c'est la nécessité historique qui
l'impose. Mais il travaille aussi à l'avance,
car il concentre les capitaux ; ils sont alors
bien groupés, il suffit qu'ils soient repris
par la collectivité. Il ne s'agit pas d'une
révolution rapide, mais d'une évolution lente.
59
Vous voyez, le secret de la vision, le secret
public de la vision, qui est à la base de tout
cela, a été joliment expliqué par Engels dans
les années 90. Il a dit : "Pourquoi des
révolutions rapides ? Ce qui se passe
lentement dans le développement du nouveau
capitalisme, ce regroupement des capitaux,
cette concentration des capitaux, tout cela
travaille pour nous. Nous n'avons pas besoin
de créer une communauté, les capitalistes le
font déjà. Nous n'avons qu'à le transformer en
propriété prolétarienne. C'est pourquoi - dit
Engels - les rôles se sont en fait inversés.
Nous, qui représentons le prolétariat, n'avons
pas à nous plaindre de l'évolution, ce sont
les autres qui doivent se plaindre. Car les
gars qui sont aujourd'hui dans les cercles des
possédants doivent se dire : nous accumulons
les capitaux, mais nous les accumulons pour
les autres. Voyez, ces types doivent en fait
s'inquiéter de perdre leurs capitaux ; ils ont
les joues creuses, ils se dessèchent à force
de se demander ce qui va se passer. En tant
que socialistes, nous nous épanouissons très
bien dans cette évolution. Engels dit que nous
avons les muscles saillants et les joues
pleines et que nous ressemblons à la vie
éternelle. - C'est ce que dit Engels dans une
introduction qu'il a écrite dans les années
1990, en décrivant comment ce qui se développe
est tout à fait juste, et comment il suffit
d'attendre le développement, qui est en fait
assuré par le capitalisme lui-même. Cette
évolution débouche ensuite sur le transfert de
ce que le capitalisme a d'abord concentré dans
la propriété commune de ceux qui n'avaient
rien jusqu'alors. - C'était en fait l'état
d'esprit dans lequel les cercles dirigeants du
prolétariat sont entrés au XXe siècle.
60
Et c'est ainsi qu'on a pensé, surtout depuis
l'époque où le marxisme n'a plus été pris
comme dans les années 1990, mais où il a été
soumis à une révision, comme on disait, à
l'époque où sont apparus les révisionnistes,
c'est-à-dire ceux qui sont encore vivants
aujourd'hui, mais qui sont des vieux, comme
Bernstein par exemple. C'est donc là que les
révisionnistes sont arrivés. Ils disaient
qu'il était possible d'encourager un peu toute
l'évolution, car si les travailleurs se
contentent de travailler jusqu'à ce que les
capitalistes aient tout rassemblé, ils seront
encore dans le besoin avant, notamment
lorsqu'ils seront âgés, ils n'auront rien. On
a donc créé des assurances et ainsi de suite ;
et surtout, on a veillé à s'approprier ce que
les classes dirigeantes avaient comme
institutions dans la vie politique. Vous
savez, c'est à cette époque qu'est née la vie
syndicale.
61
Et à l'intérieur du parti socialiste, il y
avait deux tendances fortement divergentes :
le parti syndical et le parti politique
proprement dit, comme on disait alors. Le
parti politique se tenait plus sur le terrain,
une révolution soudaine ne servirait à rien,
l'évolution devait se dérouler comme je viens
de le décrire. Il s'agissait donc de tout
préparer pour le moment où le capitalisme
serait suffisamment concentré et où le
prolétariat aurait la majorité dans les
parlements. Tout doit être poursuivi par la
voie du parlementarisme, de l'appropriation de
la majorité, afin qu'au moment où les moyens
de production seront transférés à la propriété
commune, il y ait aussi la majorité pour ce
transfert. C'est notamment dans ce groupe de
personnes qui pensaient tout du parti
politique que l'on ne pensait pas beaucoup au
mouvement syndical à la fin du XIXe siècle. À
cette époque, celui-ci s'efforçait justement
d'instaurer une sorte de compétition ordonnée
entre lui et les entrepreneurs, afin d'obtenir
de temps en temps des entreprises des
augmentations de salaire et des choses
similaires. Bref, on s'est arrangé pour imiter
le système de négociations réciproques qui
existait entre les milieux dirigeants, entre
les dirigeants eux-mêmes, et on l'a étendu aux
relations entre les milieux dirigeants et le
prolétariat. Vous savez que les représentants
du système socialiste proprement politique ont
particulièrement accusé ceux qui sont devenus
les plus bourgeois du mouvement syndical. Et à
la fin des années quatre-vingt-dix et au début
du XXe siècle, on pouvait voir partout, chez
ceux qui étaient plus orientés vers le système
politique, un grand mépris pour les gens qui
s'étaient entièrement plongés dans la vie
syndicale, notamment les typographes, qui
avaient à leur tour développé un tout autre
système de vie syndical, jusqu'à l'extrême.
62
Il s'agissait de deux tendances très
distinctes dans la vie sociale : les
syndicalistes et ceux qui penchaient plutôt
vers le parti politique. Et au sein des
syndicats, les typographes de l'association
des typographes étaient justement les garçons
modèles ; ils étaient les garçons modèles qui
avaient acquis la pleine reconnaissance des
cercles bourgeois. Et je crois que, de même
que l'on a eu une certaine crainte, une
certaine inquiétude à l'égard du parti
politique socialiste, on a vu peu à peu
émerger avec une grande satisfaction des gens
aussi braves que les gens de l'association des
typographes. On se disait à leur sujet : ils
s'embourgeoisent, on peut toujours négocier
avec eux, ça se passe très bien. S'ils s'en
prennent à leurs salaires, nous nous en
prenons à nos prix, que nous exigeons. Ça
marche. - Et, n'est-ce pas, c'était aussi
possible pour les années suivantes, et les
gens ne pensent pas plus loin. On était donc
très satisfait de cette formation exemplaire
du développement syndical. Eh bien, si j'omets
quelques nuances, on peut dire que ces deux
directions se sont plus ou moins développées
jusqu'à l'époque où la catastrophe de la
guerre mondiale les a surpris. Mais
malheureusement, les gens n'ont pas appris de
cette catastrophe mondiale tout ce qui aurait
dû être appris en ce qui concerne la question
sociale.
63
N'est-ce pas, si l'on considère les rapports à
l'est de l'Europe, en Europe centrale, si l'on
fait abstraction du monde anglo-américain et
en partie du monde roman, si l'on se limite
donc à l'Europe centrale et orientale, on peut
dire qu'il n'y a rien de juste dans cette
histoire, que l'on a toujours définie ainsi :
Les capitaux se concentrent et, lorsque l'on
aura la majorité dans les parlements, les
capitaux seront transférés à la communauté, et
ainsi de suite. - La catastrophe de la guerre
mondiale a fait en sorte que l'on ne puisse
pas s'y attendre aussi facilement aujourd'hui.
Ceux qui s'attendaient à une révolution
quelconque ont souvent été considérés comme
des enfants, mais au fond, que s'est-il passé
au cours des quatre ou cinq dernières années ?
Gardons à l'esprit ce qui s'est passé de
manière claire et nette. N'est-ce pas, vous
l'avez souvent entendu, ce qui s'est passé au
cours des quatre ou cinq dernières années : en
juillet 1914, les gouvernements sont devenus
un peu "tordus" - ou très "tordus" - et ont
poussé les gens à la guerre mondiale. Les gens
ont cru qu'il y avait une guerre mondiale, que
des batailles avaient eu lieu - mais avec les
moyens de guerre modernes, avec les moyens
mécaniques, il y avait quelque chose de tout à
fait différent que dans les guerres
précédentes. Il n'y avait plus aucune
possibilité que quelqu'un devienne un général
particulièrement célèbre, car tout dépendait
finalement de la quantité de munitions et
d'autres moyens de guerre dont disposait l'un
des deux partis, si l'un fabriquait mieux que
l'autre les moyens de guerre mécaniques ou
avait découvert un gaz et d'autres choses de
ce genre que les autres n'avaient pas. D'abord
l'un gagnait, puis l'autre découvrait à
nouveau quelque chose, puis le premier à
nouveau ; tout cela était une guerre
terriblement mécanique. Et tout ce qui a été
dit sur ce qui s'est passé ici et là de la
part des humains, c'était sous l'influence de
la phrase, c'était tout à fait de la phrase.
Et peu à peu, l'humanité moderne comprendra,
même en Europe centrale, tout ce qu'il y a eu
comme phrases dans le fait que l'un ou
l'autre, qui n'était en fait rien d'autre
qu'un soldat moyen un peu tordu, a été
transformé en un grand général en Europe
centrale. Ces choses n'ont été possibles que
sous l'influence de la phrase. Eh bien, c'est
ce qui s'est passé.
64
Mais que s'est-il passé en réalité ? Les gens
ne l'ont pas remarqué à cause des événements
extérieurs. Alors que les gens croyaient
qu'une guerre mondiale avait été menée - qui
n'était en fait qu'un masque -, une révolution
s'est en réalité produite. En réalité, une
révolution s'est produite pendant ces quatre
ou cinq ans. Mais les gens ne le savent pas
encore aujourd'hui, ils n'y prêtent pas
attention. La guerre est l'extérieur, le
masque ; la vérité, c'est que la révolution a
eu lieu. Et parce que la révolution a eu lieu,
la société d'Europe centrale et orientale se
trouve aujourd'hui dans un tout autre état, et
on ne peut rien faire de ce que les gens
avaient envisagé pour les situations
antérieures. Aujourd'hui, il est nécessaire de
réorganiser toutes les idées que l'on se
faisait auparavant, de penser les choses de
manière totalement nouvelle. C'est ce qu'a
tenté de faire le livre "Les points essentiels
de la question sociale" : tenir compte de la
situation dans laquelle les événements récents
nous ont placés. Il n'est donc pas étonnant
que les membres des partis socialistes, qui ne
peuvent pas suivre le mouvement assez
rapidement, se méprennent sur ce livre. Si les
gens acceptaient une seule fois d'examiner
leurs propres pensées - d'examiner un peu ce
qu'ils disent vouloir -, ils verraient à quel
point ils vivent sous l'influence des idées
qu'ils se sont faites jusqu'en 1914. C'est la
vieille habitude.
65
N'est-ce pas, ces idées que l'on a eues
jusqu'en 1914, elles se sont tellement
incrustées dans l'environnement des humains
qu'elles ne peuvent plus en sortir maintenant.
Et quelle est la conséquence ? La conséquence,
c'est que malgré la nécessité d'une nouvelle
action aujourd'hui, malgré la révolution qui
s'est produite en Europe centrale et
orientale, malgré la nécessité de construire
aujourd'hui - non pas selon les anciennes
idées, mais selon les nouvelles idées -,
malgré tout cela, les gens prêchent les
anciennes idées. Et que sont aujourd'hui les
partis, y compris les partis socialistes ? Les
partis socialistes sont ceux qui continuent à
prêcher aujourd'hui tel ou tel évangile
socialiste, à l'ancienne manière, comme ils
l'ont fait jusqu'en juillet 1914, car il n'y a
pas de différence dans ces programmes de parti
par rapport aux anciens - tout au plus la
différence qui vient de l'extérieur. Pour
celui qui connaît les choses, il y a
terriblement peu de nouveautés, voire rien de
nouveau, dans les différents groupes de
partis. Les vieilles idées sont toujours
véhiculées aujourd'hui. Maintenant oui, il y a
une petite différence : si l'on a un chaudron
en cuivre et que l'on tape dessus, cela sonne
; si l'on tape de la même manière sur un
tonneau en bois, cela sonne différemment ;
mais le coup peut être tout à fait le même.
Cela dépend alors de ce sur quoi on tape, si
cela sonne différemment. Et c'est ce qui se
passe aujourd'hui lorsque les gens se mettent
à parler de leurs programmes de parti. Ce qui
est contenu dans ces anciens programmes de
parti, c'est en fait le vieux garde-fou du
parti ; c'est seulement parce qu'il y a
maintenant d'autres conditions sociales que
cela sonne aujourd'hui un peu différemment,
comme cela sonne différemment dans une
chaudière en cuivre ou dans un tonneau en
bois. Lorsque les socialistes indépendants,
les socialistes majoritaires ou les
communistes parlent, ils prononcent de
vieilles phrases de parti, et cela sonne
différemment parce qu'il n'y a pas un chaudron
en cuivre, mais un tonneau en bois. En vérité,
on n'a rien appris du tout, du tout, du tout,
de bien des côtés. Mais ce qui compte, c'est
qu'on apprenne quelque chose, que cette
terrible guerre mondiale, comme on l'appelle,
mais qui était en fait une révolution
mondiale, nous dise quelque chose.
66
Et là, on peut vraiment dire que dans les
masses les plus larges, on est préparé à
entendre quelque chose de nouveau. Mais dans
les grandes masses, on écoute ce que disent
les dirigeants. Il y a une bonne
compréhension, un bon sens chez les masses
populaires non éduquées, et on a toujours pu
compter sur la compréhension lorsqu'on propose
quelque chose de vraiment moderne, quelque
chose qui peut être qualifié de moderne dans
le meilleur sens du terme. Cela s'explique en
partie par le fait que les masses ne sont pas
éduquées. Mais dès que les gens entrent dans
le type d'éducation que l'on peut avoir depuis
les trois ou quatre derniers siècles, cette
caractéristique d'inculture disparaît. Si l'on
considère l'enseignement bourgeois actuel, de
l'école primaire jusqu'à l'université - et ce
sera encore pire lorsque l'école unique
socialiste sera fondée, car tout ce que
l'école primaire bourgeoise a fait de mal y
sera présent dans la plus grande mesure -, on
voit bien que l'enseignement bourgeois n'a pas
de sens : ce qui se fait dans les écoles forme
les esprits et les rend étrangers à la vie. Il
faut sortir de tout cela, il faut vraiment se
mettre sur ses propres jambes dans la vie
spirituelle si l'on veut sortir de cette
méformation. Mais, voyez-vous, c'est grâce à
cette méformation que les dirigeants
prolétariens, grands et petits, sont devenus
ainsi. Ils ont dû s'approprier cette formation
; cette formation se trouve dans nos écoles et
dans les écrits populaires, elle se trouve
partout. Et c'est là que l'on commence à avoir
le cerveau desséché et que l'on n'est plus
accessible aux faits, mais que l'on s'arrête
aux programmes de parti et aux opinions que
l'on a greffés et martelés. Même la révolution
mondiale peut alors arriver, on continue à
siffler les vieux programmes.
67
Vous voyez, c'est essentiellement ce sort qui
a été réservé à ce qui a été voulu dans de
nombreuses directions avec ce livre "Les
points essentiels de la question sociale" et
les conférences. On y a vraiment tenu compte
de ce dont le prolétariat a absolument besoin
aujourd'hui, de ce qui est nécessaire compte
tenu de la situation actuelle. On l'a compris
au début [dans le prolétariat], mais ensuite
ceux qui sont les dirigeants du prolétariat
dans les différents groupes de partis ne l'ont
pas compris. Cela dit, je ne veux pas être
trop injuste et je ne veux pas presser la
vérité ; je ne veux pas affirmer que ces
dirigeants, par exemple, ne comprennent pas ce
livre, car je ne peux pas supposer qu'ils
l'ont lu, qu'ils le connaissent. Je
n'affirmerais pas quelque chose de juste si je
disais : ils ne peuvent pas comprendre ce
livre. Mais ils ne peuvent absolument pas se
décider à comprendre que quelque chose d'autre
soit nécessaire que ce qu'ils pensent depuis
des décennies. Leur cerveau est devenu trop
sec, trop rigide pour cela. Et c'est pourquoi
ils s'en tiennent à ce qu'ils ont pensé depuis
longtemps et trouvent que ce qui est le
contraire de toute utopie, c'est une utopie.
Car, voyez-vous, le livre "Les points
essentiels" tient pleinement compte du fait
qu'on ne peut plus aujourd'hui se mouvoir dans
des utopies dans le sens des Saint-Simon,
Fourier, Proudhon et ainsi de suite, mais
aussi du fait qu'on ne peut plus jamais se
placer du point de vue : L'évolution se fera
d'elle-même. Car ce que Marx et Engels ont vu,
ce qui s'est développé [à leur époque], ce
dont ils ont tiré leurs conclusions, on ne
peut plus en tirer de conclusions aujourd'hui,
car la guerre mondiale l'a balayé, il n'est
plus là sous sa forme véritable. Celui qui dit
aujourd'hui la même chose que Marx et Engels,
dit quelque chose que Marx n'aurait jamais
dit. Il a eu peur de ses partisans, car il a
dit : en ce qui me concerne, je ne suis pas
marxiste. - Et aujourd'hui, il dirait : à
l'époque, les faits étaient encore différents
; à l'époque, je tirais mes conclusions de
faits qui n'avaient pas encore été modifiés,
changés, comme la guerre mondiale a tout
changé par la suite.
68
Mais, voyez-vous, ces humains qui ne peuvent
rien apprendre des événements, qui ont
aujourd'hui la même attitude que les anciens
catholiques vis-à-vis de leurs évêques et de
leurs papes, ne peuvent même pas imaginer
qu'une chose telle que le marxisme doit être
développée dans le sens des faits. C'est ce
que font les socialistes, mais aussi les
bourgeois. Les cercles les plus larges le font
ainsi. Les bourgeois le font naturellement de
manière somnolente, l'âme complètement
endormie, les autres le font de telle sorte
qu'ils se trouvent au milieu et voient
l'effondrement, mais qu'ils ne veulent pas
s'attendre aux faits qui se révèlent ainsi.
Aujourd'hui, nous avons justement besoin que
quelque chose de nouveau arrive parmi les
humains. Et c'est pourquoi il est nécessaire
de comprendre quelque chose [comme la
triarticulation] qui n'est pas une utopie,
mais qui compte justement avec les faits. Si,
de ce côté, on appelle ce qui compte ainsi
avec les faits, l'ergotage, on pourrait en
fait être tout à fait satisfait. Car si les
gens appellent ce qu'ils font avancer une
ligne droite, alors il faut, pour faire
quelque chose de raisonnable, tirer dans le
sens du poil, pour amener ce qui est
déraisonnable dans une autre direction,
raisonnable. Mais vous voyez, ceux qui
comprennent encore ce qui est raisonnable
devraient approfondir ce qui est présenté ici.
Et c'est à cela que peuvent servir ces
soirées.
69
Non, il y a longtemps que l'on a essayé de
mettre en pratique ce que l'on a tiré des
faits. Et c'est ainsi que nous nous sommes
réunis depuis des semaines - je n'ai pas
besoin de répéter toutes ces choses, vous
pouvez encore poser des questions ou discuter
des pour et des contre à l'issue de cet exposé
-, nous nous sommes réunis depuis des semaines
pour mettre sur pied ce que nous appelons le
corps des conseils d'entreprise. Nous avons
essayé de créer ces conseils d'entreprise à
partir des faits actuels nécessaires, de les
créer vraiment de telle sorte qu'ils viennent
de la simple vie de l'économie, qu'ils ne
viennent pas de la vie politique, qui ne peut
pas constituer la base de la vie de
l'économie. Car si l'on regarde les faits en
face aujourd'hui, il faut se tenir strictement
sur le terrain de l'organisme social
triarticulé. Et celui qui ne veut pas de cette
triarticulation aujourd'hui va à l'encontre de
la nécessité historique de l'évolution de
l'humanité. Aujourd'hui, il doit en être
ainsi, comme je l'ai souvent expliqué : que la
vie spirituelle soit placée sur elle-même, que
la vie économique soit placée sur elle-même,
que la vie de droit ou politique soit
administrée démocratiquement. Et dans la vie
économique, le premier pas vers un façonnement
réellement social doit être fait avec les
conseils d'entreprise. Mais comment cela
peut-il se faire ? Uniquement en posant
d'abord la question : maintenant oui, il y a
l'impulsion de l'organisme social triarticulé,
c'est nouveau par rapport à toutes les
anciennes momies de parti ; y a-t-il quelque
chose d'autre de nouveau ? Les imbéciles
prétendent aujourd'hui que les idées ne font
que tourbillonner dans l'air. Si l'on écoute
les discussions, elles apportent toutes sortes
de choses négatives, mais elles n'apportent
rien qui puisse être mis en parallèle avec la
triarticulation de l'organisme social. Tout
cela n'est que de l'eau de rose lorsque les
socialistes affirment que les idées ne font
que pendre dans l'air - comme cela a été dit
dans une revue nouvellement créée, lors d'une
discussion sur la triarticulation.
70
Il s'agit tout d'abord qu’on lance la question
et d'y voir clair : N'y a-t-il rien d'autre ?
Ensuite, on s'en tient d'abord à la
triarticulation de l'organisme social, jusqu'à
ce qu'on puisse la réfuter de manière
objective, jusqu'à ce qu'on puisse placer à
côté d'elle des choses objectivement
équivalentes. On ne peut plus discuter des
anciens programmes de parti, c'est la guerre
mondiale qui en a discuté ; celui qui a
vraiment de la compréhension sait que ces
anciennes idées de parti sont réfutées par la
catastrophe de la guerre mondiale. Mais alors,
si l'on ne peut pas répondre à cette question
en plaçant à côté quelque chose
d'objectivement équivalent, et si l'on veut
aller plus loin, alors on peut honnêtement se
dire : nous travaillons donc dans le sens de
la triarticulation de l'organisme social.
Disons-le franchement : les anciennes
structures de parti ont perdu leur
signification ; il faut travailler dans le
sens de la triarticulation.
71
Lorsque j'ai pris la parole avant-hier à
Mannheim, un monsieur s'est présenté à la fin
et a dit : "Ce que Steiner a dit est bien,
mais ce n'est pas ce que nous voulons ; nous
ne voulons pas ajouter un nouveau parti à tous
les anciens partis. Les gens qui veulent une
telle chose doivent entrer dans les anciens
partis et y travailler. -- Je ne pouvais que
répondre : j'ai suivi la vie politique de très
près depuis longtemps, alors que le monsieur
qui parlait n'était pas encore né. Et bien que
j'aie été familiarisé par ma vie avec tout ce
qui fonctionnait socialement comme force, je
n'ai jamais pu agir au sein d'un parti
quelconque ou m'y tenir, et il ne me vient pas
à l'esprit, à la fin de ma sixième décennie,
de devenir un humain de parti : je ne veux
rien avoir à faire ni avec un autre parti ni
avec un parti que j'aurais fondé moi-même. Je
ne veux pas non plus avoir affaire à un parti
que j'aurais fondé moi-même ; personne ne doit
craindre qu'un nouveau parti soit fondé par
moi. Car j'ai appris que chaque parti, par la
force des choses, devient stupide au bout d'un
certain temps, précisément parce que je ne me
suis jamais engagé dans aucun parti. Et j'ai
appris à plaindre les gens qui n'ont pas
compris cela. C'est pourquoi personne ne doit
craindre qu'un nouveau parti vienne s'ajouter
aux anciens. C'est pourquoi nous n'avons pas
fondé de nouveau parti, mais la Fédération
pour la triarticulation de l'organisme social
s'est réunie pour représenter les idées de
l'organisme triarticulé, dont le caractère non
utopiste, dont le caractère réel est tout de
même perçu par un certain nombre de personnes.
Les personnes qui le reconnaissent devraient
aussi l'affirmer honnêtement et sincèrement.
72
Car cela non plus ne doit pas arriver : Il y a
une pièce de théâtre dans laquelle un coq
chante à l'aube, et chaque fois que le coq a
chanté, le soleil se lève. Eh bien, le coq ne
peut pas voir le contexte, c'est pourquoi il
croit que lorsqu'il chante, c'est que le
soleil répond à son appel, qu'il vient parce
qu'il a chanté, qu'il a fait en sorte que le
soleil se lève. - Enfin, si quelqu'un dans la
vie non sociale se laisse aller à une telle
illusion, comme ce coq qui chante sur le
fumier et veut faire se lever le soleil, cela
ne fait rien. Mais si, dans certaines
circonstances, il arrivait que l'idée des
conseils d'entreprise véritablement
économiques prospère sur le sol de l'organisme
triarticulé et que les personnes qui s'en
occupent veuillent nier l'origine, à savoir
que l'impulsion de la triarticulation a mis
cette idée en mouvement, et si ces personnes
croient que parce qu'on a chanté, les conseils
d'entreprise vont venir, alors ce serait la
même erreur, et une erreur très fatale. Mais
cela ne doit pas arriver. Ce qui se passe dans
cette direction [les conseils d'entreprise],
ce qui a été entrepris ici, ne doit pas être
dissocié, cela doit rester en rapport avec
l'impulsion bien comprise de la
triarticulation de l'organisme social. Et ceux
qui veulent réaliser les conseils d'entreprise
dans le sens de cette impulsion ne peuvent
jamais accepter que les conseils d'entreprise
soient créés de manière unilatérale et que
l'on ne crie que "conseils d'entreprise,
conseils d'entreprise". Ce n'est pas
suffisant. Cela n'a de sens que si l'on aspire
en même temps à tout ce qui doit être
recherché par l'impulsion de l'organisme
social triarticulé. C'est ce qui est
important. Car si vous voulez vraiment
comprendre ce qui est écrit dans les "points
essentiels", vous devez vous placer du point
de vue que l'on peut apprendre des faits que
les quatre ou cinq dernières années ont
offerts. Pour celui qui voit clair dans ces
faits, ils apparaissent comme s'il avait vécu
des siècles, et pour celui qui voit les
programmes des partis comme si leurs
promoteurs avaient dormi pendant des siècles.
Aujourd'hui, cela doit être envisagé
clairement et sans réserve.
73
Ce que je viens de vous raconter, j'aurais
bien sûr tout aussi bien pu l'écrire en
préambule de ce livre. Seulement, on a pu
constater ces derniers mois à quel point les
programmes des partis sont actuellement
rigides et stériles. Mais il serait utile que
cela figure en préambule de ce livre. Je vous
ai raconté aujourd'hui beaucoup de choses qui
n'y figurent pas, puisque vous avez décidé, me
semble-t-il, de vous réunir ici pour étudier
correctement les graves questions sociales
actuelles dans le prolongement de ce livre.
Mais avant de s'y atteler, il faut déjà se
rendre compte que l'on ne peut pas continuer à
trottiner dans le vieux style des programmes
et des modèles de parti, mais que l'on doit se
décider à aborder aujourd'hui les faits
conformément à la réalité et à tirer un trait
sur tout ce qui ne tient pas compte de ces
nouveaux faits. Ce n'est qu'ainsi que vous
comprendrez correctement ce qui doit être
réalisé, précisément avec cette impulsion vers
un organisme social triarticulé. Et vous le
comprendrez de la bonne manière si vous
trouvez que chaque phrase de ce livre est
susceptible d'être mise en pratique, d'être
transformée en réalité immédiate. Et la
plupart de ceux qui disent qu'ils ne
comprennent pas ou qu'il s'agit d'utopies et
autres, n'ont tout simplement pas le courage
de penser assez fort aujourd'hui pour que les
pensées puissent intervenir dans la réalité.
Ceux qui crient toujours "dictature du
prolétariat", "conquête du pouvoir",
"socialisme", pensent généralement très peu.
Il n'est donc pas possible d'intervenir dans
la réalité avec ces modèles de mots. Mais ils
viennent ensuite dire qu'on ne propose [avec
les "points essentiels"] que quelque chose qui
est une utopie. Ce n'est que dans l'esprit des
gens qui n'y comprennent rien que cela devient
une utopie.
74
C'est pourquoi il faudrait faire comprendre à
ces gens ce que Goethe a dit un jour, sous une
forme un peu différente et en se référant à
autre chose, en se moquant du physiologiste
Haller, qui était un naturaliste ossifié.
Haller avait inventé la parole :
75
aucun esprit créé ne pénètre à
l'intérieur de la nature.
Heureux celui à qui elle indique seulement
l'enveloppe extérieure ! Cela répugnait à
Goethe, et il disait : "À l'intérieur de la
nature" - ô philistin ! - "Aucun esprit créé
ne pénètre". "Heureux celui à qui elle indique
seulement l'enveloppe extérieure !" J'entends
cela se répéter depuis soixante ans, je le
maudis, mais en cachette.
La nature n'a ni noyau ni enveloppe, elle est
tout en une seule fois.
Examine-toi donc le plus possible pour savoir
si tu es le noyau ou la coquille !
76
Ceux qui parlent de la triarticulation de
l'organisme social comme d'une utopie, on
aimerait aussi leur dire : "Examine-toi
seulement si ce qui hante ton cerveau est
soi-même une utopie ou une réalité. -- On
trouvera alors que tous les corbeaux ont la
plupart du temps des utopies à l'intérieur et
que la réalité dans leur propre tête devient
donc aussi une utopie ou une idéologie, ou
comme ils l'appellent alors. C'est pourquoi il
est si difficile aujourd'hui de faire passer
la réalité, parce que les gens se sont
tellement barré l'accès à la réalité.
77
Mais nous devons nous dire que nous devons
travailler sérieusement, sinon nous ne
pourrons pas passer de notre volonté à
l'action ; et c'est ce qui importe, que nous
passions de notre volonté à l'action. Et si
nous devions renoncer à tout, parce que nous
le reconnaissons comme une erreur, alors nous
devrions, pour pouvoir passer du vouloir à
l'action, nous tourner vers la vérité, que
nous voulons percer à jour en tant que vérité,
car rien d'autre ne peut conduire du vouloir à
l'action que la poursuite impitoyable et
courageuse de la vérité. Cela devrait en fait
être écrit comme une devise, comme un slogan,
avant les études de ces soirées. Je voulais
vous présenter ce soir une préface à ces
soirées d'étude. J'espère que ce préambule ne
vous empêchera pas de cultiver ces études de
telle sorte qu'enfin, avant qu'il ne soit trop
tard, des pensées qui portent en elles des
germes d'action puissent s'insérer dans le
monde de manière fructueuse.
78
Nous aurons l'occasion d'en discuter.
79
Rudolf Steiner : Le livre "Les points
essentiels de la question sociale" est écrit
d'une manière particulière, et ce pour deux
raisons : premièrement, il est écrit de telle
manière qu'il est en fait entièrement tiré de
la réalité. Certaines personnes qui lisent le
livre n'y pensent pas. Je peux aussi
comprendre que cela ne soit pas pleinement
pris en compte aujourd'hui. J'ai déjà parlé
ici, dans ce cercle - mais tous ceux qui sont
là aujourd'hui n'étaient pas présents - de la
façon dont les gens pensent vraiment
aujourd'hui. J'ai notamment fait référence à
l'exemple du professeur d'économie nationale,
Lujo Brentano, qui l'a si bien présenté dans
le dernier numéro de la "Feuille jaune" ; je
veux le répéter brièvement, car je veux m'y
rattacher un peu. Cette lumière de la théorie
d'économie politique/de peuple actuelle de
l'université - il est le premier, pour ainsi
dire - a développé le concept d'entrepreneur
et a tenté de caractériser les
caractéristiques de l'entrepreneur à partir de
sa pensée éclairée. Je n'ai pas besoin
d'énumérer la première et la deuxième
caractéristique ; la troisième est que
l'entrepreneur est celui qui met ses moyens de
production au service de l'ordre social à son
propre compte et à ses propres risques. Il a
maintenant cette notion d'entrepreneur, et il
l'applique. Il arrive alors à l'étrange
résultat que l'ouvrier prolétarien
d'aujourd'hui est en fait aussi un
entrepreneur, car il correspond à son concept
d'entrepreneur en ce qui concerne la première,
la deuxième et la troisième caractéristique.
Car l'ouvrier a sa propre force de travail
comme moyen de production ; il en dispose, et
par rapport à celle-ci, il s'adresse au
processus social à son propre compte et à ses
propres risques. - Ainsi, cette lumière de
l'économie de peuple intègre très bien le
concept de travailleur prolétarien dans son
concept d'entrepreneur. Vous voyez, c'est
ainsi que pensent justement les humains qui se
font des concepts qui n'ont aucun sens ; ils
n'ont aucun sens si l'on exige des concepts
qui doivent être réellement applicables à la
réalité. Mais même si vous ne l'acceptez
peut-être pas, on peut dire tranquillement que
plus de quatre-vingt-dix pour cent de tout ce
qui est enseigné ou imprimé aujourd'hui
utilise de tels concepts ; si on veut les
appliquer à la réalité, cela ne marche pas
plus que le concept d'entrepreneur de Lujo
Brentano. C'est ainsi dans la science, c'est
ainsi dans la science sociale, c'est ainsi
partout, c'est pourquoi les gens ont désappris
à comprendre ce qui travaille avec des
concepts conformes à la réalité.
80
Prenez par exemple la base de la
triarticulation de l'organisme social.
N'est-ce pas, on peut les poser de différentes
manières, ces bases, parce que la vie a besoin
de nombreuses bases. Mais l'une d'entre elles
est que l'on sait que l'époque récente a vu
l'émergence de ce que l'on pourrait appeler
l'impulsion de la démocratie. La démocratie
doit consister en ce que tout humain devenu
majeur puisse établir son rapport de droit
dans des parlements démocratiques, directement
ou indirectement par rapport à tout autre
humain devenu majeur. Mais justement, si l'on
veut honnêtement et sincèrement instaurer
cette démocratie dans le monde, on ne peut pas
gérer les affaires spirituelles dans le sens
de cette démocratie, car chaque humain devenu
majeur devrait alors décider de ce qu'il ne
comprend pas. Les affaires spirituelles
doivent être réglées à partir de la
compréhension de la chose, c'est-à-dire
qu'elles doivent être placées sur elles-mêmes
; elles ne peuvent donc absolument pas être
administrées dans un parlement démocratique,
mais elles doivent avoir leur propre
administration, qui ne peut pas être
démocratique, mais qui doit être issue de la
chose. Il en va de même dans la vie de
l'économie ; la chose doit être gérée à partir
de l'expérience économique et du vivre dedans
la vie de l'économie. C'est pourquoi la vie de
l'économie d'un côté et la vie de l'esprit de
l'autre doivent être séparées du parlement
démocratique. C'est ainsi que naît l'organisme
social triarticulé.
81
Là y a maintenant à Tübingen le professeur
Heck, c'est lui - j'en ai déjà parlé - qui a
dit qu'il ne fallait absolument pas se laisser
aller à dire que le rapport salarial habituel,
où l'on est rémunéré pour son travail, avait
quelque chose d'humiliant pour le prolétaire,
car Caruso était aussi dans un rapport
salarial. La différence ne serait pas de
principe : Caruso chante et reçoit son
salaire, et le prolétaire ordinaire travaille
et reçoit aussi son salaire ; et lui, en tant
que professeur, reçoit aussi son salaire
lorsqu'il donne une conférence. La seule
différence entre Caruso et le prolétaire
serait que Caruso reçoit trente à quarante
mille marks pour une soirée et le prolétaire
un peu moins. Mais il ne s'agit pas d'une
différence de principe, seulement d'une
différence concernant la somme de la
rémunération. Et donc, selon ce professeur
plein d'esprit, on n'a pas besoin de ressentir
quelque chose de dégradant dans la
rémunération ; lui non plus ne le ressent pas
ainsi. - Ce n'est qu'une parenthèse. Mais ce
professeur intelligent a également écrit un
long article contre la triarticulation. Là, il
part de ce que si l'on articule en trois, on
en arrive à trois parlements. - Et maintenant,
il montre que ce n'est pas possible avec trois
parlements, car il dit : dans le parlement
économique, le petit artisan ne comprendra pas
le point de vue du grand industriel, et ainsi
de suite. - C'est là que le bon professeur
s'est fait ses idées sur la triarticulation,
et contre ces idées - que je trouve encore
bien plus stupides que le professeur Heck ne
les trouve ; je les critiquerais aussi jusqu'à
la moelle -, il s'en prend à elles, mais il
les a faites lui-même. Il s'agit en effet de
ne pas juxtaposer trois parlements, mais d'en
retirer ce qui n'a pas sa place dans un
parlement. Il fait simplement trois parlements
et dit : ce n'est pas possible. - C'est ainsi
que l'on vit dans des concepts étrangers à la
réalité et que l'on juge les autres en
fonction de ceux-ci.
082
Maintenant, dans l'économie nationale, la
théorie d'économie de peuple, est presque
seulement inclus ce que sont des concepts
irréels. Mais, voyez-vous, je ne pourrais pas,
maintenant que le temps presse, écrire une
bibliothèque entière dans laquelle seraient
répertoriés tous les concepts d'économie de
peuple. C'est pourquoi se trouve naturellement
dans les "points essentiels" une multitude de
concepts qui doivent être abordés/discutés de
manière appropriée. Il me suffit par exemple
d'attirer l'attention sur ce qui suit :
83
N'est-il pas vrai qu'à une époque que nous
avons dépassée, les relations sociales étaient
essentiellement le fruit de la conquête ? Un
territoire quelconque était occupé par un
peuple ou une race ; un autre peuple faisait
irruption et conquérait le territoire. Les
races ou les peuples qui étaient auparavant à
l'intérieur ont été soumis au travail. Le
peuple conquérant a pris le sol en possession,
ce qui a créé un certain rapport entre les
conquérants et les conquis. Les conquérants,
du fait qu'ils étaient des conquérants,
avaient le sol en possession. De ce fait, ils
étaient les plus forts économiquement, les
conquis étaient les plus faibles
économiquement, et il s'en est formé ce qui
est devenu un rapport de droit. C'est
pourquoi, à presque toutes les époques
anciennes de l'évolution historique, on a des
rapports de droit fondés sur des conquêtes,
c'est-à-dire des privilèges et des droits de
désavantage. Les temps sont maintenant venus
où il n'était plus possible de conquérir
librement. Vous pouvez étudier la différence
entre la conquête libre et la conquête liée en
regardant par exemple le début du Moyen Âge.
Vous pouvez étudier comment certains peuples,
les Goths, sont descendus vers le sud, mais
dans des régions entièrement occupées ; ils
ont alors été amenés, en ce qui concerne
l'ordre social, à faire autre chose que les
Francs, qui sont allés vers l'ouest et n'y ont
pas trouvé de régions entièrement occupées.
Cela a donné naissance à d'autres droits de
conquête. À l'époque moderne, ce ne sont pas
seulement les droits fonciers issus des
conquêtes qui ont agi, mais aussi les droits
des humains qui avaient des privilèges de
possession et qui pouvaient désormais
s'approprier les moyens de production grâce au
pouvoir économique. La possession des moyens
de production, c'est-à-dire la propriété
privée des capitaux, s'est ajoutée au droit
foncier au sens actuel du terme. Cela a donné
lieu à des rapports de droit issus de rapports
économiques. Comme vous le voyez, ces rapports
de droit sont nés tout seuls à partir de
rapports économiques.
84
Maintenant, les humains viennent et veulent
des notions de pouvoir économique,
d'importance économique de la terre, ils
veulent des concepts de moyens d'exploitation,
de moyens de production, de capitaux, etc.,
mais ils n'ont pas vraiment de compréhension
profonde du cours des choses. Ils prennent
alors les faits superficiels et n'arrivent pas
à comprendre ce qui se cache derrière les
droits fonciers, derrière les rapports de
force en ce qui concerne les moyens de
production. Bien sûr, toutes ces choses sont
prises en compte dans mon livre. Là est pensé
correctement ; là est, quand est parlé de
droits, à partir de la conscience de la
manière dont le droit s'est développé à
travers les siècles ; quand on parle de
capital, on parle de la conscience de comment
dont le capital est devenu. Là est évité
soigneusement d'utiliser un concept qui n'est
pas entièrement saisi à partir de sa genèse ;
c'est pourquoi ces concepts se présentent
différemment que dans les manuels habituels
d'aujourd'hui.
085
Mais aussi quelque chose d'autre est pris en
compte. Prenons un fait précis, n'est-ce pas,
le fait que le protestantisme est né un jour.
Dans les livres d'histoire, on raconte très
souvent que Tetzel a parcouru l'Europe
centrale et que les gens étaient indignés par
la vente des indulgences et autres choses de
ce genre. Mais ce n'était pas seulement cela,
ce n'est qu'une vision superficielle.
L'élément principal était le fait qu'il y
avait à Gênes une banque pour le compte de
laquelle - et non pour le compte du pape - ce
marchand d'indulgences se déplaçait en
Allemagne, car cette banque avait accordé des
crédits au pape pour ses autres besoins. Toute
cette histoire était une entreprise
capitaliste. Cet exemple du commerce des
indulgences en tant qu'entreprise capitaliste,
où même le spirituel a été négocié, vous
permet d'étudier - ou plutôt, si l'on commence
à étudier, on arrive peu à peu à la conclusion
- que finalement, tout pouvoir du capital se
ramène à la suprématie du spirituel. Si vous
étudiez comment le capital a acquis son
pouvoir, vous trouverez partout la suprématie
du spirituel. Et c'est vraiment ainsi.
N'est-ce pas, celui qui est intelligent, celui
qui est débrouillard, a un pouvoir plus grand
que celui qui n'est pas intelligent, qui n'est
pas débrouillard. Et c'est ainsi que naissent,
de façon justifiée ou non, beaucoup de choses
qui sont des concentrations de capital. Il
faut en tenir compte lorsqu'on envisage le
concept de capital. Ces études réelles
permettent de comprendre que le capital repose
sur le développement du pouvoir spirituel et
que le pouvoir de l'ancien esprit théocratique
est venu s'ajouter aux droits fonciers, aux
droits de conquête, d'un autre côté.
L'ancienne Église est à l'origine d'une grande
partie de ce qui a ensuite été transféré dans
le capitalisme moderne. Il existe un lien
secret entre le pouvoir capitaliste moderne et
le pouvoir de l'ancienne Église. Et tout cela
s'est rassemblé en un méli-mélo dans l'État de
pouvoir moderne. Là-dedans, vous trouvez les
restes de l'ancienne théocratie, les restes
des anciennes conquêtes. Et finalement, les
conquêtes modernes sont venues s'y ajouter, et
la conquête la plus moderne serait maintenant
la conquête de l'État par le socialisme. Mais
en réalité, ce n'est pas ainsi qu'il faut
procéder. Il doit y avoir quelque chose de
nouveau, qui fasse complètement table rase de
ces anciens concepts et impulsions. C'est
pourquoi il est important que nous nous
penchions aussi, dans nos études, sur les
notions qui sont à la base de tout cela. Nous
devons aujourd'hui expliquer précisément à
tous ceux qui veulent parler de choses
sociales ce qu'est le droit, ce qu'est le
pouvoir et ce qui est en réalité un bien
[économique], un bien sous forme de
marchandises et autres. C'est dans ce domaine
que les plus grandes erreurs sont commises. Je
veux par exemple attirer votre attention sur
l'une d'entre elles ; si vous n'y êtes pas
attentifs, vous comprendrez mal beaucoup de
choses dans mon livre.
086
Aujourd'hui, on pense souvent que la
marchandise est du travail stocké, que le
capital est aussi du travail stocké. - Vous
pouvez dire qu'il est inoffensif d'avoir de
telles notions. Ce n'est pas inoffensif, car
de tels concepts empoisonnent toute la pensée
sociale. Vous voyez, qu'en est-il du travail -
le travail en tant que dépense/application de
force de travail ? Oui, il y a une grande
différence entre, par exemple, utiliser ma
force musculaire physique en faisant du sport
et couper du bois. Si je fais du sport, j'use
ma force musculaire physique ; je peux être
aussi fatigué et devoir remplacer ma force
musculaire autant que celui qui coupe du bois.
Je peux appliquer la même quantité de travail
au sport qu'à la coupe de bois. La différence
ne réside pas dans le fait que la force de
travail doit être remplacée - elle doit bien
sûr être remplacée - mais dans le fait que
l'une des forces de travail est utilisée
uniquement pour moi, dans un sens égoïste,
l'autre dans un sens social pour la société.
C'est la fonction sociale qui différencie ces
choses. Si je dis maintenant que quelque chose
est du travail accumulé, je ne tiens pas
compte du fait que le travail cesse en fait
d'être dans une chose quelconque au moment où
l'on ne travaille plus. Je ne peux pas dire
que le capital est du travail accumulé, mais
je dois dire que le travail n'existe que tant
qu'il est effectué. Mais dans notre ordre
social actuel, le capital conserve le pouvoir
d'appeler à nouveau le travail à tout moment.
Ce n'est pas dans le fait que le capital soit
du travail accumulé que réside la fatalité,
comme le pense Marx, mais dans le fait que le
capital donne le pouvoir d'appeler à son
service un nouveau travail - non pas un
travail accumulé - mais un nouveau travail. Il
dépend beaucoup de cela, et il dépendra encore
beaucoup de cela, que l'on parvienne à des
notions claires, fondées sur la réalité, sur
ces choses. Et c'est à partir de telles
notions, qui sont maintenant totalement
ancrées dans la réalité, que ce livre est
écrit. Il ne tient pas compte de ces notions,
qui étaient tout à fait utiles pour
l'éducation du prolétariat. Mais aujourd'hui,
alors que l'on doit construire quelque chose,
ces notions n'ont plus de sens.
87
Vous voyez, quand je dis que le capital est du
travail accumulé, c'est bon pour l'éducation
du prolétariat ; il a reçu les sentiments
qu'il devait recevoir. Il n'était pas
important que le concept soit fondamentalement
faux - on peut éduquer même avec des concepts
fondamentalement faux. Mais on ne peut
construire quelque chose qu'avec des concepts
corrects. C'est pourquoi nous avons
aujourd'hui besoin de concepts corrects dans
tous les domaines de l'économie de peuple et
nous ne pouvons pas continuer à travailler
avec des concepts erronés. Ce n'est pas par
frivolité que je dis que l'on peut aussi
éduquer avec des concepts erronés, mais en
vertu des principes généraux de l'éducation.
Vous voyez, lorsque vous racontez des contes
de fées aux enfants, vous ne voulez pas non
plus construire avec ces choses que vous
développez ; dans l'éducation, quelque chose
d'autre entre en ligne de compte que ce qui
entre en ligne de compte pour la construction
dans la réalité physique. Il faut travailler
avec des concepts réels. Un concept tel que
"le capital est du travail accumulé" n'est pas
un concept. Le capital est un pouvoir et
confère le pouvoir de mettre à tout moment à
son service le travail qui se crée. C'est un
vrai concept avec une logique de fait. Il faut
travailler avec des concepts vrais dans ces
domaines. C'est ce qui a été tenté dans les
"points essentiels". C'est pourquoi je pense
qu'une grande partie de ce qui n'y figure pas
en termes de définition des termes, de
caractéristiques des termes, doit être
élaborée. Et celui qui peut contribuer à
l'élaboration de ce dont on a besoin pour
comprendre le mode de pensée, la base de ce
livre, apportera une très bonne contribution à
ces soirées d'étude. C'est donc ce qui compte,
mes très chers présents, c'est ce qui compte
tout particulièrement.
88
Oui, n'est-ce pas, il faudrait écrire un
dictionnaire si l'on voulait clarifier tous
les termes - mais ce qu'est le "capital" peut
maintenant être réglé en une seule soirée
d'étude de ce genre. Sans que l'on ait
clairement compris aujourd'hui : qu'est-ce que
le capital ? Qu'est-ce que la marchandise ?
Qu'est-ce que le travail ? Qu'est-ce que le
droit ? -, sans ces notions, on ne peut pas
avancer. Et ces notions sont tout à fait
confuses dans les cercles les plus larges ;
elles doivent avant tout être rectifiées.
Aujourd'hui, on se désespère quand on parle de
l'ordre social avec des gens ; ils ne peuvent
pas participer parce qu'ils n'ont pas appris à
maîtriser la réalité. C'est ce qu'il faut
faire.
|