Allez dans les communautés primitives, vous verrez
qu’il s’y trouve encore autre chose que le seul
langage. Le langage a son siège dans l’homme
supérieur. Considérez l’être humain dans sa totalité,
vous trouvez ce qui, dans les communautés primitives,
lie les êtres entre eux ; c’est le sang commun à
tous. Les liens du sang maintiennent les humains en
une communauté. Mais dans le sang vit l’âme-groupe,
l’esprit-groupe, que l’on ne rencontre pas sous cette
forme chez des êtres libres. Dans un ensemble d’êtres
humains unis par les liens du sang a pénétré un
élément spirituel commun, venant en quelque sorte d’en
bas. Là où un sang commun coule dans les veines d’un
certain nombre d’hommes, un esprit-groupe est présent.
Par ce que nous vivons en commun aussi, lorsque nous
nous ouvrons ensemble à l’anthroposophie, peut être
cultivé non pas un tel esprit-groupe de par le sang,
il est vrai, mais un esprit de communauté réel. Si
nous sommes capables de ressentir cela, nous nous
unissons, humains que nous sommes, pour former de
véritables communautés. Il nous faut seulement
réaliser l'anthroposophie, la réaliser en sachant
faire naître dans nos communautés anthroposophiques
une conscience telle que lorsque les êtres se
rencontrent en vue d’un travail anthroposophique
commun chacun s’éveille au contact de l’être spirituel
et de l’âme de l’autre. Les humains s’éveillent au
contact les uns des autres, et venant à se retrouver
constamment, ils s’éveillent, chacun ayant entre temps
fait d’autres expériences, ayant progressé, et se
retrouvant l’un l’autre transformés. C’est un éveil au
sein d’une vie germant et florissante. Et quand vous
avez trouvé la possibilité pour les âmes humaines de
s’éveiller les unes aux autres, et les esprits humains
les uns au contact des autres, la possibilité de vous
rendre dans les communautés anthroposophiques habités
par cette conscience vivante : Nous nous
éveillons parce que nous avons, maintenant seulement,
compris ensemble l’anthroposophie — quand appuyés sur
cette compréhension, vous vous ouvrez aux idées
anthroposophiques avec une âme éveillée — et non pas
avec l’âme de tous les jours qui dort, ignorante des
réalités supérieures — alors descend sur le lieu de
votre activité une spiritualité commune réelle.
Sommes-nous dans la vérité, lorsque nous parlons du
monde suprasensible et restons incapables de nous
hisser jusqu’à atteindre à cette spiritualité réelle,
d’accomplir ce culte inversé ? Nous ne sommes
vraiment capables de saisir, d’appréhender le
spirituel que lorsque nous en avons non seulement une
idée abstraite et pouvons la formuler théoriquement, y
compris pour nous-mêmes, mais que nous pouvons croire
— et croire sur la base d’une foi qui démontre — que
dans l’appréhension du spirituel, les esprits forment
avec nous une communauté spirituelle. Vous ne pouvez
pas provoquer la naissance d’une communauté
anthroposophique par des institutions extérieures. Il
faut qu’elle naisse des sources les plus profondes de
la conscience humaine elle-même.
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