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Collection/Sammlung: 083 - CONGRES OUEST - EST



TROISIÈME CONFÉRENCE

ANTHROPOSOPHIE ET ORIENTATION MONDIALE

Vienne, le 3 juin 1922

DRITTER VORTRAG

ANTHROPOSOPHIE UND UND WELTORIENTIERUNG

Wien, 3. Juni 1922

 


 

Les références Rudolf Steiner Œuvres complètes ga 083 079-107 (1981) 03/06/1922


Original





Aujourd'hui ce serait peut-être : de l'immédiateté de l'éternité.




Mes très chers présents ! Goethe, qui a exprimé en expressions simples tant de grandes choses qui font bouger les humains, a aussi écrit cette phrase : " Que chacun se demande quad même avec quel organe il peut en tout cas agir sur son temps et agira" ! Si on laisse agir sur soi une telle déclaration, avec tout ce dont on peut savoir que ça a pu traverser l'âme de Goethe, en faisant une telle déclaration, on est alors transporté dans tout le rapport de l'humain à la vie historique. Certes aujourd'hui encore, chez la plupart des humains cela se déroule, plus ou moins inconsciemment, qu'ils cherchent à gagner leur point de vue particulier, par lequel ils trouvent la possibilité d'employer leurs forces de la Faso correcte dans le cours de l'évolution de l'humanité, que cette mise en œuvre se fasse à partir de l'esprit de l'époque dans laquelle ils vivent. Mais on a bien la permission de dire qu'une observation même superficielle de la vie humaine dans son évolution montre que les humains sont finalement obligés d'organiser leur vie de manière de plus en plus consciente. La vie instinctive était la caractéristique des anciennes époques de culture. Le passage à une conscience toujours plus grande est aussi un facteur historique. Et à l'heure actuelle, on peut déjà sentir comment la vie, devenue de plus en plus compliquée, exige de l'humain qu'il se place avec un certain degré de conscience, même s'il occupe une place peut-être encore peu remarquable, dans l'évolution de l'humanité. Seuls tout de suite lors de l'aspiration à un tel point de vue, nous avons aujourd'hui encore peu de points de repère dans l'observation de l'évolution historique de l'humanité.

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Meine sehr verehrten Anwesenden! Goethe, der so vieles großes Menschenbewegende in einfache Ausdrücke geprägt hat, schrieb auch den Satz nieder: «Frage sich doch jeder, mit welchem Organ er allenfalls in seine Zeit einwirken kann und wird!» Läßt man einen solchen Ausspruch — mit all dem, wovon man wissen kann, daß es durch Goethes Seele gezogen sein könnte, indem er einen solchen Ausspruch tat — auf sich wirken, so wird man hineinversetzt in das ganze Verhältnis des Menschen zum geschichtlichen Leben. Gewiß verläuft das heute noch bei den meisten Menschen mehr oder weniger unbewußt, daß sie suchen, ihren besonderen Standpunkt zu gewinnen, durch den sie die Möglichkeit finden, in der rechten Art ihre Kräfte so einzusetzen im Entwickelungsgang der Menschheit, daß dieses Einsetzen aus dem Geist der Epoche heraus geschieht, in der sie leben. Aber man darf wohl sagen: eine schon oberflächliche Betrachtung des menschlichen Lebens in seiner Entwickelung zeigt, daß die Menschen schließlich darauf angewiesen sind, immer bewußter und bewußter ihr Leben zu gestalten. Das instinktive Leben war das Kennzeichen alter Kulturepochen. Der Übergang zu einer immer größeren Bewußtheit ist auch ein geschichtlicher Faktor. Und in der Gegenwart kann man schon fühlen, wie das immer komplizierter und komplizierter gewordene Leben von dem Menschen fordert, daß er mit einem gewissen Grad von Bewußtsein sich hineinstelle, wenn er auch auf einem vielleicht noch so wenig bemerkenswerten Platz steht, in die Entwickelung der Menschheit. Allein gerade bei dem Streben nach einem solchen Standpunkt haben wir im Grunde heute noch wenig Anhaltspunkte an der Betrachtung der geschichtlichen Entwickelung der Menschheit.

Cette observation de l'évolution historique de l'humanité, dans le sens le plus récent d'une science, n'est en fait pas encore très ancienne. Et on aimerait dire que l'on ressent la jeunesse de l'observation historique dans ce qui vient justement de se manifester dans l'historiographie.

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Diese Betrachtung der geschichtlichen Entwickelung der Menschheit im neueren Sinn einer Wissenschaft ist eigentlich noch nicht besonders alt. Und man möchte sagen, man verspürt die Jugend der geschichtlichen Betrachtung in dem, was eben in der Geschichtsschreibung zutage getreten ist.

Cette historiographie a produit de grandes choses. En se développant à partir de l'écriture non scientifique des chroniques qui régnait encore au XIXe siècle, elle a essayé, parce qu'elle est tombée dans l'ère de science de la nature, de prendre de plus en plus aussi des formes de science de la nature. Et c'est ainsi que nous voyons que l'approche historique s'est de plus en plus rapprochée de l'idée que ce qui suit devrait toujours être compris de manière causale à partir de ce qui précède. Mais celui qui est suffisamment impartial peut voir que, bien qu'une telle considération causale de la vie historique de l'humanité mène loin, il reste encore d'innombrables faits de cette vie historique qui ne peuvent pas être rangés sans contradiction dans une simple considération des causes. Et alors vous apparaît volontiers une image qui peut pourvoir de sens la vie historique : l'image d'un courant s'écoulant chez lequel nous ne pourrions cependant pas toujours déduire ce qui se trouve à un certain point du cours de ce qui se trouve un peu plus en amont, mais nous devrions tenir compte du fait que dans ses profondeurs agissent toutes sortes de forces qui peuvent en tout lieu se presser à la surface, soulever des vagues qui ne sont pas conditionnées par celles qui les précèdent.

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Diese Geschichtsschreibung hat Großartiges hervorgebracht. Allein indem sie sich aus der ja sogar im 18. Jahrhundert noch herrschenden unwissenschaftlichen Chronikenschreibung herausentwickelte, versuchte sie, weil sie in das naturwissenschaftliche Zeitalter hineinfiel, immer mehr und mehr auch naturwissenschaftliche Formen anzunehmen. Und so sehen wir, daß sich die geschichtliche Betrachtungsweise mehr und mehr der Anschauung genähert hat, daß immer das Folgende aus dem Vorhergehenden ursächlich begriffen werden müsse. Aber wer unbefangen genug ist, kann sehen, daß zwar eine solche ursächliche Betrachtung des geschichtlichen Lebens der Menschheit weit führt, daß aber immer noch zahllose Tatsachen dieses geschichtlichen Lebens bleiben, die sich nicht widerspruchslos einreihen lassen in eine einfache Ursachenbetrachtung. Und dann erscheint einem wohl ein Bild, das versinnlichen kann das geschichtliche Leben: das Bild eines fortfließenden Stromes, bei dem wir aber dasjenige, was an einem bestimmten Punkte seines Laufes ist, nicht immer bloß herleiten könnten aus dem, was ein wenig weiter stromaufwärts ist, sondern bei dem wir Rücksicht darauf nehmen müßten, daß in seinen Tiefen allerlei von Kräften waltet, die sich an jeder Stelle an die Oberfläche drängen können, Wellen aufwerfen können, die nicht durch die vorhergehenden bedingt sind.

C'est ainsi que la vie historique de l'humanité nous semble indiquer des profondeurs indicibles, nous apparaît comme une surface sur laquelle s'élèvent des forces incommensurables. Et la contemplation humaine ne peut guère avoir la prétention de voir en détail tout ce qui est particulièrement particulier à une époque donnée. C'est pourquoi l'observation historique devra de plus en plus se rapprocher de ce que j'aimerais appeler une observation symptomatologique. Nous devons donc aussi constater l'état de santé et de maladie de l'organisme humain, qui est une totalité si richement différenciée, en observant les symptômes par lesquels cet organisme se manifeste. De même, nous devons sans doute nous habituer peu à peu à pratiquer une symptomatologie historique : de comprendre ce qui s'annonce à la surface de telle sorte que cela nous indique des choses isolées et que, grâce à des symptômes de plus en plus nombreux que nous saisissons dans notre vision, nous en venions à laisser agir sur nous le vivant intérieur du devenir historique de telle sorte que, grâce à la saisie psychique/d'âme intérieure des forces historiques de l'humanité, qui agissent aussi dans notre âme par toutes sortes de détours, nous soyons en mesure de trouver notre place dans l'évolution de l'humanité.

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So scheint wohl auch das geschichtliche Leben der Menschheit hineinzuweisen in unsägliche Tiefen, erscheint uns wie eine Oberfläche, an die heraufstoßen unermeßlich viele Kräfte. Und die menschliche Betrachtung kann sich wohl kaum vermessen, in all das etwa restlos hineinzuschauen, was irgendeiner Epoche besonders eigentümlich ist. Daher wird sich wohl die geschichtliche Betrachtung immer mehr und mehr dem nähern müssen, was ich nennen möchte eine symptomatologische Betrachtung. Wir müssen ja auch am menschlichen Organismus, der eine so reichlich in sich differenzierte Totalität ist, vieles von seinem gesunden und kranken Zustand dadurch konstatieren, daß wir auf die Symptome sehen, in denen sich dieser Organismus äußert. Ebenso müssen wir uns wohl nach und nach gewöhnen, eine geschichtliche Symptomatologie zu treiben: was sich an der Oberfläche ankündigt, so aufzufassen, daß es uns auf einzelnes hindeutet und wir durch immer mehr und mehr Symptome, die wir in unsere Anschauung hereinbegreifen, dazu kommen, das innerlich Lebendige des geschichtlichen Werdens so auf uns wirken zu lassen, daß wir durch das innerlich seelische Ergreifen der geschichtlichen Kräfte der Menschheit, die ja auf allerlei Umwegen auch in unsere Seele wirken, befähigt werden, unseren Platz in der Menschheitsentwickelung zu finden.

C'est tout de suite une telle observation du monde et de la vie, tel que j'ai eu la permission de la développer devant vous, qui peut vous faire ressentir à quel point les symptômes historiques s'expriment aussi dans ce qu'on vit au plus intime de son être. C'est tout de suite ce que je vous ai décrit, l'éveil et le réveil de facultés de connaissance qui ne sont pas disponibles dans la conscience ordinaire, mais qui, dans la vie ordinaire, sommeillent au plus profond de l'âme, c'est précisément cet éveil et ce réveil de facultés de connaissance, tels qu'ils conviennent à l'humain moderne, qui nous amène à comprendre que nous devons non seulement développer ces facultés de connaissance dans le présent d'une manière différente de ce qu'elles ont été dans le monde antérieur.

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Gerade eine solche Betrachtung der Welt und des Lebens, wie ich sie vor Ihnen entwickeln durfte, kann einem so recht die Empfindung davon beibringen, wie sich auch in dem, was man in seinem intimsten Innern erlebt, geschichtlich Symptomatisches ausspricht. Gerade das was ich Ihnen geschildert habe, das Erwachen und Erwecken von Erkenntnisfähigkeiten, die im gewöhnlichen Bewußtsein nicht vorhanden sind, sondern die im gewöhnlichen Leben tief unten in der Seele schlummern, gerade dieses Erwachen und Erwecken von Erkenntniskräften, wie es dem modernen Menschen angemessen ist, führt uns dazu, einzusehen, daß wir diese Erkenntniskräfte in der Gegenwart nicht nur anders entwickeln müssen, als sie in der Vorwelt entwickelt worden sind.

Mais si nous développons de telles forces, si nous menons cette vie intérieure intime jusqu'à une vision spirituelle, alors le caractère fondamental de cette vision spirituelle se présente à l'humain d'aujourd'hui d'une tout autre manière qu'il ne se présentait aux humains de l'antiquité orientale, par exemple, à laquelle nous avons touché lorsque nous avons décrit avant-hier l'exercice du yoga.

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Sondern wenn wir dann solche Kräfte entwickeln, wenn wir dieses intime innere Leben bis zu einem geistigen Schauen führen, dann stellt sich für den heutigen Menschen der Grundcharakter dieses geistigen Schauens doch in einer ganz anderen Weise dar, als er sich dargestellt hat für Menschen zum Beispiel des orientalischen Uraltertums, an das wir gerührt haben, als vorgestern die Jogaübung geschildert worden ist.

Si nous jetons un coup d'œil vers ces anciennes façons de voir orientales, telles qu'elles ont été développées par ceux qui voulaient expulser de leur intérieur des forces de connaissance qui accèdent au suprasensible, nous devons dire que tout ce que nous savons à ce sujet nous indique que de telles connaissances, en s'installant dans l'âme, ont pris un caractère absolument permanent, durable dans l'âme. Ce que l'humain pense dans la vie ordinaire, ce qu'il absorbe comme l'effet sur son âme des expériences de l'existence terrestre, ce qui se fixe ensuite dans les souvenirs, c'est ce qui a une durée dans l'âme ; et nous ne sommes tout simplement pas sains d'esprit si nous avons des lacunes considérables dans la capacité de nous souvenir de ce que nous avons vécu dans le monde à partir d'un certain moment de notre évolution dans l'enfance. Tout ce qui a été acquis dans l'ancienne culture orientale de l'âme en matière de compréhension du monde spirituel s'est intégré/articulé/membré dans cette durée de la pensée. Cela formait pour ainsi dire des représentations de souvenir, comme les expériences ordinaires de la journée forment des représentations de souvenir. C'était précisément la particularité du voyant oriental plus âgé que de se retrouver de plus en plus dans une vie communautaire permanente avec le monde spirituel, en accomplissant son chemin dans ce monde. Il se savait pour ainsi dire en sécurité une fois qu'il était dans le monde divin-spirituel. Il savait que celui-ci représentait quelque chose de durable pour son âme aussi.

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Wenn wir hinblicken nach diesen alten orientalischen Anschauungen, wie sie entwickelt worden sind von denjenigen, die aus ihrem Inneren Erkenntniskräfte, die in das Übersinnliche hineingreifen, heraustreiben wollten, so müssen wir sagen: Alles was wir darüber wissen, weist uns darauf hin, daß solche Erkenntnisse, indem sie in die Seele sich einlebten, durchaus einen bleibenden, einen dauernden Charakter in der Seele annahmen. Was der Mensch im gewöhnlichen Leben denkt, was er in sich aufnimmt als die Wirkung auf seine Seele aus den Erlebnissen des irdischen Daseins, was sich dann in Erinnerungen festsetzt, ist das, was in der Seele eine Dauer hat; und wir sind einfach geistig nicht gesund, wenn wir Lücken erheblicher Art haben in bezug auf die Erinnerungsfähigkeit an das, was wir von einem bestimmten Zeitpunkt unserer Kindheitsentwickelung an in der Welt erlebt haben. In diese gedankliche Dauer gliederte sich alles das ein, was in alter orientalischer Seelenkultur an Einsichten in die geistige Welt errungen wurde. Es bildete sozusagen so Erinnerungsvorstellungen, wie die gewöhnlichen Erlebnisse des Tages Erinnerungsvorstellungen bilden. Das war gerade das Eigentümliche des älteren orientalischen Sehers, daß er sich immer mehr und mehr in ein dauerndes Gemeinschaftsleben mit der geistigen Welt hineinfand, indem er seinen Weg in diese Welt hinein absolvierte. Er wußte sich sozusagen geborgen, wenn er einmal drinnen war in der göttlich-geistigen Welt. Er wußte, daß diese etwas Dauerndes auch für seine Seele darstellt.

Or, dans un certain sens, on peut dire que c'est le contraire qui se produit pour celui qui s'élève aujourd'hui à une certaine vision spirituelle à partir des forces de la nature humaine vers lesquelles l'humanité s'est développée depuis ces jours anciens jusqu'à nos jours : Il développe ses façon de voir sur le spirituel de telle sorte qu'il en fait l'expérience ; mais il lui est impossible d'en faire des représentations-souvenir de la même manière que les pensées que nous vivons au quotidien au monde extérieur deviennent des représentations-souvenir.

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Nun darf man aber in einem gewissen Sinne schon sagen, das Gegenteil ist für den der Fall, der sich heute aus den Kräften der Menschennatur heraus, zu denen sich die Menschheit eben seit jenen alten Tagen bis in die Gegenwart herauf entwickelt hat, zu einem gewissen geistigen Schauen erhebt: Er entwickelt seine Anschauungen über das Geistige so, daß er sie erlebt; aber er kann sie unmöglich in derselben Weise zu Erinnerungsvorstellungen machen, wie die Gedanken, die wir im Alltag an der Außenwelt erleben, Erinnerungsvorstellungen werden.

Pour beaucoup de ceux qui, selon les méthodes actuelles, parviennent à une certaine vision spirituelle, c'est une grande déception de constater qu'ils obtiennent certes des aperçus de ce monde spirituel, mais que ces aperçus sont passagers, comme la vision d'une réalité devant laquelle nous nous trouvons dans le monde extérieur et qui n'existe plus dans notre perception lorsque nous nous en éloignons. Ce qui se passe dans la vie de l'âme n'est pas une incorporation à la mémoire au sens habituel du terme, mais un lien instantané avec le monde spirituel. Si l'on veut retrouver ce lien plus tard, on ne peut pas simplement faire remonter l'expérience de la mémoire, mais on ne peut faire que ce qui suit : On peut bien sûr se souvenir de ce qui appartient aux expériences habituelles du monde physique, comment on s'est amené, par exemple, à travers des développements de forces, à avoir une telle expérience du monde spirituel. On peut alors refaire le chemin, et on peut l'avoir à nouveau, tout comme lorsqu'on revient à une perception sensorielle. C'est précisément l'un des moments les plus importants qui garantissent la réalité de la vision moderne : que ce dans quoi nous regardons ne s'unisse pas à notre corporéité ; car cela signifie toujours être uni à la corporéité, être fixé par l'organisme, lorsque les pensées acquièrent une certaine durée en tant que représentations-souvenirs.

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Das ist gerade für viele, die nach den heutigen Methoden sich zu einem gewissen geistigen Schauen hinringen, eine große Enttäuschung, daß sie zwar Einblicke gewinnen in diese geistige Welt, daß aber diese Einblicke vorübergehend sind wie das Anschauen einer Realität, vor der wir in der Außenwelt stehen, die auch nicht mehr in unserer Wahrnehmung vorhanden ist, wenn wir von ihr hinweggehen. Keine Einverleibung dem Gedächtnisse im gewöhnlichen Sinne ist es, was sich im Seelenleben abspielt, sondern ein augenblickliches Verbundensein mit der geistigen Welt. Will man dann in einem späteren Zeitpunkt dieses Verbundensein wieder haben, so kann man das Erlebnis nicht einfach aus der Erinnerung heraufholen, sondern man kann nur das Folgende machen: Man kann sich natürlich an das erinnern, was den gewöhnlichen Erlebnissen der physischen Welt angehört, wie man sich etwa durch Kräfteentwickelungen dahin gebracht hat, ein solches Erlebnis aus der geistigen Welt zu haben. Dann kann man den Weg wiederum machen, und man kann es wiederum haben, geradeso wie wenn man zu einer sinnlichen Wahrnehmung wiederum zurückkehrt. Das ist gerade eines der wichtigsten Momente, die verbürgen die Realität des modernen Schauens: daß sich das, in das wir hineinblicken, nicht mit unserer Leiblichkeit vereinigt; denn es heißt immer, mit der Leiblichkeit vereinigt, durch den Organismus befestigt werden, wenn Gedanken als Erinnerungsvorstellungen eine gewisse Dauer gewinnen.

Si j'ai la permission d'ajouter ici une remarque personnelle, peut-être pour un accord, c'est que quelqu'un qui est un peu en contact avec le monde spirituel et qui veut faire part de ce qu'il a vécu, n'est pas en mesure de faire cette communication au sens habituel du terme, à partir de sa mémoire. Il doit toujours faire certains efforts pour s'amener lui-même à l'observation spirituelle directe. C'est pourquoi même quelqu'un qui parle directement depuis le monde spirituel peut, je dirais, faire trente fois le même exposé : il ne sera pas pour lui une répétition du précédent, mais il doit toujours être extrait de l'expérience de manière directe.

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Wenn ich hier eine persönliche Bemerkung einfügen darf — vielleicht zu einer Verständigung —, so ist es diese: jemand, der ein wenig Verbindung hat mit der geistigen Welt und Mitteilung über das machen will, was er erfahren hat, ist nicht in der Lage, im gewöhnlichen Sinn aus der Erinnerung heraus diese Mitteilung zu machen. Er muß immer gewisse Anstrengungen machen, um sich wiederum selber zum unmittelbaren geistigen Beobachten hinzuführen. Daher kann auch jemand, der unmittelbar aus der geistigen Welt heraus spricht, ich möchte sagen, dreißigmal ein und denselben Vortrag halten: er wird für ihn nicht eine Wiederholung des vorangehenden sein, sondern er muß immer in unmittelbarer Weise aus dem Erlebnis herausgeholt werden.

En même temps, il y a là quelque chose dont je voudrais dire qu'il peut apaiser certaines inquiétudes qui pourraient surgir dans les âmes craintives/anxieuses/inquiètes face à cette vision moderne de l'esprit. Beaucoup de gens considèrent encore aujourd'hui, et avec une certaine raison, que la grandeur des questions énigmatiques et significatives de l'existence réside précisément dans le fait que ces questions ne peuvent jamais être résolues dépourvues de restes.

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Darin liegt zu gleicher Zeit etwas, von dem ich sagen möchte, daß es gewisse Sorgen, die auftauchen könnten in ängstlichen Seelen gegenüber dieser modernen Geistesschau, beheben kann. Viele Menschen sehen ja heute noch, und zwar mit einem gewissen Recht, die Größe der bedeutungsvollen Rätselfragen des Daseins gerade darin, daß diese Fragen niemals restlos gelöst werden können.

Elles craignent la philistrosité de la vision spirituelle si elles devaient être confrontées à l'affirmation que les énigmes de l'être peuvent être définitivement "résolues" par une quelconque vision du monde.

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Sie fürchten sich vor der Philistrosität der geistigen Anschauung, wenn sie etwa der Behauptung gegenüberstehen müßten, die Rätsel des Daseins könnten endgültig durch irgendeine Weltanschauung «gelöst» werden.

Or, la conception de la vie dont il est question ici ne peut pas non plus parler d'une telle "solution", et ce précisément pour la raison que nous venons d'indiquer : ce qui est en quelque sorte toujours oublié doit toujours être acquis à nouveau.

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Nun, von einer solchen «Lösung» kann auch die Lebensauffassung nicht sprechen, von der hier die Rede ist, und zwar gerade aus dem eben angegebenen Grund heraus: Was gewissermaßen immer wieder vergessen wird, das muß immer neu erworben werden.

Mais c'est tout de suite en cela que se montre la vitalité. Nous nous rapprochons en quelque sorte de ce qui se manifeste aussi extérieurement dans la nature comme le caractère du vivant, par rapport à ce que nous vivons habituellement intérieurement, en voyant nos pensées devenir des représentations de souvenir. Peut-être que pour certains, ce que je veux dire maintenant semble trivial ; mais ce n'est pas trivial. Pas plus que quelqu'un ne peut dire : j'ai mangé hier, je suis donc rassasié, je n'ai pas besoin de manger aujourd'hui, ni demain, ni plus tard -- de même, personne ne peut dire à l'égard de la vision moderne de l'esprit qu'elle est achevée une fois pour toutes, qu'elle se communique ensuite à la mémoire et que l'on sait désormais pour toujours ce que l'on a.

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Darin aber zeigt sich gerade die Lebendigkeit. Wir nahen uns gewissermaßen wieder dem, was sich auch äußerlich in der Natur als der Charakter des Lebendigen zeigt, gegenüber dem, was wir sonst innerlich erleben, indem wir unsere Gedanken zu Erinnerungsvorstellungen werden sehen. Vielleicht klingt es für manchen trivial, was ich jetzt sagen möchte; es ist aber nicht trivial gemeint. So wenig wie jemand sagen kann: Ich habe gestern gegessen, also bin ich satt, brauche heute und morgen und ferner nicht zu essen -- ebensowenig kann gegenüber der modernen Geistesschau jemand sagen, sie sei einmal abgeschlossen, teile sich dann der Erinnerung mit, und man wisse nun für alle Zeit das, was man hat.

Oui, ce n'est pas le seul cas où il faut toujours lutter à nouveau pour obtenir la présence de ce qui veut se révéler à l'homme, mais c'est même le cas où, si l'on rumine longtemps les mêmes représentations du monde spirituel, si on les cherche toujours à nouveau, des doutes apparaissent, des incertitudes surgissent, et que l'on doit toujours vaincre à nouveau les incertitudes et les doutes dans la vie intérieure vivante de l'âme, précisément dans la vision spirituelle correcte. On n'est donc jamais, j'aimerais dire, condamné à la tranquillité de l'être fini lorsqu'on aspire à la vision de l'esprit au sens moderne.

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Ja, nicht nur dies ist der Fall, daß man immer von neuem ringen muß, um gegenwärtig zu bekommen, was sich dem Menschen offenbaren will, sondern sogar das ist der Fall, daß, wenn man längere Zeit über denselben Vorstellungen aus der geistigen Welt immer wieder und wiederum brütet, sie immer wieder und wiederum aufsucht, daß dann sogar Zweifel auftauchen, Ungewißheiten auftauchen, und daß man die Ungewißheiten und Zweifel im lebendigen inneren Seelenleben gerade bei der richtigen Geistesschau immer von neuem besiegen muß. Man ist also niemals, ich möchte sagen, zu der Ruhe des Fertigseins verdammt, wenn man im modernen Sinn zur Geistesschau hinstrebt.

Et une autre chose doit être dite. Cette vision moderne de l'esprit exige avant tout ce que l'on peut appeler la présence d'esprit. La vision de l'esprit des anciens temps orientaux pouvait en quelque sorte prendre son temps. Ce qu'elle obtenait restait durablement disponible. Celui qui veut regarder dans le monde spirituel à partir de la nature humaine moderne doit être vif, aimerais-je dire, avec son organe spirituel ; il doit être conscient du fait que ce qui se révèle à partir du monde spirituel n'est parfois là qu'un instant et disparaît ensuite, et que ce doit donc être saisi au moment de son apparition par la présence d'esprit. Et beaucoup d'êtres humains, qui se préparent soigneusement à une telle vision de l'esprit, n'y parviennent pas parce qu'ils ne recherchent pas en même temps cette présence d'esprit dans des exercices préparatoires. Car ce n'est qu'ainsi que l'on est en mesure d'éviter d'avoir en fait développé son attention quand la chose est déjà à nouveau passée.

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Und ein anderes noch muß gesagt werden. Diese moderne Geistesschau erfordert vor allen Dingen auch, was man Geistesgegenwart nennen kann. Der Geistesschauer alter orientalischer Vorzeiten konnte sich gewissermaßen Zeit lassen. Was er sich errang, blieb dauernd vorhanden. Derjenige, der aus der modernen Menschennatur heraus in die geistige Welt hineinschauen will, der muß schlagfertig, möchte ich sagen, sein mit seinem Geistorgan; er muß gewahr werden, wie das, was sich aus der geistigen Welt heraus offenbart, zuweilen nur einen Augenblick da ist und nachher wieder verschwindet, wie es also im Moment des Entstehens in Geistesgegenwart aufgefaßt werden muß. Und viele Menschen, die sich sorgsam vorbereiten zu einer solchen Geistesschau, kommen nicht zu ihr, weil sie nicht zu gleicher Zeit diese Geistesgegenwart in vorbereitenden Übungen suchen. Denn nur dadurch ist man imstande, zu vermeiden, daß man seine Aufmerksamkeit eigentlich erst entwickelt hat, wenn die Sache schon wiederum vorbei ist.

Avec cela je vous ai décrit maintes particularités que rencontre le chercheur moderne du monde spirituel. D'autres particularités de ce genre apparaîtront au cours des exposés. Aujourd'hui, j'aimerais seulement attirer l'attention sur l'une d'entre elles, parce qu'elle mène directement à une certaine observation historique de l'humanité.

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Damit habe ich Ihnen mancherlei Eigentümlichkeiten dessen, was dem modernen Sucher nach der geistigen Welt begegnet, geschildert. Im Verlaufe der Vorträge werden noch andere solche Eigentümlichkeiten auftreten. Heute möchte ich, weil es direkt hinüberführen wird zu einer gewissen geschichtlichen Betrachtung der Menschheit, nur noch auf das eine aufmerksam machen.

Si en cela nous voulons maintenant à nouveau dans sens caractérisé d'un certain côté en tant qu'humain moderne, trouver le chemin vers le monde spirituel d'une manière sûre, ainsi que nous ne devenions pas des fantaisistes, ainsi c'est le mieux de partir des représentations, des opérations de pensée que nous avons acquises par une observation approfondie de la nature et par l'approfondissement de science de la nature. Aucune représentation ne se prête aussi bien à la vie méditative, comme je l'ai décrit, que celles que l'on acquiert à partir de la science moderne de la nature, non pas pour les assimiler uniquement sur le plan du contenu, mais pour les traiter/élaborer sur le plan du contenu méditativement. En tant qu'humains modernes, nous avons justement appris à penser, au sens le plus strict du terme, à partir de la science de la nature.

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Wenn wir in diesem nun wiederum von einer gewissen Seite charakterisierten Sinn als moderner Mensch den Weg in die geistige Welt hinein in sicherer Weise, so daß wir nicht Phantasten werden, finden wollen, so ist es am besten, wenn wir von den Vorstellungen, von den Denkoperationen ausgehen, die wir uns an einer gründlichen Naturbeobachtung und durch Vertiefen in eine gründliche Naturwissenschaft angeeignet haben. Keine Vorstellungen eignen sich gerade zu meditativem Leben so gut, wie ich es geschildert habe, als diejenigen, die man aus der modernen Naturwissenschaft heraus gewinnt, nicht um sie allein inhaltlich aufzunehmen, sondern um sie inhaltlich meditativ zu verarbeiten. Wir haben eben als moderne Menschen im strengsten Sinne des Wortes an der Naturwissenschaft das Denken gelernt.

Nous devons garder à l'esprit que c'est justement grâce à la science de la nature que nous avons appris à penser de manière adaptée à notre actuelle époque du temps. Maintenant, tout ce que nous pouvons gagner de la science moderne en termes d'opérations de pensée peut seulement être une préparation pour la véritable vision de l'esprit.

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Dessen sollen wir eingedenk sein, daß wir an der Naturwissenschaft das Denken, das unserer heutigen Zeitepoche angemessen ist, gerade gelernt haben. Nun kann aber dieses alles, was wir also an Denkoperationen aus der modernen Naturwissenschaft gewinnen können, nur Vorbereitung sein für die eigentliche Geistesschau.

Nous ne pouvons jamais, par une quelconque conséquence logique, par une quelconque spéculation philosophique, utiliser la pensée ordinaire que nous formons aux choses du monde extérieur, à l'expérience et à l'observation, pour autre chose que pour nous préparer. Nous devons alors attendre que le monde spirituel veuille s'adresser à nous de la manière que j'ai décrite hier et avant-hier. Nous devons d'abord devenir mûrs pour chaque pas particulier de l'observation du monde spirituel. Nous ne pouvons pas, par un caprice intérieur, faire autre chose que de nous transformer en quelque sorte en un organe auquel le monde spirituel veut se révéler. La révélation objective - nous devons l'attendre. Et celui qui a de l'expérience en la matière sait comment il doit attendre certaines connaissances pendant des années, des décennies, avant qu'elles ne s'ouvrent à lui. C'est justement cette circonstance qui garantit l'objectivité de ce qui est réalité dans le monde spirituel, pour la connaissance.

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Niemals können wir durch irgendwelche logische Konsequenz, durch irgendwelche philosophische Spekulation das gewöhnliche Denken, das wir an den Dingen der Außenwelt, an Experiment und Beobachtung schulen, zu etwas anderem verwenden, als um uns vorzubereiten. Wir müssen dann warten, bis die geistige Welt in der Art an uns herantreten will, wie ich das gestern und vorgestern geschildert habe. Wir müssen zu jedem einzelnen Schritt in der Beobachtung der geistigen Welt erst reif werden. Wir können nicht aus innerer Willkür etwas anderes herbeiführen, als uns gewissermaßen zu einem Organ zu machen, dem sich die geistige Welt offenbaren will. Die objektive Offenbarung - wir müssen sie erwarten. Und wer in solchen Dingen Erfahrung hat, der weiß, wie er auf manche Erkenntnisse jahre-, jahrzehntelang warten muß, bevor sie sich ihm erschließen. Es verbürgt wiederum gerade dieser Umstand die Objektivität dessen, was Wirklichkeit in der geistigen Welt ist, für die Erkenntnis.

Il n'en était à nouveau pas de même pour celui qui, dans les temps anciens de l'Orient, cherchait par ses exercices le chemin vers le monde suprasensible. Chez lui, la pensée était d'emblée conçue de telle sorte qu'il lui suffisait en quelque sorte de la poursuivre pour trouver le chemin vers le monde spirituel que j'ai caractérisé avant-hier. Il se trouvait donc déjà, dans la vie ordinaire, dans une pensée qui n'avait besoin que d'être poursuivie pour conduire, dans son propre prolongement, à une certaine clairvoyance, mais qui, parce qu'elle était développée à partir de la vie ordinaire de l'époque, était une vision plus onirique, tandis que la vision à laquelle nous aspirons en tant qu'humains modernes est une vision qui se déroule en pleine réflexion, semblable à celle disponible dans la résolution des problèmes mathématiques.

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So war es wiederum nicht bei dem, der in alten orientalischen Zeiten, in der Welt des Ostens, durch seine Übungen den Weg in die übersinnliche Welt hinein suchte. Bei ihm war das Denken von vornherein so geartet, daß er es gewissermaßen nur fortzusetzen brauchte, um jenen Weg in die geistige Welt hinein zu finden, den ich vorgestern charakterisiert habe. Er stand also schon im gewöhnlichen Leben in einem Denken drinnen, das nur fortgesetzt zu werden brauchte, um in seiner eigenen Fortsetzung zu einem gewissen Hellsehen zu führen, das aber dafür auch, weil es aus dem gewöhnlichen Leben der damaligen Zeit heraus entwickelt war, ein mehr traumhaftes Schauen war, während das Schauen, zu dem wir als moderne Menschen streben, ein solches ist, das bei voller Besonnenheit, ähnlich der bei Lösung mathematischer Probleme vorhandenen, verläuft.

Nous y voyons précisément, en nous adressant à ce que le chercheur d'esprit doit vivre intimement, l'expression d'énormes transformations dans toute la nature humaine au cours de périodes historiques. Ces temps sont historiques dans la mesure où non seulement celui qui, par l'observation spirituelle, peut examiner la vie historique des hommes et du cosmos jusqu'aux temps les plus reculés, comme je vais encore le décrire, mais aussi celui qui examine les documents extérieurs de manière impartiale peuvent en arriver à cette conclusion. Nous pouvons aussi regarder dans ces documents extérieurs les temps anciens de la vie spirituelle de l'humanité et voir comment ils se distinguent de ce à quoi nous-mêmes, de ce à quoi notre époque doit aspirer en ce qui concerne la position intérieure dans ce monde spirituel.

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Wir sehen darin gerade, indem wir uns an das wenden, was der Geistesforscher intim erleben muß, einen Ausdruck für gewaltige Verwandlungen in der ganzen Menschennatur im Verlauf von historischen Zeiten. Historisch sind diese Zeiten insofern, als nicht nur der, der in der Art, wie ich das noch schildern werde, durch geistige Anschauung selbst bis in fernste Urzeiten das geschichtliche Leben sowohl der Menschen wie des Kosmos prüfen kann, daß nicht nur der darauf kommen kann, sondern auch der, welcher in unbefangener Weise die äußeren Dokumente prüft. Wir können auch in diesen äußeren Dokumenten auf alte Zeiten geistigen Lebens der Menschheit hinschauen und ersehen, wie sie sich unterscheiden von dem, was wir selber, was unsere Zeit erstreben muß in bezug auf das Drinnenstehen in dieser geistigen Welt.

Parce que notre pensée ne peut pas être poursuivie sans plus pour nous amener dans son propre courant se poursuivant à la vision de l'esprit, mais parce qu'elle peut purement faire la préparation, nous préparer dans une certaine mesure nous-mêmes, afin que nous soyons mûrs lorsque le monde spirituel se présente à nous, à contempler celui-ci, c'est tout de suite par cela que notre pensée est apte à agir. à tisser à l'intérieur du champ des expériences, des observations, à l'intérieur du champ que la science de la nature a fait sien. Mais c'est tout de suite en ce que nous envisagions quelle rigueur intérieure, quelle force intérieure notre pensée a atteinte que nous l'appliquerons d'autant plus sûrement à notre formation/entrainement, afin de pouvoir ensuite attendre la révélation du monde spirituel dans le sens correct du terme. Il en ressort déjà que notre pensée est aujourd'hui quelque chose d'autre que dans des temps anciens.

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Dadurch, daß unser Denken nicht ohne weiteres fortgesetzt werden kann, um in seiner eigenen Fortströmung uns zur Geistesschau zu bringen, sondern dadurch, daß es bloß die Vorbereitung machen, uns selbst gewissermaßen präparieren kann, damit wir reif werden, wenn die geistige Welt uns entgegentritt, diese zu schauen, dadurch gerade ist unser Denken geeignet, innerhalb des Feldes der Experimente, der Beobachtungen zu wirken und zu weben, innerhalb des Feldes, das die Naturwissenschaft zu dem ihrigen gemacht hat. Aber gerade indem wir einsehen, welche innere Strenge, welche innere Kraft unser Denken erreicht hat, werden wir es um so sicherer auf unsere Schulung anwenden, damit wir dann auf die Offenbarung der geistigen Welt im richtigen Sinne des Wortes warten können. Schon daraus geht hervor, daß unser Denken heute etwas anderes ist als in alten Zeiten.

J'aurai à plusieurs reprises l'occasion de faire des digressions historiques. Beaucoup de choses concernant le monde extérieur pourront être poursuivies à partir de ce que j'ai à dire aujourd'hui. Aujourd'hui, je parlerai davantage de ce que sont les forces intérieures de l'évolution de l'humanité. C'est là que nous sommes finalement conduits à la pensée et à la transformation de cette pensée au cours des époques de l'évolution de l'humanité.

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Ich werde wiederholt Gelegenheit haben zu geschichtlichen Exkursen. Da wird sich manches, was auf die äußere Welt bezüglich ist, fortsetzen lassen von dem aus, was ich heute zu sagen habe. Heute werde ich mehr auf das zu sprechen kommen, was die inneren Kräfte der Menschheitsentwickelung sind. Da werden wir ja doch zuletzt auf das Denken geführt und auf die Verwandlung dieses Denkens im Laufe der Epochen der Menschheitsentwickelung.

Mais puisque toute la vie historique extérieure dépend finalement de cette pensée, puisque l'humain produit ce qu'il accomplit historiquement à partir de ses pensées, à côté de ses impulsions émotionnelles et volontaires, nous devons nous tourner vers la pensée humaine si nous voulons nous adresser aux impulsions historiques les plus profondes.

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Da von diesem Denken aber schließlich doch alles äußere geschichtliche Leben abhängig ist, da der Mensch das, was er geschichtlich vollbringt, aus seinen Gedanken, neben seinen Gefühls- und Willensimpulsen, hervorbringt, so müssen wir uns, wenn wir uns an die tiefsten geschichtlichen Impulse wenden wollen, an das menschliche Denken wenden.

Mais maintenant, cette pensée humaine telle que nous pouvons l'utiliser aujourd'hui pour la science de la nature d'un côté, et pour l'impact de la liberté humaine de l'autre côté, se distingue pourtant dans une très large mesure de la pensée que nous trouvons dans les époques précédentes de l'humanité. Certes, il se trouvera maints humains pour dire que penser, c'est penser, que ce soit chez John Stuart Mill ou chez Solovjeff, que ce soit chez Platon, Aristote, Héraclite, ou chez les penseurs de l'Orient ancien. Mais celui qui, simplement avec un certain flair/sens à sentir intérieur, est capable d'entrer dans la façon et la manière dont les pensées ont agi au sein de l'humanité, se dira : notre pensée actuelle est au fond quand même quelque chose dé tout autre que la pensée des époques plus anciennes. On touche ainsi à un problème important de l'évolution de l'humanité.

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Nun aber unterscheidet sich dieses menschliche Denken, wie wir es heute für die Naturwissenschaft auf der einen Seite und zur Auswirkung der menschlichen Freiheit auf der anderen Seite brauchen können, doch in ganz erheblichem Maße von dem Denken, das wir in früheren Epochen der Menschheit finden. Gewiß, es werden sich manche Menschen finden, die sagen: Denken ist Denken, ob es nun auftritt bei John Stuart Mill oder bei Solovjeff, ob es auftritt meinetwegen bei Plato, Aristoteles, Heraklit, oder ob es auftritt bei den Denkern des alten Orients. Derjenige aber, der bloß mit einem gewissen inneren Spürsinn zunächst einzugehen vermag auf die Art und Weise, wie Gedanken innerhalb der Menschheit gewirkt haben, der wird sich sagen: Unser heutiges Denken ist im Grunde genommen doch etwas ganz anderes, als das Denken älterer Epochen war. Damit wird ein wichtiges Problem der Menschheitsentwickelung berührt.

Regardons notre pensée actuelle. J'aurai encore l'occasion de justifier ce que je vais développer maintenant de manière plus historique, aussi à partir de la science de la nature. Ce que nous appelons pensée s'est en fait développé à partir du maniement du langage. Celui qui a le sens de ce qui est efficace dans la langue d'un peuple, de ce qui agit en tant que logique dans la langue, de la logique dans laquelle nous vivons pendant notre enfance, et qui a ensuite un sens psychologique suffisant pour l'observer dans la vie, trouvera que notre pensée actuelle est en fait issue de ce que la langue fait de notre constitution d'âme. J'aimerais dire que c'est du langage que nous extrayons peu à peu les pensées et les lois de la pensée ; notre pensée actuelle est un don de la parole/du parler.

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Schauen wir auf unser heutiges Denken hin. Ich werde noch Gelegenheit haben, das, was ich jetzt mehr geschichtlich entwickle, auch aus der Naturwissenschaft heraus zu begründen. Was wir Denken nennen, hat sich eigentlich herausentwickelt aus der Handhabung der Sprache. Wer einen Sinn hat für das, was in der Sprache eines Volkes wirksam ist, für das, was an Logik in der Sprache wirkt, an Logik, in die wir uns während unserer Kindheit hineinleben, und wer dann psychologischen Sinn genug dazu hat, um das im Leben zu beobachten, der wird finden, daß unser heutiges Denken eigentlich aus dem hervorgeht, was die Sprache aus unserer Seelenkonstitution macht. Ich möchte sagen, aus der Sprache lösen wir allmählich die Gedanken und Gedankengesetzmäßigkeiten heraus; unser heutiges Denken ist eine Gabe des Sprechens.

Mais tout de suite, la pensée qui est un don de la parole, c'est la pensée qui est devenue grande dans l'humanité civilisée depuis les jours de Copernic, de Galilée, de Giordano Bruno, qui est devenue grande à l'époque où l'humanité a tourné de préférence son attention vers l'observation de la nature au sens moderne. La pensée appliquée à l'observation et à l'expérimentation doit, j'aimerais dire, vivre si familièrement avec nous que nous affinons idéalement ce que nous nous approprions par le langage comme un bien populaire général, de telle sorte qu'il devienne en nous une pensée idéelle par laquelle nous saisissons alors le monde extérieur.

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Aber gerade das Denken, das eine Gabe des Sprechens ist, das ist dasjenige Denken, das in der zivilisierten Menschheit groß geworden ist seit den Tagen des Kopernikus, des Galilei, des Giordano Bruno, das groß geworden ist in den Zeiten, in denen die Menschheit vorzugsweise ihre Aufmerksamkeit der Naturbetrachtung im modernen Sinn zugewendet hat. Das Denken, das auf Beobachtung und Experiment angewendet wird, das muß, ich möchte sagen, so vertraut mit uns leben, daß wir das, was wir mit der Sprache uns aneignen als ein allgemeines Volksgut, ideell so verfeinern, daß es in uns zum ideellen Gedanken wird, durch den wir dann die Außenwelt ergreifen.

Mais nous avons seulement besoin de revenir en arrière, sur une courte période par rapport à l'ensemble de l'évolution de l'humanité, pour trouver quelque chose de tout à fait autre. Nous remontons par exemple jusqu'à l'époque grecque. Celui qui sait se transposer dans ce qui œuvrait dans l'art grec, dans la poésie grecque, dans la philosophie grecque, ce qui absolument nous résonne de la Grèce, il trouve de manière tout à fait empirique qu'il est possible que le Grec ait encore vécu ce qui était pensé, intimement tissé avec la parole.

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Aber wir brauchen nur eine im Verhältnis zur gesamten Menschheitsentwickelung kurze Zeitspanne zurückzugehen, und wir finden etwas ganz anderes. Wir gehen zum Beispiel zurück bis zum Griechentum. Wer sich hineinzuversetzen weiß in das, was in der griechischen Kunst, in der griechischen Dichtung, in der griechischen Philosophie wirkte, was überhaupt zu uns herübertönt aus dem Griechentum, der findet — auf ganz empirische Weise ist das möglich —, daß der Grieche noch das, was Gedanke war, innig mit dem Worte verwoben erlebte.

La pensée et la parole ne faisaient qu'un. En ce qu'on développait le concept de logos, on parlait d'autre chose que ce dont nous parlons lorsque nous parlons des pensées ou de la connexion/liaison des pensées. On parlait des pensées ainsi que cette pensée avait l'élément linguistique comme sa corporéité évidente. Justement aussi peu que, dans le monde physique, nous pouvons penser notre âme séparée spatialement de l'organisme physique, justement aussi peu, pour la conscience grecque, la pensée se séparait de la parole.

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Gedanke und Wort waren eines. Man sprach, indem man den Logosbegriff entwickelte, von etwas anderem, als wovon wir sprechen, wenn wir von dem Gedanken oder der Gedankenverbindung sprechen. Man sprach von dem Gedanken so, daß dieser Gedanke das sprachliche Element zu seiner selbstverständlichen Körperlichkeit hatte. Ebensowenig wie wir in der physischen Welt uns unsere Seele räumlich abgetrennt denken können vom physischen Organismus, ebensowenig sonderte sich für das griechische Bewußtsein der Gedanke vom Wort.

On sentait absolument les deux comme une unité, et sur les flots des paroles s'écoulait la pensée.

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Man fühlte die beiden durchaus als ein Einheit, und auf den Wogen der Worte strömte der Gedanke dahin.

Mais cela conditionne aussi une tout autre position de l'humain dans sa conscience par rapport au monde extérieur que la nôtre avec la pensée, qui s'est déjà détachée de la parole. C'est pourquoi, lorsque nous remontons à l'époque grecque, nous devons au fond nous approprier une tout autre disposition/ambiance d'âme si nous voulons pénétrer dans les expériences réelles de l'âme grecque. C'est pourquoi tout ce qui a été produit dans le monde grec, par exemple en tant que science, n'a plus l'air d'être une science pour les exigences actuelles. Le naturaliste d'aujourd'hui dira : les Grecs n'avaient pas de science de la nature ; ils avaient une philosophie de la nature.

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Das aber bedingt auch eine ganz andere Stellung des Menschen in seinem Bewußtsein zur Außenwelt, als die unsrige ist mit dem Gedanken, der sich bereits vom Worte losgelöst hat. Und so müssen wir, wenn wir in das Griechentum zurückgehen, im Grunde genommen uns eine ganze andere Seelenstimmung aneignen, wenn wir eindringen wollen in die wirklichen Erlebnisse der griechischen Seele. Deshalb aber auch nimmt sich alles das, was im Griechentum zum Beispiel als Wissenschaft hervorgebracht worden ist, für die heutigen Anforderungen nicht mehr als Wissenschaft aus. Der heutige Naturforscher wird sagen: Die Griechen haben ja keine Naturwissenschaft gehabt; sie hatten eine Naturphilosophie.

Et il a raison. Mais le problème n'est ainsi saisi, j'aimerais dire, que dans le quart de son essence. Il repose là quelque chose de beaucoup plus profond.

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Und damit hat er recht. Aber das Problem ist damit eigentlich nur, ich möchte sagen, im Viertel seines Wesens ergriffen. Hier liegt etwas viel Tieferes zugrunde.

Et ce qui repose à la base, nous pouvons d'abord seulement l'explorer avec une vision spirituelle.

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Und das, was da zugrunde liegt, können wir erst wieder erforschen mit einer geistigen Anschauung.

Si nous nous servons de la pensée qui est aujourd'hui particulièrement adaptée à la recherche sur la nature, dans laquelle nous nous formons aujourd'hui par l'hérédité et l'éducation, si nous nous servons de cette pensée et formons ce que nous appelons des représentations scientifiques, alors nous séparons strictement ces représentations scientifiques, selon la nature de notre conscience, de ce que nous appelons l'expérience artistique et de ce que nous appelons l'expérience religieuse. C'est tout de suite une caractéristique fondamentale de notre époque que l'humain moderne exige, en un certain sens, une science qui n'accepte rien d'une quelconque création artistique, d'une quelconque vision artistique, et qui n'accepte rien non plus de ce qui veut être l'objet de la conscience religieuse, de la dévotion religieuse à l'univers et à la divinité. Nous devons dire que c'est une caractéristique de notre civilisation actuelle. Et nous trouvons cette caractéristique de plus en plus marquée à mesure que nous allons vers l'ouest et que nous y examinons le caractère fondamental de la civilisation humaine. C'est la caractéristique de l'humain moderne d'avoir dans son âme, se tenant côte à côte, la science, l'art et la vie religieuse. Et il s'efforce donc de former un concept particulier du savoir, de n'absolument pas laisser l'art empiéter sur la science, d'exclure/de déconnecter l'imagination/la fantaisie de tout ce qui est "scientifique", à l'exception de ce qui vise à l'invention ; et ensuite de faire valoir une autre sorte de certitude de la foi, qui doit jouer son rôle en particulier dans la vie religieuse.

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Wenn wir uns des Denkens, das nun einmal heute für die Naturforschung besonders geeignet ist, in das wir uns heute hineinschulen durch die Vererbung und Erziehung, wenn wir uns dieses Denkens bedienen und das ausbilden, was wir wissenschaftliche Vorstellungen nennen, dann trennen wir diese wissenschaftlichen Vorstellungen nach dem Wesen unseres Bewußtseins streng ab von dem, was wir künstlerisches Erleben nennen, und von dem, was wir religiöses Erleben nennen. Das ist gerade ein Grundcharakteristikon unserer Zeit, daß der moderne Mensch in einem gewissen Sinne eine Wissenschaft fordert, die nichts aufnimmt von irgendeiner künstlerischen Gestaltung, irgendeiner künstlerischen Anschauung, und auch nichts aufnimmt von dem, was Gegenstand des religiösen Bewußtseins, der religiösen Hingabe an Weltlichkeit und Göttlichkeit sein will. Wir müssen sagen, das ist ein Charakteristikon unserer gegenwärtigen Zivilisation. Und wir finden immer mehr und mehr dieses Charakteristikon ausgeprägt, je weiter wir nach Westen gehen und dort den Grundcharakter der menschlichen Zivilisation prüfen. Das ist das Charakteristikon, daß der moderne Mensch als nebeneinanderstehend in seiner Seele hat Wissenschaft, Kunst und religiöses Leben. Und er bemüht sich ja, einen besonderen Wissensbegriff zu bilden, die Kunst durchaus nicht übergreifen zu lassen in die Wissenschaft, die Phantasie auszuschalten aus allem, was «wissenschaftlich» ist mit Ausnahme dessen, was auf Erfindungen abzielt; und dann eine andere Art von Glaubensgewißheit geltend zu machen, die insbesondere im religiösen Leben ihre Rolle spielen soll.

Si l'on essaie de s'élever à une vision spirituelle dans le sens que j'ai décrit, on arrive, en partant absolument de la pensée scientifique exercée de notre époque, à ce que j'ai caractérisé comme une pensée vivante, une pensée à force d'image. Avec cette pensée à force d'image, on se sent maintenant aussi équipé pour comprendre, j'aimerais dire comment mathématiquement, mais maintenant qualitativement, ce qui ne peut pas être compris avec les mathématiques et la géométrie habituelles : le vivant. Avec la pensée vivante, on se sent apte à saisir le vivant.

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Wenn man in dem Sinn, wie ich es charakterisiert habe, versucht, zu einer geistigen Anschauung aufzusteigen, dann kommt man, indem man durchaus von dem geschulten naturwissenschaftlichen Denken der Gegenwart ausgeht, zu dem, was ich charakterisierte als ein lebendiges Denken, als ein bildhaftes Denken. Mit diesem bildhaften Denken fühlt man sich nun auch gerüstet, dasjenige, ich möchte sagen, wie mathematisch, aber jetzt qualitativ, zu begreifen, was mit der gewöhnlichen Mathematik und Geometrie nicht zu begreifen ist: das Lebendige. Mit dem lebendigen Gedanken fühlt man sich geeignet, das Lebendige zu ergreifen.

Dans la mesure où nous avons une vue d'ensemble de ce qui agit, disons, dans les simples combinaisons chimiques du monde inorganique, ce qui agit en termes de substances et de forces se trouve dans un équilibre plus ou moins instable, si je peux m'exprimer en termes populaires. L'équilibre devient de plus en plus instable, l'interaction de plus en plus compliquée, au fur et à mesure que nous nous élevons vers le vivant. Et dans la même mesure que l'équilibre devient plus instable, la structure vivante s'arrache à l'expérience quantitative ; et c'est en premier à la pensée vivante qu'elle devient ainsi accessible qu'elle peut se lier à la structure vivante comme la pensée mathématique à l'inerte/la dépourvue de vie. Mais par cela nous parvenons/atteignons - j'ai déjà indiqué là-dessus dans une conférence antérieure, que je dis avec cela en fait quelque chose d'horrible pour beaucoup de penseurs actuels -, par cela nous atteignons un point de connaissance qui conduit continuellement la pensée ordinaire, logique et abstraite au-delà en une saine pensée artistique, en une sorte de vision artistique qui est cependant intérieurement absolument aussi exacte que les mathématiques ou la mécanique peuvent l'être.

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Indem dasjenige, was, sagen wir, in bloßen chemischen Verbindungen der unorganischen Welt wirkt, von uns überschaut wird, ist -- wenn ich mich jetzt populär aussprechen darf - das, was da wirkt an Stoffen und Kräften, in einem mehr oder weniger labilen Gleichgewicht. Immer labiler und labiler wird das Gleichgewicht, immer komplizierter und komplizierter wird das Ineinanderwirken, je mehr wir heraufsteigen zum Lebendigen. Und in demselben Maße, wie das Gleichgewicht labiler wird, entreißt sich das lebendige Gebilde der quantitativen Erfahrung; und erst dem lebendigen Gedanken wird es so zugänglich, daß er sich mit dem lebendigen Gebilde so verbinden kann wie der mathematische Gedanke mit dem leblosen. Dadurch aber gelangen wir ich habe schon in einem der früheren Vorträge darauf hingewiesen, daß ich damit eigentlich für viele heutige Denker etwas Horribles sage -, dadurch gelangen wir herauf zu einem Erkenntnisstandpunkt, der kontinuierlich überführt das gewöhnliche, logische, abstrakte Denken in eine Art künstlerischen Denkens, in eine Art künstlerischer Anschauung, die aber durchaus innerlich so exakt ist, wie nur jemals die Mathematik oder Mechanik exakt sein können.

Je sais combien on recule s'effrayant du côté de l'esprit scientifique moderne, à faire passer ce qui veut être exact dans l'artistique, dans ce qui, par l'intervention de la qualité, se forme dans l'humain en une sorte de mathesis qualitative. Mais à quoi sert donc toute théorie de la connaissance qui déclame que nous ne pourrions parvenir à une connaissance de l'objectivité que si nous avancions de conclusion en conclusion et que nous devions nous garder d'inclure quoi que ce soit d'une telle essence artistique dans la connaissance, si la nature, la réalité, à un certain niveau, agissait justement de manière artistique, de sorte qu'elle ne se livrerait qu'à une connaissance artistique.

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Ich weiß, wie sehr man davor zurückschreckt von seiten des modernen Wissenschaftsgeistes aus, dasjenige, was exakt sein will, überzuführen in das Künstlerische, in das, was sich, indem die Qualität mitwirkt, im Menschen zu einer Art qualitativen Mathesis gestaltet. Aber was nützt denn alle Erkenntnistheorie, die da deklamiert, daß wir zu einer Erkenntnis der Objektivität doch nur kommen könnten, wenn wir von Schlußfolgerung zu Schlußfolgerung fortschreiten und uns ja hüten müßten, irgend etwas von einem solchen künstlerischen Wesen in die Erkenntnis einzubeziehen, wenn die Natur, die Wirklichkeit auf einer gewissen Stufe eben künstlerisch wirkte, so daß sie sich nur einem künstlerischen Erkennen ergeben würde.

En particulier, nous ne parvenons pas à ce qui façonne l'organisme humain à partir de l'intérieur, comme je l'ai décrit avant-hier, et qui agit en nous comme une sorte de premier homme suprasensible, si nous ne laissons pas ce qui est pensé d'assemblage s'écouler dans une sorte de création artistique, si nous ne pouvons pas recréer la forme humaine créatrice à partir d'une mathématique qualitative.

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Insbesondere gelangen wir nicht zu dem, was den menschlichen Organismus so von innen heraus gestaltet, wie ich das vorgestern beschrieben habe — was als eine Art erster übersinnlicher Mensch in uns wirkt —, wenn wir nicht dasjenige, was zusammenfügendes Denken ist, in eine Art künstlerische Gestaltung einlaufen lassen, wenn wir nicht aus einer qualitativen Mathematik heraus die menschliche schaffende Gestalt nachschaffen können.

Il nous suffit de conserver l'esprit de la science et d'accueillir l'esprit de l'art.

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Wir brauchen nur beizubehalten den Geist der Wissenschaftlichkeit und aufzunehmen den Geist des Künstlerischen.

Bref, nous devons faire naître une vision artistique à partir de ce que nous appelons aujourd'hui la science, en conservant tout l'esprit scientifique.

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Kurz, wir müssen aus dem, was wir heute Wissenschaft nennen, indem wir den ganzen Wissenschaftsgeist aufrecht erhalten, ein künstlerisches Anschauen gebären.

Mais alors, si nous faisons cela, nous nous approchons de la réconciliation de la science et de l'art, comme Goethe l'avait pressenti, en prononçant une phrase comme celle-ci : "Le beau est une manifestation de lois naturelles secrètes qui, sans son apparition, nous seraient restées éternellement cachées". Goethe le savait bien : si l'on s'en tient à vouloir comprendre la nature ou le monde en général avec les formes-pensées qui se révèlent être les plus saines et les plus justes pour le monde inorganique, on n'obtient tout simplement pas la totalité du monde. Et l'on ne trouvera pas plus tôt le passage de la science de l'inorganique à celle de l'organique avant d'avoir transposé la connaissance abstraite dans la connaissance intérieurement vivifiée, qui est en même temps un connecter et un régner/agir intérieur.

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Dann aber, wenn wir das tun, nähern wir uns der Versöhnung von Wissenschaft und Kunst, wie sie Goethe geahnt hat, indem er einen Ausspruch tat wie diesen: «Das Schöne ist eine Manifestation geheimer Naturgesetze, die uns ohne dessen Erscheinung ewig wären verborgen geblieben.» Goethe wußte gar wohl: Wenn man dabei bleibt, mit den Gedankenformen die Natur oder die Welt überhaupt begreifen zu wollen, welche sich als die gesunden und richtigen für die unorganische Welt herausstellen, so ergibt sich einfach nicht die Gesamtheit der Welt. Und nicht eher wird man den Übergang finden von der Wissenschaft des Unorganischen zu der des Organischen, ehe man nicht die abstrakte Erkenntnis in die innerlich belebte Erkenntnis, die zu gleicher Zeit ein inneres Schalten und Walten ist, überführen wird.

En nous tournant ainsi, au sein de l'aspiration moderne de l'esprit, vers une saisie du vivant, nous nous approchons de ce qui, dans la conscience grecque, n'était pas disponible de manière aussi réfléchie et consciente que ce à quoi nous aspirons, mais justement de manière instinctive. Et personne ne comprend en réalité ce qui s'exprimait encore chez Platon, mais en particulier chez les philosophes présocratiques, s'il ne se rend pas compte qu'était encore disponible une interaction entre l'élément artistique de l'humain et l'élément philosophique-scientifique. Ce n'est qu'à la fin de l'ère grecque, philosophiquement parlant quelque peu chez Aristote, que la pensée née du langage est séparée et qu'elle devient plus tard, en se développant à travers la scolastique, une pensée de science de la nature. Ce n'est que dans la Grèce postérieure que la pensée se détache. Le grec ancien a la pensée comme élément artistique. Et la philosophie grecque n'est essentiellement compréhensible que si elle est en même temps saisie avec un sens artistique.

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Indem wir uns so innerhalb des modernen Geistesstrebens hinwenden zu einer Erfassung des Lebendigen, nähern wir uns aber dem, was nun nicht in solcher Besonnenheit und Bewußtheit, nach denen wir streben, aber eben instinktiv vorhanden war im griechischen Bewußtsein. Und niemand begreift in Wirklichkeit, was sich noch bei Plato, aber insbesondere bei den vorsokratischen Philosophen äußerte, wenn er nicht gewahr wird, daß da noch ein Zusammenwirken des künstlerischen Elements im Menschen mit dem philosophisch-wissenschaftlichen vorhanden war. Erst am Ausgang des Griechentums, philosophisch gesprochen etwa bei Aristoteles, wird der Gedanke abgetrennt, der aus der Sprache heraus geboren ist und der dann später, indem er sich über die Scholastik entwickelt, zum naturwissenschaftlichen Gedanken wird. Erst im späteren Griechentum wird der Gedanke herausgeschält. Das ältere Griechentum hat den Gedanken als künstlerisches Element. Und griechische Philosophie ist im wesentlichen auch nur zu verstehen, wenn sie zu gleicher Zeit mit künstlerischem Sinn ergriffen wird.

Mais cela nous conduit absolument à voir dans le règne grec cette civilisation qui a encore non séparé la science et l'art. Cela s'exprime aussi bien dans l'art que dans la science elle-même.

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Das aber führt uns überhaupt dazu, in dem Griechentum zu sehen diejenige Zivilisation, die Wissenschaft und Kunst noch ungetrennt hat. Das drückt sich aus sowohl in der Kunst wie in der Wissenschaft selber.

Je ne peux évidemment pas entrer dans tous les détails. Mais si vous étudiez avec un sens humain sain et un œil sain et pénétré de l'esprit ce qu'est la sculpture grecque, vous trouverez que le Grec ne travaillait pas dans le sens comme cela se passe aujourd'hui, d'après le modèle, que le Grec, en ce qu'il travaillait plastiquement, travaillait à partir d'un vécu intérieur. En ce qu'il façonnait le muscle, formait le bras plié, formait la main, formait d'après ce qu'il ressentait en son intérieur. Son deuxième humain intérieur, vivant, j'aimerais dire cet humain éthérique, il le ressentait ; il se vivait psychiquement/par l'âme et ressentait ainsi la limitation vers l'extérieur. Ce qu'il vivait intérieurement passait dans la plastique. L'art était une révélation/manifestation de ce qui était vu ainsi. Et cette vision, transposée dans ces pensées vivant dans le langage, devint une science qui avait encore un caractère artistique parce qu'elle ne faisait qu'un avec ce que l'esprit du langage grec révélait au Grec.

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Ich kann natürlich jetzt nicht auf alle Einzelheiten eingehen. Aber studieren Sie mit gesundem Menschensinn und mit einem gesunden, geistdurchdrungenen Auge, was die griechische Plastik ist, so werden Sie finden, daß der Grieche nicht in dem Sinn, wie das heute geschieht, nach dem Modell arbeitete, daß der Grieche, indem er plastisch arbeitete, aus einem inneren Erleben heraus arbeitete. Indem er den Muskel, den gebeugten Arm formte, die Hand formte, formte er nach, was er in seinem Innern erfühlte. Seinen inneren, lebendigen zweiten Menschen, ich möchte sagen, diesen ätherischen Menschen, den fühlte er; seelisch durchlebte er sich und fühlte so die Begrenzung nach außen. Das, was er innerlich erlebte, ging in die Plastik über. Die Kunst war eine Offenbarung dessen, was so geschaut wurde. Und dieses Schauen, das hinübergetragen wurde in diesen in der Sprache lebenden Gedanken, wurde zur Wissenschaft, die noch einen künstlerischen Charakter hatte dadurch, daß sie eins war mit dem, was griechischer Sprachgeist dem Griechen offenbarte .

Et c'est ainsi que nous entrons, avec le règne grec, dans un monde qui s'ouvrira à nouveau à nous d'abord lorsque nous nous élèverons nous-mêmes de notre science séparée de l'art vers une connaissance qui débordera à nouveau dans l'élément artistique. J'aimerais dire que ce que nous développons plus tard en pleine réflexion était autrefois là dans une expérience/un vécu instinctif. Et nous pouvons voir comment, au cours de la vie historique, cette vie commune de l'art et de la science s'est alors transformée en ce qui est disponible en notre temps : la pleine séparation de l'art et de la science.

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Und so treten wir ein mit dem Griechentum in eine Welt, die sich uns erst wiederum erschließt, wenn wir selber aufsteigen aus unserer von der Kunst getrennten Wissenschaft zu einer Erkenntnis, die wiederum überfließt ins künstlerische Element. Ich möchte sagen, was wir später entwickeln in voller Besonnenheit, das war früher einmal da in einem instinktiven Erleben. Und wir können ja geradezu sehen, wie sich innerhalb des geschichtlichen Lebens dieses Zusammenleben von Kunst und Wissenschaft dann hinüberwandelt in das, was in unserer Zeit vorhanden ist: die völlige Trennung von Kunst und Wissenschaft.

Lorsque l'humanité s'est développée du règne romain jusqu'à travers le Moyen-Âge, l'éducation, la formation allèrent d'un tout autre point de vue que ce fut le cas plus tard, à un niveau supérieur de la culture humaine. Plus tard, à l'ère de science de nature, il s'agissait principalement de communiquer à l'humain les résultats de ce qui était obtenu par l'observation et l'expérimentation.

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Als die Menschheit sich durch das Römertum hindurch in das Mittelalter hinein entwickelte, ging die Erziehung, die Bildung zu einer höheren Stufe der Menschheitskultur von einem ganz anderen Gesichtspunkt aus, als das später der Fall war. Später, im naturwissenschaftlichen Zeitalter, kam es hauptsächlich darauf an, die Ergebnisse dessen, was aus der Beobachtung und dem Experiment gewonnen wird, dem Menschen mitzuteilen.

Dans notre formation, nous vivons presque en nous appropriant des résultats issus de l'observation et de l'expérimentation. Si nous regardons l'époque où se manifestait encore une certaine persistance de l'hellénisme/du règne grec, nous voyons comment, même dans la formation scientifique, il y avait encore quelque chose qui se rapprochait de l'humain, qui tendait davantage vers la formation d'un savoir-faire/pouvoir chez l'humain. Nous voyons comment, au Moyen-Âge, l'apprenti devait passer par ce que l'on appelle les sept arts libéraux : la grammaire, la rhétorique, la dialectique, l'arithmétique, la géométrie, l'astronomie et la musique. Ce qui comptait, c'était le savoir-faire. Ce que l'on devait devenir en tant que scientifique s'acquérait par le biais des sept arts libéraux, qui étaient toutefois déjà en passe de devenir la connaissance et la science, comme ce fut le cas par la suite.

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Wir leben ja fast davon in unserer Bildung, daß wir uns Ergebnisse, die aus der Beobachtung, aus dem Experimentieren genommen sind, aneignen. Schauen wir hin auf die Zeit, in der sich noch eine gewisse Fortwirkung des Griechentums zeigte, so sehen wir, wie da auch in der wissenschaftlichen Ausbildung noch etwas vorhanden war, was näher an den Menschen heranrückte, was mehr auf die Ausbildung eines Könnens im Menschen hinwirkte. Wir sehen, wie im Mittelalter der Auszubildende durchgehen mußte durch die sogenannten sieben freien Künste: Grammatik, Rhetorik, Dialektik, Arithmetik, Geometrie, Astronomie und Musik. Es kam auf ein Können an. Was man werden sollte als Wissenschafter, das erwarb man sich durch die sieben freien Künste, die aber durchaus schon auf dem Wege waren, Erkenntnis und Wissenschaft zu werden, wie das später dann geschehen ist.

Et l'on peut donc voir, si l'on étudie la philosophie scolastique du Moyen-Âge, tant décriée aujourd'hui, combien cette scolastique, qui se situe à la transition entre les temps anciens et les nôtres, est justement une merveilleuse formation de l'art conceptuel. On aimerait seulement que les humains modernes s'imprègnent d'un peu de la scolastique qui était en usage aux meilleurs moments du Moyen-Âge, qui faisait naître dans les humains une technique de pensée et un art de penser. On a tout de suite besoin de cela si l'on veut arriver à des concepts bien définis, auxquels nous devons parvenir. Mais, en ce qu'on part du point de vue actuel, qui sépare strictement la science, l'art et la religion, et en remontant à travers le Moyen-Âge dans l'évolution de l'humanité, on se rapproche du règne grec où, plus on remonte, plus on se convainc que la science et l'art sont fondus en une chose.

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Und man kann ja sehen, wenn man die heute so viel verpönte scholastische Philosophie des Mittelalters studiert, wie gerade diese Scholastik, die auf dem Übergang von alten Zeiten zu den unsrigen steht, eine wunderbare Ausbildung der Begriffskunst ist. Man möchte den modernen Menschen nur wünschen, daß sie etwas von der Scholastik in sich aufnähmen, die in den besten Zeiten des Mittelalters üblich war, die eine Denktechnik und Denkkunst in den Menschen heranzog. Man braucht das gerade, wenn man zu festumrissenen Begriffen, zu denen wir kommen müssen, kommen will. Indem man nun aber von dem heutigen Standpunkt ausgeht, der Wissenschaft, Kunst und Religion streng voneinander trennt, und durch das Mittelalter nach aufwärts steigt in der Menschheitsentwickelung, nähert man sich dem Griechentum, wo, je weiter und weiter man zurückgeht, man sich desto mehr und mehr davon überzeugt, daß Wissenschaft und Kunst in eins verschmolzen sind.

Mais dans la Grèce antique, se tient toujours un phénomène séparé de la science et de l'art : la vie religieuse. Elle s'approche de l'humain d'une tout autre manière que l'expérience scientifique ou artistique. Ce qui vit dans l'art et la science vit dans l'espace et le temps en tant qu'objet ; le contenu de la conscience religieuse est au-delà de l'espace et du temps.

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Aber noch immer steht im Griechentum da eine von Wissenschaft und Kunst getrennte Erscheinung: das religiöse Leben. Es kommt an den Menschen auf eine ganz andere Weise heran als das wissenschaftliche oder künstlerische Erleben. Was in Kunst und Wissenschaft lebt, lebt im Raum und in der Zeit als Objekt; der Inhalt des religiösen Bewußtseins ist jenseits von Raum und Zeit.

Cela appartient à l'éternité, cela donne certes naissance à l'espace et au temps, mais nous ne nous en approchons pas si nous nous arrêtons/restons debout à l'intérieur de l'espace et du temps.

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Das gehört der Ewigkeit an, das gebiert zwar Raum und Zeit aus sich, aber wir kommen ihm nicht nahe, wenn wir innerhalb von Raum und Zeit stehenbleiben.

Ce que la science de l'esprit, toutefois dans un sens beaucoup plus précis, doit développer aujourd'hui sur ces choses, on peut aussi le voir de documents extérieurs.

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Was Geisteswissenschaft, allerdings in einem viel genaueren Sinn, heute über diese Dinge entwickeln muß, kann man auch aus den äußeren Dokumenten ersehen.

Et j'aimerais toujours indiquer sur un ouvrage qui vient de paraître en Autriche et qui est extraordinairement utile à cet égard, sur l'"Histoire de l'idéalisme" d'Otto Willmann, un livre qui est particulièrement remarquable par rapport à de nombreux livres qui traitent de problèmes similaires à l'heure actuelle. On peut juger sans préjugés de telles choses, même si elles sont issues de conceptions opposées, si elles conduisent seulement à quelque chose qui favorise la vie de l'esprit.

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Und ich möchte immer wieder hinweisen auf ein gerade in Österreich erschienenes, in dieser Beziehung außerordentlich brauchbares Werk, auf die «Geschichte des Idealismus» von Otto Willmann, ein Buch, das besonders hervorragend ist über viele Bücher, die ähnliche Probleme in der Gegenwart behandeln. Man kann unbefangen urteilen über solche Dinge, wenn sie auch aus entgegengesetzten Anschauungen hervorgehen, wenn sie nur hinführen zu etwas, was das Geistesleben fördert.

Dans le règne grec, se tient là cette unité de l'art et de la science et de l'autre côté, cette vie religieuse à laquelle le Grec s'adonne, qu'il développe toutefois en images dans la religion populaire, mais qu'il obtient en profondeur dans la religion des mystères par l'initiation au sens approfondi. Mais partout nous pouvons voir que le religieux ne joue pas dans les forces de l'âme qui se développent dans la science et l'art, mais que la vie de l'âme, pour arriver à la vie religieuse, doit d'abord arriver à cette ambiance pieuse, à cet amour universel, dans lequel peut être saisi ce qui se révèle du divin-spirituel absolument et avec lequel l'humain peut s'unir dans la dévotion religieuse.

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Im Griechentum steht da jene Einheit von Kunst und Wissenschaft und auf der anderen Seite jenes religiöse Leben, an das sich der Grieche hingibt, das er allerdings in der Volksreligion in Bildern ausgestaltet, in der Mysterienreligion aber durch die Einweihung in vertieftem Sinn erhält. Aber überall können wir sehen, daß in die Seelenkräfte, die sich in Wissenschaft und Kunst entwickeln, das Religiöse nicht hereinspielt, sondern daß das Seelenleben, um ins religiöse Leben zu kommen, erst in jene fromme Stimmung, in jene All-Liebe kommen muß, in der erfaßt werden kann, was sich aus dem Göttlich-Geistigen überhaupt offenbart und mit dem sich der Mensch in religiöser Hingabe vereinigen kann.

Mais passons à l'Orient. Plus nous remontons dans des temps anciens, plus nous constatons que c'est à nouveau tout autre chose avec la vie spirituelle. Et là aussi, nous pouvons être guidés par ce que nous acquérons nous-mêmes dans le cadre de l'exercice moderne de l'esprit : Lorsque nous passons de l'expérience du concept vivant à ces douleurs et souffrances intérieures que nous devons surmonter pour devenir pleinement un organe des sens respectivement de l'esprit en tant qu'humain entier, et que nous cessons de faire l'expérience du monde dans le seul corps physique, en nous tenant dans le monde indépendamment du corps physique, nous nous tenons alors dans le monde de telle sorte que nous apprenons à vivre une réalité en dehors de l'espace et du temps. Nous faisons alors l'expérience de la réalité du spirituel-psychique, comment il agit dans le temporel, de la façon dont je l'ai décrit. Mais si nous conquérons la vision de l'esprit, qui sera conquise en surmontant la douleur et la souffrance à l'intérieur, nous avons déjà avec cela introduit dans la connaissance un peu de l'élément qui, de manière tout à fait continue, fait entrer la connaissance dans l'expérience religieuse, en ce sens qu'elle reste debout en tant que connaissance réelle, en tant que savoir réel selon l'esprit. Et en faisant l'expérience de ce qui est resté des temps anciens dans les vénérables représentations traditionnelles comme contenu religieux, nous vivons à nouveau aussi du plus nouveau d'un contenu spirituel similaire, lorsque nous nous élevons luttant à une telle connaissance, qui maintenant peut vivre dans la sphère de la piété religieuse.

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Gehen wir aber hinüber zu dem Orient. In je ältere Zeiten wir zurückgehen, desto mehr finden wir, daß es mit dem geistigen Leben wiederum etwas ganz anderes ist. Und auch da kann uns das führen, was wir selbst innerhalb der modernen Geistesschulung uns erringen: Wenn wir von dem Erleben des lebendigen Begriffs zu jenen innerlichen Schmerzen und Leiden aufsteigen, die wir überwinden müssen, damit wir ganz Sinnes- beziehungsweise Geistesorgan werden als ganzer Mensch und aufhören, im bloßen physischen Leib die Welt zu erfahren, indem wir unabhängig vom physischen Leib in der Welt drinnenstehen, dann stehen wir so in der Welt, daß wir lernen, außerhalb von Raum und Zeit eine Wirklichkeit zu erleben. Da erleben wir dann auch die Wirklichkeit des Geistig-Seelischen, wie es hereinwirkt in das Zeitliche, in der Art, wie ich es geschildert habe. Aber wenn wir die Geistesschau erringen, die errungen wird durch die Überwindung von Schmerz und Leid im Innenn, haben wir damit schon etwas von dem Element in die Erkenntnis hereingebracht, das in ganz kontinuierlicher Weise die Erkenntnis hineinführt, indem sie als wirkliche Erkenntnis, als wirkliches Wissen dem Geiste nach aufrecht bleibt, in das religiöse Erleben. Und indem wir das, was aus alten Zeiten in ehrwürdigen traditionellen Vorstellungen als Religionsinhalt geblieben ist, erleben, erleben wir auch Neueres von einem ähnlichen geistigen Inhalt wiederum, wenn wir uns hinaufringen zu einem solchen Erkennen, das nun leben kann in der Sphäre der religiösen Frömmigkeit.

Mais c'est alors seulement que nous comprenons de quelles profondeurs humaines est né ce qui a vécu dans le monde de l'Orient ancien comme une unité de la religion, de l'art et de la science. Ils étaient une fois une unité. Ce que l'humain connaissait, ce qu'il assimilait dans son monde d'idées, était une autre facette de ce qu'il plaçait devant lui pour que cela rayonne vers en bas sur lui dans la beauté artistique ; et ce qu'il saisissait donc en connaissant et laissait rayonner dans beauté était aussi un spirituel auquel il offrait ses actes de culte, par rapport auquel il se mouvait aussi par ses actes comme abandonné à un ordre supérieur. Nous voyons ici la religion, l'art et la science se réaliser comme une unité.

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Dann aber verstehen wir erst, aus welchen menschlichen Tiefen heraus das entsprungen ist, was in der Welt des alten Ostens gelebt hat als eine Einheit nun von Religion, Kunst und Wissenschaft. Die waren einmal eine Einheit. Was der Mensch erkannte, was er aufnahm in seine Ideenwelt, das war eine andere Seite dessen, was er vor sich hinstellte, damit es in künstlerischer Schönheit auf ihn herabstrahle; und was er also erkennend erfaßte und in Schönheit erstrahlen ließ, war auch ein Geistiges, dem er seine Kultushandlungen darbrachte, demgegenüber er sich auch mit seinem Tun bewegte als hingegeben an eine höhere Ordnung. Religion, Kunst, Wissenschaft sehen wir hier als eine Einheit verwirklicht.

Mais cela nous ramène à une époque où la pensée humaine elle-même ne vivait pas seulement sur les vagues de la parole, mais où l'expérience pour l'humain était que la pensée vivait dans des régions encore plus profondes que la parole elle-même, que la pensée était liée aux fibres les plus intimes de ce qui est la nature humaine. C'est pourquoi le yogi indien a extrait les pensées de la respiration, de ce qui est fondé plus profondément que le mot. La pensée ne s'est élevée que peu à peu jusqu'à la parole, puis au-delà de la parole dans la culture moderne. Mais la pensée était à l'origine liée à une expérience humaine plus intime, plus profonde, et c'était à l'époque où l'unité de la vie religieuse, artistique et scientifique pouvait s'épanouir dans une harmonie pénétrante.

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Das führt uns aber zurück in eine Zeit, in der der menschliche Gedanke selber nicht nur auf den Wogen des Wortes dahinlebte, sondern wo Erlebnis für den Menschen war, daß der Gedanke in noch tieferen Regionen lebte als das Wort selber, daß der Gedanke verbunden war mit der innigsten Faserung dessen, was menschliche Natur ist. Daher holte der indische Jogi die Gedanken aus dem Atmen heraus, aus dem was tiefer begründet ist als das Wort. Der Gedanke hat sich erst nach und nach zum Wort erhoben und dann über das Wort hinaus in der modernen Kultur. Der Gedanke war aber ursprünglich mit intimerem, , tieferem menschlichen Erleben verbunden, und das war in der Zeit, wo sich die Einheit des religiösen, künstlerischen und wissenschaftlichen Lebens in einer durchgreifenden Harmonie entfalten konnte.

De ce que j'ai pu vous décrire comme une unité harmonieuse de la religion, de l'art et de la philosophie, telle qu'elle se présente à nous comme une direction dans les Védas, il existe aujourd'hui un écho là-bas en Orient. Mais une résonance que nous devons comprendre, que nous ne comprenons pas facilement si nous nous élevons simplement jusqu'à ce qui vit dans la culture occidentale en tant que séparation de la religion, de l'art et de la science, mais que nous comprenons dans le plein sens du terme si nous nous élevons, grâce à une science de l'esprit plus récente, jusqu'à une vision qui produit à son tour une harmonie entre religion, art et science. Mais nous avons encore devant nous, en Orient, les vestiges de cette ancienne unité. Regardons de l'autre côté : même là où elle se répercute en Europe, nous en avons encore une résonance devant nous. Ce qui était une époque historique antérieure est, d'une certaine manière, encore présent sur une certaine partie de la terre. Et nous pouvons percevoir cette présence chez un grand philosophe de l'Est européen, chez Solovjeff.

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Von dem, was ich Ihnen so schildern konnte als harmonische Einheit von Religion, Kunst und Philosophie, wie sie uns etwa in den Veden als Richtung entgegentritt, von dem ist heute ein Nachklang im Orient drüben vorhanden. Aber ein Nachklang, den wir verstehen müssen, den wir nicht leicht verstehen, wenn wir uns bloß zu dem erheben, was in der westlichen Kultur lebt als Trennung von Religion, Kunst und Wissenschaft, den wir aber im vollen Sinn des Wortes verstehen, wenn wir uns durch eine neuere Geisteswissenschaft aufschwingen zu einer Anschauung, die wiederum eine Harmonie von Religion, Kunst und Wissenschaft hervorbringt. Aber wir haben im Orient noch die Überreste von jener alten Einheit vor uns. Schauen wir hinüber: selbst da, wo er nach Europa herüberwirkt, haben wir das in einem Nachklang noch vor uns. Was eine frühere geschichtliche Epoche war, das ist in einer gewissen Weise auf einem gewissen Fleck der Erde noch Gegenwart geblieben. Und wir können diese Gegenwart an einem großen Philosophen des europäischen Ostens, an Solovjeff, wahrnehmen.

Ce philosophe de la seconde moitié du XIXe siècle agit sur nous d'une manière très particulière.

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Dieser Philosoph der zweiten Hälfte des 19. Jahrhunderts wirkt auf uns in einer ganz besonderen Art.

Si nous nous tournons vers les philosophes occidentaux, John Stuart Mill ou Herbert Spencer ou d'autres, nous constatons que leur point de vue est issu de la pensée scientifique que j'ai décrite aujourd'hui. Mais chez Solovjeff, il y a encore quelque chose qui représente la religion, l'art et la science comme une unité. On voit toutefois, si l'on se met à lire Solovjeff, qu'il utilise comme un langage philosophique ce que l'on trouve chez Kant, chez Comte ; il maîtrise complètement les formes d'expression de ces philosophes occidentaux et d'Europe centrale. Mais si l'on s'imprègne de son sens, de ce qu'il exprime à travers ces formes d'expression, alors on le vit différemment. On a chez lui un sentiment historique : il nous apparaît comme un homme ressuscité des discussions qui ont eu lieu/été labourées avant le Concile de Nicée. On ressent littéralement le ton qui régnait dans les discussions des premiers pères chrétiens, et il y avait encore dans ces premiers siècles chrétiens un écho de l'unité de la religion et de la science - cette unité où la volonté coule/flue encore ensemble avec la pensée. Tout cela coule et ondule à travers la vision du monde est européenne de Solovjeff.

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Wenden wir uns den Philosophen des Westens zu, John Stuart Mill oder Herbert Spencer oder anderen, so finden wir, daß ihr Standpunkt herausgewachsen ist aus dem naturwissenschaftlichen Denken, das ich heute beschrieben habe. In Solovjeff lebt aber noch etwas, was Religion, Kunst und Wissenschaft wie als eine Einheit darstellt. Man sieht allerdings, wenn man sich an die Lektüre von Solovjeff heranmacht, daß er wie eine philosophische Sprache dasjenige benützt, was sich bei Kant, bei Comte findet; er beherrscht die Ausdrucksformen dieser westlichen und mitteleuropäischen Philosophen vollständig. Lebt man sich aber in seinen Sinn ein, in das was er durch diese Ausdrucksformen ausspricht, dann erlebt man ihn anders. Man hat bei ihm ein historisches Gefühl: er kommt einem vor wie ein Mensch, der wieder auferstanden ist aus den Diskussionen heraus, die vor dem Konzil von Nicäa gepflogen worden sind. Man fühlt förmlich den Ton, der in den Diskussionen der ersten christlichen Väter herrschte, und es lebte in diesen ersten christlichen Jahrhunderten durchaus noch ein Nachklang von der Einheit von Religion und Wissenschaft - diese Einheit, wo auch der Wille noch mit dem Denken zusammenfließt. Das alles strömt und wellt durch Solovjeffs osteuropäische Weltanschauung.

Et si nous regardons aujourd'hui ce qui nous entoure en tant que culture et civilisation, nous constatons que dans les régions plus occidentales, nous avons justement cette séparation entre la religion, l'art et la science, mais que ce qui appartient vraiment à notre instant historique, ce qui est vraiment ce à partir de quoi nous devons agir et marquer les structures du monde, c'est cette science qui est strictement construite sur la pensée scientifique décrite en premier lieu, tandis que nous reprenons l'ancienne tradition dans les styles artistiques et les contenus religieux. Nous voyons aujourd'hui à quel point l'art est peu productif dans les nouvelles formes de style, comment les anciennes formes de style renaissent partout. Ce qui est vivant à notre époque, c'est ce qui vit dans la pensée scientifique.

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Und wenn wir heute auf das hinschauen, was uns als Kultur und Zivilisation umgibt, so finden wir, daß wir in den mehr westlichen Gegenden eben jene Trennung von Religion, Kunst und Wissenschaft haben, daß aber das, was so recht unserem historischen Augenblick angehört, was so recht das ist, aus dem heraus wir wirken und die Gebilde der Welt prägen müssen, jene Wissenschaft ist, die auf dem zuerst geschilderten naturwissenschaftlichen Denken streng aufgebaut ist, während wir in den Kunststilen und Religionsinhalten altes Traditionelles übernehmen. Wir sehen heute, wie wenig produktiv die Kunst in neuen Stilformen ist, wie überall alte Stilformen aufleben. Dasjenige, was in unserer Zeit lebendig ist, ist das, was im wissenschaftlichen Gedanken lebt.

Nous devons d'abord attendre une époque qui aura, comme je l'ai décrit, la pensée vivifiée, imaginative, qui conduira à nouveau au vivant, qui pourra à nouveau devenir immédiatement créative artistiquement dans de nouvelles formes de style, sans devenir de paille, allégorique, non artistique.

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Wir müssen erst eine Zeit abwarten, die in der Weise, wie ich es geschildert habe, das belebte, imaginative Denken hat, das wiederum zum Lebendigen führt, das wiederum auch in neuen Stilformen künstlerisch unmittelbar schöpferisch werden kann, ohne daß es strohern, allegorisch, unkünstlerisch wird.

Nous voyons donc la pensée scientifique comme l'impulsion motrice du présent immédiat, et ce d'autant plus que nous allons vers l'ouest.

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Wir sehen also den wissenschaftlichen Gedanken als den treibenden Impuls der unmittelbaren Gegenwart, und um so mehr, je mehr wir nach Westen kommen.

Et nous voyons à l'Est un écho de ce qui était l'unité de la religion, de l'art et de la science.

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Und wir sehen im Osten einen Nachklang dessen, was Einheit von Religion, Kunst und Wissenschaft war.

Les Européens de l'Est ont cet élément religieux fondamental, cette nuance dans l'esprit. Ils regardent le monde avec cette nuance fondamentale. Ils ne peuvent comprendre l'Occident qu'en faisant un détour par un développement spirituel tel qu'il existe ici dans notre mouvement spirituel-scientifique ; ils n'ont pas de compréhension immédiate de l'Occident parce qu'en Occident, on veut justement délimiter le religieux et l'artistique de la pensée scientifique.

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Dieses religiöse Grundelement, diese Nuance haben die Osteuropäer im Gemüt. Sie schauen mit dieser Grundnuance in die Welt hinein. Den Westen können sie nur auf dem Umweg über eine solche geistige Entwikkelung verstehen, wie sie hier bei unserer geisteswissenschaftlichen Bewegung vorliegt; ein unmittelbares Verständnis für den Westen haben sie nicht, weil man gerade im Westen reinlich das Religiöse und das Künstlerische vom wissenschaftlichen Gedanken abgrenzen will.

Et au milieu - nous ne pouvons pas nous y soustraire/fermer -, l'humain doit se laisser imposer le monde extérieur des sens et vivre la pensée appropriée au monde extérieur des sens ; mais il ne peut pas faire autrement que de regarder en arrière sur lui-même et de vivre son intériorité, et pour l'intériorité, il a besoin de l'expérience religieuse. Mais j'aimerais dire que, plus profondément caché dans la nature humaine que l'expérience religieuse, dont on a besoin à l'intérieur, et l'expérience scientifique, dont on a besoin pour l'observation du monde extérieur, se trouve le membre de liaison entre les deux, l'expérience artistique.

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Und in der Mitte - wir können uns dem nicht verschließen -, da muß der Mensch die äußere Sinnenwelt sich aufdrängen lassen und den Gedanken erleben, der sich für die äußere Sinnenwelt eignet; er kann aber nicht anders als zurückblicken auf sich selber und sein Inneres erleben, und für das Innere braucht er das religiöse Erleben. Ich möchte aber sagen, tiefer verborgen in der menschlichen Natur als das religiöse Erleben, das man im Innern braucht, und das wissenschaftliche Erleben, das man für die Beobachtung der Außenwelt braucht, ist das Bindeglied zwischen beiden, das künstlerische Erleben.

Ce vécu artistique est à cause de cela aussi quelque chose qui se trouve aujourd'hui dans la vie de telle manière qu'il n'est pas revendiqué/rendu comme valant en premier lieu comme une exigence de la vie. Nous voyons comment la culture occidentale se nourrit de pensées scientifiques et la culture orientale de pensées religieuses. Nous voyons comment nous nous tenons dans une culture artistique, mais comment nous ne pouvons pas nous y intégrer pleinement, comment la culture artistique est diversement une renaissance. Mais il faut dire que l'aspiration à un tel équilibre est absolument bien présente au milieu de l'Est et de l'Ouest. Et nous la constatons en jetant un coup d'œil quelque peu tout de suite sur Goethe.

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Dieses künstlerische Erleben ist daher auch etwas, was heute im Leben so dasteht, daß es nicht in erster Linie als Anforderung an das Leben geltend gemacht wird. Wir sehen, wie sich die westliche Kultur mit Wissenschaftsgedanken trägt und die östliche Kultur mit religiösen Gedanken. Wir sehen, wie wir in einer künstlerischen Kultur drinnenstehen, wie wir uns aber nicht voll in sie einleben können, wie die künstlerische Kultur vielfach Renaissance ist. Dennoch aber muß man sagen, die Sehnsucht nach einem solchen Ausgleich ist in der Mitte zwischen Ost und West durchaus vorhanden. Und wir sehen sie, wenn wir etwa hinblicken gerade auf Goethe.

Quelle était donc la grande aspiration/nostalgie de Goethe lorsqu'il a été, j'aimerais dire, confronté aux énigmes de la nature à partir d'immédiates dispositions artistiques ? Son sens artistique s'est évidemment transformé en vision scientifique. Et on aimerait dire que chez Goethe, l'Européen central représentatif, nous trouvons l'art et la science marqués d'une même empreinte, et nous les trouvons encore marqués d'une même empreinte si nous suivons la vie de Goethe dans son évolution et si nous comprenons comment placer Goethe dans l'évolution des temps modernes. Goethe se vit dans cette interaction entre l'art et la science. C'est ainsi que naquit en lui une nostalgie que l'on ne peut comprendre qu'historiquement : le besoin d'Italie, de culture méridionale. Et c'est en observant les œuvres d'art qui s'offraient à lui dans le Sud qu'il écrivît à ses amis de Weimar quelque chose qui s'inspirait de ce qu'il avait appris là-bas à Weimar en tant que philosophie et science. Il avait trouvé l'action divine représentée de manière philosophique chez Spinoza. Cela ne lui suffisait pas. Il voulait un vivre plus large, plus spirituel dans le monde et dans la spiritualité.

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Was war denn Goethes große Sehnsucht, als er, ich möchte sagen, aus unmittelbar künstlerischen Anlagen heraus vor die Rätsel der Natur gestellt wurde? Sein Künstlersinn formte sich wie selbstverständlich um zu seiner wissenschaftlichen Anschauung. Und man möchte sagen, bei Goethe, dem repräsentativen Mitteleuropäer, finden wir Kunst und Wissenschaft doch in eins geprägt, und wir finden es weiter in eins geprägt, wenn wir das Goethesche Leben in seiner Entwickelung verfolgen und wenn wir verstehen, Goethe so recht in die Entwickelung der neueren Zeit hineinzustellen. Goethe lebt sich hinein in dieses Zusammenwirken von Kunst und Wissenschaft. So entstand eine nur historisch aufzufassende Sehnsucht in ihm: der Drang nach Italien, nach südlicher Kultur. Und von der Beobachtung der Kunstwerke, die sich ihm im Süden darboten, schrieb er seinen Weimarischen Freunden etwas, was sich anlehnte an das, was er dort in Weimar als Philosophie und Wissenschaft kennengelernt hatte. In Spinoza hatte er das göttliche Walten dargestellt gefunden in philosophischer Weise. Ihm genügte das nicht. Er wollte ein erweitertes, ein vergeistigteres Hineinleben in die Welt und in die Geistigkeit.

Et à la vue des œuvres d'art méridionales, il écrivit à ses amis : "Là est la nécessité, là est Dieu !" Et : "J'ai la supposition que les Grecs procédaient selon les lois mêmes selon lesquelles la nature elle-même procède et dont je suis sur la trace". Ici, Goethe veut fondre en un seul la science et l'art.

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Und im Anblick der südlichen Kunstwerke schrieb er seinen Freunden: «Da ist Notwendigkeit, da ist Gott!» Und: «Ich habe die Vermutung, daß die Griechen nach eben den Gesetzen verfuhren, nach welchen die Natur selbst verfährt und denen ich auf der Spur bin.» Hier will Goethe in eins verschmelzen Wissenschaft und Kunst.

Si je termine par quelque chose de personnel, c'est uniquement pour vous montrer comment on peut trouver, à travers un symptôme particulier, la manière dont le monde médiant peut se situer entre l'Est et l'Ouest. J'ai vécu ce symptôme il y a environ quarante ans, ici à Vienne. Dans ma jeunesse, j'ai fait la connaissance de Karl Julius Schröer ; il tenait alors des lectures d'histoire de la poésie allemande depuis la première apparition de Goethe. Dans sa conférence d'introduction, il a dit plusieurs choses significatives, mais il a ensuite prononcé une parole caractéristique de l'aspiration des meilleurs esprits d'Europe centrale, à partir d'où ils parlaient de manière plus instinctive. Schröer aussi parlait de manière plus instinctive. Mais en fait, il a exprimé le désir d'une alliance entre l'art et la science, d'une alliance entre la pensée scientifique occidentale et la pensée religieuse orientale dans la vision artistique, en résumant ce qu'il voulait dire par cette parole qui, pour moi, est significative : l'Allemand a une conscience esthétique.

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Wenn ich zum Schluß etwas Persönliches anführe, so soll es nur aus dem Grund geschehen, um Ihnen anzudeuten, wie man an einem einzelnen Symptom die Art und Weise finden kann, wie die mittlere Welt sich zwischen Ost und West hineinstellen kann. Dieses Symptom habe ich vor etwa vierzig Jahren hier in Wien erlebt. In meiner Jugend lernte ich kennen Karl Julius Schröer; er las dazumal über die Geschichte der deutschen Dichtung seit Goethes erstem Auftreten. In der Einleitungsvorlesung sagte er verschiedenes Bedeutungsvolles; aber er sprach dann ein Wort aus, das so recht charakteristisch ist für das mitteleuropäische Sehnen der besten Geister, aus dem heraus sie, mehr instinktiv, sprachen. Auch Schröer sprach mehr instinktiv. In der Tat aber drückte er die Sehnsucht nach einer Verbindung von Kunst und Wissenschaft aus, nach einer Verbindung des westlichen Wissenschaftsgedankens und des östlichen Religionsgedankens in dem künstlerischen Schauen, indem er zusammenfaßte, was er sagen wollte, in dem für mich bedeutungsvollen Worte: Der Deutsche hat ästhetisches Gewissen.

Cela n'exprime certainement pas une réalité générale immédiate. Mais une aspiration est exprimée, l'aspiration à voir ensemble l'art et la science. Et si l'on peut voir cela ensemble, alors un autre Européen central, que je viens de caractériser, a eu le sentiment qu'il a exprimé en de belles paroles : que si l'on peut voir ensemble la science et l'art, on peut aussi s'élever à l'expérience religieuse, si seulement dans ce sens de Goethe on trouve une véritable spiritualité dans la science et l'art. C'est dans ce sens qu'il a prononcé la parole : celui qui possède la science et l'art a aussi la religion ; celui qui ne possède pas les deux, il aurait la religion.

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Damit ist ganz gewiß nicht eine unmittelbare allgemeine Realität ausgesprochen. Aber eine Sehnsucht ist ausgesprochen, die Sehnsucht danach, zusammenzuschauen Kunst und Wissenschaft. Und dann, wenn man das zusammenschauen kann, dann hat ja ein anderer Mitteleuropäer, den ich eben charakterisiert habe, die Empfindung gehabt, die er ausgesprochen hat in schönen Worten: daß man dann, wenn man zusammenschauen kann Wissenschaft und Kunst, sich auch zum religiösen Erleben erheben kann, wenn nur in diesem Goetheschen Sinn in Wissenschaft und Kunst wirkliche Geistigkeit gefunden wird. In diesem Sinn hat er das Wort gesprochen: Wer Wissenschaft und Kunst besitzt, Hat auch Religion; Wer jene beiden nicht besitzt, Der habe Religion.

Celui qui a une conscience esthétique parvient aussi à la force de conscience scientifique et religieuse. Et cela peut nous montrer où nous nous tenons aujourd'hui.

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Wer ästhetisches Gewissen hat, kommt auch zur wissenschaftlichen und religiösen Gewissenhaftigkeit. Und das kann uns zeigen, wo wir heute stehen.

Aujourd'hui, je n'aime pas prononcer le mot souvent cité de période de transition, chaque époque est une période de transition, mais aujourd'hui, dans une période de transition, ce qui compte, c'est justement en quoi consiste la transition dans le temps.

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Heute, ich spreche nicht gern das oft angeführte Wort von der Übergangszeit aus, jede Zeit ist eine Übergangszeit, aber heute, in einer Übergangszeit, kommt es eben darauf an, worin der Übergang in der Zeit besteht.

À notre époque, nous avons vécu, développée jusqu'au triomphe suprême, la séparation de la religion, de l'art et de la science. Mais ce qui doit être recherché et qui peut permettre de trouver une entente entre l'Orient et l'Occident, c'est l'harmonisation, l'unité intérieure de la religion, de l'art et de la science. Et c'est à cette unité intérieure que voudraient conduire la conception du monde et la vision de la vie dont il a été question ici et dont il sera question plus loin.

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In unserer Zeit erlebten wir, bis zum höchsten Triumph entwickelt, die Trennung von Religion, Kunst und Wissenschaft. Das aber, was gesucht werden muß und was erst eine Verständigung finden lassen kann zwischen Ost und West, das ist die Harmonisierung, die innere Einheit von Religion, Kunst und Wissenschaft. Und zu dieser inneren Einheit möchte die Weltauffassung und Lebensanschauung, von der hier gesprochen worden ist und weiter gesprochen werden wird, führen.

 
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TROISIÈME CONFÉRENCE
aujourd'hui ce serait peut-être: de l'immédiateté de l'éternité
ANTHROPOSOPHIE ET ORIENTATION MONDIALE

Vienne, le 3 juin 1922
Est-Ouest dans l'histoire
01
Mes très chers présents ! Goethe, qui a exprimé en expressions simples tant de grandes choses qui font bouger les humains, a aussi écrit cette phrase : " Que chacun se demande quad même avec quel organe il peut en tout cas agir sur son temps et agira" ! Si on laisse agir sur soi une telle déclaration, avec tout ce dont on peut savoir que ça a pu traverser l'âme de Goethe, en faisant une telle déclaration, on est alors transporté dans tout le rapport de l'humain à la vie historique. Certes aujourd'hui encore, chez la plupart des humains cela se déroule, plus ou moins inconsciemment, qu'ils cherchent à gagner leur point de vue particulier, par lequel ils trouvent la possibilité d'employer leurs forces de la Faso correcte dans le cours de l'évolution de l'humanité, que cette mise en œuvre se fasse à partir de l'esprit de l'époque dans laquelle ils vivent. Mais on a bien la permission de dire qu'une observation même superficielle de la vie humaine dans son évolution montre que les humains sont finalement obligés d'organiser leur vie de manière de plus en plus consciente. La vie instinctive était la caractéristique des anciennes époques de culture. Le passage à une conscience toujours plus grande est aussi un facteur historique. Et à l'heure actuelle, on peut déjà sentir comment la vie, devenue de plus en plus compliquée, exige de l'humain qu'il se place avec un certain degré de conscience, même s'il occupe une place peut-être encore peu remarquable, dans l'évolution de l'humanité. Seuls tout de suite lors de l'aspiration à un tel point de vue, nous avons aujourd'hui encore peu de points de repère dans l'observation de l'évolution historique de l'humanité.
02
Cette observation de l'évolution historique de l'humanité, dans le sens le plus récent d'une science, n'est en fait pas encore très ancienne. Et on aimerait dire que l'on ressent la jeunesse de l'observation historique dans ce qui vient justement de se manifester dans l'historiographie.
03
Cette historiographie a produit de grandes choses. En se développant à partir de l'écriture non scientifique des chroniques qui régnait encore au XIXe siècle, elle a essayé, parce qu'elle est tombée dans l'ère de science de la nature, de prendre de plus en plus aussi des formes de science de la nature. Et c'est ainsi que nous voyons que l'approche historique s'est de plus en plus rapprochée de l'idée que ce qui suit devrait toujours être compris de manière causale à partir de ce qui précède. Mais celui qui est suffisamment impartial peut voir que, bien qu'une telle considération causale de la vie historique de l'humanité mène loin, il reste encore d'innombrables faits de cette vie historique qui ne peuvent pas être rangés sans contradiction dans une simple considération des causes. Et alors vous apparaît volontiers une image qui peut pourvoir de sens la vie historique : l'image d'un courant s'écoulant chez lequel nous ne pourrions cependant pas toujours déduire ce qui se trouve à un certain point du cours de ce qui se trouve un peu plus en amont, mais nous devrions tenir compte du fait que dans ses profondeurs agissent toutes sortes de forces qui peuvent en tout lieu se presser à la surface, soulever des vagues qui ne sont pas conditionnées par celles qui les précèdent.
04
C'est ainsi que la vie historique de l'humanité nous semble indiquer des profondeurs indicibles, nous apparaît comme une surface sur laquelle s'élèvent des forces incommensurables. Et la contemplation humaine ne peut guère avoir la prétention de voir en détail tout ce qui est particulièrement particulier à une époque donnée. C'est pourquoi l'observation historique devra de plus en plus se rapprocher de ce que j'aimerais appeler une observation symptomatologique. Nous devons donc aussi constater l'état de santé et de maladie de l'organisme humain, qui est une totalité si richement différenciée, en observant les symptômes par lesquels cet organisme se manifeste. De même, nous devons sans doute nous habituer peu à peu à pratiquer une symptomatologie historique : de comprendre ce qui s'annonce à la surface de telle sorte que cela nous indique des choses isolées et que, grâce à des symptômes de plus en plus nombreux que nous saisissons dans notre vision, nous en venions à laisser agir sur nous le vivant intérieur du devenir historique de telle sorte que, grâce à la saisie psychique/d'âme intérieure des forces historiques de l'humanité, qui agissent aussi dans notre âme par toutes sortes de détours, nous soyons en mesure de trouver notre place dans l'évolution de l'humanité.
05
C'est tout de suite une telle observation du monde et de la vie, tel que j'ai eu la permission de la développer devant vous, qui peut vous faire ressentir à quel point les symptômes historiques s'expriment aussi dans ce qu'on vit au plus intime de son être. C'est tout de suite ce que je vous ai décrit, l'éveil et le réveil de facultés de connaissance qui ne sont pas disponibles dans la conscience ordinaire, mais qui, dans la vie ordinaire, sommeillent au plus profond de l'âme, c'est précisément cet éveil et ce réveil de facultés de connaissance, tels qu'ils conviennent à l'humain moderne, qui nous amène à comprendre que nous devons non seulement développer ces facultés de connaissance dans le présent d'une manière différente de ce qu'elles ont été dans le monde antérieur.
06
Mais si nous développons de telles forces, si nous menons cette vie intérieure intime jusqu'à une vision spirituelle, alors le caractère fondamental de cette vision spirituelle se présente à l'humain d'aujourd'hui d'une tout autre manière qu'il ne se présentait aux humains de l'antiquité orientale, par exemple, à laquelle nous avons touché lorsque nous avons décrit avant-hier l'exercice du yoga.
07
Si nous jetons un coup d'œil vers ces anciennes façons de voir orientales, telles qu'elles ont été développées par ceux qui voulaient expulser de leur intérieur des forces de connaissance qui accèdent au suprasensible, nous devons dire que tout ce que nous savons à ce sujet nous indique que de telles connaissances, en s'installant dans l'âme, ont pris un caractère absolument permanent, durable dans l'âme. Ce que l'humain pense dans la vie ordinaire, ce qu'il absorbe comme l'effet sur son âme des expériences de l'existence terrestre, ce qui se fixe ensuite dans les souvenirs, c'est ce qui a une durée dans l'âme ; et nous ne sommes tout simplement pas sains d'esprit si nous avons des lacunes considérables dans la capacité de nous souvenir de ce que nous avons vécu dans le monde à partir d'un certain moment de notre évolution dans l'enfance. Tout ce qui a été acquis dans l'ancienne culture orientale de l'âme en matière de compréhension du monde spirituel s'est intégré/articulé/membré dans cette durée de la pensée. Cela formait pour ainsi dire des représentations de souvenir, comme les expériences ordinaires de la journée forment des représentations de souvenir. C'était précisément la particularité du voyant oriental plus âgé que de se retrouver de plus en plus dans une vie communautaire permanente avec le monde spirituel, en accomplissant son chemin dans ce monde. Il se savait pour ainsi dire en sécurité une fois qu'il était dans le monde divin-spirituel. Il savait que celui-ci représentait quelque chose de durable pour son âme aussi.
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Or, dans un certain sens, on peut dire que c'est le contraire qui se produit pour celui qui s'élève aujourd'hui à une certaine vision spirituelle à partir des forces de la nature humaine vers lesquelles l'humanité s'est développée depuis ces jours anciens jusqu'à nos jours : Il développe ses façon de voir sur le spirituel de telle sorte qu'il en fait l'expérience ; mais il lui est impossible d'en faire des représentations-souvenir de la même manière que les pensées que nous vivons au quotidien au monde extérieur deviennent des représentations-souvenir.
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Pour beaucoup de ceux qui, selon les méthodes actuelles, parviennent à une certaine vision spirituelle, c'est une grande déception de constater qu'ils obtiennent certes des aperçus de ce monde spirituel, mais que ces aperçus sont passagers, comme la vision d'une réalité devant laquelle nous nous trouvons dans le monde extérieur et qui n'existe plus dans notre perception lorsque nous nous en éloignons. Ce qui se passe dans la vie de l'âme n'est pas une incorporation à la mémoire au sens habituel du terme, mais un lien instantané avec le monde spirituel. Si l'on veut retrouver ce lien plus tard, on ne peut pas simplement faire remonter l'expérience de la mémoire, mais on ne peut faire que ce qui suit : On peut bien sûr se souvenir de ce qui appartient aux expériences habituelles du monde physique, comment on s'est amené, par exemple, à travers des développements de forces, à avoir une telle expérience du monde spirituel. On peut alors refaire le chemin, et on peut l'avoir à nouveau, tout comme lorsqu'on revient à une perception sensorielle. C'est précisément l'un des moments les plus importants qui garantissent la réalité de la vision moderne : que ce dans quoi nous regardons ne s'unisse pas à notre corporéité ; car cela signifie toujours être uni à la corporéité, être fixé par l'organisme, lorsque les pensées acquièrent une certaine durée en tant que représentations-souvenirs.
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Si j'ai la permission d'ajouter ici une remarque personnelle, peut-être pour un accord, c'est que quelqu'un qui est un peu en contact avec le monde spirituel et qui veut faire part de ce qu'il a vécu, n'est pas en mesure de faire cette communication au sens habituel du terme, à partir de sa mémoire. Il doit toujours faire certains efforts pour s'amener lui-même à l'observation spirituelle directe. C'est pourquoi même quelqu'un qui parle directement depuis le monde spirituel peut, je dirais, faire trente fois le même exposé : il ne sera pas pour lui une répétition du précédent, mais il doit toujours être extrait de l'expérience de manière directe.
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En même temps, il y a là quelque chose dont je voudrais dire qu'il peut apaiser certaines inquiétudes qui pourraient surgir dans les âmes craintives/anxieuses/inquiètes face à cette vision moderne de l'esprit. Beaucoup de gens considèrent encore aujourd'hui, et avec une certaine raison, que la grandeur des questions énigmatiques et significatives de l'existence réside précisément dans le fait que ces questions ne peuvent jamais être résolues dépourvues de restes.
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Elles craignent la philistrosité de la vision spirituelle si elles devaient être confrontées à l'affirmation que les énigmes de l'être peuvent être définitivement "résolues" par une quelconque vision du monde.
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Or, la conception de la vie dont il est question ici ne peut pas non plus parler d'une telle "solution", et ce précisément pour la raison que nous venons d'indiquer : ce qui est en quelque sorte toujours oublié doit toujours être acquis à nouveau.
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Mais c'est tout de suite en cela que se montre la vitalité. Nous nous rapprochons en quelque sorte de ce qui se manifeste aussi extérieurement dans la nature comme le caractère du vivant, par rapport à ce que nous vivons habituellement intérieurement, en voyant nos pensées devenir des représentations de souvenir. Peut-être que pour certains, ce que je veux dire maintenant semble trivial ; mais ce n'est pas trivial. Pas plus que quelqu'un ne peut dire : j'ai mangé hier, je suis donc rassasié, je n'ai pas besoin de manger aujourd'hui, ni demain, ni plus tard -- de même, personne ne peut dire à l'égard de la vision moderne de l'esprit qu'elle est achevée une fois pour toutes, qu'elle se communique ensuite à la mémoire et que l'on sait désormais pour toujours ce que l'on a.
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Oui, ce n'est pas le seul cas où il faut toujours lutter à nouveau pour obtenir la présence de ce qui veut se révéler à l'homme, mais c'est même le cas où, si l'on rumine longtemps les mêmes représentations du monde spirituel, si on les cherche toujours à nouveau, des doutes apparaissent, des incertitudes surgissent, et que l'on doit toujours vaincre à nouveau les incertitudes et les doutes dans la vie intérieure vivante de l'âme, précisément dans la vision spirituelle correcte. On n'est donc jamais, j'aimerais dire, condamné à la tranquillité de l'être fini lorsqu'on aspire à la vision de l'esprit au sens moderne.
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Et une autre chose doit être dite. Cette vision moderne de l'esprit exige avant tout ce que l'on peut appeler la présence d'esprit. La vision de l'esprit des anciens temps orientaux pouvait en quelque sorte prendre son temps. Ce qu'elle obtenait restait durablement disponible. Celui qui veut regarder dans le monde spirituel à partir de la nature humaine moderne doit être vif, aimerais-je dire, avec son organe spirituel ; il doit être conscient du fait que ce qui se révèle à partir du monde spirituel n'est parfois là qu'un instant et disparaît ensuite, et que ce doit donc être saisi au moment de son apparition par la présence d'esprit. Et beaucoup d'êtres humains, qui se préparent soigneusement à une telle vision de l'esprit, n'y parviennent pas parce qu'ils ne recherchent pas en même temps cette présence d'esprit dans des exercices préparatoires. Car ce n'est qu'ainsi que l'on est en mesure d'éviter d'avoir en fait développé son attention quand la chose est déjà à nouveau passée.
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Avec cela je vous ai décrit maintes particularités que rencontre le chercheur moderne du monde spirituel. D'autres particularités de ce genre apparaîtront au cours des exposés. Aujourd'hui, j'aimerais seulement attirer l'attention sur l'une d'entre elles, parce qu'elle mène directement à une certaine observation historique de l'humanité.
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Si en cela nous voulons maintenant à nouveau dans sens caractérisé d'un certain côté en tant qu'humain moderne, trouver le chemin vers le monde spirituel d'une manière sûre, ainsi que nous ne devenions pas des fantaisistes, ainsi c'est le mieux de partir des représentations, des opérations de pensée que nous avons acquises par une observation approfondie de la nature et par l'approfondissement de science de la nature. Aucune représentation ne se prête aussi bien à la vie méditative, comme je l'ai décrit, que celles que l'on acquiert à partir de la science moderne de la nature, non pas pour les assimiler uniquement sur le plan du contenu, mais pour les traiter/élaborer sur le plan du contenu méditativement. En tant qu'humains modernes, nous avons justement appris à penser, au sens le plus strict du terme, à partir de la science de la nature.
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Nous devons garder à l'esprit que c'est justement grâce à la science de la nature que nous avons appris à penser de manière adaptée à notre actuelle époque du temps. Maintenant, tout ce que nous pouvons gagner de la science moderne en termes d'opérations de pensée peut seulement être une préparation pour la véritable vision de l'esprit.
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Nous ne pouvons jamais, par une quelconque conséquence logique, par une quelconque spéculation philosophique, utiliser la pensée ordinaire que nous formons aux choses du monde extérieur, à l'expérience et à l'observation, pour autre chose que pour nous préparer. Nous devons alors attendre que le monde spirituel veuille s'adresser à nous de la manière que j'ai décrite hier et avant-hier. Nous devons d'abord devenir mûrs pour chaque pas particulier de l'observation du monde spirituel. Nous ne pouvons pas, par un caprice intérieur, faire autre chose que de nous transformer en quelque sorte en un organe auquel le monde spirituel veut se révéler. La révélation objective - nous devons l'attendre. Et celui qui a de l'expérience en la matière sait comment il doit attendre certaines connaissances pendant des années, des décennies, avant qu'elles ne s'ouvrent à lui. C'est justement cette circonstance qui garantit l'objectivité de ce qui est réalité dans le monde spirituel, pour la connaissance.
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Il n'en était à nouveau pas de même pour celui qui, dans les temps anciens de l'Orient, cherchait par ses exercices le chemin vers le monde suprasensible. Chez lui, la pensée était d'emblée conçue de telle sorte qu'il lui suffisait en quelque sorte de la poursuivre pour trouver le chemin vers le monde spirituel que j'ai caractérisé avant-hier. Il se trouvait donc déjà, dans la vie ordinaire, dans une pensée qui n'avait besoin que d'être poursuivie pour conduire, dans son propre prolongement, à une certaine clairvoyance, mais qui, parce qu'elle était développée à partir de la vie ordinaire de l'époque, était une vision plus onirique, tandis que la vision à laquelle nous aspirons en tant qu'humains modernes est une vision qui se déroule en pleine réflexion, semblable à celle disponible dans la résolution des problèmes mathématiques.
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Nous y voyons précisément, en nous adressant à ce que le chercheur d'esprit doit vivre intimement, l'expression d'énormes transformations dans toute la nature humaine au cours de périodes historiques. Ces temps sont historiques dans la mesure où non seulement celui qui, par l'observation spirituelle, peut examiner la vie historique des hommes et du cosmos jusqu'aux temps les plus reculés, comme je vais encore le décrire, mais aussi celui qui examine les documents extérieurs de manière impartiale peuvent en arriver à cette conclusion. Nous pouvons aussi regarder dans ces documents extérieurs les temps anciens de la vie spirituelle de l'humanité et voir comment ils se distinguent de ce à quoi nous-mêmes, de ce à quoi notre époque doit aspirer en ce qui concerne la position intérieure dans ce monde spirituel.
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Parce que notre pensée ne peut pas être poursuivie sans plus pour nous amener dans son propre courant se poursuivant à la vision de l'esprit, mais parce qu'elle peut purement faire la préparation, nous préparer dans une certaine mesure nous-mêmes, afin que nous soyons mûrs lorsque le monde spirituel se présente à nous, à contempler celui-ci, c'est tout de suite par cela que notre pensée est apte à agir. à tisser à l'intérieur du champ des expériences, des observations, à l'intérieur du champ que la science de la nature a fait sien. Mais c'est tout de suite en ce que nous envisagions quelle rigueur intérieure, quelle force intérieure notre pensée a atteinte que nous l'appliquerons d'autant plus sûrement à notre formation/entrainement, afin de pouvoir ensuite attendre la révélation du monde spirituel dans le sens correct du terme. Il en ressort déjà que notre pensée est aujourd'hui quelque chose d'autre que dans des temps anciens.
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J'aurai à plusieurs reprises l'occasion de faire des digressions historiques. Beaucoup de choses concernant le monde extérieur pourront être poursuivies à partir de ce que j'ai à dire aujourd'hui. Aujourd'hui, je parlerai davantage de ce que sont les forces intérieures de l'évolution de l'humanité. C'est là que nous sommes finalement conduits à la pensée et à la transformation de cette pensée au cours des époques de l'évolution de l'humanité.
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Mais puisque toute la vie historique extérieure dépend finalement de cette pensée, puisque l'humain produit ce qu'il accomplit historiquement à partir de ses pensées, à côté de ses impulsions émotionnelles et volontaires, nous devons nous tourner vers la pensée humaine si nous voulons nous adresser aux impulsions historiques les plus profondes.
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Mais maintenant, cette pensée humaine telle que nous pouvons l'utiliser aujourd'hui pour la science de la nature d'un côté, et pour l'impact de la liberté humaine de l'autre côté, se distingue pourtant dans une très large mesure de la pensée que nous trouvons dans les époques précédentes de l'humanité. Certes, il se trouvera maints humains pour dire que penser, c'est penser, que ce soit chez John Stuart Mill ou chez Solovjeff, que ce soit chez Platon, Aristote, Héraclite, ou chez les penseurs de l'Orient ancien. Mais celui qui, simplement avec un certain flair/sens à sentir intérieur, est capable d'entrer dans la façon et la manière dont les pensées ont agi au sein de l'humanité, se dira : notre pensée actuelle est au fond quand même quelque chose dé tout autre que la pensée des époques plus anciennes. On touche ainsi à un problème important de l'évolution de l'humanité.
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Regardons notre pensée actuelle. J'aurai encore l'occasion de justifier ce que je vais développer maintenant de manière plus historique, aussi à partir de la science de la nature. Ce que nous appelons pensée s'est en fait développé à partir du maniement du langage. Celui qui a le sens de ce qui est efficace dans la langue d'un peuple, de ce qui agit en tant que logique dans la langue, de la logique dans laquelle nous vivons pendant notre enfance, et qui a ensuite un sens psychologique suffisant pour l'observer dans la vie, trouvera que notre pensée actuelle est en fait issue de ce que la langue fait de notre constitution d'âme. J'aimerais dire que c'est du langage que nous extrayons peu à peu les pensées et les lois de la pensée ; notre pensée actuelle est un don de la parole/du parler.
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Mais tout de suite, la pensée qui est un don de la parole, c'est la pensée qui est devenue grande dans l'humanité civilisée depuis les jours de Copernic, de Galilée, de Giordano Bruno, qui est devenue grande à l'époque où l'humanité a tourné de préférence son attention vers l'observation de la nature au sens moderne. La pensée appliquée à l'observation et à l'expérimentation doit, j'aimerais dire, vivre si familièrement avec nous que nous affinons idéalement ce que nous nous approprions par le langage comme un bien populaire général, de telle sorte qu'il devienne en nous une pensée idéelle par laquelle nous saisissons alors le monde extérieur.
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Mais nous avons seulement besoin de revenir en arrière, sur une courte période par rapport à l'ensemble de l'évolution de l'humanité, pour trouver quelque chose de tout à fait autre. Nous remontons par exemple jusqu'à l'époque grecque. Celui qui sait se transposer dans ce qui œuvrait dans l'art grec, dans la poésie grecque, dans la philosophie grecque, ce qui absolument nous résonne de la Grèce, il trouve de manière tout à fait empirique qu'il est possible que le Grec ait encore vécu ce qui était pensé, intimement tissé avec la parole.
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La pensée et la parole ne faisaient qu'un. En ce qu'on développait le concept de logos, on parlait d'autre chose que ce dont nous parlons lorsque nous parlons des pensées ou de la connexion/liaison des pensées. On parlait des pensées ainsi que cette pensée avait l'élément linguistique comme sa corporéité évidente. Justement aussi peu que, dans le monde physique, nous pouvons penser notre âme séparée spatialement de l'organisme physique, justement aussi peu, pour la conscience grecque, la pensée se séparait de la parole.
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On sentait absolument les deux comme une unité, et sur les flots des paroles s'écoulait la pensée.
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Mais cela conditionne aussi une tout autre position de l'humain dans sa conscience par rapport au monde extérieur que la nôtre avec la pensée, qui s'est déjà détachée de la parole. C'est pourquoi, lorsque nous remontons à l'époque grecque, nous devons au fond nous approprier une tout autre disposition/ambiance d'âme si nous voulons pénétrer dans les expériences réelles de l'âme grecque. C'est pourquoi tout ce qui a été produit dans le monde grec, par exemple en tant que science, n'a plus l'air d'être une science pour les exigences actuelles. Le naturaliste d'aujourd'hui dira : les Grecs n'avaient pas de science de la nature ; ils avaient une philosophie de la nature.
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Et il a raison. Mais le problème n'est ainsi saisi, j'aimerais dire, que dans le quart de son essence. Il repose là quelque chose de beaucoup plus profond.
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Et ce qui repose à la base, nous pouvons d'abord seulement l'explorer avec une vision spirituelle.
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Si nous nous servons de la pensée qui est aujourd'hui particulièrement adaptée à la recherche sur la nature, dans laquelle nous nous formons aujourd'hui par l'hérédité et l'éducation, si nous nous servons de cette pensée et formons ce que nous appelons des représentations scientifiques, alors nous séparons strictement ces représentations scientifiques, selon la nature de notre conscience, de ce que nous appelons l'expérience artistique et de ce que nous appelons l'expérience religieuse. C'est tout de suite une caractéristique fondamentale de notre époque que l'humain moderne exige, en un certain sens, une science qui n'accepte rien d'une quelconque création artistique, d'une quelconque vision artistique, et qui n'accepte rien non plus de ce qui veut être l'objet de la conscience religieuse, de la dévotion religieuse à l'univers et à la divinité. Nous devons dire que c'est une caractéristique de notre civilisation actuelle. Et nous trouvons cette caractéristique de plus en plus marquée à mesure que nous allons vers l'ouest et que nous y examinons le caractère fondamental de la civilisation humaine. C'est la caractéristique de l'humain moderne d'avoir dans son âme, se tenant côte à côte, la science, l'art et la vie religieuse. Et il s'efforce donc de former un concept particulier du savoir, de n'absolument pas laisser l'art empiéter sur la science, d'exclure/de déconnecter l'imagination/la fantaisie de tout ce qui est "scientifique", à l'exception de ce qui vise à l'invention ; et ensuite de faire valoir une autre sorte de certitude de la foi, qui doit jouer son rôle en particulier dans la vie religieuse.
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Si l'on essaie de s'élever à une vision spirituelle dans le sens que j'ai décrit, on arrive, en partant absolument de la pensée scientifique exercée de notre époque, à ce que j'ai caractérisé comme une pensée vivante, une pensée à force d'image. Avec cette pensée à force d'image, on se sent maintenant aussi équipé pour comprendre, j'aimerais dire comment mathématiquement, mais maintenant qualitativement, ce qui ne peut pas être compris avec les mathématiques et la géométrie habituelles : le vivant. Avec la pensée vivante, on se sent apte à saisir le vivant.
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Dans la mesure où nous avons une vue d'ensemble de ce qui agit, disons, dans les simples combinaisons chimiques du monde inorganique, ce qui agit en termes de substances et de forces se trouve dans un équilibre plus ou moins instable, si je peux m'exprimer en termes populaires. L'équilibre devient de plus en plus instable, l'interaction de plus en plus compliquée, au fur et à mesure que nous nous élevons vers le vivant. Et dans la même mesure que l'équilibre devient plus instable, la structure vivante s'arrache à l'expérience quantitative ; et c'est en premier à la pensée vivante qu'elle devient ainsi accessible qu'elle peut se lier à la structure vivante comme la pensée mathématique à l'inerte/la dépourvue de vie. Mais par cela nous parvenons/atteignons - j'ai déjà indiqué là-dessus dans une conférence antérieure, que je dis avec cela en fait quelque chose d'horrible pour beaucoup de penseurs actuels -, par cela nous atteignons un point de connaissance qui conduit continuellement la pensée ordinaire, logique et abstraite au-delà en une saine pensée artistique, en une sorte de vision artistique qui est cependant intérieurement absolument aussi exacte que les mathématiques ou la mécanique peuvent l'être.
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Je sais combien on recule s'effrayant du côté de l'esprit scientifique moderne, à faire passer ce qui veut être exact dans l'artistique, dans ce qui, par l'intervention de la qualité, se forme dans l'humain en une sorte de mathesis qualitative. Mais à quoi sert donc toute théorie de la connaissance qui déclame que nous ne pourrions parvenir à une connaissance de l'objectivité que si nous avancions de conclusion en conclusion et que nous devions nous garder d'inclure quoi que ce soit d'une telle essence artistique dans la connaissance, si la nature, la réalité, à un certain niveau, agissait justement de manière artistique, de sorte qu'elle ne se livrerait qu'à une connaissance artistique.
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En particulier, nous ne parvenons pas à ce qui façonne l'organisme humain à partir de l'intérieur, comme je l'ai décrit avant-hier, et qui agit en nous comme une sorte de premier homme suprasensible, si nous ne laissons pas ce qui est pensé d'assemblage s'écouler dans une sorte de création artistique, si nous ne pouvons pas recréer la forme humaine créatrice à partir d'une mathématique qualitative.
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Il nous suffit de conserver l'esprit de la science et d'accueillir l'esprit de l'art.
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Bref, nous devons faire naître une vision artistique à partir de ce que nous appelons aujourd'hui la science, en conservant tout l'esprit scientifique.
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Mais alors, si nous faisons cela, nous nous approchons de la réconciliation de la science et de l'art, comme Goethe l'avait pressenti, en prononçant une phrase comme celle-ci : "Le beau est une manifestation de lois naturelles secrètes qui, sans son apparition, nous seraient restées éternellement cachées". Goethe le savait bien : si l'on s'en tient à vouloir comprendre la nature ou le monde en général avec les formes-pensées qui se révèlent être les plus saines et les plus justes pour le monde inorganique, on n'obtient tout simplement pas la totalité du monde. Et l'on ne trouvera pas plus tôt le passage de la science de l'inorganique à celle de l'organique avant d'avoir transposé la connaissance abstraite dans la connaissance intérieurement vivifiée, qui est en même temps un connecter et un régner/agir intérieur.
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En nous tournant ainsi, au sein de l'aspiration moderne de l'esprit, vers une saisie du vivant, nous nous approchons de ce qui, dans la conscience grecque, n'était pas disponible de manière aussi réfléchie et consciente que ce à quoi nous aspirons, mais justement de manière instinctive. Et personne ne comprend en réalité ce qui s'exprimait encore chez Platon, mais en particulier chez les philosophes présocratiques, s'il ne se rend pas compte qu'était encore disponible une interaction entre l'élément artistique de l'humain et l'élément philosophique-scientifique. Ce n'est qu'à la fin de l'ère grecque, philosophiquement parlant quelque peu chez Aristote, que la pensée née du langage est séparée et qu'elle devient plus tard, en se développant à travers la scolastique, une pensée de science de la nature. Ce n'est que dans la Grèce postérieure que la pensée se détache. Le grec ancien a la pensée comme élément artistique. Et la philosophie grecque n'est essentiellement compréhensible que si elle est en même temps saisie avec un sens artistique.
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Mais cela nous conduit absolument à voir dans le règne grec cette civilisation qui a encore non séparé la science et l'art. Cela s'exprime aussi bien dans l'art que dans la science elle-même.
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Je ne peux évidemment pas entrer dans tous les détails. Mais si vous étudiez avec un sens humain sain et un œil sain et pénétré de l'esprit ce qu'est la sculpture grecque, vous trouverez que le Grec ne travaillait pas dans le sens comme cela se passe aujourd'hui, d'après le modèle, que le Grec, en ce qu'il travaillait plastiquement, travaillait à partir d'un vécu intérieur. En ce qu'il façonnait le muscle, formait le bras plié, formait la main, formait d'après ce qu'il ressentait en son intérieur. Son deuxième humain intérieur, vivant, j'aimerais dire cet humain éthérique, il le ressentait ; il se vivait psychiquement/par l'âme et ressentait ainsi la limitation vers l'extérieur. Ce qu'il vivait intérieurement passait dans la plastique. L'art était une révélation/manifestation de ce qui était vu ainsi. Et cette vision, transposée dans ces pensées vivant dans le langage, devint une science qui avait encore un caractère artistique parce qu'elle ne faisait qu'un avec ce que l'esprit du langage grec révélait au Grec.
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Et c'est ainsi que nous entrons, avec le règne grec, dans un monde qui s'ouvrira à nouveau à nous d'abord lorsque nous nous élèverons nous-mêmes de notre science séparée de l'art vers une connaissance qui débordera à nouveau dans l'élément artistique. J'aimerais dire que ce que nous développons plus tard en pleine réflexion était autrefois là dans une expérience/un vécu instinctif. Et nous pouvons voir comment, au cours de la vie historique, cette vie commune de l'art et de la science s'est alors transformée en ce qui est disponible en notre temps : la pleine séparation de l'art et de la science.
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Lorsque l'humanité s'est développée du règne romain jusqu'à travers le Moyen-Âge, l'éducation, la formation allèrent d'un tout autre point de vue que ce fut le cas plus tard, à un niveau supérieur de la culture humaine. Plus tard, à l'ère de science de nature, il s'agissait principalement de communiquer à l'humain les résultats de ce qui était obtenu par l'observation et l'expérimentation.
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Dans notre formation, nous vivons presque en nous appropriant des résultats issus de l'observation et de l'expérimentation. Si nous regardons l'époque où se manifestait encore une certaine persistance de l'hellénisme/du règne grec, nous voyons comment, même dans la formation scientifique, il y avait encore quelque chose qui se rapprochait de l'humain, qui tendait davantage vers la formation d'un savoir-faire/pouvoir chez l'humain. Nous voyons comment, au Moyen-Âge, l'apprenti devait passer par ce que l'on appelle les sept arts libéraux : la grammaire, la rhétorique, la dialectique, l'arithmétique, la géométrie, l'astronomie et la musique. Ce qui comptait, c'était le savoir-faire. Ce que l'on devait devenir en tant que scientifique s'acquérait par le biais des sept arts libéraux, qui étaient toutefois déjà en passe de devenir la connaissance et la science, comme ce fut le cas par la suite.
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Et l'on peut donc voir, si l'on étudie la philosophie scolastique du Moyen-Âge, tant décriée aujourd'hui, combien cette scolastique, qui se situe à la transition entre les temps anciens et les nôtres, est justement une merveilleuse formation de l'art conceptuel. On aimerait seulement que les humains modernes s'imprègnent d'un peu de la scolastique qui était en usage aux meilleurs moments du Moyen-Âge, qui faisait naître dans les humains une technique de pensée et un art de penser. On a tout de suite besoin de cela si l'on veut arriver à des concepts bien définis, auxquels nous devons parvenir. Mais, en ce qu'on part du point de vue actuel, qui sépare strictement la science, l'art et la religion, et en remontant à travers le Moyen-Âge dans l'évolution de l'humanité, on se rapproche du règne grec où, plus on remonte, plus on se convainc que la science et l'art sont fondus en une chose.
50
Mais dans la Grèce antique, se tient toujours un phénomène séparé de la science et de l'art : la vie religieuse. Elle s'approche de l'humain d'une tout autre manière que l'expérience scientifique ou artistique. Ce qui vit dans l'art et la science vit dans l'espace et le temps en tant qu'objet ; le contenu de la conscience religieuse est au-delà de l'espace et du temps.
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Cela appartient à l'éternité, cela donne certes naissance à l'espace et au temps, mais nous ne nous en approchons pas si nous nous arrêtons/restons debout à l'intérieur de l'espace et du temps.
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Ce que la science de l'esprit, toutefois dans un sens beaucoup plus précis, doit développer aujourd'hui sur ces choses, on peut aussi le voir de documents extérieurs.
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Et j'aimerais toujours indiquer sur un ouvrage qui vient de paraître en Autriche et qui est extraordinairement utile à cet égard, sur l'"Histoire de l'idéalisme" d'Otto Willmann, un livre qui est particulièrement remarquable par rapport à de nombreux livres qui traitent de problèmes similaires à l'heure actuelle. On peut juger sans préjugés de telles choses, même si elles sont issues de conceptions opposées, si elles conduisent seulement à quelque chose qui favorise la vie de l'esprit.
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Dans le règne grec, se tient là cette unité de l'art et de la science et de l'autre côté, cette vie religieuse à laquelle le Grec s'adonne, qu'il développe toutefois en images dans la religion populaire, mais qu'il obtient en profondeur dans la religion des mystères par l'initiation au sens approfondi. Mais partout nous pouvons voir que le religieux ne joue pas dans les forces de l'âme qui se développent dans la science et l'art, mais que la vie de l'âme, pour arriver à la vie religieuse, doit d'abord arriver à cette ambiance pieuse, à cet amour universel, dans lequel peut être saisi ce qui se révèle du divin-spirituel absolument et avec lequel l'humain peut s'unir dans la dévotion religieuse.
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Mais passons à l'Orient. Plus nous remontons dans des temps anciens, plus nous constatons que c'est à nouveau tout autre chose avec la vie spirituelle. Et là aussi, nous pouvons être guidés par ce que nous acquérons nous-mêmes dans le cadre de l'exercice moderne de l'esprit : Lorsque nous passons de l'expérience du concept vivant à ces douleurs et souffrances intérieures que nous devons surmonter pour devenir pleinement un organe des sens respectivement de l'esprit en tant qu'humain entier, et que nous cessons de faire l'expérience du monde dans le seul corps physique, en nous tenant dans le monde indépendamment du corps physique, nous nous tenons alors dans le monde de telle sorte que nous apprenons à vivre une réalité en dehors de l'espace et du temps. Nous faisons alors l'expérience de la réalité du spirituel-psychique, comment il agit dans le temporel, de la façon dont je l'ai décrit. Mais si nous conquérons la vision de l'esprit, qui sera conquise en surmontant la douleur et la souffrance à l'intérieur, nous avons déjà avec cela introduit dans la connaissance un peu de l'élément qui, de manière tout à fait continue, fait entrer la connaissance dans l'expérience religieuse, en ce sens qu'elle reste debout en tant que connaissance réelle, en tant que savoir réel selon l'esprit. Et en faisant l'expérience de ce qui est resté des temps anciens dans les vénérables représentations traditionnelles comme contenu religieux, nous vivons à nouveau aussi du plus nouveau d'un contenu spirituel similaire, lorsque nous nous élevons luttant à une telle connaissance, qui maintenant peut vivre dans la sphère de la piété religieuse.
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Mais c'est alors seulement que nous comprenons de quelles profondeurs humaines est né ce qui a vécu dans le monde de l'Orient ancien comme une unité de la religion, de l'art et de la science. Ils étaient une fois une unité. Ce que l'humain connaissait, ce qu'il assimilait dans son monde d'idées, était une autre facette de ce qu'il plaçait devant lui pour que cela rayonne vers en bas sur lui dans la beauté artistique ; et ce qu'il saisissait donc en connaissant et laissait rayonner dans beauté était aussi un spirituel auquel il offrait ses actes de culte, par rapport auquel il se mouvait aussi par ses actes comme abandonné à un ordre supérieur. Nous voyons ici la religion, l'art et la science se réaliser comme une unité.
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Mais cela nous ramène à une époque où la pensée humaine elle-même ne vivait pas seulement sur les vagues de la parole, mais où l'expérience pour l'humain était que la pensée vivait dans des régions encore plus profondes que la parole elle-même, que la pensée était liée aux fibres les plus intimes de ce qui est la nature humaine. C'est pourquoi le yogi indien a extrait les pensées de la respiration, de ce qui est fondé plus profondément que le mot. La pensée ne s'est élevée que peu à peu jusqu'à la parole, puis au-delà de la parole dans la culture moderne. Mais la pensée était à l'origine liée à une expérience humaine plus intime, plus profonde, et c'était à l'époque où l'unité de la vie religieuse, artistique et scientifique pouvait s'épanouir dans une harmonie pénétrante.
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De ce que j'ai pu vous décrire comme une unité harmonieuse de la religion, de l'art et de la philosophie, telle qu'elle se présente à nous comme une direction dans les Védas, il existe aujourd'hui un écho là-bas en Orient. Mais une résonance que nous devons comprendre, que nous ne comprenons pas facilement si nous nous élevons simplement jusqu'à ce qui vit dans la culture occidentale en tant que séparation de la religion, de l'art et de la science, mais que nous comprenons dans le plein sens du terme si nous nous élevons, grâce à une science de l'esprit plus récente, jusqu'à une vision qui produit à son tour une harmonie entre religion, art et science. Mais nous avons encore devant nous, en Orient, les vestiges de cette ancienne unité. Regardons de l'autre côté : même là où elle se répercute en Europe, nous en avons encore une résonance devant nous. Ce qui était une époque historique antérieure est, d'une certaine manière, encore présent sur une certaine partie de la terre. Et nous pouvons percevoir cette présence chez un grand philosophe de l'Est européen, chez Solovjeff.
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Ce philosophe de la seconde moitié du XIXe siècle agit sur nous d'une manière très particulière.
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Si nous nous tournons vers les philosophes occidentaux, John Stuart Mill ou Herbert Spencer ou d'autres, nous constatons que leur point de vue est issu de la pensée scientifique que j'ai décrite aujourd'hui. Mais chez Solovjeff, il y a encore quelque chose qui représente la religion, l'art et la science comme une unité. On voit toutefois, si l'on se met à lire Solovjeff, qu'il utilise comme un langage philosophique ce que l'on trouve chez Kant, chez Comte ; il maîtrise complètement les formes d'expression de ces philosophes occidentaux et d'Europe centrale. Mais si l'on s'imprègne de son sens, de ce qu'il exprime à travers ces formes d'expression, alors on le vit différemment. On a chez lui un sentiment historique : il nous apparaît comme un homme ressuscité des discussions qui ont eu lieu/été labourées avant le Concile de Nicée. On ressent littéralement le ton qui régnait dans les discussions des premiers pères chrétiens, et il y avait encore dans ces premiers siècles chrétiens un écho de l'unité de la religion et de la science - cette unité où la volonté coule/flue encore ensemble avec la pensée. Tout cela coule et ondule à travers la vision du monde est européenne de Solovjeff.
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Et si nous regardons aujourd'hui ce qui nous entoure en tant que culture et civilisation, nous constatons que dans les régions plus occidentales, nous avons justement cette séparation entre la religion, l'art et la science, mais que ce qui appartient vraiment à notre instant historique, ce qui est vraiment ce à partir de quoi nous devons agir et marquer les structures du monde, c'est cette science qui est strictement construite sur la pensée scientifique décrite en premier lieu, tandis que nous reprenons l'ancienne tradition dans les styles artistiques et les contenus religieux. Nous voyons aujourd'hui à quel point l'art est peu productif dans les nouvelles formes de style, comment les anciennes formes de style renaissent partout. Ce qui est vivant à notre époque, c'est ce qui vit dans la pensée scientifique.
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Nous devons d'abord attendre une époque qui aura, comme je l'ai décrit, la pensée vivifiée, imaginative, qui conduira à nouveau au vivant, qui pourra à nouveau devenir immédiatement créative artistiquement dans de nouvelles formes de style, sans devenir de paille, allégorique, non artistique.
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Nous voyons donc la pensée scientifique comme l'impulsion motrice du présent immédiat, et ce d'autant plus que nous allons vers l'ouest.
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Et nous voyons à l'Est un écho de ce qui était l'unité de la religion, de l'art et de la science.
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Les Européens de l'Est ont cet élément religieux fondamental, cette nuance dans l'esprit. Ils regardent le monde avec cette nuance fondamentale. Ils ne peuvent comprendre l'Occident qu'en faisant un détour par un développement spirituel tel qu'il existe ici dans notre mouvement spirituel-scientifique ; ils n'ont pas de compréhension immédiate de l'Occident parce qu'en Occident, on veut justement délimiter le religieux et l'artistique de la pensée scientifique.
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Et au milieu - nous ne pouvons pas nous y soustraire/fermer -, l'humain doit se laisser imposer le monde extérieur des sens et vivre la pensée appropriée au monde extérieur des sens ; mais il ne peut pas faire autrement que de regarder en arrière sur lui-même et de vivre son intériorité, et pour l'intériorité, il a besoin de l'expérience religieuse. Mais j'aimerais dire que, plus profondément caché dans la nature humaine que l'expérience religieuse, dont on a besoin à l'intérieur, et l'expérience scientifique, dont on a besoin pour l'observation du monde extérieur, se trouve le membre de liaison entre les deux, l'expérience artistique.
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Ce vécu artistique est à cause de cela aussi quelque chose qui se trouve aujourd'hui dans la vie de telle manière qu'il n'est pas revendiqué/rendu comme valant en premier lieu comme une exigence de la vie. Nous voyons comment la culture occidentale se nourrit de pensées scientifiques et la culture orientale de pensées religieuses. Nous voyons comment nous nous tenons dans une culture artistique, mais comment nous ne pouvons pas nous y intégrer pleinement, comment la culture artistique est diversement une renaissance. Mais il faut dire que l'aspiration à un tel équilibre est absolument bien présente au milieu de l'Est et de l'Ouest. Et nous la constatons en jetant un coup d'œil quelque peu tout de suite sur Goethe.
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Quelle était donc la grande aspiration/nostalgie de Goethe lorsqu'il a été, j'aimerais dire, confronté aux énigmes de la nature à partir d'immédiates dispositions artistiques ? Son sens artistique s'est évidemment transformé en vision scientifique. Et on aimerait dire que chez Goethe, l'Européen central représentatif, nous trouvons l'art et la science marqués d'une même empreinte, et nous les trouvons encore marqués d'une même empreinte si nous suivons la vie de Goethe dans son évolution et si nous comprenons comment placer Goethe dans l'évolution des temps modernes. Goethe se vit dans cette interaction entre l'art et la science. C'est ainsi que naquit en lui une nostalgie que l'on ne peut comprendre qu'historiquement : le besoin d'Italie, de culture méridionale. Et c'est en observant les œuvres d'art qui s'offraient à lui dans le Sud qu'il écrivît à ses amis de Weimar quelque chose qui s'inspirait de ce qu'il avait appris là-bas à Weimar en tant que philosophie et science. Il avait trouvé l'action divine représentée de manière philosophique chez Spinoza. Cela ne lui suffisait pas. Il voulait un vivre plus large, plus spirituel dans le monde et dans la spiritualité.
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Et à la vue des œuvres d'art méridionales, il écrivit à ses amis : "Là est la nécessité, là est Dieu !" Et : "J'ai la supposition que les Grecs procédaient selon les lois mêmes selon lesquelles la nature elle-même procède et dont je suis sur la trace". Ici, Goethe veut fondre en un seul la science et l'art.
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Si je termine par quelque chose de personnel, c'est uniquement pour vous montrer comment on peut trouver, à travers un symptôme particulier, la manière dont le monde médiant peut se situer entre l'Est et l'Ouest. J'ai vécu ce symptôme il y a environ quarante ans, ici à Vienne. Dans ma jeunesse, j'ai fait la connaissance de Karl Julius Schröer ; il tenait alors des lectures d'histoire de la poésie allemande depuis la première apparition de Goethe. Dans sa conférence d'introduction, il a dit plusieurs choses significatives, mais il a ensuite prononcé une parole caractéristique de l'aspiration des meilleurs esprits d'Europe centrale, à partir d'où ils parlaient de manière plus instinctive. Schröer aussi parlait de manière plus instinctive. Mais en fait, il a exprimé le désir d'une alliance entre l'art et la science, d'une alliance entre la pensée scientifique occidentale et la pensée religieuse orientale dans la vision artistique, en résumant ce qu'il voulait dire par cette parole qui, pour moi, est significative : l'Allemand a une conscience esthétique.
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Cela n'exprime certainement pas une réalité générale immédiate. Mais une aspiration est exprimée, l'aspiration à voir ensemble l'art et la science. Et si l'on peut voir cela ensemble, alors un autre Européen central, que je viens de caractériser, a eu le sentiment qu'il a exprimé en de belles paroles : que si l'on peut voir ensemble la science et l'art, on peut aussi s'élever à l'expérience religieuse, si seulement dans ce sens de Goethe on trouve une véritable spiritualité dans la science et l'art. C'est dans ce sens qu'il a prononcé la parole : celui qui possède la science et l'art a aussi la religion ; celui qui ne possède pas les deux, il aurait la religion.
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Celui qui a une conscience esthétique parvient aussi à la force de conscience scientifique et religieuse. Et cela peut nous montrer où nous nous tenons aujourd'hui.
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Aujourd'hui, je n'aime pas prononcer le mot souvent cité de période de transition, chaque époque est une période de transition, mais aujourd'hui, dans une période de transition, ce qui compte, c'est justement en quoi consiste la transition dans le temps.
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À notre époque, nous avons vécu, développée jusqu'au triomphe suprême, la séparation de la religion, de l'art et de la science. Mais ce qui doit être recherché et qui peut permettre de trouver une entente entre l'Orient et l'Occident, c'est l'harmonisation, l'unité intérieure de la religion, de l'art et de la science. Et c'est à cette unité intérieure que voudraient conduire la conception du monde et la vision de la vie dont il a été question ici et dont il sera question plus loin.
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