[03/53] L'un des effets par lesquels la
triarticulation sociale aura à témoigner de son
fondement dans l'essence même de la vie sociale
humaine est la séparation qui doit s'établir entre les
activités judiciaires et les institutions de l'Etat. A
ces dernières incombe de fixer les lois qui doivent
réglementer les relations entre les hommes ou entre
les groupes d'hommes. Le jugement lui-même repose
cependant sur des institutions qui sont formées à
partir de l'organisation spirituelle. La manière de
juger est dans une très grande mesure dépendante de la
possibilité que celui qui juge ait sentiment et
compréhension de la situation individuelle du
justiciable. Ce sentiment et cette compréhension
n'existeront que si les mêmes liens de confiance, par
lesquels les hommes se sentent attirés vers les
institutions de l'organisation spirituelle, sont
également déterminants pour l'institution des
tribunaux. Il est possible que l'administration de
l'organisation spirituelle désigne les juges, qui
pourraient être pris dans les professions
intellectuelles les plus diverses, et qui, après un
certain temps, retourneraient à leur propre
profession. Chaque homme aura, dans une certaine
limite, la possibilité de choisir, parmi celles qui
ont été désignées pour cinq ou dix ans, la
personnalité en laquelle il aura suffisamment
confiance pour que, durant ce temps, si l'occasion
devait s'en présenter, il puisse accepter le jugement
de cette personnalité, dans un cas de droit privé ou
correctionnel. Dans chaque circonscription, il devra y
avoir assez de juges pour que le choix ait une valeur.
Un plaignant devra toujours alors s'adresser
directement au juge qui est compétent pour l'accusé.
Qu'on se représente quelle signification profonde
auraient pu avoir de telles institutions, dans les
régions austro-hongroises. Dans les régions où l'on
parle plusieurs langues, un membre de chaque
nationalité aurait pu se choisir un juge de son
peuple. Et qui connaît les conditions en Autriche peut
savoir à quel point une telle institution aurait pu
contribuer à l'harmonie, dans la vie des différentes
nationalités. Or, à part la nationalité, il existe de
vastes domaines de la vie où une telle institution
pourrait agir dans une direction salutaire pour un
développement sain. Des fonctionnaires plus
strictement versés dans la connaissance des lois
seront aussi nommés par l'administration spirituelle,
et assisteront les juges et les tribunaux; mais ils
n'auront pas eux-même à juger. De même, des tribunaux
d'appel devront être formés à partir de cette
administration. Il est dans la nature de la vie qui se
manifeste par la réalisation de telles données qu'un
juge puisse être proche des habitudes et de la
mentalité de ceux qu'il a à juger et qu'il puisse, par
sa vie en dehors de sa fonction de juge, qu'il
n'assume que pendant un certain temps, être
familiarisé avec leur milieu. De même que l'organisme
social sain, dans l'ensemble de ses institutions,
utilisera la compréhension sociale des personnes qui
sont associées à sa vie, ainsi en sera-t-il pour
l'activité juridique. L'exécution d'un jugement
incombe à l'Etat.
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