Atelier francophone pour
une triarticulation sociale
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Un
volume
aux parfums d'échecs ?
Ce volume, que je mets aujourd'hui en ligne dans l'intégralité (*) de sa version allemande parue en 2020 seulement n'est pas un volume comme un autre. Il "cache" une histoire auquel le destin, peut-être, m'a mêlé (je n'ose dire me mêle, ni simplement "auquel je suis mêlé"). (* GA332b Sauf les annexes) Bien qu'ayant des capacités intellectuelles, j'ai très tôt, au moment des premières amours, voulu donner une place à mes jambes et mes mains. Eux seuls, ces membres, "portent en l'océan spirituel" et un peu plus tard en une vie consacrée à l'alimentation de mes semblables par l'activité "corporelle à la base de nature" grâce aux suggestions du mouvement biologique-dynamique. Ce fut un chemin qui de banlieusard parisien, me porta d'abord 10 années au nord de la Vendée, où dans les années 70, pouvait encore se percevoir ce que firent les colonnes infernales à la soumission au vieil ordre royaliste tout en m'imprégnant, moi citadin, de la vie paysanne. Et apprenant aussi lentement qu'une culture est aussi hors Paris. Nous étions là quasi seuls en cet ouest français à porter cette impulsion pratique anthroposophique (ma compagne par la pédagogie curative) et suscitons la curiosité et parfois un réel intérêt. Par moments lourd à porter, mais toujours stimulant. Notre 1er enfant approchant de la scolarité, nos pas nous portèrent radicalement à l'est. J'étais alors enthousiasmé d'arriver en ce couloir rhénan où circulaient les trains du nord de l'Europe à l'Italie et retour, et de vivre à la porte de l' "Inde" européenne. C'était finalement aussi celui de ma famille : la sœur de ma mère suisse avait épousé un hollandais et ma mère un fils d'italien naturalisé français et fixé à Paris, rencontré dans le train de Vienne alors qu'elle revenait de faire fille au pair en Angleterre. Mais c'était aussi l'Alsace-Moselle, qui toujours aujourd'hui n'est ni pleinement la République française, ni non plus l'empire allemand fondé à … Versailles (par la Prusse! Ne pas confondre avec les pays allemands géographiquement intermédiaires aux alliances prusso-autrichiennes contre la France). J'ai utilisé l'expression "base de nature" pour mon activité agricole. C'est une façon a posteriori de signifier que ma recherche était avant tout de me placer de manière la moins socialement problématique dans les injustices de la société. Je n'étais pas insensible a ce que la nature peut donner de refuge et consolation à l'âme, ni à l'impulsion écologique, mais mon agriculture était d'abord un rapport à la société dans son économie. Et je le vécu à mon compte, comme indépendant et d'autant plus libre et responsable que pendant une première année en une ferme d'altitude recevant des adultes handicapés comme salarié, je trouvais les voies d'une collaboration avec une équipe de commerçants s'inspirants aussi de l'impulsion sociale anthroposophique (comme on le pouvait dans les années 80). Et qu'avec l'aide de la vie anthroposophique strasbourgeoise d'alors, il fut possible d'acquérir et tenter de "sortir du marché" des terres pour cela. "Homme libre sur terre libre", selon l'expression romaine remise ensuite à l'honneur par Goetz Werner dans sa campagne pour un revenu de base inconditionnel, et donc très occupé, cette Alsace me permis quand même, passant parfois la frontière, d'avoir jusqu'à aujourd'hui des aperçus de l'anthroposophie vécue dans d'autres âmes que françaises. Et cela surtout par l'étude de la proposition de triarticulation sociale faites principalement au cours de la séquence historique que représenta la mutinerie des marins de la Baltique et ses suites dans les principale villes de l'empire, - période qu'un universiaire (AB) mit un jour en lien à la Commune de Paris - en effet, un drapeau rouge flotta aussi quelques jours sur la cathédrale de Strasbourg juste avant l'entrée/le retour de l'armée française. Mais c'est dans les pays de Wurtemberg et de Bade voisins, aux capitales Stuttgart et Karlsruhe, que s'énonça de manière renouvelée, placés chacun en leur véritable portée et débarrassés de leurs hésitations quand à la propriété, les trois idéaux de 1789. Non pas simplement la République, mais plutôt peut être la "sociale" des communards de 1871. Mais ce fut plutôt quand même celle de Weimar. Et les corps francs, la répression. Bismark et Thiers, même combat. Quel étrange ballet dans l'histoire que cet empereur français de second empire après l'empire napoléonien vaincu qui déclare la guerre à la Prusse pour contrer la montée populaire intérieure et se retrouve non seulement vaincu, le nord-est de la France occupée, mais avec leur (second aussi) empire fondé à Versailles ! Et quelques mois après le soulèvement de Paris assiégé et plusieurs Communes proclamées dans le pays non occupé? Quant une autre guerre plus tard finissant, cela se passe en Alsace, mais surtout de l'autre côté du Rhin ? Et que le traité, encore à Versailles compromet aussi cette recherche d'autogestion ! Est-ce cette qualité d'âme qui fit dire une fois à Steiner, que parmi les syndicalismes européens, le français serait le plus à même de sa triarticulation ? Mais après Napoléon, Thiers et plus récemment les repreneurs de LIP… qu'en reste-t-il de l'autogestion ? Bah ! Pour Steiner aussi, de sa triarticulation appliquée au social, on a surtout préféré retenir ce qu'il dénonçait de la démarche socialiste puis léniniste, très peu des aspirations des âmes ballottées entre cette dernière et la sienne. Et pourtant, déjà lors de la Révolution française, le camp des notables n'avait pas plus de patrie que celui des âmes éprises de justice sociale. Il se peut donc bien que la première manche se joua en français, la seconde en allemand. Ce volume est en réalité un condensé de plusieurs initialement prévus. Visant notamment à documenter l'approche que Rudolf Steiner avait de l'aspect économique de la vie en société par la pratique. C'est à dire comment il conciliait aux cas particuliers ou non les perspectives qu'il énonçait. A l'issue d'un compte rendu que je fis d'un séminaire de triarticulation offert par Matthias Küster du Lorenz Oken Institut (si ma mémoire ne me joue pas des tours) au cours d’une rencontre annuelle de section, j'ai dû éveiller un enthousiasme particulier chez deux personnes travaillant aux archives et aux volumes de l'édition complète, et elles s'ouvrirent à un ami et moi de leur révolte face à de nouvelles orientations visant à réduire l'investissement sur ces sujets et faire en sorte de pouvoir annoncer les œuvres complètes finies pour le centenaire. Elles envisageaient alors de poursuivre le travail à la retraite proche. Et peut être que dans quelques années nous auront enfin ce sur quoi le présent volume fait l'impasse ? Je ne peux évidemment pas dire ce qui en ressortira. Toujours est-il que pour l'instant, telle qu' a été choisi de le constituer, il présente au fond les deux impasses relatives d'une impulsion triple. Dont certains disent volontiers que son temps est de toute façon passé (Steiner parlait cependant de trois siècles) La première est celle de la mise sur pied d'un ou de conseils de culture (vie de l'esprit), au moment où se constituaient effectivement des conseils d'entreprise (vie de l'économie). Et où un renouvellement de régime, de constitution, était en cours (vie de droit). Il aurait fallu équilibrer ainsi socialement. C'est au fond l'histoire de l'échec de l'idée même d'autogestion parmi les acteurs de la vie de l'esprit de l'époque. La seconde vient légèrement plus tard. Le mouvement pour des conseils a reflué, la vie politique et constitutionnelle à repris la main et cadré (par la loi) l'impulsion des conseils en ce que j'appellerai les "comités" d'entreprise (bien qu'en Allemagne ils ont, jusqu'à aujourd'hui, plus de pouvoir semble-t-il en termes de cogestion). Pour les partisans de la triarticulation, c'est encore alors de montrer malgré tout qu'un début d'économie associative est non seulement possible, mais pourrait aider à passer le cap de l'inflation et surtout aller de l'avant, innover. En portant aussi des entreprises non immédiatement productives (autofinancement, autogestion…). Il est clair pour tout le monde que ces tentatives échouèrent rapidement. Les questions sont dans les pourquoi, et dans comment R. Steiner géra cela tant pratique que conceptuel et en perspectives. Le présent volume semble livrer des éléments… mais un doute peut cependant s'installer sur l'exhaustivité. C’est quand même aussi l’histoire d’échecs. Impressionnante est par exemple la volte-face quant à l'idée de fonder des entreprises "spirituelles" sur des "économiques". Et cela bien que nombreux sont ceux qui, depuis, caressent encore cette ambition. Il y a très certainement, là, des choses à préciser. Toujours la question des circonstances et des perspectives… Voilà, vous aurez peut-être trouvé confuse, la navigation du propos, du quasi personnel a ce qui se joue peut-être aujourd'hui encore entre deux cultures jusque dans un mouvement somme toute encore assez anecdotique pour beaucoup. Et pourtant… on pense aussi avec les membres... Quatzenheim,
7 juillet 2025 |