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Présentation et extraits choisis du livre

Le choix de la responsabilité
Valentin Wember

Une nouvelle gouvernance pour les enseignants, parents
et élèves des écoles Steiner / Waldorf

Edité par le Cercle de travail des écoles Rudolf Steiner de Suisse et du Liechtenstein
ISBN : 978-3-9523331-3-6
Traduction : Claudine Villetet (Troyes), Sibylle Naito (Lausanne), Danièle Eydt-Thomas (Bienne)

L'auteur reprend et prolonge  par ce livre l'idée de R. Steiner de la délégation républicaine comme forme de gouvernance dans l'organisation de la vie de l'esprit dans l'organisme social.  Ernst Lehrs la développe déjà en 1956 dans un article ayant fait date : Républicaine, non pas démocratique .
Il le fait appliqué à l'expérience de déjà 90 années d'école Waldorf, mais cela peut peut-être aussi avoir son sens dans d'autres "responsabilités futures" de la vie de l'esprit comme les transmissions non vénales ou héréditaires du capital, des moyens de production et de la surface terrestre.

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Un aspect important de l'organisation sociale triarticulée expliqué brièvement et comme source d'inspiration pour renforcer la responsabilité individuelle.

P43 à 45 - Chap. 7 - Joué et gagné - un contre-exemple positif


Vers la fin de la première guerre mondiale, il était prévisible que les formes anciennes de société allaient s'effondrer. En 1917, la révolution russe éclata, en 1918, c'était au tour de la révolution en Allemagne. Les monarchies disparurent. Dans la Russie communiste, non seulement une nouvelle direction politique fut instaurée mais surtout un nouvel ordre économique. À la place du capitalisme privé fut établi le capitalisme d'état. Toutes les banques, toutes les industries et entreprises importantes furent étatisées, l'agriculture également. D'après l'idéologie marxiste, les moyens de production (le capital, les usines, les terres) doivent appartenir à la communauté et non pas à quelques capitalistes. Il est notoire que ce système n'a jamais bien fonctionné. Chaque individu était investi de bien trop peu de responsabilité et, partant, de motivation. C'est pour cela que le système avait besoin d'exercer une pression massive pour fonctionner et il ne s'est maintenu que pour deux générations. D'un autre côté, le capitalisme privé a pour conséquence que les richesses s'accumulent entre les mains de quelques personnes alors que la grande majorité et la communauté possèdent de moins en moins.'

Dès 1917, Rudolf Steiner a développé l'idée d'une forme de société qui permet de libérer les contraires s'excluant mutuellement — capitalisme privé et capitalisme d'état — de leur inégalité et de leurs faiblesses fatales et cela grâce à des cycles temporels. Pour présenter cette forme de société de façon extrêmement brève : chaque entrepreneur, dans le cadre de la « tripartition sociale », est pleinement responsable de « son » entreprise. Il la dirige. Mais il n'a pas toutes les compétences : il ne peut pas vendre son entreprise ou la donner en héritage. Au cas où il se retire de la direction, l'entreprise est remise, pour un court laps de temps, à la communauté. Cette communauté cherche ensuite un nouveau dirigeant qu'elle estime compétent. C'est à lui que l'entreprise sera transmise en tant que « propriété d'exploitation » et il en sera par la suite - jusqu'au moment de son départ - entièrement responsable.

De cette façon, les deux côtés sont pris en compte : l'individu et la communauté, la responsabilité et la force d'initiative personnelle et le bien de la communauté. Une entreprise appartient autant à l'individu qu'à la communauté — mais à l'un après l'autre. La contradiction est résolue grâce à l'élément temporel. Et cette idée apporte en même temps l'indication décisive quant à la façon de gérer une institution comme une école autant par l'ensemble de ses membres que par des individus pleinement responsables : pour un temps défini, la communauté charge différents membres des différents domaines en leur donnant la pleine responsabilité. Le temps écoulé, la responsabilité revient à l'ensemble. Une circulation vivante s'établit ainsi, circulation qui renforce le potentiel et la responsabilité des individus tout en permettant de mieux percevoir et concrétiser la responsabilité de la communauté.

 

Conséquences du choix des formes juridiques au quotidien et intérêt possible du concept steinerien d'association dans la vie économique appliqué à l'école Waldorf.

p.95 à 100 - Chap. 15 - Une république des rois : parents et professeurs

Dans l'histoire des écoles Waldorf — à quelques exceptions près — les parents n'étaient pas jusqu' alors impliqués dans la direction. Mais comme la plupart des écoles sont organisées sur le plan juridique en associations (loi de 1901 en France et réglementé par le code civil suisse en 1907) et non pas en SARL ou en corporation, il y a en général des parents actifs dans les conseils d'administration des écoles. Et — on ne saurait trop le rappeler — le travail désintéressé et professionnel qui y est réalisé fait partie des chapitres les plus enthousiasmants du mouvement des écoles Waldorf. Les activités bénévoles accomplies par les parents pour la communauté scolaire sont une performance qu'il faut tout simplement saluer. Cela commence par la préparation de petits pains aussi bons à la santé qu'au goût, pour les récréations des enfants, puis cela passe par la surveillance des devoirs à faire à la maison l'après-midi, jusqu'à l'organisation de A à Z des grands événements annuels comme les marchés d'automne, de la Saint-Martin ou de Noël, et la liste n'est pas exhaustive. Même si certains parents ont parfois senti qu'ils avaient franchi la limite de ce qu'ils pouvaient donner d'eux-mêmes, l'engagement de la plupart pour le mouvement des écoles, dans les activités que nous avons évoquées, est globalement exemplaire et les écoles Steiner / Waldorf peuvent être enviées en ce domaine. Toutefois, il n'y avait guère de parents intégrés dans les collèges internes, du moins en Allemagne. À cela, plusieurs raisons ont été données :

On a dit que les parents en général n'avaient de formation de professeur en pédagogie Waldorf. Ils ne pouvaient donc pas juger de la pertinence d'une candidature d'enseignant. Ils engageraient donc — c'est ce que l'on craignait — peut-être dans tel ou tel cas un collègue qui pourrait être certes un excellent professeur, mais quant à ses méthodes pas un professeur Waldorf.

La deuxième raison citée contre une participation des parents aux cercles de direction était le caractère passager de leur lien avec l'école.

La troisième raison : les parents n'étaient pas responsables des conséquences.

Tous ces arguments manquent de nuances.

Premièrement: on ne peut absolument pas parler de « parents » en général. Certes, une grande majorité de parents n'a qu'une vague connaissance de la pédagogie Waldorf, bien souvent transmise « uniquement » par les professeurs. Mais cela vaut également pour quelques professeurs qui enseignent dans les écoles. Il y a d'autre part également des parents qui connaissent parfaitement bien la pédagogie Waldorf. À l'époque de Steiner, le cas ne pouvait guère se présenter, mais aujourd'hui les choses ont incontestablement changé.

Deuxièmement: il y a également des parents qui pendant plus de vingt ans ont apporté bénévolement à l'école — par exemple au sein du conseil d'administration — un soutien énergique, serein et désintéressé, tant en paroles qu'en actes. Ces parents « portent » une école bien plus qu'un professeur qui, après avoir passé deux années dans le collège interne, quitte l'école au bout de trois ans.

Troisièmement: il est tout à fait possible que des parents portent la responsabilité des conséquences (par exemple pour une embauche ou pour une grille de salaires) si cette responsabilité leur est confiée et qu'ils prennent les engagements correspondants.

Les généralisations ne servent donc à rien. C'est en fait la question inverse qu'il conviendrait de poser, à savoir non pas : « Quels sont les arguments contre? » (car ces arguments ne sont pas très convaincants), mais plutôt : « Quels sont les arguments pour une participation partenariale des parents à la direction de l'école et pour une conduite conjointe de l'école par les professeurs et les parents ? »

Premièrement: les parents représentent un énorme gisement de compétences. Il serait insensé de ne pas utiliser ces compétences pour la direction de l'école. Même si certains parents qui ont des qualités de dirigeants ne pouvaient pour autant devenir eux-mêmes professeurs Waldorf, cela ne les empêche pas d'être en mesure de juger à l'aide du sain entendement humain ce que font les professeurs. L'apport de leurs compétences peut être un enrichissement fécond et constructif précisément dans les questions de direction.

Certaines écoles ont depuis longtemps une sorte de comité consultatif pour les questions de personnel. Et pour toutes ces questions de personnel, des parents sont présents. Celui qui a participé à ces cercles sait de quelle aide appréciable peuvent être les conseils des parents, issus d'une vision des choses neuve et non déformée.

Deuxièmement: une structure de direction inspirée du concept steinerien d' « association » est plus forte et plus porteuse d'avenir. Que faut-il entendre par « association » ?

Dans l'ancienne perspective, une école est une entreprise de services dans le secteur de l'éducation. Les professeurs et les éducateurs sont les producteurs, les parents les consommateurs qui ont recours à un service pour leurs enfants. Dans la nouvelle perspective, celle du concept steinerien d' « association », producteurs, consommateurs (et commerçants) travaillent ensemble. Dans l'ancienne économie de marché, dite « libérale », les producteurs mènent certes des enquêtes, avec des procédés raffinés, sur les souhaits des consommateurs, mais c'est une démarche totalement différente de celle qui consiste à se mettre d'accord sur tous les points essentiels avec le consommateur, cartes sur table. Le planteur de café au Nicaragua, le commerçant et un représentant des clients s'assoient autour d'une table et parlent des besoins du producteur, du commerçant et du consommateur. Ils connaissent toutes les charges, les conditions de vie et ils conviennent d'un prix juste. Le prix n'est donc pas fixé par le rapport de l'offre à la demande, mais au terme d'un dialogue franc : « De quel prix as-tu besoin pour pouvoir vivre décemment ss ? »

On pourrait appeler cette forme d'économie économie de communication à la différence de l'économie de marché et à la différence de l'économie d'État planifiée et centralisée. C'est une « économie de concertation ».

Dans une école, il ne s'agit pas de produire des biens économiques, mais — d'un point de vue économique — d'établir des services dans le secteur de la culture. C'est pourquoi, dans le secteur des services également, producteurs et consommateurs peuvent travailler ensemble, d'une manière certes différente mais toutefois comparable. Ils peuvent tenir conseil ensemble, décider de qui produit quoi, avec qui, dans quelles conditions et prendre la responsabilité de ces choix.

En pédagogie, la délimitation stricte entre producteur et
consommateur n'est pas réalisable. Un très grand nombre de choses dépendent d'une bonne collaboration entre parents et professeurs dans le domaine pédagogique. Et cette collaboration pédagogique peut se transposer dans une école, qui est un organisme unitaire, en une collaboration au niveau de l'organisation, c'est-à-dire de la direction.

Troisièmement: la direction commune de l'école partagée entre parents et professeurs crée un climat de confiance bien plus important. [...]