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Au sujet de la composition du « Cours d’économie nationale ».........> retour au menu de la série

Trad. D. Kmiecik, revu FG. Original allemand.

   Vieillissement de l’argent et maniement du capital
La contribution de Rudolf Steiner
pour la stabilité de la valeur de l’argent

par Stephan Eisenhut

 

« Il s’agit qu’on apprenne d’abord à connaître sérieusement une bonne fois l’argent, avant  que l’on puisse dire quoi que ce soit au sujet du rôle qu’il joue, lorsqu’il devient quelques chose d’autre pour l’expression du prix.. »

Rudolf Steiner : Cours d’économie politique, 12ème conférence.

 

La valeur de l’argent est déterminée de manière décisive par le maniement du capital. Le système moderne des banques organise l’attribution de crédit parfaitement indépendamment de la provenance/source des fonds/moyens par le processus de création de la monnaie. De plus, aucune différence n’est faite actuellement quant au secteur de l’économie où un gain sera visé. Des investisseurs réalisent leurs profits dans l’agriculture, l’industrie automobile ou l’industrie de l’armement. Leur argent a partout la même valeur pour eux. Cela mène à une chaotisation de la vie économique avec de graves répercussions pour l’être humain et le monde. Dans la 12ème conférence du « Cours d’Économie Politique » (CEP), Rudolf Steiner montre une voie pour être capable de travailler en vue d’une stabilisation de la vie de l’économie, quand sera donné à l’argent une durée de vie déterminée. ( 1 )

 

« Tout commence avec le foncier », tel est le titre du « Thème du jour » de la  Suddeutschen Zeitung du 21 septembre 2018. Le rédacteur en chef décrit lui-même la cause primordiale de la crise du logement. ( 2 )  À Berlin, les prix du foncier ont augmenté de 345% entre 1950 et 2015. Les gens sont astreints à consacrer une part toujours plus importante de leur revenu aux dépenses pour se loger, alors que les dépenses pour se nourrir reculent constamment. Les prix de ce qui est économiquement produit par l’agriculture ne suffisent plus en général pour y former et y garantir un revenu suffisant. L’UE s’attache par conséquent, depuis des décennies déjà, à soutenir les agriculteurs, avec sa politique agricole commune (PAC). À cette occasion, elle s’oriente sur le nombre d’hectares que cultive un agriculteur. Cela n’est pourtant pas couronné de succès — bien au contraire. Le « Comité scientifique consultatif pour la politique agraire » critique vivement celle-ci dans une prise de position datant d’avril 2018 :

 

Soixante-treize pour cent des moyens de l’UE (environ 40 milliards d’Euro par an) sont canalisés vers la PAC sur toute l’Europe, au moyen de ce qu’on appelle les décomptes directs des unités de surface des entreprises agricoles. Ces paiements, censés servir en majeure partie expressément des objectifs de revenu, ne sont pas légitimés au plan de la répartition politique :  ils ne sont ni orientés sur l’entretien des fonctions sociétales de l’agriculture, ni par les besoins expresses de l’agriculteur, tant au plan entrepreneurial que personnel, et serviront de plus d’un bout à l’autre au travers du marché foncier, aux plus gros propriétaires terriens. ( 3 )

 

Le problème fondamental est clairement vu : les possesseurs d’un droit de propriété de biens-fonds, le plus souvent des investisseurs, réalisent toujours des profits de plus en plus élevés, pendant que dans le même temps [à croire que c’est  peut-être un phénomène de vases communicants ... ?, ndtDK] la détresse financière est en train de s’étendre dans une large part de la population. ( 4 )  — et cela dans un pays qui fait partie des régions économiquement les plus productivistes du monde. En créant consciemment des conditions favorables aux investisseurs ou au moyen d’une incompréhension rêveuse de cette opportunité, la politique a donc fait empirer dans le même temps les conditions de la majorité de la population.

Or la politique ne peut pas résoudre ces problèmes. Ils doivent être résolus économiquement. Mais pour cela, il faut disposer des concepts, qui rendent réellement transparentes les relations de valeur dans la vie de l’économie. Et c’est exactement de cela dont il s’agit dans le Nationalökonomischen Kurs [NÖK/CEP] ( 5 ) , que Rudolf Steiner a donné à l’adresse d’étudiants en économie et de quelques praticiens, en 1922. On peut considérer la question du vieillissement de l’argent, qui est traitée dans la 12ème conférence du CEP comme l’une des idées les plus difficiles de ce cours. La question est ainsi difficile à clarifier pour la raison que pour la plupart des gens, leurs propres habitudes de penser sur le capital, l’épargne, l’intérêt, la monnaie, et autres, y font gravement obstacle. Tous ces concepts, Rudolf Steiner les développe d’une manière qui contredit les habitudes usuelles du penser. Se rajoute à cela le fait qu’il fut difficile à Steiner, dans le peu de temps qui lui fut alors imparti, de développer ses idées d’une manière satisfaisante. ( 6 ) Cet article va montrer que lorsque la manière dont Steiner édifie ses concepts, est suivie de manière conséquente la question du vieillissement de l’argent peut être clarifiée ainsi qu’une solution conforme à l’esprit de la chose, peut être trouvée.

 

L’argent comme échelle de valeur

Le prix des denrées est normalement donné dans une unité monétaire déterminée. Cette unité monétaire mesure leur valeur. Or l’échelle de mesure étant soumise elle-même à des changements arbitraires, elle ne peut pas correctement remplir sa fonction. Pour juger de l’évolution d’un prix, il est élémentaire et important que l’argent soit une mesure correcte pour les prestations échangées. ( 7 ) C’est en vue de cela que Rudolf Steiner veut travailler dans la 12ème conférence.

 En 1922, le taux d’inflation en Allemagne commença à monter de plus en plus fortement. En août 1922, au moment où Steiner donna ce cours, par exemple, le prix du timbre d’affranchissement était passé de janvier à juin à 2 Reich Mark (RM), entre juillet et septembre, à 3 RM et à partir d’octobre, à 6 RM. ( 8 )  C’était donc un moment où justement, la dépréciation de leur monnaie d’achat était justement très présente à l’esprit des participants allemands à ce cours. Rudolf Steiner en parle de la manière suivante :

 S’il m’arrive aujourd’hui d’acheter une livre de viande pour une certaine somme d’argent et de devoir, deux semaines plus tard, acheter de nouveau une livre de la même viande en la payant plus cher, je ne conclurai pas que la viande a changé mais que l’argent a changé. Cela tient purement et simplement à l’argent. Et si l’argent continue à porter la même valeur, c’est qu’il commence véritablement à mentir ; en réalité, il a perdu de sa valeur. Si je dois donner plus d’argent en échange d’une livre de viande, c’est bien qu’il a une moindre valeur. Cela va totalement de soi. Ainsi en introduisant de l’argent dans le circuit économique, j’y fais entrer en plus un facteur qui n’a plus rien à voir avec l’économie politique.  ( 9 )

 La banque impériale allemande augmentait donc arbitrairement la masse monétaire depuis 1919 par la planche à billets, pour tenter d’écarter par l’inflation les dettes de l’état résultant de la guerre. À cela venait se rajouter le fait que par le paiement des réparations aux puissances victorieuses, une grande partie des biens de consommation produits dans le pays ne se trouvaient donc plus du tout à la disposition de la consommation intérieure. Par la multiplication nominale de la monnaie, la Reichbank importait quelque chose dans le processus politico-économique qui n’y était pas. L’argent vieillissait donc comme « trop vite » dans les poches de la population allemande. Si quelqu’un avait produit prestation et reçu pour celle-ci comme contre-prestation un montant d’argent, deux semaines plus tard — et en 1923, ce délai tombera même à deux jours plus tard —, il ne pouvait plus l’échanger avec une prestation réelle de même valeur.

 

L’argent comme moyen de conservation de la valeur

Dans la situation d’un taux d’inflation très élevés, toute personne recevant cet argent, tente de le dépenser aussi vite que possible. Lors d’une situation de déflation, on se comporte à l’inverse, alors les gens ne dépensent que lorsque cela est devenu absolument nécessaire. Mais même quand la valeur de l’argent reste constante, il peut arriver que là où des surplus surgissent il soit utilisé comme moyen de conservation de la valeur. Dès l’introduction de la 12ème  conférence, Steiner caractérise déjà cette imputation à l’argent comme problématique. Il cite tout d’abord, en les tirant d’un manuel d’économie politique, quelques propriétés que devrait avoir la monnaie. Ainsi devrait-il avoir un faible volume et une haute valeur.

Cette propriétés de l’argent, selon Steiner, aboutissent à le rendre particulièrement facile à conserver c’est pourquoi cela constitue un attrait pour s’en enrichir. Le réformateur sparte de la loi, Lycurgue, avait déjà décrété pour cette raison que la monnaie devait avoir le plus grand volume possible pour rendre impossible tout enrichissement illégitime. Après avoir encore mentionné une autre propriété nébuleuse de l’argent [sa divisibilité, ndt], Steiner conclut cette considération par la phrase suivante : « Cela étant on demande à une monnaie d’être facile à conserver. Or c’est ce qui nous fera tout d’abord face dans toute sa signification, si nous voulons justement aborder notre considération d’aujourd’hui. » ( 10 ) Chez les réformateurs de la monnaie dans les années 1920, en particulier chez Silvio Gesell (1862-1930), proposer une dévaluation de l’argent d’achat revenait de manière analogue à proposer une baisse de valeur des produits consommables (corruptibilité, détérioration).

Face avant du billet historique de compensation WIR ( 11 )

En opposition à la doctrine dominante, qui attribuait à la monnaie une fonction de conservation de valeur, devait lui être ôtée toute possibilité de thésaurisation. L’argent, ainsi le reconnaissait-on, est un moyen de circulation et il peut donc conserver sa valeur aussi seulement par la circulation. Tombe-t-il hors de la circulation, parce qu’il sera thésaurisé, alors sa valeur décroît successivement. Mais si à un moment beaucoup plus tard, il est remis en circulation et s’il a conservé sa valeur, ainsi il déplace les relations de valeur à la charge de celles qui produisent des prestations à ce moment-là. La thésaurisation de l’argent a donc un effet déflationniste, la remise en circulation de l’argent, un effet inflationniste. Dans une situation économiquement stable, il faut s’attendre à ce que la formation de thésaurisation d’un partenaire  économique sera compensée par la dissolution de la thésaurisation d’un autre partenaire. Mais Gesell avait observé que tout de suite en temps de crises, les entrepreneurs retenaient de l’argent et n’investissaient plus, parce qu’ils attendaient une chute des prix qui empêcherait que leurs investissements pussent s’amortir. Or c’est tout de suite par cette attitude d’expectative que la chute des prix était d’abord vraiment provoquée. C’est pourquoi il considérait que de l’argent, qui ne baissait pas lorsqu’il était retiré de la circulation, passait pour un concurrent irréel de la marchandise. À partir de cette réflexion de base, il promu donc une circulation assurée de l’argent. Pour atteindre cela, les avoirs bancaires devaient être escomptés par un intérêt négatif et les billets de banque en circulation perdre chaque mois de leur valeur. Le détenteur d’un billet devait chaque mois lui coller un timbre de valeur, afin qu’il conservât sa valeur de paiement.

Rudolf Steiner vit la justification de cette pensée, mais tint toutefois sa transposition sur la voie d’un vieillissement de l’argent d’achat, comme expressement compliquée.  La coopérative suisse WIR fit aussi cette expérience. ( 12 ) À ses débuts, dans les années 1930-1940, elle donna aux Franc-WIR qui étaient émis à partir d’une compensation de prestations d’entreprises, sous la forme de billets de banque. Ceux-ci pouvaient seulement conserver leur valeur de paiement en y collant chaque mois des timbres de valeur. La mise en œuvre bureaucratique s’avéra toutefois alors bien trop élevée, de sorte que cette forme d’assurance de circulation fut de nouveau stoppée. Dès 1922, Steiner vit ce problème. C’est pourquoi il en rechercha une solution, au moyen de laquelle la valeur de l’argent d’achat pût être maintenue la plus constante possible et qu’on évitât nonobstant que l’argent lui-même fût utilisé comme moyen de conservation de la valeur. Car dans la fonction de l’argent comme échelle de mesure de valeur, la stabilité de valeur, est franchement un facteur central. En vérité l’argent d’achat commence toujours par mentir, lorsqu’il change sa valeur et que ce changement n’est pas fondé dans les conditions/rapports réels d’échange. Cela ne joue aucun rôle de savoir si une marchandise sera beaucoup plus chère à brève échéance ou bien devenue très bon marché. Dans les deux cas elle ne reflète pas correctement les relations de prestation. ( 13 )  C’est pourtant la tâche d’un argent conforme au temps dans une économie mondiale de partage/division du travail.

 

L’argent comme compte de résultat supra-entreprise/entrepreuneurial

 De l’argent qui peut correctement refléter les relations de prestation dans un domaine économique est en même temps une comptabilité de ces processus de prestation. Dans ma dernière considération au sujet de la 10ème conférence j’ai montré, à l’appui de l’exemple du « Sardex » ( 14 ) que des systèmes d’une monnaie portée au compte par compensation peuvent être compris comme une comptabilité supra-entreprise. Dans la comptabilité, on distingue de manière primaire le compte de patrimoine et le compte de résultat. Dans chacun on en vient à tirer et établir un bilan à un moment déterminé, sur quelles valeurs de patrimoine une entreprise dispose. Le compte de résultat saisit les recettes et les dépenses d’une entreprise à l’intérieur d’un laps de temps déterminé. Il reflète donc les prestations et contre-prestations d’une phase temporelle, avec laquelle le producteur se place en rapport avec d’autres producteurs ou clients. Si un grand nombre de producteurs sont liés par un système de compensation comptable, alors cela peut être considéré comme l’équivalent d’un compte de résultat. Les exploitants/administrateurs d’un système d’argent porté en compte par compensation permettent au moyen de lignes de crédit, qu’ils octroient/rangent à chaque participants, que de l’argent puisse naître selon un volume déterminé. Cet argent est même essentiellement plus réel que l’argent que créent les banques centrales, lorsque les conditions correspondantes se présentent chez les entreprises :

        Il doit y avoir là des êtres humains qui ont un besoin envers la prestation ou les marchandises proposées par les entreprises.

        Les moyens de production doivent exister, à l’appui desquels ces prestations peuvent être produites.

        Les producteurs doivent exister qui ont la faculté de travailler pratiquement aux moyens de production.

Cela étant si un producteur achète des pré- prestations chez un autre producteur, ainsi le paiement provoque un solde négatif sur le compte d’argent de compensation de l’acheteur et un solde positif sur celui du producteur. Apparemment de l’argent est maintenant né de rien, respectivement d’une dette. Cette représentation n’est quand même pas conforme aux faits, parce qu’en réalité l’argent naît de la possibilité de prestation du producteur qui achète. Car celui-ci veut donc continuer à travailler/élaborer les pré-prestations en produit final pour lesquelles un besoin correspondant existe bel et bien. Le processus de prestation, qui s’enclenche immédiatement après l’achat du pré-produit, couvre donc la valeur de l’argent né au préalable par la ligne d’enregistrement comptable. Un système d’argent de compensation qui commence au début d’une chaîne de création de valeur et donc avec une production primordiale, devrait donc allouer une ligne de crédit à l’agriculteur, qui produit des productions pour tous les autres qui ne travaillent pas à la production primaire, afin de lui permettre de payer toutes les pré-productions immédiates dont il a besoin (moyens d’exploitation, les dépenses qu’il a pour ses propres besoins de consommations, etc.), jusqu’à ce qu’il puisse engranger sa récolte et la vendre [soulignement du traducteur, car dans l’Association Sainte-Catherine (1989-2010 env.), cette idée avait été émise de payer la production de pommes de terre au moment de la plantation, donc bien avant qu’elle soit récoltée pour soutenir une ferme en bio-dynamie et co-participer ainsi aux risques de l’agriculture, mais nous n’eûmes point alors la maturité morale pour la réaliser, ndt]. Par contre, dans cette ligne de crédit ne doivent pas entrer les prestations qui servent à l’édification de son patrimoine. Le nouveau tracteur ou le nouveau hangar de stockage dont il a besoin, devront être financés par l’argent de prêt.

 

Création d’argent et souscription de capital

Au contraire de l’argent d’achat, l’argent de prêt ne devra pas être créé par une ligne comptable de crédit dans le système bancaire. L’actuel système bancaire se fonde pourtant sur cette forme de création monétaire, ce qui conduit à une complète confusion des processus de valeur. Les banques ne sont tout d’abord pas renvoyées à collectionner/rassembler du capital pour octroyer sur cette base des crédits, mais peuvent accorder des crédits par la technique comptable totalement indépendamment d’opérations passives. ( 15 ) Mais si des crédits d’investissement à long termes sont exactement  mis ainsi à disposition, comme c’est possible avec la création de l’argent d’achat à partir de la compensation de prestation, ainsi il devient impossible d’organiser l’argent en une  échelle de mesure objective de valeur, puisque les relations de valeur seront constamment repoussées/déplacées.

Dans la quatrième conférence du cours déjà, il devient évident que du capital doit tout d’abord être collecté, avant qu’il doive être prêté. ( 16 ) En cela, selon Rudolf Steiner, repose sa signification d’économie politique/de peuple. Ce capital doit surgir aux divers lieux comme excédent dans le processus d’économie politique. En ce qu’il sera focalisé/mis en lots par l’administration du capital, il peut être conduit vers une mise en valeur spirituelle. Une telle mise en valeur se présente lorsqu’un esprit économique productif reçoit de l’argent à disposition pour le mettre ainsi en œuvre dans une entreprise qui, à l’avenir, mène d’une façon satisfaisante à une production de marchandises. Mais le capital pourra aussi être spirituellement valorisé dans la libre vie de l’esprit. Dans ces deux cas, il est complètement consommé, sauf qu’avec la libre activité spirituelle on travaille à aucun objectif matériel dans la production de biens. La consommation du capital sert de ce fait la croissance spirituelle et non pas la croissance économique. Du capital de prêt correctement utilisé provoque une amélioration du potentiel de production à l’intérieur d’un domaine économique. Ce qui pourra mieux satisfaire à l’avenir, à un moment ultérieur, les besoins des êtres humains avec une dépense moindre de travail. Cela provoque un nouvel excédent qui apparaît sous forme d’argent. Celui-ci, Steiner le désigne comme intérêt. Lors de l’utilisation du capital en argent de donation il n’est pas du tout question par contre de faire des affaires par des intérêts.

 

Intérêts et partage de bénéfice

 Rudolf Steiner considère le paiement des intérêts du capital totalement à l’instar d’un investisseur qui dispense du venture capital (capital risque). Celui-ci accorde sans aucunes sortes de garantie du capital à un entrepreneur dans la confiance de ses facultés et de son idée de projet. Si cette idée s’avère infructueuse dans la phase de transposition/mise en œuvre, alors le capital est perdu. Par contre, si le projet réussit et dégage des bénéfices à l’avenir, alors l’investisseur y est intéressé. Au contraire du type actuel des donneurs de capital risque, qui travaillent purement et simplement pour leur profit propre, Rudolf Steiner tient ici compte de l’endroit où dans le processus d’économie politique des intérêts réels peuvent être dégagés et à quels endroits apparaissent, par contre, seulement apparemment des intérêt qui conduisent à des redistributions [par des droits abusifs par exemple, voir l’article précédant de Christian Kreiß : Intérêts composés et croissance cancéreuse. Die Drei 11/2018 [Traduit en français] ndtDK].

L’intérêt représente — vu au plan d’une économie réelle — le « plus » qui prend naissance, lorsqu’un esprit entrepreneurial deviendra actif de manière féconde sur la base d’un capital de prêt. À partir de ce « plus » se forme aussi bien le revenu de l’entrepreneur ( 17 ) que le dédommagement de ceux-là qui ont mis à sa disposition le capital de prêt. Étant donné que le capital a été consommé [ou englouti ! ndtDK] sans plus dans la mise en place des nouveaux moyens de production de l’entreprise, il ne pourra plus jamais être rendu. Ce qui revient/flue en retour au prêteur doit nécessairement être prélevé du « plus » ultérieur. Un entrepreneur et un donneur de prêt doivent par conséquent, se partager pour ainsi dire ce « plus », c’est-à-dire que l’entrepreneur « amortit » ses dettes à partir de l’intérêt produit économiquement/pat la gestion. ( 18 ) Ainsi considérée la relation entre le prêteur et l’emprunteur est exactement une procédure de partage de la recette à l’instar de ce qui s’accomplit entre un fournisseur de travail et un directeur du travail. ( 19 ) Et exactement ainsi que cette dernière relation sera faussée par des relations de droit et de pouvoir, ainsi aussi la première. C’est sur cette base que Rudolf Steiner en parle dans Les points essentiels de la question sociale en précisant que la fixation des intérêts devrait s’ensuivre par l’état de droit. ( 20 )

 Prêter et escroquer

 D’authentiques relations sociales peuvent seulement être créées si ceux qui produisent le travail concret dans les moyens de production ne sont pas escroqués par ceux qui dirigent le travail ou disposent simplement de grosses fortunes. Mais cette escroquerie surgit très facilement lorsqu’aucun concept conforme à la réalité économique n’est formé. Celui qui pense qu’il pourrait créer du capital de prêt au moyen de mesures techniques comptables, ne remarque pas qu’il escroquera par cela, à un autre endroit de l’organisme économique, avant tout ceux qui fournissent le travail dans les moyens de production. Car il peut influencer les relations de valeur à son propre profit. De même celui qui dispose du capital financier ne remarque pas qu’il escroque pareillement des humains à un autre endroit où ce capital ne cesse de proliférer au moyen de stratégies de placement astucieuses — en particulier celles consistant dans l’acquisition de droits de propriété sur des bien-fonds et entreprises. ( 21 ) À cela Rudolf Steiner oppose la pensée du vieillissement de l’argent dans la 12e conférence. Ce n’est pas l’argent d’achat qui devrait perdre de sa valeur, mais au contraire l’argent de prêt qui devrait s’user. Car c’est seulement ainsi qu’il reflète correctement ce qui se passe factuellement dans le processus d’économie de peuple.

La valeur de l’argent d’achat est en cela fondée qu’il reflète correctement le processus créateur de valeur « travail sur la nature ». On a là en tête toutes les prestations de travail au moyen du moyen de production primordial « terre » et des moyens de production produisant dans les domaines de fabrication qui sont immédiatement entreposés à proximité et qui sont aménagés à partir de besoins de consommation existants/disponibles. Il est décisif que les besoins de consommation seront satisfaits ici en temps et en heure actuels. Lors de la fabrication de biens d’investissement ce n’est pas le cas. Car ici des productions sont produites sans que s’ensuive une contrepartie proche dans le temps. Si les processus de prestation qui sont nécessaires aux biens d’investissement sont exactement ainsi pré-financés, comme mes processus de prestation qui conduisent aux biens de consommation alors les producteurs de biens d’investissement peuvent déployer avec leur revenu une demande de biens de consommation, sans qu’eux-mêmes, dans la même période de production, contribuent à la fabrication de biens de consommation. Cela a un effet inflationniste. ( 22 ) Si par contre le capital est prélevé à partir de l’excédent, alors, avec cet argent peut être déployée la demande en marchandises et prestations, qui deviennent des biens d’investissement. De ce fait l’argent reste en circulation et l’excédent est progressivement dissous/déconstruit.

 Les limites du prêter

Le concept d’argent de prêt est formé chez Rudolf Steiner par la sorte d’utilisation du capital.  De l’argent de prêt c’est l’argent qui est mis à la disposition d’une esprit entrepreneurial pour réorganiser un domaine économique de manière telle qu’à la fin de l’opération, des marchandises essentiellement plus efficientes sont produites ou que de nouveaux produits apparaissent qui n’avaient encore jamais été  développés jusqu’à cette date, des produits qui facilitent la vie matérielle. C’est-à-dire qu’au travers de l’argent de prêt l’esprit entrepreneurial intervient d’une manière telle dans la vie de l’économie que le potentiel de production du domaine économique sera développé. Or plus ce dernier est développé dans un domaine économique donné, davantage d’excédents élevés peuvent théoriquement être réalisés/dégagés, quand les êtres humains mettent en œuvre du travail à ces moyens de production dans ce domaine économique. Nonobstant cela, en pratique, il y a ici des limites. D’une part les besoins doivent aussi réellement exister, pour lesquels ce potentiel de production est mis en place. D’autre part, le travail ne pourra pas  être concentré indéfiniment en quelques endroits.

Plus un domaine économique fait monter son potentiel de production, plus vastement et mondialement doivent être organisées ses voies d’écoulement des marchandises. Le monde entier ressemble à cet égard à une gigantesque économie de village, au-delà des frontières de laquelle on ne peut pas aller. En outre un domaine économique qui renforce son potentiel de production est en situation de pouvoir exiger de la part des autres domaines économiques beaucoup plus de prestations. Sinon l’échange se laisse seulement maintenir au moyen d’artifices de techniques financières, lesquels, à longue échéance, doivent nécessairement seulement conduire à toujours plus de réprobations sociales. Même à l’intérieur d’un domaine économique devra être travaillé en vue d’un équilibre entre les divers secteurs de productions, si on est censé devoir éviter des crises économiques et écologiques.

La dépréciation de l’argent de prêt, dont parle Rudolf Steiner, représente simplement le fait concret qu’il n’est pas possible d’investir sans cesse les excédents dans une extension du potentiel de production. Plus cette consolidation a progressé, d’autant moins d’intérêt réel s’en laisse dégager. Par « force de mise en valeur pour tout organiser» ( 23 ) de l’argent de prêt s’épuise. L’argent de prêt est devenu vieux. Mais est pourtant disponible dans le domaine économique un potentiel de production qui produit des excédents, quand les êtres humains fabriquent d’une manière habituelle des prestations. Ces excédents peuvent seulement encore être sensément donnés aux être humains qui exercent des activités, lesquelles contribuent de leur côté à la croissance spirituelle de la société. Ils doivent aussi être consommés, ces excédents, car sinon en quelques endroits que ce soit, des producteurs se retrouveront assis sur leurs fabrications, quoiqu’en d’autres lieux il y eût des gens qui, ne disposant pas de l’argent nécessaire, ne peuvent absolument pas développer de demandes pour ces produits. La croissance matérielle doit toujours plus être finalement transférée dans une croissance spirituelle. Si cela réussi, un domaine économique se développera sans crise.

 

Utilisation correcte du capital et faux travail du capital

L’argent de prêt peut seulement viser un paiement d’intérêt de la manière caractérisée ci-dessus. Lorsque Rudolf Steiner explique que l’argent jeune de prêt est plus cher et que l’ancien est meilleur marché, alors cela ne signifie rien d’autre qu’on ne peut créer de valeur économique qu’avec un argent frais de prêt, parce que dans certaines branches un plus haut besoin en nouveaux investissements est donné lesquels rendent nécessaires des contrats de crédit. Dans d’autres domaines, qui sont bien adaptés au besoin existant, seuls de faibles investissements, amortissables à brève échéance, sont indispensables. Ceux-ci peuvent être réalisés avec de l’argent de prêt moins cher parce qu’ayant vieilli.

Avec le capital d’épargne, la représentation s’installe aisément du petit épargnant, qui a une paire de milliers d’Euro sur son compte et se réjouit d’en retirer un intérêt. Dans une ampleur beaucoup plus vaste, les moyens pour les investissements sont nonobstant apportés à partir des gains des entreprises. Pour l’épargnant classique le vieillissement de l’argent n’a pas de rôle important. Il a le but de déplacer son pouvoir d’achat dans le futur. La banque lui offre la possibilité de déposer son argent productif d’intérêt. De ce fait elle le conduit à la consommation/l’utilisation. À partir des intérêts qui y sont produits, elle peut donc lui indemniser son pouvoir d’achat à un moment ultérieur. Un problème surgirait seulement ensuite si l’on épargnait plus que ce qui peut être déposé en apportant un intérêt, de sorte que le pouvoir d’achat soit complètement remplacer/remboursé. Si la banque dût proposer des contrats d’épargne, dans lesquels à la fin du temps imparti, un remboursement moindre fût possible que le paiement original, alors la tentation naîtrait de thésauriser l’argent d’achat en liquide. Mais ceci n’est absolument pas le problème important.

Les excédents les plus élevés sont aujourd’hui réalisés dans les grandes entreprises. Celles-ci sont en général des sociétés par actions, cela signifie — sur la base des rapports/conditions actuelles du droit et du pouvoir  — que leurs actionnaires revendiquent les excédents qui ne devront pas être réinvestis. La part la plus petite de cela s’écoule dans la consommation privée. Une partie s’écoule vers des fondations. La part du lion est nonobstant employée aujourd’hui pour acquérir d’autres entreprises ou des biens-fonds. Il s’agit purement et simplement de conserver d’une manière ou d’une autre la valeur de l’excédent une fois réalisé. Cela est toutefois une impossibilité objective. Celle-ci sera toujours annihilée à un endroit ou un autre du processus d’économie politique.

Un grand destructeur des valeurs d’économie politique c’est, par exemple, l’industrie de l’armement. Au plan de l’économie politique les produits de celle-ci sont considérés comme une consommation de l’état. Aussi bien les dépenses de l’état pour des « biens » d’armement ainsi qu’aussi le capital qui est investi dans l’industrie de l’armement, sont en réalité de l’argent de don, quand bien même les investissements, sur la base des conditions du droit et de pouvoir données actuellement, peuvent être avoués comme bons productifs d’intérêt. Mais ces intérêts ne sont que des semblants d’intérêts. Ils ne proviennent pas d’un « plus » économique, mais naissent purement et simplement de placements de valeur qu’on ne peut pas percer à jour. À partir de cette raison Steiner part conséquemment du fait que des entreprises ainsi que des biens-fonds ne sont pas achetables. Les excédents naissent objectivement dans les entreprises. Des voies doivent donc être trouvées sur la manière dont ils peuvent être amenés à une mise en valeur spirituelle sensée.

 

Argent vieilli et branches vieillies

 La question reste donc de savoir quelle est l’importance de la proposition de Steiner d’indiquer une date d’émission sur les billets de banque et de déterminer la durée de vie de l’argent ? Pour celui qui veut acheter des biens de consommation avec l’argent, l’âge de celui-ci ne joue aucun rôle, car il conserve sa valeur jusqu’au dernier moment. Pour celui qui a prêté de l’argent, le vieillissement de celui-ci ne joue pareillement plus aucun rôle, car il le paie comme un revenu à ceux qui produisent avec lui les productions d’investissement. Le vieillissement n’a de signification que pour le moment d’attribution du crédit : pour celui qui prend un crédit, parce que le niveau d’intérêt en résulte qu’il doit réaliser en valeur économique et pour la gestion du capital, parce que celle-ci gouverne l’attribution de crédit en accord avec les associations. Dans le Séminaire d’économie politique (SEP), Steiner part du fait que « par les associations, on peut veiller à ce qu’à l’intérieur des entreprises, qui reposent sur la même base, ne soit rien utilisé d’autre qu’un argent d’âge déterminé ». ( 24 ) Il met donc l’âge de l’argent en relation aux branches.  La question se pose de savoir quelles branches doivent utiliser de l’argent jeune et quelles autres de l’argent âgé. On découvre une réponse dans le séminaire, lors d’une réponse à une question, où il s’agissait de la relation de l’état et de l’argent. Ce qu’il avait décrit dans la douzième conférence, rendrait impossible un banque d’état. La gestion/l’administration de l’argent serait transférée à l’économie :

 

Il en sortirait un institut bancaire entre ceux qui ont reçu de l’argent de don et ceux qui, par le travail, pour préciser le travail du sol, produiraient à nouveau de nouvelles marchandises dans leur commencement. Du fait que cette mesure passe à l’économie, cette mesure de rajeunissement de l’argent serait en cohérence avec d’autres mesures économiques et nullement avec des mesures étatiques. ( 25 )

 Cela étant on a montré plus haut que l’argent d’achat naît partout où du travail est produit aux moyens de production existants. Or le moyen de production primordial c’est la nature. L’agriculteur doit la façonner afin que les fondements de l’alimentation de la population soit créés. Si, dans un domaine économique, le travail est encore peu organisé par l’esprit et donc partagé, alors de nombreuses personnes doivent travailler dans l’agriculture. Plus l’esprit rend opérant ce partage du travail, d’autant moins d’êtres humains travaillent dans l’agriculture mais plutôt dans les moyens de production installés à proximité et créés par l’esprit d’invention. De ce fait de nouvelles branches peuvent toujours se développer. Les branches à proximité de la nature seraient alors à considérer comme « jeunes », les branches proches de l’esprit, par exemple la production d’ordinateurs, de smartphones et d’autres techniques, comme « vieilles ». Des excédents, qui naissent de l’agriculture, peuvent être dirigés vers des projets d’investissement à long terme, parce qu’ils assurent la base d’alimentation de ceux qui, éventuellement pendant plusieurs années durant, travaillent à la construction des moyens de production sans qu’à ceux-là déjà des prestations soient fabriquées pour le circuit économique. Des excédents qui naissent dans les domaines anciens, ne peuvent pas être investis dans des domaines jeunes, puisque ceci doit provoquer un déplacement des relations de valeur. Étant donné que l’argent n’est pas dompté actuellement et n’a pas d’âge, cela se produit donc de manière permanente. Les revenus de ceux qui se trouvent à travailler dans les domaines jeunes sont de fait dévalués sans qu’on le remarque. L’argent commence donc à mentir. L’impression surgit à la fin que tout se passe comme si l’agriculture devait être subventionnées par l’industrie.

L’argent n’est rien d’autre qu’une comptabilité inter-entreprise/supra-entreprise. La partie constitutive centrale en est une comptabilité de sorte que les positions qu’elle saisit soient correctement évaluées. En donnant un âge à l’argent et s’il est coordonné aux divers domaines de production, la gestion du capital obtient une image de la structure des moyens de production utilisables dans un domaine économique déterminé. C’est la tâche de la gestion du capital de guider celui-ci de sorte que les moyens de production puissent être adaptés aux besoins changeants. Les besoins dans un domaine économique peuvent être orientés par exemple, plus matériellement. Alors la tendance en résultera d’accorder un très long temps de vie à l’argent. Mais cela signifie que l’on peut moins donner et qu’en conséquence rendre possibles moins d’activités spirituelles libres. Dans un autre domaine économique, les besoins seront plus spirituellement orientés. On s’y efforcera à raccourcir alors le temps de vie de l’argent. Les moyens de production qui servent la production matérielle, ne peuvent plus ensuite être différentiés plus largement. Le constructeur d’automobiles ne reçoit pas d’argent de prêt pour construire de grosses limousines toujours plus bourrées de technique, le fabricant de smartphone  ne doit plus projeter chaque année un nouveau modèle sur le marché. Au lieu de cela des  moyens de productions spirituels, comme les édifices scolaires, les cathédrales, opéras, etc. peuvent être construits d’une manière artistique et entretenus.

Il devient évident sous ces points de vue, que la proposition de Steiner de donner un âge à l’argent de prêt, vise à une comptabilité de patrimoine/d'actif inter-entreprise. ( 26 ) Il est seulement étrange que ceci doive être exprimé sur l’argent d’achat. L’administration du capital doit savoir où les excédents surgissent et quelle qualité ils ont en relation avec la vie de l’économie. Elle doit pouvoir se faire à tout moment une image de la qualité de la capacité/du patrimoine de production, afin qu’une guidance sensée du capital devienne possible. Si l’on parvient à diriger les excédents de manière sensée vers la transformation du potentiel de production ou vers la libre vie de l’esprit, alors la valeur de l’argent d’achat restera toujours stable.

Die Drei 11/2018.

voir aussi courrier des lecteurs sous les notes


( 1 ) Pour le " Cours économique national ", voir ma série d'articles publiés de façon irrégulière dans die Drei 10/2011 à 5/2018. Les articles particuliers peuvent être trouvés sur http://diedrei. org/alle -artikel/thema/natio-naloekonomischer-kurs.html abgerufen werden, die ersten elf sind außerdem als Sonderheft verfügbar: http://diedrei. org/details/inhalt/artikelserie-zur-komposition-des-nati-onaloekonomischen-kurses. html

( 2 ) Heribert Prantl: „Ca commence avec le sol“, in:'Süd-deutsche Zeitung' du 21 septembre 2018, n° 218, p. 2.

( 3 ) Conseil consultatif scientifique pour la politique agricole, la protection de la santé des consommateurs et des denrées alimentaires au ministère fédéral de l'alimentation et de l'agriculture : " Pour une politique agricole commune de l'UE après 2020 : questions fondamentales et recommandations. - Déclaration avril 2018". L'accent est mis sur l'ATI. - www. bmel.de/SharedDocs/Downloads/Ministerium/Beiraete/ Agrarpolitik/GAP-GrundsatzfragenEmpfehlungen.pdf?__ blob = publicationFile

( 4 ) Selon une étude menée par la Fondation Hans Böckler en septembre 2018, environ 12% de la population active en Allemagne vit en permanence dans le précariat. Cf. Markus Promberger, Kerstin Jahn, Brigitte Schels, Jutta Allmendinger & Stefan Stuth:'Existe-t-ilun précariat stable ?', in:'Working Paper Forschungsförderung No. 085, September 2018', p. 16 - www.boeckler.de/pd-f/p_fofoe_WP_085_2018.pdf

( 5 ) Rudolf Steiner : "Cours d‘économie nationale" (GA 340), Dornach 2002 (ci-après dénommé NÖK/CEP).

( 6 ) NÖK, P. 177.

( 7 ) Cela vaut en particulier pour les organismes proposés par Rudolf Steiner pour l’observation des prix du marché (associations). Voir aussi mon article'Geldverwaltung und Assoziationsbildung' (Administration de l’argent et formation d’associations) dans : die Drei 5/2018, p. 15ff.

( 8 ) Cf. www.infla-berlin.de/ 14_Inflationsb elege/ Inflationsbelege.php

( 9 ) NÖK, P. 174.

( 10 ) NÖK, P. 172.

( 11 ) Fig. de Werner Zimmermann : " Liberté ou coercition ? Un guide de l'acte libérateur. Dans le même temps un rapport sur six ans de colonie Bassersdorf et quatre ans "Wirtschaftsring"(cercle/anneau économique), Thielle 1938, p. 29.

( 12 ) Cf. Rudolf Steiner : " Nationalökonomisches Seminar " (Séminaire d’économie nationale) (GA 341 - ci-après : NÖS), Dornach 1986, p. 77 Lorsqu'on lui demande comment penser l'usure et si l’argent d'achat doit également s'user, Steiner répond : " Comme argent d'achat, il conserve sa valeur jusqu'au bout. "Puis il explique que les dispositifs techniques, comme les billets de banque munis de coupons, qui sont arrachés par un bureau, provoqueraient l'apparition d'un appareil bureaucratique très compliqué et ajoute : "Mais il ne s'agit en réalité jamais de provoquer une usure par de tels signes extérieurs, mais que le cours réel des choses effectue de lui-même cette valence".

( 13 ) Si le prix de la viande est réduit de moitié dans un délai de deux semaines, la raison pourrait aussi être des conditions extérieures. Si, lors d'une sécheresse, la nourriture devient rare, de nombreux animaux doivent être abattus et la viande rapidement consommée. Dans ce cas, le changement ne serait pas dû à l'argent.

( 14 ) Stephan Eisenhut : >Gestion de l'argent et formation d'associations <, in : Drei 5/2018, p. 16s.

( 15 ) Au passif du bilan de la banque, les dépôts d'épargne de la clientèle sont enregistrés et les crédits à l'actif.

( 16 ) NÖK, P. 60.

( 17 ) "Si le capital a connu un agrandissement par l'activité de cette personnalité, tant de choses seront transférées dans leur propriété individuelle à partir de cet agrandissement que l'augmentation des émoluments d'origine correspond à l'augmentation de capital au sens d'une rémunération d'intérêt". - Rudolf Steiner:'Les points clef de la question sociale' (GA 23), Dornach 1976, p. 113.

( 18 ) La représentation que l'on peut prêter du capital et le récupérer après un délai convenu plus les intérêts provient d'une pratique qui n'est basée sur aucune façon de voir le processus économique.

( 19 ) Mais cette vision unilatérale n'est pas présentée ici comme la correcte, mais il est envisagé de remplacer le rapport salarial par le rapport de partage contractuel par rapport à ce qui a été réalisé conjointement par le chef du travail et le travailleur en lien avec l’organisation d’ensemble de l'organisme social. "GA 23, p. 136 : mise en évidence dans l'original

( 20 ) "Jusqu'à ces dates, un intérêt, se donnant de la conscience de droit, à fixer par l’état de droit, sera aussi à fournir par celui à qui de telles épargnes seront données pour la création de moyens de production". (GA 23, P. 115). La question qui se pose ici est de savoir ce que Rudolf Steiner entend par "intérêt à fixer par l'Etat de droit". Si le niveau du taux d'intérêt était déterminé de manière abstraite par l'État de droit, un élément extrêmement statique entrerait dans la vie économique. Cela contredit tout ce que Steiner explique dans ses autres remarques. Il est donc très probable qu'il veuille dire que l'État a la tâche de déterminer la forme sous laquelle le montant du paiement des intérêts doit être déterminé. Mais cela conduit à l'idée d'une participation aux bénéfices.

( 21 ) Cf. Stephan Eisenhut : " La tri-articulation de la monnaie : L'argent comme problème de droit", in : die drei 7-8/2015, P. 44s.

( 22 ) Je dois à Fionn Meier l’indication que cette distinction est également faite dans la "Macroéconomie quantique" (QM). La création de l'argent comme image d'une réelle création de valeur sera appelé là "crédit quantique". Le crédit, par contre, est le prêt de revenus déjà existants qui sont générés au pôle de la nature et ne sont pas consommés aussitôt. Si les banques accordent du crédit sans qu’auparavant soit générés des revenus, explique la QM, apparait de l’inflation et les revenus des travailleurs seront dévalués/dévalorisés. Voir Alvaro Cencini & Sergio Rossi:'Economic and Financial Crises : A New Macroeconomic Analysis', Hampshire/NY 2015, pp. 33 et 230.

(23 ) NÖS, P. 79.

( 24 ) NÔS, P. 80.

( 25 ) NOS, P. 81.

( 26 ) Marc Desaules a déjà constaté, il y a plusieurs années, l'affectation de l’argent d’achat au compte de résultat de la comptabilité et de l’argent de prêt au compte des actifs. Son approche de l'affectation de l'argent des dons aux écritures de clôture est intéressante, dans la mesure où celles-ci montrent un excédent. Selon l'idée présentée ici, les excédents générés dans les secteurs "jeunes" peuvent être utilisés comme argent de prêt, alors que cela n'est pas possible dans les secteurs "anciens" sans intervenir de manière redistributive dans le processus économique. Voir Marc Desaules : « S'éveiller à la comptabilité mondiale », dans ce numéro, pp. 10-13.


Forum des lecteurs      (original allemand)

Absolument pas conforme aux faits ?

 Au sujet du « vieillissement de l’argent et du pilotage du capital » de Stephan Eisenhut dans Die Drei 11/2018

 

Une des questions posées par Monsieur Eisenhut est celle de savoir ce que Rudolf Steiner pense quand il avance qu’à un prêteur d’argent (de prêt), serait à payer un intérêt ( q1 )  « qui est à fixer par l’état de droit ». Eisenhut pense (dans la note 18 de son article) que : « La représentation que l’on pût prêter du capital et, après un temps convenu, en recevoir un intérêt en retour, provient d’une pratique a la base de laquelle ne repose aucune façon de le processus d’économie de peuple. » Selon Eisenhut, le dédommagement de ceux qui ont mis à disposition du capital d’épargne doit avoir juste lieu par une certaine participation au gain éventuellement réalisée par l’entrepreneur (p.22 éd. Allemande).

Mais évidemment, peut seulement au sens de ma représentation qu’on reçoit en retour le donné/restitue, être vraiment parler d’argent de prêt. Et cette façon de voir repose aussi à la base des exposés de Rudolf Steiner. Sur le droit au paiement d’un intérêt de ce qui est donné, au plein centre de la dixième conférence du CEP — et d’une manière essentiellement plus détaillée qui peut être citée ici — celui-ci explique ce qui suit : « Originellement, le la rétribution/la contrepartie du prêter est purement la condition préalable que le prêteur prête de nouveau, respectivement quand il ne vous prête pas de nouveau, au moins(en tant que garant) aide lors du prêt propre, quand on l’a aidé lors du prêter. Lorsqu’il s’agit de prêt, ce qui entre donc tout de suite d’une manière éclatante dans le processus d’économie de peuple c’est la réciprocité humaine. — Si les choses sont ainsi qu’est-ce donc alors que l’intérêt ? L’intérêt — cela a déjà été remarqué du reste par quelques économistes de peuple — l’intérêt c’est ce que je reçois lorsque je renonce à cette réciprocité et que donc je prête quelque chose à quelqu’un et conviens avec lui qu’il n’a jamais besoin de me prêter quelque chose ; alors, quand je renonce donc à cette réciprocité, alors il me paye l’intérêt pour cela. L’intérêt est donc tout de suite le remplacement/la purge pour quelque chose qui se passe d’être humain à être humain, c’est la vengeance/la représailles pour ce qui joue comme réciprocité humaine dans le processus d’économie de peuple. » ( q2 )

Qu’en dehors de cela Steiner — citée par Eisenhut à la note 17 — décrit dans « les Points essentiels de la question sociale » qu’en cas d’augmentation du capital, l’augmentation de ses traitements qui est à négocier au niveau juridique entre un entrepreneur et ses collaborateurs, est à considérer « dans le sens d’une relation d’intérêt » ( q3 ) , ne joue aucun rôle ici, où il s’agit d’un rapport juridique à l’égard d’un prêteur d’argent de prêt et non pas d’un collaborateur. Un mélange des deux relations a conduit Eisenhut « aux pensées du partage de bénéfice » aussi lors du rapport de l’entrepreneur au prêteur d’argent(voir la note 20). Avec ce manque de clarté sur l’essence de l’argent de prêt, se toutefois aussi la possibilité d’appliquer correctement la pensée de la nécessité du vieillissement de l’argent sur les rapports d’argent de prêt, là où d’après les exposées/explications de Steiner dans la 12ème  conférence du CEP  dicitée par Eisenhut, il entre tout particulièrement en considération pour la pratique.

Une erreur a aussi échappé à Eisenhut dans sa tentative de démarquer l’argent d’achat de l’argent de prêt. (ref : § L’argent comme résultat du compte recettes-dépenses inter-entreprise). Ce dernier devrait être donné lorsqu’une institution de coordination (telle que les lieux de compensation du « Sardex » en Sardaigne) décide sur la base de son évaluation de mettre en œuvre un processus économique déterminé en fonction de l’existence dans la population d’un besoin envers une prestation ou marchandise et que des moyens de production et des producteurs sont là qui pourraient satisfaire le besoin : aux producteurs ou selon le cas prestataires de services potentiels, est donnée la possibilité d’acheter des pré-prestations auprès d’un offrant/prestataire correspondant, à l’occasion de quoi est inscrit au compte de ce dernier un solde positif, au compte de l’acheteur un solde négatif. Les deux côté peuvent certes maintenant acheter — l’un avec son gain, l’autre avec son crédit — mais l’affirmation qu’ici un argent d’achat « naît de la possibilité de prestation » n’est absolument pas conforme au fait. L’argent d’achat sert d’intermédiaire d’échange des produits ou de prestations disponibles. La « possibilité de prestation du producteur achetant » deviendrait simplement comme une marchandise présupposée comme donnée et la nécessité de son évaluation (par une instance de la vie de l’esprit laquelle a vocation à servir la médiation des processus de prêt et de don) ne serait alors simplement pas perçue, voire même sous-estimée. Et ainsi on arriverait à aucun concept propre de dons et son rapport aux institutions de la vie de l’esprit.

Néanmoins, ou aussi tout de suite à cause de la démonstration de méprises objectives qui tombent sous le sens, dans le sillage des efforts de compréhension aussi sérieux, les présentations d’Eisenhut sont stimulantes et dignes de reconnaissance au degré le plus haut.

Manfrid Gädeke           Die Drei 1-2/2019.

 

Réponse

Un souhait central de ma série est de montrer qu’on peut seulement suivre les constructions conceptuelles/formation de concept de Steiner quand on abandonne le penser dans des concepts paralysés et que l’on s’élève à des images conceptuelles qui permettent une immersion dans des images en mouvement. Dans sa critique, Manfrid Gädeke m’impute un malentendu concernant le concept d’argent d’achat et celui d’argent de prêt. À cette occasion, il part de définitions qu’il s’est elaborées par son travail en se confrontant de sa manière aux écrits de Steiner. Et je ne peux ici qu’être d’accord avec lui : avec ces définitions-ci, mes développements ne se laissent pas comprendre. Ainsi pour lui le concept de la marchandise coïncide avec celui de « produit disponible ». C’est déjà joliment commode, car on peut se représenter concrètement l’argent d’achat comme une chose équivalente. Alors l’argent d’achat doit naturellement converger avec les « produits ou prestations disponibles ».

Mais ici commence déjà la première difficulté. Je peux certes me représenter un dépôt de marchandises, dans lequel des produits sont « disponibles ». Mais que sont des « prestations disponibles » ? Les prestation sont quand-même alors seulement disponibles quand l’être humain les réalise. Maintenant où Gädeke prend-il l’argent d’achat qui concilie les « produits existants » ? Si l’on tente de penser comme chose le concept de marchandise, comme Gädeke pousse à le faire ici, alors on perd de vue ce sur quoi Steiner veut attirer l’attention dans le cour d’économie nationale. Ce n’est pas inutilement que Steiner a renvoyé à de nombreux endroits sur le besoin d’une « imagination » pour appréhender le concept de marchandise. Pourquoi le concept-marchandise est il pendant de la « prestation de l’être humain » ? ( q4 )  Parce que la marchandise naît dans un processus, dans lequel l’être humain produit un travail à la nature avec le but d’engendrer un bien échangeable qui sert le besoin d’un autre être humain. Si la fabrication ne rencontre aucun besoin, alors elle n’est aussi pas une marchandise et n’a aucune valeur avec cela. Quand je veux penser le concept de marchandise, je dois toujours plonger dans les processus qui font des choses une marchandise, c’est-à-dire, dans les mouvements de valeur qui provoque le processus d’économie de peuple. Parce que Gädeke en reste à ses définitions statiques, et ne met pas le processuel en perce, il ne rend pas justice à mes exposés.

Son concept d’argent de prêt révèle cela plus nettement encore. Quand je prête une auto, je peux évidemment m’attendre à ce qu’après un certain temps je récupère de nouveau l’auto. Quand je fais cela professionnellement, je prendrai une redevance pour cela par laquelle je peux faire face aux réparations, investissements suppléants et assurer ma subsistance. Quand je prête de l’argent à un entrepreneur, il est cependant parfaitement impossible qu’il me paye en retour le même argent. Il doit naturellement me rembourser quelque chose sinon ce serait effectivement un don. Mais ce qu’il me rembourse à l’avenir provient d’un tout autre processus de création de valeur. Et les prétentions qui avaient été édifiées dans le passé au moyen d’économie/par l’épargne n’ont pas la permission d’avoir des répercutions de sorte que ceux qui assurent des prestations dans le présent ne puisse payer aucune contrepartie/contre-prestation appropriée. C’est à partir de cette raison que Steiner dans les Points essentiels, considère l’intérêt comme une question de droit. L’intérêt est la contre-partie/la contre-prestation que reçoit quelqu’un du fait qu’il a prêté son capital en argent. S’il ne l’eût pas prêté mais, au contraire, parce qu’il n’en a pas besoin, l’eût gardé chez lui, alors l’administration de l’argent dût prendre des mesures de sorte que son argent ainsi thésaurisé perde sa valeur.

Dans les Points essentiels, Steiner exprime cela de la manière suivante : « Une possession d’argent passe après un certain temps sous une forme appropriée dans la collectivité. Et pour que l’argent qui n’œuvre pas dans les entreprises de production, ne soit pas retenu par des détenteurs avec contournement des mesures des organisations de l’économie, une refonte [monétaire, ndtDK] ou une impression de nouveaux billets peut avoir lieu. » ( q5 ). Du fait que l’argent sera prêté, il peut œuvrer dans les entreprises de production et produire économiquement/dégager un intérêt. Si, en plus de l’intérêt à l’échéance du délai, le prêteur rentrait en possession du capital, comme Gädeke l’exige, celui-ci pourrait alors être prêté de nouveau, aussi bien les intérêts que le capital récupéré. Mais cela entraînerait que dussent êtres payés aussi bien des intérêts sur des intérêts que des intérêts sur le capital. C’est exactement cela qui mène aux perturbations funestes du processus d’économie de peuple, contre lesquels se tourne clairement Steiner dans les Points essentiels : « Il ne pourra jamais y avoir d’intérêts composés. Celui qui fait des épargnes, a accompli bien entendu des prestations qui lui permettent des contre-prestations ultérieures en marchandises, comme des prestations actuelles en échange des contre-prestations actuelles ; mais les revendications peuvent seulement aller jusqu’à un certaine limite ; car des revendications provenant du passé ne peuvent être satisfaites que par des prestations de travail du présent. Or de telles revendications n’ont pas la permission de devenir un moyen de pouvoir économique. » ( q6 )

 Stephan Eisenhut Die Drei 1-2/2019.


( q1 ) Rudolf Steiner : Les points essentiels de la question sociale (GA 23), Dornach 1976.pp. 147 et suiv. de l’édition allemande
( q2 ) Du même auteur, CEP  (GA 340), pp.147 et suiv. de l’édition allemande
( q3 ) GA 23, p.113

( q4 ) voir la conférence du  5 octobre 1919 dans du même auteur : Compréhension sociale à partir de laconnaissance de science spirituelle (GA 191), Dornach 1989, p.54 de l’édition allemande.
( q5 ) GA 23, p.132 de l’édition allemande
( q6 ) À l’endroit cité précédent, p.133 de l’édition allemande