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Institut pour une triarticulation sociale
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Traduction FG version 2, le 27/11/2013 > Original allemand / Deutsch

Le mouvement pour la triarticulation
1917 - 1922
et sa signification actuelle ( 1 )
Christoph Strawe

 

Les questions sociales ont occupé Rudolf Steiner toute sa vie. Son activité dans le domaine social atteint son point culminant dans les années 1917 - 1922, dans lesquelles il a essayé d'intervenir dans les événements du moment sur une grande échelle. 
Le déménagement de R. Steiner à Berlin en 1897 l’avait conduit d'une part, dans les cercles littéraires de la capitale, d'autre part mis en contact avec le mouvement ouvrier comme enseignant de l'école de formation des travailleurs (1899-1904). S’y est adjoint la Société Théosophique, dont il devint le secrétaire général en 1902 comme champ de son activité ésotérique.( 2 )

« Loi sociologique fondamentale » et « loi sociale principale » 
En 1898, la question de base posée en rapport à la situation individuelle des humains dans son œuvre philosophique principale de 1893, « La philosophie de la liberté »,  est placée explicitement aussi comme question de la structure de la société dans deux articles du « Magazins für Literatur, magazine pour la littérature » : les articles « Liberté et société » et « La question sociale », l'émancipation de l'individu de la tutelle des organisations est identifiée comme la tendance fondamentale du développement social, et comme une «loi  sociologique fondamentale ».La conséquence de cela est la conséquente orientation de l'État vers la protection et la promotion des besoins et des forces de l'individu. En 1905-1906 Steiner publie dans la revue « Lucifer » – fondée en 1903 (regroupée plus tard avec la revue Gnosis)  trois essais sous le titre « Théosophie et question sociale », dans lesquels il thématise le dépassement de l'exploitation et la nécessaire organisation sociale de la division du travail par un altruisme, qui n'est pas subjectivement purement moral, mais agit jusque dans la conception des institutions économiques (« Loi sociale principale »). La poursuite prévue de la série d'articles est abandonnée en raison du manque d'intérêt à ce sujet du lectorat théosophique de cette feuille. Depuis des indications sur le sujet se trouvent plus comme allusions, qui auraient été volontiers développées, si les auditeurs des conférences concernées les avaient conduites à des questions, mais ce ne fut  évidemment pas le cas.

Rudolf Steiner au cours de la Première Guerre mondiale
En 1913, la rupture avec la Société Théosophique était enfin terminée, la société Anthroposophique constituée comme une association indépendante. Cette année, on avait commencé à Dornach, en Suisse, avec la construction du premier « Goetheanum » comme lieu pour soigner l'anthroposophie. Lors du déclenchement de la Guerre mondiale, un groupe d’anthroposophes de différentes nationalités travaillait à Dornach, sur ce bâtiment. 
Pendant les années de la Guerre mondiale, Rudolf Steiner a tenu des conférences à Dornach et à d’autres endroits sur l’arrière-plan spirituel de cette guerre et sur des questions d’époque ;  la direction du nécessaire renouvellement social fut nommée à mots couverts comme dans une conférence du 31.12.1914 (GA 158 ), où les exigences de liberté, égalité et fraternité sont traitées dans une différenciation triarticulée. Dans l’œuvre de conférences de cette année se trouve un vaste débat avec le nationalisme et le chauvinisme, et opposé de l’autre côté un « enseignement positif et cosmopolite sur les âmes des peuples » comme base d’une compréhension entre les peuples. Dans ce contexte, Steiner fait toujours à nouveau la tentative, contre l’installation de la chimère de puissance allemande et le ressentiment antiallemand dans les pays de l'Entente, de souligner de manière nouvelle les impulsions culturelles de l’Europe du centre (Mitteleuropäertums) comme elles avaient vécues à la fin du 18e siècle et dans le début du 19e siècle à Weimar et Berlin, à Iéna et Vienne et ont été poussées entièrement à l'arrière-plan par l’évolution depuis 1871: «L'Empire allemand a été placé dans le contexte mondial », a déclaré Steiner en 1919, « sans objectif essentiel justifiable. Cet objectif n’avait pas le droit d’être tel que seule la puissance militaire ait à le porter, ne pouvait même pas être axé sur le développement de la puissance dans le sens externe. Elle ne pouvait être dirigée que vers le développement interne de sa culture ».( 3 )

Dans ces années, Steiner s’est aussi efforcé de collaborer à un compte rendu factuel des événements en rapport avec le déclenchement de la guerre en Allemagne - il était informé de première main -. Cela s'est produit notamment en raison de l'importance de cette question pour un futur plan de paix. Le sujet était si important pour lui qu'en 1916 il mit en fonctionnement à cet effet, le projet d'un service de presse allemand en Suisse, pays neutre, à Zurich, duquel le concept d'un renouvellement social global formait déjà l'arrière-plan.


1917, année charnière.  
L'année 1917 est une année charnière dans l'histoire du monde. Se forma donc à partir de cette année, cette situation de monde bipolaire qui a été dominée par le rôle de superpuissances des États-Unis et de l'Union soviétique et n’a été dissoute qu'en 1989. En 1917 les États-Unis sont entrés dans la Guerre mondiale, 1917 est l'année de la révolution russe d’octobre – à la survenue de laquelle l’état-major allemand n’était pas non associé. Aussi bien les idées du socialisme comme les slogans démocratiques du président américain Wilson (« rendre le monde sûr pour la démocratie », discours au Congrès du 02/04/1917) visaient un effet de propagande important, tandis que les puissances du centre s’affaiblissaient elles-mêmes par déficit d'objectifs idéels et limitation à des exigences d’annexion.


La pierre commence à rouler
Dans cette situation, vint alors à la fin du mois de mai 1917, à Steiner un élève de Rudolf Steiner, Otto Graf Lerchenfeld (1868-1938), qui, comme tous les gens raisonnables se méfiait ( 4 )des slogans de paix victoireuse des militaires, avec la question de sauver l'Europe centrale du désastre imminent. Dans des entretiens personnels prolongés de trois semaines, qui commencent en juin R. Steiner lui développe alors le concept d'un programme de paix centre européen. Les détails de ces conversations ne sont pas enregistrés, mais doit aussi valoir pour sûr qu’il n’alla pas en des considérations théoriques, mais à la tentative de gagner l'oreille des hommes d'État de premier plan de l'Europe centrale et de les gagner à une initiative de paix  sensée. Le 13 juillet, le jour de la démission du chancelier Bethmann-Hollweg dans le contexte du différend croissant autour la question de paix d'Annexion en Allemagne, Ludwig comte Polzer-Hoditz (1869-1945), lui-même aussi  un élève de Rudolf Steiner est renseigné à propos de l’ initiative de Lerchenfeld . Le frère de Polzer-Hoditz est Chef de cabinet de l'Empereur Autrichien Karl (qui pousse à une conclusion rapide de la paix) et a certaines vues de devenir ministre des Affaires étrangères, tandis que l’oncle de Lerchenfeld est envoyer royal Bavarois à Berlin. Les deux ont donc un accès indirect au pouvoir. On essaye sans succès de prendre contact avec l'ancien ambassadeur allemand de l'époque à Londres, le prince Lichnowsky, le publiciste Maximilien Har, puis avec Walter Rathenau, l'ancien ambassadeur à Washington, le comte Bernstorff, et le directeur de la ligne Albert Ballin Hambourg-Amérique.

Les mémorandums
Steiner rédige deux mémoires (« mémorandums »), qui sont destinés à Berlin et à Vienne. L'idée de base est une initiative de paix partant d’Europe du Centre sur la base d’une nouvelle organisation sociale : une telle réorganisation qui se relierait aux meilleures traditions de l'Europe centrale serait la meilleure mesure formatrice de confiance, et donc la condition d'une paix qui garantisse la viabilité de l'Europe centrale. Rudolf Steiner n’a jadis d’ailleurs pas pendu son statut d’auteur « à la grande cloche », pour ne pas compromettre l'effet. Dans les mémorandums il se tourne - en plus du traitement de la question de la culpabilité de guerre - contre l'utopisme de slogans sur le bonheur de l’humanité (Menschheitsbeglückungsparolen). En particulier, il met en garde contre ce qu’étaient alors les « 14 points » de Wilson du 08/01/1918 sur le « droit à l’autodétermination des nations » mis très unilatéralement en avant. Si chaque peuple sans considération de l'autonomie culturelle des autres essaye de construire son propre État, alors une telle « libération des peuples » ne peut que créer de nouvelles injustices. Ceci doit être particulièrement vrai dans un espace tel que le sud-est de l'Europe, où de différentes ethnies se mélangent et doivent coexister dans un petit espace dans une diversité multiculturelle. On libère - selon Rudolf Steiner – d’abord l’individu - et avec lui seront alors aussi libres les peuples. La conception des conditions, je cite, « surviendra seulement d'une manière saine, si le national est dégagé de la liberté et non pas la liberté du national. Si l’on aspire plutôt qu’à ce dernier, à la première, ainsi on se place sur le sol de l'évolution historique mondiale. Si l’on veut le dernier, ainsi on œuvre contre ce devenir et prépare le terrain pour de nouveaux conflits ». (Memorandum de juillet 1917). Ce qui est soutenu ici, c'est l'idée d'une culture, respectivement vie spirituelle, libre dans le sens le plus large : « L'État laisse aux corporations de nature populaire choisir leurs tribunaux, leurs écoles, ériger leurs églises, et il laisse à l'individu de déterminer son école, son église, son juge. Bien sûr, pas au cas par cas, mais pour un certain temps. (...) Toutes les questions juridiques, éducatives et spirituelles sont placées dans la liberté de la personne. Dans ce domaine, l'État n'a que le droit de police, pas d'initiative ». (GA 24, p.352 s. éd. allemande) 
L'économie aussi devrait se déployer « opportunément » libre des interférences étatiques c'est-à-dire -pragmatiquement en vue des circonstances. Pour la culture et l'économie des « parlements » propres sont exigés. - Pour leurs affaires communes, parmi elles les finances, devrait être responsable, un Sénat, qui est élu parmi ces trois collectivités. - L'État est responsable de la préservation de la sécurité et de l'ordre public (dans ce sens, il est « conservateur »), la représentation démocratiquement élue s’occupe exclusivement des aspects purement politiques, policiers et militaires. À toutes les aspirations centralisatrices sera accordé le fédéralisme regardé comme conforme à l’essence de l’Europe du centre.

Initiatives de discussions
Polzer-Hoditz remet le texte le 23 juillet à son frère Arthur, profite aussi lui-même l'occasion de présenter le concept au premier ministre Ernst von Seidler. Le frère, affaibli dans sa position par des intrigues ne voit actuellement aucune possibilité d'intervention et soumet les protocoles seulement en novembre lors de sa demande de démission. Cela ne parvient pas à initiative politique de l'empereur malgré une prise de connaissance intéressée et positive du contenu. À Berlin R. Steiner porte lui-même la chose à la fin de juillet ou en août, au secrétaire aux Affaires étrangères Richard von Kuhlmann (1873-1948), qui a le concept dans les bagages aux négociations de paix à Brest-Litwosk. Le traité de paix du 03/03/1918 lui-même est, comme brutal diktat de paix, l'exact opposé de cette conception. L'espoir de faire de Brest-Litovsk une tribune publicitaire pour une paix sur la base de la réorganisation sociale et de donner peut-être ainsi aux événements de dernière heure une tournure différente ne s’accomplit pas. 
Steiner conduit encore de nombreux entretiens supplémentaires, entre autres, en janvier 1918, avec plus tard le chandelier d'Empire, le prince Max de Bade, pour lequel il a écrit une préface spécifique de sa série de conférences d’Oslo de 1910 sur les âmes des peuples. Mais aussi ce contact ne conduit à aucun résultat tangible. À Berlin le plus grand « succès » est toujours que les textes, qui, apparemment, auraient longtemps été en circulation au quartier général, sont transmis plus loin par un officier de liaison au fabricant wurtembourgeois Emil Molt - un disciple de Rudolf Steiner.

Collapse – En des conditions d’époque modifiées
Le 3 novembre 1918, les marins de Kiel refusent d'obéir, la révolution éclate. La Guerre mondiale, qui avec son matériel de batailles et le sacrifice insensé de la guerre des tranchées avait préalablement apporté des horreurs sans précédent est terminée. Le 9 Novembre Scheidemann et Liebknecht appellent en parallèle à la République. L'effondrement des monarchies allemande et austro-hongroise laisse, pour de nombreux humains, s'effondrer un monde. Les dures conditions de l'armistice sont vécues par beaucoup comme « ignominie nationale ». Parmi les travailleurs, qui est politiquement divisée en sociaux-démocrates majoritaires, socialistes indépendants (USPD) et Ligue communiste Spartacus, vit l'espoir en une société socialiste sans exploitation, oppression et guerre.


Initiatives à Stuttgart
Steiner se tient à cet instant en Suisse, où il adopte de manière renforcée dans des conférences la thématique sociale « dans des temps modifiés ». Marxisme, concept des conseils, prolétariat, plus-value, etc. sont des thèmes nouveaux, mais aussi des aspects intérieurs de la question sociale comme la relation entre les impulsions sociales et antisociales dans l’humain.

Emil Molt se trouve en Suisse au moment de la Révolution. A Dornach, il entend le 9 novembre une conférence de R. Steiner. Il écrit dessus dans le texte autobiographique « Esquisse de ma biographie » : « Je n'avais jamais pris des exposés de Rudolf Steiner avec une plus grande attention que ce soir-là. Comme s’il avait perçu ma question intérieure : que puis-je faire dans cette situation ? Il dit dans le déroulement de sa conférence a peu prêt ce qui suit : “Et si quelqu'un devait me demander maintenant, ce qu'il devrait faire, je ne pourrais seulement que lui conseiller d'être ouvert et d'écouter ce que les circonstances exigent de lui. C'était pour moi la seule vraie réponse » (p. 161).
Emil Molt (1876-1936), directeur de la fabrique de cigarettes à succès Waldorf-Astoria à Stuttgart, devient alors lui même actif. Il met sa collaboration à disposition du ministère des Affaires économiques du Wurtemberg et a l’autorisation d’installer un bureau personnel au ministère. La tentative de mettre en place une société de fiducie industrielle pour la relance de l'économie de paix échoue malgré tout. À la mi-novembre Molt mène une conversation avec son chef d’atelier Speidel sur les possibilités de formation des enfants des ouvriers. L'idée de la fondation d’une école commence à germer en lui. D’autres anthroposophes de Stuttgart comme Hans Kühn (1889-1977) et l'épistémologue et propriétaire d’une usine de machines Carl Unger (1878-1929) veulent s'engager également dans les questions sociales.


Entretiens de janvier à Dornach

On décide de consulter Rudolf Steiner pour poser des questions de compréhension et discuter des mesures concrètes. Les 25 et 27 janvier 1919 Molt, Kühn et Roman Boos, jadis rédacteur en chef des Nouvelles- Waldorf-Astoria, conduisent de longues conversations avec Steiner, dans lesquelles celui-ci explique ses idées jusque dans des questions particulières de mise en oeuvre – par exemple le système fiscal. Le sténogramme de Roman Boos est paru plus tard, aussi loin qu’il était utilisable, comme impression de manuscrit, sous le titre : « Textes de sciences sociales ». Steiner suggère un « manifeste », un appel, derrière lequel se tient un plus grand groupe d’humains. Dans la situation de bouleversement, il estime qu'il est nécessaire de se tourner vers le grand public avec l’idée de triarticulation. L'idée de création d'écoles libres émerge aussi. Une attention particulière sera accordée à la manière dont une organisation politique efficace peut être créée. Des signatures doivent être recueillies, des conférences organisées, un livre rédigé. Steiner écrit non seulement l'appel, mais commence dans les des semaines suivantes, la mise par écrit de l’ouvrage « Les points germinatifs de la question sociale dans les nécessités de la vie présente et de l'avenir » ( 5 ) dont il expose tout d’abord le contenu dans des conférences en Suisse. Il paraît le 28 avril.


L '«appel au peuple allemand et au monde de la culture »
Le 2 février, Steiner passe le texte final de l'appel « Au peuple allemand et au monde de la culture » à Molt, Kühn et Boos. Un comité allemand des premiers signataires est constitué avec l'auteur du projet de constitution du Würtemberg Wilhelm Blum, Molt et Unger. Au comité autrichien appartiennent Walter Johannes Stein, Polzer-Hoditz et le Conseil d'État Stephan von Licht. La collecte des signatures commence - sous de nombreuses difficultés, parce que les militants de la première heure se sentent en partie dépassés. (Boos s’exprime en ce sens sur l'appel dans une conversation avec le sociologue Max Weber.) En Allemagne, le document porte finalement 320 signatures, dont celle du sculpteur Wilhelm Lehmbruck, les écrivains Hermann Hesse et Jakob Wassermann, le théologien FriederichRittelmeyer et le philosophe Paul Natorp. 
L'appel part du fait de la catastrophe qui devrait conduire à la connaissance de soi. Elle serait arrivée parce que l'Allemagne aspire à une position de force dans des forces fondées extérieurement, mais a délaissé un véritable renouveau social qui lui aurait assuré un rôle constructif dans le monde. Le renouveau social nécessite aujourd'hui une articulation consciente là où les instincts sociaux auraient agi auparavant. L'organisme social doit développer trois membres autonomes, chacun avec leur propre « législation et administration » qui coopèrent vivants : celui de la vie économique, celle de la production spirituelle et celui de l’État de droit. Cette réorganisation devrait aussi conduire à ce que trois délégations distinctes traiteraient avec l’étranger sur les conditions de la paix.

Dépassant les mémorandums, dans l’appel comme aussi dans le livre « Les points fondamentaux/germinatifs », une comparaison de l'organisme social avec l'organisme humain naturel est employée. Cette comparaison ne doit en aucune manière être comprise comme une analogie, mais aiguiser la vue pour des structures sociales rendant la vie possible, qui servent à l’humain en tant que créateur . Steiner s'appuie sur son ouvrage publié en 1917, « Des énigmes de l’âme » dans lequel il a exprimé pour la première fois sa vision mûrie sur des décennies, de la triarticulation de l'organisation physique de l'homme comme fondement et instrument de l'âme humaine.


La campagne commence
Dans la période de février à avril 1919, la campagne est en cours de préparation. Steiner conduit au cours de cette période, entre autres des entretiens avec le socialiste Kurt Eisner assassiné plus tard. Le 5 mars, l’Appel paraît dans les quotidiens et sous forme de tract, le 21 mars le comité allemand des signataires avec Molt, Unger et von Blume rentre dans la vie publique avec une manifestation  dans le jardin de ville de Stuttgart. Blume exprime à cette occasion qu’il n'est pas anthroposophe et n'a jamais vu Rudolf Steiner (qui à cette époque reste en Suisse) mais s’explique solidaire de toute son expérience avec les concepts de la triarticulation.


Aggravation de la situation extérieure - Fondation de l’Union pour la triarticulation (NDT1)
L'Allemagne devient à cette époque de plus en plus ébranlée par des mouvements révolutionnaires. Le 1er avril éclate l’ainsi nommée grève de la Ruhr, à la mi-avril 300.000 mineurs sont en grève. Le 7 avril, la République soviétique de Munich a été proclamée, le 16 avril est fondée une armée rouge. En Wurtemberg le mouvement est moins radical, mais là aussi aura lieu du 31/3. au 6/4.une grève générale, le gouvernement se retranche temporairement dans la tour de la gare. 
Le 20 avril 1919, Steiner arrive à Stuttgart. Lors d'une réunion avec les activistes, il s'exprime sur la question de savoir si on devrait plutôt interpeller le prolétariat ou la bourgeoisie, que si on intéressait vraiment la bourgeoisie cela devrait déjà adjoindre le prolétariat. Mais cela ne l'empêche pas en dernier recours d’agir comme orateur particulièrement parmi les travailleurs.

Le 22 avril a lieu dans la salle du jardin de la ville, une conférence pour les signataires de l'appel, une « Alliance pour la triarticulation de l'organisme social » est fondée, au  Comité de travail de laquelle font partie v. Blume, Kühn, Emil Leinhas Molt, Unger, Max Benzinger et Theodor Binder.


23 avril : Conférence-Waldorf-Astoria - Début du mouvement populaire
Le 23 avril Steiner tient un discours inspirant devant les travailleurs de l’usine Waldorf-Astoria ( 6 ), où il appelle, entre autres, à une éducation gratuite pour tous et à surmonter les privilèges de classe dans les questions d'enseignement. Dans le cadre de cette présentation est prise la décision pour la fondation de l’ « Ecole Waldorf » comme école unitaire élémentaire et supérieure. Emil Molt demande à R. Steiner de prendre en main la création et la gestion de l'école, qui est tout d’abord destinée aux enfants des travailleurs.

Le mouvement se développe maintenant, saisissant de larges couches de la population comme le laissent apparaître les réactions de la presse quotidienne d’alors. Le mouvement se concentre notamment sur l’espace sud-ouest de l'Allemagne, mais gagne sur d'autres secteurs. Une liste de septembre 1919 indique 74 groupes locaux du Mouvement pour la triarticulation. R. Steiner parle dans de grands rassemblements ouvriers, dans de grandes entreprises de Stuttgart, ainsi chez Daimler, à Cannstatt, Feuerbach, Untertürkheim, Ludwigsburg, Waiblingen, plus tard à Reutlingen, Tübingen, Ulm, Heidenheim, Maulbronn, Mannheim et Schwenningen. Sa rhétorique géniale emporte l’auditeur. Des collaborateurs comme Hans Kühn aident à porter l'impulsion parmi les travailleurs où il rencontre une grande résonnance surtout parmi les partisans de l’USPD.

 
Le mouvement des conseils d’entreprise

La question de la mise en place des conseils d’entreprise a joué un grand rôle parmi les travailleurs à cette époque. Les « triarticuleurs » participèrent activement à la tentative de création de tels conseils d’entreprises. Mais ils ne comprenaient ceux-ci ni dans le sens d’une démocratie sociale majoritaire comme organes d'équilibre entre « capital » et « travail » dont la traîtresse opposition était en cela présupposée et acceptée, ni comme des organes révolutionnaires de la « lutte contre la bourgeoisie ». Bien plus, ils virent en eux des organes de l’autogestion et collaboration d’entreprises ou supra-entreprises, dans lesquelles les travailleurs et le management - doivent travailler ensemble - sur le terrain de l'égalité des droits, tout en préservant les zones de responsabilité et d'expertise. Dans ce sens, Rudolf Steiner est entré en réunions avec les comités de travailleurs à Stuttgart (le premier a eu lieu le 8 mai). Le travailleur Siegfried Dorfner (USPD) parle lors d'une réunion le 16 de l'idée que, sur la base de la triarticulation, une entente entre le prolétariat et la bourgeoisie est possible et s’exclame : Comme libres et égaux, laissez nous être frères ! Dans un tract est formulé avec aplomb : « Choisissez les conseils d’entreprise dans le sens de la triarticulation, et vous faites l’Histoire. »


Conseil culturel 
Dans le même temps on essaya, aussi pour ne pas laisser se faire un développement unilatéral, d’interpréter et ancrer aussi le concept de conseil dans la vie culturelle comme concept d’autogestion. Le 31 mai 1919, un appel pour la création d'un Conseil culturel qui était signé par de nombreux artistes et intellectuels, parmi lesquels le poète Thomas Mann a été publié : « Les travailleurs libres de l’esprit » doivent s'unir pour prendre eux-mêmes en main l’ordre des conditions culturelles. Sera revendiquée l’école unitaire libre sans contrôle de l'État et l'abolition du système d’habilitation d’État, y compris les examens d'État dans les universités. Ces efforts pour une vie culturelle autonome ont moins bien réussi que les activités relevant des travailleurs : l'engagement s’épuisa diversement dans la fourniture des signatures. Lors de discussions sur l’opportunité, comme le 15 juin, lors d'une réunion avec des professeurs d'université de Tübingen, les sceptiques prirent la parole qui craignaient que la rivalité collégiale déjà élevée s’accroisse démesurément, si un ministre de la culture ne parle plus de son autorité.


Résistance croissante

Dans l'ensemble, la situation politique pendant la première moitié de 1919 a changé de plus en plus au détriment des forces à tendance progressistes. En avril, les Corps francs avaient commencé à écraser la République soviétique de Munich. Les forces réactionnaires qui avaient temporairement baissé la tête et avaient attendu de meilleures conditions reniflèrent la chance de restaurer l'ordre ancien. De ce côté-ci, mais aussi du Parti et des fonctionnaires syndicaux sociaux-démocrates majoritaires (NDT Ceux qu’avait quittés les fondateurs du NSPD), le mouvement pour la triarticulation a été diabolisé comme radical. Les fonctionnaires craignaient pour leur position et leur influence parmi les ouvriers. Les révolutionnaires, par contre regardaient d’un mauvais oeil, et combattaient la triarticulation comme une tentative de produire une « paix sociale » illusoire. Ainsi, l’Union pour la triarticulation a dû faire face à des attaques croissantes. En outre, de nombreux collaborateurs du mouvement ont été dépassés, maints misaient moins sur les propres forces, qu’orientaient des attentes illusoires sur des partis auxquels ils voulaient simplement « soumettre » la triarticulation. Les propositions de R. Steiner ont été partiellement incomprises comme des programmes de l’ordre de la recette. La campagne n'a pas été appuyée, mais observée plutôt en sceptiques et indifférents par de grandes parties des anthroposophes. Tous ces facteurs conduisirent à une activité déclinante aussi chez de nombreux engagés auparavant. Ainsi, une réunion du Comité de travail eut lieu le 14 juin devant une salle pratiquement vide. L’hebdomadaire « Triarticulation de l’organisme social », dont le premier numéro paru en juillet – le rédacteur en chef était Ernst Uehli – ne put inverser cette tendance. 
Cependant, les efforts de formation de conseils d’entreprise furent poursuivis – ainsi paraîtra le 29 juillet un numéro spécial de la revue pour la triarticulation avec 50.000 exemplaires  sur cette question - mais sans succès éclatant

Dans l'ensemble, au plus tard en septembre est clair que la percée espérée ne réussira pas. Les conditions se sont consolidées, la Constitution d’Empire de Weimar est en vigueur, et de nombreuses questions où, auparavant des façonnements semblaient encore possibles ne sont plus ouvertes. 
Il était donc naturel de se concentrer davantage sur des « institutions modèles » dont on pouvait espérer qu’elles œuvreraient par l’exemple sur les conditions en termes de transformation à plus long terme, et de commencer un chemin de changements à petits pas. (Lors d'une soirée d'étude le 3 mars 1920 Steiner parle clairement d'un « changement de cap ».)

La brochure Moltke
Auparavant déjà, un coup dur pour le mouvement fut l’empêchement de la parution d'une brochure avec les mémoires du général von Moltke lié à Steiner. Cette publication de documents d’arrière-plan sur la question de la culpabilité de guerre devrait être une tentative pour influencer encore les négociations de Versailles dans un sens positif. Un parent de Moltke obtint une copie fraîche par Emil Molt encore avant la livraison, ce qui conduisit à ce que de la part de la parenté fut imposée - pour des inexactitudes présumées - la mise au pilon des 50.000 exemplaires imprimés de la brochure.

La fondation de l'École Waldorf
Le 7 septembre 1919 dans la salle du jardin de la ville de Stuttgart a lieu l'inauguration festive de la première école Waldorf. Une loi libérale sur l'enseignement de 1836 a offert des conditions relativement favorables pour les négociations commencées en mai avec le Ministère de la Culture, de sorte que les compromis nécessaires étaient acceptables. L’activité scolaire a eu lieu dans le bâtiment du restaurant Uhlandshöhe que Molt avaient acquis en privé pour 450.000.- Mark. Très vite, pensée à l'origine pour les enfants des travailleurs Waldorf-Astoria, l'école fut ouverte pour d’autres enfants, elle grandit vite à 420 élèves. Rudolf Steiner avait préparé le cercle d’enseignant à sa tâche en août dans une sorte de « cours intensif » ( 7 ). En accueillant les participants de ce cours le 20 août, il avait exprimé que la fondation de l'école Waldorf devait être un fait de culture, qui œuvre reformant et révolutionnant le système scolaire. Dans ses structures sociales, l’école repose sur le principe de l'autogestion de ceux qui y sont actifs - et reste, en cela, aussi loin qu’on se tient à ce principe, un « avant-poste » de rénovation sociale au-delà de son rôle pédagogique immédiat.


« Le jour qui vient », Société par Actions

En octobre on en vint à une réunion des anthroposophes économiquement actifs à Dornach. R. Steiner a appelé à porter le travail du Goetheanum par des entreprises économiques (« Principes directeurs d'une entreprise servant de fondement »). En ce sens, le 13 mars 1920 fut donc fondée « Der Kommende Tag (Le jour qui vient) – société par actions pour la promotion de valeurs économiques et spirituelles ». En Suisse, se créa Futurum AG en parallèle. Le capital social au printemps de 1920 était de 10 millions de marks, en juin 25 millions, finalement 136 millions (un nombre qui est à relativiser en raison de l'inflation). Le jour qui vient était un groupement d'entreprises économiques avec de semblables de la vie culturelle, où il était pensé en cela que ces sociétés devraient se porter mutuellement, des institutions de recherche adjointes, on espérait en fin de compte à nouveau des produits innovants commercialisables.

« Faisaient partie en tout du jour qui vient jusqu'à la fin de 1922, les sociétés suivantes :
Centrale, Stuttgart, Champignystrasse 17
Le jour qui vient Editions SA  Stuttgart
Le jour qui vient SA, Département expédition librairie
Le jour qui vient SA, département impression
Le jour qui vient SA, Département impression Offset
Le jour qui vient SA Carl Unger fabrique de machines, Hedelfingen
Le jour qui vient SA, usines chimiques, Schwäbisch Gmünd
Le jour qui vient SA, usine d'ardoise Sondelfingen
Le jour qui vient SA, Département Jose del Monte, 
Usines de carton, Stuttgart, avec des succursales à Zuffenhausen et Weildorf 
Pension Rüthling, Stuttgart
Le jour qui vient SA, filiale de Hambourg
Moulin Guldes Dischingen, ferme, moulin à farine et scierie
Hofgut (ferme) Ölhaus, O / A Crailsheim. Hofgüter Unterhueb et rire, O / A Leutkirch 
Hofgüter Dorenwald et Lanzberg à Isny 
Institut clinique et thérapeutique « Le jour qui vient»,
Institut clinique et thérapeutique « Le jour qui vient », fabrication, Schwäbisch-Gmünd
Le jour qui vient SA, Institut de recherche scientifique, Stuttgart. 
Le jour qui vient SA, Institut de recherche scientifique, département biologique, Stuttgart »( 8 )
En dehors de cela il y avait aussi quelques participations.
Le jour qui vient SA a vite connu des difficultés où à la fois des problèmes de direction, que le contexte économique difficile, ont joué un rôle. Lorsque Emil Leinhas le 22/09/1921 prend la direction, la situation est déjà passablement sans issue. En mars 1922, un « programme de secours » doit être envisagé. Les actions Waldorf-Astoria sont vendues (et acquises par Reemtsma via un homme de paille). Molt sera dédommagé financièrement, surmonte le coup, mais jamais vraiment. Finalement, l'entreprise doit être liquidée. Grâce à de grands sacrifices, la plupart des institutions culturelles qui appartiennent aux Jour qui vient, comme  l'école et l'Institut clinique thérapeutique, arrivent à être maintenus. Malgré cet échec, n’est pas seulement à retenir que Le jour qui vient fut un premier essai pour aller pratiquement de l'avant dans le sens de la coopération associative dans l’économie, mais sans lui par exemple aussi, la pharmacie d’orientation anthroposophique serait impensable.


L'action de Haute-Silésie
En novembre 1920, l'anthroposophe Moritz Bartsch de Wroclaw demande à Steiner, comment il se situerait à la pensée d'une grande initiative de triarticulation en Haute-Silésie. Dans le Traité de Versailles, un référendum sur l’appartenance nationale de la Haute-Silésie avait été décidé. Comme toujours, le résultat de ce qui allait devenir serait   l'oppression d'une minorité et dans chaque cas agir de manière non guérissante. (Le vote de détermination dur 20 mars 1921 a conduit à la partition de la Haute-Silésie. Bien que 60% aient voté pour rester en Allemagne, la plus grande partie fut rattachée à la Pologne.) Rudolf Steiner voit dans l'action la chance qu’a ce qu’un point de conflit sur lequel sont les yeux du  publique mondial, de contribuer à une forme sociale qui permet que deux cultures se développent côte à côte librement. Un appel paraît, un cours aux orateurs est mené et une campagne commencée. Cette tentative d'empêcher un vote insensé se heurte à une résistance massive surtout de milieux de droite, qui y voient une trahison à la patrie. Dans «L’observateur populaire", paru jadis un article de la plume d'Adolf Hitler, dans lequel la triarticulation est diffamée comme un stratagème juif pour détruire la constitution spirituelle normale des peuples. Le 15 mai 1922, Rudolf Steiner échappe de justesse à une tentative d'assassinat de la part de cercles radicaux de droite lors d'une conférence à Munich.


La fin

Lors d’un grand Congrès à la Pentecôte 1922 à Vienne, l’ainsi nommé Congrès orient-occident, Rudolf Steiner se prononce à nouveau face au grand public pour la pensée de triarticulation, mais il doit reconnaître que le mouvement a échoué pour l’instant. Le 29 août 1922, le sujet est traité pour la dernière fois lors d'une conférence à Oxford, après qu’ait encore eu lieu - du 24 juillet au 6 août 1922 - un cours spécial sur les questions de renouvellement de l’économie. En lui sont tirées des conclusions de l'émergence d'une économie mondiale. Rudolf Steiner concentre désormais pleinement sa force de travail sur le renouvellement de domaines de culture particuliers (arts, pédagogie, religion, médecine, agriculture). Après que dans la nuit de la Saint-Sylvestre 1922/23 le premier Goetheanum est détruit par un incendie criminel, Steiner donne à la Société anthroposophique à travers sa nouvelle constitution au Congrès de Noël 1923, une forme sociale qui est également orientée pour une communauté moderne, vivant entièrement à partir du libre jeu de l'initiative et de l’écho social.


Développement supplémentaire jusqu’à ce jour

Le développement social global prit dans les années suivantes une direction fatale : en 1933 put s’établir en Allemagne, le plein opposé d'une constitution de société libre : un régime totalitaire inhumain qui foula la démocratie aux pieds et força la vie culturelle complètement sous l'emprise de sa politique. D'autre part, depuis 1917 dans des circonstances différentes, un système monolithique similaire se mit en place sous la forme du stalinisme. 
Après la mort de Rudolf Steiner (30/03/1925), des conflits internes ont tout d’abord empêché un développement significatif de l'impulsion sociale anthroposophique. Puis vinrent la barbarie et de l'oppression nationale-socialiste et la répression de l'anthroposophie qui lui est associée en Europe centrale. Après la Seconde Guerre mondiale, le conflit est-ouest a souvent bloqué la recherche de refonte sociale. Au sein du mouvement anthroposophique, après la guerre, la reconstruction des institutions se tint au premier plan, moins le travail en grand. Seul le mouvement de 68 apporta un regain d'intérêt pour la « triarticulation ». Le bouleversement européen de 1989, une nouvelle constellation historique de la franchise, laissa à nouveau revivre de telles impulsions, les forces qui auraient pu apporter un véritable renouveau se sont cependant avérées trop faibles. 
L’approche de la triarticulation ne compte pas comme un matérialisme dialectique historique, ou l'approche systémique de l'économie de marché avec des mécanismes sociaux et automatisés, mais se place tout à fait sur des actions pertinentes libres d’humains. Que les opportunités que les constellations historiques offrent soient saisies, ne dépends que de la connaissance, des capacités, sentiments et impulsions volontaires d'humains. 
Tout de même, après 1989, un certain renouveau du mouvement pour la triarticulation est à noter, bien qu'encore de modeste façon. À cela appartient entre autres la formation de l'initiative « Réseau triarticulation », la construction d'un travail continu d'éducation dans le domaine social et des efforts accrus de coopération en termes d'économie associative. 
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Signification actuelle

Si aussi le mouvement pour la triarticulation de 1917-1922 échoua finalement, la tentative pratique pèse en fin de compte - comme « histoire non devenue » - plus que des programmes et des considérations littéraires. De l'expérience de l'ancien mouvement peut encore être énormément appris - de son équilibre entre l’utopie et le pragmatisme technocratique, - de la tentative à la fois de faire appel aux masses comme du contact sans peur avec « l'establishment » - du sens pour les constellations historiques et du flair chaque fois pour l’essentiel - de la diversité des types de travail et la capacité de le modifier le cas échéant conformément à la situation - de l'essai de relations publiques efficaces - de la non-partisanerie des approches d’organisation de l’Union pour la triarticulation – de l’expérience de lier les questions les plus profondes de l'humanité (Anthroposophie) avec les tâches pratiques immédiates – mais en particulier les caps tenus malgré tout, de progresser dans les trois grands domaines de la vie sociale et créer de réalités (Conseils d’entreprise, Jour qui vient, Conseil culturel, école Waldorf, etc.) 
L'approche de travail de la « triarticulation de l’organisme social » est la tentative de répondre aux questions soulevées par le point de rupture de la maturité de l'individu pour le développement social. Aussi loin que cette méthode de travail est pertinente pour toute une époque historique. Cela ne veut pas dire que la « triarticulation » est considérée comme un ensemble de réponses toutes prêtes. Bien plus, elle doit être saisie comme une description des conditions, en vertu desquelles les relations sociales sont consciemment pénétrables et humainement façonnables. Il s'agit d'un modèle vivant d'où toujours - correspondant aux exigences respectives de temps spécifiques - des orientations de travail et des conceptions pratiques peuvent être développées. 
Pour l'approche d'un tel renouvellement social, restent actuelles les phrases suivantes que Rudolf Steiner écrivait de son temps dans « Les questions fondamentales » :

 « [03/38] Toute personne douée d'un sens pour ce qui est réalisable pratiquement ne tiendra pas pour une utopie ce qui est exposé ici. Car l'attention est précisément dirigée sur des dispositions qui peuvent en tous lieux se développer en partant des conditions actuelles. Il suffira de prendre la décision de renoncer peu à peu à ce que l'administration de la vie spirituelle et de l'économie se fasse au sein de l'État politique ; et de ne pas faire opposition lorsque ce qui doit advenir arrive vraiment : que des institutions d'enseignement privées se créent et que la vie économique se place sur ses propres fondements. Il ne sera pas nécessaire de supprimer d'un jour à l'autre les écoles publiques et les institutions économiques de l'État ; par de prudents débuts, on verra se dessiner la possibilité d'une réduction progressive de l'enseignement public et de l'économie régie par l'État.
Avant tout, il serait nécessaire que les personnes qui ont pu reconnaître l'exactitude des idées de triarticulation « pour prendre soin de leur diffusion. Que de telles idées rencontrent de la compréhension, il en résultera de la confiance pour une transformation salutaire possible des conditions actuelles, en de nouvelles qui n'auront pas leurs défauts... »
La confiance grandit quand peut être montré « comment les institutions nouvelles peuvent être rattachées d'une manière pratique à ce qui existe déjà [...] Désespérer parce qu'on ne peut croire que chez un nombre suffisant d'hommes, même dans le désordre actuel, il puisse se trouver de la compréhension pour de telles idées lorsque l'énergie indispensable est mise au service de leur diffusion, cela voudrait dire que l'on désespère de la réceptivité des hommes pour des impulsions vers ce qui est sain et judicieux. A cette question de savoir si l'on doit désespérer ne devrait même pas être posée, mais seulement cette autre: que doit-on faire pour donner à l'enseignement d'idées inspirant la confiance le plus d'impact possible? » ( 9 )

( 1 ) L'article est basé en grande partie sur la littérature spécifiée à la fin (voir tout en bas) pour en savoir plus. Il a d'abord été publié dans le Bulletin triarticulation de l'organisme social, cahier 3/1998. Pour la  publication Internet, il a été revu et rédigé plus bref.
( 2 ) Sur la vie et l'œuvre de Rudolf Steiner, nous nous référons à l'ouvrage classique de l'historien Christoph Lindenberg: Rudolf Steiner – Une biographie.2 volumes, 1997 Stuttgart
( 3 ) Introduction à Helmuth von Moltke "Pensées et des souvenirs" / 1919, dans Essais pour la triarticulation de l'organisme social, et sur la situation à l’époque GA 24, Dornach, 1961, p 382
( 4 ) - Mi 1917, il note que ce n'était plus à assister, à ordre, contre-ordre, désordre. Chacun cherche le tout dans son petit ressort. "Pour la pensée - pas de temps! D'idées - pas une trace! Avec la guerre,avec la victoire est compté comme avec des chiffres. Pour se donner du courage, on demande aux militaires. Ils rêvent toujours: gagner - gagner - gagner »!(De:. Rudolf Steiner au cours de la Guerre mondiale, édité par R. Boos, Dornach 1933, pages 57 et suivantes)
( 5 ) Dans l'Internet, vous pouvez trouver le texte en allemand à h tt p :/ / www .anthroposophy.com/Steinerwerke/Steiner-GA023- 01.html. En annexe est également à lire l'appel. En français : ?????
( 6 ) Voir extrait en annexe (ci-dessous).
( 7 ) 21. août au 5 septembre.
( 8 ) Hans Kühn: Le temps de la triarticulation. Rudolf Steiner lutte pour l’ordre social de l'avenir, éd. de la Section des sciences sociales au Goetheanum, Dornach, 1978, p 11
( 9 ) Les éléments clés de la question sociale dans les nécessités de la vie présente et future.GA 23, Dornach 1976, pages 119 et suivantes

(NDT1) Bund für Dreigliederung, généralement traduit comme je le fais. Mais il est à noter aussi que « Bund » sert aussi à désigner une fédération ce qui n’est pas sans importance pour la compréhension de la triarticulation dans un pays comme la France où le « jacobinisme » règne toujours jusque dans les esprits.

Annexe : Du  discours de R. Steiner aux ouvriers de l’usine Waldorf-Astoria le 23 Avril 1919
  Dans les domaines matériels, dans les domaines économiques extérieurs les humains se partagent désormais en deux classes : la classe des bourgeois, qui est fusionnée avec la noblesse, et la classe des prolétaires. Le prolétaire sait aujourd'hui, parce qu'il est devenu conscience de sa classe, ce qu'il a à exiger. Il est prolétaire. Il n'avait pas le choix. Il a été jeté dans le prolétariat par le processus économique. [...] 
La chose est donc ainsi que cette vie spirituelle des Temps modernes est apparue simultanément avec le développement de la technique moderne, avec le développement du capitalisme désertifiant l’âme. Là une vie spirituelle nouvelle est aussi apparue, mais une vie de l’esprit telle qu’elle est seulement une vie de l’esprit de classe. [...] Et nous sommes confrontés aujourd’hui à la nécessité de ne pas cultiver plus longtemps ces acquis de la bourgeoisie, mais de nous décider pour un savoir libre, ce qui ne peut se développer que si les préjugés sont surmontés [...] Nous devons apprendre à voir que la vie spirituelle doit être émancipée, qu'elle devrait être placée sur elle-même afin qu'elle ne soit plus un serviteur de l'ordre étatique et économique, mais un serviteur de ce qui peut rapporter la conscience humaine en général à la vie spirituelle ; afin que la vie spirituelle ne soit pas là pour une classe, mais pareillement pour tous les humains.

Très honorés présents, vous travaillez aujourd'hui à partir du matin, autant que votre travail suffit, à l'usine. Vous sortez de l'usine et vous passez au plus devant les installations de formation, qui sont construites pour certains humains. Dans ces établissements d'enseignement sont fabriqués, ceux qui jusqu’à présent étaient la classe dirigeante qui a conduit le gouvernement et ainsi de suite. Je vous le demande, la main sur le cœur, avez-vous une idée de ce qui est fait là-dedans ? Savez-vous ce qui se passe là-dedans ? Vous ne savez rien. Là se montre immédiatement le divorce apparent des classes. Là est l'abîme. Ce qui est recherché sur l’Appel est que tout ce qui est fait sur le sol spirituel concerne tous, et que les travailleurs spirituels soient responsables de l'humanité tout entière. Cela vous ne pouvez pas l'atteindre si vous ne libérez pas la vie spirituelle et la placez sur elle-même ».

Après la conférence, quelques-uns des ouvriers sont venus à Herbert Hahn, qui leur donnait des cours, et ont dit quelque chose comme : « Les cours que nous recevons sont justes, et nous en sommes reconnaissants. Mais nous sommes un peu vieux. Nos enfants ne pourraient-ils pas dès les premières années être instruits de cette façon, que nous avons maintenant appris à connaître ? Ne serait-il pas possible de créer une école comme celle de laquelle nous avons entendu hier ? » Et ainsi, la question d'une nouvelle école fut apportée à Rudolf Steiner. 
Tiré de: Christoph Lindenberg: Apprendre libéré de la peur - agir conscient de soi. Pratique méconnue d’un modèle d’école. Reinbek 1975, pp 170 et suiv


Pour aller plus loin (en allemand)
Christoph Lindenberg: Le lieu historique des initiatives de triarticulation de Steiner Rudolf. Une étude historique des années 1916-1921. "Die Drei », n ° 9, Septembre 1985, pp 641 et suiv
Albert Schmelzer: Le mouvement pour la triarticulation de l’année 1919. L’engagement de Rudolf Steiner pour l'impulsion d'autogestionnaire. Stuttgart 1991
Hans Kühn: Le temps de la triarticulation. La lutte de Rudolf Steiner pour l’ordre social de l'avenir. Dornach 1978

Révision du texte allemand : 10/01/01