1905 - L'année de Rudolf Steiner

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1904 < ....... 1905 ........ > 1906

Replacer dans son contexte

L'année 1905 a commencé par une importante tournée de conférences. Le 9 janvier, Rudolf Steiner a donné une conférence pour des universitaires/académiciens à Munich, qui avait été organisée par quelques étudiants. Le travail dans ces cercles à l'époque était similaire à celui d'un paysan qui voulait rendre fertile un sol sucé par des décennies ou devenu fatigué par une surcharge permanente avec une fausse rotation des cultures. Il ne pouvait pas être compté avec de bonnes et saines récoltes dans l'immédiat. Les uns ont été pris en compte par les fraternités étudiantes existantes, d'autres par des nécessités d'examen, beaucoup aussi par une imitation de Dostoïevski resignant de fatigue, mécomprise, et d'autres encore par des symptômes caractéristiques du temps et divisés en d’innombrables groupes particuliers. L'idée globale de l'Universitas était devenue un fantôme pour beaucoup, la spécialisation unilatérale dans des domaines spécialisés avait pris sa revanche sur l'humain. Faust avait quitté l'université où l'étude de la philosophie, du droit, de la médecine et de la théologie ne pouvait lui donner la véritable image de l'homme. Tout d'abord, il était nécessaire d'éveiller la conscience de la façon dont une vision unifiée du monde peut ramener les facultés mutuellement aliénées à une synthèse supérieure. Rudolf Steiner donna donc des conférences sur les tâches des facultés à la lumière d'une nouvelle vision du monde en mai - juin 1905, le 11 mai sur "Théosophie et faculté de théologie", le 18 mai dans le même esprit sur la "Faculté de droit", le 25 mai sur "Faculté de médecine" et 8. Juin la "Faculté de Philosophie". Bien des années passèrent avant qu'il ne puisse réaliser l'unité souhaitée de la science, de l'art et de la connaissance du monde spirituel à l'université du "Goetheanum", qu'il avait fondée lui-même et qui était à l'époque la base de ses cours.

Dans les premiers mois de 1905, il a parlé simultanément sur les sujets les plus divers que nous allons non seulement résumer chronologiquement dans la suite, mais – aussi parce que certains sujets ont été répétés dans d'autres villes - en un semestre ou en quelques mois dans leur regroupement afin d'être en mesure de mieux suivre les étapes du développement individuel. De janvier à mai, par exemple, il a parlé à plusieurs reprises de l'œuvre de Richard Wagner pour l’élaboration des traditions mythologiques duquel il avait un profond intérêt. C'est ainsi qu'une conférence du 13 janvier 1905 introduisit dans le contexte spirituel des personnages de Siegfried et Lohengrin, les 28 mars, 5 et 12 mai dans l'histoire mythique des Nibelungs et le 19 mai dans le sens ésotérique de la transformation du Parsival.
Les secrets des mystères abordés dans les œuvres de Richard Wagner ont été présentés par Rudolf Steiner dans de telles conférences à partir de sa connaissance unique [en son genre [71] de l'évolution spirituelle et éclairés dans leurs contextes historiques plus larges*. Il a rappelé l'atmosphère de rétrospective et de prospective qui régnait dans les vieux mystères nordiques. Car là, la connaissance du passé était gardée par le plan de développement spirituel de l'humanité et son déroulement dans les quatre périodes atlantique et post-atlantique. Ces quatre étapes du développement de la conscience se reflètent dans la tradition nordique et donc aussi dans le travail de Richard Wagner. "Ce n'est pas pour rien que Wagner a formé la tétralogie," dit Rudolf Steiner. Il a illustré l'atmosphère du "crépuscule des dieux" qui se dégageait de la connaissance de la disparition des anciens mondes des dieux, et l'"atmosphère de préparation" qui naissait de l'aperçu prophétique de l'événement du Christ dans ces temps-là. Ce tournant spirituel et historique décisif du monde trouve également sa résonance rythmique dans la structure de l'œuvre de Wagner :
"C’est quelque chose de significatif qu'après que Richard Wagner ait incarné les temps primitifs des peuples germaniques dans les quatre étapes de l'Anneau des Nibelungs, il ait créé un drame éminemment chrétien, l'œuvre par laquelle il a conclu sa vie : Parsival".
Dans l'"Anneau des Nibelungen", règne encore l’écho du monde nordique des dieux, qui avait conduit les humains dans les premiers temps, prévaut toujours. La figure de dieu de Wotan a donné aux héros terrestres, comme Siegfried, l'initiation pour assurer l’évolution prévue des tribus/troncs nordiques. Tandis que dans les mystères du sud, les rois prêtres, dont par ex. Laocoon était l'un des derniers représentants, combattaient à leur manière avec le serpent, symbole de la sagesse et de l'intelligence terrestres, au nord, les dieux, les initiés et les héros luttaient avec les représentants de la montée de la raison analytique seulement terrestre, seul l'esprit terrestre. Wotan et ses élèves, les représentants de l'ancienne initiation atlantique, se battent avec Alberich, "le porteur de l'égoïsme". Le symbole de la sagesse endurcie de la raison analytique est pour cette époque l'or que les dynasties de nains gardent. Quand l'inspiration immédiate des mondes des dieux se perd peu à peu, les derniers chevaliers de la terre témoignent encore de l'esprit des sphères suprasensibles, Lohengrin apparaît comme messager du Graal, le roi Arthur et ses chevaliers préparent le chemin pour la victoire du Christianisme.

Rudolf Steiner a ensuite expliqué comment les mythes et les légendes sont nés des récits des anciens initiés, qui voulaient transmettre et préserver les vérités spirituelles cachées en eux. Dans un temps ultérieur, le regard devait maintenant être dirigé depuis les temples extérieurs et les anciens lieux de consécration vers le temple du corps humain, dans lequel la Déité œuvre créatrice. Ainsi la naissance de la conscience-je en l’intérieur de l'être humain a été systématiquement préparée, ce qui donna son empreinte à une nouvelle époque d’évolution. Nous pouvons évoqué tout cela ici en seulement quelques traits pour montrer comment Rudolf Steiner a pris le monde mythique de l'œuvre de Richard Wagner, comme point de départ afin de révéler des vues/coups d’œil plus profonds dans l'histoire de l’esprit de l'humanité.
* En dehors des écrits de Rudolf Steiner, voir aussi : Ernst Uehli : „Die Geburt der Individualität aus dem Mythos als künstlerisches Erlebnis Richard Wagners" (La naissance de l‘individualité du mythe comme expérience/vécu artistique de Richarde Wagner).
[72]
En même temps, dans quelques conférences, étaient faits les pas préparatoires pour une nouvelle introduction des auditeurs dans la thématique christologique  : "L'Apocalypse de Jean" (16 janvier et 19 mars), "La Genèse" (17 mars), "Sur le concept de Dieu" (19 janvier), "L'essence du christianisme" (23 janvier), "La signification de la messe dans le sens de la mystique" (17 mars), le "Sermon sur la montagne" (19 juin) et "Sur l’Évangile de Jean" (26 juin). Il s'agissait encore de conférences isolées qui constituaient le premier prélude à ces cycles des évangiles complets que Rudolf Steiner donna ensuite à partir de 1907 et qui appliquèrent la recherche spirituelle dans sa plénitude à la substance religieuse.
En janvier 1905, il a de nouveau parlé des deux héros de la vie allemande de l’esprit dans plusieurs séries de conférences à la Maison des architectes de Berlin, à partir du 26 janvier sur "L’évangile de Goethe" et "La Révélation secrète de Goethe" ; à partir du 21 janvier sur "Schiller et notre époque", cette dernière à l'occasion du centième anniversaire de la mort de Schiller. Ces conférences ont ensuite été publiées sous forme de livre à l'occasion du centième anniversaire de la mort de Goethe. Malheureusement, la plupart des conférences de cette époque n'ont que des transcriptions très insuffisantes, mais elles donnent un certain aperçu de l'essence de ses pensées. La dernière conférence s'est terminée avec la parole de Goethe, qui est très actuelle pour ce travail :
"Seul se gagne la liberté et la vie, celui qui doit la conquérir quotidiennement."

Au cours de ces mois, des questions cosmologiques ont aussi été traitées : "Les relations de la terre aux planètes", "L’évolution planétaire", "L'origine de la terre", "L'origine de l'humain", tout comme des thèmes d’histoire de l’esprit : "L'avenir de l'humain et des grands initiés".
Dans cette dernière conférence, comme dans les conférences du 16 janvier et du 19 mars sur l'"Apocalypse", on a entendu un motif que Rudolf Steiner a traité plus en détail dans les années suivantes et sous les aspects les plus divers. C'est le fait que tant dans les mystères de l'Antiquité que dans les centres spirituels du Moyen Âge et des temps postérieurs, les initiés et les personnalités dirigeantes avaient non seulement pour tâche d'enseigner l'origine du monde, les lois spirituelles de l'évolution cosmique et la structure spirituelle et le développement de l'individualité humaine, c'est-à-dire de donner une image du passé et du présent, mais surtout de transmettre à ceux qui doivent être formés une vision claire et une connaissance spirituelle pour le plan de l’évolution future. C'est ainsi que Rudolf Steiner disait dans sa conférence du 16 janvier 1905 : "Les événements du futur ont été présentés dans les mystères", et : "Les initiés doivent/devraient travailler dans le sens que les humains sont préparés au futur". Cela est possible de deux façons : premièrement par la connaissance exacte de l'évolution jusqu’à présent, de ses lois et de ses rythmes, mais aussi par des changements systématiques de la nature corporelle et des niveaux de conscience se poursuivant de l'être humain, c'est-à-dire ce que Goethe a appelé plus tard "métamorphose et amélioration (Steigerung)". Quiconque a pu se faire une idée claire des métamorphoses d'un être vivant à ce jour peut également prévoir les étapes ultérieures de son développement à partir de ses légités/lois de nature. Tout comme, par exemple, de manière ontogénétique, la plante se déploie à partir du germe, le papillon à partir de la nymphe, de même, de manière phylogénétique, l’évolution spirituelle et corporelle de l'espèce humaine se déroule selon certains rythmes et lois. Qui, comme le matérialisme actuel, cherche seulement la nature de corps reste plus ou moins un statisticien des événements du passé et du présent. Mais ceux qui incluent la structure spirituelle, ses organes et ses métamorphoses dans la recherche voient disposés en eux des horizons supplémentaires d’évolution en arrière et en avant. Il arrive du domaine des effets au domaine des causes, du devenu au devenir, il atteint la sphère d'où proviennent d’origine le sens et le plan de l'évolution. Présenter cette planification était l'une des tâches les plus essentielles de ces anciens mystères et des centres d'initiation ultérieurs. Là, par exemple, on a enseigné comment l'évolution globale et ses phases individuelles se déroulent habituellement dans une structure de temps articulée en sept membres. Mais si l’articulation d'une certaine époque de développement en quelque sept périodes de temps est connue et que l'humanité se trouve quelque peu à un certain point dans le temps dans la quatrième phase de ce développement, alors non seulement dans les quatre phases déjà achevées, les lois de nature/la légité du devenir est clairement à lire, mais aussi un aperçu total des tâches et des objectifs des trois phases suivantes est donné. Ici en plus de cela, la seconde voie vint à l'aide des initiés dans le domaine de la planification spirituelle, car l'essence de ces personnalités consistait donc tout de suite dans ce que chez eux les organes de l’esprit avaient fait maints pas d’évolution au-delà de la moyenne de l'humanité dans son ensemble, qu'ils pouvaient à cause de cela survoler ces prochaines étapes et en même temps, par ces organes de l’esprit, entrer en relation avec ces mondes et êtres suprasensibles qui agissent comme intermédiaires, préparent et guident la planification de la totalité.

Tout d’abord, la loi de l'époque à venir n'était chaque fois connue que de peu dans les mystères précoces, et ses influences dans le sens de cette planification peuvent être connues moins par des documents externes que par l'étude plus intime de l'histoire de l’esprit. Et pourtant, cette influence était souvent plus essentielle que ce qui a été transmis de données et luttes extérieures historiques. Après que ces époques soient passées, où les rois prêtres de la préhistoire obtenaient leurs savoirs dans les lieux des mystères et, pour la plupart, unissaient encore la dignité spirituelle extérieure, royale et intérieure en une seule personne, il était encore possible dans les siècles suivants, à des centaines de personnalités initiées travaillant en silence [74] d’œuvrer dans un cercle d'élèves, ou ici et là aussi comme conseillers des princes et dirigeants séculiers d’État. Jusqu'à ce que finalement vint cette époque, où les deux courants de direction spirituelle et séculière se séparèrent de plus en plus. Mais aussi en ce temps-là, le savoir du canal (Duktus) spirituel du cours du monde rayonnait des centres spirituels dans l'environnement. Ce qu'ils ont ainsi disposé de la sorte par le conseil et l'acte n'apparut sur le plan extérieur de l'histoire du monde jusqu'aux époques postérieures. C'est pourquoi Rudolf Steiner a aussi dit : "Chaque contenu d'initiation sera révélé plus tard." Mais dès que le germe eut porté ses fruits, les initiés de chaque époque reçurent le germe de la suivante, qui était maintenant à réaliser. Ces germes ont été implantés dans le contexte de conscience de l'humanité comme un sol d’évolution de la sorte qu'ils ont été adaptés à la réceptivité de chaque époque. C'est pourquoi les anciens initiés indiens ou nordiques parlaient un langage spirituel différent de celui du Jean apocalyptique, et les chefs spirituels du Moyen Âge devaient à leur tour faire appel à des forces de conscience différentes de la science actuelle de l’esprit. Rudolf Steiner a tout de suite expliqué très en détail à l'essence des anciennes traditions indiennes ou germaniques nordiques supérieures et aussi au contenu d’esprit de l'Apocalypse comment ces contenus, s'ils sont reconnus dans leur substance spirituelle, représentent non seulement le présent de cette époque, mais dans chaque cas aussi de larges perspectives des phases des développements futurs, et contiennent de nombreux secrets qui peuvent être révélés par la science de l’esprit. Nous y reviendrons les cycles de conférences des années suivantes à la main. Dans ces conférences d'introduction des années 1904/05, il voulait d'abord faire comprendre que l'une des tâches les plus essentielles de la direction spirituelle depuis des temps immémoriaux et de la science spirituelle actuelle est de donner aux humains aussi bien un aperçu de l'histoire de l’esprit du passé, mais avant tout des lois spirituelles du développement futur.

Celui qui regarde les phénomènes du temps de l'extérieur peut découvrir peu ou rien du germe, qui commence son développement en notre époque selon plan et loi d’airain, dans l'environnement quotidien, mais oui, il pourrait d'abord reconnaître tout de suite les contre-forces qui, à chaque époque, se jettent avec force et puissance contre l'esprit du futur. Mais à la fin, les lois spirituelles ont toujours été plus fortes que la puissance terrestre. On peut détruire, forcer et inhiber les choses corporelles terrestres, mais pas l'esprit et sa marche en avant planifiée à large vue. Les puissances adverses peuvent toujours à nouveau essayer de combattre la connaissance du plan spirituel du monde, de limiter temporairement sa diffusion, etc. Mais l'histoire de l’esprit a toujours eu un souffle plus grand et une portée plus large que les régnants et détenteurs de pouvoir terrestre. Les initiés des mystères grecs et de tous les temps ont regardé plus loin dans l'avenir que ces dirigeants limités dans le temps, et l'évolution future ne deviendra pas comme ils le voulaient, mais comme ils la connaissent. Ce sont des lois importantes [75] pour chaque mouvement spirituel et Rudolf Steiner les a exprimées en toute clarté dès le début.
En ces mois, il a aussi parlé à plusieurs reprises sur "La mythologie nordique dans son sens ésotérique". Le degré de vérité spirituelle de la mythologie des peuples et des continents a reçu une interprétation détaillée dans les nombreuses conférences et œuvres de Rudolf Steiner dans les années à venir. Ce furent les premières étapes du développement pour explorer dans quelle mesure les gens pouvaient déjà s'ouvrir à une compréhension pleine de réalité du langage spirituel caché dans la mythologie. Cette graine a atteint sa pleine maturité dans le cycle "La mission des âmes individuelles des peuples" tenu en Scandinavie en 1910. Il est extraordinairement instructif de voir comment Rudolf Steiner a méthodiquement formé ses élèves et ses auditeurs au fil des ans à accepter ces vérités avec compréhension.

En avril 1905, des conférences parallèles à d'autres jours de la semaine traitaient de "La vie entre la mort et la renaissance", "Réincarnation et karma", "Yoga et l'Unio Mystica", plusieurs fois aussi "La quatrième dimension". En mai-juin a suivi une intéressante série de conférences "Sur le Temple perdu et retrouvé", dans laquelle, ont été données entre autres, des présentations sur les grandes allégories, l'ordre du Temple, le symbole de la croix, des considérations qui ont conduit à une conférence de Pentecôte "Sur la parole à gagner de nouveau".

Dans ces conférences, Rudolf Steiner est parti tout d'abord du fait historique, essentiel pour la naissance de la science de l’esprit d'aujourd'hui, que l'humanité est arrivée à un tournant décisif dans le temps, où la transmission du savoir spirituel, qui n'était autrefois gardée que par quelques personnes dans le cercle le plus proche, doit maintenant être rendue accessible à tout être humain. Dans l'Antiquité indienne, persane, babylonienne-égyptienne et, dans une certaine mesure, dans l'époque culturelle gréco-romaine, la vie sociale était principalement façonnée par les rois prêtres qui recevaient leur éducation et leur sagesse des temples initiés de ces périodes. Ainsi l'état et la culture ont été construits ainsi que seulement peu étaient sachant, mais le peuple ne sachant pas conduit d’après des lois et des directives spirituelles lui étant étrangères. Depuis lors, l'individualité humaine a atteint ce niveau de conscience où chaque être humain doit avoir accès à la compréhension des lois spirituelles du devenir. Rudolf Steiner a donc dit dans cette conférence sur cette différence essentielle entre le passé et le présent : "L'ancienne culture sacerdotale est surmontée par une culture où chaque individu doit se hisser au savoir". Il a caractérisé alors les premières approches historiques de la transformation de l'ancienne sagesse ésotérique reçue des mystères en la sagesse plus rationnelle issue de la culture gréco-latine, dans les figures d'Odysseus, Laocoon [76], Énée et la tradition des sept rois fondateurs de Rome. Ici, donc, la vieille sagesse de l’effet du chiffre 7 dans l’édifice cosmique a été inséré dans la structure extérieure d'une époque et d'un système d’état émergent. Cependant, ces tendances tombèrent plus tard en décadence dans le monde extérieur, puisque les dirigeants romains ultérieurs forçaient l'initiation aux mystères, mais n'effectuaient pas l'entraînement intérieur et la purification nécessaires. C'est pourquoi l'ancienne sagesse a dû être gardée pendant des siècles dans les centres ésotériques et rayonnée dans chaque nouvelle époque et niveau de conscience. C'est ainsi que les cercles de chevaliers autour du roi Arthur, des Templiers, des courants plus ésotériques du Graal, des Rose-Croix et des représentants les plus nobles de la mystique médiévale ont vu le jour. Aussi par exemple dans des personnalités comme Brunetto Latini et Dante une partie du savoir de l’édifice cosmique-spirituel du monde continue à vivre. Par la légende du temple, par les traditions du symbole de la croix comme "arbre de vie" et par des œuvres comme la "Legenda Aurea", une partie de ce savoir ancien originel a été transmise, mais maintenant revêtue d'images que les personnes formées spirituellement doivent apprendre à déchiffrer.

Le contenu de base tissé dans ces traditions sous de multiples formes était l'image du cosmos, du monde en tant que temple puissant, œuvre du Créateur, dans la construction duquel l'humain doit s'intégrer consciemment, pour ainsi dire, se construire. C'était la prise de conscience qu’à l'humain, le plus parfait est le corps physique, qui lui a été donné par le Créateur dans une construction infiniment sage, tandis que les autres membres essentiels de l'être humain, qui l'élèvent hors de la nature et le font d'abord "himain", âme et esprit, sont encore disposés à des stades très imparfaits de développement en lui, dont il est maintenant responsable de l'éducation supplémentaire. Ainsi l'humain doit construire son âme individuelle et son je, sa structure spirituelle, de sa propre force dans le temple plus parfait du corps physique et du cosmos, comme œuvre propre, mais aussi par là transformer, promouvoir et conduire à de nouvelles étapes de développement la nature qui règne en lui et autour de lui. Ceci n'est possible que quand l'humain n'est plus seulement guidé inconsciemment par la sagesse et l'inspiration sacerdotales, comme aux époques précédentes, mais qu’est confié à chaque individu la sagesse cosmique, le sens et le plan du devenir ; pour appliquer ce savoir d'abord en connaissant et pensant, puis en se formant et se transformant lui-même de l'intérieur. "Ce que tu penses aujourd'hui, tu l’es demain." L'influence saisissant profondément de la pensée, de la formation spirituelle consciente sur la transformation de la totalité, jusque dans la structure corporelle, est l’essentiel. En cela l'esprit encore imparfait et individuel de l'humain peut apprendre de la sagesse plus parfaite de la construction miracle de la corporéité de l'humain et de la nature. L'esprit individuel doit maintenant créer en lui-même, de par sa propre force, l'ordre qui a déjà été créé dans le corporel et le naturel par la Déité.

[77] Ceux qui connaissent ces éléments primordiaux de la meilleure tradition spirituelle comprendront encore mieux pourquoi, dans les instructions de formation spirituelle que Rudolf Steiner a ensuite données dans les années suivantes dans son ouvrage "Wie erlangt man Erkenntnisse der höheren Welten" (Comment acquérir des connaissances des mondes supérieurs), ces vertus fondamentales apparemment simples deviennent le point de départ du développement spirituel, comme le contrôle des pensées, la paix et la sûreté intérieure, la sérénité envers le désir et la souffrance, la patience, le respect, l'objectivité et la rythmisation et l’ordonnance consciente de la vie de l’âme, des pensées, des sentiments et des actes. Rudolf Steiner exprime ainsi la signification d'une telle autoformation, telle que présentée dans les chapitres de ce livre sur la préparation, l'illumination et l'initiation :
"Lorsqu'un humain traverse sa formation en rapport aux sentiments, aux pensées et aux humeurs, comme a été décrit dans les chapitres sur la préparation, l'illumination et l'initiation, il apporte dans son âme et son esprit une articulation similaire à celle que la nature a apportée dans son corps physique. Avant cet entraînement, l'âme et l'esprit sont des masses non structurées.... L'homme arrive à une telle régularité et donc à une connaissance supérieure lorsqu'il met de l'ordre dans ses sentiments, ses pensées et ses humeurs de la même manière que la nature a mis de l'ordre dans ses accomplissements corporels....
Et à partir des sentiments et des pensées qui apparaissent ainsi, les organes spirituels, les organes clairvoyants se construisent comme les yeux et les oreilles du corps physique se construisent par les forces naturelles à partir du corps physique....

Si vous essayez de faire un pas en avant dans la connaissance des vérités spirituelles, faites en même temps trois pas en avant dans le perfectionnement de votre caractère pour le bien".
La sagesse divine a ordonné l'esprit et la nature de l'univers, l'homme doit construire lui-même la sagesse d'ordre dans son âme individuelle et spirituelle selon ce modèle, afin d'être à nouveau capable d'y construire tout son être dans le sens et le plan de l’évolution du monde. Ce contact et cette harmonie avec le monde spirituel suprasensible, chaque être humain à notre époque peut seulement être établi par sa propre force.

Il y a un aperçu profond de la carrière de Rudolf Steiner et du mouvement spirituel qu'il a inauguré, si l'on découvre comment, dans les premières années après le tournant du siècle, il a d'abord préparé les humains en rattachement à la tradition spirituelle, aux images et légendes les plus sublimes de la préhistoire, à l'ésotérisme de la mythologie, au temple de la légende, le symbole de la croix, la legenda aurea, etc, à comprendre le sens et le but de ce qu'il a ensuite présenté pas à pas dans les années qui ont suivi, à partir de la science spirituelle du XXe siècle, comme de nouvelles impulsions dans ses œuvres fondamentales et les a développées au cours d’une décennie de conférences et d’activités de formation. Avec la formation progressive des auditeurs, il a bien sûr été en mesure de s'appuyer sur des forces de conscience et d'intuition bien différentes plus tard qu'au cours de ces premières années de développement. Mais de telles conférences de cette première période, comme celles "Sur la Parole à gagner de nouveau", donnaient des tons fondamentaux et des thèmes de base pour la symphonie de connaissances spirituelles [78], qu'il pouvait ensuite transmettre à l'humanité jusqu'à la fin de sa vie comme œuvre mature.
Dans l'esprit de la proclamation johannique de la puissance créatrice de la parole, Rudolf Steiner voyait maintenant une de ses tâches les plus importantes dans cette vie sur terre comme l'exploration spirituelle et la culture des forces de la langue de l'humain. Dans les forces du langage, il voyait quelque chose du plus sacré qui est donné à l'humain par la divinité, et il appelait ses disciples à la conscience des tâches futures de ces forces transformant l'être humain tout entier en constante amélioration. Nous verrons aussi comment les connaissances, les conférences et les indications d’exercice des trois années suivantes du mouvement ont été condensées pour former une nouvelle méthodologie dans l'art de la "formation de la parole", qui a ensuite été cultivée de manière plus intensive dans la Section des arts de la parole et de la musique de l'Université de Dornach et a déjà attiré un cercle d'étudiants répartis dans plusieurs pays du monde. Ce développement planifié des forces de la langue à partir des lois spirituelles a été rendu possible grâce à la coopération avec Mme Marie Steiner, qui aida à inaugurer une nouvelle époque de la culture linguistique par sa formation artistique et son talent pédagogique unique.

L'été 1905 amène deux voyages à l'étranger, en Angleterre et en Suisse. Du 8 au 10 juillet 1905, le Congrès de la Fédération des Sections européennes a eu lieu à Londres, où Rudolf Steiner a parlé des "Fondements occultes dans l'œuvre de Goethe". On voir comment, dans ce milieu sinon orienté sur des thèmes complètement différents, il a collé avec une cohérence et une fidélité inébranlables aux orientations spirituelles qu'il avait lui-même choisies. Si, dans les décennies à venir, des milliers d’humains sur tous les continents ont découvert en Goethe plus que le vénérable dramaturge d'antan, mais l'initiateur d'impulsions inépuisables pour une vision organique du monde, le révélateur de lois naturelles secrètes et la formation spirituelle de la vie, cela est dû dans une large mesure à l'œuvre de Rudolf Steiner. Car qui a parlé à l’époque, en dehors des contextes littéraires et esthétiques comme Londres ou Paris et ailleurs, de Goethe en tant que naturaliste, en tant qu'un humain qui avait remis à la postérité une clé des sphères occultes et suprasensibles du cosmos ? C'est Rudolf Steiner qui, en 1905, également à Londres, a fait connaître l'esprit de Goethe comme omniprésent dans toute recherche correcte de l'avenir. En Allemagne, comme nous l'avons vu et le verrons, il a servi l'œuvre de Goethe toute sa vie. Il a proclamé son essence dans presque tous les pays européens. C'est aussi grâce à ce travail qu'en 1937, à l'occasion de l'Exposition universelle de Paris, le Goetheanum, qu'il avait fondé, laissait naitre des scènes du "Faust" de Goethe en langue allemande dans la salle bondée du plus grand théâtre de Paris. C'est son œuvre, systématiquement poursuivie par Mme Marie Steiner, que le "Goetheanum" de Dornach en 1938, pour la première fois dans l'histoire, a donné l'exécution intégrale [79] du "Faust" I. et II. Les visiteurs venaient du monde entier. Ces faits prouvent que Rudolf Steiner a élevé l'œuvre de Goethe sur toute la terre à une puissance qui a pénétré la conscience ; qu'il n'aspirait pas seulement à cela, mais qu'il l'a aussi réalisé.
Après son retour de Londres, le mois d'août est à nouveau consacré à une période d'isolement et de travail d’écrivain, jusqu'à ce qu'en septembre, le voyage de conférences en Suisse reprenne le rythme du travail au loin. En septembre et novembre, il a pris la parole à Saint-Gall, Zurich et Bâle. Nous avions déjà mentionné que depuis 1904, ces séjours en Suisse se répétaient et augmentaient chaque année. À Saint-Gall, il a parlé le 7 septembre sur les "Tâches contemporaines" et ensuite du point de vue cosmologique "Sur notre système planétaire" ; à Zurich, la conférence publique du 9 septembre résonna "Surmonter le matérialisme selon de nouveaux points de vue" et deux mois plus tard "Haeckel, les énigmes du monde et la théosophie" ; à Bâle, lieu des plus importants cycles sur les évangiles dans les prochaines années, sur "Les enseignements de sagesse du Christianisme".

Après son séjour en Suisse en septembre, après une courte visite dans plusieurs villes du sud de l'Allemagne, à nouveau à la branche de Berlin ,il a repris ses cours réguliers d'introduction aux connaissances élémentaires de la science de l’esprit. S'ensuivit un cycle de 31 conférences qui introduisit le public dans les rythmes du développement cosmologique-historique, tels qu'il les avait étudiés jusque-là. D'un point de vue nouveau, les phases des étapes planétaires du développement, le "rythme de 7" dans la formation des "sphères", des "plans" et des "états/contextes", des races racines et des époques historiques ont été présentés. La connaissance de la structure des êtres, des êtres élémentaires dans la nature, des êtres au-dessous et au-dessus de l'humain, des bodhisattvas, des hiérarchies spirituelles, a été étendue et approfondie, et la connaissance des forces suprasensibles renforcée. Ici aussi, nous trouvons la doctrine des quatre sortes d’éther, les "forces éthériques formatrices", qui devinrent plus tard d'une importance décisive pour la recherche de la nature en science de l’esprit, jusqu'aux domaines d'application pratique de la biologie et de l'agriculture. Et cette richesse de connaissances nouvelles a culminé, dans le sens d'une véritable anthroposophie, dans une représentation de la structure corporelle, d’âme et spirituelle de l'être humain. Il expliqua l’œuvre concrète de la destinée et de la liberté dans l'humain, aussi que le je supérieur, qui fait de lui le membre inférieur du monde spirituel hiérarchiquement structuré ; enfin, l’œuvre de la divinité, le Logos, dans cet univers rempli d'êtres spirituellement actifs. Qui, comme Rudolf Steiner, maîtrisait si bien les connaissances scientifiques de son époque, pouvait s'attendre à ce que même ce qu'il avait étudié spirituellement sur la base d'une méthode de connaissance clairement présentée [80] soit reçu avec une volonté tout d'abord aussi ouverte d’élaboration pensante. Alors, chacun pourrait et devrait le vérifier pour voir s'il ne pourrait pas expliquer les phénomènes déjà connus mieux que les hypothèses matérialistes du siècle dernier. Ou bien l'élève pourrait suivre sa demande répétée de suivre lui-même la voie clairement indiquée de la recherche spirituelle. Ces 31 présentations y ont largement contribué.

En octobre-novembre 1905, Rudolf Steiner évoqua à nouveau dans son journal les problèmes sociaux qui avaient déjà été éclairés pour la première fois dans leurs nouveaux aspects en 1903 et 1905 par les conférences du 26 octobre à la Maison des architectes sur "La question sociale" et du 4 novembre, plus historiquement-spirituellement, sur "Le socialisme de l'Ouest et de l'Est". Ici ont été évoquées des questions qui alors après 1916, dans la troisième septaine année de vie du mouvement, ont atteint une maturité féconde en de nouvelles impulsions pour le façonnement de l'organisme social.
Conformément aux principes qu'il a toujours observés, ces questions, qui touchent aux problèmes sociaux futurs, ont d'abord été étayées par une description des phases de développement passées. Il s'agit d'une série de conférences organisées du 31 octobre à fin décembre à la Freie Hochschule en collaboration avec la Humboldt-Hochschule, qui a présenté le développement "De la germanité à la citoyenneté urbaine" conformément aux intérêts particuliers de la ville.

Entre-temps, l'assemblée générale annuelle de la section allemande de T. G. (Société théosophique) a eu lieu le 22 octobre. Nous en sommes informés par le premier bulletin d'information de la Société publié en novembre 1905, qui a ensuite été rédigé de manière excellente par Mlle M. Scholl pendant de nombreuses années. À ses débuts, la Section comptait 377 membres et 18 sections dans diverses villes. Rudolf Steiner a ouvert son allocution à la rencontre par ces mots : "Le mouvement a trouvé une large et intense diffusion en Allemagne et en Suisse". Il a ensuite donné un aperçu des nombreuses tournées de conférences et de la formation connexe de nouvelles branches. Sur Congrès qui a eu lieu à Londres en juillet 1905, il dit : "Ce que signifie le Mouvement a été montré à nouveau lors du Congrès de la Fédération des Sections européennes. On peut s'opposer à de tels congrès à sa guise, mais les choses parfaites ne sont pas tombées du ciel, mais il s’agit ici des intentions. Nous devons nos poser l'idéal de ce qui doit être amélioré, mieux fait, coopérer et non critiquer." Il a appelé aux membres à la conscience que chacun qui travaillent selon la science de l’esprit devient une "source de force" qui peut être bénéfique aux autres humains, et a rappelé aux présents de toujours réfléchir à ce qu'ils seraient membres d'une communauté spirituelle. Mais tout ce qui est repris de nouvelles pensées n'a de sens que si elles ne restent pas un enseignement ou une théorie, mais [81] "s'intègrent constamment dans la vie immédiate". Après une discussion sur les différentes applications et les autres possibilités de travail positif, il a été décidé de publier une "feuille d’informations" pour les membres et d'intégrer les quelques bibliothèques appartenant à des personnes privées à la branche locale de la section.

Au semestre d'hiver 1905/06 suivant, Rudolf Steiner présenta une introduction à l'"Évangile de Jean" lors des réunions des membres le lundi soir de chaque semaine. Maintes de ces soirées ont été en l'absence du Dr Steiner maintenant aussi transféré à l'étude des membres en un travail indépendant.
Pendant le temps de Noël, il a parlé publiquement de "Noël" le 14 décembre à la Maison des architectes, et la veille de Noël, le 24 décembre, dans une "Considération de Noël" aux membres. Tandis que la Conférence de Pentecôte de cette année, comme mentionnée plus haut, avait présenté "La Parole a gagner de nouveau" comme une tâche ésotérique pour l'humain du futur, ce discours de Noël était maintenant consacré au mystère de la naissance du porteur du Logos sur terre.
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