Université libre de science de l'esprit

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Johannes Kiersch - L’ÉSOTÉRISME INDIVIDUALISÉ DE RUDOLF STEINER AUTREFOIS ET MAINTENANT
À propos du développement de l'Université libre pour la science de l’esprit   retour au sommaire

9. Conclusions


9.1 Ce qui était pensé au début

Dès 1906, Rudolf Steiner a commencé à rompre avec le principe de direction hiérarchique des traditions ésotériques, qu'il a dû suivre pendant quelques années. Il souligne avec prudence que la mystique rosicrucienne moderne qu'il représente, contrairement aux anciennes méthodes, construit sur la responsabilité personnelle de l'étudiant. Cette intention est devenue plus évidente avec la « tentative » de 1911 et avec l'idée du « culte cosmique » de 1922 et a pris avec la fondation de l’Université libre de science de l'esprit au cours de 1924 une forme sociale déterminante jusqu’à aujourd’hui. Comment cette école ésotérique libérale, la première du genre dans l'histoire du monde, aurait été conçue en détail si Steiner avait pu achever son projet, ne se laisse pas déduire des sources disponibles à ce jour. Cependant, les premières mesures prises en 1924 montrent des impulsions de conception claires.

 

 Le 15 février 1924, Steiner commence avec les heures d’enseignement de la première classe de la nouvelle université. Il permet immédiatement à Lili Kolisko, qui accueille avec enthousiasme son projet, de lire régulièrement les transcriptions des heures aux professeurs de l'école Waldorf de Stuttgart. À l'automne, il accepte la proposition de rendre ces lectures accessibles à d’autres membres de l'université. La participation d'importants anthroposophes à Stuttgart et de nombreux invités de l'étranger à ces heures ont fondé la tradition de la lecture, qui a été généralement acceptée quelques années après la mort de Steiner. Steiner a probablement anticipé cela. Mais il n'a permis la lecture à personne d'autre que Lili Kolisko. Pourquoi seulement à elle ? Parce qu'elle a été la première à lui demander ? Parce qu'il lui a reconnu - comme en témoignent de nombreux auditeurs - une compétence particulière pour la présentation digne des textes ? Il a peut-être considéré qu'il y aura toujours de nouveau des humains capables d'élever la pure répétition d'un texte fixé une fois pour toutes, au niveau d'un événement spirituel authentique. En tout cas, avec la permission à Lili Kolisko[225], il a inauguré une tradition dont la continuation est un besoin profond pour beaucoup d’humains, une tradition qui en même temps donne aux nouveaux membres de l'université l'occasion de se remettre par la parole prononcée dans l'atmosphère de l'atelier de menuiserie de Dornach, dans lequel les conférences de classe ont eu lieu à côté des ruines du premier bâtiment du Goetheanum, et dans la situation fondatrice de 1924. Il va sans/s’en dire que l'effet désiré dépend du talent particulier du lecteur et que la lecture à haute voix peut devenir une routine vide - Marie Steiner parle dans une lettre tardive 612 de l’« automatisme de la pure lecture » - se comprend de soi-même. Cette déclaration n'a pas pour but de dévaloriser la pratique de la lecture. Aujourd'hui encore, il y a des gens qui peuvent être conduits d'une manière authentique par la formulation de Rudolf Steiner jusqu'à l'endroit spirituel d'où parlait une première fois le maître spirituel.

 

Cependant, sans coordination avec les comités créés au cours de la fondation de la Société anthroposophique, Steiner a encore initié un autre courant de tradition. Comme décrit en détail dans la présente étude, il a repris l'image de l'université introduite lors de la Conférence de Noël 1923/24 comme le « cœur » dans le courant sanguin du mouvement anthroposophique, comme un organe d'harmonisation entre la périphérie et le centre, et a chargé des amis éprouvés pour l'expansion de la nouvelle institution à l'extérieur de Dornach de transmettre le bien mantrique d’enseignement de l'école à leur endroit particulier pour là, au cercle particulier d’humains qui s'y sont rassemblées, leur rendre accessibles de manière individuelle sans qu’il leur ai rendu accessibles les relevés de notes des heures. Comme il a lui-même reformulé à plusieurs reprises ses exposés sur les contenus spirituels et les a façonnés à partir d'expériences spirituelles authentiques, ils devaient produire à partir de leur propre intuition sur la base de leurs propres efforts de méditation et de la perception actuelle des circonstances locales ce qui était nécessaire pour comprendre et transmettre dignement le précieux matériel d'enseignement. Le premier à être mandaté/commissionné fut Henry Monges des États-Unis d'Amérique du Nord, qui travaillait le plus loin.

 

612 TVA à Helga Geelmuyden, B. 11. 1947. archives Nachl.

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Avec ces nominations, Steiner reprend l'idée du « culte cosmique » de la conférence du 31 décembre 1922 et des déclarations ultérieures sur la construction anthroposophique de communauté de 1923 et jette les graines pour un avenir social qui ne sera pas donné d'en haut, mais dont les fruits s'élèvent comme un « sacrifice » de la sphère terrestre vers le spirituel. Dans l'esprit de cette idée, l'essai fondamental du 6 avril 1924 dans le Nachrichtenblatt  (NDT : feuille de nouvelle) promeut le travail de l'université « à partir des besoins de nos membres, à partir d'en bas », et quelques jours plus tard, le 10 avril, Adolf Arenson est appelé, conformément à ce principe directeur, à travailler aux côtés à côté des lectures de Lili Kolisko à Stuttgart à la construction d’un groupe de travail avec des buts entièrement propres. D'autres mandats suivront au cours de l'été. Le fait que Steiner ait adhéré à cette stratégie aussi pendant sa maladie jusqu’à la fin, fait qu'on ne peut pas supposer que les premières contrats de médiation devaient être considérées comme une solution provisoire dépassée, est démontré par la nomination de Willem Zeylman pour les Pays-Bas, qui n'a eu lieu qu'au début de 1925, peu de semaines avant la mort de Steiner. Comme Hans-Broder von Laue a été le premier à le remarquer, la référence répétée aux « écoles ésotériques » de la 18e classe ne se réfère pas à d'autres courants spirituels, mais à des institutions conçues individuellement à la « périphérie » de l'Ecole de Science de l'Esprit elle-même. Sous une forme porteuse d’avenir, l'impulsion de Steiner à cet égard a émergé de nouveau à partir de 1933 dans le destin dramatique du plus proche collègue dans le développement de l'université, chez Ita Wegman.

 

La deuxième tradition ésotérique de Steiner, qui a été largement cachée jusqu'à présent, a été redécouverte ces dernières années. Elle est apparue temporairement, en particulier à la Conférence Michael de 1986 à Dornach, sans aucune connaissance détaillée des événements sous-jacents de 1924. Elle était principalement animée par les travaux de Jörgen Smit (1916-1991) et Heinz Zimmermann (1937-2011).

 

9.2 Formation des façades

La mort de Steiner a plongé l'université nouvellement fondée dans une situation de conflit tragique. Les membres du monde entier espéraient et s'attendaient à ce que le Comité fondateur nommé par lui poursuive le travail qu'il avait commencé, même sans un nouveau directeur autorisé par lui. Ainsi, la déclaration provisoire du conseil d'administration [227] du 3 mai 1925 sur l'état d'avancement des travaux a été accueillie avec reconnaissance. Personne à l'extérieur n'a remarqué que cette déclaration programmatique était basée sur un compromis qui n'était pas très ferme, qui ne faisait que déguiser les tâches à accomplir au lieu de les traiter dans une discussion prudente. Cela renforçait l'idée répandue que même sans la participation terrestre du grand enseignant, le conseil d'administration et donc la gestion de l'université était « ésotérique » comme d’elle-même. L'image rassurante d'un « comité ésotérique » fiable et durable, combinée aux revendications d'une sorte de procuration de succession apostolique, pour ainsi dire, a développé une vie propre problématique bien au-delà de la Seconde Guerre mondiale. Mais « ésotérique », comme Steiner l'a toujours de nouveau souligné, un travail social peut l'être seulement s'il émerge de l'unanimité, de « l'harmonie des sentiments », dont il fait si souvent l'admonestation. Cette harmonie n'a pas été atteinte après la mort du maître spirituel. Il n'est pas acceptable de mettre de côté ce fait tragique comme une perturbation marginale qui n'a pas affecté la continuation du flux des mystères. Elle est une occasion de réflexion et nécessite un traitement conjoint et prudent.

 

Un problème connexe existe en ce qui concerne les relevés de notes des conférences ésotériques d’enseignement de l'université. Ils ont été publiés dans leur intégralité depuis un certain temps et depuis 1992, avec le consentement exprès de la direction de l'université, et mis en vente par l'intermédiaire des libraires. Dans la pratique du travail universitaire, cependant, est souvent fait comme si cela ne se serait pas produit. L'étude autonome des textes de classe et la discussion à leur sujet, qui est ouverte à toute personne intéressée, même si elle n'est pas liée par l'appartenance à l'université, sont considérées comme irrégulières ou même moralement répréhensibles.

L'adhésion aux représentations directrices et habitudes linguistiques susmentionnées et similaires, par exemple le titre officiel inapproprié de « lecteur », qui contredit clairement les intentions centrales de Rudolf Steiner, pour les superviseurs de classe travaillant avec la direction de Dornach,613 conduit à des formations de façade derrière lesquelles les intentions libérales originales de Steiner restent cachées pour la perception publique de l'université, mais aussi pour l'auto-compréhension de la qualité de membre.

 613 Pour des raisons plus précises, voir chapitre 5, p.112 f., note 262.
[228]

9.3 A la recherche du courant des mystères se poursuivant

Je ne peux pas effacer la douleur désespérée avec laquelle Ingo Hellmers, le célèbre médecin et grand anthroposophe, s'est prononcé contre la publication prochaine des textes de classe lors d'une réunion universitaire à Dornach. Pour lui, cet acte scandaleux de mépris des graves mises en garde du maître spirituel contre la profanation des contenus sacrés signifiait la ruine de l'ésotérisme universitaire anthroposophique. Que nous reste-t-il lorsque les heures de classe ne sont plus protégées ? C'était une question effrayante pas seulement pour lui à l'époque. C'est encore le cas aujourd'hui pour la communauté mondiale des membres de l’université.

 Ita Wegman, la « codirectrice » de l'université et combattante enthousiaste pour la poursuite du courant des mystères a connu aussi une expérience tout aussi douloureuse après la mort de l'enseignant spirituel. « Toutes les formes anciennes, y compris la toute dernière forme pour l'anthroposophie », écrivait-elle à Maria Röschl en février 1935, lorsque la première grande division du mouvement anthroposophique est apparue, « sont fondamentalement cassées ». Nous avons des raisons de ne pas refouler de telles expériences et de tels sentiments. La publication des textes de classe, parmi d'autres événements problématiques, ne nous a-t-elle pas mis dans une situation aussi désespérée ? » Wegman ne se résigne pas. L'expérience existentielle limite dans laquelle elle se trouve la conduit à une pensée audacieuse au cours d'une maladie qui met sa vie en danger. « Il me vient ainsi maintenant », continue-t-elle à Röschl, « comme si l'on n'avait plus besoin de chercher une forme pour la vie de l'anthroposophie, mais que chaque humain est lui-même la forme avec laquelle l'anthroposophie veut s'unir. Là où cela s'est produit, les humains se trouveront et s'uniront pour devenir un membre de la véritable société-esprit ». Avec le mot « association-esprit », qui lui est familière des mantras de Steiner, elle décrit à plusieurs reprises dans des lettres et des conversations intimes, ce qui la conduit finalement, peu de temps avant sa mort, à l'idée d'une future « résurrection » de l'université.

Comment se laissent reprendre aujourd'hui les mouvements de recherche interrogatifs d'Ita Wegman sur ses dernières années ? Le simple fait d'adhérer aux formes traditionnelles de médiation ne suffira pas. Il n'est pas acceptable de traiter la triste réalité de la publication et de la diffusion des textes de classe qui en résulte - un processus précédé par des considérations prudentes et plausibles[229] - dans la pratique de l'enseignement supérieur comme un événement séparé de la vie et seulement historiquement remarquable, en d'autres termes, de l'ignorer de manière pragmatique afin de ne pas perturber des habitudes qui sont devenues chères.

Ce qu’Ita Wegman recherchait ne se laisse pas non plus trouver dans les discussions théoriques sur des questions de contenu ou de méthode. De telles discussions, même si elles n'ont lieu que dans les médias anthroposophiques ou lors d'événements internes, deviennent immédiatement publiques. À l'ère du World Wide Web, il n'y a plus de secrets dans la vie publique. Ce qui a pris forme quelque part dans la parole ou l'écriture devient accessible partout. Il sera également inévitable que les énoncés ésotériques de Steiner seront interprétés philologiquement et sinon aussi élaborés scientifiquement. Au vu de cette situation, pourrait-on se demander s'il est possible de sauver l'ésotérisme vivant d'Ahriman et de ses aides/complices ?

 Il est utile de se rendre compte qu'un phénomène peu remarqué se produit partout dans la vie : l'émergence et la décomposition des espaces ésotériques. De tels espaces ne s'ouvrent souvent que brièvement, souvent aussi pour un temps plus long parmi des humains à n'importe quel endroit : par des coïncidences heureuses, une remarque pleine d’esprit, par la perception (NDT : Gewahrwerden) inattendue de ce que Steiner appelait « l'harmonie des sentiments ». Même notre ordre de droit/juridique traditionnel connaît le phénomène et le protège : par le secret médical, le secret de la correspondance, le secret de la confession. Même le secret bancaire, s'il n'est pas mésusé, peut devenir ésotériquement efficace. Cela sécurise un espace intime de discussion, qui devient productif par le fait que les décisions y sont prises non pas « sur la base de prescriptions ou de routines, mais à partir de l'évaluation libre des impondérables en fonction de la situation, qui se soustraient à toute définition. Ce qui est discuté ou vécu dans un tel espace ne prétend pas être permanent. Cela peut mener à des décisions qui deviennent fructueuses dans la vie. Mais ce qui se passe dans l'espace ésotérique lui-même entre les gens passe de nouveau. Comme l'énigmatique « tentative » de Steiner de 1911, cela suit les « principes du devenir ».

 Historiquement, il se trouve une culture consciente des espaces ésotériques sous une forme exemplaire chez Platon, qui, dans sa septième lettre, décrit avec beaucoup de sérieux pourquoi il résiste à fixer par écrit ses conversations doctrinales avancées entre étudiants: non pas pour le secret, mais parce que la vérité mouvante, vivante et constamment renouvelée de ce qui est discuté serait falsifiée par écrit.614 Pour la revivification de l'ésotérisme anthroposophique, les remarques de Steiner dans les conférences sur le Karma de l'été 1924 sur les origines de l'art de l'imprimerie et le rappel de l’avertissement de l'esprit du temps : « La chose la plus importante de bouche à oreille ! » 614/615

Les premiers « intermédiaires » mandatés par Steiner, dont le travail a été décrit en détail dans cette étude, ont tous suivi cet avertissement de manière très individuelle. Certains d'entre eux ont formulé de manière innovante ce qui était important pour eux. Ainsi, dans sa « Circulaire » de 1926, Adolf Arenson appelle les « révélations des heures de classe » une « semence de l'esprit », que nous devons « doter d’âme par notre propre travail créatif ». Ce faisant, il pense à « un penser plus loin et sentir plus loin », comme l'a suggéré Rudolf Steiner à propos de ses cycles de conférences à travers les « Lignes directrices ».616 Quatre ans plus tard, Ludwig Graf Polzer montre dans une note testamentaire comment de tels efforts dans un « cercle ésotérique » peuvent gagner un certaine fiabilité/un certain engagement social. « C'est ma conviction scientifique-spirituelle/selon la science de l’esprit », écrivait-il déjà en 1930, « que le travail ésotérique dans notre période d'attente, pendant laquelle les mystères nous sont provisoirement de nouveau fermés, ne peut être commencé et cultivé que dans de plus petits groupes de confiance ».617

 Les autres premiers « intermédiaires » aussi, qui n'avaient à leur disposition que les mantras de l'université pour leurs heures d'enseignement, remarquent aussi à quel point ils ont pris au sérieux la tâche de Steiner de façonner le travail de leur cercle par responsabilité personnelle, par intuition propre. Nous pouvons apprendre beaucoup de cette approche pour la renaissance de l'ésotérisme anthroposophique dans la situation troublée d'aujourd'hui. Là où, sous leur propre responsabilité, se forment des cercles de personnes qui travaillent ensemble dans le sens de l'idée du « culte cosmique » de 1922, avec ou sans contact avec la direction de Dornach, l'ésotérisme vivant, tel qu'il était déjà pratiqué avec « l'enseignement non écrit » de Platon, peut être poursuivi.

 614 T. Szlezâk : Lisez Platon. Stuttgart-Bad Cannstatt 1993, et Ch. Schefer : l'expérience indicible de Platon. Bâle 2001.
615 Conférence du 20. 7. 1924, GA 240.
616 Voir la note 18.
617 Principes d'un cercle ésotérique (juin 1930). Voir note 27.

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Il est utile de prêter attention aux espaces ésotériques, qui ne sont pas institutionnellement sécurisés, mais qui s'ouvrent sous une forme en constante évolution, souvent surprenante, différemment selon le lieu et le temps, sur des chemins individuels du destin. Avec les exigences strictes qu'il a imposées aux premiers « médiateurs », Steiner a fait confiance à la puissance inspiratrice de tels événements personnels du destin.

 Dans les heures de classe, dans les descriptions du chemin vers le monde des esprits, la pensée apparaît que l'expérience suprasensible authentique n'a lieu que temporairement, toujours de nouveau interrompue par une immersion dans la sphère de la conscience ordinaire et liée aux sens. Seules les puissances adverses aspirent à des états permanents. Le chemin du Christ/Christ-chemin vers l'esprit passe par le changement situationnel des conditions par libre décision.618 L'aspiré surgit et disparaît de nouveau, aussi bien dans les situations de tous les jours que dans le silence consciemment créé de la méditation personnelle et dans la conversation prudente.

 L'énigmatique « tentative » de 1911 donne finalement matière à réflexion. Elle est née parce que les collaborateurs appelés à le faire avaient fait leurs preuves dans la vie de tous les jours. Steiner a certainement compté sur les participants en suivant leur parcours personnel d'exercices ésotériques. Cependant, à la différence de l'ésotérisme des années précédentes, la « fondation » du cercle ne servait pas seulement à promouvoir la vie cognitive spirituelle. Elle était avant tout orientée vers l'effet dans la vie. « Ce qui doit arriver n'est pas basé sur des mots, mais sur des humains, et pas une fois sur des humains, mais sur ce que ces humains feront ». Nos groupes de travail universitaires actuels - ceux qui se concentrent sur l'audition et l'expérience du contenu initialement révélé, ainsi que d'autres qui s'intéressent davantage aux conversations exploratoires/de recherche – s’efforcent primairement à la connaissance. Se laisse-t-il penser que de tels cercles apprennent aussi à agir ensemble à partir de l'ésotérisme ? Le collègue des enseignants de la première école Waldorf, dont Steiner savait qu'il pouvait « travailler ésotériquement » avec lui,619 était une communauté vivante de pratique. En même temps, il s'agissait d'une communauté de « souverains » 620, non subordonnée à aucune sorte de pouvoir de direction, active à partir de la responsabilité personnelle.

618 Voir la leçon de la 14e classe, GA 270/2, p. 81 et suivantes.
619 Voir le rapport de Lili Kolisko, chapitre 6.1.
620 GA 300/1, P.68.

[232]

Se laisse-t-il penser qu'au cours du temps, les cercles de classe silencieux du présent, qui sont plutôt touchés par l'intérêt intérieur, apprennent à être actifs à l'extérieur dans la vie avec des projets concrets ? L’indication prophétique de Steiner aux bâtiments-Goetheanum dans le monde entier, qui seront déjà à admirer vers 2086, va dans ce sens.621 Ita Wegman a vu « des châteaux de Michael » dans une relation sociable les uns aux autres, dans un avenir pas si lointain. L'œuvrer à partir d'un nouvel espace secret vivant tiendra ces lieux ensemble.

621 Conférence du 7 mars 1914, GA 284/285 (1977), p.168.